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Journal of French and Francophone Philosophy | Revue de la philosophie franaise et de langue franaise
Vol XIX, No 2 (2011) | www.jffp.org | DOI 10.5195/jffp.2011.514
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De lexprience vcue luniversel
Catherine Dchamp-Le Roux
Journal of French and Francophone Philosophy - Revue de la philosophie
franaise et de langue franaise, Vol XIX, No 2 (2011) pp 17-36
Vol XIX, No 2 (2011)
ISSN 1936-6280 (print)
ISSN 2155-1162 (online)
DOI 10.5195/jffp.2011.514
www.jffp.org
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De lexprience vcue luniversel
Catherine Dchamp-Le Roux
Universit de Lille 1
Introduction
Albert Memmi a ralis une uvre complexe et importante tant sur le
plan littraire que sur le plan philosophique et sociologique.1 Dans le cadre
de cette contribution lhommage rendu son uvre philosophique, jai
choisi de dvelopper la mthode et quelques concepts importants tels que la
judit, le racisme, lhtrophobie et le lacisme. Memmi a t un prcurseur
sur ces questions et son approche est originale. Il est reconnu comme une
des figures incontournables de la lutte anticoloniale et antiraciste. Le portrait
du colonis est un des ouvrages importants qui a marqu la priode de la
dcolonisation.2 Il est toujours une rfrence pour les peuples qui
revendiquent leur autonomie et pour les pays confronts la question de la
dcolonisation et de ses consquences. On a rcemment redcouvert cet
ouvrage loccasion de la sortie, en 2004, de lessai Portrait du dcolonis
arabo-musulman et de quelques autres.3 En France, le dbat public gnr par le
principe de la lacit dans la rpublique4 puis par ladoption dune loi
mmorielle5 sur les bienfaits de la colonisation ont contribu faire merger
une mobilisation sociale sur les sujets sensibles du postcolonialisme. Le
Mouvement des Indignes de la Rpublique,6 cr en 2005, cite Le portrait du
colonis et Le racisme7 parmi dautres ouvrages sur la colonisation, le
postcolonialisme et le racisme. Enfin dans un ouvrage rcent consacr au
postcolonialisme, lhistorien Yvan Gastaut considre que sa pense
iconoclaste et complexe a toujours t lavant-garde des problmes
contemporains.8
La mthode
Comme de nombreux sociologues de sa gnration, Albert Memmi a
une formation philosophique.9 Il faut attendre 1958 pour quune licence de
sociologie soit cre La Sorbonne sous limpulsion de George Gurvitch et
de ses collaborateurs tels que Raymond Aron et Georges Friedmann.10 En
effet, les sociologues, fondateurs de la discipline, ont t dcims par les
guerres et aprs la deuxime guerre mondiale, la discipline est
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reconstruire. On parle de refondation de la sociologie franaise qui
revendique sa spcificit thorique et mthodologique.11 A cette priode, de
nombreux jeunes chercheurs ont bnfici de sjours dtude aux Etats-Unis
et ont t inspirs par les mthodes de la sociologie empirique quelle soit
qualitative ou quantitative.12 Cependant, la sociologie franaise se construit
aussi contre le modle de la sociologie nord-amricaine, Gurvitch tant le
premier critiquer ce quil a appel la quantophrnie amricaine.13
Memmi est n en Tunisie, en 1920, dans une famille juive de langue
arabe. Il a poursuivi sa scolarit au lyce franais de Tunis, et il a entrepris
des tudes de philosophie lUniversit dAlger encourag par le fait quil
avait achev ses tudes secondaires par un prix dhonneur des classes de
philosophie.14 Ses professeurs de philosophie, Aim Patri, et de littrature,
Jean Amrouche, ont t des modles et ont russi lui donner envie de
poursuivre dans ces domaines; le succs acadmique la confort dans ce
choix. Aprs avoir tudi la philosophie lUniversit dAlger, Memmi part
en mtropole pour prparer lagrgation de philosophie La Sorbonne.15
La philosophie, alors enseigne, est peu en prise avec lactualit sociale
de lpoque. Il dcrit de faon amusante les cours de philosophie tels quils
taient enseigns alors La Sorbonne:
Dautres, chez qui les jeux de mots faisaient office de
philosophie, svertuaient triturer les textes jusqu leur
faire rendre le sens quils souhaitaient; la plupart faisaient
surtout de lhistoire de la philosophie, laquelle ils
rduisaient la pense de matres du pass. Le plus
souvent, ils sexprimaient dans un jargon impntrable,
maladie du style de la plupart des philosophes. 16
On peut sans peine imaginer le dsarroi dun jeune qui avait alors tout
mis sur la philosophie. Memmi se dmarque alors de la philosophie
spculative et cherche une mthode lui permettant de rpondre son
questionnement existentiel:
Au fond je reste fidle une vieille conception de la
philosophie qui a fait ses preuves depuis les Grecs: bien
penser pour bien agir. La philosophie doit prendre en
charge lensemble du destin humain. Pour cela, si elle veut
comprendre le rel, et, si possible, avoir prise sur lui, elle
doit tenir compte de la totalit de nos savoirs passs et
actuels.17
En tant que philosophe puis en tant que sociologue, il sest toujours
montr critique lencontre des excs de lcholalie. On peut constater dans
lensemble de luvre littraire, philosophique et sociologique d Memmi,
quil y a indniablement un souci dune pense bien construite et exprime
de faon comprhensible. Les textes vont lessentiel sans fioriture
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superficielle. Cest une rigueur quil sest toujours impose et quil cherchait
transmettre dans ses enseignements. Il y a un souci constant de rendre
compte, par lcriture, de la ralit et de distinguer ce qui relve de la
littrature et/ou de la philosophie:
Procdant par concepts et catgories, la philosophie ratisse
large, elle ne peut garder dans ses filets les poissons trop
petits. Visant luniversel elle ne peut sattarder sur les
mandres de la subjectivit, les varits de lmotion, les
qualits du plaisir, la singularit des faits divers. Seule la
littrature pouvait me permettre de traduire toutes ces
nuances que la philosophie est impuissante
exprimersauf se transformer en littrature.18
Memmi a poursuivi une triple carrire: crivain, philosophe et sociologue. Il
a ainsi, en jouant sur des registres diffrents, pu rendre compte de niveaux
de ralit qui vont du plus subjectif au plus universel. Son uvre est
accessible et comprhensible au plus grand nombre, ce qui est assez rare
dans ce domaine.
Son parcours est alors celui dun jeune professeur de philosophie qui
aprs avoir enseign la philosophie, a fond un centre de psychopdagogie
de lenfant en Tunisie. Il acquiert une renomme importante avec la
publication de son premier roman La statue de sel, en 1953, et sengage dans
le dbat politique en contribuant la cration de la revue Afrique-Action. A
lindpendance de la Tunisie, il sinstalle en France, devient le collaborateur
de Gurvitch et participe au Laboratoire de sociologie de la connaissance et de la
vie morale. Au moment o la sociologie franaise se dmarque de la
philosophie comme discipline empirique, Memmi, form la sociologie par
Georges Gurvitch,19 dveloppe une mthode personnelle fonde sur une
philosophie du vcu personnel et se dmarque ainsi dune sociologie fonde
sur la neutralit et lobjectivit.
Cest toujours en rfrence une exprience personnelle quAlbert
Memmi gnralise et ralise un travail dabstraction. Cest en tant que
colonis, juif puis comme tre humain confront la dpendance,20 quil
labore ses recherches sur la condition humaine. Il qualifie lexprience
vcue de reine des savoirs. Elle doit tre valide par la vrification:
Autrement dit: qui nexprimente pas ne peut pas esprer
convaincre. Pour convaincre, il faut sortir de soi. La validit
dune exprience est dans sa possible rptition. Toute
science, cest--dire tout systme de connaissance exige,
pour sa vracit, la comparaison: en somme, lexprience
nest, provisoirement, acheve que par le consentement
des autres.21
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En quelques lignes, il rsume cette mthode sur laquelle toute luvre est
fonde.
Toute recherche doit tre prcde dune clarification conceptuelle,
tape indispensable et pralable la recherche empirique.22 Les outils
mobiliss sont soit le recours une enqute sociologique quantitative
comme cela a t le cas pour le racisme et la judit, soit le recours une
grille danalyse labore pour interprter la ralit observe de lhomme
domin et ses diffrentes figures du colonis au post colonis.23 Il dfinit
lui-mme deux ples mthodologiques qui sont essayer de mettre jour
des mcanismes gnraux travers plusieurs conduites similaires et
rechercher dans chaque cas, la spcificit de chaque dmarche.24 A partir de
lexprience vcue, il vise luniversalit de la condition humaine par
lexprimentation de la situation et jajouterai par lpreuve du temps. En
effet, Memmi ne cesse danalyser les transformations de la socit pour
identifier les nouvelles plaies que sont la corruption, la pauvret, le
terrorisme et lintgrisme.
La judit
La condition juive, je le veux bien, nest quun raccourci, plus condens,
plus sombre, de la condition humaine plus gnrale.25
Cette citation tire de Portrait dun juif est intressante en ce quelle clt
le chapitre La figure dombre aprs avoir convenu que tous les hommes sont
galement opprims mais que chaque oppression est spcifique. Cest donc
partir de son exprience vcue, quil dcrit la condition juive contemporaine.
Cet autoportrait est une des figures majeures de loppression
contemporaine. Une approche comparative ralise sur les figures du
colonis, du noir, du domestique, de la femme, du proltaire et du
dcolonis arabo-musulman nous propose des cls pour comprendre ce qui
fait la spcificit de chaque situation.26
Il sensuit, certes, que pour une entire comprhension de
chaque figure, il faudrait la replacer en dfinitive dans la
perspective des autres. Jai souvent essay de les clairer
lune par lautre, de prciser le cousinage entre les
diffrents modes de loppression vcue, den dgager par
suite les mcanismes gnraux, qui viennent en retour
aider comprendre le vcu.27
Cette tude, laquelle il consacre plusieurs ouvrages et articles, a un
retentissement important qui sera amplifi par les vnements politiques
tels que la guerre isralo-arabe.
On lui doit une clarification conceptuelle de lidentit juive, tape
indispensable et pralable toute rflexion sur la condition juive. Le
contexte du gnocide de 1939-1945 et la cration dIsral ont suscit une
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rflexion sur le fait juif. Cest lantismitisme qui, pour Jean-Paul Sartre,
dfinit la condition juive.28 Memmi procde alors une dconstruction du
concept didentit juive propos par Sartre. Inspir par le concept de
ngritude,29 formulation potique dAim Csaire, il forge le concept de
judit pour en donner une dfinition positive dans le sens o cette identit
nest pas dtermine par autrui mais quelle est le fait et la manire dtre
juif. Ce concept est distinguer de la judacit (lensemble des personnes
juives) et du judasme (lensemble des doctrines et des institutions juives). Il a
eu le souci de clarifier les concepts de ngritude (manire de se sentir et dtre
noir, par appartenance un groupe dhommes et par fidlit ses valeurs) et
de judit pour rvler la dimension dynamique, interactive et positive de la
condition de noir ou de juif.30
Il dcrit un contexte gnral dantismitisme plus ou moins affirm
selon les contextes nationaux et les priodes de lhistoire. Il y a t confront
ds sa plus tendre enfance par les histoires familiales et communautaires en
Tunisie. Adulte, il est directement tmoin de cet antismitisme dont il
donne de nombreux exemples. Lorsque parait Portrait dun juif, en 1962, le
paysage politique de la France est marqu par les guerres coloniales, le
processus de la dcolonisation et lon tente doublier et de panser les
squelles de loccupation nazie et du rgime de Vichy. Le contexte social est
alors, selon Memmi, celui du silence sur de telles questions: Vous allez
rveillez des monstres qui ne demandent qu ltre ! Ma-t-on dit; ce qui
convient le mieux cette affaire, cest le silence !31
Ce commentaire dfensif est rvlateur du contexte social dans lequel
tout juif tait contraint de vivre en tant que membre dune minorit. Et
quelques annes aprs, Memmi dresse un Petit portrait du juif publi dans
LHomme domin. Ce texte a t labor pour une srie de confrences aux
Etats-Unis en 1967 juste avant la guerre des six jours.
Le juif, comme tout minoritaire, est relativement exclu de
la mmoire collective de la nation, et de son hritage
culturel encore vivace. Certes, il peut sen accommoder et
beaucoup de mes amis retirent mme quelque orgueil de
cette solitude, qui nest peut-tre pas sans noblesse. Je
constate simplement le rsultat: une espce de hiatus
constant entre la vie publique du citoyen juif et sa vie
prive.32
Ce hiatus, dcrit par A. Memmi, traduit la ralit du contexte socioculturel
de la France et lon peut penser que seule une minorit du public nord-
amricain connaissait cette priode antrieure aux vnements de 1968 qui
marqueront une rupture sociale importante. Certains travaux comme les
Cultural studies raliss par des sociologues amricains tels que Laurence
Wylie33 mais ignors du grand public, ont permis une relative
comprhension des diffrences entre pays. Ainsi dans les annes soixante, le
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catholicisme saffirme encore comme la religion dominante mais le dclin de
lEglise comme institution est inexorablement amorc.34 Les transformations
sociales que la socit franaise a connues, depuis 1945, ont t finement
analyses par Henri Mendras et Laurence Duboys-Fresney.35 Les auteurs
insistent, entre autres sur le dclin de lEglise comme institution centrale
confirmant la thse de la scularisation des socits industrielles avances.36
En France, la loi de 190537 spare les cultes et lEtat. La Rpublique franaise
est laque et respecte toutes les croyances.38 La pratique dune religion relve
strictement de la vie prive ce qui est paradoxal puisque la religion
catholique reste dominante et rythme la vie sociale alors que la Rpublique
sest construite contre le catholicisme, religion dominante.39 Cette analyse
ralise par Ccile Jolly, analyste politique, en 2005, met bien en vidence la
spcificit franaise au sein de lEurope:
Les religions sont galement trs fortement structures par
notre culture politique et par les relations - dont l'origine
remonte parfois la Rvolution franaise - qu'ont
entretenu et que continuent d'entretenir les pouvoirs
publics et les citoyens avec les religions. Du fait de cette
histoire singulire, en particulier l'opposition au
catholicisme des origines de la Rpublique mais aussi son
modle d'assimilation, par rapport des modles
davantage pluriculturels voire communautaires en
Europe, la France conserve une certaine suspicion
l'gard des religions, une plus grande attention porte au
risque d'enfermement des mes qu'elles peuvent receler et
une forte opposition la visibilit religieuse mais aussi
ethnique.40
La scularisation de la socit franaise est, de nos jours, une ralit; les
symboles du catholicisme sont bien prsents dans lespace public franais
mais ils nont pas de sens pour une majorit croissante de franais.41 La
religion se dsencastre selon Bruno Duriez, de lensemble des rapports
sociaux.42 Il y a un incontestable recul du catholicisme puisque seuls 42% se
dclarent comme tels. Les agnostiques sont de plus en plus nombreux
puisqu ils reprsenteraient plus de 25% de la population. La France est
devenue le pays europen qui compte le plus grand nombre de musulmans
(cest la deuxime religion avec 6%), les protestants ne sont plus que 2%, et
enfin larrive en France de juifs dAfrique du nord, dans les annes
soixante, a revitalis le judasme qui reprsente 1%.43 Les pratiques
religieuses traditionnelles sont en dclin44 alors que de nouvelles religions-
origine gographique- contribuent diversifier le paysage religieux.45 On
constate, selon Claude Dargent, une distanciation aux institutions religieuses
qui saccentue avec les plus jeunes malgr des formes dadhsion
religieuse.46
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Aujourdhui dautres minorits religieuses doivent composer avec une
France scularise et incarne dans la Rpublique mais dont lhritage
catholique est omniprsent. Il y a dix ans, une commission de rflexion sur
lapplication du principe de lacit dans la Rpublique a t saisie
dexaminer les faits relatifs des manquements la lacit dans des lieux
publics tels que des discriminations de fait, un antismitisme parfois
virulent et le port du voile chez de jeunes musulmanes scolarises qui a t
un sujet trs mdiatis. Il a t procd laudition de nombreuses
personnalits reprsentant diffrentes communaut de pense et le rapport
Stasi47(sous la responsabilit de Bernard Stasi) a permis la raffirmation de
valeurs rpublicaines communes tous telle que le principe de lacit qui
garantit la libert de conscience. A la suite de ce rapport, une loi a t
adopte en 200448 et raffirme le principe de libert de conscience et de fait
interdit, entre autres, toute manifestation religieuse ostensible dans les
tablissements scolaires publics. Elle incite au respect de toutes les
confessions religieuses.
Par comparaison, sur la question de la pratique religieuse, la
constitution des Etats-Unis (Bill of Rights) garantit depuis 1789, la non-
ingrence et la sparation de lEtat et de la religion ainsi que la libert de
culte.49 La spiritualit est encourage. Pour mmoire, Alexis de Tocqueville,
lors de son sjour aux Etats-Unis en 1832, dcrit un pays religieux dans
lequel il y a une complte sparation du culte et de lEtat. Isral est, par
contre, un Etat dont les religions tiennent les registres dtat civil, il est par
consquent difficile de saffirmer comme libre de toute religiondans les
documents de ltat civil.50 Il est cependant observ, en Isral, un double
processus de scularisation et de retraditionalisation.51
La condition sociale dune minorit religieuse, socioculturelle ou
ethnique est dpendante dun contexte social quil faut prendre en
considration pour comprendre la spcificit dune situation et son
volution. Lanalyse sociohistorique, ralise par Rene Waissman sur les
conditions sociales dexistence de la communaut juive de 1789 1967 en
France, nous claire sur le rapport la judit des juifs franais du fait de
leur situation sociale et enfin du fait de la cration de lEtat dIsral.52 La
guerre des six jours aurait provoqu lmergence de lexpression publique de
lappartenance juive ce qui dune certaine faon rompt avec la norme sociale
qui encourage la discrtion dans lespace public quand il sagit de manifester
des signes extrieurs dappartenance une religion et/ou une
communaut.
Malgr les juifs franais peuvent exprimer un particularisme au nom
de lgalit des citoyens qui est un autre principe rpublicain. En dautres
termes, tre juif nest plus la consquence dune contrainte sociale mais est
lexpression dun libre choix qui peut saffirmer de diverses faons ce qui a
fort bien t montr dans la grande enqute sur la population juive en
France en 1965.53
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Les travaux initis dans les annes soixante, par Memmi et ses
collaborateurs, sur la judit en France lesquels montrent que le fait dtre
juif est vcu et non subi et que lintgration la socit franaise ne se fait
pas au dtriment de la judit. La recherche sur le sentiment de la diffrence
ralise sur un chantillon de six cents individus rvle une affirmation de
lidentit juive qui nest pas la consquence dune mise lcart puisque la
population interroge ne manifeste pas de sentiment dexclusion de la part
de la socit franaise non-juive. La judit sexprime aujourdhui dans un
contexte diffrent (scularisation croissante de la socit franaise) de celui
dans lequel ce concept a t construit. Cependant ce concept est toujours
oprationnel- et ce quel que soit le contexte- ainsi que la distinction
conceptuelle qui sy rapporte.
Dans louvrage juifs et arabes, crit aprs la guerre du Kippour de 1973,
Memmi propose des ouvertures pour un dialogue et il dfend la thse selon
laquelle la cration dIsral est laboutissement logique de loppression subie
par le peuple juif de par le monde tout comme il a dfendu prcdemment
les nationalismes des peuples domins.54 La fondation de ce pays repose
aussi lorigine sur un mythe: celui dun peuple lu sur une terre promise.55 Le
mythe du juif errant tombe avec la cration dIsral.56 Il ajoute que
lexistence de ce pays a transform le destin juif en ce quil donne tout juif
le sentiment dune rfrence nationale ventuelle57 et alors Isral
reprsente le rsultat, encore fragile, de la libration du juif, tout comme la
dcolonisation reprsente la libration des peuples arabes ou noirs dAsie et
dAfrique.Memmi dnonce les valeurs-refuges qui entravent trop souvent
les librations et il prconise une dsacralisation de la tradition juive laquelle
nen sera que plus fconde.58
Lors du conflit isralo-arabe, il a tent de montrer que les torts taient
partags et a uvr pour une solution respectant lensemble des parties. Il a
dautre part dnonc, ce quil qualifie de grossire quation, lassimilation
du sionisme au racisme et limprialisme. Il se rfre bien videmment
lidal du sionisme originel et non ses drives religieuses servant une cause
de conqute territoriale. Ces positions lui ont valu de nombreuses inimitis.
De mme, lantismitisme a chang et de nouvelles manifestations sont
observes. Ainsi Isral incarne la figure du juif des pays arabes et reprsente
lobstacle la construction de la nation arabe unifie, autre grand mythe.59
Dans lOccident contemporain, Memmi donne comme exemple de nouvelle
manifestation de lantismitisme, parmi dautres, la rumeur accusant le
Mossad davoir prvenu les employs juifs dun risque dattentat le jour de
lattaque des tours du World Trade Center le 11 septembre 2001.60
Cest la condition du minoritaire, souvent accus, que Memmi rsume
ainsi: Etre juif, cest encore une manire de se conduire pour surmonter les
handicaps du minoritaire et de laccus, pour affronter la suspicion dans
laquelle on vit, pour contrer la menace permanente.61 Il y a actuellement, en
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France, une controverse scientifique et politique relative la rsurgence ou
non de lantismitisme. Il est observ une corrlation entre les actes
antismites et la situation au Proche-Orient. Cependant lantismitisme
serait en dcroissance depuis la fin de la deuxime guerre mondiale et les
actes antismites signals seraient le fait dimmigrs rcents trouvant ainsi
un exutoire aux difficults dintgration. Sur le plan politique, il ny aurait
pas damalgame entre la critique de lEtat dIsral et lantismitisme. Dans
lopinion publique, il y aurait par contre un amalgame entre la politique
isralienne, vis--vis des Palestiniens, et la communaut juive en raison des
positions adoptes par les institutions et la communaut juives avec lEtat
dIsral. . Cette analyse ralise par le sociologue Laurent Mucchielli rend
compte des tensions croissantes entre les communauts dans le contexte du
conflit isralo-arabe.62
Les actes antismites et racistes sont durement rprims en raison dun
arsenal juridique63et depuis 2005, une institution dEtat64 veille et lutte
contre toutes les formes de discrimination. Il est malgr tout observ, en
France, une islamophobie croissante.65 Memmi, juif de langue arabe, a
construit une partie de sa rflexion sur la place et la singularit du juif dans
le monde arabe et a veill, tout au long de sa vie, au dialogue entre juifs et
arabes. Il a favoris par ses essais et ses fictions les cls dune comprhension
rciproque. Il a propos: pour les natifs juifs des pays arabes, lexpression
de Juif arabe qui na plu ni aux arabes ni aux juifs. Les Arabes narrivent
toujours pas concevoir cet tre trange, un arabe qui ne soit pas musulman;
et les juifs, un juif qui ne soit pas de confession rabbinique.66 Memmi
revendique le droit dtre diffrent et davoir multiples appartenances.67
Du racisme lhtrophobie
Le racisme et lhtrophobie, qui servent exclure le diffrent, sont dautant
plus tenaces quils servent aussi renforcer nos appartenances.68
La question du racisme est centrale dans luvre littraire,
philosophique et sociologique de Memmi.69 Il affirme sa mthode en
comparant des situations sociales prsentant des similitudes et tente
chaque fois de rvler ce qui en fait la spcificit tout comme lintuition
dune situation doit tre analyse scientifiquement. La rflexion engage sur
la question du racisme est fonde sur lexprience personnelle, sur
lobservation de manifestations racistes dans la vie quotidienne puis
analyse par comparaison avec dautres situations similaires comme dans
lenqute ralise, dans les annes soixante, sur les franais et le racisme.70
La dfinition du racisme, alors propose par Memmi, a t intgre, en 1972,
dans lEncyclopaedia Universalis: Le racisme est la valorisation, gnralise et
dfinitive, de diffrences relles ou imaginaires, au profit de laccusation et
au dtriment de sa victime, afin de lgitimer une agression ou des
privilges.71
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Memmi rpond un souci de clarification pour tous les concepts quil
construit ou propose. Cest laboutissement dun long cheminement de la
pense qui sexprime par tapes successives du Portrait du colonis, puis de
Portrait du juif et est enfin stabilis dans Lhomme domin. Si Memmi a, crit-il,
consacr plus de temps qu nimporte quel autre sujet,72 cest parce quil
a t de toute vidence victime du racisme en tant que colonis et en tant
que juif du Maghreb. Il y a consacr trente annes et rdig plus dune
quarante de textes. On peut donc suivre la maturation du concept en
parcourant dans lordre chronologique les ouvrages ci-dessus cits.
Le fait raciste a fait lobjet dune grande enqute empirique au cours de
lanne 1963, la demande du Mouvement contre le racisme, lantismitisme
et pour la paix.73 Une quipe pluridisciplinaire a labor un questionnaire
destin aux militants du M.R.A.P. et visait comprendre les diffrentes
manifestations du racisme tel que Memmi le dfinit (voir la dfinition plus
haut). Il est constat que la vision raciste est complexe et envahie de
strotypes mais il ressort, de cette recherche empirique, de nombreux
tmoignages sur les causes et consquences du racisme qui est somme tout
dune grande banalit: le racisme est un plaisir la porte de tous. Le
racisme est une exprience vcue, commune et socialise. Il est constat le
lien fort entre racisme et xnophobie qui touche toutes les catgories sociales
incluant les opprims. Cette recherche dresse un inventaire complet des
attitudes racistes dclines diffremment selon les victimes et selon les
milieux sociaux qui les expriment. Les causes du racisme et de
lantismitisme sont explores au prisme du processus de la dcolonisation,
de la guerre dAlgrie et enfin de la cration dIsral. Le lien fort entre
ducation religieuse chrtienne-en particulier catholique- centre sur le
mythe du dicide et dun antismitisme latent, est mis en vidence dans
lenqute. Il en ressort que lducation peut tout autant contribuer lutter
contre toute manifestation de racisme. Le constat est que laltrit provoque
le trouble qui peut facilement se transformer en hostilit par manque
dempathie pour lautre. Il faut donc reconnaitre lautre dans ses diffrences
et engager un dialogue.
Les transformations sociales de la socit franaise ont contribu
dplacer les problmes comme avec limmigration et ses consquences. Les
affirmations identitaires suivent aussi dautres voies et dautres combats
comme celui des femmes, des homosexuels et de toutes les minorits et cest
le retour du pendule qui exacerbe les particularits. Cette analyse rvle le
subtil quilibre entre une identit opprime et une identit spcifique
survalorise. Le concept dhtrophobie a t construit pour rendre compte
de lextension de la problmatique du racisme des situations quotidiennes
et banales dans lesquelles il y a un refus dautrui du fait de sa diffrence
quelle quelle soit. Ce nest plus seulement le refus dautrui du fait de
diffrences biologiques mais du fait dune diffrence dfinie socialement
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comme problmatique: ge, genre, catgorie sociale, orientation sexuelle et
autres.
Il prconise une stratgie commune pour lutter contre le racisme mais
comme chaque htrophobie est spcifique, il faut y associer une action
ponctuelle avec une solidarit gnrale.74
Le lacisme
Un demi-sicle aprs ces travaux, Memmi insiste sur linterdpendance
des peuples et des nations et pense que seule la loi universelle permettra la
paix des peuples. En ceci, il prne un lacisme humaniste75 qui est la seule
philosophie qui respecte les diffrences et les droits de chacunet la
solidarit qui est ncessaire la survie de nos socits multiculturelles. Il en
donne la dfinition suivante:
Le lacisme est un systme de pense dans lequel un dieu
est inutile pour comprendre le monde. On peut bien sr
tre laque et croyant. On peut aussi tre laque en
tant lacistemembre dun courant de pense, autonome,
ancien. On peut lappeler lhumanisme lac.76
Cette philosophie est sous-jacente dans les premiers travaux et dans luvre
fictionnelle dAlbert Memmi. On peut dire qu Memmi a expriment et a
mis en pratique dans sa vie la philosophie du lacisme. Partant de son
exprience vcue, il se rfre lducation laque reue au lyce franais de
Tunis. Plus tard, il se dgage de son milieu dorigine et de sa religion comme
il le raconte travers le hros de La statue de sel.77 On aussi peut citer titre
dexemple le roman Agar qui met en scne un couple mixte qui se dchire
parce quil est incapable de surmonter les difficults gnres par les
diffrences culturelles.78 Lorsque Memmi fonde une famille issue dun
couple mixte,79 le couple observe une neutralit dans lducation des enfants
par rapport aux traditions de chacun.80 Il quitte la Tunisie au moment de son
indpendance parce que sa place en tant que minoritaire est incertaine. Il
choisit de sinstaller en France avec sa famille parce quil est crivain
francophone, agrg de lUniversit et aussi parce que lidal dmocratique
de lEtat lac lui laisse esprer une place en tant que minoritaire. Memmi
sest exprim de nombreuses fois sur les difficults rencontres pour
sintgrer comme il pouvait lgitiment lesprer. Cest dans ce contexte
dhostilit quil forge le concept de judit pour marquer une distance avec
la religion juive ou avec la judat. Il se revendique comme juif lac ce qui est
source dincomprhension de la part de la communaut juive et de la part
des non-juifs. Au fil du temps, le lacisme est devenu un concept-cl de la
pense dAlbert Memmi. Le lacisme sinscrit dans un idal duniversalit et
rend ainsi possible lexpression de la diffrence.
La lacit est un principe de la Rpublique franaise qui doit assurer la
libert de conscience de tous. Les dbats rcents en Europe autour du
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concept de libert de conscience de prfrence la libert religieuse
tmoignent de traditions diffrentes tels que limpt religieux, les signes
religieux et les cours de religion dans les coles publiques ou encore la
mention de la religion sur les cartes didentit qui ont cours dans certains
pays europens.81 Largument est celui dune sparation stricte entre
religions et Etat. En Europe, lidal lac reste fragile mais on peut observer
un consensus politique en faveur dun lacisme inscrit rcemment dans la
Charte europenne des droits fondamentaux.82
Dans le texte Oser tre laciste,83 alors que vingt Etats arabes sur vingt
et un ont inscrit la religion dans la constitution, Memmi propose de
distinguer arabisme et islam, ou arabisme et arabit, comme il a propos de
distinguer judasme et judit. Selon lui, peu dintellectuels musulmans
seraient favorables la lacit hormis Zakarya Fouad.84 Le modle qui est
propos est celui dun lacisme la franaise. Le lacisme est un concept
central dans la recherche dune solution pacifique au conflit entre juifs et
arabes.
Il insiste beaucoup sur linterdpendance irrversible entre lOccident
et le tiers-monde et pense que nous sommes entrs dans une re nouvelle de
mtissage dont nous ne mesurons pas les consquences.85 La carence
idologique de lOccident a laiss penser aux islamistes intgristes que le
terrain tait mur pour son expansion. Les maux du dcolonis sont
aujourdhui la pauvret, la corruption, le despotisme et le fanatisme. Aucune
transformation sociale nest possible sans dmocratie et Memmi invite,
avant le printemps arabe, la prise en main des peuples par eux-mmes,
comme ils lont fait lors des dcolonisations.86
Cependant, les slogans religieux restent mobilisateurs dans les conflits
contemporains et de nombreux massacres sont perptrs en leur nom. Les
minorits religieuses sont souvent opprimes et le lacisme nest pas un
principe philosophique communment partag. Le lacisme est la seule
philosophie qui, socialement, nexclut personne, qui respecte les diffrences
et les droits de chacun sauf celui dexclure les autres.87
Conclusion
Cette prsentation de quelques concepts rend partiellement compte de
luvre complexe dAlbert Memmi. Cette slection vise montrer la
mthode qui, sur plusieurs dcennies, a permis la clarification de concepts
destins analyser les rapports sociaux fonds sur une interdpendance des
relations humaines et sociales. Ltude de duos colonisateur-colonis,
dominant-domin, raciste-victime tant au niveau macro social quau niveau
microsocial sappuient sur des observations quotidiennes, dexpriences
vcues, de tmoignages et denqutes de terrain. Il y a un constant souci de
comparer dans lespace et dans le temps des situations humaines et sociales
quil a vcues dune certaine faon. Si les sujets dtude sont rests
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permanents, lanalyse est enrichie par lobservation des transformations
sociales qui confortent la justesse des interprtations sur les causes et les
consquences du racisme transposes lhtrophobie. Le spectre danalyse
est ainsi largi sans que les spcificits de chaque situation ne soient
oublies. On passe ainsi du particulier luniversel.
En conclusion, je voudrai insister sur le lacisme qui est un concept-cl
de luvre dAlbert Memmi. Cette philosophie dfinit des rgles sociales
communes permettant chacun dexprimer et de vivre sa diffrence. Le
contexte social est alors favorable aux liens de dpendance rciproque qui
nous lient les uns aux autres. La prise en compte de la dpendance comme
situation intrinsquement lie au statut dtre humain et social est un constat
auquel a abouti Memmi aprs avoir longtemps travaill sur les rapports
dominants-domins. Cest lexprience de la maladie qui la confront la
ralit de la dpendance.88 Le concept semble pouvoir rendre compte de
luniverselle humanit ou, en dautres termes, de dfinir le besoin
fondamental que nous avons des uns et des autres. Lexprience de la
dpendance donne une autre interprtation des duos dominant-domin.89
Cette simple reconnaissance de la dpendance et de la relation dpendance-
pourvoyance peuvent contribuer pacifier les relations humaines. Memmi
sest toujours dclar comme un homme de paix et y a uvr toute sa vie
par des crits, des confrences et des engagements associatifs. Il a tent de
comprendre les obstacles la comprhension des tres humains et pour
chacune des situations analyses, comme la colonisation et le racisme, il
propose une analyse nous permettant de concevoir autrement les relations
humaines, sociales et interculturelles dans un contexte social de dpendance
rciproque.
1 Que soient remercis Scott Davidson, Bruno Duriez, Albert Memmi et Rene
Waissman pour les commentaires critiques sur ce texte dont les propos nengagent
que moi-mme. Je remercie aussi Herv Sanson qui a t dune grande efficacit
pour cet hommage.
2 Albert Memmi, Portrait du colonis prcd du Portrait du colonisateur, prface de
Jean-Paul Sartre (Paris: Corra, 1957). On peut consulter, ce sujet, ma
prsentation du texte dAlbert Memmi Sociologie des rapports entre colonisateurs
et coloniss, Cahiers Internationaux de Sociologie 23 (1957): 85-96.
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3 Albert Memmi, Portrait du dcolonis arabo-musulman et de quelques autres
(Paris: Gallimard, 2004).
4 La loi du 15 mars 2004 interdit le port des signes religieux ostensibles dans les
tablissements scolaires publics.
5 En France, une loi mmorielle impose le point de vue officiel de lEtat sur des
vnements historiques. A propos de la loi du 23 fvrier 2005, les historiens se sont
mobiliss contre ce quils considraient comme une instrumentalisation de lhistoire
des fins politiques.
6 Les indignes de la Rpublique est un mouvement antiraciste et antisioniste. Le
Mouvement des Indignes de la Rpublique est oppos la Loi interdisant le port de
signes religieux lcole, qualifie de mesure nocoloniale.
7 Albert Memmi, Le racisme (Paris: Gallimard, 1982).
8 Yvan Gastaut, Albert Memmi, un regard postcolonial in Ruptures postcoloniales,
ed. Achille Mbembe (Paris: La Dcouverte, 2010), 88-95.
9 La sociologie tait intgre la formation philosophique.
10 Ce qui est lquivalent du diplme Bachelor of Arts. Alain Chenu, Une institution
sans intention. La sociologie en France depuis laprs-guerre, Actes de la
Recherche en Sciences Sociales 1-2 (2002): 46-61.
11 Francis Farrugia, La reconstruction de la sociologie franaise 1945-1965 (Paris:
LHarmattan, 2000).
12 Patricia Vanier, Research trips to the United States in the 1950s: From their
beginnings to the redefinition of French sociology in Transatlantic Voyages and
Sociology, ed. Cherry Schrecker (Surrey: Ashgate, 2010).
13 Henri Mendras, Comment devenir sociologue: Souvenirs dun vieux mandarin
(Arles: Actes sud, 1995), 53.
14 En France, la philosophie est enseigne la dernire anne des tudes secondaires.
La section philosophie a longtemps t considre comme la voie royale ce qui nest
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plus le cas aujourdhui. De prestigieux scientifiques ont ainsi fait de la philosophie
avant de poursuivre des tudes de sciences.
15 Lagrgation est un concours permettant lenseignement de la discipline dans les
classes de philosophie du secondaire et ctait aussi la premire tape dun
doctorat pour un poste luniversit.
16 Albert Memmi, Le nomade immobile (Paris: Arla, 2000), 211.
17 Memmi, Le nomade immobile, 214.
18 Memmi, Le nomade immobile, 144.
19 Il raconte que Gurvitch tait un philosophe qui connaissait trs bien les sciences
sociales mais sa matrise du franais tait difficile et ses textes devaient tre
corrigs avant publication (Entretien ralis le 19/07/2007).
20 Albert Memmi, La dpendance: Esquisse pour un portrait du dpendant (Paris:
Gallimard, 1979).
21 Albert Memmi, Dictionnaire critique lgard des incrdules (Paris: Flin, 2002),
99.
22 Memmi, Le nomade immobile, 214.
23 Albert Memmi consigne ses observations quotidiennement sur des fiches.
24 Albert Memmi, Le racisme (Paris: Gallimard, 1982), 172.
25 Albert Memmi, Portrait dun juif (Paris: Gallimard, 1962), 279.
26 Albert Memmi, Portrait du dcolonis arabo-musulman et de quelques autres
(Paris: Gallimard, 2004).
27 Memmi, Portrait dun juif, 17.
28 Jean-Paul Sartre, Rflexions sur la question juive (Paris: Gallimard, 1973).
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29 Aim Csaire, Ngreries, Ltudiant noir 1 (mars 1935).
30 Albert Memmi, Lhomme domin: Ngritude et judit (Paris: Gallimard, 1968),
35-49.
31 Memmi, Portrait dun juif, 57.
32 Memmi, LHomme domin, 111.
33 Laurence Wyllie, Un village du Vaucluse (Paris: Gallimard, 1968);
Chanzeaux, un village dAnjou (Paris: Gallimard, 1970).
34 Henri Mendras and Alistair Cole, Social Change in Modern France: Towards a
Cultural Anthropology of the Fifth Republic (Cambridge: Cambridge University
Press, 1991).
35 Henri Mendras et Laurence Duboys-Fresney, Franais, comme vous avez chang
(Paris: Tallandier, 2004).
36 Claude Dargent, Dclin ou mutation de ladhsion religieuse in
Lindividualisation des valeurs, eds. Pierre Brchon et Olivier Galland (Paris: A.
Colin, 2010), 213-232.
37 La loi de sparation de lEtat et des Eglises. Quatre cultes ont t reconnus:
catholicisme, protestantisme rform et luthrien, judasme. LIslam est, par
contre, prsent et dominant dans lEmpire colonial franais (Maghreb et Afrique).
38 Henri Pena-Ruiz, Quest-ce que la lacit? (Paris: Gallimard, 2003), 275-308.
39 Le catholicisme a t reconnu comme la religion de la grande majorit des
franais par le Concordat en 1801.
40 Ccile Jolly, Religions et intgration sociale in Les pratiques religieuses en
France (rapport pour le commissariat du plan, la documentation franaise, 2005).
41 Je remercie Bruno Duriez pour ce commentaire.
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42 Bruno Duriez, Claude Dargent, et Richard Liogier, Religion et valeurs en France et
en Europe (Paris: Lharmattan, 2009), 198.
43 Claude Dargent, Les protestants en France aujourdhui (Paris: Payot, 2005).
44 J-P Machelen, Les relations des cultes avec les pouvoirs publics (Rapport, La
documentation franaise, 2006).
45 Le premier temple Sikh a t inaugur en rgion parisienne, Le Monde, 13-14
novembre 2011.
46 Claude Dargent, Lindividualisation des valeurs, 232.
47 Bernard Stasi, Lacit et Rpublique (La documentation franaise, 2004).
48 Loi du 15 mars 2004, Legifrance.gouv.fr.
49 Alexis de Tocqueville, De la Dmocratie en Amrique (Paris: Folio/Histoire,
1986).
50 Lcrivain Yoram Kaniuak a fond lassociation laque Etre libre en Isral, et a
obtenu, dbut octobre, le droit de ne plus tre rpertori comme juif mais
comme libre de toute religion dans les documents de ltat civil.
51 Alain Dieckhoff, Regards sur 60 ans dIsral (Paris: Akadem, 2008).
52 Rene Waissman, Is there a new way to be a Jew in France? The pattern of
integration into French society from a socio-historical point of view," 1Oth
Conference of the European Sociological Association (ESA): Social relations in
turbulent times, Genve, 7-11 septembre 2011.
53 Albert Memmi, Werner Ackermann, Nicole et Samuel Zoberman, Spcificit et
sentiment de la diffrence chez les juifs, Revue franaise de sociologie 10, no. 2
(1969): 186-200.
54 Albert Memmi, Juifs et arabes (Paris: Gallimard, 1974), 45.
55 Albert Memmi, La libration du juif (Paris: Payot ,1972), 258.
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56 P-H Maucorps, A Memmi, et J-F Held, Les franais et le racisme (Paris: Payot,
1965), 212-222.
57 Memmi, Le nomade immobile, 128.
58 Memmi, Juifs et arabes, 258.
59 Memmi, Juifs et arabes, 107.
60 Memmi, Dictionnaire critique lusage des incrdules, 175.
61 Memmi, Le nomade immobile, 124.
62 Laurent Mucchieli, Le retour de lantismitisme, discours rituel au dner
annuel du CRIF, 5 mars 2009.
63 Loi du 3 fvrier 2003.
64 HALDE (Haute Autorit de Lutte contre les Discriminations et pour lEgalit).
65 Le Front National revendique la lacit pour stigmatiser les musulmans:
www.observatoiredemocratie.com
66 Memmi, Le Nomade immobile, 118.
67 Memmi, Le Nomade immobile, 119.
68 Memmi, Dictionnaire critique lusage des incrdules (Paris: du flin, 2002), 286.
69 Memmi, Le racisme (Paris: Gallimard ides, 1982).
70 Memmi, et al., Les franais et le racisme (Paris: Payot, 1965).
71 Voir la dfinition in Encyclopaedia Universalis, 1972, 915-916.
72 Albert Memmi, Ce que je crois (Paris: Grasset, 1985), 195.
73 Memmi, et al., Les franais et le racisme, 34 et 281.
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74 Memmi, Le racisme, 210.
75 Memmi, Le nomade immobile, 190-195.
76 Memmi, La lacit et les identits collectives, Ides en mouvement 118 (avril
2004).
77 Albert Memmi, La statue de sel, prface dAlbert Camus (Paris: Gallimard, Folio,
1984).
78 Albert Memmi, Agar (Paris: Buchet Chastel, 1955).
79 Germaine Memmi est catholique, lorraine et agrge dallemand. Albert Memmi
explique que le mariage lac ntant pas reconnu par la loi rabbinique en Tunisie,
les enfants ne pouvaient avoir le statut denfant lgitime. Elle sest par consquent
convertie. Cette conversion est qualifie de dernire reculade par rapport au
chantage coutumier (Le nomade immobile, 94).
80 Memmi, Ce que je crois.
81 Pena-Ruiz, Quest-ce que la lacit?, 241-252.
82Charte des droits fondamentaux de lUnion Europenne:
www.europarl.europa.eu/charter/pdf/text_fr.pdf
83 Memmi, Dictionnaire critique lgard des incrdules, 190-195.
84 Fouad Zakarya, Lacit ou islamisme, les Arabes lheure du choix (Paris: La
Dcouverte, 1991).
85 Memmi, Portrait du dcolonis, 154.
86 Memmi, Portrait du dcolonis, 162.
87 Memmi, Dictionnaire critique lgard des incrdules, 194.
88 Memmi, La dpendance (Paris: Gallimard, 1979).
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89 Dchamp-Le Roux Catherine, ed. Figures de la dpendance, autour dAlbert
Memmi: Colloque de Cerisy-la-Salle (Paris: PUF, 1987). Ce colloque a t organis
par le Centre de Recherches sur la dpendance cr linitiative dAlbert Memmi.