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Mutation et changement de métier: le point de vue de la vente
Session prospective du 26 juin 2003
Document de synthèse N° 4
Michelle Bergadaà, Professeur Samad Laaroussi, Assistant
et
l'équipe des étudiants
de l'Observatoire de Vente et Stratégies du Marketi ng
Observatoire de Vente et Stratégie Marketing HEC - Université de Genève
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing ii
© OVSM - 2003
L'Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing
de Genève
Ses fondateurs et partenaires
• Caterpillar Overseas SA • FNAC • Fiat Auto Suisse • Groupe PP Holding • Hewlett Packard • Nestlé Suisse • Procter & Gamble • Sanofi-Synthelabo • Sérono • Société Coopérative Migros • SGS • Télévision Suisse Romande • UBS SA Depuis 1998, le comité de pilotage de l'OVSM, composé du professeur Bergadaà, de dirigeants d’entreprises et d'assistants de recherche, définit le programme des activités et le thème des travaux de recherche
Son rôle
et son fonctionnement • Observer les mutations sociales et leurs enjeux commerciaux par la réalisation de “recherche-actions” conduites par des chercheurs et des étudiants ; en diffuser les conclusions. • Analyser les mutations de la Vente et des Stratégies du Marketing grâce à des recherches dirigées par le Professeur Bergadaà et subventionnées par le Fonds National Suisse de RecherchScientifique. • Innover en matière de dévelop-pement et de transfert de connais-sances, car la mondialisation et les nouvelles techniques de communi-cation remettent en question les systèmes traditionnels de formation • Concevoir ses sites Internet, comme des espaces de rencontre, de dialogue et d'action, pour les étudiants de l’Université et les acteurs du monde économique et social.
RESUME
Le 26 juin 2003, l'Observatoire de Vente et Stratégies Marketing de Genève a
organisé sa journée de prospective annuelle sur le thème :
"Perspective de mutation et métiers de la vente"
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Ce thème spécifique a été sélectionné par les membres du Comité de Pilotage
de l'Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing, dans le cadre des axes
de recherche fondateurs que sont :
1) La personne : ses relations aux autres, sa relation au métier, ses craintes
et ses espoirs.
2) Le métier : les objectifs de la vente, la perspective temporelle des
actions, l'usage du temps quotidien.
3) L'entreprise et la vente : la place occupée par la fonction vente, la vente
comme vitrine de l'entreprise ou comme relais de CRM privilégié.
4) La mutation du métier : sa perception et son vécu vis-à-vis de la
hiérarchie, des clients et des collaborateurs.
5) Les challenges du futur : le pouvoir relatif du client, de la direction et de
la vente, la mise en œuvre de la "proximité client", une éthique pour le
futur.
Cette réflexion prospective soulève des questions fondamentales et indique
des voies d'action pour l'avenir, aux niveaux stratégiques et organisationnels.
Son déroulement complet est le suivant :
• Vingt étudiants de l'OVSM réalisent durant deux mois une enquête sur le
terrain en allant interroger des dirigeants d'entreprises de secteurs
distincts afin de comprendre le sens de l'évolution et des mutations
auxquelles ces entreprises sont aujourd'hui confrontées. Une série
d'ateliers de travail permet de guider ce travail par une rigoureuse
démarche scientifique.
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• L'analyse de contenu de ces interviews, et l'analyse des données
secondaires disponibles, a permis aux étudiants-enquêteurs de réaliser
une série de cas déclinant spécifiquement les mutations et changements
en action dans les entreprises de notre panel.
• Chaque année, des travaux en ateliers avec les dirigeants de ces
entreprises permettent d’approfondir les thèmes d'investigation et de
proposer des voies d'actions pour le futur.
• Durant la séance plénière finale, les participants confrontent leurs
opinions, et la journée se conclut par des propositions consensuelles.
• Le président d'HEC Genève et les étudiants de l'OVSM convient les
experts à un cocktail.
• Le présent rapport est rédigé et transmis à tous les experts ayant
participé à cette journée.
• Ce rapport donne lieu, chaque année, à des articles qui sont publiés dans
des revues scientifiques, concrétisant le partenariat monde
académique/monde économique de l'OVSM et assurant ainsi la promotion
de ses travaux.
• Ce présent rapport définit également les axes de recherche et de
pédagogie qui sont mis en œuvre au cours de l'année suivante avec le
concours d’étudiants de l'Observatoire de Vente et Stratégies du
Marketing de Genève.
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TABLE DES MATIERES
1 - Introduction 2
2. Vers l'entreprise du XXIe siècle 4
2.1 Un cadre de mutation 4
2. 2 Les mutations de la vente 6
3. La recherche d'une pensée prospective 10
3.1 Son déroulement 10
3. 2 Le panel des entreprises 12
3. 3 La validation des résultats 12
4. Les synthèses des cas d'entreprises 14
4.1 Le cas de Baume & Mercier 14
4.2 Le cas de Caterpillar Inc. 17
4.3 Le cas de FIAT Suisse 20
4.4 Le cas de Hewlett-Packard 23
4.5 Le cas de Nestlé Suisse 26
4.5 Le cas de Procter & Gamble 29
5. La mise en œuvre des mutations 33
5.1 L'espace de vente de l'entreprise 33
5.2 Les temps de la vente 34
5.3 La mutation perçue et vécue 35
5.4 La personne, l'homme 37
6. Conclusion 40
Annexe méthodologique 43
Introduction
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1 - Introduction Depuis une dizaine d'années nos recherches nous ont permis de mieux
comprendre les mutations vécues par les entreprises. L'Observatoire de Vente
et Stratégies du Marketing de Genève (OVSM) permet à des dirigeants
d'entreprises de confronter régulièrement leurs opinions à ce sujet. Sa journée
de prospective annuelle est pour eux l'occasion de marquer une pause dans
leurs environnements immédiats et de prendre de la distance vis-à-vis de leurs
secteurs d'activités.
Nos journées de prospective permettent également d'accroître les relations
entre le monde universitaire et les entreprises en impliquant un certain nombre
d'étudiants de nos programmes de Licence, DEA et de doctorat. Les étudiants
réalisent sur le terrain la phase préliminaire de structuration de la
problématique, puis ils participent "en temps réel" aux débats de responsables
d'entreprises lors de la journée de prospective. Ils complètent ainsi leur
formation théorique.
Nos journées de prospective se concrétisent par la proposition de résultats qui
sont ensuite mis en œuvre dans les recherches de l'Observatoire et qui sont
utilisés au quotidien par les responsables impliqués dans le travail prospectif.
Le thème d'investigation du 26 juin 2003 a été choisi par les membres
fondateurs de l'Observatoire réunis lors de leur session de recherche du 10
décembre 2002. Il s'agissait de traiter du thème :
"Perspective de mutation et métiers de la vente"
Ce document, synthèse des résultats de notre recherche, constitue un rapport
d'étape. Il est articulé en quatre points : a) le modèle générique de l'OVSM et
les interrogations spécifiques de 2003, b) le déroulement de la recherche 2003,
c) les synthèses des six cas d'entreprises articulées autour du modèle
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générique, d) les propositions thématiques et les conclusions de la journée de
débat du 26 juin 2003.
Le modèle générique de recherche
de l'OVSM
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2. Vers l'entreprise du XXIe siècle 2.1 Le cadre de mutation
Depuis la session de prospective de juin 2000, nos travaux de recherche
s'inscrivent dans le cadre générique de mutation suivant.
• La première mutation concerne le consommateur, client final qui est d'abord
touché, tant par les modifications de la structure démographique (pyramide des
âges, espérance de vie accrue, etc.), que par les adaptations sociales en cours
(durée hebdomadaire du travail réduit, âge de la retraite, etc.). D'une part, une
répartition différente du "temps de loisir" vs. "temps de travail" se met en place
au niveau global de la société européenne ; d'autre part, l'augmentation des
possibilités de travail mobile (téléphone, micro-ordinateur, Internet, etc.)
change la notion de frontière entre ces deux types de temps traditionnels "libre"
vs. "obligatoire". Par ailleurs, l'augmentation du niveau de scolarité et de
l'éducation, ainsi que l'augmentation générale du niveau de vie, ont permis
l'émergence de populations plus aptes à décider de manière autonome de
leurs modes de consommation. Par conséquent, les individus gèrent (ou vont
gérer) de manière différente que par le passé leurs activités et leurs relations
avec les entreprises fournissant biens et services.
• La seconde mutation fondamentale touche l'extension des marchés. Depuis
quelques années l’Union européenne est devenue un vaste marché unique de
près de 400 millions de consommateurs potentiels. Parallèlement, la
mondialisation ouvre, pour les entreprises, la perspective d'un marché devenu
plus vaste et plus concurrentiel où la comparaison d’un pays à l’autre, voire
d’une région à l’autre, sera facilitée. La course à la taille, reposant sur la
volonté de réduire les coûts, conduit certains acteurs économiques à
standardiser prix et produits. La mondialisation, qui ferait du monde un village
et de l’Europe un quartier, conduirait à une forme d'homogénéité culturelle.
Mais cette dilution des relations directes entreprise-client implique une prise de
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conscience : il ne s'agira plus de se contenter d'attirer des clients, mais de bâtir
des relations avec eux à travers un ensemble de services souvent offerts par
des partenaires commerciaux différents. C'est dans ce cadre de changement, à
la fois chez le consommateur final et dans les transactions entre les
entreprises, que le nouveau courant du marketing relationnel ou Customer
Relationship Management (CRM) s'oppose au courant traditionnel
transactionnel. Ici, on parlera davantage de relations de type "one to one" que
de segmentation de marché ou de publicité de masse.
• Simultanément, l’explosion d’Internet est une mutation considérable par
l'accès à la virtualité qu'elle procure. Au-delà de nouveaux moyens de
communication, Internet a le pouvoir de modifier l'ordre social actuel du savoir,
et donc l'"homo sapiens". L'individu, consommateur ou client industriel,
apprend à vivre avec de nouveaux paradigmes communicationnels et
commerciaux. Ce nouveau média interactif, qui a réussi la convergence du
texte, du son et de l'image, connaît une croissance fulgurante. Toutes les
catégories d'individus sont susceptibles d'être touchées à plus ou moins brève
échéance. Seule sa vitesse de propagation en est encore inconnue. Les
technologies de l'information et de la communication transforment
profondément les stratégies et les pratiques de l'entreprise. L'économie de
l'Internet n'est plus virtuelle, mais tout à fait réelle. Elle permet l'apparition de
modèles de gestion qui affectent radicalement métiers et organisations. Elles
remettent en cause les techniques traditionnelles du commerce, les politiques
organisationnelles et les stratégies d'entreprises. Nul n'est capable de prédire
avec exactitude la configuration future d'Internet, mais ce nouveau média est
en train de bouleverser notre façon d'apprendre, d'acquérir et de diffuser
l'information, donc de communiquer avec les hommes.
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2. 2 Les mutations de la vente
Le métier de vente s'est toujours fondé sur un échange d'informations. Mais,
depuis peu, pour mieux cerner l'incertitude propre à l'extension des marchés et
des échanges commerciaux, des modèles de structuration sociale sont
proposés dans les relations d’échanges en vue de créer et consolider les flux
d’informations. Ces derniers sont autant de sources d'opportunités et de
contraintes pour les acteurs, et ils ont de notables implications en terme de
comportement et de performance des acteurs. Cette perspective de relations
informationnelles s'applique au niveau individuel comme organisationnel. Les
réseaux de relations que l’entreprise a tissé ont une influence sur son choix de
nouveaux partenaires. La tendance actuelle ne fait qu'accentuer le phénomène
selon lequel l’entreprise aura naturellement tendance à rechercher des
relations avec des partenaires avec lesquels il lui sera possible de construire
des échanges d’informations riches au-delà des frontières organisationnelles.
�Le premier thème que nous explorons concerne la place de la vente au cœur
de cette relation informationnelle : la vente comme une vitrine de l'entreprise,
l'entreprise mise à la portée du client, ou un intermédiaire entre des mondes
séparés ?
Les restructurations d'entreprises dues à la mondialisation, au développement
de pôles européens et de directions régionales ont introduit dans les
entreprises une dimension d'urgence et d'incertitude. Les motivations
principales des entreprises sont le désir de maîtriser, d'une part l’incertitude et
la dépendance venant des caractéristiques externes du marché de l’offre et,
d'autre part, des facteurs internes situationnels. Dans ces conditions les
différents secteurs et filiales des grandes entreprises ont tout intérêt à établir
des relations à long terme avec leurs partenaires afin de réduire dépendance et
incertitude. Les ressources et la possibilité de créer des relations à long terme
sont alors deux facteurs qui orientent l’entreprise dans son choix de nouveaux
partenaires. Mais, le vendeur individuel peut être confronté à un véritable
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paradoxe dans l'exercice quotidien de sa profession entre un besoin de
résultats à court terme toujours plus pressant et un long terme à assurer dans
le cadre de la fidélisation des partenaires commerciaux.
�Le second thème de recherche qui sera exploré ici est la manière dont cette
mutation organisationnelle est vécue au niveau de la vente.
Durant des décennies, les critères d'évaluation des entreprises sont fondés sur
l’efficience de la production et sur la mesure de la performance financière. Les
premiers travaux portant sur la stratégie marketing ont permis d'élaborer des
mesures d'efficience de la vente en termes de chiffre d'affaire et de part de
marché. Les activités interpersonnelles à l’interface d’entreprise-vente sont
alors négligées dans l’élaboration de la stratégie Marketing de l’entreprise.
Pourtant, toute entreprise peut également être comprise comme une entité
fondée sur des actifs intangibles tels que la culture, sur les compétences
intellectuelles spécifiques de son personnel et sur ses compétences distinctives
via l'agencement de ses ressources humaines. En effet, toute mutation va avoir
un impact interne à la fois sur son capital "personnel" et son capital "culturel".
Dans une situation donnée, la compétence spécifique de l'entreprise peut être
considérée comme étant l'aptitude des individus et groupes qui la composent à
coordonner ce type de ressources.
�Notre troisième thème de recherche sera donc de vérifier dans quelle
mesure cette mutation est culturellement intégrée par les vendeurs et adaptée
à la perception qu'ils ont de leur métier.
Au cours des dix dernières années, l’attention s'est orientée vers le rôle du
relationnel dans la satisfaction du client. Car c’est à travers les activités
interpersonnelles aux points de vente que le client perçoit la valeur de l’offre.
L’avantage compétitif de n’importe quel produit ne peut être achevé qu’en
différenciant à la fois les attributs techniques du produit et ceux du processus
interpersonnel mis en place entre partenaires. Par conséquent, les
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comportements et performances de la force de vente constituent des bases
significatives pour influencer les évaluations des acheteurs, les relations
fondées sur la confiance et l’ensemble de la satisfaction du client. Il semblerait
bien que le comportement de la force de vente soit toujours symptomatique du
“ moment de vérité ” où le client évalue l'ensemble de ce que lui apporte sa
relation avec le fournisseur. Mais peu d'études s'attachent à analyser l'intensité
de cette relation spécifiquement humaine.
�Le quatrième thème de recherche qui sera étudié portera donc sur le
concept du vendeur comme une personne, un homme qui entre en relation
avec d'autres et qui a des inquiétudes et des espoirs quant à son avenir.
Le déroulement de la recherche
3. La recherche d'une pensée prospective Nous avons opté pour la méthode Prodin que nous utilisons dans les
recherches d'inspiration ethnologique car elle permet de prolonger la réalité
quotidienne des entreprises étudiées.
3.1 Son déroulement
La méthode utilisée suit différentes étapes et phases de travail qui sont
représentées dans le schéma ci-après.
Comme on s'en aperçoit, il s'agit d'une véritable opération de recherche
rigoureuse qui appelle à une collaboration étroite entre le chercheur principal et
les enquêteurs, car chaque production (objectifs, portraits individuels,
validation, synthèse, etc.) répond à des normes de réalisation précises et est
donc strictement contrôlée. Le problème, en effet, avec les méthodes
qualitatives reste toujours de savoir dans quelle mesure la "réalité" produite par
les chercheurs n'est pas simplement une interprétation subjective de leur esprit
et si elle est véritablement fidèle à la réalité vécue par les acteurs de
l'entreprise.
Cette procédure de validation par aller-retour entre les concepts et le terrain,
entre chercheurs, enquêteurs et patriciens, garantit cette éthique élémentaire
sans laquelle il ne saurait y avoir de production de recherche.
Dans le cas présent, l'enquête a été réalisée grâce au concours de quatorze
dirigeants d'entreprises et de vingt-sept vendeurs en relation directe avec
quatorze étudiants de l'Observatoire de Vente et Stratégie du Marketing de
Genève. Tous, qu'ils soient étudiants ou responsables en entreprise se sont
fortement impliqués dans cette recherche qui s'est déroulée sur une période de
3 mois d'avril à juin 2003.
� PRESENTATION DES RESULTATS EN CONFERENCES SCIENTIFIQUES
ETAPES DE CONTRIBUTION�EMPIRIQUE
� REPONSE AUX INTERVIEWS �REALISEES PAR LES ETUDIANTSAU SEIN DE CHAQUE ENTREPRISEDE L'ECHANTILLON
� SEANCE PLENIERE :�CONFRONTATION DES RESULTATS,DEBAT PUIS SYNTHESE GENERALEDE VALIDATION DES PROPOSITIONS
ETAPES DE CONTRIBUTION�THEORIQUE
� ANALYSE DE CONTENU DES RETRANSCRIPTIONS D'INTERVIEWS :�- REDACTION DE PORTRAITS INDIVIDUELS�
ETAPE 4 : MISE EN OEUVRE
� ELABORATION D'UN DOCUMENT DE SYNTHESE FINAL
ETAPE 3 : MODELISATION
ETAPE 2 : FORMALISATION
� CHOIX DE L'ECHANTILLON D'ENTREPRISES ET CHOIX DES ACTEURS-EXPERTS�� REDACTION DU QUESTIONNAIRE �OUVERT D'INTERVIEW
ETAPE 1 : EXPLORATION PHASE 1 : EXPLORATION
PHASE 2 : FORMALISATION
PHASE 3 : MODELISATION
� DISCUSSION EN SOUS-GROUPE :�- CHOIX DES DIMENSIONS PRINCIPALES DU MODELE�- CREATION D'UN DESIGN DE RECHERCHE
� VALIDATION DES PORTRAITS�- STRUCTURATION DU PHENOMENE- INDUCTION DE MODELES INTRA-ENTREPRISES �
ETAPE 4 : MISE EN OEUVRE
Fig. 1 : Les étapes de la recherche
3. 2 Le panel des entreprises Notre panel était composé de six entreprises représentatives de différents
secteurs d'activité œuvrant dans la vente au B to B. Il s'agissait de Baume &
Mercier, Caterpillar Overseas SA, Fiat Auto Suisse, Hewlett Packard, Nestlé-
Suisse, Procter & Gamble
Les personnes suivantes ont accepté d'être longuement interviewées par les
étudiants enquêteurs. Sans leur confiance et leur franchise lors des entretiens,
cette recherche n'aurait pu être menée à bien. Toute notre gratitude va aux
personnes suivantes :
Bernard Allegrini, Lotthar Bielke, Jean-Marc Buchi, Cédric Bracher, Marco
Cacitti, Roger Costi, Jean Fracheboud, Jacques Girardet, Manuel Hurt, Ania
Jakubowski, Mike Jones, Stephan Leblanc, Guy Lettens, Hamid Lavassani,
Heinz Lohri, Schukuhe Massonnet, Urs May, Jean-Claude Meyer, Patrick
Perreard, Philippe Roussin, Myriam Rubin, John Salmona, Rolf Sauter, Thérèse
Schindelholz, Martin Tobler, Betsy Vielhaber, Didier Wyssa.
3. 3 La validation des résultats Le 26 juin 2003, une journée prospective a permis de présenter aux dirigeants
des entreprises de l'OVSM les synthèses des cas réalisés par les enquêteurs-
étudiants.
Ensuite, deux sous-groupes de dirigeants ont été organisés pour débattre de
ces résultats (avec les étudiants-enquêteurs et sous la conduite d'un
animateur), en vue de formuler des propositions spécifiques. Chacun des sous-
groupes s'est attaché à déterminer quels étaient les causes et les effets des
phénomènes étudiés, à distinguer des variables indépendantes et dépendantes
permettant de comprendre ce qui relevait d'une mutation du métier de la vente
ou d'une simple évolution du métier de l'entreprise.
Les personnes suivantes ont directement contribué à l'élaboration des
propositions de recherches présentées dans les pages suivantes :
Jean-Max Arbez Directeur Suisse Romande Hewlett Packard
Patrice Borde New Channel Development Procter & Gamble
Luc Boyer Directeur de Recherche Université Dauphine - Paris
Pierre Cariage Responsable de la formation Migros-Genève
Valérie Cornut Cheffe de Vente Nationale Nestlé Suisse SA
Sylvère Demonsais Directeur Administratif & Financier Baume & Mercier
Christian Dillier Capital Intellectual Manager Caterpillar Overseas SA
Fabrizio Guidi Directeur de Business Unit Sanofi-Synthelabo
Stéphanie Krieger Key Account Manager Procter & Gamble
Bernard Paternot Chef de la Division Chocolat Alimentation - Nestlé Suisse SA
John Salmona Responsable Vente Fiat Suisse
Mme Simpson Pharmacienne Groupe PP Holding
Salvador Vidal Dir. associé, Clientèle de placement UBS SA
Les résultats de la recherche
.
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4. Les synthèses des cas d'entreprises 4. 1 Le cas Baume & Mercier Cette analyse a été effectuée par Loubna Bendaoud et Karin Soller.
A – L'entreprise et la vente La vente chez Baume et Mercier doit représenter au mieux la marque. Les
vendeurs, qui constituent un canal de communication et d'information privilégié
auprès des intermédiaires, jouent un rôle déterminant. Au-delà de la bonne
image de l'entreprise qu'ils doivent véhiculer, ils doivent mériter sur la durée la
confiance des détaillants et maintenir avec eux une position cohérente dans le
cadre d'un partenariat durable.
La vente est aussi l’intermédiaire entre deux mondes. Son champs d'action et
de compétence s'est élargie. D'un simple acte de vente discontinue, la stratégie
de Baume & Mercier consiste à simplifier les relations et les flux d’informations
avec les intermédiaires. Les nouvelles technologies de gestion de la relation
client (CRM) sont très présentes à travers les différentes phases de la vente.
Elles sont directement corrélées à la force du partenariat avec le détaillant.
Elles comprennent tous les éléments qualitatifs autour de l’acte de vente tels
que l’écoute, le conseil et la formation des détaillants. L'entreprise Baume &
Mercier a bien compris qu’au-delà du produit, les clients attendent qu’un
concept global leur soit proposé.
B - La mutation du métier La fonction et le rôle du vendeur se sont élargis et diversifiés. Du simple
preneur d’ordre, les vendeurs ont acquis une plus grande autonomie et marge
de manœuvre accrue avec le temps. Ils doivent mettre en œuvre la stratégie
fixée par l’entreprise tout en l’adaptant à la demande du marché et aux
spécificités du détaillant. Ainsi, le commercial va chercher à assurer le flux
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d’informations entre Baume & Mercier et le marché et apporter des résultats
concrets pour satisfaire les deux parties.
Les pressions relevées, qui se profilent et accélèrent ce besoin d’évolution,
voire de mutation, sont communes à toutes les entreprises : saturation des
marchés et accroissement de la concurrence au niveau mondial. La
construction de partenariats constitue à la fois une source de différenciation et
d'avantage concurrentiel. Dans les faits, l’évolution de l’environnement a
surtout affecté le vendeur. Aujourd’hui, celui-ci est devenu un acteur majeur de
la rentabilité par son rôle d’interlocuteur privilégié du client. Par ailleurs, ses
compétences se sont élargies. Un vendeur doit désormais maîtriser les
différentes disciplines de la gestion, les nouvelles technologies, et les
techniques de communication.
L'autre moteur principal du changement est le client final. Celui-ci souhaite de
plus en plus partager et s’approprier des valeurs à travers son acte d’achat.
Cela implique pour l’entreprise de mettre en avant plus que jamais sa marque
et ses avantages liés pour se différencier de la concurrence. Baume & Mercier
doit répondre à ces nouvelles exigences du client final tout en conciliant les
intérêts et les exigences des détaillants. Les vendeurs peuvent y jouer un rôle
crucial. Grâce à leur rôle d'observateurs privilégiés du terrain et à la qualité de
leurs relations avec les intermédiaires, ils peuvent remonter des informations et
des données clés sur les changements de la demande ainsi que la
concurrence.
C - La personne La notion de risque est intrinsèque au métier de la vente car il existe toujours
l'incertitude de ne pas atteindre les objectifs fixés en termes de ventes. Face au
client, le vendeur doit laisser une place aux impondérables afin de s’adapter
aux variations de la demande et aux fluctuations de plus en plus importantes
du marché. Pour réduire le risque, le vendeur peut jouer un rôle actif en
favorisant le dialogue avec les détaillants, et leur en apportant, le cas échéant,
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les outils nécessaires à l'amélioration de leurs ventes. Il s’agit plus précisément
de formation et des techniques utiles à la mise en valeur optimale des produits
au lieu de vente.
Les vendeurs vont jouer plusieurs rôles vis-à-vis de leurs clients. Ils adopteront
une casquette de “ médecin généraliste ”, diagnostiquant les principales
difficultés des détaillants et leur proposant des solutions. Ils seront parfois
“ psychologues ”, à l’écoute de leurs difficultés professionnelles et
personnelles. Ce faisant, ils resteront les partenaires et les interlocuteurs
commerciaux des clients. Il s’agira de mettre en place des stratégies répondant
aux intérêts des deux parties, soit Baume & Mercier et le détaillant.
D - Les challenges du futur Le secteur de l’horlogerie est perçu comme peu sensible aux changements car
les valeurs clés et le métier central sont ressentis comme facteurs de
permanence. Néanmoins, les conditions du marché obligent de plus en plus
l’entreprise à s’adapter de manière plus sensible aux besoins de la clientèle
pour se différencier. Ainsi, le vendeur doit désormais maîtriser les différentes
disciplines de la gestion, les nouvelles technologies et les techniques de
communication. Ce pouvoir de décision délégué aux vendeurs a pour objectif
de réduire le nombre d’interactions entre la direction et les clients. Le vendeur a
pour tâche de communiquer les attentes des détaillants et des clients finaux à
la direction.
L' éthique est un thème qui prendra de l'importance dans les années à venir.
Pour Baume & Mercier, agir de manière éthique consiste à respecter certaines
normes lors de la fabrication des différents articles. En effet, Baume & Mercier
a constaté un intérêt croissant du client final pour les techniques de fabrication.
Il souhaite plus d’informations et attend une “ garantie éthique ”. Pour répondre
à cette attente, l’entreprise étend son contrôle sur les fournisseurs et cherche à
se montrer plus transparente.
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4.2 Le cas Caterpillar Inc.
Cette analyse a été effectuée par Alexandra Broillet et Zoya Parfenova.
A – L'entreprise et la vente L'expertise principale de Caterpillar est la fabrication de machines de haute
qualité. Toute l'entreprise, aussi bien la finance, que le marketing et la direction
commerciale, servent de support à la vente avec les concessionnaires. Par
conséquent, la vente est la vitrine des compétences de l'entreprise Caterpillar.
Le représentant de vente chez Caterpillar est un conseiller à la clientèle, il
assiste les concessionnaires dans leurs activités de vente. Il doit identifier les
besoins des clients finaux en tant qu'utilisateurs de machines, développer les
services correspondants et les mettre à disposition des concessionnaires.
Ces changements d'approche de la vente ont modifié la culture de l'entreprise
Caterpillar. D'une structure horizontale on est passé à une autre verticale.
Aujourd'hui l'entreprise est organisée par catégories de produits. Ces
changements de la vente chez Caterpillar se font en petits pas en s'assurant
que les mutations sont bien ancrées dans l'esprit des employés. Le processus
de mutation peut être accéléré par le recrutement de nouvelles personnes
B - La mutation du métier Le représentant de vente est l'intermédiaire entre l'entreprise Caterpillar et les
concessionnaires. Il y a 10 à15 ans, ce dernier effectuait essentiellement des
ventes directes en tant que preneur d'ordres. Durant les cinq ou dix dernières
années il s'est produit une importante évolution dans le métier du vendeur chez
Caterpillar. Il est de plus en plus intégré dans la stratégie de l'entreprise et la
compréhension mêmes des affaires et, parallèlement, il est devenu un véritable
conseiller à la clientèle. Cette mutation du métier n'est pas simplement
attribuable aux évolutions du marché en soi, mais également à la complexité
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des affaires qui appelle une stratégie de type "pull" impliquant des approches
différenciées dans la vente.
Ces évolutions demandent des pratiques commerciales différentes afin de
mieux répondre à de nouvelles opportunités du marché, mais aussi pour faire
face à des concurrents auxquels l'entreprise n'était pas confrontée auparavant.
En outre, le client final est devenu plus global, il se déplace partout, de ce fait il
est mieux informé sur les prix et sur les offres des concurrents.
Les mutations du métier de vendeur au sein de Caterpillar impliquent une
réflexion et une refonte au niveau de la gestion de la force de vente. En effet,
les représentants de vente doivent avoir un manager qui comprend la situation
sur le terrain, car il y une différence conséquente entre ce qui se décide dans le
top management et ce qui se passe sur le terrain. En même temps le manager
ne peut pas partager toute l'information stratégique avec les représentants de
vente car ces derniers peuvent quitter l'entreprise à tout moment…
C - La personne Les qualités personnelles nécessaires au vendeur pour mener à bien ses
activités de conseil résident dans les capacités à aimer les interactions
sociales, à écouter, à comprendre, à orienter, à encourager, et à savoir
construire des relations de confiance avec ses collaborateurs, ses supérieurs,
les concessionnaires et les clients. Les compétences professionnelles d'un tel
consultant incluent la connaissance des produits et des services disponibles,
afin de tenir au courant les concessionnaires sur de nouvelles opportunités et
les aider à trouver les solutions les plus adaptées pour les clients finaux. Il lui
faut néanmoins garder à l'esprit que le conseil est important, mais le but ultime
est de vendre.
Le représentant de vente Caterpillar vit plutôt dans le présent. Il est sensé
atteindre les objectifs journaliers, les objectifs mensuels. Mais il lui faut aussi
s'enquérir du futur car il doit donc accepter, percevoir, essayer de comprendre
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et de gérer l'incertitude d'abord à un niveau personnel. C'est important pour un
représentant de vente face à sa hiérarchie, mais plus encore vis-à-vis de la
clientèle, car cela lui permet d'anticiper le besoin de solutions spécifiques de
ses clients.
D - Les challenges du futur Construire les relations à long terme avec les concessionnaires et avec les
clients est l'activité principale d'un représentant de vente. C'est la base de sa
crédibilité et des rapports de confiance qu'il développe et qui sont déterminants
dans ses activités. Il construit ces relations en comprenant les problèmes des
concessionnaires au jour le jour et en leur apportant un soutien dans leurs
rapports avec les clients finaux. Avec le temps, cette relation de confiance
devient un acquis et un capital ; à condition que des efforts de gestion et de
fructification de ce capital soient effectivement maintenus sur la durée.
L'intégration technologique, dont la finalité est d'établir des partenariats solides
avec les concessionnaires et pourvoir assurer une certaine relation avec le
client final, accélère la mutation des métiers de représentants de la vente.
Toujours dans une logique de passage d'un vendeur vers un gestionnaire et un
manager, il devra réfléchir aux solutions permettant d'augmenter l'efficacité de
ces outils voir même jusqu'à l'implantation de solutions chez le
concessionnaire.
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© OVSM - 2003
4. 3 Le cas FIAT Suisse Cette analyse a été effectuée par Grabriela Ivanikova et Claudia Rodriguez.
A – L'entreprise et la vente Avec la globalisation et l’internationalisation des marchés, ces dernières
années le marché automobile est devenu de plus en plus saturé. La situation
est particulièrement difficile car Fiat est une société qui perd de l’argent.
Aujourd’hui les services commerciaux sont soumis à d'énormes contraintes et
pressions. Dans ces conditions le plus important n’est pas forcément de vendre
mais de limiter les dégâts en évitant de perdre de l’argent.
Le rôle de la vente dans l’entreprise est ainsi fondamental : c'est une question
de survie. Aujourd’hui les objectifs sont chaque fois plus hauts. Chez Fiat on
pourrait en conclure qu’il y a eu un changement de type quantitatif mais que
l’essence de la vente reste le même.
B - La mutation du métier
Les marchés et les entreprises s’unifient avec une tendance régionale ou
globale. Pour répondre à cette tendance lourde, on assiste dans toutes les
entreprises du secteur à l’évolution du métier niveau territorial. La clientèle
locale diminue et la clientèle nationale ou internationale augmente. La
distribution locale disparaît au profit de négociateurs régionaux du B to B. Il faut
que le vendeur ait les compétences pour s'y adapter. Il y a encore 10 -15 ans,
c’était le produit, son image et sa qualité qui étaient déterminantes. Mais
aujourd'hui, les produits commencent à se ressembler et les distinctions
régionales tendent à diminuer.
Avant, la voiture était un achat très impliquant à forte valeur économique et
sociale. Aujourd’hui, on assiste à des modifications importantes dans la
consommation du produit automobile. Les préférences des consommateurs
évoluent au gré des tendances sociétales (importance des loisirs, acheter une
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 28
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voiture plus petite ou même la louer, …). Il y a donc davantage d'analyses à
effectuer au niveau marketing sur des besoins qui n’existaient pas avant ou
qu'on ne voulait pas voir. Tel est l'exemple de l’adaptation de véhicules pour les
gens handicapés ou plus âgés. Par contre, la manière dont les clients achètent
n’a pas vraiment changé. Les gens achètent toujours un produit comme
l’automobile avec des sentiments, avec des états d’âme malgré la
rationalisation énoncée.
Vendre simplement un produit n’est plus suffisant. Aujourd’hui, la tendance est
d’avoir des relations étroites avec les clients, de fidéliser des entreprises
importantes avec des marges réduites mais avec des volumes accrus. Cela fait
qu’on est passé du vendeur de succursale à un vendeur national B to B.
L’entreprise doit créer ce nouvel environnement qui donne une priorité à
l’adaptation aux changements du marché et des clients. Le vendeur doit
s’adapter à ces changements, prendre des cours, suivre techniquement les
innovations et gérer un maximum d’informations sur le secteur. Chez Fiat, le
droit de perdre un client n'existe plus.
C - La personne
C’est un métier où le vendeur grandit petit à petit. Ce qui est le plus apprécié
dans ce type de vente c’est certainement le contact avec le client avec lequel il
est important de créer un climat de confiance. Faire ressentir avec psychologie
au client qu’on est là pour lui, pour répondre à toutes ses questions, pour
satisfaire ses désirs et bien le servir, tels est le leitmotiv du vendeur. C’est
donc un métier enrichissant où les relations humaines restent fondamentales.
Mais dans ce métier de vendeur, il y beaucoup d’incertitude. Pour y faire face,
d'une part il devra bien la tolérer face à sa direction qui annonce de
nombreuses restructurations et, d'autre part, il est très important de bien
tolérer cette incertitude vis-à-vis des clients. L’acheteur le sait et il joue avec
cette incertitude. Car c'est un métier à où on doit gérer des relations
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 29
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commerciales sur plusieurs années et cette perspective ajoute un stress
supplémentaire.
Le vendeur agit au plus proche du client et, grâce à cette proximité, il a un
pouvoir de persuasion et d’influence primordial. Vendre à tout prix, serait une
erreur. Malgré les pressions économiques il lui faut s'appuyer sur des valeurs
humaines immuables. Or, l'organisation, avec ses différents centres d'intérêts,
de pouvoir et d'influences, n’a pas toujours la possibilité d’être cohérente vis-à-
vis de ses exigences commerciales.
D - Les challenges du futur Le vendeur Fiat défend l’argument : “Si le produit de qualité n’est pas là, même
toutes les aptitudes du vendeur ne suffisent pas”. Or,aujourd’hui c’est sur le
prix qu’il lui faut se battre, sur le rapport prix au kilomètre parcouru. Et là il
n’est pas facile de se différencier de la concurrence. C’est la qualité des
services qui fait la différence. Les clients sont très soucieux des procédures de
réparation, de la garantie, de tout le côté service, et cela joue un rôle
fondamental dans la vente des véhicules actuellement. Le service après-vente
devient une valeur ajoutée très importante. D’une certaine manière la vente
deviendra un partenariat sur une durée dont le client déterminera l'importance
et l'intensité.
Le marché de l'automobile est saturé. On assiste à une concentration des
acteurs du marché à travers des fusions acquisitions ou des partenariats d'une
grande envergure. Fiat devra se battre pour garder sa place. Au niveau des
clients tel que nous les connaissant aujourd'hui, ils risqueront de disparaître au
profil d'une distribution globale avec un pouvoir de négociation colossale et
équivalent aux acteurs de la grande distribution.
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4.4 Le cas de Hewlett Packard L'analyse a été effectuée par Gregory Coraux.
A – L'entreprise et la vente
Ce qui différencie HP de ses concurrents et qui caractérise sa valeur ajoutée
se situe dans le fait que HP développe et maîtrise une très haute technologie
innovante. Son enjeu est de savoir comment aiguiller cette technologie dans le
temps pour concevoir des solutions technologiques spécifiques à l’activité du
client et ainsi développer son marché. Les "Accounts managers" deviennent
des "partenaires commerciaux". C’est cet aspect de "partenaire" qui est la
valeur ajoutée mise en exergue par HP.
Le centre de gravité de l’entreprise se situe toujours au niveau de la production,
car les solutions vendues chez les clients dépendent de la fabrication et de
l'innovation technologique. Mais le département vente constitue un second
centre de gravité de l’entreprise. C'est en effet le responsable de compte qui,
par son contact constant avec les clients, est à même d'identifier les tendances
du marché. En outre, la force de vente doit générer à court terme du chiffre
d'affaire pour l'entreprise et doit établir des relations à moyen et long terme afin
que le positionnement de l'entreprise HP soit ajusté au plus proche des clients.
B - La mutation du métier Les clients HP sont principalement les directions informatiques. Ces directions
informatiques ont beaucoup évolué au sein de leurs propres entreprises : au
lieu de savoir combien l'informatique coûte, on se demande désormais
comment l'informatique peut apporter sa contribution en apportant des
solutions qui sont plus pertinentes, et performantes. Auparavant le client de HP
choisissait quelles étaient les fonctionnalités dont il avait besoin dans son
budget, alors qu’aujourd’hui il va définir les fonctionnalités primaires qui vont
faire fonctionner sa société, et va essayer d'en obtenir le budget auprès de sa
hiérarchie.
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Le métier de vendeur devient ainsi de plus en plus stratégique. Pour que
l'achat puisse se réaliser, il faut avoir une approche plus globale du client.
Cette compréhension repose sur des processus de routine précis comme
l'identification des bons contacts chez les clients, et celle des bons intervenants
au sein de HP. Un vendeur doit être le plus souvent possible en face-à-face
avec le client. La mission du commercial est de soutenir sa société, mais aussi
d’être parfois l'avocat du client, parce qu'il a un contact privilégié avec ses
clients d'un point de vue relationnel à court, moyen et long terme.
A l’heure actuelle, tout ce qui peut être fait pour gagner un temps précieux est
mis en œuvre. Ainsi, les commerciaux travaillent de plus en plus sur ordinateur.
Ils se connectent avec leur ordinateur portable, se déclarent "présents" et leur
numéro de téléphone se programme automatiquement sur le poste de travail.
Par ailleurs, le téléphone portable est pour eux un outil de travail qui allie
flexibilité et instantanéité de la disponibilité. Ces mutations technologiques
jouent un rôle fondamental dans la productivité des commerciaux.
C - La personne Le commercial de HP vit dans le futur et regarde toujours devant lui. Ce qui
l'intéresse est ce qui va venir dans ces prochaines années, les prochains
développements techniques et les prochaines opportunités de marché, car,
dans un tel secteur, il n’est pas possible de se reposer sur le passé.
Néanmoins, la vision sur le futur est toujours à très court terme en ces périodes
de crise économique où les perspectives envisagées par les clients au niveau
de leurs projets atteignent difficilement les 12 mois.
Le commercial doit dissiper leur incertitude, et envisager quelles sont les
actions à prendre. Il faut toujours gérer le risque jusqu’à la signature définitive
d’un contrat et prévoir des scénarios de repli afin de ne pas dépendre que
d'une seule grosse commande, par exemple. Il faut donc que le vendeur ait
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 32
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une personnalité forte et de toujours afficher de l'optimisme et faire preuve de
persévérance.
Par ailleurs, le pragmatisme est un maître mot contre l'incertitude, et la
réactivité le moteur de l'action. En effet, dans les niveaux hiérarchiques de HP,
ce n'est pas l'incertitude qu'il faut transmettre aux supérieurs, mais une réalité
pragmatique et des propositions concrètes.
D - Les challenges du futur Avec les changements qui ont affecté le secteur de l'informatique, le rôle de
conseiller devient beaucoup plus difficile. Aujourd’hui un commercial chez HP
peut aller dix fois chez un client, et voir cinq personnes différentes. Ces
personnes discutent ensuite en interne. Les cycles de décision s'allongent de
plus en plus et la prise de décision se dilue entre différents départements et
responsables. Les négociations sont beaucoup plus difficiles car complexes. Le
vendeur devra dans le futur trouver les moyens nécessaires d'approcher et
d'intégrer ces cercles de décisions interne des clients de façon politique et
économique.
Si HP veut avoir une approche à long terme, il est important d'avoir une éthique
très solide. Le monde de l’informatique véhicule beaucoup d'argent dans la
signature de contrats et quelqu’un pourrait être sensible à des propositions
limites pour satisfaire certains objectifs commerciaux à court terme. Si de telles
tentations ne manquent pas, il n'est pas envisageable de travailler longtemps
avec de telles pratiques.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 33
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4. 5 Le cas de Nestlé Suisse Cette analyse a été effectuée par Alessandra Aslan et Stéphanie Wuerfel .
A – L'entreprise et la vente Les distributeurs s’étant considérablement structurés, la part de la vente directe
a fortement diminué au profit des "layouts", du merchandising et du conseil. De
plus, ce type de clients demande de moins en moins de compositions de
produits ou de techniques de fabrication. Dans le passé, le client pouvait être
prêt à accepter, grâce aux contacts avec son vendeur, de prolonger un article
qui ne marchait pas vraiment. Maintenant, la rentabilité entrant davantage en
ligne de compte, le client est également absolument rationnel au niveau de ses
achats.
Les deux principaux clients nationaux, à savoir Migros et Coop, se trouvent
aujourd’hui en concurrence directe avec Carrefour, nouveau venu sur le
marché suisse, qui ambitionne de devenir no. 3. Ces grandes chaînes de
magasins réagissent donc les unes par rapport aux autres en adaptant leur
structure et leur offre, telle que Migros qui, par exemple, propose toujours
davantage de produits de marque.
B - La mutation du métier Les vendeurs Nestlé attribuent les mutations de leur métier à trois sources
principales : la conjoncture macroéconomique, la réorganisation de leur
clientèle ainsi que les remaniements internes, eux-mêmes générés par les
deux premières évolutions. Ainsi, l’entreprise demande au vendeur de
s’adapter, à savoir de gérer davantage de produits et de se spécialiser, soit
dans les tâches du merchandising destinées aux grandes chaînes
commerciales (Coop, Pick-Pay), soit dans la vente propre, destinée aux petits
clients (kiosques, piscines, stations de ski…). Pour les grands clients, la vente
propre est aujourd’hui sous la responsabilité des "Key Account Managers",
lesquels travaillent en étroite collaboration avec le marketing. Au bout de la
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 34
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chaîne, les vendeurs sont chargés d’exécuter les missions ponctuelles définies
par le KAM.
Les vendeurs Nestlé perçoivent leur métier comme étant de plus en plus
incertain du fait notamment de la mauvaise conjoncture économique et des
restructurations internes de l’entreprise au niveau du département vente
(augmentation du portefeuille de produits par vendeur et diminution de l’effectif
de la force de vente). Malgré cela, ils affirment ne pas vouloir rester passifs
face à cette incertitude, tentant de l’ignorer au quotidien soit en la
“ contournant ”, soit en disant “ foncer au lieu d’hésiter ”.
C - La personne Dans le passé, il existait un fort esprit d’équipe qui tendrait à se perdre
aujourd’hui, du fait que chaque représentant travaille de façon individuelle.
L’essor des nouvelles technologies a contribué à réduire les contacts directs,
les vendeurs communiquant entre eux essentiellement par téléphone.
La nouvelle acception du métier de vendeur dans le secteur de l’alimentaire, à
savoir davantage celui d’un conseiller clientèle que d’un vendeur “ traditionnel ”,
implique d’effectuer toutes les tâches liées au merchandising, telles que la
prise de contact, d’information, la présentation du nouveau produit, de même
que, chez certains clients, la mise en ordre du linéaire, les rotations, le contrôle
des rotations, de la marchandise ainsi que de sa présentation.
De plus, il s’agit pour le vendeur de se montrer plus dynamique, plus à l’écoute
du client. Du fait que la vente propre tend à disparaître dans le métier du
vendeur, au profit du merchandising et du relationnel, il devient par conséquent
de plus en plus difficile d’évaluer et de quantifier les résultats de vente, la
performance personnelle du vendeur.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 35
© OVSM - 2003
D - Les challenges du futur
Les mutations du métier de vendeur ont deux principaux vecteurs : les
remaniements organisationnels internes de l’entreprise et l’évolution des
magasins eux-mêmes, en particulier des grandes chaînes.
Au niveau interne, ces changements se sont traduits essentiellement par une
diminution croissante de l’effectif des vendeurs ainsi que l’accroissement de
leur gamme respective de produits. Quelle que soit leur ancienneté dans le
métier, les vendeurs partagent une perception identique des évolutions à venir
dans le secteur alimentaire et dans la vente en général. Du fait de la
concurrence, de la conjoncture et des réorganisations internes, ils se montrent
en effet inquiets vis-à-vis de la pérennité du métier de vendeur tel que défini
traditionnellement
Aujourd’hui, le rôle du métier de vendeur change en fonction du client. Il est
davantage conçu comme celui d’un conseiller clientèle pour les clients
indirects, c’est-à-dire les magasins moyens ou ceux qui appartiennent à une
chaîne de distribution. Dans ce cas-là, le vendeur vend l’image du produit, non
le produit lui-même. Il revient en effet au "Key Account Manager" de mettre au
point la stratégie de vente relative à ce type de clientèle.
Les vendeurs Nestlé ne semblent guère avoir de possibilités de faire carrière
ou ne sont pas prêts à renoncer à leur relative indépendance pour accéder à
des fonctions de management. Un fossé existe entre les vendeurs, gens du
terrain qui n’ont pas de formation supérieure, et les personnes des bureaux, en
l’occurrence actuellement les supérieurs hiérarchiques des vendeurs, issus
pour beaucoup de l’Université de Saint-Gall. Néanmoins, de nouvelles
perspectives sont toutefois en train d’être redéfinies de façon à précisément
élargir les horizons de carrière des vendeurs expérimentés.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 36
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4. 5 Le cas de Procter & Gamble Cette analyse a été effectuée par Emma Karlsonn et So-Won Kim.
A – L'entreprise et la vente Au cours des années passées, on a assisté en Europe à une consolidation de
fusions qui eurent pour conséquence une croissance en taille des distributeurs.
Face à ce phénomène, les producteurs ont perdu beaucoup de leur pouvoir
d'origine. Confronté à cette profonde mutation de la structure du marché,
Procter & Gamble a décidé, il y a déjà quelques années, d'une restructuration
interne drastique.
P&G était a une entreprise extrêmement visible, dont le cœur de métier était le
marketing. Avant cette mutation de la distribution, P & G avait essentiellement
une stratégie "pull", attirant les consommateurs finaux au travers de vastes
campagnes publicitaires. Aujourd'hui le budget de la publicité a été
considérablement réduit au profit de la communication directe au distributeur,
lieu de contact avec le consommateur final.
Auparavant le vendeur approchait ses clients distributeurs avec des listes de
produits en vue de négocier leur exposition sur le lieu de vente. Mais les ventes
sont le plus souvent effectuées en terme de volume au niveau national ou
régional, le rôle de la vente s'est réorienté vers la mise en valeur des produits
une fois acquis par le distributeur. Et comme c'est le distributeur qui a, in fine,
le contact direct avec le consommateur, la présence effective sur le lieu de
vente des vendeurs de P & G devient primordiale.
B - La mutation du métier
L'objectif d'un commercial - ou customer business developer - est de créer et
de consolider des relations à long terme avec les distributeurs afin d'instaurer
un axe de croissance commune. Dans ce but, le commercial doit comprendre
la stratégie du client distributeur et s'y associer. Il doit comprendre qui est le
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 37
© OVSM - 2003
client final, le "shopper", et quelles sont ses tendances d'évolution. C'est sur ce
point que P & G peut sans nul doute offrir au distributeur une compétence
marketing acquise au cours des décennies passées.
Avec l'explosion des nouveaux media de communication (i.e. mobile phone,
Internet) et l'extrême diversité des offres de produits et de marques, le
consommateur est de moins en moins captif et fidèle. Mais, justement, cette
extrême mosaïque d'offres peut perturber les acheteurs. Un des espoirs de P &
G serait de savoir jouer une carte maîtresse en aidant les consommateurs à
optimiser leurs processus d'achat. A cet effet, l'entreprise participe activement
à la mise en place des nouveaux concepts de magasins que les distributeurs
tendent à promouvoir.
Ces évolutions des clients, comme des consommateurs, a conduit P & G à
créer des équipes multidisciplinaires, il y a une dizaine d’années. Ceci a pour
conséquences de modifier en profondeur le travail des vendeurs qui ont appris
à travailler en équipes transversales et à agir de manière moins indépendante.
Les vendeurs actuels ont oublié le temps de la transformation des processus
commerciaux, temps où ils se sentaient "orphelins de leurs marques" alors
qu'on leur demandait d'apprendre à faire vivre en terme de merchandising un
portefeuille de produits au lieu d'assurer la totalité de la vente d'une marque ou
deux seulement.
C - La personne
Les commerciaux de P & G se sont déclarés fiers de travailler en bénéficiant
d'un haut degré de confiance de leur hiérarchie concernant leur pouvoir de
décision. Chacun est jugé apte à bénéficier à conduire un travail indépendant
en matière de gestion de budget et de temps dans la droite ligne, bien sûr, des
recommandations de sa hiérarchie.
Le facteur clé de l'épanouissement des commerciaux est leur aptitude à
comprendre les implications stratégiques de leurs actions, aptitude alliée à de
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 38
© OVSM - 2003
fortes habiletés de communication et à des compétences analytiques de tout
premier plan. Ceci étant, P & G s'attache à promouvoir les carrières en interne
de ses collaborateurs et à ne pas recruter à l'extérieur des managers pour des
postes de direction.
D - Les challenges du futur
Le pouvoir croissant des distributeurs conduit à une ambiguïté quant au rôle
futur de la vente chez P & G. En effet les distributeurs ayant leurs propres
marque et le pouvoir de les faire vivre vu leur concentration, ils se trouvent être
à la fois des clients et des concurrents de tous les fabricants de produits de
grande consommation. Ainsi, lorsque les équipes de ventes de P & G
"donnent" une partie de leur savoir-faire marketing à ces distributeurs, elles leur
donnent également des outils d'autonomie pour se développer dans le futur.
A cause de cette place stratégique occupée par les équipes de ventes de P &
G, les individus ressentent bien le caractère incertain de l'avenir. Mais
s'agissant d'un fait, les personnes interrogées soit font confiance à leur
hiérarchie, soit acceptent avec fatalité les changements encore à venir.
La mise en œuvre des mutations
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 40
© OVSM - 2003
5. La mise en œuvre des mutations Lors des travaux en sous-groupes qui se sont déroulés durant la journée de
validation du 26 juin 2003, les participants devaient choisir de traiter des
questions qui leur semblaient les plus importantes et urgentes d'aborder dans
le contexte de crise et de changements actuels. Ces questions étaient issues
de l'analyse de contenu des précédentes synthèses.
5.1 L'espace de vente de l'entreprise Les questions qui ont servi de guide de réflexion étaient les suivantes : La
vente restera-t-elle une vitrine de l'entreprise ? La vente se situera-t-elle
entièrement dans l'espace du CRM ? Le management occupera-t-il une place
prépondérante dans la vente ? La complexification des tâches de la vente va-
t-elle se poursuivre ? Etc.
La vente telle que conçue autrefois comme le dernier maillon d'une chaîne,
maillon en relation directe avec le client s'est déjà profondément modifiée. La
nature des produits qui se complexifie dans un contexte de concurrence
mondialisée, des clients de en plus exigeants ainsi que la pression financière
interne, ont entraîné une croissance des organisations. L'aspect relationnel et
les qualités de communication ont été mis en veilleuse par rapport à
l'importance des décisions stratégiques. Mais la vente a évolué dans des
directions différentes.
Dans certaines entreprises, telles que Caterpillar, le métier de vendeur
classique tend à disparaître pour être remplacé par un métier de manager
auprès du client. Son rôle va être d'agir en consultant pour l'aider à améliorer
ses performances et l'aider à gérer, au besoin, les vendeurs qui seront en
contact direct avec sa clientèle. Les différentes dimensions de la vente seront
par exemple, la vente spécifique, la promotion de la marque, le CRM, etc. Ce
type de vendeur sera un entrepreneur doté d'un solide sens managérial.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 41
© OVSM - 2003
A contrario des entreprises de services, telles que l'UBS, dont les commerciaux
ont toujours été des conseillers doivent maintenant apprendre le métier
traditionnel de la vente qui comporte des activités soutenues de prospection,
de suivi de la clientèle, de la vente de produits spéciaux, etc. Les outils actuels,
tels le CRM, introduisent de nouvelles pratiques de la vente et une mentalité de
vendeurs chez les conseillers de clientèle. Ces outils offrent aussi l'opportunité
de pouvoir garantir une qualité de conseils et de vente quasi similaire entre les
vendeurs grâce, notamment, au partage des connaissances qu'ils impliquent.
A l'autre extrémité, la vente de contact avec des consommateurs finaux dans le
cadre du B to C, comme à Migros par exemple, ne subit pas de mutation
puisqu'il s'agit surtout de répondre aux besoins identiques et non véritablement
différenciés des consommateurs. C'est davantage le point de vue d'un
marketing expérientiel qu'il s'agira de développer dans ce cas.
Le cas particulier de la Suisse tempère sans doute nos observations. Ainsi, la
marque n'est peut-être pas un vecteur de relation aussi solide que dans
d'autres pays. Il semble que, dans notre pays, la relation de personne à
personne soit fondamentale et la puissance des réseaux personnels
incontournable. Ce qui donne au vendeur une autre dimension : la relation de
personne à personne est toujours très présente en Suisse avec le risque, en
cas de départ du vendeur de l'entreprise, de départ simultané du client.
5.2 Les temps de la vente
Les questions qui ont servi de guide de réflexion étaient les suivantes : Sur
quel "temps de référence" seront établis les objectifs et la rémunération des
vendeurs ? Ces objectifs de vente pourront-ils être clairs ? L'usage du temps
des vendeurs se modifiera t- il ? Comment conciliera-t-on gestion de la relation
à long terme et objectifs de vente à court terme ? Etc.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 42
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De l'avis de tous, la vente n'est pas le moteur de l'entreprise car ce moteur
restera toujours l'innovation et l'aptitude à anticiper les besoins du marché.
Mais la vente est la courroie de transmission par laquelle les concepts de
produits et services prennent leurs formes en se frottant au contact permanent
de la clientèle. Toute la dynamique de l'évolution des produits et des services
existe donc au travers de la fonction vente.
Toutefois, la réconciliation des buts à long terme que l'on fixe aux vendeurs et
l'exigence de réalisations à court terme semble difficile à réaliser.
Le temps des vendeurs reste le court terme, dans la mesure où les objectifs de
vente sont fixés pour des périodes mensuelles ou trimestrielles. Cependant, on
leur demande en parallèle de développer des relations à long terme avec le
client afin de le fidéliser. Les vendeurs apprennent ainsi à prendre le temps de
développer des réseaux pour l'entreprise, réseaux susceptibles de s'enraciner
dans le temps. Cette double pression temporelle, du court terme pour remplir
les objectifs de vente et de long terme pour fidéliser les clients, est ennuyeuse
et parfois mal vécue par le vendeur.
Ajoutons que, pour certaines entreprises de notre échantillon, une véritable
angoisse est aujourd'hui présente. Par exemple, lors de notre précédente
enquête de 2002, notre échantillon comprenait Andersen Consulting qui
s'effondrait et H.P. qui venait de fusionner avec Compaq. Cette année Fiat est
parvenu jusqu'à notre travail de validation, mais ses responsables ne savaient
rien de leur avenir. L'appréhension du futur est devenue quotidienne chez tous,
dirigeants et vendeurs. Plus personne ne peut affirmer où il sera l'an prochain.
5.3 La mutation perçue et vécue Les questions qui ont servi de guide de réflexions étaient les suivantes : Les
vendeurs seront-ils intégrés aux prises de décisions stratégiques ? La vente
est-elle initiatrice et actrice du changement ? Le partenariat avec le client sera-
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© OVSM - 2003
t-il l'élément clé du changement ? Y aura-t-il encore modification du
comportement du client ? Le code de conduite éthique sera-t-il un ciment
collectif ou simple vœux pieux ou prévention contre le risque éventuel ? Les
TIC modifieront-elles la circulation de l’information ?Etc.
Le client change et l'entreprise doit obligatoirement s'y adapter. Les termes de
partenariat, de confiance, de valeur-ajoutée au client, etc., sont encore à la
mode. Toutefois, les experts validant les résultats ont constaté que, s'ils restent
importants, c'est le pragmatisme et l'efficacité commerciale qui priment. Le
partenariat ne doit pas être un vœu pieu, mais un intérêt fonctionnel partagé.
Il semblerait primordial, dans ces grandes entreprises mondialisées, de ne pas
confondre la mission et la fonction de la vente avec son rôle spécifique dans le
contexte où elle se déroule. Selon le contexte culturel et économique, en effet,
le rôle qu'endosse chacun des vendeurs sera tout à fait différent. Certains
contextes demeurent attachés à leurs traditions commerciales, d'autres sont
totalement transnationaux. Par exemple un vendeur de la grande
consommation n'aura pas du tout le même rôle en Suisse que dans un pays
asiatique. Une montre Baume & Mercier ne s'achète pas de la même manière
à Genève et à New York. Pourtant, il semble parfois, que les hautes directions
mondiales réclament une standardisation des processus de vente en ignorant
ce poids du contexte de travail sur le rôle d'interface rempli par les services
commerciaux.
Une autre mutation est jugée capitale par les membres de notre panel : l'impact
des TIC sur l'exercice du métier. Grâce ou à cause de ce type d'outils, le
vendeur traditionnellement indépendant, peut être en relation constante avec
son entreprise et se sentir moins isolé qu'il l'était auparavant. Les TIC peuvent
également lui procurer une plus grande autonomie car en cas de besoin, le
vendeur peut parfois recourir aux ressources de l'Intranet ce qui lui évite de
dépendre aussi souvent des conseils de sa hiérarchie. Néanmoins, les TIC ont
des conséquences différentes selon les différents profils des vendeurs, certains
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 44
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s'y adaptant parfaitement, d'autres avec davantage de réticence. Notons que la
surabondance d'informations provoquée par la mise en œuvre des TIC appelle
des ajustements organisationnels indispensables afin d'en canaliser les
énergies et de limiter les pertes de temps de recherche des utilisateurs.
Chaque entreprise de notre panel avait un vocabulaire spécifique pour nommer
ses vendeurs, ce qui illustre à quel point le métier de vendeur évolue dans tous
les secteurs. Le nombre de vendeurs a considérablement diminué, et les
commerciaux n'ont souvent pas d'autre choix que de se transformer en
gestionnaire ou de quitter l'entreprise pour exercer leurs compétences dans
d'autres contextes.
5.4 La personne, l'homme
Les questions qui ont servi de guide de réflexion étaient les suivantes : Verra-t-
on disparaître le métier de vendeur ? Comment l'homme supportera-t-il le
stress lié aux mutations de son métier ? Du preneur d’ordre au conseiller : tous
en seront-ils capables ? Quelle carrière dans un monde en mutation et pour
quelle rémunération ? Etc.
Ce qui ne changera jamais, semble-t-il, est que le vendeur par son contact
permanent avec le terrain est une personne fragile avec un grand ego et qui a
besoin d'être entouré. Il a besoin de clarté cognitive, besoin de comprendre des
objectifs clairs et précis, envie de déchiffrer la récompense tangible qui leur est
attachée.
Le responsable des ventes est appelé à devenir un chef d'orchestre assumant
à la fois une tâche de coaching et d'organisation. C'est aussi un intermédiaire
entre une certaine pression mise par la hiérarchie et les besoins du terrain,
notamment de la clientèle.
Observatoire de Vente et Stratégies du Marketing 45
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Afin que le vendeur puisse ne pas subir trop de pression psychologique quant à
son avenir professionnel, trois types d'actions devraient sans doute être
favorisés :
• Il devrait avoir un accès permanent et direct à un "coach" qui resterait celui
qui sait expliquer, traduire les décisions de la stratégie en objectifs clairs pour
les vendeurs devant se les approprier.
• Il devrait dès son entrée en entreprise être mis en relation avec un mentor, un
aîné qui saurait le conseiller aux phases critiques de ses choix de carrière. Ce
mentor ne devrait pas avoir de liens hiérarchiques ou fonctionnels mais
réellement jouer un rôle de guide spirituel.
• Il devrait, enfin, être incité à développer un réseau personnel de
connaissances. Il faut cesser de croire que ce type de réseau peut induire un
plus grand turn-over. Ces réseaux professionnels peuvent aider l'individu à se
sentir plus à l'aise dans ses choix professionnels, plus apte à quitter l'entreprise
quand il n'y a réellement plus sa place et à trouver son équilibre personnel
ailleurs. Tout le monde y gagne en fin de compte.
Conclusion
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6. Conclusion
Au terme de cette recherche nous avons considéré la manière dont les
mutations de métiers sont vécues par les entreprises.
Notre travail de recherche sur le terrain, et la journée de validation par les
dirigeants d'entreprise, ont permis de comprendre quel était finalement le
ressort de ces mutations en cours ; que ces mutations soient dans les
entreprises ou dans leur environnement, au niveau macro comme au niveau
micro, dans la réflexion comme dans la mise en œuvre. Ce ressort de "la"
mutation repose sur un changement de vision.
Contrairement à ce que nous avancions comme hypothèse l'année passée, la
mutation ne semble pas être la résultante des modifications qui se produisent
sur le terrain. Il semble que ce soit la puissance des raisons financières semble
bien imposer à l'entreprise, et à chacun de ses acteurs, des exigences de
résultats. Pour rencontrer des objectifs de croissance, les résultats de vente
sont poussés aux limites de l'éthique et de la déontologie. Ventes accélérées,
ventes anticipées, par exemple, sont le lot de ceux qui acceptent le diktat des
résultats trimestriels.
La vente, dernier bastion de l'entreprise et qui focalise toutes les critiques, n'est
pas responsable de cette pression accrue. Elle n'est pas un métier moins noble
ou moins éthique que tous les autres métiers de l'entreprise qui participent à
cette course à la croissante pour que perdure cet ordre économique actuel. Si
la bourse est la seule mesure de performance, alors il n'est pas étonnant que la
direction stratégique mette sa pression sur la direction des ventes, qui elle
même exige toujours plus de ses vendeurs. Peut-être faudrait-il refuser le jeu
de la cotation boursière pour éviter cette tyrannie du court terme lié au résultat?
De la multitude des métiers qui ont "enrichi" celui des vendeurs, on retient
l'idée de ce paradoxe entre une exigence de performance à court terme et de
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compréhension de la stratégie à long terme de politiques de marketing
relationnel. Nous avons vu l'expression d'une certaine souffrance chez ces
hommes et ces femmes à qui l'on demande de réaliser toujours plus de chiffre
et/ou d'oublier leur métier de base de la vente pour devenir des gestionnaires.
Or le métier de vendeur, métier humain par excellence n'est pas remplaçable
par des interfaces électroniques. Être vendeur, c'est assumer la mission de
supporter la relation établie entre êtres humains en vue de concrétiser la
fonction d'établir un contrat par lequel il y a changement de propriété d'un bien
ou service. Et, à ce titre le Directeur Général de l'entreprise est aussi un
vendeur ; s'il assume cette mission et cette fonction.
La conviction de tous ceux qui ont participé aux travaux présentés dans ce
document est que c'est dans un travail de validation croisée comme ceux que
mènent ensemble chercheurs, responsables d'entreprise, gens des media et
étudiants qu'un sens prudent -, mais authentique - doit être donné aux
mutations actuelles des métiers, en particulier celle touchant au métier de
vendeur. Si on n'ajoute pas très vite à la mesure quantifiée du chiffre de vente
ou du bénéfice, celui de la raison sociale et de l'éthique, alors des
débordements inévitables, quelle que soit l'entreprise et ses chartes
déontologiques.
Annexe
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Méthodologie détaillée
Note technique
Les méthodes de recherche traditionnelles du monde académique sont pour la
plupart inadaptées au problème de la prospective stratégique. Que l’on cherche
les facteurs de succès des entreprises pour proposer aux dirigeants des actions
possibles ou que l’on observe la manière dont les patrons prennent des
décisions pour proposer des descriptions qui seront éventuellement utiles à
d’autres dirigeants, le problème du temps séquentiel reste posé. En effet, entre
le moment où les observations empiriques sont effectuées et celui où des
propositions peuvent être faites le temps s'est écoulé. Les dirigeants ont pris de
nombreuses décisions et ont agi, faisant par leur action évoluer l’environnement
économique et social, rendant obsolètes toutes les “recettes” qui peuvent leur
être proposées (32). Ainsi, la recherche académique, bien que donnant le jour à
des apports conceptuels très riches, demeure encore trop peu utilisable
directement dans l’entreprise (28).
Les recherches naturelles tentent de réconcilier les impératifs des responsables d’entreprise
ayant peu de temps à consacrer à la recherche et ceux des chercheurs souhaitant recueillir
des données riches de sens. Ce type de recherche réclame des échantillons de petite taille.
En effet la méthode (qu'elle soit de type ethnologique ou phénoménologique) doit permettre
l'émergence des “ lois ” ou de “ raisons ” sous-jacentes au phénomène.
La méthode prospective utilisée dans cette recherche (27) est fondée sur les
informations fournies par des experts, à l’instar des méthodes intuitives (ex.
méthode Delphi). On y progresse également vers une vision consensuelle de
divers experts. Mais notre méthode reconnaît également le rôle fondamental
des véritables acteurs de changement organisationnel et économique que sont
les participants. La taille exacte de l'échantillon dépend de l'équilibre recherché entre un
besoin de compréhension en profondeur du phénomène et un besoin de définition de bases
de comparaisons (31).
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- La première étape consiste à définir la "population mère". Ici il s'agit de
l'échantillon déjà constitué des fondateurs de l'OVSM choisis pour la
complémentarité des secteurs représentés et leur non-concurrence.
- La seconde étape consiste à déterminer la taille de l'échantillon. Il s’agit ici
d’obtenir un nombre de propositions suffisant pour se prêter aux analyses, mais pas trop
important pour ne pas perdre en représentativité qualitative ce qui serait gagné en
représentativité strictement numérique. Un nombre d’experts entre quinze et vingt s’est
avéré, à l’expérience, adapté au type de réflexion prospective conduite.
- La troisième étape consiste à choisir les critères de sélection des interviewés. Ici Nous
avons retenu comme critères a priori de différenciation/segmentation de
personnes situées dans la vente au contact direct de la clientèle.
Dans une étude "naturelle", le chercheur n'est jamais totalement actif ou passif,
puisqu'il est partie intégrante de la recherche au niveau du recueil de données
et de leur analyse (33). Il s'efforce d'être le plus neutre possible. Ainsi les
questions posées sont toujours ouvertes pour permettre aux répondants un
maximum de liberté. Dans le cadre de cette étude, l'entretien en profondeur
consiste à interroger des individus de manière structurée non dirigée.
- L'entretien est structuré car un questionnaire ouvert est préalablement défini
pour couvrir les différents thèmes que l'on désire aborder. Les entretiens
réalisés sont centrés sur quelques thèmes majeurs par rapport à l'objet de
recherche.
- L'entretien est non dirigé car l'interviewer laisse l'interviewé parler le plus
librement possible. L'ordre d'apparition des thèmes au cours de l'entretien
n'importe pas, car la personne interrogée doit avoir le maximum de latitude
pour exprimer ses raisons, motivations et attitudes. L'entretien non directif
permet donc, mieux que tout type d'entretien direct, l'émergence du contenu
socio-affectif profond qui relie le sujet interrogé à l'objet d'investigation.
L'analyse de contenu réalisée sur la base des écrits fournis par les experts participant à la
recherche différencie d'abord la structure globale des données, du contenu des documents
individuels afin de distinguer clairement cadre général et raisons particulières (30). L'étude
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des documents s'effectue ensuite par un mouvement dialectique qui permet au chercheur
de procéder alternativement par une analyse globale et des analyses spécifiques, de
dégager peu à peu le sens profond des messages, de comprendre la relation dynamique
des éléments relevés, puis de vérifier la validité des résultats en revenant à la structure
descriptive de base (29).
- La première analyse a pour objectif de dégager une vision collective et
d'étudier les dimensions structurelles sur lesquelles s’appuie cette vision
commune (25). Dans un premier temps, les réponses aux questions sont
regroupées thématiquement. A ce stade la vision des raisons individuelles
est perdue, puisqu'il s'agit d'induire une structure commune à tous les
acteurs. Les réponses sont ensuite formellement codifiées, de manière à
permettre la formulation d'un discours (ou photographie factuelle) sur la
base du consensus le plus large. Pour éviter les biais idiosyncratiques,
l'analyse à été effectuée par deux étudiants-chercheurs qui ont analysé
indépendamment les données puis, ensuite seulement, ont comparé leurs
résultats.
- L'analyse se poursuit par la recherche de propositions structurelles sur
lesquelles s’articulent les thèmes généraux découverts. Pour chacune de
ces propositions induites de l'analyse les documents écrits individuels sont
regroupés de façon à obtenir une vue d'ensemble de l'échantillon d’experts.
Chaque thème est ainsi analysé indépendamment et des définitions
génériques en sont induites. Ces définitions proviennent des significations
majeures observées chez les individus. Pour chaque définition, la question
suivante se pose : sommes-nous sûrs que les termes choisis sont à la fois
représentatifs des opinions de tous et assez nuancés ? Les documents
individuels sont donc relus pour effectuer ce contrôle. Il est parfois
nécessaire de modifier complètement une définition, lorsque son pouvoir de
compréhension se révèle faible.
Dans toute étude qui se respecte, il faut procéder à une mesure de validation
des résultats avant de rédiger le texte définitif. A fortiori avec les méthodes
qualitatives toujours suspectées d'être trop "subjectives". Nous avons procédé
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par "members-checks" afin de nous assurer que le moins possible de biais
d'interview et de biais d'analyse ont été introduits (26). Il s'agit d'une "mesure"
de fiabilité des données.
- Ici, on va envoyer les portraits individuels aux personnes interrogées en leur
précisant que "ceci est une synthèse réalisée à partir de leurs propos" et en
leur posant cinq questions simples par écrit ("Pensez-vous que le portrait
que vous venez de lire soit fidèle à vos propos ? Y a-t-il des points dans la
synthèse suivante que vous voudriez modifier ? Y a-t-il des points que nous
n'avons pas mentionnés et que vous pensez utile de préciser ? Y a-t-il des
points auxquels nous avons accordé trop d'importance ? Si d'autres
personnes que nous avaient réalisé l'entretien, le contenu de vos réponses
aurait-il été différent ?")
- Sur la base des réponses reçues, on modifiera, éventuellement, le portrait
qui servira désormais de base de recherche.
L’étape suivante consiste à restituer ces définitions dans un discours se prêtant
aux discussions en groupe de focus est réalisé dans un langage adapté à celui
des experts (35 ; 36). Le travail en groupe de focus est connu depuis les
années ’50 pour ses vertus en manière d’engagement des membres vers
l’action. Mais la perspective d’une conduite dialectique de ses groupes
s’opposant à la recherche délibérée de coopération et de protection mutuelle
des membres est relativement récente.
- La méthode de discussion privilégiée dans notre approche est résolument
dialectique : il s’agit d’abord de susciter le maximum de divergences
d’opinion propices à induire une plus grande richesse d’opinions
individuelle, afin de détecter la plus grande richesse prospective possible.
- En séance plénière, la méthode de discussion utilisée est, par contre,
consensuelle. En réconciliant les analyses divergentes, il s'agit de définir un
modèle générique simplificateur mais non réductionniste propre à considérer
sans les gommer les différences entre entreprises et entre acteurs.
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De nombreux tests dans le domaine de la stratégie ont montré qu’un trop haut
degré de satisfaction individuelle (dû au respect des opinions individuelles)
pouvait affaiblir la qualité des recommandations et donner lieu à des
recommandations peu performantes en terme d’applicabilité (34). A l'issue du
travail collectif la satisfaction des experts-acteurs d'entreprise est toujours
extrêmement importante.
Références
(25) Belk, R. W., Sherry, J. F. and Wallendorf, M. (1988), “A Naturalistic Inquiry into
Buyer and Seller Behavior at a Swap Meet”, J. of Consumer Research, 14, No 4, 449-470.
(26) Bergadaà, M. (1990), The Role of Time in the Action of the Consumer, Journal of
Consumer Research, Vol. 17, n° 3, 289-302. (27) Bergadaà, M. (1998), Strategic Decisions and Implementation : PRODIN™, a
Prospective Dialectic Interpersonal Method, Journal of Business Research. (28) Bergadaà, M. et Thiétart, R.-A. (1990), “Experts s’abstenir” Harvard l’Expansion,
Eté, 98-105. (29) Churchill, S. D. et Wertz, F. J. (1985), “An Introduction to Phenomenology for
Consumer Research: Historical, Conceptual and Methodological Foundations”, Advances in Consumer Research, Vol. 12, 550-554.
(30) Garfinkel, H. (1967), Studies in Ethnomethodology, Prentice-Hall, Englewood Cliffs,
77-78. (31) Glaser, B. G. et Strauss, A. L. (1967),The Discovery of Grounded Theory:
Strategies for Qualitative Research, A. de Gruyter Ed., New York, 47-77. (32) Habermas, J. (1987), Theory of Communicative Action, Oxford: Polity Press. (33) Lincoln, Y. S. et Guba, E. G. (1985), Naturalistic Inquiry, Sage. (34) Mitroff, I. I., Emshoff, J. R., and Kilmann, R. H., (1979) Assumption Analysis: A
Methodology for Strategic Problem Solving, Management Science, vol. 25, no 5, 583-593.
(35) Morgan, D. L. (1988), Focus Groups as Qualitative Research, Qualitative Research
methods Series, Sage Publication. (36) Schweiger, D. M., Sandberg, W. R., and Ragan, J. C., (1986) Group Approaches for
Improving Strategic Decision Making: A Comparative Analysis of Dialectic Inquiry, Devil's Advocacy, and Consensus, Academy of management Journal, vol. 29, no 1, 51-71.
Contacts & renseignements
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