•••••
•
• ••••••
•••
APPRÉHENDER LA DIFFÉRENCE :ÉDUCATION INCLUSIVE
ET PROJETS EUROPÉENS
COMENIUS
Impact des projets scolaires Comenius sur les publics à besoins éducatifs spécifiques
Étude réalisée par Alexia SAMUELAgence Europe-Education-Formation-France
Bordeaux, juillet-août 2010
Sommaire
Introduction
L’année européenne 2010
Démarche
I) Adapter les structures d’apprentissage p. 9
A) Les programmes d’enseignement p. 9
Gérer la diversité des besoins et des acquis p. 9
L’adaptation des contenus : l’inclusion en milieu ordinaire
◘ La plus-value Comenius : l’indifférence face au stigmate p. 12
L’adaptation des supports d’apprentissage : l’accessibilité p. 13
◘ La plus-value Comenius : observer différents supports matériels p. 13
Des activités qui promeuvent la diversité p. 14
◘ La plus-value Comenius : la diversité intrinsèque p. 14
Elaborer des pratiques fédératrices p. 15
La dynamique des projets
◘ La plus-value Comenius : l’aspect ludique p. 15
L’interdépendance des élèves p. 16
◘ La plus-value Comenius : un premier rôle dans un projet européen p. 17
Un mode de communication adapté à tous les besoins : les NTICE p. 18
◘ La plus-value Comenius : la communication comme ciment du projet p. 18
Individualiser les trajectoires
La diversité comme une multitude d’individualités p. 20
◘ La plus-value Comenius : une personnalité, une réponse p. 21
Soutenir pour atténuer les inégalités p. 21
◘ La plus-value Comenius : réfléchir sur les ressources humaines p. 22
B) Les évaluations p. 23 Trouver une alternative plus équitable à l’évaluation classique
◘ La plus-value Comenius : l’évaluation plus originale p. 24
C) L’environnement d’apprentissage p. 24 Créer un espace interactif
◘ La plus-value Comenius : l’observation des salles de classe p. 25
2
II) Prendre en compte le développement personnel de l’enfant p. 25
Gérer le développement personnel de l’élève p. 26
Répondre à la problématique de l’estime de soi
◘ La plus-value Comenius : l’altérité banalisée p. 26
Inculquer les valeurs de l’inclusion p. 27
◘ La plus-value Comenius : une leçon de tolérance p. 27
Favoriser l’aspect relationnel entre élèves ; entre élèves et éducateurs p. 29
◘ La plus-value Comenius : vers une relation éducateurs/élèves moins formelle ? p.29
Gérer les troubles comportementaux p. 30
Contractualiser le comportement, rechercher la cause du mal-être
◘ La plus-value Comenius : différentes cultures, différentes normes p. 31
Gérer le développement professionnel p. 31
Accompagner le projet de vie, favoriser l’autonomie p. 31
◘ La plus-value Comenius : une réflexion commune sur le projet de vie p. 32
III) Former les enseignants p. 33
Enrichir la formation initiale et continue
Eduquer les jeunes, inspirer les anciens p. 33
◘ La plus-value Comenius : l’échange de pratiques, le maître-mot p. 34
Adopter l’éthique de l’éducation inclusive p. 35
◘ La plus-value Comenius : une émulation de principes inclusifs p. 36
IV) Coopérer p. 37
Coopérer pour une action concertée et une culture scolaire commune
Au sein de l’équipe pédagogique p. 37
◘ La plus-value Comenius : accroitre la coopération dans l’équipe éducative p. 38
Entre les établissements p. 39
◘ La plus-value Comenius : créer des réseaux, diffuser les bénéfices p. 39
Donner un rôle prépondérant aux familles p. 40
Valoriser l’éducation formelle
◘ La plus-value Comenius : impliquer les parents dans un projet valorisant p. 41
V) Restructurer l’établissement p. 43
Modifier l’architecture organisationnelle pour promouvoir l’éducation inclusive
◘ La plus-value Comenius : s’inspirer de la politique des établissements partenaires p. 44
Adopter et diffuser une politique de la diversité p. 44
◘ La plus-value Comenius : le volet européen du projet d’établissement p. 45
Associer les partenaires locaux p. 46
◘ La plus-value Comenius : insuffler une dynamique européenne régionale p. 46 Conclusion p. 49
Annexes pp. 50-60
Bibliographie p. 68
3
Introduction
Lorsque l’on parle de public à besoins éducatifs spécifiques, la terminologie est vague
et englobe un nombre considérable d’enfants en difficulté scolaire. Ainsi la Conférence
mondiale de l’UNESCO sur « l’Education et les besoins éducatifs spéciaux : accès et qualité »
en 1994 qui aboutira à la Déclaration de Salamanque peine-t-elle a définir le terme de manière
concise et s’exprime de la sorte : sont concernés « tous les enfants, quelles que soient leurs
caractéristiques particulières d'ordre physique, intellectuel, social, affectif, linguistique ou
autre. Elle devrait recevoir aussi bien les enfants handicapés que les surdoués, les enfants des
rues et ceux qui travaillent, les enfants des populations isolées ou nomades, ceux des
minorités linguistiques, ethniques ou culturelles ainsi que les enfants d'autres groupes
défavorisés ou marginalisés. […] Le terme "besoins éducatifs spéciaux" renvoie à tous les
enfants et adolescents dont les besoins découlent de handicaps ou de difficultés
d'apprentissage. »
La définition consensuelle mondiale n’est elle-même guère satisfaisante. Peut-on
catégoriser les enfants selon leur handicap ou leurs difficultés d’apprentissage ? Ces
difficultés ne sont-elles pas conséquentes au handicap et à d’autres sortes de stigmates ?
L’étude présente a tout d’abord été pensée dans une logique de problem-solving : quelles
réponses du système éducatif en général et du programme Comenius en particulier pour quels
profils d’enfants ? Il semble que ceux-ci peuvent être grossièrement catégorisés selon leur
handicap (physique : moteur ou sensoriel, cognitif : mental ou intellectuel) et leur origine
socio-culturelle (milieux défavorisés, immigration), qui eux-mêmes engendrent des difficultés
scolaires au niveau de l’apprentissage, des troubles du comportement et des troubles
psychologiques nuisant à leur développement personnel. Qui sommes-nous cependant pour
étiqueter les troubles, diagnostiquer leur origine et leurs conséquences ? Dans quelle case
devraient être « rangés » les polyhandicapés, les enfants souffrant de déficience à cause d’un
mauvais traitement familial ?
L’approche instinctive semblait bien archaïque après réflexion mais, à vrai dire en
France et ailleurs en Europe, pas si lointaine dans le temps. Identifier le stigmate de l’élève et
doter notre Education Nationale d’une mission salvatrice, quasi-messianique. Cloisonner et
ségréguer les cursus pour une évolution optimale de ces élèves « spéciaux ». Soigner et guérir
dans une démarche sociétale plus proche du processus médical que des problématiques
d’inclusion. Conséquemment, l’effet pervers de cette prise en charge individualisée induit
plus d’exclusion sociale (thème de cette Année Européenne 2010) puisque la réponse donnée
par le système éducatif à la diversité des élèves pendant des décennies n’a peut-être pas été la
bonne, ou du moins n’a pas engendré une société inclusive. Un système d’éducation inclusif,
dont les institutions internationales redécouvrent depuis quelques années les bienfaits
idéologiques, ne raisonne pas en considérant l’élève comme un problème à résoudre,
indépendamment de la classe et de la structure. Il considère que le problème est là où la
structure ne sait pas répondre à la diversité des besoins de l’enfant, quels qu’ils soient, en
admettant que chacun se retrouve à un moment ou à un autre de sa scolarité confronté à des
difficultés d’apprentissage pour une multiplicité de raisons qu’il n’est pas nécessaire de
catégoriser.
4
P. NICOLON : « Pour moi, un élève à besoins spécifiques, c’est un élève de sixième de 1m10
qui va devoir vivre du jour au lendemain, lorsqu’ il entre dans cet établissement, avec un
élève de troisième d’1m80. Il y a des enfants qui souffrent d’anorexie, d’autres d’obésité, il y
a des garçons, des filles, des blancs, des noirs, des gitans, des élèves qui courent vite,
d’autres qui ont des béquilles parce qu’ils sont handicapés moteur… Il y a les élèves qui
réussissent très bien leur scolarité, d’autres qui sont en difficulté, il y en a qu’on dit
handicapés… des différences comme cela, sur 282 élèves, je pourrais dire qu’il y en a 282. »
Ainsi les établissements spéciaux, les classes spéciales disparaissent progressivement
et les élèves sont disséminés dans les cursus classiques sous l’appellation « intégration en
milieu ordinaire ». La loi « pour l’égalité des droits et des chances, pour la participation et
pour la citoyenneté des personnes handicapées » promulguée le 11 février 2005 en France
concrétise la volonté gouvernementale de leur rendre accessible tous les domaines de la vie
sociale, dont l’éducation. L’une des mesures phares : inverser la logique de scolarisation des
enfants handicapés en faisant de l’intégration en milieu ordinaire la règle et non plus
l’exception. D’aucuns diront qu’il s’agit d’une véritable révolution de l’enseignement où la
différence bénéficie enfin de la considération dont elle a besoin pour s’épanouir (nouveaux
dispositifs Ulis en 2010) ; d’autres d’un manque de moyens toujours croissant qui jette les
élèves à besoins spécifiques dans le bain de la vie réelle sans plus d’adaptations
supplémentaires de la part du système. Si notre objectif n’est sûrement pas de trancher ce
débat, nous présenterons les points de vue successifs de la part des intervenants de l’éducation
interrogés.
Cette loi est un bon exemple de la démarche d’éducation inclusive vers laquelle
s’oriente aujourd’hui beaucoup de pays européens, dont la France. Un tel changement de
conception du système éducatif ne concerne pas seulement le décloisonnement des formations
mais également le contenu et la forme de l’apprentissage, une formation et une concertation
accrue des acteurs de l’éducation formelle et informelle, un environnement propice à
l’inclusion et un changement des mentalités. L’accès à l’éducation pour les publics à besoins
spécifiques tels que nous les mentionnerons ci-après, ou disons les publics ayant des besoins
plus importants que les autres enfants, ne suffit pas : encore faut-il que cette éducation soit de
qualité. Les mauvaises orientations et le décrochage scolaire représentent toujours un lourd
problème à éradiquer partout en Europe et les méthodes doivent désormais s’adapter à
l’enfant, non l’inverse, pour que l’on puisse parler véritablement d’inclusion et non
simplement d’intégration.
Les projets Comenius, de par leur diversité intrinsèque, constituent une plus-value
européenne qui s’inscrit dans cette démarche qualitative pour les cursus. Parties intégrantes du
programme pour l’éducation et la formation tout au long de la vie de la Communauté
européenne lancé en 2007, ils ont notamment pour objectif de promouvoir la coopération et la
mobilité et de renforcer la dimension européenne de l’éducation. Englobant la totalité des
actions de ce type entre les écoles et leurs enseignants en Europe, de la maternelle au lycée, le
programme a pour objectif l’implication de trois millions d’élèves sur la période 2007-2013.
Si l’éducation inclusive a vocation à reprendre les piliers de l’éducation du XXIe
siècle définis par la communauté internationale, à savoir l’acquisition du savoir et du savoir-
être, le programme Comenius remplit pleinement ces missions. Ainsi l’échange de pratiques
entre enseignants, les activités proposées aux élèves (intrinsèquement liées aux compétences-
clés) construisent-ils le savoir. Les mobilités, le contact avec les homologues étrangers
5
toujours plus diversifiés favorisent-ils l’acquisition d’un véritable « savoir-être » citoyen
européen.
Cette étude a été commandée par l’Agence 2e2f parmi les actions réalisées pour
l’Année Européenne 2010 de la Lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. La
problématique de départ portait sur les bénéfices potentiels des projets Comenius pour les
publics à besoins spécifiques. Elle porte donc sur le rappel dans les grandes lignes de ce
que pourrait être un système éducatif idéalement inclusif en supposant que les projets
Comenius y apportent une plus-value non négligeable. Elle ne se prétend nullement
exhaustive ni dictatrice de normes en matière d’éducation mais tente de percevoir l’apport de
ce type de projets pour les élèves, leurs enseignants et leur établissement en général. Etant
limitée dans ses ressources temporelles, financières et académiques, l’étude n’aspire pas non
plus à une vocation scientifique mais ne constitue qu’un camaïeu de projets menés à bien par
divers enseignants français dans des établissements pour « publics à besoins spécifiques »
(voir la liste en annexe), l’auteure espérant qu’il puisse inspirer nombre de structures du
même type à concrétiser des expériences européennes aux bénéfices inestimables pour toute
la communauté éducative.
Photo de couverture : « Les oursons voyagent », projet « Différents mais égaux » auquel participe Nathalie
BRUINAUD de l’école élémentaire Pierre et Marie Curie de Confolens (16) ; photo extraite du site web de
l’école partenaire de Windmill, Irlande du Nord
6
L’année européenne 2010
Depuis 1983, le Parlement européen et le
Conseil de l’Union Européenne (Conseil des Ministres)
orchestrent conjointement la mise en place de l’Année
européenne pour donner l’impulsion politique nécessaire à
la réalisation des grands défis que l’Europe se doit de relever
aujourd’hui. L’année 2010 est placée sous le signe de la
« Lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale » dans
l’optique de sensibiliser les gouvernements des Etats-membres
et les citoyens européens à la marginalisation de certains
groupes d’individus et de les faire réfléchir sur la manière d’y
remédier, au niveau institutionnel et au sein de la société
civile.
Doté d’un budget de dix-sept millions d’euros, le projet annuel s’inscrit parmi les
réponses apportées à la lourde crise économique de 2008 dont les répercussions se firent plus
particulièrement sentir pour 13,2% de la population française (2006), victime de pauvreté.
Les jeunes sont parmi les plus durement touchés par l’exclusion sociale et le domaine de
l’éducation compte, à titre d’exemple, 11,8% de jeunes présentant des difficultés de lecture et
12% sortant du système scolaire avec un faible niveau d’études (2008).
Lancée officiellement le 18 février 2010 par Martin Hirsch avec la bienveillance de son
ambassadeur François Soulage, président du Secours Catholique, l’Année Européenne 2010
est placée sous la tutelle conjointe des ministères du Travail, de la Famille, de la Ville, des
Relations sociales et de la Solidarité. Son comité de pilotage s’appuie sur le CNLE (Conseil
national des politiques de Lutte contre la Pauvreté) et l’ONPES (Observatoire National de la
Pauvreté et de l’Exclusion Sociale) et son exécution est prise en charge par la DGAS
(direction générale des affaires sociales) et l’ASP (agence de services et de paiement).
Axée en France sur les parcours d’insertion, la citoyenneté et la gouvernance territoriale,
l’Année Européenne se veut concrète sous un gouvernement qui souhaite avant tout garantir
l’accès de chacun aux droits fondamentaux, répondre plus rapidement aux urgences
sociales et entretenir une logique de prévention à plus long-terme – ce, en mobilisant tous
les acteurs européens de l’institution au citoyen et en routinisant les pratiques
de benchmarking .
Douze ans après la loi d’orientation française relative à la lutte contre l’exclusion
(1998), l’Année européenne 2010 dont le thème a été convenu sous la Présidence Française de
l’Union Européenne insuffle un regain d’activité politique en matière d’intégration sociale
dont 7,9 millions de citoyens français ont besoin.
7
Démarche
L’étude qui suit s’est basée sur la lecture de nombreux rapports nationaux et
internationaux des acteurs de l’éducation formelle et informelle (institutions internationales,
textes de lois, rapports d’associations, synthèses de conférences…). Suite à ce temps de
familiarisation au sujet, les publics à interroger pour donner corps et authenticité à l’étude ont
été ciblés dans la base de données des projets Comenius de l’Agence 2e2f selon le thème
abordé, en privilégiant ceux qui traitaient d’inclusion sociale et des thématiques connexes
(majoritairement des projets de partenariats multilatéraux). Puis deux questionnaires ont été
élaborés : le premier à renvoyer par email à l’Agence et le second destiné aux entretiens au
sein-même de la structure visée. Les deux questionnaires traitaient essentiellement des mêmes
sujets, plus approfondis en entretien, à savoir le quotidien dans les établissements (profils
d’élèves, méthodes pédagogiques…) et le déroulement du projet Comenius engendré
(activités, apport…). Cinq entretiens ont été organisés en juin et juillet 2010 dans les
académies de Nantes, Poitiers et Bordeaux. Sept enseignants ont retourné le questionnaire par
email.
Si les intervenants sont peu nombreux, le public dont ils ont la charge est représentatif
des besoins éducatifs spécifiques visés par cette étude. Les établissements et classes évoqués
ci-après (CLIS, UPI, SEGPA, RSS, lycées professionnels, établissements-ressources…) sont
tous confrontés à la diversité, qu’il s’agisse d’enfants déficients, venant d’un milieu difficile,
ayant des troubles psychologiques ou comportementaux… Voici les premiers extraits de
témoignage des porteurs de projet Comenius interrogés au sujet du profil de leurs élèves :
Nicolas ROSSI : « Pratiquement tous nos élèves sont de milieux sociaux défavorisés. […]
Nous avons aussi des jeunes qui ont été victimes de maltraitances, d'autres qui vivent mal la
séparation de leurs parents, nous avons aussi parfois des jeunes sans papiers. »
Nadine HENO : « Ce sont des déficiences intellectuelles, innées ou acquises : nous avions pas
mal d’enfants qui avaient plutôt des déficiences socio-économiques, familiales, pas
exactement une déficience intellectuelle ou mentale telle qu’on l’entend mais petit à petit,
parce qu’ils avaient vécu des choses difficiles, parce qu’ils avaient été dans un milieu très peu
porteur, parce qu’ils avaient été abandonnés ou autre, ces enfants devenaient déficients. »
S’il est donc délicat pour l’équipe éducative d’identifier la raison exacte pour laquelle
leurs élèves ont besoin de plus d’attention que les autres, il est clair pour tous que la
différence de chacun ne doit pas être problématisée individuellement mais contextualisée dans
la dynamique d’un groupe hétérogène, aux capacités d’apprentissage variées et aux
sensibilités différentes. L’éducation inclusive représente pour ces enseignants confrontés à la
diversité l’évidence d’une approche globale, à travers une prise en charge centrée sur le
rythme, la perception, la sociabilité de chacun.
Un système inclusif ne se résume donc guère à l’adaptation du programme
d’enseignement classique mais également à ses supports, son évaluation et son environnement
(I). Et puisque le savoir ne peut se concevoir sans le savoir-être pour produire les membres
d’une société pleinement inclusive, le développement personnel est également l’une des
facettes essentielles de la formation de l’élève dont le système doit se préoccuper du bien-être,
des valeurs, de l’estime de soi, de l’autonomie… (II) Pour répondre à ces défis, il semble
indispensable que les acteurs de l’éducation qui encadrent ces élèves soient formés aux grands
8
principes de l’éducation inclusive, initialement et en continu. (III) Il ne s’agit cependant pas
de faire reposer l’intégralité du système sur les enseignants et la coopération avec le reste de
l’équipe éducative est indispensable, de même qu’avec les familles et les intervenants
extérieurs. (IV) Enfin, un système inclusif ne peut se concrétiser sans le soutien de la structure
d’accueil, à savoir la gouvernance de l’établissement qui constitue une véritable interface
entre la société et ses jeunes éléments et doit faire preuve de volontarisme politique en matière
d’inclusion sociale en son sein. (V)
I) Adapter les structures d’apprentissage
♫ Compétences-clés 1 à 4
La première mesure à laquelle on pense pour tendre vers un système éducatif inclusif
est bien sûr l’adaptation des structures d’apprentissage, à commencer par les contenus. Selon
le modèle souvent révolu des enseignements dispensés par les classes ou établissements
spécialisés, l’idée de se baser sur des contenus moins intenses demeure la norme pour la prise
en charge des élèves à besoins spécifiques et les obstacles de leur intégration dans les cursus
ordinaires n’en deviennent que plus grands. Pourtant, l’adaptation des programmes s’effectue
parfois simplement à l’aide d’activités qui promeuvent la diversité, démocratiques et ludiques.
Parfois également, le contenu peut s’avérer parfaitement abordable si le support de travail est
lui seul adapté, par exemple une méthode de communication propice à l’attention de tous. De
même l’adaptation de l’enseignement doit être conçue en parallèle avec une adaptation des
évaluations proposées aux élèves, sans oublier l’environnement de travail qui doit être propice
à l’évolution intellectuelle de l’élève. Sur tous ces aspects de l’apprentissage, le projet
Comenius est un atout de poids en ce qu’il constitue un support de travail original et inédit
pour les élèves, un environnement où ils peuvent tous apporter leur contribution créative en
sortant du carcan scolaire.
A) Les programmes d’enseignement
Gérer la diversité des besoins et des acquis
L’adaptation des contenus : l’inclusion en milieu ordinaire
En France, l’inclusion en milieu ordinaire n’est pas sans poser quelques difficultés
méthodologiques aux enseignants des cursus classiques confrontés à des élèves aux capacités
amoindries et aux enseignants spécialisés qui doivent désormais jongler avec des élèves
dispersés dans nombre d’établissements différents. La loi de 2005 mentionne entre autres
choses la création des Maisons Départementales pour les Personnes Handicapées (MDPH)
dont celle de Charente-Maritime où nous avons été reçus par Nadine HENO (ancienne
enseignante dans une CLIS aujourd’hui disparue), dont l’équipe pluridisciplinaire a été
chargée de plusieurs nouvelles missions par le législateur. Les MDPH n’ont pas cessé d’être
en relation avec les unités pédagogiques spécialisées dans les établissements, à la différence
près que ces dernières sont désormais créées selon un modèle d’enfants épars dans les classes,
comme l’UPI de l’établissement de Philippe NICOLON. Surtout, les établissements
9
spécialisés tels que celui de Philippe BELSEUR (Institut Montéclair pour jeunes déficients
visuels) sont devenus suite à cette loi des centres-ressources, mettant à disposition de ces
établissements classiques les moyens humains et matériels nécessaires pour accompagner les
élèves dans leur nouvel environnement.
Nadine HENO : « Je suis tout à fait pour ce système-là (celui de l’intégration dans les cursus
ordinaires), avec des limites ceci dit. Même s’il ne fait pas partie des cas très lourds, un
enfant qui a un déficit cognitif fatigue lorsqu’il est en classe ordinaire toute la journée.
L’enseignement n’est pas adapté et l’enseignant spécialisé ne peut pas être avec lui
constamment. Le principe du travail des enfants qui ont des déficiences, c’est de travailler
autrement, ce que l’enseignant ne peut pas faire véritablement quand on les place dans une
classe ordinaire. « Adapter » est le maître-mot et c’est très bien, mais il y a déjà plusieurs
groupes de niveaux dans la classe et l’enseignant doit non seulement s’adapter à cela mais
également à un enfant qui ne peut pas vraiment suivre le cursus. […] On ne peut pas
demander aux enseignants qui ont trente élèves dans la classe et un programme assez strict et
très lourd de faire quelque chose de vraiment intéressant et adapté aux enfants handicapés,
surtout lorsqu’il sont deux dans la classe avec des handicaps différents. »
Ainsi l’adaptation des programmes semble assez compromise dans la mesure où
l’enseignant fait déjà face à une classe largement hétérogène et ne dispose pas du temps
nécessaire pour élaborer un enseignement adéquat pour tous les besoins des élèves dont il a la
charge. « Adapter » semble demander une charge considérable de travail en amont lors de la
préparation du cours et une énergie non négligeable à fournir dans l’enceinte de la classe pour
capter et retenir l’attention des plus faibles. Certains établissements cependant comme celui
de P. NICOLON, devant les défis de l’élaboration d’un projet pédagogique pour ces enfants,
s’y attèlent et formalisent un programme individualisé qui doit être bâti selon des normes
précises pour favoriser la réussite et qui peut même s’avérer stimulant pour la prise en charge
des autres élèves en difficulté. C’est précisément le type d’émulation sur lequel l’éducation
inclusive doit s’appuyer : construire un programme plus personnalisé pour les élèves les plus
faibles et réaliser qu’il peut également s’appliquer à tous les autres, puisqu’il y a autant de
« besoins spécifiques » qu’il y a d’enfants.
P. NICOLON : « Le coordinateur de l’UPI fait des propositions aux collègues pour que
l’accueil en classe ordinaire se fasse le mieux possible, de manière progressive, parce qu’il
ne s’agit pas de lancer comme cela un élève handicapé dans le grand bain, sans précautions.
Il ne suffit pas de l’accueillir en classe ordinaire, il faut aussi s’occuper de lui ; donc nous
travaillons sur ses compétences, cela demande au professeur ordinaire de sortir de son cours
standard, pour pouvoir personnaliser, individualiser par rapport à cet élève. Nous verrons
que par la suite cela lui est très utile pour individualiser par rapport aux autres élèves en
difficulté qui ne relèvent pas de l’UPI. Sortir du cours standard, ce n’est déjà pas une mince
affaire pour le professeur. Quand c’est bien construit, précis, qu’il y a des objectifs
formalisés à travers un document, et quand il y a une communication régulière, permanente -
et c’est aussi l’avantage du petit établissement, on peut discuter de manière formelle mais
aussi informelle, très souvent – on peut tendre vers la réussite. »
Si donc la transformation des programmes semble encore être un processus
relativement délicat, elle semble pourtant être le pilier de l’éducation inclusive qu’il faut bâtir
avec acharnement. L’adaptation des apprentissages, comme l’explique ci-après P. NICOLON,
10
est précisément ce qui distingue l’intégration de l’inclusion. Dans un processus d’intégration,
l’enfant à besoins spécifiques doit effectuer lui-même la démarche d’adaptation requise pour
ingérer les informations diffusées et se socialiser, ce qui par ailleurs peut s’avérer intéressant
(bien que considérablement éprouvant), y compris parce que cela stimule les autres
élèves selon P. BELSEUR. Mais l’intégration, contrairement à l’inclusion, est une dynamique
trop unilatérale pour favoriser l’insertion véritable du jeune. L’inclusion, comme la loi de
2005 semble l’avoir fait comprendre aux établissements français, passe non seulement par
l’amélioration de la sociabilité des élèves mais également et avant tout par un accent sur
l’apprentissage, qui reste primordial.
Philippe BELSEUR : « L’intégration est une bonne chose parce que d’un côté, cela permet
aux jeunes de se confronter au milieu ordinaire, ce qui sera leur condition de vie lorsqu’ils
seront adultes. D’un autre côté, cela permet aussi à des jeunes sans déficience particulière de
se confronter au handicap et à la différence. En termes de tolérance, d’acceptation de l’autre,
c’est très important. […] Mais le milieu ordinaire est aussi forcément un peu « sauvage », il
n’y a pas de méchanceté mais il y a forcément l’absence d’un milieu protégé de la vie réelle.
La personne se confronte forcément à toutes les difficultés de l’intégration ordinaire. Donc
celle-ci est très bien mais l’on s’aperçoit en tant que centre-ressource aujourd’hui qu’il faut
un accompagnement qui permette au jeune de pouvoir intégrer tout ça, de gagner en
autonomie. »
P. NICOLON : « Dans le projet de l’UPI, on a vraiment voulu se distinguer de l’intégration.
On ne voulait pas que l’élève participe à la vie de classe, point final. On voulait vraiment que
l’objectif prioritaire, ce soit les apprentissages. Evidemment, la socialisation a une part
importante et on s’appuie dessus ; c’est pour cela que l’élève handicapé passe autant que
faire se peut du temps avec son groupe de référence. L’élève est dans une classe de sixième
par exemple qui le suit toute l’année. Peut-être qu’avant la loi de 2005, on aurait dit « on
intègre » pour qu’il soit avec son groupe d’âge, qu’il ait des copains, qu’il joue. Là on a
déplacé le curseur vers les apprentissages et on essaye de mettre en œuvre cette démarche
différente ».
Aucun enseignant spécialisé ne considère donc l’intégration en milieu ordinaire sans
accompagnement plus ou moins conséquent de l’élève pour procéder en douceur à sa plongée
dans un monde moins aseptisé que celui dont il avait l’habitude en établissement spécialisé.
Tous cependant reconnaissent que mêler ces enfants aux autres est une initiative importante
pour développer chez eux les capacités d’adaptation nécessaires à leur vie d’adulte et chez les
autres des valeurs inclusives telles que la tolérance. Les enseignants qui ont encore la
possibilité de moduler l’intégration en milieu ordinaire font preuve d’inventivité, comme
Nathalie BRUINAUD en école élémentaire avec sa classe de CLIS ; certains amoindrissent le
stigmate des élèves en les mêlant aux autres seulement lors des activités les plus ludiques et
les moins conventionnelles ; les échanges entre les élèves n’en sont que plus riches :
Nathalie BRUINAUD : « Ce que l’on a fait l’année dernière avec ma collègue de CLIS, c’est
du décloisonnement. Comme elle a un petit effectif, on a mélangé nos deux classes en faisant
deux groupes : elle prenait les enfants en arts plastiques et moi en informatique. Il y avait un
réel échange avec les enfants, c’était vraiment très enrichissant. Le but était de montrer aux
autres que les enfants de la CLIS étaient des enfants comme eux, qu’ils étaient aussi forts
qu’eux en arts ou en informatique. »
11
◘ La plus-value Comenius : l’indifférence face au stigmate
Ainsi l’inclusion des élèves à besoins spécifiques en milieu ordinaire, malgré toutes
les embûches qu’il faut surmonter, est un processus enrichissant pour tous les enfants qui leur
fait intégrer des valeurs égalitaires au sujet de la différence Dans cette continuité, le projet
Comenius a fait prendre conscience à certains porteurs de projets que le cloisonnement des
élèves à besoin spécifiques étouffait leur sociabilité et leur adaptabilité. Si le regroupement de
ces enfants s’avère bénéfique lorsqu’il est ponctuel pour qu’ils profitent encore parfois d’un
temps de récupération après l’immersion en milieu ordinaire, il engendre l’exclusion sociale
sur le long terme :
Nadine HENO : « Je pense qu’il faut vraiment aller dans le sens de l’intégration ordinaire.
Nous avons vu les deux extrêmes avec l’Italie où c’est toujours le cas et l’Allemagne dans une
école du Bade-Wurtemberg avec un institut très clos sur lui-même (cas particulier à ce Land-
là) où étaient regroupés des enfants qui avaient différents types de handicap ; c’était une
structure extrêmement bien équipée et subventionnée mais qui pratiquement n’incluait pas
d’enfants dans les classes ordinaires. […] Les Allemands avaient beaucoup de moyens, parce
qu’il y avait une grosse usine qui finançait l’établissement où étaient ces enfants. C’est aussi
un Land riche. Mais tout n’était pas rose car les enfants étaient trop repliés sur eux-mêmes.
Certains enseignants disaient même qu’ils ne pouvaient pas continuer comme ça, qu’ils
devaient aller en classe ordinaire. »
C’est justement ce qui fait la force des projets Comenius ; en élaborant les
questionnaires à l’adresse des acteurs éducatifs, l’hypothèse a été formulée que les partenaires
européens des français présenteraient un profil d’élèves relativement similaires au leur. L’on
en déduisait facilement que l’une des raisons principales pour lesquelles les établissements
spécialisés ne se lançaient pas dans le projet était que les homologues étaient trop difficiles à
trouver. Or il n’en est rien puisque certains porteurs de projets décrivent naturellement les
élèves de leurs partenaires comme totalement différents de leurs propres élèves :
Nathalie BRUINAUD : « Lorsque l’on parlait du handicap, on ne visait pas seulement la
CLIS mais aussi les élèves en grande difficulté. […] Ce projet était intéressant car les
collègues qui venaient de l’étranger avaient d’autres enfants en difficulté, d’autres types
d’enfants en quelque sorte. Nous avions une population de nomades, eux avaient plutôt des
enfants d’immigrés ou venant de milieux sociaux défavorisés. En Irlande du Nord, il y avait
des enfants de toutes confessions. »
Nicolas ROSSI : « Les Siciliens ont un public local, tout le monde est issu du même village
mais ils sont aussi beaucoup confrontés aux problématiques d’immigration. Les Allemands
ont un public handicapé, c'est assez lourd. Les Finlandais ont plutôt un public victime de
handicap social, psychologique. Les Tchèques ont un public tout à fait classique. »
Ce qui semble ainsi caractériser les projets Comenius montés dans ces établissements, c’est
donc leur cécité vis-à-vis des stigmates des élèves impliqués dans les partenariats. Peu
importe leurs besoins spécifiques pour les porteurs de projets qui ont mené à bien des
expériences tout à fait réussies avec une grande diversité de jeunes participants. Les projets
Comenius, qui valorisent par essence la différence, s’axent plus volontiers sur une diversité
culturelle, géographique, linguistique et amoindrissent l’hétérogénéité des élèves dont la
caractéristique première devient leur rôle d’ambassadeur national. L’étiquetage de longue date
des plus faibles est amenuisé, chacun apporte une contribution inédite au projet et la synergie
entre les élèves n’en est que meilleure.
12
L’adaptation des supports d’apprentissage : l’accessibilité
Pour que tous les élèves et surtout ceux ayant des besoins spécifiques puissent se
reconnaitre dans les activités proposées et y participer, il est nécessaire de s’attaquer non
seulement à l’adaptation des contenus mais aussi de leur forme, qui doit sortir de l’ordinaire et
constituer une alternative aux supports classiques d’enseignement. C’est ainsi que
fonctionnent au niveau matériel, bien sûr, P. BELSEUR avec ses jeunes aveugles mais aussi
N. HENO pour stimuler ses élèves de CLIS et même N. ROSSI dans son lycée professionnel,
sur un plan plus didactique, qui reconnait que sortir du carcan scolaire y compris dans la
forme est essentiel pour motiver les jeunes :
P. BELSEUR : « Globalement, il n’y a pas d’adaptation particulière du programme mais une
adaptation de l’environnement du jeune déficient visuel avec du matériel adéquat, de la
documentation en braille ou en gros caractères, l’accompagnement d’un enseignant
spécialisé dans les matières qui sont un peu plus difficiles pour le jeune comme les matières
scientifiques – ce qui va permettre à ces jeunes-là de pouvoir suivre comme les autres en
classe ordinaire. »
N. HENO : « J’avais aussi fait un projet sur l’écriture. Nous étions partis de l’origine de
l’écriture jusqu’à comment créer du papier. Nous avions utilisé des outils scripteurs
particuliers, nous avions commencé à écrire comme les anciens sur de la terre avec des
calames… »
N. ROSSI : « Nous mettons aussi en pratique les projets PPCP spécifiques aux lycées
professionnels (projet pluridisciplinaire à caractère professionnel). Deux semaines de l’année
sont banalisées en janvier et en mai sur un thème proposé aux jeunes de tous cursus réunis en
atelier de quinze. Puis un prof de cuisine va par exemple travailler avec une prof de français.
Nous n’avons pas l'habitude de travailler ensemble même si nous nous côtoyons beaucoup en
salle des profs. Si nous travaillons sur l'ouverture à l'Europe, nous allons organiser la venue
d'intervenants (du Conseil Régional par exemple), la réalisation d'expositions… Nous
produisons quelque chose de concret avec ces jeunes, et nous travaillons d'une manière
différente des autres jours. Nous sommes dans une grande salle, nous faisons du découpage,
des panneaux, nous mangeons ensemble...puis nous exposons nos travaux lors de la journée
de l’amitié de fin d’année. »
◘ La plus-value Comenius : observer différents supports
matériels
Une nouvelle fois sur le sujet des supports, c’est l’échange de pratiques et
d’observations qui fait comprendre à certains enseignants, comme Nathalie BRUINAUD,
qu’une amélioration de la forme sous laquelle sont présentés les enseignements peut décupler
les opportunités d’apprentissage. Si nous étudions ci-après le support d’enseignement ayant
davantage trait à la méthodologie, c’est bien l’aspect matériel d’une classe d’Irlande du Nord
qui frappe l’enseignante, constatant que les moyens financiers sont loin d’être attribués de la
même manière d’un pays à un autre :
N. BRUINAUD : « Au niveau pédagogique, l’aspect matériel était incroyable en Grande-
Bretagne. Ils avaient une salle informatique semblable à la nôtre mais eux bénéficiaient de sa
gestion constante par une personne compétente. Ainsi ils ont pu mettre en place un réseau
13
dans leur école, les enfants pouvaient jouir d’une vraie communication avec Internet sans
avoir de souci avec l’extérieur. Ils avaient aussi un tableau numérique dans toutes les classes
avec ses avantages : accès Internet, travail sur tableau blanc, vraie recherche en art visuel
avec les œuvres projetées sur le mur… »
Des activités qui promeuvent la diversité
Que les valeurs inclusives transparaissent ici dans les contenus ou dans la forme,
l’orientation clairement donnée dans les établissements cités semble être l’élaboration
d’activités qui font avec la diversité, et même la promeuvent. Certains se proposent d’axer
ouvertement le programme sur la valorisation d’une différence quelconque, comme N. HENO
avec les divers types d’écriture selon les civilisations. Il a déjà été vu cependant que ce type
d’initiative demeure particulièrement difficile pour les classes les plus âgées tant le
programme établi laisse peu de place à l’innovation à mesure que les élèves grandissent. Il
demeure ceci dit habile d’étayer un aspect des enseignements d’une leçon sur la diversité
selon le type de stigmate qui se trouve dans la classe :
N. HENO : « Pour le projet sur l’écriture, j’avais fait venir à l’école un enseignant marocain
pour nous montrer l’écriture arabe. C’était extraordinaire parce que j’avais un petit
marocain dans la classe. Cela l’avait beaucoup porté, lui qui avait plus de difficultés
socioculturelles que de déficiences, parce qu’il connaissait un peu d’arabe. Nous avions fait
venir un intervenant chinois pour l’écriture chinoise …cela nous permettait de voir du monde.
Du coup, ils ont voulu apprendre l’anglais ! Cela était très drôle parce que le français était
déjà un problème. Mais cela les motivait énormément. »
◘ La plus-value Comenius : la diversité intrinsèque L’intérêt des projets Comenius est bien sûr, une nouvelle fois, d’apporter leur pierre à
l’édifice de la promotion de la diversité que les enseignants essaient tant bien que mal
d’insérer dans leurs programmes. Les partenariats européens, s’ils demandent autant de temps
voire plus que la réflexion sur les possibilités d’étoffer les programmes pour les rendre plus
inclusifs, ont au moins l’avantage d’être approuvés par les structures productrices de normes
si strictes sur les enseignements. Comenius, c’est l’occasion légitime de construire un projet
valorisant la différence, voire complètement axé sur elle. Non seulement ces projets donnent
l’opportunité d’effacer l’étiquetage des enfants à besoins spécifiques et d’accentuer plutôt
leurs spécificités culturelles, mais ils permettent aussi de se familiariser avec l’altérité et de se
trouver des points communs ; autant de valeurs inclusives.
N. BRUINAUD : « Pour nous, ce qui était intéressant, c’était de montrer aux enfants que
nous étions certes habitants de pays différents mais que les écoles étaient semblables, que
l’on étudiait quasiment les mêmes matières, que l’on avait tous des frères et sœurs…des
choses qui peuvent paraitre évidentes pour quelqu’un qui a l’habitude de voyager. […] Ce
sont des choses qui les ont beaucoup intéressés parce que nous avons ramené des films et des
diaporamas après chaque voyage et les enfants voyaient que leurs homologues européens
s’amusaient dans la cour, jouaient au football, mangeaient à la cantine…nous avons donc
mis l’accent sur les ressemblances, mais aussi les différences comme les uniformes ou les
grands mouvements religieux en Irlande du Nord… {…] Ce qui m’a beaucoup plus, c’est
l’album photo des élèves « Différents mais égaux », à feuilleter dans les classes. Je trouve que
14
c’est important de montrer aux enfants que l’on fait tous partie d’une même planète. C’est
bien de le percevoir et de l’appliquer tous les jours avec les gens du voyage que l’on a ici.
Pour moi, c’était une évidence.
Elaborer des pratiques fédératrices
La dynamique des projets
Ainsi l’important dans une classe qui se veut inclusive est de promouvoir la diversité
mais aussi et surtout d’élaborer des pratiques fédératrices, pour que nul ne se sente délaissé et
que chacun ait conscience de sa ressemblance avec les autres, bien plus que du stigmate qui
les sépare. L’un des supports didactiques phares pour fédérer la classe et stimuler les élèves
semble être l’initiation de projets. Tout d’abord, travailler sous forme de projet permet bien
évidemment de faire s’atteler les élèves à leur tâche de manière plus ludique par rapport aux
méthodes d’enseignement classiques. Mais avant tout, le projet permet de lancer une
dynamique de groupe où le collectif est le maître-mot et où l’interdépendance des élèves est
renforcée par un but commun à atteindre. Le projet permet, dans le cas de N. HENO, de
donner du sens à l’apprentissage des compétences classiques et montrer aux enfants qu’ils
peuvent contextualiser leurs connaissances et les instrumentaliser. Pour N. ROSSI, c’est aussi
l’occasion de découvrir certaines valeurs comme la persévérance et la solidarité.
N. HENO : « Je ne travaillais pratiquement que sous la forme de projets. J’en définissais
deux ou trois pour l’année autour desquels j’articulais tous mes enseignements. C’était
extrêmement varié, par exemple ce projet de correspondance avec des écoles anglaises,
australiennes…qui s’appelait le « Potatoe Trap ». Cela permettait aux enfants de
communiquer avec les autres enfants. Il fallait mettre une pomme de terre dehors au
printemps dans un endroit humide et l’on photographiait les insectes qui y venaient, nous les
retrouvions sur un livre et nous faisions un montage photo-texte à échanger avec d’autres
pays. Les enfants apprenaient à lire et un peu à écrire. Là, la lecture prenait un sens. »
N. ROSSI : « Dernièrement, nous avons participé à un projet Lacoste : nous avons initié des
jeunes au tennis durant leur pause-déjeuner. Ils ont été à Roland Garros voir la finale. Nous
avons aussi participé au Trophée des Lycées, qui est une compétition de régates de bateaux à
voile à Vannes. Un certain panel de jeunes volontaires a été sélectionné pour des
entrainements tout au long de l’année. C'était dur car il fallait s'entrainer l'hiver ; ce sont des
jeunes qui ne sont pas très travailleurs donc il fallait les motiver pour partir affronter la mer,
le froid. A la vie scolaire, nous avons deux éducatrices très sportives qui mènent les jeunes
sur ces projets. Nous organisons aussi des journées sportives qui rassemblent tous nos jeunes.
Cette année, nous avons fait du char à voile. »
◘ La plus-value Comenius : l’aspect ludique
Privilégier l’aspect ludique et créatif semble être particulièrement stimulant pour les
élèves qui sont considérés comme ayant des besoins spécifiques lorsque l’on parle
d’éducation ordinaire. Les domaines moins orthodoxes comme les arts ou les sports sont
l’occasion pour ce type de profil d’exercer un talent qui est plus susceptible de relever de
15
l’inné que de l’acquis. Ce sont également des domaines où même les meilleurs élèves dans les
matières classiques ne peuvent pas toujours exceller et peuvent être surpassés. Bref, ce sont
les matières idéales pour valoriser les élèves différents et les plus faibles car elles font appel à
des compétences moins rebattues, plus subjectives, plus originales. Les projets Comenius
auxquels les élèves participent activement s’axent en général sur ces thèmes fédérateurs :
M. BOZEC (enseignante dans un Institut Médico-Educatif) : « Les constats de départ font
apparaître que les modes d’expression de nos jeunes ne favorisent pas la communication, la
valorisation et le sentiment de bien être. Il est apparu à l’équipe thérapeutique, éducative et
pédagogique que la médiation par les Arts plastiques serait l’outil idéal pour travailler avec
eux les difficultés repérées. Le geste créateur qui sollicite l’imaginaire, la pensée et les
émotions pourrait avoir un effet cathartique et thérapeutique. Nos élèves, à travers le projet
« Special artist through Europe », retrouvent donc un sentiment de bien être, d’estime de soi
car nous sommes dans la pédagogie de la réussite sans jugement. Ils peuvent exprimer leurs
émotions et leur plaisir de créer et de découvrir des matériaux nouveaux. Ils ont envie de
communiquer et d’exposer leur travail. De plus, ils sont reconnus par les autres à travers les
échanges dans l’établissement, dans les pays, ce qui leur apporte un grand enrichissement
culturel à travers les mobilités. »
P. ZANON : « On a préparé tous ensemble un grand jeu de Trivial Pursuit : ce n’était pas
une mince affaire. Puis on y a joué avec des équipes mixtes, pas seulement filles/garçons mais
aussi avec des nationalités différentes. Trois triangles car on avait trois pays, des cerceaux de
couleur, un lancement de dé pour faire avancer les élèves. S’ils échouaient à répondre à la
question – et ils devaient répondre en équipe, pas individuellement, pour les faire parler
anglais et communiquer – ils pouvaient se rattraper par une épreuve sportive. La rencontre
sportive est un lieu de socialisation et de communication particulièrement intéressant à
travers le sport, les passes, les règles à suivre et le jeu, puisque le sport, c’est ludique. C’est
vraiment un moment privilégié pour nouer des relations. Aujourd’hui le jeu est opérationnel
et prêt à être rejoué par plein de monde. »
D. POULAT (enseignant dans un collège doté de classes de consolidation) : Dans ces classes
de consolidation, les élèves sont très demandeurs d’activités « non purement scolaires ». Il
faut savoir détourner les apprentissages et trouver les moyens de faire passer les notions par
des projets pluridisciplinaires, des découvertes et qui utilisent les techniques modernes qui
sont les leurs : informatique, vidéo, numériques… Dans l’établissement une classe par niveau
regroupe ces élèves et la plupart de leurs enseignants sont volontaires pour ce genre de
travail. […] Pour l’établissement, il est important de pouvoir faire connaitre ce projet auprès
des parents et des écoles primaires qui nous envoient des élèves en 6ème
et montrer comment
on peut « travailler autrement ».
L’interdépendance des élèves
Plus que l’aspect ludique donc, ce qui est important dans la dynamique du projet (y
compris du projet Comenius) et la manière dont il crée une interdépendance du but chez les
élèves : il s’agit de définir une tâche commune à accomplir par la collectivité et de penser
ensemble aux défis que pose son achèvement. Cet exercice à lui-seul requiert une certaine
attitude sociable. Pour la réalisation du travail en lui-même, il est nécessaire de se répartir
équitablement le travail et de rassembler les élèves en groupes pour produire la synergie
adéquate à la productivité. Cette tâche éradique d’emblée les pratiques de cours magistrales,
16
vecteurs d’exclusion. Par contre, elle demande également une interdépendance en termes de
moyens et ressources disponibles pour la mettre en œuvre : il faut prendre en compte les
compétences et les savoirs de chacun, identifier de quelle manière ils seraient utiles au
groupe. Ainsi les élèves reconnaissent en chacun d’eux un élément indispensable à la bonne
marche du projet et identifient des talents jusque là insoupçonnés chez leurs camarades. Enfin,
l’interdépendance du mérite et de la reconnaissance après un projet réussi développe des
valeurs solidaires, pur produit de la dynamique de ce type de méthode de travail inclusive.
E. HUE (travaille au sein d’une équipe de maîtres E): « C’est une stratégie d’enseignement
efficace dans laquelle de petites équipes utilisent des techniques d’apprentissage en vue
d’améliorer leur compréhension et leur connaissance d’un sujet. Chaque membre d’une
équipe est responsable non seulement d’apprendre mais aussi d’aider ses coéquipiers à
apprendre, créant ainsi une atmosphère de réussite. Les élèves travaillent ensemble jusqu’à
ce que tous les membres du groupe réussissent. Il y a une interdépendance (ou interaction)
positive parmi les élèves car ils sont mis en situation de partager (la tâche, les outils, les
informations…) et ils ont des rôles différents (1 est secrétaire, 2 est dessinateur, 3 est
rapporteur…) […] On reconnaît et récompense les efforts de chacun. Ils sont ravis et
réclament ce type de séance (qui n’est pas automatique et convient mieux à certains groupes
d’élèves plus âgés), car c’est ludique, agréable, très cadré (gestion du temps et de l’espace),
et ils se sentent toujours valorisés malgré leurs difficultés. »
◘ La plus-value Comenius : un premier rôle dans un projet
européen
Dans un projet Comenius, l’interdépendance des rôles est d’autant plus importante que
tous les élèves qui se sentent plus faibles à l’ordinaire doivent participer concrètement à un
projet exceptionnellement valorisant. Un travail d’envergure européenne est encore
relativement inhabituel dans un établissement classique et se teinte forcément d’une
connotation positivement inédite susceptible de mettre en avant ceux qui se font moins
remarquer que les autres au quotidien pour leurs compétences. Faire partie d’un tel projet
gonfle de fierté ce profil d’élèves (et leurs parents) qui ont dès lors l’impression qu’ils sont
assez estimables pour contribuer à cette expérience de grande envergure.
N. ROSSI : « C'est une classe de vingt-deux élèves. Six sont partis en République Tchèque, six
autres partiront en Italie. Ils travaillent avec leur prof d'anglais sur les travaux qui sont mis
sur le blog. Quand ils sont à l'étranger, ils doivent tous les jours le compléter en français et
en anglais avec photos et textes. Certains vont participer au séminaire à Paris et ceux qui ne
se seront pas déplacés seront plutôt responsables des partenaires lorsqu’ils viendront ici.
Nous faisons en sorte que tout le monde participe concrètement. »
G. BADUFLE (enseigne dans une zone rurale où l’immigration est forte) : « Le but du projet
est de mettre en valeur des élèves du lycée professionnel socialement défavorisés. Ces élèves
se sentent souvent exclus du système scolaire et de la société. Ils vivent en zone rurale reculée
mais également dans des quartiers difficiles où se concentrent des populations d'origine
immigrée. […] Ils sont très fiers de participer à ce projet et se sentent valorisés. »
17
P. NICOLON : « Il ne fallait pas que les élèves participant à ces mobilités soient tous des
élèves de catégorie sociale favorisée. Quand on met en place des projets particuliers, si on
n’y prend pas garde, même sans le vouloir - cela se fait souvent de manière automatique et
non volontaire - on se retrouve avec des projets qui concernent les élèves de familles
favorisées. Donc je veillais à ce que les élèves qui participent soient surtout issus de familles
défavorisées. Moi j’admets l’injustice seulement si elle favorise les plus pauvres. C’est comme
cela qu’en République Tchèque sont partis des élèves de la SEGPA qui à 99% est constituée
d’élèves issus de familles très défavorisées.
Un mode de communication adapté à tous les besoins : les
NTICE
En matière de support pédagogique, les nouvelles technologies de l’information et de
la communication semblent être un outil majeur pour faire office de vecteur de ces projets de
groupe. Favorisant l’interaction parfois instantanée entre les éléments d’une même
dynamique, les NTIC permettent la coordination des objectifs et des moyens et la mise en
commun des produits finaux de manière spectaculairement ludique et accessible. De plus, ces
technologies fournissent des opportunités d’adaptation miraculeuses pour les élèves à besoins
spécifiques, comme l’explique P. BELSEUR. Les NTIC semblent donc constituer un support
parfaitement adéquat à l’éducation inclusive, étant un mode de communication adapté à tous.
P. BELSEUR : « Il y a également des formations sur les aides techniques puisque la
déficience visuelle est très liée à l’utilisation de matériel adapté, sur le plan scolaire et dans
la vie quotidienne. Donc ce sont des logiciels tactiles, des logiciels de synthèse vocale ou
d’agrandissement de caractères…tout ce matériel adapté, cette aide technique va permettre à
ces jeunes déficients d’être plus autonome dans leur quotidien pour saisir des documents,
utiliser l’outil informatique tout simplement, accéder à Internet, même si l’on sait très bien
qu’il y a un grand nombre de sites web qui ne sont pas encore accessibles avec l’aide
technique. Mais le but est de pouvoir au moins rendre l’enfant plus autonome dans tout le
champ des NTIC ».
◘ La plus-value Comenius : la communication comme ciment
du projet
N. ROSSI et P. ZANON nous parlent ici de tous les avantages que confère l’outil
informatique dans un projet Comenius. Indispensables bien sûr pour la coordination des
actions entreprises sur deux ans entre les établissements, les NTIC sont également un moyen
privilégié des élèves pour communiquer avec leurs partenaires puisque l’ordinateur fait
aujourd’hui naturellement partie de leur vie sociale et de leurs loisirs. Associer
développement du projet et plaisir permet également de muscler ses compétences en
informatique et de se socialiser avec ses homologues européens. Les NTIC, énormément
sollicitées dans les projets de ce type, semblent donc être le vecteur idéal pour un
développement personnel et même professionnel car ils sont pleinement parties de l’éducation
inclusive.
18
N. ROSSI : « Le projet final, c’est le blog consultable en ligne depuis septembre 2009. Tous
les échanges effectués on été relatés sur le blog que nous avons créé en France. Nous avons
discuté pendant le deuxième séminaire de la manière dont il fonctionnait et de comment nos
partenaires devaient l'utiliser. Il comporte une rubrique, un lien, un logo pour chaque lycée,
les logos de l’Europe...et l’on peut y voir tout ce qu'ont fait les jeunes par pays. Quant au
projet eTwinning, ma collègue qui enseigne l'anglais a réalisé en début d'année avec la classe
participant à Comenius un projet sur ce que les jeunes consomment, font de leurs loisirs...et
nous avons demandé à tous nos partenaires de faire de même. »
P. ZANON (collaboratrice de P. NICOLON) : « Certains élèves ne voyaient pas pourquoi ils
faisaient de l’anglais à l’école, maintenant ils sont sur MSN avec le dictionnaire à côté d’eux
pour mieux communiquer avec leurs partenaires. Donc au niveau des élèves et de quelques
enseignants qui ne maitrisaient pas forcément l’anglais, tout le monde s’y est mis. Cela a
vraiment initié une dynamique au niveau de la langue. »
Visite du Lycée Brottier de Bouguenais par les Tchèques
Projet 2009 « Fluvial and Seaside Influences in our European Countries » (N. ROSSI)
19
Individualiser les trajectoires
La diversité comme une multitude d’individualités
Si l’éducation inclusive doit concevoir l’ensemble des élèves et tâcher de répondre à
leur diversité vue comme un tout, l’on ne peut toutefois faire abstraction de certains besoins
spécifiques qui nécessitent plus d’attention que ceux des autres. Il s’agit ici d’individualiser
les parcours, les différents passés scolaires, les trajectoires de vie et les projets d’avenir, les
capacités, les difficultés et les sensibilités de chacun. Toutes ces composantes s’articulent
autour d’un projet individuel, formalisé par exemple pour les enfants handicapés dans
l’Education Nationale française sous le label « projet personnalisé de scolarisation » (PPS)
depuis la loi de 2005. Nombre de mesures existent parallèlement sous les appellations PEI
(projet éducatif individualisé), PAI (projet d’accueil individualisé, pour les enfants malades),
ou encore PAS (programme d’aménagement scolaire, pour les petits dyslexiques par exemple)
et également les Contrats d’Intégration Scolaire pour les enfants qui ont des troubles
comportementaux.
La plupart de ces documents contractualisés identifient les caractéristiques de l’enfant
et ses besoins spécifiques puis définissent, en accord conjoint avec l’équipe éducative, les
parents et l’enfant, des objectifs à atteindre et les actions qui doivent être mises en place pour
les réaliser. Ces objectifs sont modulables selon l’évolution de l’élève au fil de sa scolarité. Il
ne s’agit pas ici de stigmatiser davantage l’élève par rapport à ses camarades et de
diagnostiquer ses faiblesses tout en voulant y remédier, comme l’exigeait l’ancienne
démarche de la spécialisation toujours plus accrue des cursus. Il s’agit plutôt d’admettre la
que l’enfant, s’il est capable d’être intégré en milieu ordinaire, a cependant toujours besoin
d’une attention spécifique de la part de l’équipe éducative pour que son inclusion se déroule
au mieux. C’est considérer la diversité comme un tout mais ne pas pousser le raisonnement
jusqu’à l’universalisme républicain, l’égalitarisme aveugle qui veut à tout prix lisser la
différence. C’est plutôt percevoir les particularités de chacun et prendre les mesures
nécessaires pour les faire rimer avec une égalité réelle. Les enseignants, sans pousser le débat
sur les notions que chacun mettra derrière des mots si importants, expliquent pourquoi il est
essentiel d’individualiser les parcours et de prêter attention à la trajectoire de chaque
individu :
P. NICOLON : « Dès le départ, il y a eu une équipe de suivi de scolarisation, avec le
professeur référent de la MDPH qui a permis de construire un PPS qui indique les objectifs
précis fixés pour cet élève pour les apprentissages à court terme (« doit savoir lire, doit
savoir compter… ») et les moyens d’y parvenir : temps de scolarisation, temps de soin…Ce
document a été signé par les parents et présenté aux professeurs qui accueillent l’élève. Donc
le professeur ordinaire sait quels objectifs on a pour cet élève et ce que l’on attend de lui. »
M. BOZEC : « Toutes les activités proposées aux élèves sont adaptées à la pathologie et aux
possibilités de chacun. Un projet personnalisé est mis à jour chaque année par l’équipe
multidisciplinaire. Il s’articule autour de 5 objectifs :
- accueillir, éduquer, scolariser, dispenser une formation préprofessionnelle socialisante,
héberger des enfants et adolescents polyhandicapés mentaux (internat), moyens et profonds
ou souffrant de handicaps surajoutés
20
- intégrer des polyhandicapés avec les autres groupes dans un même milieu tout en respectant
les rythmes individuels,
- placer les jeunes dans les conditions les plus proches de celles des classes ordinaires tout en
adaptant la pédagogie aux rythmes individuels et aux troubles spécifiques
- organiser les prises en charge et de soutien par les équipes de soin (médicales et
paramédicales) en relation étroite avec les équipes éducatives et les familles
- respecter les vœux des familles confiant leurs enfants à l’Institution. »
◘ La plus-value Comenius : une personnalité, une réponse
La personnalisation des prises en charge par l’équipe éducative est sans nul doute un
atout pour les jeunes concernés lorsqu’il s’agit d’orchestrer un projet Comenius. La cécité
précitée des partenariats à l’égard du stigmate de l’enfant permet de sélectionner des élèves à
qui le projet pourrait être plus particulièrement bénéfique. Il s’agit de faire profiter de
l’expérience un maximum d’élèves et en particulier les plus défavorisés comme nous l’avons
vu dans la partie précédente. Mais l’idée est également de cibler les participants qui font face
à des problématiques auxquelles Comenius apporterait le plus de réponses. Ainsi, si comme
dans les établissements de P. NICOLON et N. ROSSI, P. BELSEUR s’axe sur la motivation
des élèves pour le choix des mobilités, il veille également à ce que ses jeunes soient les
candidats adéquats pour ce type de projet, dans leur propre intérêt :
P. BELSEUR : « Nous avons sélectionnés les élèves participants sur des critères d’âge et de
déficience visuelle : seuls les jeunes aveugles étaient concernés. Ensuite, il s’agissait de
demander aux jeunes s’ils avaient un intérêt particulier à participer à un projet sur cette
thématique-là, à des ateliers, à créer des échanges avec des jeunes européens Il s’agissait
d’avoir de l’appétence pour aller à la rencontre de ses homologues et travailler sur
l’expression corporelle. Peut-être également avons-nous choisi des jeunes qui avaient des
problèmes particuliers sur ce sujet-là »
Soutenir pour atténuer les inégalités
Lorsque l’on discute de la personnalisation des parcours des jeunes, il apparait donc
que dans l’intention générale d’accorder plus d’attention à chacun, il faille surtout compenser
les inégalités des besoins en encadrant plus fortement les plus faibles pour leur meilleure
inclusion. Ce processus passe par diverses mesures de soutien scolaire (et affectif et
psychologique comme nous le verrons par la suite) qui impliquent des aménagements du
temps, de l’espace et des ressources éducatives. Les enseignants se révèlent bien souvent
impuissants pour adapter de façon optimale le rythme de la classe selon les besoins de chacun,
comme nous avons pu le constater précédemment lors de l’évocation du débat sur l’inclusion
en milieu ordinaire. Il s’agit donc de déléguer aux collègues ordinaires, spécialisés, aux
professionnels et même parfois aux autres élèves la charge du soutien scolaire, ce qui
nécessite comme nous l’évoquerons par la suite une coopération maximale entre les acteurs de
l’éducation. N. ROSSI notamment est familier avec différents types de tutorat, parfois peu
orthodoxes.
21
N. ROSSI : « Nous pouvons faire du tutorat. En enseignement général, les élèves les plus forts
aident les plus faibles, cela peut arriver. Nous travaillons beaucoup sous la forme de projets,
en petits groupes. Les inégalités se voient mais il y a toujours quelqu'un qui vient compléter
ou compenser. […] Nous avons également le projet STAR. Si l’on détecte un jeune en
décrochage, nous allons le sortir de la classe mais le garder dans le lycée. Il va être
accompagné par la vie scolaire, c'est-à-dire le CPE, avec ses trois membres du personnel. Il
va s'occuper de lui, lui donner des cours individuels dans une classe spéciale, surveillée par
les gens de la vie scolaire. Le planning hebdomadaire est fixé avec le jeune et il inclut un peu
de pratique à l'intérieur du lycée avec nos menuisiers à demeure, ou une travail au self, etc.
Le but du STAR est de réintégrer le jeune dans la classe au bout d'une semaine ou deux. De
lui faire prendre conscience qu'il a besoin de l'école. […] Nous avons également une
structure qui s'appelle le Panama : c’est une maison en campagne dotée d’un éducateur
sportif, un éducateur technique, une musicothérapeute et un bénévole qui fait du soutien
scolaire. Le jeune est placé dans cette structure car il ne supporte plus le cadre du lycée, les
autres. Là-bas il est dans la nature, dans une maison, avec un petit noyau d'adultes autour de
lui, il est en autonomie car il doit se faire à manger, etc. Et à travers la musique, le bricolage,
le sport...il va reprendre le goût de se regarder le matin dans la glace.»
N. HENO quant à elle déplore un manque de moyens et étudie la situation
problématique des Auxiliaires de Vie Scolaire individuels (AVS-I) ou collectifs (AVS-Co).
Un rapport d’information du Sénat français de 2006-2007 fait notamment état des progrès
réalisés par la fameuse loi de 2005 qui consacre le droit des enfants handicapés d’être
accompagnés dans leur scolarité. Il déplore que le recrutement des AVS demeure largement
« artisanal » avec des statuts très différents et des contrats précaires. Si l’Education Nationale
semble avoir ouvert 4500 postes d’AVS depuis 2008, l’emploi demeure peu attractif du fait
du peu de perspectives ultérieures de carrière, la professionnalisation de ces métiers est
urgente et leur formation doit pour cela être largement approfondie.
N. HENO : « Nous essayons de mettre des AVS mais elles coûtent très cher et à l’heure
actuelle, elles ne sont pas formées et ne peuvent pas remplacer un enseignant spécialisé. […]
Nous manquons de structures intermédiaires, de classes-relais. On ne le dit pas toujours
honnêtement, mais si nous avions vraiment les moyens, nous pourrions faire du bon travail.
Nous pourrions mettre les élèves en milieu ordinaire le plus possible, avec des gens qui
seraient formés à cela, des possibilités de les regrouper à certains moments pour leur
permettre de se reprendre, de se recaler, de retrouver le goût du travail… »
◘ La plus-value Comenius : réfléchir sur les ressources
humaines
En matière de soutien scolaire, l’apport des projets Comenius transparait une fois de
plus dans l’échange de pratiques des enseignants qui ont témoigné pour cette étude. De même
que N. BRUINAUD avait admiré l’équipement matériel dans l’établissement partenaire
d’Irlande du Nord, elle constate dans la même école que des moyens supplémentaires ont été
alloués en vue d’assurer un encadrement optimal pour les enfants à besoins spécifiques. Outre
le fait que ces moyens ne soient pas gérés de la même manière dans les deux pays et que
l’établissement d’Irlande du Nord semble à même de mener sa propre politique en matière
d’accompagnement, N. BRUINAUD mentionne les deux ans de formation de l’auxiliaire
irlandaise qui ont sans doute contribué à l’excellente intégration de l’enfant trisomique en
classe.
22
N. BRUINAUD : « Pour chaque enfant en très grande difficulté, il y avait un adulte
supplémentaire dans la classe. Nous avons vu l’intégration d’une enfant trisomique en milieu
ordinaire et la dame qui était avec l’enfant avait eu deux ans de formation. Ensuite il y avait
l’équivalent d’une ATSEM (agent territorial spécialisé des écoles maternelles) dans chaque
classe en primaire qui en gérait tout l’aspect matériel. Quand j’en ai parlé avec mes
collègues irlandais, elles m’ont dit que c’était une vraie politique de l’établissement. »
Visite en Irlande du Nord pour l’équipe de Nathalie BRUINAUD (devant)
B) Les évaluations
Trouver une alternative plus équitable à l’évaluation classique
L’on ne peut parler des apprentissages sans mentionner la manière dont le système
vérifie que les acquis sont bel et bien intégrés par les élèves. Si les méthodes pour intégrer le
programme doivent être modifiées selon les principes de l’éducation inclusive, l’évaluation
doit elle aussi être jugée quelque peu archaïque et remise en question dans ses fondements.
Certains rapports prônant les valeurs de l’éducation inclusive analysent les défauts de
l’évaluation classique dans son contenu et dans sa forme. Ainsi, la vérification des
compétences et connaissances s’avèrerait trop fragmentaire et subjective et ressemblerait plus
à une évaluation-sanction qui marginalise les plus faibles et accentue les préjugés selon les
taux d’échecs (sexe, appartenance sociale). L’évaluation serait également trop ponctuelle et
parfois inadaptée aux besoins de l’élève. Les propositions de redoublement qu’elle induit
parfois auraient tendance à dévaloriser l’élève par rapport aux autres et constitueraient un
échec de l’adaptation du système aux problématiques de l’élève, même si l’objet de cette
étude n’est pas de débattre sur les bienfaits et méfaits potentiels de telles mesures éducatives.
Ainsi une évaluation équitable, en comparaison, intègrerait les valeurs de l’éducation
inclusive. Elle constituerait non pas une sanction mais une manière d’éduquer, en identifiant
les forces et les faiblesses de chacun pour constituer des groupes de travail hétérogènes et
équilibrés et instaurer une meilleure dynamique de travail. Elle devrait être axée sur le
23
contrôle des connaissances et des compétences mais aussi sur d’autres indicateurs moins
formels comme l’épanouissement personnel et les compétences sociales.
◘ La plus-value Comenius : l’évaluation plus originale
Pour ce faire, le système devrait élaborer des mesures de soutien pour l’élève en
situation d’évaluation classique : disposer de plus de temps ou d’une aide personnalisée,
travailler sur des supports d’évaluation adaptés, espacer les examens…Il s’agirait également
d’imaginer des alternatives crédibles à cette évaluation classique pour plus d’objectivité en
changeant de perspective (faire plus de place à l’observation, construire un dossier annuel des
meilleurs travaux…) et d’évaluateur (auto-évaluation, correction par d’autres élèves…). En
cela, les projets Comenius constituent les mises en situation idéales pour tester de nouveaux
outils d’évaluation informels, ou tout du moins les bases pour voir les élèves sous un angle
différent, diagnostiquer leurs forces et leurs faiblesses selon un point de vue original :
D. POULAT : « La participation de ces classes d’élèves en difficultés à un projet Comenius
permet de les valoriser aux yeux des autres mais aussi de leurs parents et de certains
collègues enseignants. Certains reprennent confiance en eux puisqu’ils voient qu’ils sont
capables de produire, de retenir et d’obtenir de bons résultats, ce qu’ils n’ont pas toujours
lors d’exercices traditionnels. C’est pour eux une manière d’apprécier l’école où ils ne
subissent plus un cours mais deviennent acteurs de la séance. »
N. ROSSI : « Toutes les semaines, nous donnons à nos élèves une note de savoir-être sur un
carnet. Un jeune qui sème le désordre, qui n'est pas volontaire...ne partira pas. Nous
demandons qui est volontaire pour partir avec un CV et lettre de motivation, et suivant la note
de savoir-être, nous lui accordons sa mobilité ou pas. »
C) L’environnement d’apprentissage
Créer un espace interactif
Enfin, après avoir pris en compte les contenus de l’apprentissage, leur forme et leur
évaluation, il convient d’examiner la manière dont l’espace éducatif est agencé.
L’organisation de la classe semble être un point crucial de l’éducation inclusive en ce sens
que ces quatre murs constituent le cadre journalier de l’équipe éducative et des enfants. La
classe comme le reste mérite d’être repensée, optimisée de manière à stimuler les élèves et
améliorer leur bien-être. Plus qu’une simple décoration des murs de la classe avec des cartes
géographiques et des frises historiques, il s’agit ici véritablement de créer un espace interactif
spécifique, par exemple un coin « ressources » ou les élèves ayant fini leur travail plus
rapidement que les autres pourraient venir s’auto-éduquer et se distraire de manière ludique
pendant que leurs camarades terminent l’exercice demandé. C. KOVARSKI, professeure
certifiée dans le domaine de la vision et auteure de plusieurs ouvrages sur le sujet, s’exprime
sur l’importance d’un environnement d’apprentissage adéquat :
C. KOVARSKI : « Dans une communauté inclusive, l’un des éléments clé pour garantir la
réussite de tous les apprenants est une considération avancée et minutieuse de la conception
de l’environnement d’apprentissage. La plupart des aménagements de milieux scolaires ne
prennent pas en considération les résultats de la recherche impliquant des adaptations
24
appropriées pour les personnes handicapées. Il est reconnu que 80% de l’information est
assimilée au travers de la vision, donc, les besoins spécifiques des apprenants d’âge scolaire
déficients visuels, sont d’une importance particulière. En outre, une salle de classe adaptée
aux besoins spécifiques d’élèves déficients de la vue, peut avoir un impact positif sur le
processus d’apprentissage ainsi que la performance de tous les jeunes apprenants. »
◘ La plus-value Comenius : l’observation des salles de classe
Un espace d’apprentissage inclusif ne doit donc pas être conçu comme statique mais
comme un lieu dynamique de collaboration, d’interaction, d’expérimentation. Il doit bien sûr
adapter le matériel d’assistance aux élèves à besoins spécifiques comme l’expliquent
notamment C. KOVARSKI et P. BELSEUR au sujet des jeunes déficients visuels, mais aussi
être agencé de manière à favoriser la liberté de mouvement et d’expression. Comenius est une
nouvelle fois le cadre propice à l’échange de pratiques au sujet de l’organisation des classes
dans les différents pays d’Europe. La plupart des enseignants interrogés ont eu l’occasion de
voir des salles de classes étrangères et ont été marqués par les différences singulières
d’agencement ou d’équipement. Ces visites d’établissement sont l’occasion de réfléchir sur
ses propres moyens mais aussi sur l’inventivité et l’ingéniosité dont il faut faire preuve pour
concevoir un espace ludique et convivial, comme l’explique C. KOVARSKI :
C. KOVARSKI : « Notre projet Comenius OPTIC montre à quel point un environnement
éducatif adapté aux besoins spécifiques des élèves déficients visuels peut être bénéfique pour
tous les élèves. Les résultats du projet, accessibles par le web ainsi que par la diffusion d’une
brochure et d’un CD, contribueront à majorer l’approche globale et détaillée de
l’aménagement d’une salle de classe pour tous. Par exemple, des rampes d’escalier et des
bords de marches bien contrastés renforcent davantage la sécurité pour tous les enfants,
surtout pour ceux avec des déficits comme les troubles d’attention. »
II) Prendre en compte le développement personnel
de l’enfant ♫ Compétences-clés 4 à 8
L’éducation inclusive met certes l’accent sur les apprentissages en priorité puisqu’il
s’agit avant tout de réformer un système pour éviter l’exclusion sociale. Mais ceux qui
prônent les valeurs inclusives insistent longuement sur le fait que l’équipe éducative doit être
tout aussi attentive au développement personnel de l’élève, sa psychologie, sa sensibilité, ses
émotions et son vécu. Le bien-être à l’école, surtout lorsqu’il peut être inexistant à la maison,
fait partie de la mission du pédagogue qui aurait intégré les principes de l’inclusion. Outre les
problématiques classiques de l’adolescence auxquelles un jeune doit faire face, l’élève à
besoins spécifiques, de par ses difficultés, devra s’accommoder d’une charge supplémentaire
de sentiments à gérer, et en particulier dans sa relation à l’altérité et ses interactions avec les
enfants ordinaires.
Gérer le développement personnel de l’élève
25
Répondre à la problématique de l’estime de soi
De ces expériences houleuses peuvent résulter une perception aigüe de la différence,
une relation plus conflictuelle avec ses pairs, sa famille, et donc beaucoup de souffrance et
parfois une certaine agressivité. C’est pourquoi l’équipe éducative, à travers les divers
témoignages recueillis, parle si souvent du développement personnel, du bien-être et de la
confiance en soi comme des priorités, y compris par rapport aux apprentissages. Cette mission
demande de l’enseignant qu’il change de point de vue sur son élève, voie ses potentialités
plutôt que ses échecs, le félicite plutôt que l’encourage, lui donne l’opportunité de s’exprimer
sur ses points forts et écoute son opinion.
N. ROSSI : « Pour nous, c'est très important d'éduquer […] Former l'élève à un métier, je
dirais que c'est facultatif. Avant tout, c'est lui rendre sa dignité, lui redonner confiance. Il y
avait une phrase de nos dirigeants qui disait qu’il fallait en faire « des hommes debout »
(« standing men »), avant toute chose, que ces jeunes repartent avec une confiance en eux et
puissent affronter le monde extérieur. »
N. HENO : « Le premier travail en CLIS pour moi c’est retrouver le goût de l’école. C’est la
première chose. Il faut que l’enfant reprenne une place d’élève, qu’on lui dise « c’est bien ce
que tu as fait ». J’avais une petite fille avec qui on avait eu des débuts difficiles mais qui
comptait tous les jours ses « très bien » sur le cahier, lorsqu’il n’y avait aucune faute.
C’est primordial pour des enfants qui n’ont eu de cesse d’être en échec jusque là. C’est très
bien de les mettre en cycle ordinaire, mais il faut qu’ils aient des plages où ils puissent
reprendre confiance en eux. »
◘ La plus-value Comenius : l’altérité banalisée
Bien sûr, faire partie d’un projet Comenius est, nous l’avons vu, une expérience
extrêmement valorisante qui permet aux élèves participants de retrouver une certaine estime
de soi de par leur contribution effective au partenariat. La différence des profils d’élèves au
sein du même projet a également été évoquée et cet aspect de l’expérience permet tout autant
de reprendre confiance en soi après examen de ses jeunes homologues européens : voir qu’ils
sont complètement différents de soi-même fait réaliser au jeune que ses besoins spécifiques
n’ont pas d’importance mais que seuls ses talents et sa motivation sont pris en compte. Voir à
l’inverse au sein d’un projet spécifique que tous ses pairs européens sont affectés par le même
trouble, la même déficience, permet sans nul doute de relativiser son stigmate et de se rendre
compte qu’il est même facteur de rapprochement avec les autres : étant tous dans la même
situation, les particularités physiques, sociales, intellectuelles peuvent être mises de côté pour
ne s’intéresser qu’aux différences culturelles.
P. BELSEUR : « Nous savons que chez les jeunes non-voyants, il y a un problème important
qui est lié à l’expression corporelle : tout ce qui est lié à l’appropriation, la maitrise de son
corps est un souci important surtout quand on est dans la relation avec l’autre. […] Je pense
que le projet un stimulant très important pour ces jeunes-là : s’apercevoir qu’ils ne sont pas
les seuls dans ce cas-là, vivre des choses entre pairs, pour leur permettre d’améliorer toute
leur attitude corporelle, leur relation avec l’autre. Même si dans ce cas on est dans une
26
relation entre semblables et non avec le milieu ordinaire, c’est important de se sentir d’abord
à l’aise avec eux avant d’affronter la suite. »
Inculquer les valeurs de l’inclusion
Tout comme l’évolution des apprentissages et la prise en compte du développement
personnel de l’enfant sont les deux faces de l’éducation inclusive, la méthodologie et la
mentalité sont indissociables pour éradiquer l’exclusion sociale du système éducatif. S’il est
important de mettre en pratique les valeurs de l’inclusion en se demandant concrètement
comment les appliquer au quotidien en classe, il est essentiel de transmettre aux élèves les
raisons éthiques d’un tel bouleversement et leurs fondements, comme les notions de tolérance
et de solidarité.
◘ La plus-value Comenius : une leçon de tolérance
En cela évidemment, les projets Comenius en tant que porte ouverte sur l’Europe sont
les vecteurs de la tolérance à l’échelle universelle. Ces projets à la fois alimentent une
réflexion approfondie sur ce que les systèmes éducatifs européens et les cultures du continent
ont de différents, et en même temps fournissent les bases d’un édifice commun à bâtir autour
d’un thème défini, exigeant une coopération fournie sur le long terme. La tolérance est bel et
bien l’outil premier dont doivent disposer les élèves, l’équipe éducative et même les parents
pour s’engager dans un tel projet et ne peut qu’avoir des répercussions positives sur
l’acceptation de la différence au quotidien. Parfois même comme avec le projet de P.
ZANON, le projet est spécifiquement centré sur des problématiques liées à la tolérance et il
constitue l’occasion de parler des différentes notions que les nations mettent derrière le mot.
G. BADUFLE : « Ces élèves issus de milieux défavorisés n'ont pas la chance de voyager et de
s'ouvrir à l'Europe. La plupart d'entre eux ne sont même jamais allés dans les grandes villes
voisines… […] L’ouverture culturelle (les élèves sont acteurs du projet) et à l'Europe : rien
de tel que de voyager et de vivre quinze jours dans une famille européenne pour détruire tous
les préjugés et prendre goût à l'Europe... »
R. BRACQ (collège situé en RRS avec une SEGPA et une UPI) : « Comenius permet surtout
aux élèves de se rendre dans un pays et de rencontrer d’autres enfants de leurs âges. Ainsi,
cela favorise l’ouverture et donc la tolérance, dans la mesure où la plupart de nos élèves ne
sont jamais sortis de leur environnement proche, voire de leur quartier ! C’est pour cela que
nous tentons d’envoyer le plus d’élèves possibles à l’étranger, comme les dix-neuf élèves à
Malte en mars dernier. […] A leur retour, ils ont été très marqués par les découvertes faites
dans le pays et l’école partenaires et ils semblent relativiser davantage les expériences
négatives et positives de leur existence. »
E. HUE : « Nos élèves sont fiers de voir (vidéos, photos, site web) les autres élèves qui
travaillent de la même façon, dans un pays lointain, et bientôt ils rencontreront les
professeurs en visite ; pour les petits Domiens si éloignés de la métropole, c’est une vraie
découverte de la réalité européenne. »
27
P. ZANON : « Nous avons bien vu qu’on ne mettait pas les mêmes notions derrière les
mots. Avec la pièce de théâtre cela a été assez frappant, la manière de traiter les choses sous
des angles différents, même si nous avions parlé de la même tolérance. A plusieurs nous
n’étions pas forcément d’accord : même si nous choisissions la même chose, nous ne la
traitions pas de la même manière. C’est vrai que la Turquie, pays musulman, n’a pas les
mêmes approches sur la femme par exemple. Cela a été clair pour les adultes et les enfants
quand nous étions là-bas. En République Tchèque, il y avait moins d’appréhension mais je ne
dirais pas qu’il n’y en avait pas parce que pour certains parents, on amenait leurs enfants au
beau milieu de la Russie ! Nous avons donc aussi travaillé sur les parents. »
Rencontre en Turquie
Projet 2008 « Let’s play to go beyond the differences » (P. ZANON, P. NICOLON)
28
Favoriser l’aspect relationnel entre élèves/entre élèves et éducateurs
L’épanouissement personnel de l’enfant tel qu’il peut se concevoir dans l’enceinte
éducative passe aussi par de bonnes interactions sociales, avec ses semblables et les adultes
qui l’entourent. Ainsi plus les contacts positifs entre élèves sont nombreux dans le cadre d’une
activité, plus la dynamique de groupe est productive et chaleureuse, ce qui contribue au
développement scolaire et personnel de l’enfant. La solidarité du groupe s’en trouve renforcée
et si les professeurs prennent part à ce rapprochement, cela peut leur permettre comme
l’explique D. POULAT d’identifier chez leurs élèves le meilleur de ce qu’ils peuvent tirer
d’eux-mêmes.
E. HUE : « La pédagogie coopérative est un des aspects de la pédagogie du mouvement
Freinet. C'est le choix de l'entraide plutôt que la compétition. C'est inscrire l'individu dans le
collectif au service du collectif. C'est reconnaître les compétences de chacun au service des
autres. Ainsi, les apprentissages peuvent bénéficier aux autres. Nous permettons aux élèves de
comprendre comment ils peuvent expliquer à un camarade les stratégies pour résoudre le
problème posé ; ils sont mis en situation de conflit sociocognitif en permanence, ils
découvrent qu’ils peuvent aider leurs pairs même s’ils sont en difficulté. C'est une pédagogie
de l'entraide. »
N. ROSSI : « Nous commençons toujours l'année avec un projet de rassemblement. Puisque la
mission de la fondation d'Auteuil est d'accompagner, nous organisons une randonnée au
Mont St Michel avec tous les jeunes et les profs sur la journée, pour fédérer. »
D. POULAT : « Pour les professeurs de ces classes, cela a permis de connaitre les élèves
autrement et trouver ce qui pouvait être mieux exploité et valorisé chez eux. »
◘ La plus-value Comenius : vers une relation
éducateurs/élèves moins formelle ?
N. ROSSI garde la relation enseignants/élèves de son partenaire sicilien comme son
meilleur souvenir de l’expérience Comenius : il déplore la rigidité de cette relation qui existe
encore en France et espèrerait pouvoir éradiquer les crispations hiérarchiques dans son propre
établissement pour produire des interactions moins formelles et plus saines avec ces élèves de
lycée. En discutant avec N.BRUINAUD, il semble cependant qu’en primaire, établir une
proximité moins martiale avec les élèves ne fonctionne pas d’après son observation de petits
élèves suédois qu’elle trouve trop autonomes et par conséquent trop dissipés. L’équilibre
d’une relation moins formelle étant plus mature, il est peut-être à trouver dans un âge plus
adulte où la conscience des limites est plus vive.
N. ROSSI : « En Sicile, les profs et les élèves sont très soudés les uns aux autres et ont une
manière très particulière de communiquer. Ils sont issus du même village et tout le monde se
connait. Les jeunes sont très proches de leurs profs et cela, c’est très beau à voir. L’image qui
me reste est dans une salle de classe : l’enseignante est à son bureau et les élèves viennent
naturellement s’asseoir devant elle. Chez nous, nos élèves se mettent naturellement au fond…
C’est une des choses que j’ai exposé à mes collègues : il faut comprendre comment ils font ça.
Est-ce le fait de la Sicile, de son insularité ? Nous ne savons pas mais nous voudrions nous en
servir car en France, nous sommes en quelque sorte individualistes, un peu martiaux, très
rigoureux dans la relation profs-élèves. Nous avons cette réserve qui n’existe pas en Sicile. »
29
Nicolas ROSSI (à gauche) et les jeunes élèves siciliens en 2009
Gérer les troubles comportementaux
Contractualiser le comportement, rechercher la cause du
mal-être
Les difficultés comportementales sont étudiées ici dans la mesure où elles sont bien
souvent une résultante des troubles psychologiques et du mal-être de ces élèves à besoins
spécifiques qui, nous l’avons dit, doivent faire face à plus de problématiques existentielles que
leur congénères du fait de leur différence. Les troubles comportementaux sont par ailleurs
eux-mêmes généralement traités comme des besoins spécifiques face à des jeunes qui ne
supportent plus le cadre scolaire, l’autorité, les règles civiques…Il s’agit donc pour
l’enseignant ayant intégré les valeurs inclusives de prendre des mesures : élaborer des
activités pour la gestion des émotions, savoir capter l’attention de l’élève, savoir
ponctuellement faire preuve d’autorité et lui donner un sens ; en amont, comprendre la cause
du mauvais comportement de l’élève et tenter d’y remédier dans la mesure du possible.
Il est nécessaire pour cela d’agir de manière concertée avec le reste de l’équipe
éducative, les professionnels (psychologue, assistants sociaux) et la famille tant que faire se
peut puisque ces problématiques ont bien souvent trait à l’absentéisme et au décrochage
scolaire, dont la lutte reste une priorité mondiale dans les directives actuelles. Renforcer,
personnaliser et systématiser l’encadrement de l’élève qui ne respecte pas les normes
comportementales de la vie scolaire (par exemple en contractualisant son attitude avec les
Contrats d’Intégration) est le préalable essentiel à tout processus d’apprentissage.
N. HENO : « La violence est quelque chose qui revient souvent. C’est un problème énorme.
Dans les dossiers que nous avons, souvent, le déficient intellectuel a souvent des troubles
associés puisqu’il ne se sent pas bien… Il y a aussi tous ces enfants qui ont vécu des choses
difficiles au niveau familial, social, et qui répercutent cela par de la violence. »
30
N. ROSSI : « Il y a des réunions tous les vendredis entre tous les professeurs de
l'enseignement technique et général plus les éducateurs des foyers. Nous faisons le point sur
tous les cas lourds de la semaine. Il y a un suivi hebdomadaire intense. Comme dans toutes
les écoles, chaque classe a un professeur principal et sa mission est énorme car il doit
communiquer avec les éducateurs de tous ses élèves pour élaborer les rendez-vous éducatifs
lorsqu'il y a besoin ; c'est-à-dire pour s’occuper d’un jeune dont on s'aperçoit qu'il se sent
mal sur le moment, qui a un souci dans sa famille, qui décroche...et si la famille est présente,
on fait des réunions à trois. […] Si un jeune « décroche » malgré toutes les mesures mises en
œuvre, nous allons l'envoyer en stage, sur le terrain avec des professionnels. Nous l'écartons
de la classe car il la met en danger ou se met en danger lui-même. La mission des professeurs
est alors de faire le bilan avec ces professionnels pour savoir comment évolue le jeune, si
c'est vraiment ce dont il avait besoin : une partie pratique, ne plus être en contact avec
l'école, le bureau, le tableau...Car souvent les jeunes viennent ici parce qu'ils en ont assez de
l'école. Ici, nous reproduisons le schéma scolaire mais nous lui donnons des limites. »
◘ La plus-value Comenius : différentes cultures, différentes
normes
Lorsque l’on se demande quelle aide substantielle un projet Comenius pourrait
apporter à un élève ayant des troubles de comportement, l’idée première est éventuellement le
fait que les élèves d’habitude « difficiles » s’avèrent plus motivés et attentifs au sein d’une
dynamique de projet en général et d’un Comenius en particulier, dans la mesure où le
programme d’envergure européenne les valorise comme nous l’avons mentionné plus haut.
L’hypothèse de l’atténuation des troubles comportementaux grâce au projet n’ayant pas été
vérifiée par les témoignages recueillis, elle restera à l’état d’utopie bien que les enseignants
encouragent vivement ces projets avec des élèves aux problèmes psychologiques, sociaux,
familiaux pour les extirper de leur condition et les valoriser ; pour remédier finalement à ce
qui bien souvent est la cause des problèmes comportementaux. Le projet de R. BRACQ sur le
civisme montre par ailleurs que la politesse requise pour la communication avec les jeunes
européens incite sans doute les Français à ne pas faire d’écarts. De plus, l’on peut supposer
que les standards culturels de comportement n’étant pas les mêmes d’une société européenne
à une autre, il faille dans ce cas pour les élèves réinventer une norme comportementale inédite
et faire preuve de tact de peur de froisser ses partenaires (rituels de conversation…).
R. BRACQ : « Le thème étant celui du traitement des incivilités, dans le cadre de notre projet
d’établissement, des actions seront proposées pour y remédier grâce en partie aux échanges
avec les élèves des autres pays (visioconférence, échanges physiques, questionnaires…). Le
projet Comenius nous a donc permis d’alimenter une réflexion avec nos partenaires
européens sur nos difficultés et des moyens de les résoudre. »
Gérer le développement professionnel
Accompagner le projet de vie, favoriser l’autonomie
Si l’équipe éducative s’occupe à la fois d’élever ses élèves dans les domaines de
l’intellect et du bien-être, elle se trouve quelque par impliquée dans le projet de vie personnel
31
et professionnel de l’enfant qu’elle influence grandement. En tant que microcosme sociétal,
l’école prépare indéniablement à la vie d’adulte et arme de jeunes gens pour affronter la vie
quotidienne. Le socle européen des huit compétences clés a par ailleurs bien pris en compte
cette dimension puisque que l’une d’entre elles a pour but l’autodidaxie (« apprendre à
apprendre »), une autre cherche à développer « l’esprit d’initiative et d’entreprise ». Ces deux-
là traduisent explicitement le souci de la Commission Européenne de former des jeunes élèves
au marché du travail qu’ils affronteront bientôt. Le rôle des éducateurs est bien entendu de les
aider dans ce cheminement et cela commence par l’inculcation de l’autonomie, de
l’indépendance et de l’auto-évaluation, qualités plus nécessaires aux enfants à besoins
spécifiques qu’aux autres (comme il semble évident avec les jeunes aveugles de l’Institut
Montéclair).
N. ROSSI : « Ce que l'on apprend à l'internat, c'est l'autonomie. Se débrouiller tout seul,
gérer ses comptes, ses démarches administratives... »
P. BELSEUR : « Nous élaborons également des activités dans le champ de la rééducation
pour nos jeunes déficients visuels, des AVJ (activités de la vie journalière) : ce sont des
interventions de professionnels pour permettre au jeune d’être plus autonome dans la vie
quotidienne pour réaliser ces tâches-là. Cela va de la cuisine à la reconnaissance de pièces
de monnaie, au classement des fiches et documents sur le plan scolaires… Il y a aussi la
rééducation en locomotion : tout ce qui est lié au déplacement avec l’apprentissage de
l’usage de la canne blanche au quotidien. »
◘ La plus-value Comenius : une réflexion commune sur le
projet de vie
Au sein des projets Comenius organisés par les participants de cette étude, il semble
que l’avenir personnel et professionnel des jeunes soit largement pris en compte et que les
professeurs y voient l’occasion pour les élèves de développer des compétences importantes
pour le futur, comme l’esprit de groupe. Les émulations sont cependant très différentes d’un
projet à un autre. E. HUE qui a travaillé sur la pédagogie coopérative en vante les mérites
pour les valeurs acquises par ses élèves. P. BELSEUR souhaite se tourner davantage vers une
réflexion européenne sur la formation professionnelle à travers le réseau ENVITER. J.
ANDREA, enseignant en UPI, est heureux d’avoir pu échanger avec ses partenaires sur le
projet de vie des jeunes handicapés.
E. HUE : « Les élèves apprennent à s’auto-évaluer dans leur comportement, à respecter les
autres, à écouter, à aider ; toutes ces valeurs que sont la tolérance, l’esprit de camaraderie,
l’entraide, l’encouragement, l’effort, doivent être enseignées à l’école et la pédagogie
coopérative de notre projet en est un bon moyen. »
P. BELSEUR : « Le réseau ENVITER (European Network on Visual Impairment : Training
Education and Research) dont nous faisons partie et dont a découlé le partenariat européen
va nous permettre de travailler en commun avec les autres établissements français inscrits et
de déposer des projets avec d’autres pays sur des questions liées à l’accès à l’emploi, la
formation professionnelle, plus que l’éducation.
32
J. ANDREA : « Les échanges avec nos collègues italiens et portugais nous ont permis de
découvrir des systèmes différents du nôtre. La réflexion sur la place de l’Ecole dans la
construction du projet de vie de l’élève handicapé a suscité de la part de tous les participants
un vif intérêt qui se poursuivra et se développera dans nos pratiques quotidiennes.
L’ensemble de ce travail sera publié sur un site avec nos partenaires à destination d’un grand
public et dans un document écrit plus spécifiquement à l’intention des professionnels.
III) Former les enseignants
Après avoir listé l’ensemble des mesures à prendre au niveau du développement
scolaire et personnel de l’élève pour rendre le système éducatif plus inclusif, il est désormais
temps de se demander comment répondre aux exigences de l’instauration de telles valeurs. La
plupart des actions à entreprendre découle de la volonté de l’équipe éducative et ce que les
projets Comenius apportent passe bien souvent par un échange de pratiques puisque les
enseignants constituent le vecteur privilégié de l’inclusion dans la classe et dans
l’établissement. S’il ne doit pas porter la charge du changement du système sur ses épaules
seules, comme nous le verrons dans le chapitre suivant, il est l’interlocuteur direct des enfants
et joue un rôle primordial dans leur évolution intellectuelle et psychique.
Enrichir la formation initiale et continue
Eduquer les jeunes, inspirer les anciens
Les jeunes professeurs en formation doivent être les premiers à intégrer les valeurs de
l’inclusion, pour que la future génération d’enseignants soit une génération active en matière
de lutte pour l’équité et la tolérance à l’école. Cela signifie concrètement qu’il faut donner des
directives à leurs formateurs et les former eux-mêmes à ce type de philosophie ; qu’il faut
faire prendre conscience à ces jeunes étudiants de leur rôle de pivot en matière d’inclusion
sociale ; qu’il faut décloisonner, enfin, les formations pour publics spécialisés et ordinaires,
modifier la structure exclusive à la base pour que le schéma ségrégatif ne se reproduise pas à
l’avenir :
N. BRUINAUD : « L’on m’avait demandé d’intervenir à l’IUFM d’Angoulême pour présenter
le projet Comenius mais j’étais en mobilité, donc c’est le directeur qui a représenté l’école,
M. Guinot. C’était très bien qu’il soit amené à en parler à des étudiants, mais il m’a expliqué
qu’il n’en avait parlé qu’à des étudiants qui avaient pris une option particulière, et j’ai trouvé
cela dommage, parce que je pense que tout le monde pourrait être intéressé à l’IUFM par ce
genre de projet, surtout et justement parce que nous sommes enclavés dans des zones très
rurales. »
Et s’il faut bien compter sur les jeunes, c’est parce que les anciens modifient leurs
pratiques très lentement…ou ne les modifient que très sommairement une fois sortis de
l’école. Si le décloisonnement des cursus ordinaires et spécialisés ne se fait pas encore dans
les IUFM de France, la frontière est d’autant plus marquée au fer rouge dans les esprits des
33
enseignants avec quelques années voire quelques décennies d’expérience, qui bien souvent
ont des lacunes dans l’un ou l’autre domaine et comptent sur leur vécu pour faire face à des
situations inédites :
N. HENO : « Quand je suis arrivée dans le primaire, j’ai tout de suite fait une spécialisation
pour le handicap intellectuel. Je n’y connais donc pas vraiment la classe ordinaire. J’étais la
seule à avoir une formation spécialisée à l’école d’Angoulins. ».
N. BRUINAUD : « Je n’ai pas de formation spécifique pour les enfants à besoins spécifiques.
J’ai fait l’IUFM de façon tout à fait ordinaire. Je crois que la prise en charge se fait aussi en
fonction de notre expérience. L’on s’aperçoit de plus en plus que l’on a affaire dans nos
classes à des enfants en difficulté, quelle qu’elle soit, ce n’est pas forcément d’ordre scolaire.
Nous avons beaucoup de chance parce que notre psychologue scolaire qui a son bureau à
l’école. Lorsque nous avons la moindre difficulté, il y a quelqu’un sur qui l’on peut
s’appuyer. »
N. BRUINAUD mentionne ici la psychologue de l’école qui lui fournit les éléments
nécessaires pour pouvoir comprendre la situation de certains de ces élèves. Outre
l’introduction qu’offre ce témoignage à la quatrième partie de cette étude basée sur la
coopération entre acteurs éducatifs, il est surtout l’illustration du conseil suivant : un système
inclusif se base sur la formation continue des enseignants exerçant depuis longtemps qui
doivent perpétuellement remettre en cause leurs pratiques et la vision de leur métier. Bien
souvent comme nous le verrons ensuite, ce sont des collaborateurs externes qui viennent
apporter un angle nouveau aux méthodes pédagogiques du corps enseignant, comme c’est le
cas dans l’établissement de N. ROSSI. Les sources d’informations consultées doivent alors
être caractérisées par leur régularité, leur exhaustivité et leur proximité pour une formation
« tout au long de la vie » de l’enseignant.
N. ROSSI : « Nous travaillons aussi avec l'Institut Psychiatrique parce que nous avons de
plus en plus de jeunes ayant des troubles psychologiques. Ils nous offrent des formations qui
sensibilisent nos professeurs. Nous suivons également des formations face au suicide pour
détecter les signes annonciateurs. »
◘ La plus-value Comenius : l’échange de pratiques, le maître-
mot
S’il est un apport des projets Comenius sur lequel les personnes interrogées sont
unanimes, c’est bien l’échange de pratiques qu’ils occasionnent. A travers beaucoup de
thèmes abordés jusqu’ici dans cette étude, l’observation, la discussion et la réflexion entre
acteurs de l’éducation sont les phénomènes qui de loin ont le plus nourri le débat sur les
meilleures méthodes pédagogiques européennes. Il en est ainsi des ressources matérielles et
humaines et donc bien sûr de budget ; des contenus, des supports et des évaluations des
enseignements, de l’organisation des salles de classes ; de la relation enseignants-élèves et de
la manière de répondre aux différents besoins spécifiques ; de la conception même des
besoins spécifiques et de la tolérance, du vivre-ensemble.
Echanger diverses pratiques agréées au niveau national et des documents de travail,
échanger de manière plus informelle autour des moments plus conviviaux offerts par le projet,
sont autant d’opportunités de prendre du recul sur son propre travail et sa conception du
34
métier et d’enrichir cette vision par comparaison avec ses homologues européens. Sans
compter que l’apport des projets Comenius n’est pas seulement didactique mais également
linguistique, culturel, humain, et que bien souvent il se diffuse à tout l’établissement
concerné. E. HUE nous explique comment ses collègues européens et elle-même ont élaboré,
expérimenté et diffusé ensemble les méthodes de la « pédagogie coopérative » à la base de
leur projet.
E. HUE : « Au sein de notre projet de « pédagogie coopérative », nous profitons de
l’enrichissement culturel, pédagogique, humain lors de chaque meeting réunissant les
participants ; nous avons là une occasion de formation tout au long de la vie. […] Nous
avons mis en place des séances basées sur les techniques de pédagogie coopérative et nous
avons fait connaître à nos collègues dans les écoles la teneur de notre projet. Nous sommes
sept pays partenaires et nous sommes tous impliqués dans cette recherche commune :
comment améliorer les apprentissages grâce aux techniques et méthodes de la « cooperative
learning » ? Nous avons proposé à nos élèves dans les sept pays les mêmes bases et
techniques de la « cooperative learning » ; nous en sommes à échanger nos séances, et nous y
arrivons malgré la barrière de la langue commune (l’anglais) pas toujours bien maitrisée
surtout en ce qui concerne le jargon pédagogique. Mais les professeurs impliqués ont
amélioré leur pratique de la langue, ce qui leur permet d’accéder aux recherches dans cette
langue. »
Adopter l’éthique de l’éducation inclusive
Aussi exhaustive et régulière soit la formation initiale et continue dispensée tout au
long de la vie aux éducateurs, ses effets demeurent limités si l’enseignant n’a pas intégré les
valeurs de l’éducation inclusive à propager chez ses collègues et surtout chez ses élèves.
S’imprégner d’une (nouvelle) philosophie de l’éducation nécessite des principes et des
manières de les mettre en pratique au quotidien dans la classe. Il s’agit tout d’abord de la
concevoir comme un ensemble diversifié, une dynamique hétérogène d’autant plus riche en
opportunités de par ses différences, et non comme une somme de problèmes. Croire en le
potentiel de chaque élève, élaborer des pratiques qui les mettent tous en valeur et engendrent
un processus d’apprentissage égalitaire sont les bases d’un système inclusif. Cela implique le
bon diagnostic des capacités et des faiblesses des élèves à besoins spécifiques comme nous
l’avons évoqué précédemment, et certains profils demandent bien entendus plus d’attention
que d’autres.
Ainsi N. HENO et N. BRUINAUD nous parlent des enfants du voyage. Outre les
difficultés culturelles auxquelles se heurtent les enseignants devant n’importe quelle
population migrante, la nomadité de ces enfants pose problème pour assurer la continuité de
l’enseignement parce qu’ils ont bien souvent de grandes lacunes, sont donc plus âgés que
leurs camarades de la classe, ont parfois des comportements difficiles et souffrent
d’absentéisme. La prise en charge de ces enfants s’avère donc délicate, particulièrement
lorsqu’il s’agit de leur orientation. Les enseignantes ont toutes deux vu l’intégration d’enfants
du voyage dans les CLIS de leur établissement et, tandis que ce placement semblait quelque
peu anarchique et « faute de mieux » dans celui de N. HENO, il était mûrement réfléchi par
l’équipe pédagogique dont fait partie N. BRUINAUD pour que l’apprentissage de tous se
déroule au mieux, indistinctement de leur origine sociale.
35
N. HENO : « Nous avons mis en place des structures pour les gens du voyage. C’est un
problème à part parce qu’ils sont beaucoup absents. Ils n’ont pas les mêmes références que
nous. On les mettait en CLIS parce qu’on n’avait pas de solutions, parce que parfois la CLIS
c’était un peu la classe « poubelle ». Ils étaient en difficulté, ils étaient parfois violent, ils ne
savaient pas lire… J’en avais beaucoup qui n’étaient pas déficients mais on ne savait plus
quoi en faire. »
N. BRUINAUD : « Lorsque l’on parlait du handicap dans le projet, on ne visait pas
seulement la CLIS mais aussi les élèves en grande difficulté. Nous avons des enfants du
voyage et ce sont des enfants qui ont des difficultés scolaires, qui ont souvent un ou deux ans
de retard, qui sont intégrés, quelquefois en CLIS pour certaines matières et dans les classes
ordinaires pour l’apprentissage de la lecture ou des mathématiques. […] Quand on les
intègre, c’est donc ponctuel. Nous ne les plaçons pas en CLIS parce que ce sont des enfants
du voyage, cela ne fonctionne pas comme ça. Ce n’est pas du tout notre objectif, on ne
s’occupe pas de leur origine, c’est vraiment pour aider les enfants dans leur apprentissage. »
◘ La plus-value Comenius : une émulation de principes
inclusifs
A travers l’échange de pratiques et d’idées, les professionnels de l’enseignement
peuvent effectivement amorcer la réflexion sur leurs méthodes pédagogiques. Si quelques
bonnes techniques et traits d’inventivité dans les méthodes pédagogiques surgissent çà-et-là
dans l’esprit des collègues européens, les rencontres sporadiques d’une semaine dans le cadre
des projets s’avèrent bien souvent, pourtant, trop courtes pour instaurer durablement des
pratiques différentes dans les établissements qui seraient inspirées de leurs pairs européens.
Les projets Comenius constituent donc l’étincelle qui permet de réfléchir sur l’enrichissement
de l’enseignement de chacun ; il s’agit moins d’une refonte des pratiques que d’une ouverture
d’esprit, d’un changement d’attitude subreptice, comme l’explique P. BELSEUR qui demeure
prudent sur les effets de long terme dans l’esprit de ses collègues.
P. BELSEUR : « Les échos sont surtout venus des professionnels et des chefs de service qui
m’ont fait savoir que pour certains d’entre eux, il y avait eu un changement dans leur attitude
et leur comportement ; à savoir si cela va être vrai sur le long terme. […] Je ne peux pas dire
que les professionnels aient changé radicalement. Ils se sont aperçus dans les ateliers mis en
place qu’ils permettaient à des jeunes d’améliorer leur comportement, la relation avec
l’autre. Cela ne va pas changer leurs habitudes et pratiques professionnelles du tout au tout.
Par contre, c’est la réflexion qu’ils peuvent avoir autour de cela qui leur permet de
développer des concepts, d’intégrer des notions particulières dans leurs pratiques
professionnelles qu’ils n’avaient pas forcément jusque là. C’est parce qu’ils ont vécu cela
dans le cadre du projet qu’ils pourront le mettre en place demain. »
36
IV) Coopérer
Si le pilier de l’éducation inclusive est bel et bien l’enseignant, il est essentiel de
comprendre que celui-ci n’est que le vecteur d’une démarche pédagogique concertée d’après
une consultation très régulière de l’ensemble des acteurs éducatifs qui gravitent autour de
l’enfant à besoins spécifiques. Tous se doivent d’adopter le même comportement basé sur un
socle de valeurs inclusives pour impulser à l’établissement un processus d’inspiration
mutuelle pour une vision objective des difficultés de l’enfant et une prise en charge efficiente.
Coopérer pour une action concertée et une culture scolaire
commune
Au sein de l’équipe pédagogique
Il s’agit de coopérer entre enseignants des matières du tronc commun, enseignants
professionnels : en s’observant les uns les autres ; en prodiguant et en recevant des conseils
tout en respectant la vision du métier de ses homologues et en acceptant la critique ; en
visitant et en faisant visiter les classes ; en suivant des formations ensemble.
Il s’agit aussi bien sûr de coopérer avec les enseignants spécialisés désormais présents
ponctuellement dans les établissements à titre de personnel-ressource : en s’inspirant de leur
expertise ; en les tutorant et les assistant selon leur rôle avec les élèves ; en mêlant les élèves
ordinaires et ceux à besoins plus particuliers le plus souvent possible.
N. ROSSI : « La force de nos établissements c'est que sur le même site, nous sommes des
professeurs issus d'un cursus classique de l'Éducation Nationale mais qui sont habitués à ce
genre de public. Nous travaillons avec des éducateurs spécialisés qui sont également sur
place, et avec les parents quand ils sont là. Nous sommes donc vraiment dans l'encadrement
maximum. C'est-à-dire que durant la journée, le jeune est au lycée et nous avons des
conditions de travail qui font que nous pouvons gérer au cas par cas (10 élèves par classe).
Tandis que le soir, ils se retrouvent dans un foyer, dans un internat où ils sont suivis par
d'autres éducateurs spécialisés. […] Lorsque l'on a des jeunes avec des troubles
psychologiques, les jeunes ont besoin d'un suivi, d'un cadre très fort, il faut qu'ils soient
encadrés la journée et le soir. Tout le monde se connait ici, nous sommes une petite équipe
donc il y a une grosse communication entre tout le personnel. Cela facilite l'encadrement du
jeune à tout moment de la journée.
J. ANDREA : « Le collège de L’Archet à Nice a une longue tradition d’accueil des élèves
handicapés (vingt ans). L’enseignement pour ces élèves est assuré par un directeur
coordonateur titulaire du DDEEAS, cinq professeurs des écoles spécialisés titulaires du
CAPA-SH option D, deux AVS-Sco rattachés à la structure et à la vie scolaire, des
professeurs du collège qui enseignent en intégration collective (classe d’UPI en entier) en
EPS, Education musicale et SVT. De plus, certains élèves sont intégrés individuellement dans
les classes de collège dans le cadre d’un contrat d’intégration. Une quinzaine de professeurs
du collège interviennent dans ce dispositif dans sept champs disciplinaires différents. Depuis
5 ans, certains professeurs ont suivi une formation spécialisée et sont titulaires du 2CA-SH (7
professeurs). »
37
Enfin, la coopération doit inclure les autres professionnels de l’établissement qui
interviennent dans le développement scolaire et personnel de l’enfant comme les
psychologues et les assistantes sociales. Les RASED (réseaux d’aides spécialisées pour les
élèves en difficulté) tels qu’en parle E. HUE, créés en 1990 et actuellement menacés de
disparaitre dans le cadre des réformes actuelles au grand dam des professionnels, incarnent
bien cette coopération institutionnalisée lorsqu’il s’agit d’enfants à besoins spécifiques : ils
comportent en effet des maîtres E (centrés sur l’apprentissage) et G (sur l’adaptation à l’école)
ainsi que des psychologues scolaires. Il est primordial de connaître l’expertise de ces
spécialistes pour se faire une idée précise des troubles médicaux et psychologiques de
l’enfant, comme l’explique N. HENO qui regrette quelque peu que ces secteurs soient encore
trop cloisonnés en France. Coopérer sous-entend donc communiquer très régulièrement dans
une ambiance conviviale et respectueuse pour assurer au mieux le suivi de tous les enfants de
manière continue et effective.
E. HUE : « Voilà comment cela se passe dans un RASED en France : les enfants en difficulté
sont dans les classes « ordinaires », puis sont repérés par les maitres qui mettent en place un
soutien, une aide en groupe ou individuelle ; quand les maitres ne viennent pas à bout des
difficultés, ils font appel à des maitres spécialisés (demandes d’aides). Puis les maitres E, G
ou le psychologue décident avec le maitre quelle orientation donner à l’aide concernant
chaque enfant, et mettent en place une remédiation pédagogique ou rééducative ou un suivi
psychologique. »
N. HENO : « Les terrains de la médecine, de la psychologie sont tout de même des chasses
gardées là où je travaille. Nous nous entendons très bien et nous échangeons énormément de
choses, il n’empêche qu’il y a dans les dossiers des parties auxquelles je n’ai pas accès. Ce
n’est pas grave parce que nous travaillons réellement en équipe et elle fonctionne très bien, je
sais à peu près ce qu’il se passe, mais c’est vrai qu’il y a tout de même un secret médical en
France auquel on ne touche pas. »
◘ La plus-value Comenius : accroitre la coopération dans
l’équipe éducative
Si donc la coopération semble être aux enseignants interrogés un élément fondamental
de la vie éducative de leur établissement, le projet Comenius a été pour eux l’occasion
d’approfondir ce travail en équipe, de lui donner un nouvel essor, dans le prolongement
naturel de la dynamique initiée au quotidien comme au collège supervisé par P. NICOLON.
E. HUE explique quant à elle que c’est cette implication commune dans la réussite de leurs
élèves que ses collègues et elle-même qui a influencé la sélection du thème du projet.
P. NICOLON : « Un peu toutes les disciplines ont été mobilisées pour le projet. C’est un petit
établissement (25 profs, 282 élèves) donc ici, à chaque fois que l’on monte une action, elle est
pluridisciplinaire et elle concerne tout le monde, comme l’UPI qui a été créé cette année :
pour accueillir des élèves handicapés, il faut que tout le monde s’y mette et tous les
professeurs ont joué le jeu. Je pense qu’il n’y a pas de groupes d’enseignants qui font des
petits projets dans leur coin, c’est le fait d’une équipe entière. »
38
E. HUE : « Nous intervenons selon un calendrier défini dans neuf écoles différentes, de gros
systèmes scolaires de 200 à 400 élèves ; nous ne sommes pas en nombre suffisant pour
répondre à la demande (sans compter la politique ministérielle actuelle pour réduire nos
effectifs) mais nous avons établi des priorités en accord avec notre hiérarchie. Nous sommes
impliqués dans la réussite de nos élèves, c’est pourquoi nous avons choisi le thème de la
« pédagogie coopérative » qui nous parait capable d’apporter des solutions à certains
problèmes.»
Entre les établissements
Elargir toujours plus le cercle éducatif autour de l’enseignant sous-tend non seulement
la coopération au sein de l’établissement mais également entre établissements voisins dans
une même région. Créer un réseau de ressources éducatives en échangeant des informations
au niveau local, ouvrir son propre environnement de travail à celui des autres, voire échanger
des professionnels ou des élèves pour un temps donné comme certains établissements le font
parfois : telle est la clé d’un pôle inclusif régional dont tous les moyens ont été mis en
commun pour disséminer les bénéfices de l’intégration de telles valeurs.
Ceci est particulièrement vrai depuis la loi française de 2005 en matière d’inclusion
des élèves handicapés dans la mesure où ceux-ci ont été transférés des établissements
spécialisés aux structures ordinaires. La collaboration ponctuelle entre les deux cursus est
donc devenue intensive et régulière dans la mesure où les établissements comme celui de P.
BELSEUR sont devenus des centres-ressources comme nous l’avons observé précédemment,
et les enseignants spécialisés qui n’intervenaient que pour des expertises ou des
enseignements sporadiques viennent désormais très régulièrement encadrer ces jeunes dans
leur établissement d’accueil.
P. BELSEUR : « L’établissement accueille des jeunes de 0 à 20 ans mais nous ne sommes pas
un établissement d’enseignement. Nous sommes un Institut médico-social. Aujourd’hui,
surtout depuis la loi de 2005, l’enseignement est dispensé par l’Education Nationale dans les
établissements d’enseignement. La dernière classe au sein de l’Institut a fermé au début des
années 2000. Aujourd’hui, surtout depuis la loi de 2005, tous les enfants que l’on
accompagne sont scolarisés en milieu ordinaire. Ce sont des écoles, collèges et lycées
d’Angers et du département, la majorité des jeunes que l’on accompagne sont issus du
département du Maine-et-Loire même si certains viennent ici pour des raisons liées à
l’Internat et l’aspect éducatif et rééducatif qu’il y a autour. […] L’Institut Montéclair est
devenu de plus en plus un centre de ressources dans le champ de la déficience visuelle. »
◘ La plus-value Comenius : créer des réseaux, diffuser les
bénéfices
L’on perçoit aisément les avantages de la dissémination des apports du projet
Comenius aux établissements alentour. La plupart des témoignages s’accordent sur le fait
qu’il serait dommage de limiter les bénéfices retirés de cette expérience européenne aux seuls
murs de leur établissement et sont prêts à les faire partager à leur commune, voire leur région
autant que possible. Parfois, la diffusion s’effectue même naturellement de par la différence
de niveau scolaire des partenaires européens qui souhaiteraient rencontrer des classes
39
françaises de leur âge, et vice-versa, comme c’est le cas pour le projet de N. BRUINAUD qui
s’inscrit dans une véritable politique de la commune pour unir les forces des structures
éducatives et mettre en valeur une localité rurale. Parfois également, les établissements
voisins font la démarche eux-mêmes pour profiter de la dynamique du projet, voire en initier à
leur tour, comme ceux qui ont été inspirés par le projet de P. ZANON.
N. BRUINAUD : « Même si officiellement les collègues de maternelles ne sont pas inclus
dans le projet, nous nous sommes dit que ce ne serait peut-être pas mal qu’il y ait un échange
avec eux aussi puisque notre collègue d’Irlande du Nord a une maternelle ; donc un atelier de
danse avec les Suédois a été organisé à l’école maternelle. Concernant les collègues de
Suède, ce sont plutôt des enseignants du secondaire donc nous avons fait appel au collège de
Confolens dans lequel il y aura peut-être un accueil. A la rentrée, je vais voir le proviseur du
lycée pour demander s’il serait d’accord pour accepter les collègues partenaires dans une
classe et peut-être avoir un échange avec les collègues français intéressés. C’est un peu notre
politique ici à Confolens. Nous avons un gros projet musical pour l’année prochaine et l’on
travaille beaucoup en partenariat avec le collège. Si l’on peut aussi associer le lycée sur ce
projet…nous trouvons que c’est important. »
P. BELSEUR : « L’implication supplémentaire envisageable, ce serait l’action du directeur
de l’établissement vis-à-vis de ses collègues pour les lier au réseau ENVITER, où depuis cette
année nous avons réussi à intégrer deux partenaires français (un Centre d’adaptation
professionnelle à Villejuif et le Centre régional pour déficients visuels de Clermont-Ferrand).
Aujourd’hui nous sommes donc trois partenaires français avec la volonté de travailler
ensemble sur les projets européens. Le réseau va nous permettre de travailler en commun et
de déposer des projets avec d’autres pays. »
P. NICOLON : « On a senti comme un intéressement particulier des établissements voisins
qui ont sollicité Patrizia ZANON pour qu’elle explique la manière de s’y prendre pour monter
un projet Comenius. Les trois établissements du bassin d’Albret ont déposé un projet. »
Donner un rôle prépondérant aux familles
Valoriser l’éducation informelle Faire contribuer tous les acteurs de la vie éducative au développement de l’enfant
implique bien sûr sa famille et en particulier les personnes responsables de son éducation, le
plus souvent les parents. Le milieu socioculturel dans lequel évolue l’élève en-dehors de
l’école, les valeurs familiales qu’on lui a inculqué, l’influence de ses amis, de son quartier,
des associations qu’il fréquente, de la religion, des loisirs, des sports qu’il pratique, en bref
l’éducation informelle est une part primordiale du développement de l’enfant que les
pédagogues ne peuvent négliger et se doivent de mettre en valeur dans un système inclusif,
car elle constitue le prolongement de l’éducation formelle prodiguée à l’école, et vice-versa.
C’est pourquoi les familles doivent être impliquées autant que faire se peut dans la vie
quotidienne de leur progéniture au sein de l’école et la coopération avec elles passe par une
communication très régulière : il s’agit de créer des canaux d’information bilatéraux de sorte
que l’équipe éducative soit tenue informée de la situation de l’enfant à la maison et que les
parents soient au courant de ce qui se passe dans la vie de leur enfant dans les murs de
l’établissement. Lorsqu’il s’agit d’élèves à besoins spécifiques, comme les enfants déficients
et handicapés dont s’occupe N. HENO, le dialogue avec les parents est institutionnalisé de
40
longue date puisque la prise en charge des élèves s’opère à leur initiative et toujours avec leur
accord, qu’il s’agisse d’orientation ou de suivi. Pour les profils d’élèves venant d’un milieu
défavorisé, il s’agit davantage d’inciter les parents à s’intéresser à la vie scolaire de leur
enfant et de valoriser ces familles, d’établir une relation de confiance réciproque puisque bien
souvent, elles ne sont sollicitées que pour parler des difficultés de leur enfant.
N. HENO : « Je fais partie d’une équipe pluridisciplinaire qui étudie des dossiers. Ils sont
montés par les écoles, ce sont les parents qui sont décideurs. Nous demandons quand il y a
une requête d’orientation ou d’aménagement à ce que l’école fasse partie du projet, et au-
delà de cela, l’enseignant référent de secteur. Ces enseignants-là sont sur le terrain, assurent
le suivi dans les écoles, rencontrent les parents…personnellement, je le fais très rarement
mais j’ai un lien avec eux et j’ai un lien avec l’école. Toute l’équipe travaille sur les dossiers
pour voir si la demande est recevable et ce que l’on peut proposer. Une fois que nous avons
donné notre avis, le dossier est transmis à la CDAPH (Commission des Droits et de
l’Autonomie des Personnes Handicapées), une commission qui va prendre les décisions. »
N. BRUINAUD : « Le placement en CLIS des enfants du voyage est une décision du Conseil
des Maîtres en accord avec les parents. C’est à chaque fois quelque chose que l’on décide
ensemble parce que c’est important que la famille soit concernée par le travail de l’enfant,
surtout avec ces familles qui ont un rapport à l’école qui n’est pas toujours évident, donc on
les implique beaucoup. Il y a beaucoup d’équipes éducatives qui sont faites pour discuter
avec les parents de comment on fait travailler l’enfant et comment il évolue au sein de
l’école. »
◘ La plus-value Comenius : impliquer les parents dans un
projet valorisant
Les parents étant ordinairement très impliqués dans la vie scolaire de l’élève à besoins
spécifiques, le projet Comenius constitue pour eux une formidable opportunité donnée à leur
enfant de voyager et de s’ouvrir à l’Europe, ce qui bien souvent s’est avéré impossible tout le
long de leur éducation formelle et informelle par manque d’initiative, de moyens ou d’estime
de soi. Beaucoup de témoignages évoquent le fait que ces enfants n’avaient jamais voyagé et
ne voyageront sûrement plus que très peu dans leur vie future. C’est ainsi que les élèves mais
aussi leurs familles se sentent impliqués dans un projet valorisant qui individualise pour une
fois les enfants non pas pour leur stigmate, mais dans le cadre d’une expérience unique et
positive. Les familles s’investissent même volontiers pour aider à concrétiser le projet
Comenius dans beaucoup de cas et la coopération entre enseignants et parents s’avère plus
vive que jamais. De plus, l’établissement bénéficie d’une bonne publicité auprès des futurs
parents d’élèves qui doivent choisir une structure où scolariser leur enfant.
P. NICOLON : « Un voyage en Turquie pour un élève de SEGPA dont les parents ne peuvent
pas payer la demi-pension, c’est un évènement non seulement pour lui mais aussi pour sa
famille. Les parents nous ont transmis de la reconnaissance, de la grande joie pendant tout le
voyage et l’absence de leur enfant, c’était une grande excitation, on ne les a jamais vu autant
au collège. Ce sont les parents que nous n’arrivons pas à avoir tout au long de l’année ! Et
pour cause : on les convoque le plus souvent pour parler des difficultés de leur enfant. Donc
il y a comme un « ras-le-bol » qui fait qu’ils n’ont plus envie de venir au collège et on ne les
41
voit jamais. Depuis que ce projet a été mis en place, on a vu les parents qui étaient à chaque
fois présents et très impliqués dans ce projet. […] Nous n’avons pas hésité à leur demander
de l’aide, nous avons voulu les faire participer jusqu’au bout, y compris dans les mobilités.
Leur association « La Buissonnière » avait été inscrite dans le projet Comenius qui a été
accepté. C’est la présidente de cette association qui est partie accompagner les élèves en
République Tchèque. »
N. ROSSI : « Les familles réagissent très bien. Elles ont assisté à une réunion d'information
avant, nous leur avons présenté un diaporama, des photos de la ville, l'organisation du
voyage, son contenu, les contacts... Les parents adhèrent totalement au projet et ont été
prévenus à l'avance car quand les parents viennent aux portes ouvertes, nous leur parlons
déjà des projets européens. »
Dans le cas du projet de P. BELSEUR spécifiquement centré sur les déficients visuels,
l’expérience a beaucoup intéressé les parents qui étaient heureux qu’un projet de cet
envergure soit centré sur les difficultés qu’ils rencontrent au quotidien avec leurs enfants, y
compris à la maison. N. HENO, qui a également axé son projet sur la scolarité des enfants à
besoins spécifiques, observe que l’impact sur la communauté des parents a même été
beaucoup plus large puisque les familles des enfants ordinaires ont gagné en tolérance, bel
exemple de l’impact conjugué d’une politique inclusive et d’un projet Comenius. J. ANDREA
envisage même un projet multilatéral sur le thème de la coopération avec les parents.
P. BELSEUR : « Il y a quelques jours, mes collègues ont reçu les parents des jeunes
impliqués dans ce projet pour leur en expliquer tout l’intérêt, ce qu’ils allaient y faire, qui ils
allaient rencontrer pendant cette semaine-là. Les parents sont très intéressés par le thème de
l’expression corporelle car elle pose problème chez les non-voyants. Je ne vais pas dire que
le projet européen va arranger toutes ces questions mais cela peut permettre aux jeunes de se
sentir beaucoup plus à l’aise, y compris dans la relation à l’autre ; et pour les parents, c’est
important car cela concerne le quotidien. »
N. HENO : « Cela a apporté énormément dans l’acceptation du handicap et des déficiences
en tous genres auprès des parents des élèves ordinaires. Cela a été un très grand pas : d’une
part auprès des enseignants qui n’avaient pas participé au projet, ils ont pris la mesure de ce
que c’était d’inclure des enfants différents. La commune d’Angoulins a bien fait les choses,
cela a eu un écho très large, et cela a vraiment permis d’autre part aux parents qui disent
quelquefois « je n’ai pas envie que mon enfant soit en classe avec un handicapé, cela va
retarder le niveau, les acquis… » de se dire que cet enfant avait les mêmes droits que tous les
autres. Parler de ce projet dans les classes a montré que la différence devait être intégrée et
que c’était bien que l’on soit tous différents… Du coup, les parents étaient porteurs du projet,
l’association de parents a également pris en charge financièrement le projet. »
J. ANDREA : Sur le thème du partenariat des familles dans la construction du projet de vie de
leur enfant, nous envisageons de poursuivre cette étude en engageant une recherche-action
avec l’Université de Nice et l’INS-HEA de Suresnes. Nous pourrions dès février 2011, faire
acte de candidature à un projet multilatéral COMENIUS avec d’autres établissements
européens et des associations de parents afin de pouvoir travailler et développer ce thème de
recherche.
42
V) Restructurer l’établissement
Cette étude a déjà évoqué les grandes lignes pédagogiques de l’éducation inclusive et
la manière dont l’enseignant et ses collègues peuvent appliquer ces principes au quotidien
dans leur travail. Il faut désormais rappeler que leur environnement de travail, à savoir
l’établissement qui les accueille, joue un rôle essentiel de supervision en apportant sa pierre à
l’édifice d’un système plus inclusif.
Modifier l’architecture organisationnelle pour promouvoir
l’éducation inclusive
Cadrer les changements opérés en ce sens dans sa propre enceinte de vie scolaire,
poser un regard bienveillant sur les acteurs de cette transformation, leur fournir les moyens
nécessaires, voici la mission de l’établissement inclusif qui commence par créer un
environnement adapté à tous les besoins. Cette mesure concerne bien sûr les infrastructures
pour enfants déficients ou handicapés par exemple, dont P. BELSEUR nous décrit toutes les
subtilités :
P. BELSEUR : « C’est le jeune avec l’aide de nos établissements qui s’adapte en milieu
ordinaire, mais la loi de 2005 précise que les établissements doivent être rendus accessibles.
Un établissement d’enseignement, c’est aussi un lieu public. Il y a une différence entre
l’accessibilité des bâtis (salles de classe…) et l’accessibilité de l’enseignement, des
manuels…où là il y a besoin d’intervention parce que l’Education Nationale n’a pas
aujourd’hui les compétences pour le faire. Par exemple un document en braille demande de
l’anticipation, que ce soit pour les examens, la documentation donnée par les enseignants ou
les manuels. »
Nous ne reviendrons pas sur l’adaptation des programmes, des évaluations et des
supports pour élèves à besoins spécifiques, sujet délicat, mais il faut s’attarder un moment sur
le coût qu’elle engendre, problématique qui relève pleinement du ressort de l’établissement et
à laquelle il doit s’intéresser sérieusement. L’inclusion contrairement aux idées reçues ne
coûte pas si cher si l’on utilise l’éventail de ressources déjà disponible et si l’on fait preuve
d’un minimum d’inventivité, comme l’initiative d’installer des salles de classe en rez-de-
chaussée pour les handicapés moteurs. Il semble nécessaire de plus de rationaliser et surveiller
l’allocation des ressources supplémentaires pour ces élèves de sorte qu’elles soient
correctement utilisées, dans leur intérêt seul.
Enfin, il faut privilégier une vision de long terme et à plus grande échelle : l’inclusion
en milieu ordinaire est moins onéreuse et mieux vaut pour la société prendre en charge un
élève à besoins spécifiques qu’un adulte qui n’aurait pas été correctement éduqué à être
autonome dans la vie quotidienne, à trouver un emploi, etc. Décloisonner et assister à moindre
coût : telle semble être la politique actuelle nationale en France qui peut s’avérer en théorie
excellente si elle est mise en pratique de manière ingénieuse, ce qui ne semble pas être l’avis
de toutes les personnes interrogées, mais telle n’est pas la question dans cette étude.
43
◘ La plus-value Comenius : s’inspirer de la politique des
établissements partenaires
Les visites effectuées dans le cadre des partenariats Comenius semblent donc être les
moments idéaux pour observer la façon dont les établissements sont dirigés et agencés, et
quelles mesures sont prises pour faciliter l’intégration des élèves à besoins spécifiques.
Beaucoup d’enseignants commentent les ressources matérielles et humaines utilisées, envient
ou déplorent, réfléchissent en tous les cas à la meilleure manière de faire travailler tout le
monde dans le meilleur environnement possible. Et ceci doit être également valable pour les
enseignants dans un système inclusif qui devrait être conçu en pensant à leur bien-être sur leur
lieu d’activité, comme l’ont fait les Suédois selon N.BRUINAUD, favorablement
impressionnée :
N. BRUINAUD : « En Suède, il était très surprenant de voir que toutes les tables étaient très
hautes, même pour les petits. Quand j’ai posé la question, on m’a répondu que c’était pour
éviter aux maîtresses de se faire mal au dos. Chez nous, les tables sont toutes petites et la
maîtresse est toujours penchée ou accroupie. »
Adopter et diffuser une politique de la diversité
Si l’allocation de moyens conditionnant les ressources matérielles et humaines pour
l’encadrement de la scolarité dépend largement de structures administratives supérieures à
l’établissement, celui-ci peut en tous les cas adopter indépendamment des volontés politiques
externes une ligne de conduite éthique basée sur les principes de l’éducation inclusive. La
démarche éducative des établissements français est institutionnalisée depuis la loi
d’orientation du 10 juillet 1989 par l’instauration d’un projet d’établissement. Celui-ci définit
les modalités de mise en œuvre des objectifs et des programmes nationaux ainsi que du projet
académique via le conseil pédagogique pour assurer l’adéquation entre des valeurs et des
actions. Ce projet se décline en plusieurs volets : la pédagogie bien sûr, l’orientation, la
citoyenneté, les TICE…et les mesures adoptées dans ces domaines seront évaluées par la
suite. Cette institution s’avère plus ou moins personnalisée selon le chef d’établissement et
son équipe et peut parfois se traduire par une véritable philosophie de l’établissement, comme
il en est question dans le lycée de N. ROSSI qui dépend de la Fondation d’Auteuil, fortement
imprégnée des valeurs catholiques. C’est cependant P. NICOLON, chef d’établissement en
collège rural, qui parle le mieux du projet qu’il orchestre.
N. ROSSI : « Nous les profs dépendons de l’Education Nationale et les autres sont sous la
coupe de la Fondation d’Auteuil. Il y a des valeurs. Si l’on vient travailler ici, on doit un
minimum respecter les fondements de la Fondation qui s’appuient sur l’Evangile (respecter
l’autre, accompagner…). Il y a une culture et même une démarche qualité là-dessus. Nous
demandons bien aux gens s’ils connaissent les piliers de la fondation. »
44
P. NICOLON : « Etant en milieu rural, nous sommes isolés et éloignés des grands centres
culturels, nous avons donc dans notre projet d’établissement un axe important dans le
domaine de l’ouverture culturelle. Il y a un deuxième axe important qui est d’accompagner
les élèves pour une scolarité complète au collège. Les élèves qui sont en difficulté ont
tendance à ne pas terminer leur scolarité au collège, à partir avant, à quitter le système sans
diplôme ou sans entrer dans une formation. C’est aussi un axe important du projet
académique, ne laisser personne au bord du chemin. Le troisième axe : les orienter vers une
formation ambitieuse. Parce que ce qui caractérise aussi le public que nous accueillons, ce
sont les projets de formation de faible envergure. Quatrième axe : l’éducation à la
citoyenneté et l’ouverture aux autres. Nous accueillons un public très divers, au niveau des
difficultés, des handicaps, des suivis à l’extérieur. Cela justifie que l’on mette en place
l’éducation à la citoyenneté et que l’on développe chez les élèves le regard positif vis-à-vis de
la différence, d’où notre projet Comenius. »
◘ La plus-value Comenius : le volet européen du projet
d’établissement
Depuis 2008, le projet d’établissement doit aussi être axé sur la culture et l’ouverture à
l’international et, récemment également, sur la formation tout au long de la vie. Les projets
Comenius s’inscrivent donc parfaitement dans cette démarche de qualité de l’éducation pour
lui donner une impulsion européenne et en faire un projet exemplaire aux yeux des parents et
du reste de la communauté locale. Pour la plupart des personnes interrogées, ces projets sont
une vraie plus-value en matière de publicité pour la structure dans laquelle ils travaillent.
L’établissement gagne bien souvent en prestige et en crédibilité dans la région et les projets
prennent pleinement part à sa promotion, surtout lorsque les projets sont en parfaite
adéquation avec les valeurs de l’inclusion.
M. BOZEC : « Notre établissement a pu promouvoir son ouverture sur l’extérieur, sur
l’Europe avec un échange conséquent sur les problèmes de handicap et les méthodes
pédagogiques liées. Nos élèves handicapés ont été reconnus dans notre ville et l’établissement
a pu partager le plaisir de la création avec les habitants et les artistes. »
N. ROSSI : « On parle très souvent de l'Europe ici, cela fait partie du projet d'établissement.
Quand nous recevons les parents, nous mettons en avant la dimension européenne du lycée. »
P. NICOLON : « Cela participe au rayonnement du collège, c’est certain. Lorsque je vais
dans les écoles élémentaires pour présenter l’établissement, évidemment, quand je parle de
Comenius et des rencontres européennes que nous faisons, les parents sont particulièrement
attentifs, connaissent déjà, en ont entendu parler, l’ont vu dans la presse, ou l’un de leurs
enfants y a déjà participé ou risque d’être concerné dans les années à venir. C’est vraiment
une reconnaissance pour le collège. »
45
Associer les partenaires locaux
Collaborer avec les acteurs de la vie locale renvoie à la logique de coopération
mentionnée précédemment, primordiale pour assurer la mise en pratique des valeurs de
l’inclusion et garantir un enseignement de qualité aux élèves, et surtout ceux à besoins
éducatifs spécifiques. Cependant le contact avec l’extérieur relève davantage des
administrateurs de l’établissement que de l’équipe éducative : ceux-ci assurent le relais entre
la vie scolaire et les collectivités locales, associations, familles…L’on sait désormais le rôle
que les parents ont à jouer dans l’éducation inclusive. Qu’en est-il des autres acteurs
externes ? Lors de la scolarité des enfants à besoins spécifiques, la plupart sont sollicités en
tant que béquilles éducatives, comme les professionnels qui prennent les élèves en stage, ou
psychologiques, comme les structures locales spécialisées et les associations dévouées à la
jeunesse, ainsi que nous l’explique N. ROSSI.
Il s’agit ici d’identifier les soutiens potentiels pour l’éducation, matériels, financiers ou
humains, du niveau national au local, du public au privé, des grandes structures
administratives aux petits communes, des multinationales aux commerces de proximité, des
associations aux médias et solliciter leurs services. Le but avoué étant que tout le tissu local
participe à l’amélioration du système éducatif et accroisse la visibilité de l’établissement à la
source du processus.
N. ROSSI : « Nous travaillons avec d'autres acteurs locaux que les entreprises qui accueillent
nos élèves. Comme beaucoup d'écoles, nous avons des problèmes d'addiction ; donc nous
avons des structures locales à Nantes comme « Triangle » qui gère l'addiction aux drogues si
nous la détectons chez certains jeunes. […] Lors de nos portes ouvertes, toute la journée du
samedi, le lycée est ouvert aux donateurs, parce que nous en avons beaucoup, et sous forme
de kermesse, nous exposons nos travaux. Tous ceux qui nous aident peuvent voir ce que l'on a
fait. »
◘ La plus-value Comenius : insuffler une dynamique
européenne régionale
Les projets Comenius rencontrent évidemment un franc succès lors de leur initiation
dans la mesure où ils correspondent à la volonté politique de la plupart des échelons publics
français, à savoir l’ouverture du monde de l’éducation sur l’Europe et l’organisation de
projets d’envergure transnationale avec les jeunes. Les responsables de communes et de
régions, interlocuteurs habitués des acteurs de l’Europe, encouragent donc vivement ces
expériences en fournissant leur soutien tout au long des deux années. Les médias locaux
servent en général systématiquement de support en publiant quelques articles sur les mobilités
sur un ton élogieux. Assurer la liaison dans ce cadre entre les acteurs locaux et les élèves
permet également à ces derniers de découvrir leur localité comme le fait le projet de D.
POULAT.
Sans conteste, le programme Comenius permet à de petites structures de valoriser leur
position dans le système éducatif de leur région et d’y associer tous ses acteurs dans une
optique de rayonnement local en matière de pédagogie. Parfois, le programme est même
l’occasion d’impulser un véritable débat politique sur l’inclusion au sein de la communauté
locale, comme à travers le projet de N. HENO, ou d’initier un partenariat européen de plus
46
long terme et de plus grande envergure, comme le projet de jumelage de la commune où
travaille P. NICOLON.
N. BRUINAUD : « Le projet a été extrêmement bien perçu par la mairie. […] Madame
l’adjointe au Maire a voulu m’accompagner en réunion à Poitiers. Suite à cette réunion, elle
en a parlé à monsieur le Maire et au Conseil municipal qui ont bien voulu mettre à notre
disposition le comptable de la commune et le percepteur. Le projet demande donc une bonne
relation entre les enseignants et la municipalité. La mairie a accueilli les collègues étrangers
quand ils sont venus avec une petite cérémonie, une remise de cadeaux, un verre de l’amitié…
C’était très intéressant, très agréable de sentir que l’on est soutenus par la municipalité. […]
De plus le projet correspondait bien aux activités estivales de Confolens qui accueille un
festival folklorique tous les étés. »
N. HENO : « A partir de tout ce que nous avons pu ramener dans nos écoles, les écoles à
côté, dans le bourg, à partir de ce que l’on a échangé avec les parents, les associations, nous
avons pu faire savoir qu’il y avait des enfants à besoins particuliers dans cette ville et que
l’on pouvait faire des tas de choses avec eux, qu’ils étaient importants. […] Des articles sont
parus dans les journaux, on nous a interviewés, il y a eu un impact et il aurait pu être bien
plus important que la seule commune si l’on avait pu demander à d’autres écoles en France
de se regrouper. J’ai eu beaucoup de chance d’aborder ce projet dans une commune, une
école qui l’ont porté, y compris les deux fois où il a échoué. »
D. POULAT : « Notre projet a pour titre « fier de ma région, j’en deviens l’ambassadeur ».
Au travers des six thèmes développés, nous avons pu donner envie à des élèves qui peinent
scolairement de découvrir leur région, rédiger des articles, des commentaires de photos,
développer leur anglais pour pouvoir communiquer avec nos pays partenaires. »
N. ROSSI : « La Maison de l’Europe de Nantes nous aide si l’on a besoin de drapeaux, de
posters… Le Conseil régional nous met à disposition des intervenants. En octobre, nous
allons partir en Sicile donc une intervenante va venir parler aux jeunes pour leur exposer les
grandes lignes culturelles de la Sicile. Nous allons aussi faire cela avec les projets Leonardo
cette année, il faut qu’ils soient « briefés » sur le lieu où ils vont aller. »
P. NICOLON : « C’est un projet qui a associé un journaliste local qui à chaque retour a fait
un petit point sur l’avancée du projet, sur les élèves pour essayer d’avoir leur sentiment sur
ce qu’ils étaient en train de vivre. Ensuite, pour les autorités locales, je pense au maire et au
conseiller général, qui se sont bien associés au projet en étant disponibles à chaque fois que
l’on a accueilli nos partenaires européens. Le projet a débuté ici et ils sont venus à la
rencontre des Tchèques et des Turcs. Lors de la rencontre finale au mois de mai, toute
l’équipe du collège a été invitée à la mairie en présence du conseiller général avec une
réception. Les parents et leur association ont aussi été associés. La mairie a même espéré
conclure un jumelage avec la ville de l’un de nos partenaires. Le maire nous a proposé cette
idée et attend notre avis là-dessus. »
47
Cérémonie d’accueil
Projet 2009 « Differente but equal » (N. BRUINAUD)
48
Conclusion
Ainsi la problématique de départ était-elle axée sur la plus-value hypothétique du
programme Comenius pour les publics à besoins spécifiques dans les établissements porteurs
des projets. Il apparait dans un premier temps qu’il est difficile de cibler lesdits besoins
spécifiques et que les bénéfices apportés par les projets Comenius sont présentés par les
personnes interrogées de manière générale, à destination de tous les élèves qui peuvent
chacun à leur tour, à un moment de leur scolarité, présenter des difficultés d’apprentissage.
C’est bel et bien dans cette optique qu’il faut travailler dans un système idéalement inclusif.
Il s’agit comme observé précédemment d’adapter les contenus, les supports et les
évaluations à tous les besoins ainsi que l’assistance humaine et matérielle : pour cela, il
semble que les projets Comenius soient des supports de travail ludiques et accessibles à tous
et l’occasion pour les enseignants d’échanger des pratiques sur les moyens mis en place pour
adapter les programmes. Il s’agit également de considérer l’enfant dans la globalité de son
existence et de prêter attention à son développement personnel, professionnel, son psychisme
et son comportement, de favoriser son bien-être et son estime de soi : en cela, les projets
Comenius constituent le cadre idéal pour développer des qualités et compétences cruciales
chez l’enfant comme la confiance en soi, l’autonomie, l’esprit de groupe, la tolérance et
l’ouverture à l’Europe.
Pour parvenir à mettre en pratique ces mesures, il faut que la formation initiale et
continue des enseignants soit conforme aux valeurs de l’inclusion et intègre concrètement des
pratiques pédagogiques pour faire face à la diversité. Les projets Comenius sont
principalement vantés par les personnes interrogées comme le lieu d’un échange de méthodes
européennes d’enseignement et une fraternisation positive avec leurs homologues européens,
sans compter l’acquisition de compétences linguistiques, interculturelles, humaines.
L’enseignant n’étant pas seul pour répondre aux besoins spécifiques de ses élèves, une
coopération accrue basée sur la communication et la confiance est nécessaire entre tous les
acteurs éducatifs internes et externes à l’établissement, que les projets Comenius semblent
exacerber. L’établissement enfin, se doit de créer un cadre propice à la promotion et à la
diffusion des valeurs inclusives et les projets Comenius valorisent la dimension européenne
de la structure porteuse, lui donnant le crédit nécessaire pour prôner des principes tels que la
tolérance.
P. BELSEUR : « Je souhaite vraiment continuer à travailler sur les projets Comenius parce
que quand je vois l’enthousiasme qu’il y a autour, je me dis qu’il ne faut surtout pas s’arrêter
en si bon chemin parce qu’il y a d’autres thématiques à développer sur lesquelles les jeunes
pourraient travailler avec d’autres partenaires européens. »
N. BRUINAUD : Depuis que le projet est lancé, je n’arrête pas d’en parler à tout le monde et
de dire « allez-y, vous allez voir, c’est très intéressant, ça permet d’avoir du recul sur sa
formation, de voir comment les autres font… » ; je fais beaucoup de publicité pour Comenius
maintenant.
P. NICOLON et P. ZANON : « Nous ne pouvons qu’encourager à faire des projets, c’est ce
que l’on fait quand on va dans les établissements. Il faut être sacrément motivé mais c’est une
expérience unique. C’est beaucoup plus enrichissant qu’un simple voyage à l’étranger ou
même qu’un échange scolaire, cela n’a rien à voir. Quand on en a fait un, on n’a qu’une idée
en tête c’est d’en faire un autre. »
49
Annexe 1 : liste des protagonistes et de leur projet
Entretiens
BELSEUR Philippe, Institut Montéclair (Mutualité française Anjou-Mayenne) à Angers
Projet de partenariat multilatéral “L’expression corporelle et musicale comme moyen
d’intégration sociale des personnes déficientes visuelles” (2009-2011)
Partenaires : Hongrie, Roumanie
Budget accordé par l’Agence française : 25 000 €
BRUINAUD Nathalie, Ecole élémentaire Pierre et Marie Curie à Confolens
Projet de partenariat multilatéral « Différents mais égaux » (2009-2011)
Partenaires : Irlande du Nord, Suède
Budget accordé par l’Agence française : 14 000 €
HENO Nadine, Ecole élémentaire Jean Moulin à Angoulins
Projet de partenariat multilatéral « Scolarisation des enfants à besoins particuliers » (2008-
2010)
Partenaires : Allemagne, Roumanie, Italie
Budget accordé par l’Agence française : 16 000 €
ROSSI Nicolas, Lycée professionnel BROTTIER (fondation d’Auteuil) à Bouguenais-les-
Couets
Projet de partenariat multilatéral « Fluvial and Seaside Influences in our European countries »
(2009-2011)
Partenaires : Allemagne, Italie, Finlande, République Tchèque
Budget accordé par l’Agence française : 18 000 €
ZANON Patrizia, Collège La Plaine à Lavardac
Projet de partenariat multilateral « Let’s play to go beyond the differences » (2008-2010)
Partenaires : Turquie, République Tchèque
Budget accordé par l’Agence française : 20 000 €
Témoignages par Internet
ANDREA Joël, Collège l’Archet à Nice
Projet de partenariat multilatéral « Stratégies éducatives pour une insertion adaptée » (2008-
2010)
Partenaires : Portugal, Italie
Budget accordé par l’Agence française : 20 000 €
BADUFLE Guillaume, Lycée polyvalent Henri Laurens à Saint Vallier
Projet de partenariat bilatéral « Découverte d’une culture à travers Ionesco et le théâtre »
(2009-2011)
Partenaire : Roumanie
Budget accordé par l’Agence française : 25 000 €
50
BOZEC Maryse et WILTZ Emilie, Institut Médico-éducatif La Ravinière à Osny
Projet de partenariat multilatéral « Special artist through Europe » (2009-2011)
Partenaires : Espagne, Grèce, Pologne, Grande-Bretagne, Finlande, République Tchèque
Budget accordé par l’Agence française : 22 000 €
BRACQ Regis, Collège François Vincent Raspail à Carpentras
Projet de partenariat multilatéral « Together against violence » (2009)
Partenaires : Espagne, Italie, Bulgarie, Roumanie, République Tchèque, Malte
Budget accordé par l’Agence française : 25 000 €
HUE Evelyne, RASED Bois de Nèfles St Paul à St Paul (La Réunion)
Projet de partenariat multilatéral « Cooperative learning: I am proud to be a teacher but I am
even prouder to be a learner » (2009-2011)
Partenaires : Allemagne, Grèce, Italie, Espagne, Pologne, Grande-Bretagne
Budget accordé par l’Agence française : 18 000 €
KOVARSKI Caroline, Lycée Fresnel à Paris
Projet de partenariat multilatéral « OPtiminzing the Inclusive Classroom » (“OPTIC”) (2008-
2010)
Partenaires : Luxembourg, Slovénie, Irlande, Royaume-Uni, Suède, Bulgarie, Norvège
Budget accordé par l’Agence française : 16 000 €
POULAT Dominique, Collège Notre Dame du Bon Conseil à Oullins
Projet de partenariat multilatéral “Fier de ma région, j’en deviens l’ambassadeur” (2009-
2011)
Partenaires : Belgique, Italie, Grande-Bretagne, Allemagne, Grèce
Budget accordé par l’Agence française : 25 000 €
Merci à tous pour leur engagement dans les projets européens, leur disponibilité et leur
accueil chaleureux. Merci également à M. GUINOT, directeur de l’école de Confolens, ainsi
qu’à M. NICOLON, principal du collège de Lavardac pour m’avoir reçue.
51
Annexe 2 : questionnaire-type pour les entretiens
A) Quotidien dans l’établissement
Etablissement
- Quelles sont les caractéristiques de votre établissement ?
o Taille, location (urbain/rural), ordinaire/professionnel/spécialisé…
o Tranche d’âge
o Types de cursus, structure organisationnelle
o Projet pédagogique/politique en matière d’intégration/d’égalité des chances
o Mesures d’insertion
o Association avec les partenaires locaux
o Quelle relation établissements/parents ?
Formation de l’interlocuteur/des enseignants
- Quelle est votre formation ?
- Quelle est votre formation pour les élèves à besoins spécifiques ? (initiale/continue)
- Quelle est la formation de vos collègues ? (édu spé, assistantes sociales…)
Profil des élèves
- Quel est le profil des élèves avec qui vous travaillez ?
- Handicap :
o Quel est le type de handicap de vos élèves ?
o Quelle assistance matérielle est nécessaire ?
Utilisez-vous beaucoup les TICE ?
o Quelle assistance humaine est nécessaire ?
o Quelles méthodes pédagogiques employez-vous (grandes lignes) ?
o Les intégrez-vous dans les parcours ordinaires ? Que pensez-vous de cette
intégration ?
- Milieux défavorisés :
o Votre établissement est-il situé dans une zone défavorisée ?
o Quelle est la composition de vos élèves ? D’où viennent-ils ?
o Comment les élèves vivent-ils leur condition ? Leur relation aux autres ?
- Dont immigration :
o Quelles sont les nationalités les plus représentées dans l’établissement ?
o Les élèves parlent-ils bien la langue du pays d’accueil ? Le cas échéant,
comment s’en accommodent-ils ? Quelles répercussions sur l’éducation ?
o Ont-ils des problèmes d’adaptation (normes de comportement, culture) ?
o Des mesures ont-elles été prises pour faciliter leur pratique de la langue ?
- Comment répondre aux réactions des autres enfants ?
- Comment faites-vous face à une classe de niveaux hétérogènes ? Avez-vous changé
votre gestion du temps/des ressources/votre vision des choses ?
- Comment inclure les plus faibles dans le travail/la dynamique de groupe ?
52
- Comment ne pas négliger les plus forts ?
- Quelles activités sportives, culturelles ?
- Comment décelez-vous les troubles de l’apprentissage dans votre propre matière ?
(écrit/oral) ?
- Comment y remédiez-vous ? Adaptez-vous vos méthodes d’enseignement ? Vos
évaluations ?
- Vos élèves bénéficient-ils d’un suivi personnalisé dans le travail ? dans l’orientation ?
- Les faites-vous participer à beaucoup de projets ? Citez en un ou deux.
- Travaillez-vous beaucoup en partenariat avec vos collègues/vos collègues spécialisés ?
- Comment décelez-vous qu’un enfant est en passe de décrochage scolaire ? Essayez-
vous d’y remédier et par quel moyen ? Comment selon vous remotiver un élève ?
- Quels sont selon vous les problèmes et les sentiments les plus fréquents dans le
développement personnel des adolescents que vous avez en classe ? Vos élèves vous
en font-ils part ? De quelle nature l’aide que vous leur apportez peut-elle être ?
Sollicitez-vous l’aide du personnel éducatif/spécialisé ?
- Outre les problèmes classiques de l’adolescence, comment vivent-ils leurs besoins
spécifiques ? La relation avec les autres élèves ?
B) Projet Comenius
Caractéristiques du projet
- Où avez-vous entendu parler de Comenius ?
- Pourquoi en avoir entrepris un ? Avez-vous déjà fait un projet de ce type ?
- Spécificités du projet :
o Date de lancement, type de projet, nombre de partenaires, qui coordonne
o Pourquoi ce thème ? Quelle réponse pour quelle situation ?
o Quelle motivation pour le choix des partenaires européens ?
o Brève description du projet
o Brève description des activités/mobilités déjà effectuées/à effectuer
o Brève description du produit final
Élèves
- Combien d’élèves sont impliqués dans le projet ?
- Quel est le profil des élèves participant ? Pourquoi eux ?
- Quel est le profil des élèves choisis pour la mobilité ? Pourquoi eux ?
- Comment ont-ils vécu cette participation ? Le contact avec les autres européens ? Leur
mobilité ?
- Leurs partenaires avaient-ils le même profil ?
- Quelle est leur contribution significative au projet ?
- Quelles matières ont été mobilisées ?
- De quelles capacités ont-ils du faire preuve pour réaliser ce projet ?
- Quelle a été la langue de travail et comment les élèves ont-ils géré la difficulté
linguistique ?
- Comment ont-ils vécu le changement d’environnement culturel dans
l’établissement/les familles ?
- Pensez-vous que vos élèves aient gagné en autonomie, en confiance en eux… ?
- Pensez-vous que vos élèves aient gagné en tolérance, prise de conscience de la
diversité culturelle et de sa richesse… ?
53
- Quels autres apports personnels pour l’élève ?
- Comment les familles ont-elles réagi face au projet ?
- Handicapés :
o comment la mobilité a-t-elle été gérée au point de vue matériel ?
o comment les TICE ont-ils été utilisées pendant le projet ?
o quels défis spécifiques à la participation d’élèves handicapés ?
Apport professionnel et personnel
- Qu’avez-vous découvert de nouveau en comparant les différents systèmes éducatifs ?
o En matière de pratiques pédagogiques (exemple)
o En matière de prise en charge des élèves à besoins spécifiques (matérielle,
psycho…)
o A propos de l’idée que vous vous faites de votre métier
o A propos de l’idée que vous vous faites des stigmates de vos élèves
o A propos de l’idée que vous vous faites de la diversité et de sa gestion, de
l’inclusion
- Les établissements partenaires ont-ils une vision différente en matière d’inclusion
sociale ? D’ouverture sur l’Europe ? Vous a-t-elle profité ?
- Pensez-vous qu’il existe une vision spécifique de l’inclusion dans l’Education
nationale ?
- Que vous a apporté le contact d’autres cultures et nationalités ?
- Quel a été l’apport linguistique ?
- Quel a été l’apport pout vos collègues ?
Etablissement :
o De quelle manière votre chef d’établissement a-t-il contribué à ce projet ?
o De quelle manière vos collègues ont-ils participé au projet ?
o Comment le tissu local a-t-il participé à ce projet ? (collectivités, assos…)
o De manière générale, estimez-vous avoir été soutenu dans ce projet ?
o Quelle est la politique de votre établissement en matière d’ouverture (sur
l’Europe) ?
o Votre projet a-t-il bénéficié à d’autres établissements dans la région ? Au tissu
local ? Votre produit final va-t-il servir durablement des fins pédagogiques ?
A-t-il initié une dynamique dans l’établissement/la région ?
o Quel écho dans les médias locaux ? Quelle visibilité ? Quelle reconnaissance ?
C) Conclusion
- A qui votre projet a-t-il le plus bénéficié ? Pourquoi ?
- Quel est votre souvenir le plus marquant dans ce projet ?
- Quelles ont été les embûches les plus significatives pour mener à bien ce projet ?
- Quelles recommandations feriez-vous pour améliorer le programme ?
- Conseilleriez-vous ce programme comme une plus-value pour les élèves BES ?
54
Annexe 3 : questionnaire pour témoignages Internet
55
56
57
58
59
60
Annexe 4 : rappel du cadre de référence des huit
compétences-clé pour l’éducation et la formation tout
au long de la vie
La présente recommandation devrait contribuer au développement d’une éducation et d’une
formation de qualité, tournées vers l’avenir et adaptées aux besoins de la société européenne
en soutenant et en complétant l’action des Etats membres destinés à garantir que, d’une part,
leurs système d’éducation et de formation initiale offrent à tous les jeunes les moyens de
développer des compétences clés à un niveau qui leur permette d’être préparés à la vie
d’adulte, et qui constitue une base pour de futurs apprentissages et pour la vie
professionnelle et que, d’autre part, les adultes soient en mesure de développer et d’actualiser
leurs compétences clés grâce à un système cohérent et élaboré d’éducation et de formation
tout au long de la vie. (Recommandation du Parlement européen et du Conseil du 18
décembre 2006)
Grandes lignes des contenus :
♫ Compétence 1 : Communication dans la langue maternelle
- Faculté d’exprimer des concepts, pensées, faits, sentiments à l’oral et à l’écrit ; lire,
parler, écouter, écrire
- Connaitre les modalités d’interaction verbale, le vocabulaire et la grammaire, les
registres et styles de langage
- Adapter la communication à la situation, formuler des arguments
- Utiliser la langue d’une manière positive et responsable
♫ Compétence 2 : Communication en langues étrangères
- Mêmes compétences que pour la langue maternelle mais également compréhension
des autres cultures : conventions sociales, variabilité des langues
- Curiosité pour la diversité culturelle
♫ Compétence 3 : Compétence mathématique et compétences de base en sciences et
technologies
- Maitrise du calcul, du raisonnement dans les problèmes de la vie quotidienne
- Modes mathématiques de pensée (logique) et de représentation
- Comprendre le monde de la nature et les changements induits par l’activité humaine
- Jugement critique, curiosité, intérêt pour les problèmes éthiques
♫ Compétence 4 : Compétence numérique
- Maitrise des TIC pour stocker, échanger…connaissance suffisante pour en user dans la
vie quotidienne ; recueillir et traiter l’information avec un esprit critique
- Comprendre que collaboration en réseau peut être un support pour la connaissance,
recherche, créativité, innovation
- Etre sensibilisé aux limites et principes éthiques du web
61
♫ Compétence 5 : Apprendre à apprendre
- Entreprendre et poursuivre un apprentissage par une gestion efficace du temps et de
l’information
- Connaitre ses méthodes et besoins et les offres disponibles, les mettre en adéquation et
surmonter les obstacles
- Acquérir motivation et confiance, autodiscipline
- Etre capable d’organiser son propre apprentissage et d’évaluer son propre travail
♫ Compétence 6 : Compétences sociales et civiques
- Compétences personnelles, interpersonnelles et interculturelles
- Maitrise des comportements permettant de participer de manière constructive à la vie
sociale et professionnelle
- Connaissance des structures sociales et politiques
- Etat optimum de santé mentale et physique
- Comprendre les codes sociétaux dans différents environnements
- Comprendre l’interaction culture nationale/européenne
- Tolérance, négociation, empathie, intégrité
- Compétences civiques : notions de justice, de démocratie, d’égalité, de citoyenneté
- Connaissance d’Histoire et d’actualité y compris sur l’UE
- Engagement, solidarité ; participation constructive à a prise de décision, sentiment
d’appartenance à une communauté
♫ Compétence 7 : Esprit d’initiative et d’entreprise
- Aptitude à passer des idées aux actes : créativité et innovation, capacité de gestion
d’un projet
- Sensibilisation aux valeurs éthiques/à la bonne gouvernance
- Bases d’économie et d’évaluation du risque
- Travail individuel ou en groupe
- Détermination, anticipation, indépendance
♫ Compétence 8 : Sensibilité et expression culturelles
- Importance de l’expression créatrice d’idées, d’expériences et émotions
- Musique, littérature, arts du spectacle et visuels
- Connaissance du patrimoine mondial, principales œuvres classiques et culture
populaire
- Comprendre la diversité culturelle européenne et le besoin de la préserver
- Comprendre l’importance des facteurs esthétiques
- Aptitudes d’appréciation et d’expression
- Développer sa propre créativité et participer à la vie culturelle
62
Annexe 5 : Cadre législatif mondial, européen, français
sur l’éducation et l’inclusion sociale
Dans le monde
1948 : Déclaration Universelle des Droits de l’Homme
- art 26 : prémices de l’inclusion dans le droit à l’éducation
o « Toute personne a droit à l’éducation. […] L’éducation doit viser au plein
épanouissement de la personnalité humaine »
1960 : Convention UNESCO pour la lutte contre la discrimination dans le domaine de
l’enseignement
- « le terme discrimination comprend toute distinction, exclusion, limitation ou
préférence qui, fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l’opinion
politique ou tout autre opinion, l’origine nationale ou sociale, la condition économique
ou la naissance, a pour objet ou pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de
traitement en matière d’enseignement… »
- Les Etats s’engagent à « abroger toutes dispositions législatives et administratives et à
faire cesser toutes pratiques administratives qui comporteraient une discrimination
dans le domaine de l’enseignement » ainsi qu’à « rendre obligatoire et gratuit
l’enseignement primaire »
1969 : Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
- « Les Etats parties s'engagent à prendre des mesures immédiates et efficaces,
notamment dans les domaines de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et de
l'information, pour lutter contre les préjugés conduisant à la discrimination raciale et
favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre nations et groupes raciaux ou
ethniques […] »
1966 : Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
- réaffirmation du droit de toute personne à l’éducation
1989 : Convention internationale des droits de l’enfant
- art 23 : droit des handicapés aux soins spéciaux et à une aide adaptée ; cela
gratuitement et de sorte que l’enfant ait accès à l’éducation, la formation, la
préparation à l’emploi, des activités récréatives…de façon à assurer une intégration
sociale et un épanouissement personnel
1990 : Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous (déclaration de Jomtien)
- programme phare Education pour tous (EPT)
o objectifs
faire en sorte que, d’ici à 2015, tous les enfants, en particulier les filles,
les enfants en difficulté et ceux qui appartiennent à des minorités
ethniques, aient la possibilité d’accéder à un enseignement primaire
obligatoire et gratuit, de qualité et de le suivre jusqu’à son terme
améliorer sous tous ses aspects la qualité de l’éducation dans un souci
d’excellence […]
63
- art 6 : améliorer le contexte de l’apprentissage
- art 8 : mettre en place des politiques d’accompagnement : « L’éducation fondamentale
pour tous suppose un engagement et une volonté politiques étayés par des mesures
budgétaires et allant de pair avec une réforme de l’enseignement et un renforcement
des institutions. »
- art 9 : mobiliser les ressources
1993 : Règles universelles pour l’égalisation des chances des personnes handicapées
- « l’égalisation des chances désigne le processus par lequel les divers systèmes de la
société, le cadre matériel, les services, les activités et les informations sont rendus
accessibles à tous, et en particulier aux handicapés »
- « Ils (les handicapés) doivent recevoir l’assistance dont ils ont besoin dans le cadre des
structures ordinaires d’enseignement, de santé, d’emploi et de services sociaux. »
1994 : Déclaration de Salamanque et cadre d’action pour l’éducation et les besoins spéciaux
- Ciblée sur l’accès et la qualité de l’éducation
- Les programmes éducatifs doivent être conçus en fonction de la diversité et les
personnes à besoins éducatifs spéciaux doivent être intégrées en cursus ordinaire
- « Les écoles ordinaires ayant cette orientation intégratrice constituent le moyen le plus
efficace de combattre les attitudes discriminatoires, en créant des communautés
accueillantes, en édifiant une société intégratrice et en atteignant l’objectif de
l’éducation pour tous ; en outre, elles assurent efficacement l’éducation de la majorité
des enfants et accroissent le rendement et, en fin de compte, la rentabilité du système
éducatif tout entier. »
- Le terme « besoins éducatifs spéciaux » renvoie à tout ce qui est handicap ou difficulté
d’apprentissage
- « L’éducation visant à répondre aux besoins éducatifs spécifiques […] a pour point de
départ que les différences humaines sont normales et que, par conséquent,
l’apprentissage doit être adapté aux besoins de chaque enfant, au lieu d’obliger
l’enfant à s’adapter à des hypothèses établies quant au rythme et à la nature du
processus d’apprentissage. »
2000 : Cadre d’action du Forum mondial sur l’éducation de Dakar
- réaffirme l’éducation comme droit fondamental pour tous (Jomtien 1990)
- corrélation établie entre exclusion du système éducatif et pauvreté ; nécessité du
soutien de la société civile et des organismes de financement pour endiguer le
phénomène
- accent mis sur les groupes marginalisés et les filles
2000 : Objectifs du millénaire
- objectif 2 : assurer l’éducation primaire pour tous
2005 : édition par l’UNESCO de principes directeurs pour l’inclusion
- nécessité de créer un outil pour identifier les groupes exclus et fournir de la matière à
réflexion sur l’éducation inclusive et la manière de la mettre en pratique
2006 : Convention relative aux droits des personnes handicapées
- 82 signataires, le nombre le plus élevé de l’histoire des conventions
64
- Principes directeurs : non-discrimination, intégration pleine et effective à la société,
acceptation des handicapés comme faisant partie de la diversité humaine, égalité des
chances, accessibilité, respect du développement des capacités de l’enfant handicap
2008 : 48e session de la Conférence Internationale de l’Education à Genève
- thème : « L’Education pour l’inclusion, la voie de l’avenir »
- recommandations :
o accorder la plus haute priorité au financement de l’éducation malgré la crise
économique car vecteur indispensable pour lutter contre la pauvreté qu’elle va
engendrer
o « Promouvoir des cultures et des environnements scolaires adaptés aux enfants,
propices à un apprentissage efficace et inclusif pour tous, sains et protecteurs,
attentifs à l’égalité entre les sexes, et encourager le rôle actif et la participation
des apprenants eux mêmes, de leurs familles et de leurs communautés.»
o « Former les enseignants en leur donnant les compétences et les matériels
appropriés pour enseigner à des groupes d’élèves différents et répondre aux
divers besoins d’apprentissage des apprenants au moyen de méthodes telles
que le développement professionnel au niveau de l’école, la formation initiale
relative à l’inclusion, et un enseignement attentif au développement et aux
points forts de chaque apprenant. »
o « Doter les administrateurs des écoles des compétences nécessaires pour
répondre de manière efficace aux divers besoins de tous les apprenants et
promouvoir l’éducation pour l’inclusion dans leurs établissements. »
En Europe
Traité de Rome 1957 : traité économique dans une logique de spill-over donc pas d’aspect
politique à court terme, encore moins de volet social ou éducatif
Traité de Maastricht 1992 : instauration d’une politique communautaire pour l’éducation et la
formation professionnelle
2000 : Charte des Droits Fondamentaux de l’Union européenne (intégrée au Traité de
Lisbonne)
- art 14 : droit de toute personne à l’éducation, à la formation professionnelle et
continue
- art 21 : non discrimination
- art 26 : intégration sociale et professionnelle des handicapés
2001 : Stratégie de Lisbonne (en matière d’éducation et de formation pour 2010)
- Diminution du nombre de jeunes de 15 ans présentant des difficultés de lecture d'au
moins 20%
- taux moyen de décrochage scolaire inférieur à 10 %
- 85 % des jeunes de 22 ans doivent avoir terminé le 2e cycle de l'enseignement
secondaire
- augmentation du nombre total de diplômés en mathématiques, sciences et technologies
d'au moins 15 %, et réduction du déséquilibre entre hommes et femmes sur ces sujets
- 12,5% de participation moyenne des adultes (de 25 à 64 ans) à l'éducation et la
formation tout au long de la vie
65
2007 (-2013) : Programme pour l’Education et la Formation tout au long de la vie
- et ses sous-programmes : Leonardo, Comenius, Erasmus, Grundtvig…
2007 : Conférence européenne sur les Personnes Handicapées
- Berlin, 11 et 12 juin sous la présidence allemande UE
- « Education, emploi, opportunités égales : renforcer les handicapés. »
- Inspirée de la convention des NU 2006
- Etablir une stratégie commune d’application de la convention
- Première réunion informelle historique des ministres de l’UE en charge du handicap,
en marge de la conférence
2008 : Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE, ancien TCE)
- titre 12 : éducation, formation professionnelle ; développement d’une dimension
européenne de l’éducation ; développement d’une éducation de qualité, mention de la
diversité culturelle et linguistique du système éducatif à respecter
2009 : cadre stratégique pour la coopération européenne (un des cinq piliers : « Education et
Formation 2020 »)
- Au moins 95% des enfants entre l'âge de 4 ans et l'âge pour commencer
l'enseignement primaire obligatoire devraient participer à l'enseignement préscolaire
- Le taux moyen des jeunes de 15 ans ayant des lacunes en lecture, en mathématiques et
en science devrait être inférieur à 15%
- Le taux moyen de décrochage scolaire devrait être inférieur à 10%
- Le taux moyens d'adultes entre 30 et 34 ans ayant une éducation de troisième cycle
devrait atteindre au moins 40%
- Une moyenne d'environ 15% des adultes (de 25 à 64 ans) devraient participer à
l'éducation et la formation tout au long de la vie.
En France
1998 : loi d’orientation relative à la lutte contre l’exclusion
- traitement des exclusions y compris dans l’éducation
- accès aux droits fondamentaux
1999 : plan Handiscol’
- plan de scolarisation des enfants et adolescents handicapés
- axe 1 : réaffirmer le droit et favoriser son exercice
- axe 2 : constituer des outils d'observation
- axe 3 : améliorer l'orientation et renforcer le pilotage
- axe 4 : développer les dispositifs et les outils de l'intégration
- axe 5 : améliorer la formation des personnels
2004 : plan national de cohésion sociale
- 3e pilier : égalité des chances
o Programme 15 : accompagner les enfants en fragilité
o Programme 16 : accompagner les collégiens en difficulté et rénover
l’éducation prioritaire
o Programme 19 : rénover l’accueil et l’intégration des populations immigrées
o Programme 20 : lutter contre les discriminations
66
2005 : Loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des
personnes handicapées
o Intégration dans les cursus ordinaires devient la règle
o Scolarisation des enfants qui doivent rester en instituts spécialisés
o Déploiement d’AVS et d’enseignants-ressources / meilleure formation des
enseignants
Objectifs actuels du gouvernement français
o garantir l’accès de tous aux droits fondamentaux (surtout logement)
o aller d’une logique d’assistance vers une logique de prévention/insertion
o répondre plus rapidement aux urgences sociales
o accroitre l’observation nationale / le benchmarking pour mieux comprendre les
phénomènes de pauvreté et les réponses à y apporter
o mobiliser les acteurs institutionnels nationaux, européens et la société civile
67
Bibliographie
Publications au Journal Officiel de l’UE
« Charte des droits fondamentaux de l’UE »
Journal Officiel des Communautés Européennes (18/12/2000)
« Les compétences clés pour l'éducation et la formation tout au long de la vie »
Journal officiel de l’Union Européenne (30/12/2006)
Recommandation du Parlement Européen et du Conseil du 18 décembre 2006
« Mieux inclure l'orientation tout au long de la vie dans les stratégies d'éducation et de
formation tout au long de la vie »
Journal officiel de l’Union Européenne (13/12/3008)
Résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres, réunis au
sein du Conseil du 21 novembre 2008
Rapports de la Commission Européenne
“Study on Access to Education and Training, Basic Skills and Early School Leavers”
Rapport final septembre 2005
GHK consultants (Ref. DG EAC 38/04)
Commission Européenne, DG Education et Culture
“Key Education indicators on social inclusion and efficiency”
Rapport final octobre 2006
par EU-RA (European Research Associates) Luxembourg
Commission Européenne DG Education et Culture
« Effets des partenariats scolaires Comenius sur les écoles participantes »
Rapport final 2007
par Gesellschaft für Empirische Studien bR, Kassel ; Zentrum für Schul- und
Bildungsforschung an der Martin-Luther-Universität in Halle-Wittenberg Halle / Saale
Commission européenne, DG Éducation et culture
« Ségrégation des enfants roms dans l’enseignement. La directive sur l’égalité raciale comme
moyen de lutte contre la discrimination sctructurelle »
Rapport 2007
par Lilla Farkas au nom du Réseau européen des experts juridiques en matière de non-
discrimination (fondée sur la race ou l’origine ethnique, l’âge, le handicap, la religion ou les
convictions et l’orientation sexuelle)
Commission européenne, DG Emploi, affaires sociales et égalité des chances
“Child Poverty and Well-Being in the EU. Current status and way forward.”
Rapport 2008
Commission Européenne, DG Emploi, Affaires Sociales et Egalité des Chances
68
Rapports d’organisations soutenues par la Commission Européenne
« Intégration scolaire et pratiques pédagogiques »
Rapport de Synthèse 2003
Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des
besoins particuliers (soutien de la Commission Européenne)
« Education Inclusive et Pratiques de Classe dans l’Enseignement Secondaire »
Rapport de Synthèse 2005
Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des
besoins particuliers (soutien de la Commission Européenne)
« Diversité multiculturelle et besoins éducatifs particuliers »
Compte-rendu résumé 2009
Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des
besoins particuliers (soutien de la Commission Européenne)
“Development of a set of indicators for inclusive education in Europe”
Rapport de synthèse 2009
Agence européenne pour le développement de l’éducation des personnes présentant des
besoins particuliers (soutien de la Commission Européenne)
« Vers une éducation inclusive : exemple de bonnes pratiques d’éducation inclusive »
Rapport 2007
par Ingrid Körner, Présidente d’Inclusion Europe; Kay Tisdall, Université d’Edinburgh; Sonja
Uhl1mann, Fondation du Syndrome de Down de Madrid; Bernhard Schmid, Lebenshilfe
Vienne; Geert Freyhoff, Inclusion Europe; Daniela Rígrová, Inclusion Europe.
Inclusion Europe (association européenne des organisations des personnes handicapées
mentales et leurs familles) (soutien de la Commission Européenne)
Documents français
« La contribution de l’éducation prioritaire à l’égalité des chances des élèves »
Rapport n° 2006-076 ; 2006
à monsieur le ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la
Recherche
Inspection générale de l’éducation nationale
Inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et de la Recherche
Rapport d’information fait au nom de la commission des Affaires sociales sur l’application de
la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation
et la citoyenneté des personnes handicapées,
par M. Paul BLANC, Sénateur.
Annexe au procès-verbal de la séance du 3 juillet 2007
Sénat – Session extraordinaire de 2006-2007
« Gérer les transitions : l’orientation tout au long de la vie dans l’espace européen »
Compte-rendu de la conférence de Lyon, France (17, 18 septembre 2008)
69
Rapport annuel 2008
Haute Autorité de Lutte contre les discriminations et pour l’Egalité (La Halde)
Site dédié du gouvernement français à l’Année Européenne 2010 :
http://www.leurope-contre-la-pauvrete.gouv.fr/
Rapports de l’UNESCO
« Déclaration de Salamanque et Cadre d’action pour l’Education et les besoins spéciaux. »
Adoptés par la Conférence mondiale sur l’Education et les besoins éducatifs spéciaux : accès
et qualité. »
Salamanque, Espagne, 7/10 juin 1994
UNESCO 1994
« L’Éducation pour tous : tenir nos engagements collectifs »
Cadre d’action de Dakar
Adopté par le Forum mondial sur l’éducation
Dakar, Sénégal, 26-28 avril 2000
UNESCO 2000
« Comprendre les besoins des enfants dans les classes intégratrices et y répondre. Un guide
pour les enseignants. »
Rapport de synthèse
par Roy McConkey
UNESCO 2003
« Vaincre l’exclusion par des approches intégratrices dans l’éducation. Un défi, une vision. »
Document de réflexion
UNESCO 2003
« Changer les méthodes d’enseignement. La différenciation des programmes comme solution
à la diversité des élèves. »
Rapport de synthèse
UNESCO 2005
« Principes directeurs pour l’inclusion : Assurer l’accès à « l’Education Pour Tous »
Rapport de synthèse
UNESCO 2005
« L’éducation pour l’inclusion : la voie de l’avenir »
Quarante-huitième session de l’UNESCO
Genève, 25/28 novembre 2008
Conclusions et recommandations / Document de référence
UNESCO 2008
« Vers une école inclusive et une amélioration de l’apprentissage. »
Synthèse des résultats d’études de cas menées dans différents pays
par R. Govinda, Université nationale de planification et d’administration de l’éducation (Inde)
UNESCO 2009