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COLLECTION FAMAGOUSTE · ANACHARSIS. À la mémoire de Michel Lassithiotakis et Stéphane...

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Constantinople 1453

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COLLECTION FAMAGOUSTE

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Constantinople1453

Des Byzantins aux Ottomans

Textes et documents

Réunis, traduits et présentés sous la direction de Vincent Déroche et Nicolas Vatin

Avec le concours deMarie-Hélène Blanchet, Elisabetta Borromeo, Thierry Ganchou et Guillaume Saint-Guillain

ANACHARSIS

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À la mémoire de Michel Lassithiotakis et Stéphane Yerasimos.

Ouvrage publié à l’initiative des UMR 8167 (Orient et Méditerranée) et 8032 (Cen-tre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centre-asiatiques) du CNRS, avec leconcours du Labex RESMED (ANR-10-LABX-72) dans le cadre du programmeInvestissements d’avenir ANR-11-IDEX-0004-02 et du Labex TEPSIS, et soutenudans le cadre du contrat de filière CNL-DRAC-Région Midi-Pyrénées.

ISBN : 979-92011-29-6

Diffusion distribution : Les Belles Lettres

© Anacharsis Éditions, 201643, rue de Bayard31000 Toulousewww.editions-anacharsis.com

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Avant-proposVincent Déroche et Nicolas Vatin

Le 29 mai 1453 est une de ces dates qui émergent dans l’histoire de l’hu-manité. Certains en ont fait le point de départ des temps modernes. Danstous les cas, la chute de Constantinople, qui éliminait à jamais l’Empireromain d’Orient, était la fin d’un monde, tandis que la conquête d’Istan-bul donnait aux Ottomans un immense prestige impérial et promettaitde nouveaux succès à l’expansion musulmane en Europe. L’historien sedoit de nuancer ces images. Pour autant cette vision symbolique de l’évé-nement – toujours latente aujourd’hui dans les réflexions ou polémiquessur la place de l’islam dans le monde ou, récemment encore, sur le statutde Sainte-Sophie – était déjà celle largement partagée par les contempo-rains du siège et leurs premiers successeurs. C’est à ceux-ci que le présentvolume a choisi de donner la parole, parce qu’ils sont notre source sur desévénements qu’il importe de comprendre en historiens d’aujourd’hui,soucieux de préciser les faits avec le plus d’exactitude possible, mais aussid’en éclairer le contexte politique, social et culturel et de comprendre cequ’ils signifièrent pour ceux qui les vécurent, de près ou de loin.

Nous ne sommes pas les premiers à tenter cette aventure. Il y aura bien-tôt quarante ans, Agostino Pertusi faisait paraître, sous le titre La cadutadi Costantinopoli, un ouvrage de grande ampleur qui eut un retentisse-ment important. Il ne s’agissait pas de proposer au public une nouvellehistoire du siège et de la chute de Constantinople, mais de lui donneraccès aux sources en fournissant une traduction italienne de textes denatures très diverses : témoignages, mais aussi récits d’historiens, échosplus ou moins lointains, etc. A.  Pertusi s’était notamment efforcé de

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donner toute leur place aux sources orientales, ce qui, à l’époque, était uneinnovation. Des introductions et une annotation soigneuses, une chrono-logie fine des événements, une bibliographie à jour, contribuèrent à fairede ce recueil de traductions un ouvrage de référence, toujours de premièreutilité aujourd’hui.

Était-il utile de refaire ce travail en rassemblant à nouveau la tra -duction de textes et documents sur la chute de Constantinople (ou laconquête d’Istanbul) ? À cette question, il est aisé de répondre qu’unpareil effort n’avait jamais été fait en français. Non seulement les lecteursfrancophones ne disposaient pas d’un volume rassemblant systématique-ment cette documentation, mais encore la plupart des auteurs n’avaientjamais été traduits en français, à commencer par Doukas et Kritoboulos.

D’autres considérations, cependant, poussaient les promoteurs duprésent volume.

En premier lieu, ils étaient animés par le souci de fournir un travail phi-lologique aussi sérieux que possible, en revenant aux textes originaux, ceque Pertusi n’avait pas toujours pu faire dans le domaine oriental. Aussifirent-ils appel à des collaborateurs nombreux, qui acceptèrent de partici-per à l’aventure, malgré les tâches qui les occupaient déjà. Ceci explique àla fois le temps qu’il fallut pour venir à bout du présent volume et cer-taines particularités de celui-ci, sur lesquelles nous reviendrons plus bas.

Bien entendu, la recherche historique et la bibliographie avaient conti-nué à se développer, à la fois dans le domaine de l’histoire et de l’historio-graphie. Nos connaissances sur les événements et notre façon d’aborderles sources ont changé depuis les années 1970, notamment (mais non uni-quement) en ce qui concerne les textes ottomans. Bien plus, un certainnombre des documents latins ou des chroniques ottomanes traduits icin’étaient alors pas disponibles. L’importance accordée dans le présentrecueil aux textes apocalyptiques, ou à des hagiographies de saints der-viches (qui ne décrivent pas le siège) est le reflet de l’évolution de notremanière de faire de l’histoire ou, pour le dire autrement, de nous interro-ger sur la nature d’un événement comme le siège de 1453, sur sa significa-tion pour les acteurs, de part et d’autre des murailles de la Ville, et pourleurs descendants.

Enfin il paraissait important – mais il est juste de dire qu’A. Pertusis’était déjà efforcé de travailler dans cet esprit – de ne pas séparer artifi-ciellement les domaines linguistiques et culturels. D’ailleurs, à l’analyse,

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on s’aperçoit qu’auteurs hellénophones et turcophones pouvaient parti-ciper pour une part, fût-ce marginalement, à une culture commune,notamment une culture orale qui nous échappe.

L’organisation générale de l’ouvrage est le reflet de ces réflexions préli-minaires.

Notre but étant de fournir au lecteur un maximum de sources et de luien faciliter la compréhension, il était nécessaire de faire quelques brèvesintroductions générales mettant les événements et les textes en contexte :une introduction historique, cosignée par un byzantiniste et un orien -taliste, est suivie d’une chronologie, à usage pratique et plus légère quecelle d’A. Pertusi. Puis trois exposés sont consacrés aux particularités dessources grecques et slaves, occidentales et ottomanes (en turc ou en arabe).

Les textes traduits sont répartis, indépendamment de la langue dedépart, en cinq sections thématiques. La première (« Historiens : les textesde référence ») rassemble des témoignages majeurs d’auteurs contempo-rains des faits, qui ont constitué ou constituent la base de nos connais-sances. Y figurent bien sûr les quatre historiens byzantins, Kritoboulos,Doukas, Sphrantzès et Chalkokondylès, sources des récits modernes de lachute (malgré leurs points de vue très divergents) avec Barbaro qui, étantplutôt un témoin, trouve sa place dans la section suivante ; on y a jointPosculo et Nestor Iskander dont le témoignage a été jusqu’ici insuffisam-ment exploité à cause de difficultés philologiques, ainsi qu’un extrait desmémoires de Constantin Mihailović. Dans le cas particulier des auteursottomans, on y a placé Tursun Bey et Aşıkpaşazade, dont les récits ont étélargement la source des autres his toriens ottomans, y compris parmi leurscontemporains. Non sans hési tation, on y a ajouté Enveri, dont le poèmen’est pourtant que la versification d’un original en prose inconnu, maisdont la date de rédaction est la plus ancienne de tout le corpus en langueturque. La deuxième section (« Lettres et documents ») est l’occasiond’apporter en contrepoint de ces sources littéraires bon nombre desources documentaires, le plus souvent (mais pas exclusivement) occi -dentales, qui apportent au lecteur un contact direct et bienvenu avecl’événement concret. Le titre de la troisième section (« Monodies etlamentations ») parle de lui-même : un échantillon de textes donne uneidée de l’écho douloureux de l’événement dans le monde chrétien. Lestextes grecs, surtout ceux en vers, sont devenus partie intégrante de la culture populaire grecque qui garde la nostalgie de la Ville et de l’Empire

Avant-propos 7

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idéalisé. On a choisi de rassembler dans une même quatrième section(« Prophéties, apocalypses et textes mystiques ») d’une part des textesproprement apocalyptiques – dont les travaux de Stéphane Yerasimos ontmontré quelle était la porosité, dans des contextes politiques changeants,entre les différentes cultures qui se côtoyaient et s’affrontaient –, d’autrepart des récits ottomans d’une tonalité un peu particulière : le passage desTevarih-i al-i Osman d’Oruç, qui revient sur la thématique de la villemaudite chère aux opposants à la politique impériale de Mehmed II, faitécho aux textes apocalyptiques ; deux autres émanent du monde des der-viches et présentent les événements à travers le prisme d’une vision mys-tique populaire. La cinquième section enfin rassemble sous le titre« Après la bataille : de l’histoire à la légende » des textes rédigés après lesévénements, soit par des contemporains du siège travaillant de secondemain, en historiens plus qu’en mémorialistes, soit bien plus longtempsaprès les événements ; le Pseudo-Sphrantzès est emblématique de cettereconstruction d’un passé assez récent en une légende qui oblitérapresque les vraies sources dans la mémoire collective sous la dominationottomane. Pour ne pas alourdir le volume, c’est par une petite synthèsedue à Michel Balivet que le lecteur pourra prendre connaissance de troisnarrations ottomanes tardives, rédigées au xviie siècle, « entre mythe ethistoire ». Pour finir, un épilogue constitué de trois courtes synthèsesvient rappeler que la date du 29 mai 1453 scella la fin d’un monde, maiségalement le début d’un autre et aussi, peut-être, la perpétuation partielledu premier dans le second.

Chaque traduction est annotée et précédée d’une introduction surl’auteur et son œuvre qui fournit une courte bibliographie. Dans laforme, une homogénéisation a été faite. En revanche, tant en raison dutemps qu’a pris la préparation du volume que par principe, nous avonschoisi de laisser à chaque contributeur une grande liberté. Aussi l’impor-tance de la notice liminaire, le nombre et la longueur des notes, et mêmel’esprit dans lequel elles sont rédigées, peuvent varier un peu, dans unelimite que nous espérons raisonnable.

Pour éviter de répéter à chaque occurrence des éclaircissements pour-tant nécessaires, nous avons annexé d’une part un glossaire définissantdes termes techniques ou des notions géographiques ou mythologiques,d’autre part une liste de biographies des principaux personnages appa-raissant dans les textes. Une concordance permettra également de se

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repérer entre les différentes formes que pouvaient prendre, selon lalangue, les noms de lieux ou de personnes.

Avant de clore cet avant-propos, qu’on nous permette de dire notregratitude à tous ceux qui nous ont aidés à venir à bout de ce projet :d’abord Frantz Olivié qui a accepté généreusement de publier le livre,puis les Labex TEPSIS et RESMED qui ont apporté une contributionfinancière essentielle, enfin des amis et collègues dont l’aide ou le soutien,à un moment ou un autre, se sont révélés essentiels : Mmes Nathalie Clayeret Anne-Marie Touzard, MM. Jean-Claude Cheynet et Driss Mekhouar.Notre reconnaissance va également aux contributeurs du volume, quibien souvent ont accepté d’y participer par amitié, certains dans la der-nière étape, pour nous permettre d’achever.

Plus d’une année a passé en effet depuis l’époque où Bernard Flusinlançait la première idée de ce recueil. Avec le temps, de nouveaux col-lègues, souvent de jeunes collègues, se sont joints à nous, pour notre plusgrand plaisir. D’autres, hélas, nous ont quittés. En ce moment d’aboutis-sement où nous aurions souhaité les avoir auprès de nous, notre pensée vaà Michel Lassithiotakis et Stéphane Yerasimos, tous deux compagnons dela première heure décédés prématurément, à qui nous dédions ce livre.

Avant-propos 9

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Note sur les transcriptions

Les textes rassemblés dans ce volume parlent des mêmes lieux, des mêmespersonnes, des mêmes institutions parfois. Ils le font dans des langues dif-férentes, en employant des formes diverses. À pareil casse-tête, il n’est pasde solution satisfaisante. Dans les introductions et les notes, le principesuivi est d’utiliser soit la forme française quand elle existe (janissaire, Gal-lipoli), soit, pour les noms de lieu, la forme officielle actuelle (Skopje,Edirne). Les renvois figurant dans l’index devraient permettre de relier,par exemple, Edirne à Andrinople. Dans les textes traduits, les solutionsse devaient d’être plus empiriques. Il eût été absurde de garder, dans destextes ottomans, Gelibolu au lieu de Gallipoli. Mais faire dire à un auteurbyzantin Istanbul ou Bursa tiendrait du contresens : le plus souvent, c’estpour la forme grecque qu’on a opté.

Les prénoms grecs ont été francisés : Luc Notaras et non pas LoukasNotaras.

En ce qui concerne les transcriptions, on a évidemment conservé lesformes données par la langue utilisant un alphabet latin, y compris pourles traductions de l’ottoman, où c’est une transcription en caractères turcsactuels qui a été adoptée. De façon plus contestable, on en a fait autantpour quelques rares formes arabes ou persanes. Pour des lecteurs moinsfamiliers du turc que de l’italien ou du latin, rappelons en deux mots lesprincipales caractéristiques de l’alphabet turc :

Voyelles : E, e = è // İ, i (avec point) = i // I, ı (sans point) = seprononce comme le i, mais avec l’extrémité de la langue ramenéeen arrière vers le milieu du palais // Ö, ö = eu (comme dans beurre)// U, u = ou (comme dans jour) // Ü, ü = u (comme dans pur).

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Consonnes : C, c = dj // Ç, ç = tch // G, g = gu (comme dansguerre) // Ğ, ğ = y après e, i, ö, ü ; après a, ı, o, u il indique une brèvesuspension de la voix // Ş, ş = ch // Y, y = toujours consonnecomme dans Cayenne.

Les consonnes finales sont toujours prononcées : Sinop se pro-nonce Sinope.

Pour ce qui est du grec, on a suivi la transcription traditionnelle pourle grec ancien, qui ne correspond pas à la prononciation moderne mais al’avantage de distinguer les lettres homophones.

Le hèta est rendu par un « è » marqué d’un accent grave. L’epsilon esttranscrit par un « e », qui ne porte un accent aigu que quand celui-ci estutile à la prononciation française (pour éviter le « e » muet français).Cet accent aigu est absent dans la syllabe finale lorsque l’epsilon y est suivid’une consonne qui est prononcée.

L’ôméga est distingué du omicron par un accent circonflexe.Les lettres composant des diphtongues sont transcrites comme les let-

tres indépendantes, sauf le upsilon, rendu par un « y » lorsqu’il est seulmais par un « u » lorsqu’il est le second élément d’une diphtongue. Legamma seul est rendu par un « g », mais l’est par un « n » lorsqu’il pré-cède kappa, xi, chi ou un second gamma.

L’esprit rude a été rendu par un « h » initial. Les accents, l’esprit douxet l’esprit rude sur le rhô ont été ignorés.

Nota : le lecteur trouvera aux p. 1394-1397 des cartes des lieux concernés. Les termes suivis dans letexte d’un astérisque se trouvent explicités dans le Glossaire p.  1285.

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Introduction généraleGuillaume Saint-Guillain et Nicolas Vatin

Il est des événements auxquels les mécanismes complexes de la construc-tion du souvenir et de l’écriture de l’histoire ont conféré une valeur symbolique et une charge émotionnelle si fortes qu’ils risquent, à êtreréexaminés de plus près, d’apparaître finalement trop maigres dans desvêtements trop grands. Une fois dépouillés de leur valeur mémorielle etmnémotechnique, il reste souvent l’impression que l’essentiel de ce qu’ilsprétendent incarner et résumer s’est passé avant, après, ailleurs ou autre-ment. Tel est en partie le cas de la chute de Constantinople, mais en partieseulement 1. Certes, les faits et la date de 1453 –  ou de 857 pour les Ottomans, grands amateurs de chronogrammes * – ont acquis très tôtun  pouvoir d’évocation qui les dépasse et l’ont ensuite, sinon conti -nûment conservé, du moins périodiquement retrouvé : au soir de sontriomphe, à en croire en tout cas Tursun Bey 2, la pensée du conquérantlui-même ne s’égarait-elle pas loin du champ de bataille de l’heure, dans

1. Parmi les ouvrages consacrés au siège et à la chute de Constantinople, voir en dernier lieuM. Angold, The Fall of Constantinople to the Ottomans, qui s’intéresse non tant à l’événement lui-même qu’à son contexte et à son écho. Pour un récit suivi des péripéties du siège, on peut encore sereporter à S. Runciman, La chute de Constantinople (traduction de Idem, The Fall of Constanti -nople), bien que l’interprétation qu’il en donne soit aujourd’hui datée et que certains éléments fac-tuels soient dépassés. Voir aussi K. M. Setton, The Papacy and the Levant, II, p. 108-160. Levolumineux ouvrage de M. Philippides et W. K. Hanak, The Siege and the Fall of Constantinople,synthèse et couronnement de travaux antérieurs, est moins une présentation d’ensemble qu’unesérie d’études particulièrement minutieuses sur certains problèmes posés par les sources et par l’his-toire du siège. On peut également consulter D. Nicolle, J. Haldon et S. Turnbull, The Fall ofConstantinople. Voir aussi infra, note 3.2. Sur cet auteur, voir infra p. 187-190.

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une méditation intemporelle sur la caducité de toutes les grandeurs impé-riales ? Pourtant, la prise de la capitale de ce qui restait, bon an mal an,l’Empire romain n’est pas simplement un événement symbolique propreà nourrir la poésie du transitoire. Non seulement il joue bien un rôle dansle développement des phénomènes plus lents et plus massifs qu’il sertsouvent à évoquer par un raccourci simplificateur sinon réducteur – l’hu-manisme et le transfert de l’héritage grec antique à l’Italie, le partage deseaux entre l’Europe orientale et l’Europe occidentale, le basculement decette dernière de la Méditerranée à l’Atlantique, l’avènement de la puis-sance ottomane à un nouveau statut, la genèse de l’hellénisme moderne,la fin du Moyen Âge – mais pour certains d’entre eux il constitue lemoment d’une rupture décisive.

Cet événement ne peut donc pas être réduit à l’écume d’une mer quiserait seule la véritable histoire. Il le peut d’autant moins que le regardqui se porte aujourd’hui sur lui est nécessairement guidé par un doublehéritage. Celui, d’abord, de tous les textes qu’il a suscités dans les décen-nies qui l’ont suivi, dont on verra que seuls quelques-uns peuvent êtredéfinis à proprement parler comme des témoignages 3 ; celui ensuite detous ces autres textes qui se sont employés dans les siècles suivants à leréinventer et à l’insérer dans un grand récit, puis à le reconstituer dansses moindres détails à l’aide des méthodes de la science historique. Nousavons en effet affaire à un événement qui a été scruté dans ses recoins lesplus obscurs avec un soin maniaque par des générations d’historiens : onl’a décomposé en une série de micro-événements dont l’authenticité oules motifs de l’invention ont été soigneusement pesés et, par un phéno-mène bien connu, l’érudition appelant toujours davantage d’érudition,sa signification a parfois été perdue de vue au profit d’une quête esthé-tico-savante du détail vrai.

14 Guillaume Saint-Guillain et Nicolas Vatin

3. Parmi les entreprises d’édition et de traduction de sources concernant la chute de Constantino-ple, il faut mentionner d’abord les deux volumes d’A. Pertusi, La caduta di Costantinopoli, publiésen 1976 et complétés en 1983 par un troisième volume posthume (Idem, Testi inediti e poco noti) ;l’introduction du premier volume fournit, p. lix-xci, une chronologie minutieuse, en grande par-tie basée sur le récit de Nicolò Barbaro (à propos duquel voir infra p. 455-464), et dont dépend lar-gement la nôtre (infra, p. 39-61). J. R. Melville-Jones, The Siege of Constantinople, 1453, propose latraduction en anglais de sept des plus célèbres récits du siège. M. Philippides, Mehmed  II theConqueror and the Fall of the Franco-Byzantine Levant, donne, également en traduction anglaise,d’autres textes relatifs à la chute de Constantinople ; l’annotation fait également le point sur cer-tains épisodes du siège de 1453 et la bibliographie recense les sources qui le concernent.

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S’efforcer d’y voir clair paraît donc essentiel, d’autant plus que l’évé-nement de 1453 et ses conséquences ont longtemps suscité et suscitentaujourd’hui encore des émotions fortes : qu’on songe aux rêves et frustra-tions qui ont pu animer la politique de l’empire tsariste ou du royaumehellénique, mais aussi à la multiplication à Istanbul des tombes de hérosmythiques de la conquête de la Ville 4, ou à l’importance de l’image duConquérant (Fatih) et de sa conquête dans la Turquie contemporaine,alors que certains envisagent de rendre à Sainte-Sophie le statut de mos-quée qu’elle a perdu depuis près d’un siècle au profit de celui de musée.Pour y voir clair, donc, le mieux est de laisser parler les textes que nousavons traduits, non sans donner les quelques clefs qui doivent permettrede comprendre ce qu’ils disent et ce qu’ils ne disent pas. Dans l’introduc-tion à ces textes, notre but modeste est de présenter brièvement les ori-gines de l’événement : origines historiques à long, puis à moyen terme, oùil est naturel que Byzance, de plus en plus isolée et inquiète, constitue lepivot de notre propos, avant de s’interroger sur ce que pouvaient signifierpour les Ottomans eux-mêmes le siège et la conquête de Constantinople.

les racines de la chute : byzance, les turcs et les occidentaux avant le xve siècle

L’histoire de la chute de Constantinople commence au moins deux siè-cles avant 1453, avec la grande conquête mongole qui submerge toutl’Orient musulman et change la face du monde. Celle-ci, entre autresimmenses conséquences, ébranle définitivement les fondements du sul -tanat des Turcs seldjoukides qui dominait le centre et l’est de l’AsieMineure depuis la fin du xie siècle. Ces territoires avaient été auparavantsous le contrôle de l’Empire byzantin 5 (nom que les historiens occiden-taux donnèrent à partir du xvie siècle à l’Empire romain d’Orient) ; decet empire, les Seldjoukides, régnant donc à l’origine sur une populationmajoritairement grecque et orthodoxe, devinrent l’adversaire par excel-lence, mais aussi le compagnon de route, dans le cadre d’une relation où

Introduction générale 15

4. Voir N. Vatin et S. Yerasimos, Les cimetières dans la ville, p. 53-54.5. Sur la dernière phase de l’histoire de l’Empire byzantin, après la quatrième croisade, voir en général A. Laiou et C. Morrisson éd., Le monde byzantin, III, Byzance et ses voisins, 1204-1453 ;D. M. Nicol, Les derniers siècles de Byzance.

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la symbiose et l’affrontement idéologique se côtoyaient 6. Paradoxale-ment, l’effondrement de cet État seldjoukide ne profita pas à Byzance,tout au contraire.

C’est que l’Empire byzantin avait lui-même beaucoup changé. Il avaitexpérimenté l’exil intérieur, lorsque, en 1204, la conquête de Constanti-nople par les croisés francs et vénitiens l’avait chassé de sa capitale et rem-placé par un Empire latin prétendant marier l’héritage de Byzance et lesmodèles politiques et religieux de l’Occident, alors en pleine expansion.La « latinisation » d’une partie de l’espace byzantin est à replacer dans cegrand contexte de l’expansion de l’Occident, de l’Irlande à la Palestine etde l’Espagne à la Baltique, dont la croisade peut être lue comme l’une desexpressions. En Grèce, l’une des principales régions de l’ancien Empirebyzantin, elle entraîne une fragmentation politique extrême 7, mais orga-nisée dans le cadre de rapports féodaux entre certaines de ces entités, oude relations coloniales entre certaines autres et les communes italiennesde Venise et, plus tard, de Gênes.

Parallèlement, l’identité impériale et religieuse byzantine se ressourcedans la relégation provinciale ; parmi les prétendants grecs à la succession,l’un, qui règne à Nicée (İznik) en Asie Mineure occidentale, finit pardominer les autres, repousser les Occidentaux d’une partie au moins desterritoires qu’ils avaient occupés et organisés à leur façon, et finalementreprendre en 1261 Constantinople, la capitale éternelle de l’empire. CetteByzance restaurée ne peut toutefois plus se prétendre l’héritière autar-cique de la tradition romaine : elle est contrainte de prendre sa place dansle concert des nations européennes, avec lesquelles elle doit maintenir undialogue permanent, politique et religieux, ne serait-ce que pour garder àdistance le spectre d’une nouvelle occupation latine de Constantinople.Certes, l’empire maintient ses revendications universelles et sa spécificitéreligieuse (en dépit d’une première union avec l’Église romaine de 1274à 1282), mais néanmoins Byzance est désormais d’Occident et sa poli-tique intérieure même se trouve déterminée par la question de ses rapportsavec les Occidentaux. Ceux-ci contrôlent toujours une partie de sonancien territoire et de son économie, à travers l’existence de nombreusesprincipautés et colonies latines dans le sud de la Grèce comme à travers la

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6. S. Métivier, « Byzantium in Question in 13th-century Seljuk Anatolia ».7. Voir la carte de la Méditerranée orientale, p. 1394.

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présence et l’action, dans l’Empire même, des mercenaires et aristocrateslatins et surtout des marchands italiens, en particulier ceux de Venise et deGênes, qui dominent les échanges commerciaux 8.

C’est donc cette Byzance nouvelle, à la façade impériale brillammentravalée et dont la culture rayonne à travers la première renaissance paléo-logue 9, mais dont l’intégration occidentale s’affirme, qui doit affronterles conséquences de l’effondrement seldjoukide. Celui-ci a déchaîné lesforces, bien plus incontrôlables, de nouveaux venus : une seconde migra-tion turque touche alors l’Anatolie, celle de tribus turcomanes encorenomades et pour certaines non encore ou très superficiellement islami-sées. C’est de cette vague que sortiront les futurs Ottomans. Cette injec-tion brusque de forces vives et brutales, couplée au vide politique créé parl’agonie lente et silencieuse des Seldjoukides, dresse face à Byzance dansla deuxième moitié du xiiie siècle une menace redoutable.

Les conséquences pour l’empire sont immédiates et considérables : ilest amputé dès le début du xive siècle de l’essentiel de sa moitié asiatique,à l’exception de quelques enclaves comme la ville de Philadelphie(Alaşehir), isolée à l’intérieur des terres, et il se trouve ainsi réduit à sapart européenne (Thrace, Macédoine, Nord de la Thessalie et de l’Alba-nie). Cette avancée turque repousse vers Constantinople des flots deréfugiés anatoliens et bouleverse les structures sociales et économiques del’Asie Mineure occidentale à présent sous domination turque ; qui pis est,elle déstabilise aussi les équilibres à l’intérieur de l’aristocratie byzantine,instrument principal du gouvernement impérial mais désormais dépossé-dée d’une partie considérable de sa fortune foncière. Byzance se montreincapable de réagir autrement que par le recours au mercenariat occiden-tal, avec l’engagement des routiers de la Compagnie catalane qui, aprèsquelques succès face aux Turcs, se retournent contre l’empire, qu’ils rava-gent avant d’aller enlever pour leur propre compte Athènes et son duchéaux Francs 10. C’est dans ces tensions que s’enracine la première guerrecivile byzantine (1321-1328), à l’issue de laquelle Andronic II, l’empereurpieux et lettré, est déposé par son petit-fils Andronic III (1328-1341),

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8. Pour une vue d’ensemble et une bibliographie plus complète, voir M. Balard, Les Latins enOrient, p. 215-243 et 271-365.9. E. Fryde, The Early Palaeologan Renaissance.10. Voir la traduction française par J.-M. Barbera du récit d’un témoin et de l’un des acteurs de cesévénements : Ramon Muntaner, Les Almogavres. L’expédition des Catalans en Orient.

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souverain guerrier et entreprenant, et par la faction d’aristocrates devieille souche et de nouveaux riches qui l’entoure. Signe de l’ébranlementdes valeurs qui fondent la société, les partis qui s’opposent à Byzancen’hésitent pas à faire appel à des mercenaires, ou alliés, turcs – mais il estvrai que la soldatesque turque était déjà présente avant cette date dans lesarmées byzantines.

Des émirats turcs installés sur les rivages de l’Asie Mineure se dotentde flottes et organisent des expéditions de pillages systématiques en merÉgée 11, au cours desquelles s’illustre notamment Umur Beg d’Aydın(1334-1348), dont le nom, latinisé en Morbasanus, est redouté jusqu’enOccident, mais qui fut aussi à l’occasion un partenaire des Byzantins et deleur empereur Jean VI Cantacuzène. L’une des conséquences principalesde cette situation nouvelle est de renforcer encore les liens et les échangesdiplomatiques de Byzance avec l’Occident et de changer profondément,au cours du xive siècle, la perception byzantine de la croisade mais aussisa nature réelle : de menace brandie par la papauté pour obtenir la sou-mission religieuse des Grecs, le projet de croisade devient au contrairecelui d’une alliance entre Occidentaux et Byzantins dans le but de défen-dre la chrétienté désormais menacée en Égée 12. Ce rapprochement,entamé dès les années 1320, connaît un demi-succès lors de la croisade del’Archipel et de la prise de Smyrne en 1344, qui devient pour près desoixante ans une enclave pontificale en plein territoire turc.

À cette époque toutefois, Byzance a déjà sombré dans les désordres etles violences de la deuxième guerre civile (1341-1347) opposant larégence du jeune Jean V, fils d’Andronic III, au principal conseiller de sonpère, Jean Cantacuzène, qui se proclame empereur sous le nom de Jean VI(1341-1354) 13. La guerre civile provoque cette fois la perte de la plusgrande partie de ses possessions européennes, d’abord essentiellement auprofit des Serbes qui, sous le règne d’Étienne Uroš  IV Dušan (1331-1355), accèdent très brièvement à la prépondérance politique dans le sud

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11. E. A. Zachariadou, Trade and Crusade.12. K. M. Setton, The Papacy and the Levant, I, p. 163-404 ; D. Geanakoplos, « Byzantium and theCrusades ».13. Sur les réponses byzantines au défi ottoman à partir du règne de Jean VI, en particulier à traversl’organisation et le contrôle du territoire, l’affirmation des droits de l’État et la fiscalité, on se repor-tera avant tout au livre récent de R. Estangüi Gómez, Byzance face aux Ottomans. Il montre notam-ment comment la Byzance des xive et xve siècles n’est en rien le cadre d’une décomposition del’autorité publique.

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des Balkans. Mais surtout, contre ses adversaires byzantins Cantacuzènes’allie et donne même sa fille pour épouse à Orhan (1326-1362), beyd’une petite tribu turcomane qui a enlevé aux Byzantins dans les années1320-1330 leurs dernières villes au nord-ouest de l’Asie Mineure, en par-ticulier Pruse (Bursa), Nicée (İznik) et Nicomédie (İzmit). Orhan est lefils d’Osman, éponyme de la dynastie ottomane, la « maison d’Osman »(al-i Osman), dont l’entité politique est promise à un avenir inespéré 14.Orhan contribue à la victoire de Jean VI, mais ses guerriers ravagent cequi reste du territoire byzantin en Thrace et en Macédoine et s’y établis-sent : en 1354, un tremblement de terre providentiel leur ouvre les portesde Kallipolis (Gallipoli), port sur le détroit des Dardanelles qui constitueun point de passage stratégique entre l’Europe et l’Asie. Face à cetteavance turque, Byzance fait preuve d’une incapacité où certains histo-riens ont vu une véritable faillite de ses élites 15.

Les décennies qui suivent voient les Turcs progresser en territoireeuropéen, s’emparant notamment des principales villes de Thrace :Didymotique en 1361, Andrinople (Edirne) en 1369. Battus à la bataillede la Maritza en 1371, les Serbes laissent ouverte aux envahisseurs lavoie des Balkans. Ces troupes turques ne sont pas nécessairement liéesaux Ottomans, que la perte momentanée de Gallipoli (1366-1376)pourrait avoir freinés. Mais Murad Ier (1362-1389), fils d’Orhan, sut endéfinitive imposer la domination de sa dynastie dans les Balkans, faisantd’Edirne la deuxième capitale ottomane et encerclant Constantinople etson Hinterland.

La puissance ottomane qui s’enracine désormais en Europe est doncen partie une créature de Byzance, née de ses tensions internes, et sondéveloppement doit se comprendre dans cette symbiose dévorante avecson prédécesseur. Les Ottomans deviennent l’enjeu principal de la poli-tique intérieure de l’empire, mais aussi de son dialogue compliqué avecl’Occident latin : c’est maintenant contre eux que se brandit la croisade,comme en 1366 lorsque le comte de Savoie libère et restitue à son cousinl’empereur Jean V (1341-1391) la cité de Gallipoli, que, dans un discourspassionné prononcé en 1375, Démétrios Kydônès (1324/1325-1397),

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14. Pour un aperçu des débuts de l’histoire ottomane, voir C. Imber, The Ottoman Empire, 1300-1481 ; C. Finkel, Osman’s Dream, p. 1-21 ; en français voir I. Beldiceanu-Steinherr, « Les débuts :Osmân et Orkhân », et N. Vatin, « L’ascension des Ottomans ».15. E. de Vries-van der Velden, L’élite byzantine devant l’avance turque.

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Achevé d’imprimer en avril 2016 sur les Presses de Normandie Roto

à Alençon (61)

Imprimé en France

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Dépôt légal avril 2016

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