+ All Categories
Home > Documents > Editions Delahaye Piste - Signe de · SERGE DALENS ET JEAN-LOUIS FONCINE CT 02 ASSASSINAT Texte...

Editions Delahaye Piste - Signe de · SERGE DALENS ET JEAN-LOUIS FONCINE CT 02 ASSASSINAT Texte...

Date post: 19-Feb-2021
Category:
Upload: others
View: 4 times
Download: 0 times
Share this document with a friend
42
L’Assassinat du Duc de Guise Signe de Piste - Editions Delahaye
Transcript
  • L’Assassinatdu Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 1

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • LES ENQUÊTES DU CHAT-TIGRE

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 2

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • DU MÊME AUTEUR

    Mik FONDAL(Serge DALENS et Jean-Louis FONCINE)

    AUX EDITIONS DELAHAYE

    COLLECTION « LES ENQUETES DU CHAT-TIGRE ».

    2. Les galapiats de la rue haute.3. L’assassinat du duc de Guise.

    Pour paraître :4. Pas de chewing-gum pour Pataugas.

    5. Le piano des princes Darnakine.7. La D.S. de Creil.

    9. La guêpe et les frelons.10. Panique sur la butte.11. Versailles-Vougeöt.

    12. Mik et la pierre du soleil.13. L’Affaire Marmouset.

    AUX EDITIONS DU TRIOMPHE

    COLLECTION TOTEM

    1. L’auberge des trois guépards.6. La bible de Chambertin.

    8. Télémik.

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 3

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • MIK FONDALSERGE DALENS ET JEAN-LOUIS FONCINE

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 4

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • L E S E N Q U E T E S D U C H AT- T I G R E

    3

    L’Assassinat du Duc de Guise

    Roman

    Illustrations de Pierre Joubert

    EDITIONS DELAHAYE40, rue Carnot, 89100 SENS

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 5

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • A Huguette RINGUENET,aux gentes demoiselles

    et aux jeunes pages du Château.

    © 2005 —Editions Delahaye, Sens.Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous pays.

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 6

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 7

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 8

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • LES ENQUÊTES DU CHAT-TIGRE

    Connaissez-vousMichel Mercadier, dit Mik,dit le Chat-Tigre ?

    Un garçon semblable à beaucoup d’autres,ni trop grand ni trop mince, aux cheveuxchâtain clair raisonnablement frisés, auxyeux couleur de noisette…Quatorze ans et demi, presque toutes ses dents, tête de fer et cœur de beurre.

    Connaissez-vous aussi M. Mercadier,Tonton Léon pour les intimes, heureuxpère des six filles, oncle de Mik, et de sur-croît Juge d’Instruction à Versailles ?Oui ? Alors c’est parfait.Non ? Alors hâtez-vous de tourner la pagepour faire connaissance avec ces intéres-sants personnages.

    Parce que Mik est le neveu de Tonton Léon,Juge d’instruction à Versailles, il a eu l’in-croyable chance de pouvoir fourrer son nezdans le dossier. Alors commence la premiè-re enquête du Chat-Tigre, celle deL’AUBERGE DES TROIS GUEPARDS.Tournez la page : vous allez voir Mik engrande discussion avec Tonton Léon...

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 9

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Voici donc M. le Juge d’Instruction “en son hôtel” (comme dit leCode), qui s’entretient avec M. son Neveu, lequel ne semble pas le

    moints du monde intimidé.

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 10

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Comme les choses paraissent traîner en longueur, Mik mène sa pro-pre enquête.

    Ce qui l’entraîne à écouter aux portes - sans honte et sans vergo-gne, puisque c’est pour le bon motif !

    La Vérité apparaîtra-elle enfin ?

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 11

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Vous le saurez en lisantL’AUBERGE

    DES TROIS GUEPARDS(si ce n’est déjà fait).

    Cette première enquête terminée, Mik, pensantpouvoir profiter d’un repos bien gagné, va passerses vacances à Champotte (Haute-Marne) avecTonton Léon, Tante Loulou son épouse, ...etleurs six filles.Hélas, Toutes sortes de travaux particulièrementardus l’y attendaient...

    D’abord effectuer quelques petites réparationsdans le presbytère désaffecté, loué par laCommune à tonton Léon...

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:39 Page 12

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 13

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Ensuite préparer l’arrivée de ses chères cousines...

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 14

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • ...Lesquelles ne cesseront de lui donner bien du souci durant sonséjour à Champotte.

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 15

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Mais ce n’est pas tout. De splendides bijoux ont été volés au Manoir,et Mik entend les récupérer.

    Conseil de Guerre...

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 16

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • ...et activités dirigées ! Les bijoux seraient-ils cachés dans le gicleurdu carburateur ?

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 17

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • C’est ce que vous saurezen lisantLES GALAPIATSDE LA RUE HAUTE(ce qui devrait déjà être fait !)

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 18

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Et maintenant les vacances tirent à leur fin, çasent déjà la rentrée. Mais on n’échappe pas àson destin ; cédant aux instances de TontonLéon, Mik accepte de l’accompagner pourquelques jours à Blois.Blois la ravissante, célèbre par la qualité de sareconstruction, ses pâtisseries, son merveilleuxchâteau, sa Loire et le chien Ely...Blois qui fut pourtant fatale à ces Messieurs deLorraine...

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 19

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • ‘Qui ne prévoit pas les choses lointainess’expose à des malheurs prochains.”

    CONFUCIUS (cité par Tonton Léon).

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 20

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • PREMIERE PARTIE

    L’HOMME A L’OREILLE MARQUÉE

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 21

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 22

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • 1

    ENNUIS MÉCANIQUES

    Délaissant provisoirement Champotte et ses Galapiats, TontonLéon déjeune aujourd’hui à Versailles, et Mik avec lui. La grandemaison semble étonnamment silencieuse. Revenue quarante-huitheures avec son père et son cousin sous le fallacieux prétexte demultiples courses à faire pour Tante Loulou, Pimprenelle honoreseule de sa présence la table de famille 1. Mais dès les paupiettes,parfaitement réussies, il faut le dire, le Chat-Tigre soupçonne l’ex-quise petite cousine, qui a son âge, de méditer quelque tour à safaçon. L’expérience lui a enseigné que le calme, la bonne tenue,sont chez elle de graves menaces d’orage. Il n’est pire eau quel’eau qui dort, et selon la forte parole de l’Officier de PolicePrincipal Fortier, on charge la dynamite en douceur : c’est aprèsque ça crache 2.

    La femme de ménage apporte le café, et Mik, d’un sourire,remercie pour le menu succulent.

    — Elle était du tonnerre, votre glace ! Avec tous ces fruits con-fits partout…

    — Toujours gourmand, Chaton ! dit Tonton Léon qui n’a

    23

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 23

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • rien à lui envier sur ce point. Tu viens dans mon bureau uneseconde ?

    — Deux, même, répond Mik en lui emboîtant le pas. D’autantqu’en principe je ne te quitte plus. Pourtant, si tu veux bien, j’iraivoir un copain malade à Saint-Cloud, et ça fera sûrement plaisir àmaman si je dors cette nuit rue des Favorites… Au fait, je me per-mets de te rappeler, Tonton, que maman t’attend ce soir pourdîner 3.

    Sur le seuil de la pièce, Mik se retourne : déjà Pimprenelle s’estesquivée. Et le Chat-Tigre fronce le sourcil.

    — Assieds-toi. Veux-tu une Craven de Luce ?— Avec plaisir, Tonton.Il regarde la pendule, juchée sur le petit éléphant de bronze.

    Elle vient juste de sonner deux heures. La grosse sacoche de cuirnoir est posée sur la table, les dossiers brillent par leur absence. Lafameuse chancelière, les paravents ont disparu. Un généreux soleilréchauffe les boiseries, ranime les dessins du tapis, et le meubleNapoléon III scintille de toutes ses incrustations sur fond de fausseécaille. Mon Dieu, que prépare la Pimprenelle ?

    Le bon oncle, lui, semble n’appréhender aucune catastropheimminente. De plus, le faste du déjeuner lui vaut une délicieusesensation d’euphorie, et la paix insolite qui règne sur cette maisonle pousse à d’innocentes rêveries :

    — Oui, quelle glace… Bien entendu. Chaton, je n’abuserai pasde ton temps. Toutefois, je suis heureux de te voir…

    — Moi aussi, Tonton chéri, fait Mik souriant et un peu surpris 4.— Chaton… Tu as la grande gentillesse de m’accompagner à

    Blois. Mais moi, j’ai des scrupules.— Des scrupules ! Et pourquoi ?— Parce qu’à la réflexion, pour toi ce séjour ne sera guère foli-

    chon. Je vénère le procureur honoraire Delestrange, qui fut monguide et mon maître, et demeure mon ami : c’est à lui que je doisma philosophie de la vie… Je me demande cependant si tu ne

    24

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 24

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • serais pas mieux à Champotte avec ta tante, tes cousines et tesGalapiats, ou bien à Paris avec ta mère, plutôt qu’avec ton onclechez ce vieux magistrat.

    Mik lève la main droite et affirme :— Tonton, du moment que je suis avec toi, je me trouve bien

    partout, et ça fait plaisir à maman. Moi aussi, j’avais envie de medégourdir un peu les jambes. Et puis, je ne connais pas Blois…

    — Une ville ravissante, Chaton. Un château royal, ou plutôtdes châteaux, des escaliers, des terrasses, Denis Papin, tout ça… Ettu verras la fenêtre par laquelle Marie de Médicis s’évada au boutd’une corde.

    — Elle avait des ennuis, cette femme ?— Elle était prisonnière.— Ah ? Des Anglais ?— Qu’est-ce que tu vas chercher ! soupire Tonton Léon. De son

    fils, Chaton, de son propre fils. Qui s’appelait ?— Heu… Louis… XIII… Ah oui ! L’affaire Concini ?— Exactement. Alors nous sommes bien d’accord : départ

    jeudi ?— Demain si tu veux. Quand il s’agit de partir, moi, ma valise

    est vite…Il n’achève pas. Une porte vient de claquer, dans le hall des pas

    précipités se font entendre. La femme de ménage entre en bour-rasque, les yeux révulsés, tremblante d’émotion :

    — Pimprenelle, chère petite… Au coin de la rue… l’impru-dente… Que j’ai eu peur… Mon Dieu, quel coup !

    Mik se précipite hors du bureau pour complément d’informa-tion, et se trouve face à face avec un inconnu, qui est le proprié-taire de la voiture. Renseignements pris, la Texas-Girl proprementculbutée par une Ford, Capri bien entendu, a fait une rentrée assezpiteuse au logis, une écorchure sur le nez et le blue-jeans en lam-beaux. Elle vient de grimper dans sa chambre pour y cuver sahonte et se débarbouiller.

    25

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 25

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • L’inconnu est navré. Il donne son nom, son adresse, sonnuméro de téléphone.

    — …Et pour la mobylette, naturellement l’assurance…— Quelle mobylette ? rugit Mik.— Mais, cette jeune fille…— Ça y est ! éclate le Chat-Tigre, toutes griffes sorties, Elle me

    l’a bousillée ! C’est ça qu’elle ruminait pendant tout le déjeuner !Hélas ! Les dégâts dépassent de loin les craintes. Sur le trottoir,

    la belle machine atomique, offerte par Tonton Léon, n’est plusqu’un nœud de serpents. La roue avant est en 8, le phareantibrouillard latéral en bouillie, le garde-boue tordu. Les manettessynchronisées ont déserté le tableau de bord, les fanions, haubansrompus, gisent lamentablement parmi les rayons enchevêtrés.Quant au moteur, il lui faudra du temps avant de s’en remettre.

    Muet, Mik contemple le désastre. Il en pleurerait de colère, s’ilétait seul.

    ** *

    — Pour une fois que je n’avais pas mis de cadenas ! se répé-tait-il en se dirigeant vers la gare Rive-Droite… Elle ne sera jamaisréparée à temps, et je ne pourrai pas l’emmener à Blois… Ah, cesfilles !

    Il prit le train pour gagner Saint-Cloud, et fit un louable effortafin d’égayer le malade. Vers cinq heures, il s’en alla, longeal’avenue du Maréchal-de-Lattre, descendit les marches de la ruede Longchamp, et atteignit la Seine, face à la station d’autobusdu 175.

    — Je vais rentrer par le Pont de Neuilly. Je marcherai un peu,ça me fera du bien, et je terminerai en métro…

    Mais il éprouvait autant de peine qu’un cavalier à l’agonie deson cheval.

    26

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 26

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Debout à présent sur la plate-forme arrière, Mik laissait sesregards errer vers le fleuve, les péniches et les îles. Au passage desremorqueurs, toute une flottille à l’ancre tanguait au bas du talus.Le bus tanguait aussi, sur l’ignoble pavage. Et le préposé à la son-nette, dans sa cage de verre, annonçait les arrêts d’une voix sépul-crale :

    — Pont de Suresnes. Allons, pressons…Quatre hommes montèrent, visiblement étrangers les uns aux

    autres. Un petit chauve aux yeux jaunes, globuleux à souhait, uncolosse en salopette kakie, un fade à bouche triste, et un escogriffe

    27

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 27

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • en duffle-coat, qui se casa tant bien que mal entre Mik et le reste.Il portait beau, mais n’était pas rasé. Sa barbe, noire et drue, dataitde deux jours, ou plus. Mais ce que Mik remarqua particulière-ment, ce fut, sur le lobe de l’oreille droite, une marque étrange. Avrai dire, ce n’était pas une cicatrice semblable à celle que le Chat-Tigre portait à la tempe gauche. Cela ressemblait plutôt à unetrace, à une sorte d’empreinte. C’était un curieux trait, vertical etrouge…

    Mik l’oublia bientôt. Il était descendu au pont de Neuilly. Et,traversant la Seine pour regagner Paris, il vit les escaliers qui, aumilieu du fleuve, conduisaient au terrain de basket de l’île. Se rap-pelant les photos montrées par Tonton Léon, il songea auxescaliers de Blois.

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 28

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • 2

    MÉFIEZ-VOUS DES ASCENSEURS !

    Le même soir, avant de passer à table, le Juge remit à son cherneveu toute une documentation qu’il venait de recevoir deM. le Procureur Delestrange.

    Ce magistrat honoraire avait bien fait les choses. Guide de laville, plan, photos en couleurs, dépliants touristiques, programmedes fêtes, spectacles Son et Lumière, gloires de Chambord,maréchal de Saxe, la Pompadour à Ménars, équipage de chasse àcourre à Cheverny, multitude chatoyante des étangs, des forêts, desbruyères et des châteaux de Sologne… On pouvait même appren-dre qu’il fonctionne, au départ de Blois, un service régulier pourles Baléares.

    Après le départ du cher oncle (vexée, la Texas-Girl n’avait pasvoulu quitter Versailles), Mik, captivé par ces précieux documents,s’installa à la salle à manger, tandis que Mme Mercadier luicoupait une chemisette neuve dans un nouvel écossais. Le voyageà Blois se parait de solides attraits. Les spécialités abondaient : dequoi consoler le cœur d’un chaton : « …crème, fromage deVendôme, volaille de la Cisse, vins blancs, rouges et rosés, choco-lat Poulain, biscuits, asperges de Vineuil… » Et au chapitre de la

    29

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 29

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • pêche — le chat est friand de poisson : « …brochets, truites, black-bass, perches, carpes, tanches, anguilles, gardons, chevesnes,goujons, ablettes… » En outre, « ancien séjour des Rois deFrance, » Blois comptait quatre cinémas principaux et toutes lesdistractions.

    — Je trouverai bien un vélo à louer quelque part, et je ferai debelles balades au bord de la Loire.

    — Essaie de visiter le Musée d’Histoire Naturelle qui se trou-ve au château, recommanda Mme Mercadier. C’est un des plusbeaux de France…

    Le fils embrasse tendrement sa mère et va au lit. Demain il feraun tour aux Trois Guépards, histoire de prendre des nouvelles duchat Plume et de serrer la main de l’excellent Mitou.

    Et dans trois jours, en route pour Blois ! Hélas ! Quoique fortdésireux de réparer les pots cassés par la Pimprenelle, le Tontonchéri trop respectueux de la loi, n’osera même pas prêter pourquelques instants, le volant, la grosse boule noire et docile du levierde vitesse, à son Mik si éprouvé…

    ** *

    LUNDI

    Le chat Plume avait beaucoup forci, mais Mitou était de sortie.Le Chat-Tigre dut se contenter de la rousse aux émeraudes, qui trô-nait toujours au bar. Elle lui offrit sur-le-champ et sur le compte dupatron, un petit cocktail à sa façon. Mik but, remercia, reprit l’au-tobus et se retrouva en fin d’après-midi du côté de la gareMontparnasse. C’est alors que son petit démon personnel vint luitirer la barbichette.

    Dédaignant le plaisir vulgaire et indécent de tirer les sonnettes,le Chat-Tigre s’adonnait assez souvent à celui des ascenseurs.

    30

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 30

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • C’est-à-dire qu’il éprouvait des émotions sans cesse renouvelées àpénétrer tête haute dans des immeubles rigoureusement inconnus,puis à se laisser emporter vers le ciel dans ces cages de métal plusou moins silencieuses, à traverser de bas en haut des maisonsanonymes et noires…

    Côté concierges, bigoudis et balais, en général pas d’ac-crochages. Côté locataires, les surprises n’étaient pas rares. Côtéservice, c’était encore plus drôle. Un soir, au coin d’un cinquièmepalier, une personne cagneuse, myope, impérative et moustachue,avait surgi d’un massif de plantes vertes pour se jeter littéralementsur Mik :

    — C’est les côtelettes ? Vite ! Madame passera payer…

    Ce soir hélas, les ascenseurs se refusent obstinément à toutimprévu, à toute poésie. Plus d’histoires de côtelettes ! Ils nelivrent que des étages mornes à carpette râpée, de classiques ban-quettes de chêne où personne ne s’assied jamais, des portes tristesà boutons de cuivre pas trop bien astiqués…

    — Rebutant ! soupire le Mik. Allez, ouste, on change decrémerie ! Y m’faut des boissons fortes, et c’est pas avec ça queFortier soignerait sa périchondrite… Trop vieux, tout ça : je vaistravailler dans le neuf.

    Il redescend, flâne dans la foule, coupe le Luxembourg, suitl’avenue de l’Observatoire, salue le maréchal Ney, rebroussechemin vers la gare Montparnasse.

    — Ah, voilà ! Une belle crèche à caviar, et huit étages, monp’tit père. Tonton chéri, protège ton chaton !

    L’entrée est impressionnante. Un grand damier noir et blanccouvre le sol. Les murs, de dalles polies, brillent doucement. Descolonnes lisses soutiennent une coupole à fresques et l’ascenseur,là-bas, semble une pièce d’orfèvrerie précieuse, étincelante, fasci-nante.

    Fasciné, Mik l’est bel et bien. Lentement, l’oreille tendue, il

    31

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 31

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • avance, pose un doigt sur la clenche de bronze doré en forme dedauphin. Ouvre, entre, referme. L’intérieur est d’acajou rouge. Uneconfortable banquette occupe tout le fond de la cabine et le Chat-Tigre s’y installe avec ravissement. Enfin, il appuie, au hasard, surle bouton 5 : il s’élève aussitôt sans bruit. Expédition mer-veilleuse ! Chaque étage découvre des splendeurs : meubles, tapis-series, tableaux, forment une véritable antichambre à des apparte-ments sans doute plus séduisants encore.

    — Eh bien ! Ils n’ont pas peur de se faire piller… Tiens, laradio ! Bien aimables, on reviendra !

    L’ascenseur s’est arrêté.— Et en souplesse ! Pas de sorcière à côtelettes ? Alors, ite ad

    astra sursum corda ! 5 Madame passera payer… J’ai l’impressionque je vais être reçu en musique.

    Il perçoit maintenant tout un brouhaha, où se mêlent des rires,un dialogue étrangement passionné et les accords finals d’un con-certo pour piano et orchestre.

    — Ça y est, se dit Mik, je tombe en pleine surboum.L’ascenseur vient de s’immobiliser juste dans l’axe d’une pers-

    pective de pièces, car la double porte du palier est grande ouverte.Il y a des tas de gens partout, des jeunes et de moins jeunes, desverres, des flacons, des bouteilles sur toutes les tables… Et voicique, brusquement, quelqu’un bondit hors d’un fauteuil, court àl’ascenseur, ouvre d’autorité, avec un large sourire :

    — Ah, enfin, te voilà ! Entre, entre, on t’attendait… Le Grosdisait qu’il était trop tard, que tu ne viendrais pas…

    La stupéfaction de Mik ne dure qu’une seconde. Déjà unedemi-douzaine de types l’entourent, guère différents des Math-Elem du lycée, pipe au bec et chevelure en bataille.

    — Bonsoir, dit le Chat-Tigre, un peu rouge. J’ai soif.— Ah, il est au poil ! fait un maigrichon. Jean-Claude me

    l’avait dit : un loupiot sensass ! Qu’on lui verse à boire ! Tu con-nais le Gros ?

    32

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 32

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 33

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 34

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • — Heu… pas personnellement.— Il est là, mon vieux, il est là ! C’est fou, hein, quelle veine !— Ça, on peut le dire, répond Mik. Une drôle de veine !Poussé par quantité de bras fraternels, il est conduit dans l’ap-

    partement, présenté au Gros, pacha débonnaire qui sirote au boutd’une paille un liquide indigo.

    — Mon cher petit, nous sommes tellement heureux de vousaccueillir ! Gérard m’avait juré que vous viendriez ce soir, mais jefinissais par douter… C’est vraiment très gentil à vous d’avoiraccepté… Vous vous appelez Remi, n’est-ce pas ?

    Mik arbore un sourire de Chat-Tigre au bord d’une jatte decrème fraîche, et louche en direction des petits fours :

    — Mon Dieu, Monsieur, jusqu’à preuve du contraire…— Il est charmant !— Il est peut-être charmant, intervient le maigrichon, mais il a

    soif. Qu’est-ce que tu bois ?— Qu’est-ce que tu m’offres ? répondit Mik du tac au tac.Les rires font cascade.— Mon vieux, on est tombés sur un sacré numéro ! Il est

    formid’, le mouflet. On téléphone à Jean-Claude que ça colle ?— Oh ! fait Mik désireux tout de même de se ménager une

    porte de sortie, attendez, je verrai Gérard demain…— Alors, ça boume ! Et maintenant, Remi, au buffet !On le conduit vers une table abondamment garnie. Et soudain

    le Chat-Tigre sursaute : une coupe de Champagne dans une main,un mouchoir dans l’autre, l’escogriffe du pont de Suresnes leregarde venir. Mais si débarbouillé, brillantiné, rasé, qu’il en estpresque méconnaissable.

    Mik a un peu froid dans le dos. Le gars de l’autobus n’aban-donne ni sa coupe ni son mouchoir. Il se contente de le toiser duhaut en bas en ricanant.

    — Être ou ne pas être, dit-il d’une voix sépulcrale, tromperie,mensonge, illusion, tout n’est qu’illusion… Pas vrai, Remi ?

    35

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 35

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • Il hausse les épaules, boit sa coupe, s’en verse coup sur coupdeux autres, toise Mik en ricanant encore, et disparaît.

    Comment la compagnie n’a-t-elle rien remarqué ? Les verresvalsent, les piles de gâteaux s’effondrent. Pour se remettre, Mikfume une demi Craven, regarde sa montre à la dérobée. Bientôtsept heures. C’est très joli, de faire le zigue au milieu destartelettes, mais, rue des Favorites, Mme Mercadier va s’inquiéterde ne pas voir revenir son chaton. Et puis, que fabrique-t-il, ce cha-ton, au milieu d’une bande inconnue, dans des nuages de pipe ? Lepick-up est bon, c’est entendu : il ferait la joie de la Duchesse. Lesupercarburant est fulgurant, et Luce en viderait un grand pot sanssourciller. Mais si les plus grands pots ont un fond, les meilleuresfarces ont une fin : il est temps de songer à la retraite.

    Heureusement, le Gros réussit à s’extirper de son divan, pro-fond comme un tombeau, et contemple songeur ses jolis doigtsboudinés :

    — Les enfants, on se quitte. Terminé pour aujourd’hui. On aréalisé un fameux travail, et je suis assez content. Demain, Jean-Claude et Gérard seront avec nous pour régler les derniers détailstechniques. Mais que personne ne manque, ou je ferai ouah ouah !Pour tout le monde, rendez-vous au Taudis demain seize heurestrente. Je peux compter sur vous, Remi ?

    — Je n’ai qu’un rendez-vous sans importance dans la matinée,Monsieur.

    — En ce cas, parfait. Je m’occupe du matériel, je passe un coupde fil au Balafré pour la quincaille, et je tiens le camion prêt…

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 36

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • 3

    LE GROS FERA OUAH OUAH !

    Sans un regard pour ses collections de petites autos et de tim-bres-poste, Mik se coucha bien avant dix heures, éteignit sa lampede chevet, et joignit ses bras sous sa tête, pour essayer de réfléchirun peu. Comment aurait-il pu demander l’adresse du Taudis,puisque tous avaient cru qu’il était Remi, et que Remi connaissaitGérard et Jean-Claude ?

    « Qu’est-ce que c’est ce rendez-vous, et qu’attendaient-ils demoi ? Qui c’est, ce Gros ? Le propriétaire de l’appartement peut-être ? Il était mieux habillé que les autres… Drôle de surboum : pasune fille. Évidemment, pour ce qui est des quilles, je ferais mieuxde me contenter du rodéo de la Pimprenelle : ça va encore coûterdes tas de sous à ce pauv’ Tonton… Enfin, ça prouve au moinstrois choses : que les types ne connaissaient pas Remi, que Remin’est pas venu, et que j’aurais pu m’en tirer plus mal. Mais àprésent ? »

    Dieu sait pourtant que son attention, tendue à l’extrême, avaitsaisi au vol le moindre mot des propos échangés. Les yeux, lesoreilles aux aguets, à l’abri d’un rempart de petits fours délec-tables, insouciant en apparence et ronronnant comme un très hon-

    37

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 37

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • nête Chat-Tigre, patte de velours ou le nez dans son verre, Mikn’avait perdu ni une parole ni une bouchée.

    Mais d’abord, il n’était, au total, resté chez le Gros qu’unevingtaine de minutes. Ensuite, il n’était arrivé, lui semblait-il,qu’après la réunion véritable : mis à part le rendez-vous du lende-main au Taudis, on n’avait, en sa présence, rien dit de manifeste-ment important. Il n’y avait eu, devant lui, ni débat, ni discussionssusceptibles de lui faire entrevoir les activités de cette étrangesociété. Quant aux plaisanteries, aux dialogues par petits groupesdans tous les coins de la boutique, il aurait fallu être bien malinpour y comprendre quelque chose. Ces types impossibles, à com-mencer par le maigrichon, ne s’exprimaient que par allusions,sous-entendus, hyperboles et jactances amphigouriques, rires finsou béats, hochements de tête, grimaces et contorsions du sourcil…Quant à l’escogriffe du pont de Suresnes, le mal rasé de l’autobus,le seul qui parût d’assez méchante humeur, il était parti si vite queMik n’avait rien pu apprendre de plus à son sujet.

    « Tous des cinglés, se répétait Mik pour la dixième fois. Oualors, alors… Une bande ? Une bande de… ? »

    A force d’y penser, et quoiqu’il s’y refusât au début, il com-mençait, dans l’obscurité de sa chambre, à trouver cette hypothèsebien moins invraisemblable.

    L’étonnante masse de chair et de drap, qu’on appelait le Gros,masse joviale et quasiment inerte, n’évoquait en rien le gangsterinternational. Cependant, ses paroles étaient là, et Mik n’en avaitpas oublié une seule. Elles lui avaient causé un certain malaise, aumoment du départ. Avec un peu d’imagination… Tout un arsenal yfigurait, rarement en usage dans les maisons bourgeoisementhabitées : la quincaille, le camion tenu prêt, les derniers détailstechniques, le « fameux travail » déjà réalisé, le matériel. Quelmatériel ? Et pour faire quoi ?

    « Et surtout, surtout, ce coup de fil au Balafré… »Habitué du Palais de Justice de Versailles, Mik en avait vu

    38

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 38

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • défiler, des balafrés ! Sans compter le Jo du Porc-Épic 6, caïd desrives poétiques du bassin de la Villette.

    « Il en tient aussi, la rosse, une sacrée méchante balafre !Possible qu’il vienne de sortir de taule, une fois de plus… Bon, jedemanderai demain au Tonton. »

    Il se tourna sur le côté, remonta le drap sous son menton.« En attendant, le Gros fera ouah ouah. Parce que moi, je ne

    serai pas au rendez-vous. Si Gérard arrive avec le vrai Remi, çadonnera plutôt du vilain. Tant pis ! Madame passera payer… »

    ** *

    MARDI

    — Allo, Tonton ? C’est Mik, bonjour. Tu as bien dormi ?— A merveille, mon enfant, merci.— La Pimprenelle chérie bourgeonne toujours dans l’albu-

    plast ?— Plus d’albuplast, Chaton, répond le magistrat avec une noble

    dignité. Cette enfant repart à midi pour Champotte. Et qu’y a-t-ilpour votre service ? Auriez-vous renoncé à m’accompagner ?

    — Pas du tout, Tonton, pas du tout… — Mik hésite — jevoudrais, je veux dire : j’aimerais savoir si Jo le Balafré, tu sais, leJo de la Villette…

    — Oui ?— Il est encore sous les verrous ?— Tu t’intéresses tellement à ce Monsieur ?— Oh, pas directement, je t’assure…— Allons, tant mieux !— Tu vois, ce serait plutôt pour… par…— Par charité pure, bravo ! Je reconnais là ton joli petit cœur

    de beurre… Seigneur puissant ! (Ici s’intercale un long, un déchi-

    39

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 39

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • rant soupir…) Seigneur puissant ! Moi qui ne pense plus qu’àBlois, qui ne rêve que de Blois… La Loire, Chaton… Chambord,Cheverny, Ménars, Talcy, que sais-je… Et tu viens m’entretenir decet individu !

    La voix de Mik se fait suppliante et contrite :— Pardonne-moi, Tonton chéri, pardon ! Mais tu ironises, et tu

    ne m’as pas répondu.— Navré pour ton protégé : il est encore à l’ombre pour six

    mois. Avec bail renouvelable, d’ailleurs.— Ça n’arrange rien, murmure le Chat-Tigre.— Hélas non ! Vas-tu m’expliquer ce que tu mijotes encore, au

    lieu de dormir comme tout le monde ?— Plus tard, Tonton, si tu ne te fâches pas.— Et voilà les enfants d’aujourd’hui ! Ils posent leurs condi-

    tions, dictent leurs volontés, tirent les magistrats du lit dès l’aurore.En quel siècle vivons-nous ?

    — Mais, dans le nôtre, Tonton, et je m’y plais bien.— Parce que c’est toi qui fais la loi…— N’exagérons rien. Tu t’en occupes un peu aussi, je crois…,

    Allons, fais un sourire. A quelle heure veux-tu me voir arriveraprès-demain à Versailles ?

    — Dès que ma chère sœur aura le courage de se débarrasser detoi. C’est-à-dire pour neuf heures au plus tard.

    ** *

    Coupée par une brève station chez le coiffeur (« … pas tropcourt, n’est-ce pas… »), la matinée s’écoula avec une sombrelenteur. Pour l’ennui, l’après-midi ne lui aurait cédé en rien, si Mikn’avait été secrètement tracassé par l’imminence du rendez-vous.Au fur et à mesure que l’heure approchait, il envisageait de plus enplus fermement de courir se poster en embuscade dans les parages

    40

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 40

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • de la « crèche à caviar ». La largeur du boulevard faciliterait un telaffût et l’on devait, de fort loin, reconnaître le Gros.

    Mik avait sur lui toutes ses économies. Il était prêt à se ruiner,non pour paraître au Taudis, mais pour en découvrir l’adresse.

    A quatre heures, il quitta la rue des Favorites, et acheva la pre-mière partie de sa course sur un autobus qui le déposa à l’extrémitédu boulevard du Montparnasse. Immédiatement, Mik repéra,devant une librairie, un important éventaire de livres d’occasion etde cartes postales, propre à lui faciliter la tâche : presque en face,de l’autre côté de la chaussée, s’ouvrait le porche aux bellescolonnes.

    — Tout juste assez large pour le Gros !Quelques voitures en stationnement, deux taxis sous la main. Il

    était exactement quatre heures et quart.« Si sa bagnole est là, c’est sûrement c’te Mercedes 280… »

    songea Mik, qui feuilletait du doigt un vague Précis Vétérinaire :« LAPINOCORYZETTE » Contre le Coryza des Lapins…Mais, deux minutes plus tard, un petit homme gris montait au

    volant, et la Mercedes disparaissait vers Port-Royal. Personne nesortait de l’immeuble ! Trois bouts de filles en rouge, qui reve-naient apparemment du Luxembourg, s’engouffrèrent dans le hallau damier noir et blanc.

    « Si ça se trouve, rageait le Chat-Tigre, il est au Taudis depuisune heure ! Je peux toujours faire le pied de grue ici et bouquinerla Lapinocoryzette… Idiot. C’est complètement idiot… »

    Il passa du traitement des lapins à « Volsinies, Glas desÉtrusques ». Une seconde voiture démarra, puis une troisième.Des gamins poussaient leurs billes près de la dernière, et lemaréchal Ney, là-bas, le chapeau de guingois, brandissait infatiga-blement son sabre.

    « Quatre heures et demie ! L’heure où le Gros ouahouahte… »Il s’entêta, près d’une vingtaine de minutes encore, allant,

    venant, traversant… Il revit la cage scintillante de l’ascenseur, la

    41

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 41

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye

  • clenche dorée, en forme de dauphin. Personne. Le Gros assuré-ment n’était plus là.

    — J’en ai archi-marre, moi. Bonsoir !Déçu et furieux, il prit le métro à Raspail, changea de ligne à

    Pasteur, sortit de terre à Vaugirard et rentra chez lui.Qu’avait-il espéré ? Il était bien bête, d’avoir perdu une heure

    au pied de cet immeuble. En mettant tout au pire, oui, en supposantmême que ce fussent de dangereux malfaiteurs, s’était-il imaginéqu’il les prendrait au filet ? Sottises. L’invitation au voyage, elle,se parait d’autres attraits : ceux de la réalité.

    Aussi, laissant tomber le Taudis, Mik replongea-t-il dans ladocumentation gracieusement fournie par le Procureur Honoraire.Mais à table, il se souvint de l’escogriffe du pont de Suresnes, del’homme à l’oreille marquée, minable dans l’autobus et superbeprès du buffet.

    Il balaya cette vision. D’un revers de main qui expédia la sal-ière au tapis. Tout cela n’avait aucun sens, n’offrait aucune espèced’intérêt.

    Les Enquêtes du Chat-TigreL’Assassinat du Duc de Guise

    CT 02 ASSASSINAT Texte interieur.qxd 11/03/2005 18:40 Page 42

    Signe

    de P

    iste -

    Edit

    ions D

    elaha

    ye


Recommended