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Intubation difficile en obstétrique

Date post: 30-Dec-2016
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Le Praticien en anesthésie réanimation (2013) 17, 253—259 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com RUBRIQUE PRATIQUE Intubation difficile en obstétrique Difficult intubation in obstetrics Julien Rousset a,, Aurélien Bataille b a Service d’anesthésie réanimation, hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France b Service d’anesthésie, hôpital Foch, 40, rue Worth, 92151 Suresnes, France MOTS CLÉS Obstétrique ; Accouchement ; Intubation orotrachéale ; Intubation difficile ; Vidéolaryngoscope Résumé L’intubation difficile a une incidence dix fois plus élevée dans la population obsté- tricale que dans la population générale, notamment lorsque la prise de poids est importante. Cela est à une modification des voies aériennes supérieures qui se produit au cours de la grossesse et de l’accouchement. Le risque d’inhalation du contenu gastrique est également augmenté au cours de la grossesse. Le risque d’intubation difficile peut être évalué à l’aide des indexes habituels, au cours de la grossesse. Le retour d’expérience est encore limité en ce qui concerne les dispositifs de laryngoscopie indirecte. Leur usage peut être préconisé en cas d’échec de la laryngoscopie directe si l’oxygénation est assurée. Dans le cas contraire, la mise en place d’un masque laryngé permet d’assurer la ventilation et d’effectuer secondairement l’intubation. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Obstetrics; Delivery; Orotracheal intubation; Difficult intubation; Videolaryngoscope Summary The incidence of difficult intubation is ten-fold higher in the obstetrical setting compared to the general population, especially in parturient with an important weight gain. This is related to an oedema of the upper airways occurring during pregnancy and delivery. The risk of inhalation of gastric content is also increased during pregnancy. Difficult intubation is predictable using the usual criteria during pregnancy but unexpected difficulties may occur. The feedback concerning the use of videolaryngoscopes is still limited in the obstetrical setting. Their use is recommended in case of unpredicted difficult intubation when arterial oxygen saturation is maintained. Otherwise, the placement of a laryngeal mask allows maintaining ventilation and performing orotracheal intubation as a second step. © 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J. Rousset). 1279-7960/$ see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2013.08.004
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Page 1: Intubation difficile en obstétrique

Le Praticien en anesthésie réanimation (2013) 17, 253—259

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

RUBRIQUE PRATIQUE

Intubation difficile en obstétrique

Difficult intubation in obstetrics

Julien Rousseta,∗, Aurélien Batailleb

a Service d’anesthésie réanimation, hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, Franceb Service d’anesthésie, hôpital Foch, 40, rue Worth, 92151 Suresnes, France

MOTS CLÉSObstétrique ;Accouchement ;Intubationorotrachéale ;Intubation difficile ;Vidéolaryngoscope

Résumé L’intubation difficile a une incidence dix fois plus élevée dans la population obsté-tricale que dans la population générale, notamment lorsque la prise de poids est importante.Cela est dû à une modification des voies aériennes supérieures qui se produit au cours de lagrossesse et de l’accouchement. Le risque d’inhalation du contenu gastrique est égalementaugmenté au cours de la grossesse. Le risque d’intubation difficile peut être évalué à l’aidedes indexes habituels, au cours de la grossesse. Le retour d’expérience est encore limité en cequi concerne les dispositifs de laryngoscopie indirecte. Leur usage peut être préconisé en casd’échec de la laryngoscopie directe si l’oxygénation est assurée. Dans le cas contraire, la miseen place d’un masque laryngé permet d’assurer la ventilation et d’effectuer secondairementl’intubation.© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSObstetrics;Delivery;Orotrachealintubation;

Summary The incidence of difficult intubation is ten-fold higher in the obstetrical settingcompared to the general population, especially in parturient with an important weight gain.This is related to an oedema of the upper airways occurring during pregnancy and delivery.The risk of inhalation of gastric content is also increased during pregnancy. Difficult intubationis predictable using the usual criteria during pregnancy but unexpected difficulties may occur.

Difficult intubation;Videolaryngoscope

The feedback concerning the use of videolaryngoscopes is still limited in the obstetrical setting.Their use is recommended in case of unpredicted difficult intubation when arterial oxygensaturation is maintained. Otherwise, the placement of a laryngeal mask allows maintaining

ventilation and performing orotr© 2013 Elsevier Masson SAS. All r

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J. Rousset).

1279-7960/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droitshttp://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2013.08.004

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ntroduction

epuis la description en 1946, par Mendelson [1], de casatals d’inhalation du contenu gastrique chez des partu-ientes à l’occasion d’une anesthésie, la prise en charge desoies aériennes supérieures des femmes au cours du travailbstétrical est devenue une obsession pour tous les anes-hésistes. Cette prise en charge est d’autant plus difficileu’un certain nombre de modifications physiologiques auours de la grossesse ont pour conséquence une augmen-ation de l’incidence de l’intubation difficile, d’une part,t du risque de régurgitation du contenu gastrique, d’autreart [2,3].

Ce risque étant pris en compte depuis de nombreusesnnées, son appréciation a conduit à privilégier l’anesthésieocorégionale en cas d’intervention au cours de la gros-esse ou de l’accouchement, le recours à une anesthésieénérale étant devenu une éventualité plus rare. L’enquêteationale sur la périnatalité effectuée en 2003 qui revenaitur l’évolution des pratiques francaises entre 1998 et 2003,otait malgré une augmentation du taux de césariennes de7,5 % à 20,2 %, que le nombre d’anesthésie générale dimi-uait pour ne plus représenter que 1,7 % des anesthésieséalisées chez les femmes enceintes [4]. De ce fait, unéfaut de pratique s’ajoute à une prise en charge techni-uement difficile, qui rend la situation encore plus critique.

Ainsi, la mortalité liée à l’anesthésie est la septièmeause de mortalité chez les femmes au cours de la grossesse5] et la gestion difficile des voies aériennes supérieures,otamment au cours des césariennes urgentes contribue enrande partie à cet état de fait.

Le risque accru d’intubation difficile est très variable enonction des femmes et il est probable qu’il existe au sein dea population obstétricale, des groupes plus à risques parmiesquels on peut citer la parturiente obèse, par exemple [2].

odifications physiologiques au cours dea grossesse interférant avec le contrôlees voies aériennes

oies aériennes supérieures

lusieurs modifications des voies aériennes peuvent abou-ir à des difficultés d’intubation au cours de la grossesse.n note d’une part, un œdème des muqueuses des voiesériennes supérieures lié à une augmentation des taux’hormones circulantes. De nombreux cas cliniques font état’un œdème laryngé au cours de la grossesse responsablee difficultés d’intubation, d’intubation impossible, maisussi de défaillance respiratoire au décours de l’extubation2,6]. L’œdème semble d’autant plus marqué qu’il existene hypertension artérielle gravidique et des cas extrême-ent graves ont été décrits au cours de la pré-éclampsie

7]. Pour ces raisons, il est conseillé d’utiliser des sondes’intubation de plus petits diamètres (6 à 6,5 mm) au course la grossesse.

odifications ventilatoires

’augmentation de la pression abdominale liée à l’utérusravide a pour conséquence une ascension des coupoles

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J. Rousset, A. Bataille

iaphragmatiques et une réduction du volume de la capa-ité résiduelle fonctionnelle. Le volume résiduel et leolume de réserve expiratoire diminuent également. Parilleurs, il existe une augmentation de l’ordre de 40 %u volume minute essentiellement due à une augmenta-ion du volume courant, la fréquence respiratoire restantensiblement la même. La diminution de la capacité rési-uelle fonctionnelle (CRF) est responsable d’une possibilitée dénitrogénation plus rapide lors de l’induction anesthé-ique, mais aussi d’un temps d’apnée plus court lors de’induction de l’anesthésie générale [8]. C’est pourquoi ilst recommandé d’assurer une pré-oxygénation en venti-ation spontanée de 3 minutes avec une fraction inspirée’oxygène (FiO2) à 100 % ou la réalisation de 8 inspirationsrofondes à 10 L/min d’O2 pendant une minute [8]. La confé-ence d’expert de la société francaise d’anesthésie et deéanimation (Sfar) portant sur l’intubation difficile recon-aît que chez la femme enceinte, la manœuvre des quatreapacités vitales pendant 30 secondes peut constituer unelternative à la pré-oxygénation standard [8].

ugmentation de l’incidence deségurgitations

a grossesse provoque une modification de la position de’estomac lié à l’utérus gravide qui modifie l’angle de laonction œsogastrique [9]. On note de plus une diminutionu tonus du sphincter inférieur de l’œsophage et certainestudes montrent que le transit et le temps de vidangeastrique sont allongés au cours de la grossesse [3]. Poures raisons, le risque de régurgitation est augmenté auours de l’induction anesthésique. Il est difficile d’évaluer’incidence réelle de l’inhalation en obstétrique puisque lesaux retrouvés sont très variables en fonction des études. Leaux d’inhalation était de 0,15 % dans l’étude historique deendelson, 1 sur 895 anesthésies générales dans l’étude dearner et al., 1 sur 1870 actes réalisés dans la série publiéear Ezri et al. [1,10,11]. Toutefois, et ce malgré des étudesécentes qui tendent à démontrer la possibilité de réaliserne anesthésie générale au cours de la grossesse sans avoirecours à une intubation orotrachéale, une femme enceinteoit être considérée comme ayant un estomac plein à partire 16 semaines d’aménorrhée et une induction en séquenceapide devrait être réalisée que ce soit pour une chirurgieu cours de la grossesse ou pour une césarienne en urgenceu pour la réalisation d’une manœuvre d’extraction instru-entale, une délivrance artificielle ou une révision utérine.

l est également recommandé de réaliser une prophylaxiear l’administration d’anti-acide avant chaque geste chi-urgical programmé au cours de la grossesse. Une revuee la Cochrane Database de 2010 a refait le point surette question [12]. Elle regroupait 22 études et incluait658 femmes. Elle montrait que comparé à un placebo,’utilisation d’une prophylaxie médicamenteuse permettaite réduire de manière significative le risque d’observer unH intragastrique inférieur à 2,5. Au sein des différenteslasses médicamenteuses, les anti-H2 étaient supérieures

ux inhibiteurs de la pompe à protons. Il ne semblait pasxister de différence entre les anti-H2 et anti-acides. Tou-efois l’association anti-H2, anti-acides était supérieure à’utilisation des anti-acides seuls. C’est donc probablement
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Intubation difficile en obstétrique

cette association qu’il faut conseiller avant chaque anesthé-sie générale pour une femme enceinte.

Stratification du risque d’intubationdifficile

Comme nous l’avons vu précédemment, la réalisation d’uneanesthésie générale chez la parturiente impose une induc-tion en séquence rapide. Compte tenu d’un temps d’apnéeplus court avant désaturation artérielle en oxygène, letemps dont dispose l’anesthésiste pour intuber une femmeenceinte est restreint alors même que nous avons vu queles conditions techniques de réalisation étaient rendues plusdifficiles par les remaniements anatomo-physiologiques.

Pour ces raisons, l’incidence de l’intubationdifficile est 10 fois plus élevée dans la

population obstétricale par rapport à lapopulation générale et varie en fonction des

études entre 1 sur 250 et 1 sur 500 [2].

Il est donc fondamental d’identifier au mieux les partu-rientes à risques afin d’anticiper une situation qui pourraitdevenir catastrophique.

Score de Mallampati

Le score de Mallampati est obtenu chez un sujet en positiondebout, tirant la langue et sans effort de phonation. Il estactuellement largement utilisé par l’ensemble des anesthé-sistes dans une version modifiée par Samsoon et Young [13]qui comporte 4 classes (Fig. 1) :• classe 1 : la luette, les piliers du voile, le palais mou et le

palais dur sont visibles ;• classe 2 : les piliers du voile, le palais mou et le palais dur

sont visibles ;• classe 3 : le palais mou et le palais dur sont visibles ;• classe 4 : seul le palais dur est visible.

Figure 1. Score de Mallampati et classification de Cormack etLeehan.

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En obstétrique, Rocke et al. ont évalué ce score afin derédire une intubation difficile [14]. Leur étude a inclus500 patientes qui ont été opérées d’une césarienne pro-rammée ou en urgence sous anesthésie générale. Dans leurravail, la difficulté d’intubation était définie par un scorettribué par l’anesthésiste lors de la laryngoscopie. Ce scoreomportait quatre grades allant du grade 1 où l’intubationtait jugée facile au grade 4 où l’intubation était impossible.ne bonne corrélation a été mise en évidence entre le scoree Mallampati et les difficultés d’intubation ainsi évaluées.n effet, le risque relatif d’être confronté à une intubationifficile en cas de score de Mallampati à 2 était de 3,23 parapport à un score de Mallampati à 1. Ce risque relatif pas-ait à 7,58 en cas de score de Mallampati à 3 et à 11,30 enas de score de Mallampati à 4.

Plus récemment, un rapport de surveillance s’est inté-essé aux cas d’intubation impossible lors de la réalisation’une anesthésie générale au cours de la grossesse [2].’analyse des 57 cas rapportés a montré qu’un score de Mal-ampati supérieur à 1 était corrélé en analyse multivariée auisque d’intubation impossible.

Enfin, il faut noter que certaines équipes rapportent chezes mêmes femmes, une évolution du score de Mallampatiu cours de la grossesse [15]. C’était le cas notammentans une étude qui évaluait le score de Mallampati chez42 femmes à 12 et à 38 semaines d’aménorrhée (SA). À8 SA, les auteurs retrouvaient une augmentation de 34 %e la fréquence des scores de Mallampati à 4. Il est intéres-ant d’observer que cette modification de la visualisationes structures oropharyngées était corrélée à la prise deoids pendant la grossesse.

Pour cette raison, il faut réévaluer le scorede Mallampati de chaque parturiente lors de son

arrivée en salle de travail.

uverture de bouche

n admet qu’une ouverture de bouche inférieure à5 mm est associée à un risque accru d’intubation dif-cile alors qu’une ouverture de bouche inférieure à0 mm est toujours associée à une intubation orotrachéalempossible.

istance thyromentale

lle représente la distance entre le menton et le carti-age thyroïde. Dans la conférence d’experts de la Sfar,ne distance thyromentale inférieure à 65 mm est cor-élée au risque d’intubation difficile [8]. Dans l’étudee Rocke et al., la présence d’un cou court était asso-iée de facon significative aux difficultés d’intubation14].

rotrusion maxillaire

a protrusion maxillaire ainsi que le rétrognatisme ont étéssociés à un risque d’intubation difficile accru.

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2 J. Rousset, A. Bataille

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opulation à risque

utre les caractéristiques cliniques permettant d’envisagerne intubation difficile prévisible, certaines études ont aussienté de définir des populations dont le risque serait aug-enté par rapport aux autres parturientes. C’est le cas

otamment d’un rapport de surveillance utilisant la basee données United Kingdom Obstetric Surveillance SystemUKOSS) [2]. Dans ce rapport revenant sur la période avril008—mars 2010, les cas d’intubation impossible ont étéecensés ainsi que les caractéristiques cliniques et démo-raphiques des patientes. L’analyse de ces cas montrait quee risque d’intubation impossible était corrélé en analyseultifactorielle à l’index de masse corporelle et à l’âge desarturientes. La corrélation de l’intubation difficile et de’obésité avait déjà était rapporté par Rocke et al. [14].

Il n’existe pas d’étude à notre connaissance qui retrouveue la pré-éclampsie soit un facteur prédictif d’intubationifficile. Toutefois, il existe de nombreux cas clinique rela-ant la difficulté de prise en charge des voies aériennesupérieures chez ces patientes [6], et il paraît donc raison-able d’inciter à la plus grande prudence lors de l’induction’une patiente pré-éclamptique.

De même, on peut recommander la prudence chezes patientes souffrant de diabète gestationnel. Même siomme dans le cas précédent, la littérature ne permet pas’affirmer que l’intubation prévisible risque d’être difficile,n sait que ces patientes ont une prise de poids plus impor-ante lors de leur grossesse et que le risque de césarienne enrgence est augmenté par rapport à la population générale.

La stratification du risque d’intubation difficile est doncompliquée en dehors des situations caricaturales. Aucunlément clinique pris isolément ne permet de prédire la dif-culté de prise en charge des voies aériennes supérieures.’est l’association de plusieurs éléments chez une patienteppartenant à un groupe à risque qui doit inciter à anti-iper une situation difficile voire à modifier de la stratégie’intubation.

ispositifs utilisés en vue d’une intubationifficile

côté de dispositifs plus anciens, de nombreux autres ontté mis sur le marché au cours dernières années. Peu d’entreux ont été évalués dans le contexte obstétrical.

asque laryngé

e masque laryngé est probablement le dispositif le mieuxtudier dans le cadre de l’intubation difficile. Il fait à ceitre l’objet de recommandations quant au choix de sontilisation [8]. Il a le double avantage de permettre la ven-ilation et l’intubation et ainsi d’assurer l’oxygénation desatientes en attendant de sécuriser totalement les voiesériennes supérieures. C’est ce que montre une étude réa-isée en chirurgie gynécologique regroupant 115 patientes.

a moitié d’entre elles présentaient un score de Cormackt Leehan à 4 lors de la laryngoscopie directe. L’utilisationu masque laryngé a permis la ventilation dans 97 % des cast l’intubation dans 86 % des cas [16]. Même si le taux de

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igure 2. LMA C TrachTM.

uccès de l’intubation paraît important dans cette étude, ilst variable d’une étude à l’autre en fonction des critèresetenus pour qualifier le succès de l’intubation, du type deasque laryngé utilisé et de l’expérience de l’utilisateur.Ainsi, même s’il est techniquement possible d’intuber à

ravers un masque laryngé de type I-gelTM, le LMA FastrachTM

emble offrir un taux de succès plus important. C’étaitotamment le cas dans l’étude de Halwagi et al. qui seroposait de comparer les deux dispositifs [17]. Dans cettetude qui avait inclus 160 patients, l’insertion du masque I-elTM était plus rapide que celle du LMA FastrachTM, mais leaux d’intubation réussie, et ce malgré plusieurs tentatives,tait plus faible avec le masque I-gelTM (73 % contre 91 %).

Le dispositif offrant le taux de succès le plus importantemble être le LMA CTrachTM (Fig. 2). À mi-chemin entree LMA FastrachTM et les nouveaux vidéolaryngoscopes, ilermet par un dispositif de fibre optique de positionner leasque laryngé et de visualiser en temps réel le passage de

a sonde d’intubation au travers des cordes vocales. Dansne étude incluant 271 patients et le comparant au LMAastrachTM [18], le taux de succès de l’intubation trachéaleors de la première tentative était de 93,3 % avec le LMATrachTM contre 67,9 % avec le LMA FastrachTM et de 100 %près trois tentatives contre 96,4 % avec le FastrachTM.

Enfin, il faut noter que certains auteurs ont proposé’utilisation du masque laryngé comme seule technique derise charge des voies aériennes supérieures pour la réalisa-ion de césariennes programmées. C’est le cas dans deuxéries rétrospectives comportant respectivement 1096 et000 patientes [19,20]. Malgré l’absence d’inhalation auours de ces deux études, il faut probablement attendre’autres essais cliniques pour promouvoir cette attitude.

irtraqTM

’AirtraqTM est un dispositif à usage unique qui par le biaise miroirs permet de réaliser une laryngoscopie indirecte.a présence d’un canal latéral permet de guider la sonde

Page 5: Intubation difficile en obstétrique

Intubation difficile en obstétrique

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Figure 3. AirtraqTM.

d’intubation entre les cordes vocales (Fig. 3). Une étude cli-nique a montré que l’utilisation de l’AirtraqTM par rapport àla laryngoscopie directe permettait en cas de rachis cervicalfixe, d’améliorer les conditions d’intubation, d’augmenterle taux de succès et de réduire le temps d’intubation[21]. L’AirtraqTM a aussi été comparé à la laryngoscopiedirecte dans un collectif de patients présentant des cri-tères d’intubations difficiles, où il a montré qu’il amélioraitles conditions d’intubation et réduisait le temps nécessairepour intuber (13,4 ± 6,3 s contre 47,7 ± 8,5 s dans le groupelaryngoscopie directe), ce qui avait pour conséquence dediminuer le nombre d’épisodes de désaturation artérielle enoxygène dans le groupe AirtraqTM [22]. Pour ces raisons, cer-tains auteurs ont proposé son utilisation après échec d’unepremière laryngoscopie. C’était le cas de cette étude oùl’utilisation de ce dispositif après échec en laryngoscopiedirecte avait permis d’intuber 80 % des patients [23].

L’intérêt spécifique de son utilisation en obstétriquereste toutefois à démontrer puisqu’en dehors de la des-cription de séries de cas, il n’a pas fait l’objet d’étudescliniques comparatives [24]. Une étude a évalué son inté-rêt pour l’intubation des patients obèses dont les conditionsd’intubations peuvent se rapprocher de celles de la femmeenceinte. Dans cette étude qui comparait l’intubation aumoyen de la laryngoscopie directe ou de l’AirtraqTM chezune centaine de patients obèses dont l’index de massecorporelle était supérieur à 40 kg/m2, on observait une amé-lioration des conditions d’intubation, une réduction de ladurée de la procédure et diminution du nombre de désa-turations artérielles en oxygène inférieures à 92 % dans legroupe AirtraqTM [25].

Vidéolaryngoscopes

Les vidéolaryngoscopes ont la caractéristique commune depermettre la visualisation de la glotte sur un écran à par-tir des images obtenues par une caméra placée au bout de

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257

a lame du laryngoscope (Fig. 4). Il n’est donc plus néces-aire d’aligner l’axe du larynx avec ceux de la cavité buccalet de l’œil de l’observateur rendant la visualisation de lalotte techniquement plus facile qu’avec les laryngoscopesraditionnels [26]. L’usage des vidéolaryngoscopes permet’améliorer les conditions d’exposition et de raccourcir leélai d’intubation [27]. Ces dispositifs sont d’autant plusntéressant dans les situations où existent des difficultése mobilisation du rachis ou lorsque l’ouverture de bouchest diminuée [28]. Toutefois, l’intubation par laryngoscopiendirecte ne permet pas de visualiser le trajet de la sonde’intubation durant toute la procédure et des lésions dualais ont été décrites [29].

Une évaluation rétrospective du GlidescopeTM portantur plus de 2000 séquences d’intubation montrait que leaux de succès chez les patients présentant des critères’intubation difficile était de 96 % [29]. Il semble que lesacteurs permettant de prédire l’échec avec le GlidescopeTM

oient des modifications de l’anatomie cervicale, notam-ent lorsqu’elles sont consécutives à une chirurgie, une

adiothérapie ou une tumeur. Toutefois, il ne semble pasu’un score de Mallampati élevé soit corrélé à des difficultés’intubation.

Une série récente publiée en obstétrique revenaitur l’utilisation du GlidescopeTM dans une unité obsté-ricale sur une période de 36 mois [30]. Au cours deette période, 180 anesthésies générales avaient été réali-ées. Afin d’intuber les patientes, les anesthésistes avaientu recours à la laryngoscopie directe à 163 reprises. À

reprises, ils avaient dû recourir à plusieurs tentatives afine réussir à intuber la patiente et dans un cas l’intubationvait été impossible. La vidéolaryngoscopie n’avait été uti-isée que 18 fois mais le taux de succès était de 100 %ors de la première tentative. Il est intéressant de noterue les patientes ayant bénéficié d’une vidéolaryngoscopievaient été sélectionnées en raison de critères prédic-ifs d’intubation difficile et que la patiente qui n’avait putre intubée en laryngoscopie directe avait pu l’être enidéolaryngoscopie. Ces dispositifs semblent donc très pro-etteurs appliqués dans le contexte obstétrical et même

’il existe encore peu d’études les concernant dans ceomaine, certains auteurs proposent leur utilisation en pre-ière intention à la place de la laryngoscopie directe [31].

tratégie de contrôle des voies aériennesn cas d’intubation difficile

ntubation difficile prévue et césariennerogrammée

ette situation où la chirurgie est programmée et où lesifficultés sont atténues représente la meilleure oppor-unité pour appliquer une stratégie définie. Dans le casrésent, la meilleure attitude est d’éviter l’anesthésie géné-ale en pratiquant une rachianesthésie [32]. Cette stratégie’applique également même s’il n’existe pas a priori de

ion d’intubation difficile non prévue. Il existe toutefois desituations où les circonstances peuvent imposer une anes-hésie générale (anomalie non corrigeable de l’hémostase)

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258 J. Rousset, A. Bataille

Figure 4. Trois modèles de vidéolaryngoscopes. A. VidéolaryngoscopC.Vidéolaryngoscope de type Pentax AWSTM.

Intubation difficileÉchec de 2 laryngos copies ou SpO2 < 9 0 %

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[1] Mendelson CL. The aspiration of stomach contents during obs-

igure 5. Algorithme pour l’intubation difficile non prévue enbstétrique.

algré l’existence de critères d’intubation difficile. Danses cas, l’intubation sous fibroscopie est la technique deéférence selon les recommandations de la Sfar [8].

ntubation difficile non prévue ou césariennen urgence

orsque le délai d’extraction ne permet pas d’attendrea conversion de la péridurale, une anesthésie géné-ale est pratiquée qui peut rencontrer des conditions’intubation difficile non prévues génératrices d’un stressmportant. Dans ces circonstances, la priorité est d’assurer’oxygénation de la patiente et une revue récente indiqueue la ventilation au masque facial doit être reprise si laaturation artérielle en oxygène chute en dessous de 90 % ouprès 2 échecs de laryngoscopie (Fig. 5) [31]. Elle rappelleussi que les tentatives de laryngoscopies répétées peuvent

ggraver l’œdème des voies aériennes supérieures qui peutboutir à une obstruction complète de la filière oropharyn-ée [31]. Certains auteurs recommandent de maintenir uneanœuvre de Sellick pendant la durée de la ventilation [33].

e type Mc GrathTM. B. Vidéolaryngoscope de type GlidescopeTM.

Si l’oxygénation peut être maintenue, il est licite’envisager le recours aux dispositifs type AirtraqTM ouidéolaryngoscopes [22]. Actuellement, la littérature neermet pas de recommander un dispositif plutôt qu’unutre.

En cas de difficulté à assurer une bonne oxygénationar la ventilation au masque facial, la mise en place d’unasque laryngé doit être effectuée en attendant de pouvoir

ntuber le patient [16]. Dans ce cas, le LMA FastrachTM et leMA CTrachTM sont probablement les plus adaptés puisqu’ilemble que les chances de succès d’intubation sont plusmportantes qu’avec les autres dispositifs extraglottiques17].

onclusion

a bonne connaissance des algorithmes de prise en chargee l’intubation difficile sont un corolaire à la diminutione la morbidité en anesthésie obstétricale. Ces algorithmeseront probablement modifiés dans un futur proche du faitu retour d’expérience sur l’utilisation des vidéolaryngo-copes. Toutefois, malgré ces innovations, l’anesthésie lalus sûre dans le contexte obstétrical reste l’anesthésieocorégionale qui doit être privilégiée [32].

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

éférences

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Intubation difficile en obstétrique

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