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LA VALLÉE DE LA CÈRE (CANTAL) - Episode 2/2 · de 300 pages sur l’histoire de son village,...

Date post: 13-Sep-2018
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50 - MASSIF CENTRAL MAGAZINE - www.massif-central.fr MASSIF CENTRAL MAGAZINE - www.massif-central.fr - 51 Thiézac Vic-sur-Cère Saint-Flour Murat Aurillac Mur-de-Barrez Le Goul La Cère 45e parallèle LA VALLÉE DE LA CÈRE La fdfdfdf (CANTAL) - Episode 2/2 TEXTE : LAURENT BLANCHON PHOTOS : VINCENT JOLFRE (SAUF MENTION) L’Iraliot, petit ruisseau qui coule en plein cœur de Vic-sur-Cère. 5 Vic sur Cere2:Mise en page 1 6/07/12 10:37 Page 4
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Page 1: LA VALLÉE DE LA CÈRE (CANTAL) - Episode 2/2 · de 300 pages sur l’histoire de son village, abondamment illustrés de cartes postales. A voir, à faire ... un faux cyprès de Lawson

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Thiézac

Vic-sur-Cère

Saint-Flour

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45e parallèle

LA VALLÉE DE LA CÈRE ❚ La fdfdfdf

(CANTAL) - Episode 2/2

TEXTE : LAURENT BLANCHON

PHOTOS : VINCENT JOLFRE (SAUF MENTION)

❚ L’Iraliot, petit ruisseauqui coule en plein cœur de Vic-sur-Cère.

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45e Parallèle 45e Parallèle

Énigme sur le 45e parallèle ! Par quel miracle Anne d’Autriche a-t-elle enfanté lefutur Louis XIV, après vingt-trois ans d’attente et un voyage en haute Auvergne,dans la vallée de la Cère (Cantal) ? Trois siècles plus tard, deux communes, Vic-sur-Cère et Thiézac, se disputent encore la paternité du Roi-Soleil ! Enquête sur leslieux du mystère.

Vic-sur-Cère, la mairie. Lasalle du conseil est ferméeà double tour mais selaisse admirer derrière

une porte vitrée. Tout est là, sous mesyeux. L’histoire d’un pays. Ses lé-gendes aussi. Blasons, fresques, fersde noblesse… Ils disent tout, racontenttout. Pourtant, en décrypter la symbo-lique relève d’un impossible jeu depiste, dans les méandres du passé com-munal et de la pensée un tantinet co-quine du maître des lieux, le maire deVic-sur-Cère, historien et romancierLouis-Jacques Liandier. Appeler lemaire. Prendre rendez-vous. Qu’ilnous explique ! Deux reines, desprinces, des nobles, un révolutionnairejalonnent son récit. Et une énigme his-torique, qui court depuis deux siècles.En 1615, Anne d’Autriche épouseLouis XIII. Pendant vingt-trois ans,elle ne lui donnera pas la moindre des-cendance. Déprimée, lasse des bri-mades, elle fuit la Cour, voyage à tra-vers le royaume, fait halte à hauteur du 45e parallèle, dansla vallée de la Cère (Cantal). Moins d’un an après naissaitle futur Louis XIV. Voilà les faits. Deux siècles plus tard, àThiézac et Vic-sur-Cère, et avec force extrapolations, on sedispute encore le miracle. Et l’enquête, prétexte à un pas-sionnant voyage dans l’histoire régionale, nous transporte,au gré des légendes, entre mythe et réalité historique.

Les princes de MonacoNos investigations débutent dans le vieux Vic où l’Iraliot,petit ruisselet au débit faiblard en cette fin d’été, serpenteentre les maisons de basalte. À l’angle d’une rue, uneplaque indique la maison des princes de Monaco. Pendantplus d’un siècle, de 1643 à 1793, la région fut administréepar le royaume du Rocher, objet d’une subtile tractation en-tre Louis XIII et Honoré de Grimaldi. De cette gouver-nance monégasque, plutôt débonnaire — « à la méditerra-néenne », qualifie Louis-Jacques Liandier —, il ne reste

que cette demeure, occupée jadis par l’envoyé du prince. Etquelques curiosités. Tous les registres paroissiaux de Vic-sur-Cère, antérieurs à la Révolution française, sont soigneu-sement conservés en principauté. « L’archiviste en chef deMonaco nous a simplement autorisés à les numériser », pré-cise le maire. Pour ne point qu’il termine en carrière, on aaussi confié à Monaco la propriété du rocher de Carlat, hautlieu médiéval où trôna jadis une gigantesque forteresse, ra-sée sur ordre du roi Henri IV en 1603. Enfin, les parrains etmarraines de la dernière rosière de Vic-sur-Cère, en 1999(lire notre encadré p. 57) n’étaient autres que feu Roger For-chino, chef du service honoraire des sports de la principautéet membre du Comité olympique, et son épouse Renée,conseillère technique du gouvernement auprès du princeRainier. Comme il y a la maison des Princes, il y a, à Vic,

❚ Les eaux de Vic, ne sont plus exploitées deuis 1960, faute d’un débit suffisant. Ellesauraient pourtant, selon la légende, des propriétés miraculeuses.

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❚ La salle du conseil avec ses fresques, rénovée en 1991, dans desteintes de vert et de terre de Sienne chères à Veronèse.

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la maison dite de la Reine Margot, qu’elleaurait occupée un temps, alors qu’elle étaiten exil à Carlat. On trouve aussi celles dePierre-André Coffinhal et de Jérôme Pagèsdes Huttes. Ces deux grands hommes, natifsdu pays, ont tous deux laissé leur peau à laRévolution, le premier, vice-président dutribunal révolutionnaire, pour être resté fi-dèle à Robespierre ; le second, entré au ser-vice du roi Louis XVI à l’âge de 22 ans,pour avoir facilité la fuite de la reine Marie-Antoinette.

Lʼeau de VicVoilà qui est intéressant. Mais ne me ren-seigne guère sur la paternité du Roi-Soleil.Je poursuis mes recherches près de la sourced’eau minérale où sans doute, me dit-on,trouverai-je un quelconque indice. L’eau deVic-sur-Cère fut découverte par les Celtespuis exploitée par les Romains. Elle connaîtson apogée à la fin du XIXe siècle, alorsqu’elle est rachetée par un certain AntoineFayet1. L’homme obtient sa déclarationd’intérêt public, développe sa commerciali-sation sur la capitale — il aurait expédiéjusqu’à 700 000 colis par an —, décide de laconstruction d’un établissement thermal.Nous sommes en 1890. Vic-sur-Cère se dé-veloppe avec l’arrivée du chemin de fer,construit à grand frais par la compagnied’Orléans. La compagnie érige même deuxgrands hôtels pour héberger le flot de tou-ristes acheminés par ses trains. Celui de Vica fermé après guerre2. Et dans la gare deTours, où se trouvait paradoxalement lesiège de ladite compagnie, trône toujours, àcôté du bistrot, une céramique vantant lesséjours à Vic-sur-Cère. La source, elle, n’estpas tarie. Grâce à un nouveau forage, opéré

en 1991, l’eau coule toujours à lafontaine du kiosque, où quelquesVicois remplissent encore leursbouteilles, à l’ombre d’arbres bi-centenaires importés d’Amé-rique par un authentique aventu-rier (lire notre encadré p. 58). Etla commune a installé dans l’an-cien établissement thermal unemaison des Eaux minérales.C’est ce musée qui m’apprendles propriétés de cette fameuseeau de Vic. « Ferrugineuse àsouhait, [elle] stimule l’appétit,régularise les fonctions diges-tives, accélère la nutrition »,clame une ancienne publicité.Une autre réclame rappelle quela précieuse source, qui n’est

plus exploitée industriellement depuis 1960,faute d’un débit suffisant, « assiste grande-ment les parties servant à la génération,tant de l’homme que de la femme ». La pre-mière thèse est là. Anne d’Autriche est ve-nue à Vic-sur-Cère. Et a trouvé en son eaumiraculeuse un remède à son infécondité.

La prière de ThiézacBalivernes, répond-on non loin de là, àThiézac ! Pour tout entendre, je traverse le45e parallèle et rejoins cette bourgade de600 habitants, perchée sur le versant nord dela vallée de la Cère. Là m’attend JacquesOddoux. Historien local érudit, amoureuxde son pays, l’homme a écrit deux ouvrages3

de 300 pages sur l’histoire de son village,abondamment illustrés de cartes postales.

A voir, à faire• La maison des Eaux minéralesUn musée de l’eau, où vousgoûterez la fameuse eaugazeuse de Vic-sur-Cère.Ouverte les week-ends et surdemande. Renseignements enmairie, au 04.71.47.51.75.

• Le patrimoine de ThiézacLa chapelle Notre-Dame-de-la-Consolation et l’église Saint-Martin, notamment. Renseignements en mairie, au04.71.47.01.21.

• Le Pas de CèreVingt minutes de marche audépart du camping de Vic-sur-Cère pour profiter de cesimprobables gorges taillées parla fonte des glaces et l’érosionfluviale. Pour 1,5 km demarche en plus, sur le trèsagréable sentier qui longe lesgorges, vous profiterez de lacascade de la Roucolle.

• Le rocher des PendusDu haut de ce promontoiresitué au sommet du col deCurebourse, on appliquait lespeines capitales prononcées àVic-sur-Cère par la cour de jus-tice du Carladès. Il offre unevue imprenable sur la vallée.

• Les cascadesQuinze minutes de marchepour atteindre la cascade de laConche, en empruntant lapetite ruelle derrière l’église,avec la possibilité d’une halte àCastel-Vieil, emplacement d’unancien château féodal.

InfosOffice de tourisme du Carladès,avenue André-Mercier, 15800Vic-sur-Cère. Tél. :04.71.47.50. 68. Site :www.vicsurcere.com/

❚ Jacques Oddoux, historien passionné par son village, Thiézac, et son pays, lavallée de la Cère...

❚ Le centre ville de Vic-sur-Cère. « Ici, on a construit avec les pierres qu’on avait sous la main », explique le maire Louis-JacquesLiandier. « Du basalte, de la bonne pierre de lave...»

❚ L’eau de Vic-sur-Cère, très ferrugineuse,coule toujours sous le kiosque, à l’ombred’arbres bicentenaires. Nombreux sont lesVicois a venir encore remplir leurs bouteilles.

❚ Homme politique, historien, romancier, Louis-Jacques Liandierest maire de Vic-sur-Cère.

La rosièrePar un vote en conseil municipal, àbulletins secrets et sans débat. Ainsiétait désignée, tous les trois ans et surcandidature, la rosière de Vic-sur-Cère.La tradition est née en 1891, dans lafortune d’un dénommé Laborie, heu-reux de léguer un peu de son argent, endot, à une jeune fille « méritante etd’excellente moralité ». Elle s’est perpé-tuée tous les trois ans jusqu’en 1999.En 2002, la municipalité n’a reçuaucune candidature… et n’en a passollicité. « Il devenait de plus en plusdifficile de trouver parrain et marraineayant les moyens de financer unmariage dans son intégralité », soulignele maire de Vic, Louis-Jacques Liandier.

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Un monumental séquoia, un pin Weymouth aux aiguilleslongues et persistantes, un faux cyprès de Lawson et, encoreplus exceptionnel, un if, à l’alcaloïde vénéneux et dont le bois,robuste et à forte capacité de torsion, servait à la fabrication desarcs… Le parc du kiosque, où coule encore l’eau de Vic-sur-Cère, situé en face de la maison des Eaux minérales, est arboréd’essences rares. L’histoire de ces grands arbres est singulière.Né à Aurillac en 1778, Arsène Lacarrière-Latour, dont la famillehabitait le château de Comblat, près de Vic, s’en est allé com-battre outre-Atlantique aux côtés de Lafayette. Architecte, il estl’urbaniste de La Nouvelle-Orléans et de Bâton-Rouge, ville danslaquelle il a construit un kilomètre de fortifications. On le pré-sente comme l’artisan de la victoire américaine sur les Anglaisen 1815. L’homme n’était pas ingrat avec son pays d’origine.Après s’être vendu aux Espagnols, il est d’ailleurs revenu ymourir. Non sans avoir importé d’Amérique, dans d’immensescaissons, ces magnifiques arbres qui ont fort bien pris racinedans la terre cantalienne.

Les arbres américains de Vic-sur-Cère

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Par un chemin caillouteux, il me conduit sur les hau-teurs de la commune, vers Notre-Dame-de-la-Consola-tion. La chapelle fut érigée au XVe siècle, à l’endroitprécis où la Vierge serait apparue à des pèlerins. Unmagnifique retable, aux sculptures dorées, règne surl’édifice noirci par le temps. La voûte est ornée surtoute sa longueur d’une superbe peinture murale : pasmoins de 45 tableaux ou médaillons reliés les uns auxautres, encadrés de feuillages ou de fleurs, entremêlésde têtes d’anges4. Les murs sont couverts d’ex-voto, da-tés pour l’essentiel des périodes d’après guerre. C’estici, dans cette chapelle, que l’on découvrit en 1881 unfragment de dentelle. C’est un devant d’autel qui porteune inscription — « grâce à Dieu Royne de France » —et des éléments décoratifs identifiés : on y reconnaît no-tre ami Louis XIII, le duc d’Orléans, ses sœurs Élisa-beth et Christine. Pour Jacques Oddoux, pas de doute !Anne d’Autriche vint à Thiézac. Pria la Vierge. Futexaucée. Et envoya, en remerciement, l’inestimablenapperon toujours exposé de nos jours dans une vitrineilluminée de l’église Saint-Martin.

La troisième versionTout s’explique donc, dans cette fameuse salle duconseil ! Les blasons de Monaco aux côtés de ceux deVic-sur-Cère. Au plafond, les fers de noblesse de la fa-mille Pagès de Huttes. Et, sur les murs, ces troisfresques, commandées par la municipalité en 1991, réa-lisées dans les teintes de vert et de terre de Siennechères à Véronèse. À droite en entrant, la reine Margot.En face, la scène emblématique où l’envoyé du roiLouis XIII remet à Honoré de Grimaldi, devantl’évêque de Saint-Flour, les clés et apanages du Carla-dès vicois. À gauche, la belle Anne d’Autriche, accom-pagnée d’une figure céleste et d’un symbole de fécon-dité dessiné dans le bleu de l’eau minérale. Qui, del’eau ou de la Vierge, aura soudain permis l’enfante-ment ? Louis-Jacques Liandier penche pour une troi-sième version, beaucoup moins mystique, d’une femmelasse d’un mariage politique, de la misogynie et despassions « très masculines » de son roi de mari5.

Et qui, après plus de vingt ans d’attente, dans une pro-vince reculée de haute Auvergne et sur le 45e parallèle,aurait soudain consommé. À Thiézac ou à Vic-sur-Cère ? ■

1. Né à Auzolles, dans le Cantal, il sera élu maire de Vic-sur-Cèreen 1898. Il aurait consacré une grande partie de sa fortune, amas-sée dans diverses affaires à Paris, au service de la station ther-male.2. Le Grand-Hôtel de Vic-sur-Cère a été reconverti en un centre decourt et moyen séjours géré par l’Union des caisses primairesd’assurance maladie.3. Thiézac au XXe siècle et Thiézac autrefois. Édités par l’office detourisme de la commune.4. Description tirée d’une revue de la haute Auvergne.5. L’homosexualité de Louis XIII n’a jamais été prouvée, mais cettequestion est abordée par la plupart de ses biographes.

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