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l'Amour de La Raison Universelle

Date post: 08-Jul-2015
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Sommaire

Avant-Propos Le Fond du Secret LOrigine des Mondes La Vie LEsprit LHomme Libr La Philosophie de lHomme Libr Aprs-Propos

La Totale Intelligibilit du Rel Conceptions Scientifiques Le Dterminisme et la Libert Les liens entre Dmocrite, Epicure, Spinoza et Einstein Sources dInspiration Sources de Contre-Inspiration Rfrences et Notes

Version : pr-dition n3 utilise pour recueillir des avis, raliser des corrections, et laisser le texte mrir encore quelque temps avant d'en proposer une premire dition. N'hsitez donc pas envoyer vos commentaires lauteur : [email protected]. Copyright : cet essai a fait l'objet de plusieurs dpts et est protg par le droit d'auteur contre la copie ou la fausse appropriation.

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Avant-propos AvantTout homme a besoin de savoir pourquoi il existe. Malheureusement nous navons pas de rponses. Nous naissons seuls. Nos existences nous sont incomprhensibles. Elles sont de brves irruptions dans un monde que nous ne connaissons pas. Pour survivre, nous nous laissons guider par des conventions imposes. Nous nous rattachons aux croyances inventes par nos anctres. Ces fables mettent un terme aux questions sans rponses. Elles nous disent quoi penser et comment nous comporter. Elles nous rconfortent de linconnu. En contrepartie, nous devenons leur prisonnier. Beaucoup dentre nous se croient capables de reconnatre la vrit. Pourtant, bien que celle-ci soit souvent clatante, peu savent ladopter. Chacun porte en lui son image du monde. Elle est beaucoup trop ancre pour tre modifie par une lecture, une conversation, ou une exprience. Elle est inscrite au plus profond de lui-mme. Elle est rattache son identit et lempche de se corriger. Constern par les mensonges des hommes, jai su rsister leur emprise. Nanmoins, sans base pour apprhender le monde, je me suis compltement effondr. Perdu avec moi-mme, dpourvu de toute valeur, plus rien navait de sens. Je me suis dtach de mes propres motions, auxquelles je ne faisais de toute faon plus confiance. Jai lentement sombr dans une dsorientation totale o jai fini par douter de la ralit de ma propre existence. Nayant plus peur de ce que je pouvais rencontrer, je me suis mis accepter tout ce qui arrivait face moi. Les derniers sens qui me retenaient encore cdrent. Ne cherchant plus fuir le rel, ma chute sacclra brutalement face lordre mauvais et injuste de ce monde dont il fallait peut-tre encore mieux quil soit irrel. Je vis partout labsurde et compris pourquoi les hommes ferment les yeux pour survivre. Totalement immerg dans ce nant, je sentais progressivement steindre mon envie de vivre en ce monde. Aucune fable ne mavait charm. Rien ne semblait pouvoir me rconcilier. Je dcidais, malgr tout, de rester ici encore quelque temps

pour explorer vritablement le fond des choses. Je demeurais ainsi dans la dsolation et lindiffrence, et voyais ces sentiments se renforcer... jusqu cet instant de clairvoyance o jai ressenti la contradiction que javais souleve : si rien na de sens, si tout est dj mort, si les forces qui mont cr nont fait de moi quune poussire insignifiante qui va bientt disparatre et dont la vie est une absurdit, alors pourquoi y a-til en moi ce cri de dsespoir ? A lvidence, je suis triste de dcouvrir mon sort. Est-ce l un signe ? Au fond de moi-mme, je sentis que si je navais pas vu le monde, je laurais voulu diffrent. Ma dception peutelle tre la preuve que ma condition nest pas ma finalit ? Serait-elle la marque dune vrit plus profonde, au-del de ce que jai compris jusqu prsent ? Pendant longtemps, je nai pas pu mettre de mots sur ce que je ressentais. Doutant fortement de mes propres sentiments, je voulais dabord comprendre ces forces qui me guident. Javais besoin de savoir si je pouvais leur faire confiance. Cependant, comme je navais plus rien perdre, je dcidai de braver tous ces doutes. Jai donc choisi de donner toute sa chance ces mystrieuses impressions... L au fond de la dsolation, jai fini par comprendre que tout autour de moi sopposait un idal perdu. Si je ressuscitais ce rve refoul, il ferait de moi un tranger en ce monde. Partout on minviterait le dtruire pour pouvoir cohabiter avec cet ordre absurde. Au lieu de cela, jai dcid de le faire renatre pour exister. Cet idal me montre un autre monde. Un monde qui serait en accord avec ce que jai dans mon cur depuis toujours. Un monde qui fait de celui o je vis aujourdhui, une aberration quil me faut balayer. Nous ne demandons plus pourquoi. Nous nous sommes habitus au long silence de notre ignorance. Les religions proposent de fausses rponses dont nous nous loignons nouveau depuis maintenant quelques sicles, sans les avoir pour autant remplaces par une alternative solide. Lorigine de la ralit, le sens de la vie et le tourment de la mort nont toujours pas trouv de rponses pleinement satisfaisantes, nous rconciliant totalement avec le rel, et en mme temps capables de nous convaincre de leur vracit, au point quelles sont embrasses par tous les amis de la vrit. Malgr quelques rares

gnies qui ont jadis approch cette philosophie ultime, de sublimes rponses aux grandes questions de lexistence nont toujours pas t clairement annonces. Un texte philosophique essentiel manque cruellement tout enfant dsorient par ces problmes. Souffrant de ce manque, je me suis mis en qute de le composer pour moi-mme. Aprs de longs efforts, jai aujourdhui le sentiment dtre parvenu un niveau de cohrence qui dpasse toutes mes esprances initiales. Je vous offre loccasion de dcouvrir les rponses que jai trouves, et vous invite vous en inspirer librement. Cet essai dcrit ma faon de mexpliquer la vie. Il porte mon idal, mes ides, mes rves. Il est ma rfrence dans ce monde sans repres. Pour quil ait une chance de vous toucher, vous allez devoir remettre en cause vos convictions les plus profondes. Vous allez devoir vous retrouver dans ltat de lenfant qui prend conscience pour la toute premire fois. Si comme moi, vous vous sentez perdu, alors peut-tre y parviendrez-vous ? Pour cela, il faudra trouver en vous le courage de regarder toute la vrit en face, quelles quen soient les consquences pour nos existences. Si vous tes capable de me suivre dans cette voie prilleuse, jespre que comme moi, vous jugerez que le priple naura pas t vain. Je prfre toutefois vous prvenir que cette lecture peut dfinitivement changer votre rapport la ralit. A vrai dire, je suis moi-mme troubl par la puissance de ce que jai dcouvert. Plusieurs ides vous surprendront tellement que votre premier rflexe sera trs probablement de les rejeter malgr le poids de leur vidence. Il vous faudra du temps et srement plusieurs relectures pour accepter totalement certaines conclusions, si vous finissez par les accepter un jour. Jai moi-mme longtemps essay de fuir certaines consquences, jai cherch mille moyens de les rfuter et de m'en dbarrasser, et puis un jour j'ai fini par accepter lvidence... et finalement je ralise depuis combien cette nouvelle vision de la vie est belle. Vous voil prvenu de la difficult de lpreuve laquelle vous allez vous soumettre. Alors, ne me demandez pas si mes ides pourront tre ou non largement acceptes. Demandez-vous seulement si je vous ai dit la vrit ?

Dfinitions prliminairesLe mot raison, avec un r minuscule, sera employ comme synonyme du mot cause. Par exemple, une raison est une cause logique, une cause physique, ou encore une cause psychologique. Le mot Raison, avec un R majuscule, sera employ comme synonyme du mot Causalit ou pour voquer cette notion. Par Raison humaine, jentends notre capacit utiliser la Causalit, cest--dire le pouvoir de notre pense saisir l'enchanement des causes. La Raison humaine dsigne donc les facults intellectuelles de ltre humain. Par principe de Raison, jentends le principe de Causalit logique, autrement dit le principe du calcul et du raisonnement (Raison provient du latin ratio qui signifie calcul). Par exemple, le principe de Raison est ce pourquoi 1+1 = 2 et pas 3, -7, ou autre chose. Par Raison universelle, je signifie que le principe de Raison sapplique tout le cosmos et mme au-del si il devait y avoir lieu. Cette position fait du principe de Raison non seulement un concept humain, mais aussi une partie de la nature, ce qui implique lexistence de liens entre toutes les choses relles, de telle sorte que rien nest jamais sans raison, mais que toute chose possde toujours une cause logique, qui rend compte du fait quelle est ainsi et pas autrement. Le concept de Raison universelle soppose celui de Raison limite, dfendu par les empiristes, Kant et la plupart des thologiens qui rduisent la Raison une simple facult humaine permettant dordonner les phnomnes et imaginent que les fondements de la ralit ne sont pas soumis au principe de Raison.

Le Fond du SecretLe principe de Raison proclame que toutes les choses ont une cause, quelles ne sont pas arbitraires. En vertu de cette loi, rien ne saurait tre seul, uniquement par ce quil est. Pour avoir un sens, toute chose doit reposer sur un support qui lui est extrieur. Ce bel nonc est malheureusement confront un grave problme : lunivers contient tout. Rien ne peut tre en dehors. Par consquent, rien ne peut le soutenir. Si lunivers na pas de raison indpendante dexister, le nant absolu aurait d combler lternit. Pourtant, une ralit a merg. Chacun peut sen rendre compte. La ralit est peut-tre trs diffrente de limage que nous nous en faisons, mais nos existences tmoignent dune certaine forme de prsence, dfinitivement incompatible avec une totale inexistence. Ainsi, puisquun monde existe, beaucoup en ont conclu que le principe de Raison ntait pas universel. Selon eux, l o il sest teint, notre univers a merg. Depuis, tout est dsormais devenu relatif. Le sens mme des choses est circonstanciel. Ce qui est pour les uns, nest pas pour les autres. Ce qui se passe pour vous, ne se passe pas ncessairement pour moi. Tout et son contraire se sont dj produits. Tout et son contraire se vaut galement. Sans rfrentiel absolu, le relativisme intgral dcompose la ralit qui sautodtruit. Sans support universel, le sens mme des mots disparat. Aucune vrit absolue ne peut exister. La vrit nest mme pas terrestre, et toutes les questions que nous nous posons resteront jamais sans rponses. Tel est pris qui croyait prendre ! Le raisonnement que vous venez de lire sapplique galement lui-mme. Il prtend montrer quaucune vrit absolue ne saurait exister, alors mme quil avance laffirmation suivante : aucune vrit absolue ne peut exister. Bien que le cheminement qui nous a conduits jusqu cette conclusion vous paraisse peut-tre valide, si la Raison est morte, toute dduction causale nest que pure chimre et par consquent mme cette simple conclusion ne saurait tre universellement nonce.

Tel est pris qui croyait prendre encore une fois ! L'absence de vrit empche toute forme de conclusion. Toutes les phrases que vous venez de lire outrepassent leur droit, ainsi que celles que vous tes en train de lire ! Je ne peux plus rien vous dire et je nai pas le droit de dire que je ne dis rien. O suis je ? Tout est compltement bloqu. Celui qui souhaite sortir de cette spirale dautodestruction infernale se doit de reconnatre luniversalit absolue du principe de Raison. Etant incapable de rfuter, ni de dmontrer formellement lomniprsence de ce principe, jobserve que seul la reconnaissance de son universalit comme pralable toute chose garantit une signification minimale au rel. Aux portes de la logique rationnelle s'teint toute forme de ralit, mme la plus extrme. Au nom de lexistence dau moins une certaine forme de ralit, je nai dautre choix que dadmettre luniversalit du principe de Raison, et de supposer lexistence de ce que j'appellerais pour le moment un support absolu aux raisons de ce monde. Si tout dpendait de lunivers et si il nexistait pas un absolu qui lui soit extrieur pour fonder et garantir la Causalit, alors le sens des choses disparatrait, et tout sombrerait dans la spirale dautodestruction laquelle nous nous sommes heurts. Si par le pass, ce support avait cess dtre ne serait-ce quun bref instant, la ralit aurait disparu jamais. Tout ne peut tre remis en cause. Quelque soit le vritable visage de lunivers, aussi tordu que vous puissiez limaginer et bien plus encore, cet univers sera soutenu par un socle indpendant ne seraitce parce quil existe ; et mme si celui-ci nexistait pas, une chose immuable dfinirait ltat ne pas exister. Malgr et contre tout, une garantie luniversalit du principe de Raison rside ncessairement dans les fondements de toute ralit. Avec ce mystrieux support, lunivers nest plus seul. Un socle extrieur et indpendant soutient dsormais le rel. Il y a quelque part une entit ternelle et irrductible qui donne cours aux choses. Quoi que vous soyez, mme si ce monde nest pas ce que nous croyons, mme si je ne suis pas ici, que je nai pas vraiment crit cette phrase et que vous ne la lisez pas tout fait en ce moment, une entit absolue demeure malgr tout. Sans elle, rien ne peut

tre et rien ne peut ne pas tre. Sans elle, les mots perdent toute signification, les choses deviennent plus floues que des mirages, la ralit tombe plus bas que le nant. Grce ce support, la vrit absolue existe, ce qui mautorise rechercher la nature et la signification de mon existence. Depuis la nuit des temps, les hommes ont compris quil existe une chose qui soutient leur monde. Ce support qui maintient tout en place, ils lont appel Dieu. Une grande partie de la confusion qui entoure lide que les hommes se font habituellement de Dieu vient du fait que pour beaucoup l'arbitraire n'est pas irrationnel et quun support arbitraire est envisageable, voire ncessaire. Monumentale erreur ! Une chose arbitraire n'a pas de cause. Elle est donc contraire luniversalit du principe de Raison... universalit qui est ncessaire pour sauver la ralit. En effet, si le support de notre univers tait quelque chose d'arbitraire, cela impliquerait qu'il existe un lieu o la Causalit nest plus respecte. Afin que le support arbitraire reste en place et que tout ne finisse pas dans le chaos infini et indescriptible, il se doit d'y avoir une force, qui sapparente en fait une raison, pour maintenir le premier support. On peut continuer longtemps comme cela repousser le problme en crant des dieux dans les dieux, mais on ne formera pas de support absolu. Si l'on veut chapper au gouffre, on est contraint d'admettre que curieusement la raison de lexistence du socle du rel est le socle lui-mme. On se doit de reconnatre que dune certaine manire, Dieu est cause de soi. Je viens de rejeter la thse du support arbitraire pour dfendre celle du support totalement rationnel. Jadmets avoir troqu une incohrence contre un mystre brumeux. En effet, comment ce mystrieux socle fait-il pour se contenir et se soutenir lui-mme ? A peine vaincus, les paradoxes resurgissent de plus belle. Cependant, si vous acceptez de faire encore un bout de chemin avec moi, je vous montrerai quils ne sont pas invincibles. Pour cela, il va nous falloir percer le secret de Dieu, et alors vous verrez, tous les paradoxes se dissiperont.

Avec luniversalit du principe de Raison grav dans le socle de la ralit, l'irrationnel sombre dans limpossibilit dexister. Toute chose relle se doit davoir une cause. Rien ne peut exister arbitrairement. Par consquent, ltat originel de lunivers ne pouvait tre que le nant le plus absolu. Fermez vos yeux et essayez dimaginer ce quil y avait avant la naissance de tout. Pour concevoir cet tat primordial, vous devez imaginer un lieu o aucune chose navait de raison dtre ce quelle est. Vous voyez des espaces noirs, infinis entirement vides. Vous pouvez atteindre un tat encore plus recul. Supprimez lespace et le temps. Imaginez un vide absolu, o tout le volume est confin en moins dun point et o le temps ne scoule pas. Vous commencez percevoir ce quil y avait avant la naissance de tout. Il ny avait quun vide trange que jappellerai le non-nant. Le nonnant est le seul point de dpart possible lunivers. Tout lment arbitraire dfie le principe de Raison, or ce principe ne peut tre transgress sans dtruire lessence de la ralit. Ce raisonnement nous ramne devant notre paradoxe millnaire. Dune part, lorigine de tout ne pouvait tre quun nant absolu qui ne contient aucun lment arbitraire ; dautre part, un support se doit dtre immuable et ternel afin de fonder la Causalit. Ainsi, les croyants proclament que Dieu est ncessaire sans quoi lunivers naurait jamais pu tre cr, et les athes rtorquent que Dieu est une hypothse irrationnelle. Do vient-il ? Comment ferrait-il pour exister ? Ce paradoxe a travers les sicles. Il admet pourtant une solution. Si Dieu ne peut pas tre caus, ni exist arbitrairement, il ne peut tre que spontan. Si le non-nant est le point de dpart toute forme de ralit, il doit dj contenir des lois irrductibles, qui nont pas besoin de crateur pour exister et qui sont capables de donner naissance notre monde. Nous avons parfois limpression que la nature a dcid que 1+1 = 2 et pas 3 ou 4. Ce rsultat nous semble dtermin, comme si une instance suprieure avait dict le principe de laddition parmi les lois de la nature. Plaons deux billes dans un sac. Pour compter le nombre de billes, nous effectuons 1+1 et nous trouvons 2. En fait, si vous y

rflchissez bien, vous raliserez que ce rsultat ne peut pas tre diffrent. Laddition nest pas un processus. 1+1 et 2 dsignent tous deux la mme chose : le nombre de billes dans le sac. Il ny a pas besoin dinstance suprieure. Par consquent, mme dans lunivers le plus chaotique imaginable, 1+1 sera gal 2. Laddition nest pas vraiment une loi, puisquelle ne peut tre diffrente. Laddition nous apparat comme une loi, mais en ralit cest une vidence dune telle simplicit quelle na besoin de rien pour sexercer. De la mme faon, le thorme de Pythagore est un principe logique universel. Contrairement laddition qui est facilement comprhensible, cette loi nous est beaucoup moins familire. Nous avons besoin de lexprimer laide dune phrase et de lapprendre par cur. Pourtant, de la mme faon que 1+1 et 2 sont les deux noms dune mme ralit, dans un espace plat, le carr de lhypotnuse est gal la somme des carrs des cots de langle droit est synonyme de triangle rectangle. A premire vue, nous trouvons certaines lois arbitraires car elles ne nous sont pas naturelles, mais en fait, ce ne sont que des points de repre dcouverts par nos anctres pour contenir les contradictions de la pense humaine. Ces lois apparaissent seulement lhomme lorsquil se retrouve confront l'impossibilit des absurdits quil est capable dimaginer. Ces principes logiques universels nont pas besoin de crateur pour exister. Leur vidence rsout le mystre de leur origine. Leur spontanit leur permet de sexercer partout depuis lternit. La simplicit logique de ces axiomes mathmatiques est si profonde quelle les rend indmontrables. Pourtant, leur puissance de vrit ne connat son pareil dans et au-del de lunivers. Nous voil face au fond du secret. Ces principes logiques universels ne font quun avec le support qui maintient la ralit en place. Comme la logique rationnelle est lexpression naturelle du principe de Raison, elle na besoin daucun socle pour se fonder et simposer universellement. Elle se suffit ellemme. Voil le visage de lnigmatique support, indpendant de tout, qui seul orchestre la ralit. Dieu est le principe de Raison. Dieu tant le principe de Causalit logique, une chose irrationnelle ne peut pas exister dans la ralit, mais uniquement dans la

confusion de la pense humaine. Lorsque nous regardons notre monde si parfaitement construit, si merveilleusement organis, nous ressentons la prsence dune chose incomprhensible et inimaginable qui surpasse lentendement humain. De la mme faon que lgalit logique entre le triangle rectangle et le thorme de Pythagore ne nous est pas inne, nous ne voyons pas le lien entre le nant originel et le monde dans lequel nous vivons. Lorsque nous observons le ciel bleu, les toiles, locan nous restons merveill et stupfait. Nous nous demandons pourquoi le ciel est bleu et pas vert ? Pourquoi la Terre est ronde et pas plate ? Nous nous demandons pourquoi les choses sont telles quelles sont, car nous sommes capables de les imaginer autrement. Nous nous demandons pourquoi 1+1 = 2, car nous sommes capables dimaginer 1+1 = 3. Il existe partout des liens logiques qui font que les choses ne peuvent tre diffrentes de ce quelles sont. La qute de la science est de montrer que les apparents phnomnes incomprhensibles sont en fait des consquences plus ou moins volues des principes logiques universels. Ces principes s'exerant partout et pour lternit, les dmonstrations que nous tablissons grce eux ne sont pas des descriptions relatives lesprit humain, mais les voies sous-jacentes par lesquels un lment est jadis apparu partir du non-nant. Ainsi, aussi complexes que soient les choses que la nature ait engendres, elles possdent toutes une explication rationnelle. A lorigine, le non-nant tait donc beaucoup plus complexe que tout ce que nous avions imagin. Il contient en lui une infinit de principes logiques mathmatiques ternels. Ces lois ne sont pas des principes imposs, mais seulement une simple description de la logique inluctable. En vrit donc, les lois de la nature sont une illusion humaine. La seule rgle gouvernant le rel est dtre ce qui est logiquement possible. Munis de cette comprhension, nous pouvons rsoudre le mystre de lorigine de tout : lunivers est lexpression naturelle de la logique universelle qui contient locan infini des possibilits... et nous sommes lune de ces possibilits. Transport par son imagination dbordante, l'homme rve de choses arbitraires ou contradictoires et ne comprend pas pourquoi ces

choses nexistent pas. Ignorant les liens logiques qui lui rvleraient que les choses ne peuvent tre diffrentes de ce quelles sont, et oubliant trop vite quil ne peroit quune infime partie de la ralit, lhomme ne parvient pas ressentir son monde comme ncessaire. Perdu, il cherche dsesprment un impossible crateur. Comprendre l'origine de l'univers est finalement une difficult plus psychologique que scientifique. Cette vision esquisse un chemin rationnel nos origines. Elle nest cependant pas encore tout fait satisfaisante. Sil est dsormais clair que certaines vidences ne nous sont pas innes et nous font voir des phnomnes magiques incomprhensibles l o il ny a que des consquences logiques inluctables, les principes logiques universels dissimulent-ils pour autant toute la richesse et la diversit de notre monde et de nos penses ? Comment dailleurs la pense pourrait-elle merger dun non-nant dirig par des principes mathmatiques ? Limmense difficult de comprhension quil nous reste claircir ne rside pas tellement dans lorigine de lunivers, mais dans le dtail des processus qui, partant du non-nant, ont conduit jusqu lesprit humain et son imagination dbordante, capable de nier la logique rationnelle et de ne pas comprendre lorigine pourtant simple, naturelle et inluctable de toute chose et de lui-mme. Entre lesprit humain et de simples thormes mathmatiques, il semble y avoir un abme infranchissable. Pourtant, de spectaculaires transitions se produisent chaque instant devant nos sens bahis. En effet, sparment les sons ne sont que des vibrations de molcules dair. Lorsquils sont correctement associs, ils donnent naissance des mlodies. De mme, de vulgaires photons peuvent se rassembler pour former toutes les images que nous percevons, et des squences monotones et linaires dacides amins se replient chaque instant en des complexes capables de catalyser les ractions molculaires qui gouvernent le mtabolisme de tous les tres vivants. Soumis la ncessit aveugle, des lments simples peuvent au hasard des rencontres, voluer vers des niveaux suprieurs. Lorsquils franchissent certains seuils dorganisation, de nouvelles notions qui navaient

aucune signification auparavant prennent tout coup sens. Ces extraordinaires, et pourtant parfaitement naturelles volutions ne rendent plus irrationnelle la mtamorphose dun nant mathmatique en univers matriel, de la matire inerte en tres vivants et des tres vivants en individus conscients de leur propre existence. Voil rapidement trac la manire dont jentends maintenant vous proposer une explication rationnelle lorigine de tout. Voil, lesquisse du pont logique qui relie le non-nant notre monde.

AvertissementMes penses sont incertaines. Elles proviennent de mon esprit, et je sais mon esprit faillible. Il sgare souvent dans des erreurs de logique. De plus, rien ne massure quil matrise les bons concepts, ni quil soit assez puissant pour relever tous les dfis, ni non plus que je sois assez libre pour parvenir certaines conclusions. Je pourrais tre en train de nager dans un ocan derreurs et dillusions, incapable de comprendre ce qui se passe vraiment. Certes, les confrontations avec lexprience sensible confortent mon impression dtre sur le chemin de la vrit. Elles font reculer ce doute affreux. Malheureusement, en aucun cas ces expriences ne le feront compltement disparatre. Cest l une limitation intrinsque notre condition humaine. Je dois donc me contenter de la meilleure vrit prsente. Je sais que ma certitude la plus solide est ma conscience de moi-mme. Elle me prouve mon existence, ce qui implique ncessairement la prsence dune certaine forme de ralit... ralit que je ne saurais admettre sans luniversalit du principe de Raison. Tant que lon considre la logique rationnelle comme une simple facult de la pense humaine, on la supposera limite et probablement incapable de nous rvler les secrets cachs de lunivers. En revanche, partir du moment o lon reconnat que le principe de Raison est Dieu, alors la vrit absolue existe, et se conquiert si nos penses saccordent pleinement avec ce principe ultime. La pense rationnelle devient alors une lumire divine qui nous illumine le fond des choses. Toutes les lois de la nature tant des tats complexes de la logique rationnelle, en tudiant toutes les possibilits offertes par la Raison pure, une trs grande intelligence pourrait dcouvrir toutes les lois de la nature, et sans tre elle-mme totalement certaine des rsultats de sa propre pense, avoir malgr tout saisi lentire nature des choses. Lhistoire qui va tre prsente maintenant tient peut-tre plus du conte de fe que de cette vrit ultime. Les trois chapitres qui vont suivre sont une anticipation de cette explication finale nos origines. Jai essay de mapprocher au plus prs de cette vrit, nanmoins la

limite de nos connaissances actuelles ma conduit faire des spculations, minspirer de thories non confirmes, tandis que, dans un souci de cohsion, certains passages ont t presque librement invents. Si cette anticipation de la vrit ultime a aujourdhui toutes les chances dtre, au mieux inexacte, imprcise et beaucoup trop simplifie, alors me demanderez-vous : pourquoi lavoir rdige ? Dans le premier chapitre, jai raffirm luniversalit absolue du principe de Raison. Avant de vous exposer ma doctrine philosophique, je dois pralablement vous montrer comment franchir ce qui pour beaucoup parait encore infranchissable. Je dois vous faire sentir comment des vnements aussi incroyables que lapparition de notre univers, des tres vivants et dindividus conscients est possible dans un ordre parfaitement rationnel. Nos connaissances actuelles tant insuffisantes pour prtendre conclure srieusement sur le dtail exact des processus, je me contente de vous proposer une spculation base sur les plus rcentes connaissances scientifiques, qui permet dentrevoir lexplication complte et entirement rationnelle lorigine de tout. Pour le moment, je ne vois dautre possibilit que dadmettre que les vnements ont d globalement ressembler ce qui va tre dcrit maintenant, cest--dire que les ponts tracs entre toutes les lois de la nature existent vritablement. Mme si les trois chapitres qui vont suivre contiennent de nombreuses vrits, je vous demande toutefois de ne pas trop vous attacher aux dtails des explications proposes ici, car elles mritent dtre affines et corriges, mais je vous invite utiliser la vision gnrale qui se dgage de cette comprhension prliminaire pour commencer entrevoir le cosmos dans sa globalit. Que les sages considrent ce texte comme une source de propositions, dides et dhypothses. Que la superstition voit ici se dessiner les prmisses de tout ce quelle enseigne impossible. Aujourdhui, cet expos a avant tout un objectif psychologique. Lavenir dira jusqu quel point il correspond la ralit rvle par la science.

LOrigine des MondesLe non-nant est partout et nulle part. Nous ne pouvons pas dire que nous sommes linstant zro, ni dire combien de temps dure cette priode, car le temps nest pas encore dfini. De mme, lespace et ses dimensions nexistent pas encore. Le non-nant nest pas un vide physique. Ce nest pas une immense tendue vide, mais cest un vide logique. Le non-nant s'apparente au chiffre zro. En vertu de la logique naturelle, zro est et demeure gal zro. Comme rien ne pourra jamais en jaillir sans renier le principe de Raison, lunivers est condamn demeurer gal zro pour lternit. Ce point est acquis. Je ne vous jouerai pas la farce dy revenir. Mais alors comment notre monde peut-il exister ? Zro est en fait beaucoup plus complexe que la faon dont nous nous le reprsentons habituellement. Zro est gal (1 1), (2 + 1 3) ou encore (5 + 3 8). Zro nest donc pas seulement 0, mais il est linfinit des formules mathmatiques dont la somme est nulle. Chaque formule exprimant zro existe sparment des autres. Elle est un univers mathmatique indpendant contenant une suite de nombres dont la somme est nulle. Le non-nant est donc en fait un multi-univers mathmatique compos de toutes les formulations possibles de zro, de la plus simple des suites numriques aux quations les plus sophistiques. Dans certains univers mathmatiques, zro scrit (x + 3y) ou encore (x + 2y + 3z 1). De telles quations-univers admettent une infinit de solutions associes en couple, en ttrade ou plus selon le nombre de variables contenues dans lquation. Par exemple, dans lquation-univers (x + 3y) = 0, on trouve les couples de solutions (x = 3 ; y = -1) (x = 6 ; y = -2) (x = -1; y = 1/3)... Chaque quation-univers est remplie de linfinit des nombres-solutions qui garantissent la nullit de son quation. Comme chaque variable x, y, z... renferme une srie infinie de nombres, la cohabitation de ces multiples ensembles infinis dans le mme univers fait merger la notion de dimension. Les

variables x, y, z... donnent sens lespace pluridimensionnel. Selon leurs nombres de variables, les quations-univers acquirent une, deux, trois dimensions spatiales. Spontanment, la gomtrie apparat au sein de cet ensemble arithmtique. Observons mieux les quations-univers, car dans certaines dentre elles est apparu quelque chose dextraordinaire qui ne nous nest pas immdiatement perceptible. Pour lapercevoir, commenons par essayer dimaginer le point de vue dune chose finie, cest--dire limage que se ferrait un observateur imaginaire situ dans un de ces univers. Pour voir la gomtrie interne de son univers, notre observateur relie entre eux les couples, ttrades de nombressolutions. Par exemple, dans lunivers (x + 3y = 0), chaque valeur de x correspond une seule valeur dfinie de y. Imaginez un segment reliant chaque valeur de x sa valeur y correspondante. La forme gomtrique de cet univers vous apparat alors clairement. Elle est observable comme une infinit de segments de taille finie et enchevtrs dans toutes les directions. Cette vision gomtrique quaurait un observateur lintrieur et la vue globale quoffre lquation depuis lextrieur ne sont que deux points de vue quivalents sur le mme univers. La ralit mathmatique peut se percevoir comme une entit absolue (vue arithmtique) ou sobserver comme une infinit d'lments finis (vue gomtrique). Le travail de notre observateur se complique dans les univers possdant au moins trois dimensions. Par exemple, dans lunivers (x + 2y + 3z), si notre observateur part dun point au hasard, et essaie ensuite de dessiner un triangle liant les trois nombres-solutions, il ralise quil ne connat pas les cordonnes dans les deux autres dimensions. Sil part du point x = 1, il lui reste une infinit de y et de z possibles pour que la somme de lquation soit nulle. A toute valeur dans une dimension correspond une infinit dautres valeurs possibles dans les deux autres dimensions. Y a-t-il vraiment une gomtrie dans cet univers ? A lvidence oui, mais alors pourquoi ne parvenons-nous pas lobserver ? Cette difficult nous montre que quelque chose de subtil sest produite ici. Pour percevoir la gomtrie interne, nous

devons dcompacter le nouvel infini que nous venons de rencontrer. Au lieu de considrer en mme temps linfinit des correspondances possibles, pour dessiner notre triangle, il faut dplier ce nouvel infini en une infinit dinstants montrant chacun une seule correspondance. Epaississons lespace et tirons-le comme un accordon pour faire sortir une nouvelle dimension infinie, de telle sorte que chaque tranche despace montre notre triangle dans une de ses configurations possibles. Lobservateur qui regarde notre triangle le long de cette nouvelle dimension le voit se dformer ternellement dans lespace infini. En passant de tranches en tranches despace, les extrmits du triangle bougent et explorent toutes les combinaisons possibles. Au bout dun temps infini, notre triangle, et linfinit des autres triangles auront ralis toutes les configurations imaginables. Elevez-vous hors de cet univers et repliez toute lternit en un instant. Voyez, vous obtenez lunivers statique, perceptible depuis lextrieur, contenant toutes les solutions possibles. A nouveau, les deux points de vue dcrivent exactement la mme ralit. A lintrieur des univers possdant au moins trois dimensions spatiales, la notion mme de dimension s'approfondit jusqu engendrer une nouvelle dimension qui les englobe toutes. Cette dimension despace logique, nous lappelons le temps. Le temps nexiste pas hors de lunivers et na pas non plus de sens absolu pour lunivers pris dans sa globalit. Le temps nexiste que du point de vue gomtrique. Il ne saurait donc y avoir de temps absolu, pas de gigantesque pouls cosmique synchronis pour tout le cosmos, mais il y a autant de temps que dobservateurs finis. Puisque le temps na pas de sens hors des univers et que tous ces vnements sont des consquences logiques les unes des autres, tout ce qui vient de se produire a t instantan. Nous avons simplement fait un bond conceptuel pour nous les humains. En fait, tout ce qui a exist, existe ou existera est dj ralis. Linfinit des univers est de toute ternit. La ralit est depuis toujours fractionne en un nombre infini dexpansions mathmatiques qui coexistent paralllement. Ici commence et se termine la vritable histoire de tout. Zro a

instantanment et pour toujours atteint son degr de complexit maximal. Je vous emmne explorer les recoins cachs du non-nant, l o rien nest jamais cr, et o nous contemplons simplement ce qui est de toute ternit. Dans ces lieux, lorsque la logique rationnelle nous fait voir des choses, celles-ci ne peuvent pas ne pas exister. En effet, lessence des concepts mathmatiques nest pas dissociable de leur existence. Retournons dans ces contres o lapparition spontane de lespace et du temps, a runi les prmisses dune ralit physique. Essayons de visualiser les points et les triangles, en les dessinant sur une feuille de papier. La feuille de papier peut tre parfaitement droite, ou bien courbe, plie, froisse, de telle sorte que les points, les droites, les plans qui sont dessins dessus... deviennent des points, des cordes, des membranes.... En gomtrie, lespace nest pas forcment plat, mais peut tre plus ou moins courbe. Quest ce qui peut bien dterminer le degr de courbure de lespace ? Force est de reconnatre que la forme de lespace na pas t prvue ! Cette notion suprieure na de sens que dans les proprits mergentes. La logique fait donc apparatre lespace, mais elle est ellemme dpasse par ce quelle engendre. Comme la notion de forme de lespace a indiscutablement merge, mais quelle na pas t prvue, elle ne saurait tre contrainte. En chaque lieu, la forme de lespace oscille donc librement. Elle se courbe, se dtend, se modifie sans cesse. Lespace vibre alatoirement, pour raliser tous les degrs de courbures possibles travers lunivers infini, et ainsi combler le vide laiss par la logique. Lespace nest pas une entit en soi. Il nexiste que par les nombres qui le constituent. En ralit, il ny a pas despace. Dans lunivers, il ny a pas de support comme la feuille de papier. Au niveau fondamental, il ny a que les points correspondant aux nombressolutions de lquation-univers, qui dfinissent eux-mmes lespace. En chaque lieu, le degr de courbure de lespace est donc un potentiel port par un point. Chaque point de lespace possde donc une grandeur supplmentaire, alatoire.

Prenons une certaine zone despace possdant un certain degr de courbure. Ce degr de courbure est une grandeur finie. Si nous cherchons connatre le potentiel dun des points de cette zone, nous nous retrouvons confronts un srieux problme. En effet, dans toute partie de lespace, il y a une infinit de points, donc nous devrions rpartir notre grandeur finie dans une infinit de point, or une telle division par linfini est impossible. Ce problme nous fait voir, que la faon dont nous avons peru lunivers jusqu prsent tait bien trop approximative. Nous sommes alls trop vite, et nous navons pas tenu compte de nouveaux paramtres associs aux nouvelles notions qui ont merg. La notion de courbure de lespace implique ncessairement la notion de borne dans l'infiniment petit, afin que le degr de courbure soit reprsent par un nombre fini de points, ayant chacun un potentiel fini. Lespace courbe nest pas dcoupable linfini, mais il contient en lui une limite infrieure. Quest ce qui peut bien fixer la valeur dune telle borne ? Pas plus que le degr de courbure ntait prvu, ce paramtre nest attendu. Afin de combler cet espace logique, lunivers ralise toutes les valeurs possibles pour cette borne travers linfini. Dans certains lieux, cette limite est trs grande, dans dautres elle est plus petite, mais elle est toujours un paramtre fini. Comme il ne peut plus y avoir de continuit entre ces diffrentes rgions, le visage de lunivers se transforme compltement. Nous percevons quil ny avait pas quun seul type despace par univers. Il ny a pas un seul bloc unifi, mais lunivers est fragment en une infinit de bulles-univers possdant chacune localement une borne infrieure qui limite la taille possible dans son infiniment petit. Lunivers infini est en fait morcel en une infinit de bulles-univers finies qui apparaissent et disparaissent au gr des oscillations locales du degr de courbure de lespace. A lintrieur de chacune des bulles, il y a une taille minimale en de de laquelle rien ne peut exister. Lespace possde comme une maille interne. Tout segment reliant deux points de la maille possde exactement la distance minimale possible dans lespace. Il nest pas divisible. Les points de

lespace dessinent des segments, des triangles, des ttradres tout aussi inscables. Voil les atomes vritables. A tout instant, chaque point dfinit un certain degr de courbure de lespace qui varie alatoirement une cadence elle aussi alatoire le long de la dimension temporelle. Si nous considrons une petite zone despace, forme dun faible nombre de points, il y a peu de chance de voir longtemps se dessiner une courbure stable. En revanche, si nous observons une trs grande rgion, contenant un nombre gigantesque de points, nous trouverons, au sein de cette immensit, quelques rares points dont la cadence doscillation est suffisamment lente pour dessiner des courbures stables, au sein dune mer agite par des fluctuations phmres. Ainsi, bien qu lchelle microscopique lespace oscille de manire chaotique et imprvisible, lchelle macroscopique, se dessine quelques grandes structures stables dont les possibilits dvolution le long de la direction temporelle sont statistiquement contraintes par leur disposition passe. A grande chelle, les structures ne se transforment que partie par partie, et les tats s'enchanent les uns les autres : la Causalit physique merge. Plus une courbure est grande, plus elle a de chance dtre forme de points voluant lentement, et donc plus elle a de probabilit dtre stable. Toutefois aussi gigantesque soit-elle, toute courbure de lespace volue et nest pas ternelle. Mme les bulles-univers subissent ces transformations. Ici une nouvelle bulle-univers jaillit, l une autre sestompe, et ainsi naissent et disparaissent continuellement une infinit de bulles-univers au sein de lespace infini. A lintrieur de chaque bulle, apparat une ralit physique avec des atomes qui vont dessiner des mondes. Lvolution de ces figures gomtriques fait natre une histoire. Si dans une bulle, un observateur voit effectivement des structures voluer avec le temps, en fait tout instant, nimporte quelle structure imaginable est forme une infinit de fois, travers les autres bulles. Si un temps et une histoire sont bien perceptibles en chaque endroit de lunivers, du point de vue global, lensemble de toutes les bulles est statique. Lquation-univers nvolue pas. A travers lunivers infini, tous les types de mondes possibles existent simultanment une infinit de fois, tous les stades de leur volution.

Rien na t cr. Rien ne fut dtruit. Tout tait dj l. A chaque instant, nous ne faisons que contempler ce qui est de toute ternit. Ainsi naquirent les mondes. Limit par ses sens et ses a priori conceptuels, les hommes ne peroivent pas aisment la ncessit absolue qui fonde toute chose. Ils simaginent que limpossible sest ralis. Muni des yeux de la logique rationnelle, le sage voit que rien na t branl. La ralit que nous percevons nest quune infime partie de ltat ultra-complexe du non-nant. Derrire le mystre de lorigine des mondes, se cache un processus dune imparable simplicit. Il ny avait pas de choix de la cration. Le non-nant est quivalent au tout infini, par consquent linfinit des univers ne peut pas ne pas exister. La ralit est le fruit de la logique pure. Dieu nest pas la cause premire de lunivers. Dieu est le principe de Causalit logique qui se rvle travers le cosmos. Du principe de Causalit dcoule spontanment la seule loi rgissant le multi-univers : raliser locan infini des possibilits. Ainsi, chaque instant et pour lternit, les filles de la logique dirigent le destin des mondes. Les filles de la logique ordonnent les mondes, cependant elles ne parviennent pas suivre lenvol vertigineux dans lequel la ralit sest engouffre ! Revenons par exemple nos triangles. A chaque instant, ils bougent dans lespace, et chaque instant, la disposition suivante du triangle est confronte un choix multiple. Rien ne peut choisir quelle solution doit tre prfre plutt quune autre. Aucun principe causal ne peut dterminer quelle position sera slectionne parmi limmensit des solutions proposes. La ralit est encore confronte une insuffisance de la logique. Puisque la logique ellemme est incapable de choisir, les solutions adoptent des valeurs alatoires parmi linfinit des possibilits. A la croise des chemins, le hasard tranche. Lorsque la logique de lunivers est incapable de choisir, le hasard comble le foss et achve la construction de la ralit. Ce hasard vritable rgne perptuellement en matre au coeur de toute chose. Avec cette incertitude ternelle, merge limprvisibilit de chacun des mondes.

Depuis la nuit des temps, lhistoire est une suite de causes et de consquences. Nanmoins, la nature na pas engendr ses lments totalement souds sa ncessit cosmique. Librs par les insuffisances de la logique, les choses apparaissent avec des proprits alatoires. Dans chacun des univers, lincertitude simpose en matre, et met un terme dfinitif au mot destin. Lavenir de chaque monde nest pas grav dans son pass. Limprvisibilit inhrente au coeur de la matire rend le sort de chaque univers indfini. Mme si vous aviez un film montrant parfaitement chacun des atomes mergeant avec notre bulle-univers, vous ne pourriez compltement prvoir la suite des vnements. En suivant chaque grain de matire, vous seriez confront la croise des chemins. Avec la meilleure science, vous pourriez seulement envisager les probabilits, au sein desquelles, perdue dans cette immensit, se trouve le cas de notre petite plante bleue. Il ntait pas donn que la vie apparaisse sur Terre, et encore moins quun jour, des tres vivants prennent conscience de leur existence. La logique de notre bulleunivers ouvre le champ des possibilits. Elle dit ce qui est possible et ce qui ne lest pas. Seule la ralit crit lhistoire. Il y a environ quatorze milliards dannes, une nouvelle bulleunivers jaillit lintrieur du nant mathmatique. Lquation de lunivers qui la contient est incroyablement complexe. Elle dessine un espace agenc en des structures sophistiques. Le comportement des atomes sen trouve fortement compliqu. Ils subissent ces contraintes naturelles qui se font ressentir comme des forces, et les poussent sassembler en des structures volues. A grande chelle, les fluctuations originelles ont laiss des disparits. Certaines rgions sont plus concentres que dautres. Par la force de gravit, elles attirent la matire avoisinante pour former de gigantesques nuages de poussire et de gaz. Quelques centaines de millions dannes aprs lexpansion cratrice, notre bulle-univers compte des milliards de galaxies, elles-mmes formes de centaines de milliards de nuages gazeux plus petits. La force de gravit contraint ces nuages seffondrer sur eux-mmes. La temprature dans leur cur s'accrot au fur et mesure quils se contractent, jusqu ce que des

ractions nuclaires senclenchent. Les agrgats de particules sagitent, sentrechoquent jusqu se souder en des lments plus complexes, librant au passage une gigantesque quantit dnergie. La boule de gaz arrte soudain de se contracter. Elle vient datteindre un quilibre entre sa propre force de gravit qui tend la comprimer et lnergie des ractions nuclaires qui tend la faire clater. Lorsque la premire toile est ne, la lumire a recommenc briller dans lobscurit de lespace. Puis trs loin, une deuxime toile sest mise elle aussi briller, rapidement suivie par de nombreuses autres jusqu ce que des milliards de milliards dtoiles illuminent la bulle-univers de toute part. A lintrieur de ces boules gazeuses, les lments simples sont transforms en lments complexes. Lorsquune grande partie des lments simples est consomme, les ractions nuclaires ralentissent, le rayonnement saffaiblit et la gravit reprend le dessus. Le coeur de ltoile se contracte, sa temprature augmente et se stabilise temporairement grce de nouvelles ractions plus fortes, jusqu ce que la gravit reprenne dfinitivement le dessus. Alors, le cur de ltoile seffondre provoquant une onde de choc qui conduit une gigantesque explosion. Lnergie libre permet aux ractions de se poursuivre. Une soixantaine dlments nouveaux naissent au cours de lexplosion. Les 92 lments de la nature sont dsormais disponibles. Descendant des principes physiques, les lois de la chimie acquirent leur sens et vont combiner ces lments primordiaux pour former des molcules. Neuf milliards dannes se sont coules depuis le Big Bang. Dans une galaxie du nom de Voie Lacte, une toile vient dexploser. Elle laisse place un gigantesque nuage interstellaire. Sous leffet de sa propre gravit, ce nuage se condense et donne naissance une toile plus petite. Des fragments du nuage se contractent eux-aussi pour former des plantes. Des pluies de mtorites s'abattent leur surface, dversant les lments fabriqus par ltoile dfunte. Selon les conditions de luminosit et de gravit quoffrent les plantes, les lments dposs voluent de diffrentes manires. Sur lune delle, leau saccumule jusqu en recouvrir la surface. Des gaz svaporent,

crent une atmosphre, et au fond de son ocan se runissent les ingrdients de la vie.

La VieDans locan de la Terre primitive, les diverses molcules fusionnent ou s'accrochent ensemble grce aux lois de la chimie. Avec la complexification des structures molculaires, les associations deviennent de plus en plus spcifiques. Selon sa structure spatiale et lectronique, chaque molcule est comme une clef qui ne peut sinsrer que dans les molcules prsentant une disposition complmentaire. Les ractions chimiques alatoires se poursuivent et gnrent des milliards de nouvelles molcules toujours plus complexes. Chacune de ces grosses molcules attire de nombreuses autres, plus petites, qui lui sont localement complmentaires. En sagglutinant, ces petites molcules fusionnent parfois entre elles et forment une nouvelle molcule, associe la premire. Par ce processus, certaines grosses molcules crent spontanment des moules delles-mmes. Chaque couple ainsi form est un rplicateur : il est dot de la fabuleuse capacit de se reproduire. En effet, lorsque les deux membres du couple se dissocient, chacun se met attirer sur lui des petites molcules qui s'agrgent et fusionnent entre elles pour reformer le membre complmentaire. A chaque cycle de sparation, les effectifs sont dupliqus. Le rplicateur catalyse sa propre synthse. Sa population croit alors exponentiellement et des milliards de milliards de copies se diffusent rapidement dans locan primitif. Idalement, un rplicateur doit tre form de deux partenaires tablissant des liaisons faibles entre eux, car ces liaisons doivent se rompre facilement pour permettre le prochain cycle de rplication. Inversement, les petites molcules prcurseurs qui fusionnent pour recrer chaque partenaire doivent avoir la proprit dtablir des liaisons fortes entre elles, afin de former un rplicateur robuste. Parmi les innombrables types de rplicateurs qui sont apparus sur notre plante, une seule grande famille a rsist lpreuve du temps : les acides ribonucliques, dont fait partie notre ADN.

Les diffrences physico-chimiques qui sparent les nombreux types de rplicateurs ont un impact sur leur rsistance, leur capacit attirer leurs prcurseurs et bien dautres paramtres qui au final, modifient leur aptitude se reproduire. Dans chaque environnement, les rplicateurs moins aptes se reproduire se retrouvent submergs par tous les autres. A force de dilutions, ils finissent par disparatre. Cette reproduction diffrentielle, entre rplicateurs bien et moins bien adapts, engendre une amlioration de leur capacit de rplication au fils des gnrations. Comme de nouveaux rplicateurs apparaissent sans cesse cause de limperfection du processus de rplication, lensemble des diffrents rplicateurs est soumis une comptition constante qui slectionne les plus aptes se perptuer. La capacit de reproduction imparfaite de ces molcules les soumet une volution constante. Aveuglement, cette pression slective fait natre une volont de survie qui fait basculer les lois de la chimie dans le monde du vivant. Rapidement, la prolifration incessante des rplicateurs finit par puiser les rserves de prcurseurs ncessaires leur laboration. Ds lors, la lutte pour la survie s'acclre. Par slection naturelle, apparat des rplicateurs capables den digrer dautres et den rcuprer les fragments pour leur propre reproduction. A la premire slection effectue sur la seule rsistance physique, fait suite une deuxime slection sur ce que les rplicateurs sont capables de faire pour survivre. Lorsquelles se sparent, chacune des deux parties du rplicateur sassocient avec des petits prcurseurs. La plupart du temps, ce processus est interrompu avant davoir compltement reproduit un rplicateur complet et seuls des fragments partiels sont synthtiss. Au lieu de subir passivement ce dfaut, le rplicateur va lutiliser son avantage. Chaque rgion du rplicateur, appele gne, donne naissance un fragment du rplicateur possdant une activit particulire. Rapidement, les rplicateurs sont slectionns pour leurs gnes et se mettent ainsi produire un nombre croissant de molcules aux effets divers. Afin daccrotre ses capacits de survie, le rplicateur produit des fragments de lui-mme qui sont capables de se lier des mtaux, et bien dautres types de molcules plus aptes servir ses intrts. Des

molcules trs varies se greffent sur des fragments de rplicateur et donnent lieu de nouvelles possibilits. Cette stratgie va s'avrer tellement efficace, que rapidement les fragments du rplicateur perdront quasiment toute activit et ne serviront que de matrice pour ordonner lassemblage de complexes suprieurs. Quelques centaines de millions dannes aprs lapparition du premier rplicateur, la lutte pour la survie bat son plein. Parmi les nombreuses stratgies qui sont apparues, une nouvelle astuce est sur le point de devenir une vritable rvolution. Par l'intermdiaire des produits de leurs gnes, certains rplicateurs parviennent fabriquer des molcules qui les entourent et les protgent. Cette dernire innovation prsente lextraordinaire avantage de mieux retenir les produits du rplicateur qui se perdaient jadis dans locan. Les rplicateurs envelopps supplantent rapidement les rplicateurs nus. En leur sein, ils synthtisent des myriades de molcules qui favorisent la rplication. Ainsi naquit la premire cellule... Lorsque bien plus tard, les rplicateurs parviennent enfin au sommet de lvolution cellulaire, ils innovent nouveau : les diffrentes copies dun mme rplicateur apprennent collaborer. Les cellules porteuses dun rplicateur identique sassemblent en un organisme pluricellulaire. Selon leur position dans le corps, les rplicateurs se modulent mutuellement pour produire les substances qui donnent chaque zone une spcificit. Tous ns au fond du mme ocan, vgtaux, mollusques et vertbrs peupleront bientt la surface des continents. Nul ne sait jusquo les rplicateurs iront. Guids par leur apptit de survie, ils ont dj invent tant dastuces pour envahir la mer, la terre et le ciel. Par-del la complexit de toutes les innovations ultrieures, force est de reconnatre la premire entit molculaire capable de se rpliquer, le principe rvolutionnaire, qui a engendr tout ce qui est apparu par la suite. Aprs presque quatre milliards dannes de perfectionnement continu, les rplicateurs se sont btis des machines survie ultrasophistiques. Leurs nano-rouages ont atteint le degr de virtuosit qui permet aux organismes que nous sommes dexister. Les tout premiers

tres vivants taient dune simplicit exceptionnelle et ont mis beaucoup de temps apparatre. Puis, progressivement lvolution sest acclre. Les brusques variations climatiques ont slectionn les individus capables de sadapter rapidement. Les cataclysmes incessants ont forc les tres vivants dvelopper des systmes capables damplifier les innovations du hasard. Ainsi, il a fallu attendre presque trois milliard dannes entre lapparition des premires bactries et celle des premiers assemblages cellulaires, alors quen seulement quelques dizaines de millions dannes, les oiseaux se sont mis voler, les insectes sont apparus avec une organisation sociale, et les mammifres se sont diversifis de telle sorte quune varit de rongeur engendre des espces aussi diffrentes que nous, les chevaux et les dauphins. Dans les premires espces, les transformations taient lentes car linaires. La nature devait attendre quune mme ligne dindividus runisse successivement toute une srie dadaptations avant de franchir un nouveau cap. Aspirs par leur volont aveugle de survie, certains tres vivants ont invent le moyen de runir toutes les amliorations existantes en une seule tape. Au lieu de se reproduire lidentique, les individus vont se croiser. A chaque gnration apparatront des descendants diffrents. Certains runiront en eux les combinaisons ncessaires lapparition dune nouvelle catgorie. Les premiers organismes pratiquer ce mode de reproduction fusionnaient, mlangeaient leurs rplicateurs, puis se sparaient. Afin damliorer la productivit et les chances de rencontre, les tres vivants ont dvelopp une nouvelle stratgie consistant scrter de petits morceaux deux-mmes, appels gamtes, qui fusionneront avec ceux dun autre membre de lespce pour former un nouvel individu. Nanmoins, les gamtes sont petits et fragiles, et peu arrivent former un uf. Pour accrotre la rentabilit du systme, certains individus se mirent fabriquer des gamtes plus gros, contenant des rserves nergtiques. Ces super-gamtes tant volumineux, et cotant cher en nourriture, leur production et leur mobilit diminurent. Cette stratgie russit car elle connut lvolution coordonne dautres membres de la mme espce. Ceux-ci fabriqurent des gamtes ultra-mobiles en trs grande quantit. Ce systme a t adopt par tous les tres vivants

depuis les champignons et a fait apparatre deux sous-catgories distinctes dans chaque espce : le mle et la femelle. Aujourd'hui, la plupart des tapes intermdiaires empruntes par lvolution ont disparu. Face la perfection des systmes interconnects, lignorance humaine croit percevoir la marque dun grand horloger. Elle se met croire en un mystre en amont, alors que les solutions se trouvent en aval. Elle se demande qui de l'uf ou de la poule a bien pu apparatre en premier. Comment le mle ou la femelle ont pu tre crs, puisquils ont besoin lun de lautre pour exister ? Pareillement, les hommes ont souvent du mal comprendre que lgosme des rplicateurs ait pu avoir spontanment raison des monstres prhistoriques, agressifs, munis de griffes et de crocs normes et voient dans le triomphe de laltruisme et de lharmonie, le signe dun ordre surnaturel. En vrit, la coexistence pacifique des espces tant beaucoup plus rentable que la destruction prventive et systmatique, dans bien des conditions, la symbiose simpose spontanment car elle est simplement le meilleur systme qui puisse exister. Lharmonie et l'altruisme ne sont pas des ordres surnaturels opposs l'gosme. Laltruisme, cest de l'gosme intelligent. Avec lmergence despces sociales, la nature sadoucit. Les rplicateurs nont absolument pas reni leurs intrts, seulement ils obtiennent de bien meilleurs rsultats par lentraide quavec l'gosme primaire. La volont de survie est le moteur de lvolution. Elle faonne les corps et retentit bien au-del. Elle a vocation rguler linteraction de lanimal avec son environnement. Pour cela, les rplicateurs ont invent le systme nerveux, dans lequel ils gravent leurs directives. Ils disent aux poissons de nager, aux flins de bondir et aux abeilles de danser ! Soucieux de leur survie, les rplicateurs nont pas laiss les tres vivants agir leur guise. Trs tt dans lvolution, ils ont parsem leur enveloppe de rcepteurs, de voies de signalisations et deffecteurs pour doter le corps de rflexes. Lorsque certains vnements extrieurs sont dtects, le signal est transmis jusquaux muscles pour quils se contractent ou se relchent. Par exemple, la sensation dune forte chaleur au bout dune patte provoque sa rtraction. Les rflexes sont un

gain fantastique pour la survie de lanimal. Cependant, de part leur caractre automatique, ces rponses sont loin dtre toujours appropries. Afin damliorer la pertinence des rflexes, de nouvelles structures, plus volues, apparaissent pour moduler les ractions selon les circonstances. Elles sont formes de rseaux de neurones qui centralisent localement les signaux provenant de diffrents sens, comparent les informations, puis transmettent ou non lalerte si un certain seuil a t dpass. Au dpart disperses, ces structures sinterconnectent rapidement et sassemblent en une structure centrale. Chez les invertbrs, le cerveau primitif prend forme et finit par regrouper la majeure partie de lactivit dcisionnelle de lanimal. Les signaux provenant de l'estomac, des organes sexuels, et des diffrents sens affluent dans les aires crbrales. L, selon la manire dont le rplicateur a structur les connexions neuronales, divers instincts voient le jour. Comme le cerveau est directement conu par le rplicateur, il possde la mmoire de lespce. Chaque espce animale a son propre comportement. A lintrieur du cerveau, lagencement des neurones dfinit de fait diffrents instincts et leur importance relative. Dsormais capable deffectuer la synthse de tout ce quil peroit, lanimal fixe des priorits. Par exemple, la dtection de grands mouvements signale un danger potentiel qui rfrne certains instincts peu discrets comme un cri dappel aux femelles. La rgulation des rflexes et des instincts est un immense progrs et va considrablement amliorer la survie. Jusqu ce degr dvolution, lanimal est un automate. Il nprouve pas dmotions, mais ragit seulement selon la manire dont ses gnes lont programm. Ces gnes ont t slectionns dans un environnement donn, toutefois lenvironnement change constamment. Les rplicateurs ne peuvent pas se contenter de leur volution trop lente. Ils auraient besoin quune deuxime volution se produise en acclr dans les tres vivants, pour les adapter leur environnement actuel. Face lurgente ncessit de crer un systme capable dinventer rapidement de nouvelles solutions, les poissons et les reptiles apparaissent avec un second cerveau, adjacent et reli au premier, mais avec un fonctionnement rvolutionnaire. Au lieu de directement

programmer tous les neurones de ce nouveau cerveau, les rplicateurs ont labor un systme ouvert. Aprs avoir bauch certaines structures, ils laissent les connections entre neurones voluer librement, quasiment au hasard, et vont confier au cerveau primitif le rle dordonner ce nouveau cerveau. A chaque instant, les signaux provenant des sens se propagent dans le nouveau cerveau. L, les ensembles de neurones fonctionnent comme des filtres activables. Selon la disposition de leurs connexions, celles-ci forment des cartes qui nmettront elles-mmes que lorsquelles seront stimules par un type bien particulier de signal. Parmi le nombre colossal de cartes existantes, seules un faible nombre est sensible un certain type de signal. Par exemple, lorsque l'il convertit la lumire en impulsion lectrique, les diffrents types doscillations lectriques transmises par le nerf optique correspondent aux lments prsents dans la vision, et ces oscillations activent seulement quelques cartes particulires dans le nouveau cerveau. Certaines cartes sont sensibles au signal correspondant une orientation particulire des objets ou encore une couleur. Tout signal provenant des sens active donc la fois quelques cartes dans le nouveau cerveau, et stimule paralllement des instincts dans lancien cerveau. Le cerveau primitif est incapable de comprendre ce que le nouveau cerveau peroit, mais il peut tester si lextension dun de ses instincts certaines de ces cartes favorise ou non son ordre interne. Le fait mme que certaines cartes sveillent dans le mme contexte quun de ses instincts suggre quelles pourraient tre des capacits de reconnaissance supplmentaire dans cet environnement. Toutefois, comme ces cartes sont apparues par hasard, rien ne garantit quelles soient utiles, ni que leur utilisation ne soit pas carrment nfaste. Le cerveau primitif est l pour mettre de lordre. Le cerveau primitif connecte temporairement un de ses instincts aux cartes du nouveau cerveau qui se sont veilles en mme temps que lui, puis en fonction du rsultat, dcide de conserver ou dabandonner cette connexion. Pour mieux comprendre, prenons lexemple dune carte sensible une odeur ou une forme. Si une proie de notre animal possde cette odeur particulire ou quelle vit prs dune plante

facilement identifiable par sa forme, ces cartes se sont rgulirement actives par le pass lorsque notre animal a consomm cette nourriture. Le cerveau primitif a alors reli ces cartes ses instincts inns qui lui permettent ordinairement de reconnatre la nourriture. Ultrieurement, lorsque notre animal passera de nouveau proximit de cette odeur et/ou de cette plante, ces cartes activeront la valeur nourriture dans le cerveau primitif et orienteront les rflexes pour stimuler la prdation. Si aprs coup, lanimal obtient effectivement de la nourriture, et que sen suit une satit, le cerveau primitif verra son ordre interne confort. Il enverra alors un signal de survie ces cartes et renforcera sa connexion avec elles. Dans le cas contraire, la connexion sera limine. Le cerveau primitif est charg de juger les trouvailles du nouveau cerveau. Avec le temps, la slection continuelle quil opre sur ses connexions conduit au renforcement des structures quil valide et la disparition de toutes les autres. En consolidant prfrentiellement ses connexions avec les cartes qui saccordent avec ses valeurs, le cerveau primitif tend ses aptitudes de reconnaissance selon le vcu de lanimal. Dsormais, certaines couleurs, certaines formes, certains sons de l'environnement sont associs des valeurs comme la nourriture, le danger, la chaleur. Une mmoire inconsciente du vcu se forge. Les changes corrls de ces cartes interconnectes donnent ensuite naissance des capacits de reconnaissance suprieures. En associant les circuits neuronaux sensibles certaines formes et certaines couleurs, apparat le moyen de reconnatre des objets particuliers. Par la slection de ses propres cartes neuronales, lanimal apprend reconnatre des objets inconnus et dcouvre des solutions indites. A force dessayer, il ajuste sa perception et parfait ses ractions. Grce ce systme, le nouveau cerveau est mme de trouver des rponses des problmes pour lesquels il na pas t initialement programm : ce cerveau est intelligent. De mme que la nature puise son ingniosit dans la slection des rplicateurs, le cerveau forge son intelligence par slection de ses cartes neuronales. Le rplicateur laisse le hasard des connexions entre neurones travailler pour lui et se contente de btir un systme qui prlve ce qui saccorde avec ses valeurs. Il sconomise ainsi un gigantesque travail de programmation et offre son enveloppe

le bonus de sadapter son environnement. En effet, bien que ce soit les directives internes au cerveau primitif qui dcident de conserver ou non les nouvelles cartes, cest lenvironnement qui fournit linformation pour tester et valider ou non ces rseaux. Grce leur second cerveau, les vertbrs acquirent la capacit didentifier des lments inconnus et dinventer des ractions intelligentes. Ainsi va la vie. Lextraordinaire intelligence du grand horloger se manifeste rellement partout, elle retentit jusque dans le comportement animal, sans jamais navoir t autre chose que la logique universelle exprime par linstinct de survie du rplicateur. Lvolution par slection naturelle est probablement lexemple le plus flagrant de la spontanit des lois de la nature. A travers la volont de survie des tres vivants, la nature ne fait quaccomplir la logique implacable de lunivers. Devant la stupfaction et lincomprhension des tres humains, porte par ses principes spontans, la nature poursuit inlassablement sa cration avec panache et intelligence.

LEspritTout au long de la vie de lanimal, le cerveau sadapte lenvironnement. Malgr cette prsence manifeste dintelligence, lanimal na pas conscience de tout ce qui se produit en lui. Son cerveau fonctionne en aveugle. Il ne ragit que selon des instructions innes ou slectionnes. Comme un automate, il traite les informations sans les comprendre. Tardivement dans lvolution, le cerveau des vertbrs suprieurs acquiert laptitude de stocker les lments vcus sous forme de souvenirs qui pourront ensuite venir complter les instincts du cerveau primitif en fonction de lexprience vcue. Le cerveau copie, trie, classe et hirarchise linformation contenue dans les cartes actives par la perception, et tablit de nouvelles cartes formant une mmoire. Contrairement la perception rudimentaire des ordinateurs numriques qui ne voient que des 0 et des 1 puis se rattrapent aveuglment par la force brute du calcul, les super-cartes mmorielles sont des arrangements qui par analogie structurale confrent la capacit de reconnatre directement le sens suprieur de choses complexes sans calcul. Les super-cartes de la mmoire sont forges par un long processus de slection interne qui transforme des territoires crbraux vierges en multiples rseaux de neurones stockant les souvenirs. Le lent travail de mmorisation dessine des cartes sensibles des notions de plus en plus complexes. Avec la sophistication de ces cartes, une vritable mmoire conceptuelle voit le jour. A la diffrence des programmes des automates, dont la signification est contenue et cache dans lagencement de leurs circuits, avec les super-cartes, lanimal acquiert une sensibilit au sens des choses. Ses valeurs et ses instincts ne sont plus seulement prsents dans son corps, du fait de circuits automatiques qui les dfinissent, mais lide mme de ses instincts est dsormais galement reprsente par un second niveau dans les cartes mmorielles. Ces super-cartes font passer du signifiant au signifi. Chaque chose vcue, et chaque notion inne (peur, faim, froid) est

dsormais reproduite dans la mmoire par une carte reconnaissant ces notions pour ce quelles sont. Le cerveau nest plus seulement un programme qui obit aveuglment des instructions intgres. Il est dsormais capable didentifier ses propres notions. Imaginez-vous tre cet animal. Que voyez-vous ? Quelque chose ? Un tel animal nest effectivement plus compltement aveugle. Dans le noir absolu qui rgnait dans son cerveau, sa mmoire conceptuelle fait natre une petite lumire qui claire dsormais par intermittence le sens des choses. Des flashs lui apparaissent. Ils montrent des images partielles avec une signification et une valeur motionnelle. Grce leur mmoire conceptuelle, les mammifres ressentent intrieurement leurs valeurs innes et acquises sous forme dmotions qui guident leurs instincts. Ils se souviennent dlments dj rencontrs, et leur associent une valeur affective. Rapidement ces animaux arrivent interconnecter en temps rel les cartes actives par leur perception avec leur mmoire conceptuelle. A chaque instant, leur cerveau identifie les lments perus dans lenvironnement et peut presque immdiatement les rattacher un concept. Grce la corrlation dynamique tablie entre les cartes de la perception et celles de la mmoire conceptuelle, les lments identifis par la vision, l'oue et les autres sens sassemblent en une scne cohrente et significative. En se remmorant tout instant presque immdiatement le prsent, lanimal voit une scne, qui nest en fait quun ensemble de corrlations dans son cerveau. En rattachant les lments de sa perception aux concepts dans sa mmoire, lanimal prend conscience du prsent qui dfile devant lui. Plus tard, lorsquil ira se reposer, et que ses sens seront mis en veille, le processus de la conscience pourra parfois fonctionner en sens inverse. Pendant le sommeil, ce ne sont plus les cartes perceptives qui stimulent la mmoire, mais cest la mmoire qui rtroactive ces cartes. Lanimal se met percevoir les images, les sons, et les odeurs imaginaires qui ornent ses rves. Il y a trois millions dannes, un groupe de primates dveloppe de nouvelles capacits de manipulation des concepts mmoriss. Ces

pr-humains sont capables dtablir des concepts de concepts et dassocier leurs ides en un nombre important de combinaisons. Vu de lextrieur, le langage de ces animaux, qui ne produisait auparavant quun seul mot la fois, est dsormais capable de composer des phrases significatives. Lexplosion conceptuelle qui en dcoule confre ces pr-humains une capacit danalyse sans prcdents. Ces nouvelles fonctions dcuplent la comprhension quils peuvent se faire du monde. A chaque instant, des vnements extrieurs veillent des souvenirs qui se combinent ensuite pour former des multi-concepts. La rflexion prend alors une toute autre ampleur. Devant une situation, au lieu de simplement ragir selon un instinct plus ou moins modul par sa mmoire puis doublier, ce nouvel animal utilise ses souvenirs pour penser. Les concepts veills par les sens sassocient et en veillent dautres qui, leur tour, s'engouffrent dans cette cascade qui revient sur elle-mme et senrichit chaque nouveau cycle. La mmoire dtrne la perception de son exclusivit pouvoir dclencher des analyses. Dsormais, des penses sinitient continuellement partir des souvenirs et ne sont plus seulement une rponse brve un stimulus sensoriel. Cette instance de dlibration intrieure libre de linstant prsent. En associant ses souvenirs avec des concepts temporels, la pense anticipe et imagine. Elle dcouvre tant de choses qui nveillaient pas lattention des instincts gntiquement programms. La conscience largit son champ de connaissance. Les instincts nont plus un contrle total. La curiosit lemporte sur les peurs primaires et lanimal sapproche du feu. Dtach danciennes contraintes, son champ dintrt stend. Tous les lments qui composent son monde sont examins un un, et ce qui devait arriver se produit enfin. Par recoupements, lanimal finit par se trouver lui-mme. Lorsquil prend conscience de soi, il ressent sa propre existence pour la toute premire fois : une personne est ne. La personne nouveau-ne est traverse par le sentiment dtre elle-mme, dtre quelquun, dexister. Elle se pose sa premire question : qui suis-je ? Son propre souvenir provoque un sentiment intrieur. Elle investit son soi mmoris. Cette boucle est son

sanctuaire. Dans cette bulle, elle est seule avec elle-mme. Seule, devant le fait quelle est elle. Un sentiment de soi vient dapparatre. En s'associant la pense multi-conceptuelle, il ferra vivre un esprit. Lindividu tait une notion intgre depuis bien longtemps par les concepts relationnels ; cependant, avant la conscience dtre conscient, le concept de soi tait rest ltat rudimentaire. Il navait pas fait lobjet dun souvenir approfondi. Il ny avait pas proprement parler dimage tendue du soi. A partir du moment o le sentiment de soi apparat, il provoque un choc si profond que lindividu en porte depuis constamment le souvenir. Les impressions rsultant du sentiment mme de soi deviennent le socle de son unicit. Bien que des introspections ultrieures se produiront au cours de sa vie, elles nauront que peu deffets sur limage dj tablie. Lessentiel se joue lors de la formation de ce sentiment. Le contrecoup mmoriel de cette rvolution dcide de notre nature. Enfoui au fond de ses souvenirs, chacun porte le secret de lui-mme. Tant que l'agencement matriel qui a produit cette structure restera intacte, lessence dun tre unique perdurera. Le sentiment de soi est propre chaque individu. Il merge comme le produit de l'organisation suprieure de la conscience, soutenu par des milliards de neurones dsorganiss qui se sont agencs pour former cette structure unique. Au dpart isol et peu dvelopp, le sentiment de soi ne transforme pas immdiatement le prsent animal en une conscience de linstant prsent vcu comme une appropriation du rel. Parce quil est issu du royaume animal, ltre humain commence dabord par tre passivement conscient du monde externe, et vit telle la feuille dans le vent, au gr des rencontres... et comme la feuille, il nest pas source de ce quil vit. La signification de ce quune conscience animale ressent provient de lextrieur. Elle ne fait que subir des affects subjectivement sans porter en elle de vritables raisons intimes. Dpourvu de volont propre, lhomme primaire est galement un pantin conscient. Les forces qui le conduisent restent extrieures lui-mme. Parfois, il se demandera quel peut bien tre le sens de tout cela, sans trouver de rponse. Y a-t-il un but ? Au fond, pourquoi certains vnements le rendrait-il heureux ? Pourquoi aurait-il envie

daccomplir certaines choses et den combattre dautres ? Depuis quand cette vie lui appartient-elle ? Bien que sensible son environnement, lhomme voit que la signification de ce quil vit ne lui appartient pas. La conscience qui se retourne sur elle-mme ralise alors labsurdit de son existence. Elle est un objet du monde extrieur. Incapable encore dutiliser le pouvoir qui est apparu en son sein, elle demeure libre au gr du vent, sans vritablement exister. Assailli par lordre absurde du monde qui lentoure, il arrive que lesprit conscient de soi parvienne retourner en lui-mme. L, il se remmore lmotion dcouverte ce jour denfance, lorsque pour la premire fois, il a pris conscience de la valeur de la vie. Au dpart, ptrifi par le choc issu du moment o il a pleinement ralis la port de linstant prsent, progressivement lesprit shabitue son sentiment de soi. Si il est dispos la sagesse, il aimera se laisser pntrer par la joie ne de la contemplation de sa propre existence, car ressentir son tre rvle soi-mme le prix de cette chance qui jamais ne sera gale. Dsormais, pendant la conscience du prsent, ce ressenti intrieur va se mler en permanence aux motions, choix et sentiments actuellement en formation. Le fond de la conscience sapproprie les donnes primaires des sens et les fait mrir, jusqu parfois devenir la cause principale du rsultat final. Le sentiment de soi devient la source de dsirs qui dessinent une vritable Causalit interne lindividu. Il fait apparatre une Raison ou Causalit intime qui sappartient totalement. De son ressenti intrieur, lesprit de lenfant engendre sa volont, ses idaux et ses rves. Malgr lapparente continuit de lmergence de dsirs conscients avec lvolution de la nature, quelque chose de compltement rvolutionnaire vient de se produire dans lhistoire logique de lunivers. Quelque chose est ne avec lesprit quelque chose qui nest pas seulement une simple cause noye dans lenchanement infini des causes. Une nouvelle Raison est apparue lintrieur de la grande Raison. Le principe du cosmos vient de se reconstituer en miniature dans le cerveau humain. Tel le principe de Raison, do a jadis dcoul locan infini des possibilits, le sentiment

de soi gnre un microcosme do jaillissent dinnombrables dsirs intimes. Au dbut, le microcosme peine se connatre lui-mme. Comme lhomme qui cherchait la cause de lunivers et qui ne pouvait ni la trouver, ni la comprendre, car Dieu nest pas la cause premire mais le principe de Causalit, de mme lesprit ne peut se comprendre travers une raison circonstancielle, sans quoi dailleurs tout perdrait son sens et il se condamnerait un statut desclave, mais il ne se trouve luimme quen se vouant entirement son pur sentiment dexister. Le cosmos na pas une cause, il est lmanation du principe de Causalit. Le Dsir de lesprit conscient de lui-mme na pas une cause particulire ; il est la manifestation dun sentiment existentiel. Lesprit qui se contemple soi-mme ressent sa ncessit intrieure et dcouvre son tre au plus profond de lui-mme. Dans son coeur, le microcosme affirme sa puissance dtre. Ds lors, il ne se sent plus cras, mme par la vision de la ncessit extrieure, mais il se sent libre, guid par les dsirs qui manent de son me matrielle. Bien quentirement compos datomes, lesprit est libre, non parce quil violerait les lois de la physique, mais parce que ses dsirs intimes proviennent de la seule ncessit de sa nature, de la mme faon que les proprits du triangle proviennent de la seule nature du triangle et ne se trouvent pas dans les points et les segments qui le composent. Lanalogie avec les mathmatiques est pertinente. En effet, le sentiment de soi est form par un ensemble de cartes neuronales, qui sapparentent en quelque sorte un assemblage de figures gomtriques complexes. A lintrieur de cette hyperstructure, ce sentiment nest pas isol mais il est associ aux conditions de possibilits quoffre le corps, dans cette vie, dans ce monde, et il affecte donc les autres lments prsents dans la conscience. Ainsi, dans lme matrielle, les dsirs intimes de lindividu dcoulent des divers tats de conscience, un peu comme des proprits mathmatiques dcoulent de figures gomtriques nouvellement recomposes. Pendant la conscience du prsent, les cartes du sentiment de soi sassocient aux cartes adjacentes, psent sur les motions en formation, jusqu parfois en devenir la cause principale, lorsquelles parviennent sapproprier certains dsirs

et les transformer en raisons intimes. A chaque instant, les particularits du sentiment de soi sont plus ou moins mles la volont, choix, et actes du corps. Par consquent, lindividu est libre lorsquil agit en vertu des dterminations qui proviennent de lensemble des atomes qui dfinissent son essence unique dans son cerveau, contre toutes les forces qui sy opposent dans son corps, dans le reste de sa psychologie et dans l'ordre du monde. Sa libert, cest sa capacit individuelle faire triompher ses causes intrieures contre lordre des causes extrieures. Lme matrielle permet lexercice dune telle libert car elle ne fonctionne pas selon un dterminisme linaire. Sous linfluence du sentiment de soi, elle initie des dlibrations intrieures qui suspendent les jugements et lui permettent dattendre que le flot des connections alatoires entre neurones tombe par hasard sur une solution qui saccorde avec elle. Les ides, actes et sentiments que nous exprimons ne sont pas toujours des constructions mentales volues issues dinfluences du monde extrieur, mais peuvent provenir de notre total tre intrieur. Ainsi apparat une Causalit libre, dordre suprieur, irrductible lindividu, et vivant dans sa conscience dtre conscient. Par consquent, si la succession des causes matrielles peut ventuellement tre remonte linfini, il nen est pas de mme pour la Causalit psychologique qui merge localement avec lme matrielle. Lesprit est lorigine dfinitive de ses dsirs intimes. Il est un microcosme. Il forme une Causalit dordre suprieur lintrieur de la Causalit universelle. Anim par son sentiment de soi, lesprit peut donc rsister aux contraintes extrieures et fait vivre sa ncessit intrieure. La plus ou moins grande disposition de chacun tre libre, cest--dire exister vritablement, dpend de sa capacit simposer lui-mme. En son coeur, force defforts, lesprit forge les sentiments, les idaux et initie les actes qui dcoulent de sa Raison intime. En rsum, lesprit merge dabord dans sa bulle consciente et formule ses tout premiers dsirs intimes. L, le coeur de la personne nouveau-ne juge avec subjectivit, inspire son originalit et gnre son imprvisibilit. Immdiatement, les forces extrieures tentent de

lcraser. Chaque esprit dbarque tout droit du monde animal. Il merge dans un flot dmotions qui ne lui appartiennent pas. Il arrive nu dans un corps dirig par un rplicateur. La personne recherchera toute sa vie retrouver ce moment o elle est ne. Avec des efforts, elle pourra retourner dans son sanctuaire et y puiser sa libert. De l, viendra sa capacit dexister par elle-mme et de rsister aux forces extrieures. Ses instincts et les conventions sociales essaieront de la contrler, mais elle trouvera, dans le sentiment dtre elle-mme, les ressources pour faire merger sa propre volont. Le sentiment de soi se manifeste plus ou moins selon ses diffrents dsirs. Lorsque ce sentiment est suffisamment fort et dvelopp, lesprit forme alors des dsirs intimes dans lesquels le soi est tellement prsent, quil se reconnat en eux, les contemple et veut vivre avec et pour eux. Aprs des annes de mditation, lesprit qui se connat lui-mme affirme de tels dsirs, et tend vers sa joie avec la comprhension que ce qui a de la valeur, ce ne sont pas les affects subis, mais cette Causalit intime qui fonde ses sentiments et les fait vivre en son coeur. Aucune passion isole na en soi les moyens de rvler lhomme le fond de son secret. Seule sa Raison intime donne un sens ses actes, une valeur ses sentiments, une signification aux choses quil aime. La conscience rationnelle qui sommeille en chacun de nous est la seule chose qui puisse donner sa valeur nos vies. Sans amour de soi, lhomme sombre dans le nant existentiel. Ce nest que grce la contemplation de lui-mme, que ses idaux, sa volont, ses sentiments mergent dans la logique de ce quil est, dans le rve de ce quil veut tre. Alors seulement, lhomme peut se retourner sur luimme et ressentir le sens de son existence. Rationnel en sa pense et dans sa comprhension de lunivers, rationnel en son cur et dans ses sentiments les plus profonds, lesprit sest lanc vers le degr ultime de ltre. La Raison est lessence suprme. Elle fonde le rel, le vrai, nos connaissances, nos idaux, le sens de nos vies. A celui qui sait lencenser, elle donne en retour la capacit daimer vritablement. Au sage qui accde au fond du secret, elle insuffle un merveillement infini, l o sa contemplation

sternalise et son coeur se soulve lorsquil ralise quil est tomb amoureux de la Raison elle-mme. La Raison est le principe ultime : cest Dieu autour de nous, et la lumire divine qui sest veille en chacun de nous.

Nous voil parvenus au bout de ce premier chemin. J'espre que ce petit historique vous a plu, et qu'il vous a convaincu de la nature profonde de la ralit. Maintenant que nous savons que Dieu est le principe de Raison, nous allons pouvoir nouveau regarder autour de nous. Il est temps d'ouvrir les yeux et de comprendre notre rel rapport avec Dieu. Nous sommes enfin parvenus au paradoxe qui a initi l'criture de cet essai.

LHomme LibrAu cours de son volution, la nature fait apparatre de nouvelles valeurs dans les choses finies. Ces valeurs nont pas de sens dans la logique originelle. Elles nexistent que pour elles-mmes, indpendamment du niveau fondamental qui les a engendres. Ainsi, les lois physiques ont produit la volont de survie des tres vivants, qui a ensuite aveuglement cr la Raison intime de lesprit libr. Les lois physico-mathmatiques nont aucune raison dtre en accord avec les nouvelles valeurs apparues dans ces niveaux suprieurs. La mtorite qui vient du fond de lespace pour sabattre sur notre plante, et y dtruire la vie, obit aussi bien au principe de Raison que le faisaient les tres conscients qui peuplaient sa surface. Dieu est aveugle. Il ne peroit pas les valeurs singulires apparues dans les choses finies. Il est donc naturel que ses lois nous ignorent. Ce fait a des consquences profondes. Dieu ne reconnaissant pas la valeur de la vie humaine, ce sont des parties entires de ce monde qui se trouvent aujourdhui en dsaccord avec le sens de notre existence. Lhomme ne peut compter sur lordre de la nature. La libration dont a joui lesprit a clairement son revers. Les lois naturelles ne nous reconnaissent pas. Elles sont donc incapables de garantir nos valeurs. Aveugle au rel prix de notre existence, Dieu na pas tabli ses lois pour tenir compte de notre unicit. Voil comment nos dsirs et la condition offerte par ce monde sont devenus incompatibles. Jadis, la transformation qua constitu lapparition dindividus conscients de leur existence aurait d bouleverser lordre des lois de la nature. En effet, les principes de la vie nattribuent que trs peu de valeur lindividu. Seule la survie du rplicateur travers sa population a de limportance. Avec lmergence desprits, les lois de la vie sont devenues compltement obsoltes. Chaque esprit est unique. Il contient en lui son identit qui le rend irremplaable. Il vit son exprience et conduit sa propre destine. Si lessence de chaque esprit avait t

reconnue par Dieu, alors lhomme ne serait jamais libre. Prisonnier, o quil aille, son existence serait parfaite. Son sort resterait toujours juste. Mais lhomme porte en lui une essence libre de lordre du cosmos. Les rves et dsirs de lhomme libr sont la manifestation de la nouvelle Raison apparue lintrieur de la grande Raison quest lunivers. Lesprit conscient de lui-mme est une divinit enferme dans le cosmos, condamne vivre une existence limite, comme une simple chose. Voil le coeur de l'enfant qui prend conscience pour la premire fois. Voil le fond de notre secret, que nous avons presque tous oubli. Nous nous protgeons contre la triste vrit. Bien quen nous-mme le microcosme formule des dsirs intimes, librs de lordre qui lentoure, il voit la ralisation effective de ces dsirs restreinte et broye par lordre aveugle du macrocosme. Face cette condition, le microcosme peut voluer selon deux grandes directions opposes. Soit, en son coeur, sa joie intrieure terrasse la tristesse, domine linjustice et llve en homme-dieu simposant au monde, voulant vivre, goter, raliser toutes les belles choses inspires par sa subjectivit, et malgr tout agir selon les dsirs ns de sa nature intime ; soit sa tristesse lemporte, ses idaux priclitent, et lesprit demeure impuissant face un ordre dont il va chercher fuir la ralit. Tous nos dsirs, choix et sentiments profonds ont leur origine dans ses deux orientations fondamentales et ennemies : la Raison glorieuse qui exalte les dsirs de lhomme libr de lordre du cosmos, et cette mme Raison vaincue qui se cache dans lignorance, et dgnre dans lhumilit, le fatalisme ou larrogance compensatrice. Soit la Causalit intime est assez forte pour perdurer en elle-mme, et lindividu saura rsister aux causes extrieures qui tenteront de lasservir. Il mnera alors une existence libre de lordre du cosmos. Soit la Raison intime sautodtruit face son sort injuste. Vid de sa substance, ltre perd alors toute vritable raison intrieure dexister. Il nest plus quagit par les causes qui lentourent et sombre dans lesclavage du monde extrieur. Mme si il ny a que ces deux grandes orientations possibles, gnralement la disposition du microcosme est complexe et nuance.

Hormis quelques individus extrmes, le plus souvent, ces deux forces ennemies cohabitent divers degrs dans le mme individu, et sexpriment plus ou moins intensment selon les circonstances. Pour simplifier et clarifier mon analyse, je vais toutefois uniquement penser avec les deux cas extrmes, en commenant par dcrire le microcosme impuissant. Cette exploration de lme humaine va me permettre de reposer notre problme existentiel dune manire qui ferra entrevoir la solution, et donnera le point de dpart ma doctrine philosophique. La premire ncessit de lme vaincue est doublier la vrit et de trahir sa pense rationnelle pour contenir sa tristesse. La cause profonde de ses actions, de ses paroles, et de ses sentiments est sa rsi


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