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Le Carnet du Forum des Cooperatives - Step Entreprendre€¦ · mier Forum des Coopératives en...

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ÉCONOMIE SOCIALE, COOPÉRATIVE ET SOLIDAIRE 16 novembre 2017 Charleroi Bois du Cazier Comptes rendus des workshops LE RENDEZ-VOUS DE L’ENTREPRENEURIAT COOPERATIF Le Carnet du Forum des Cooperatives
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Page 1: Le Carnet du Forum des Cooperatives - Step Entreprendre€¦ · mier Forum des Coopératives en 2016, en collaboration avec la SOWECSOM. Lors de cette première édition, celle-ci

ÉCONOMIESOCIALE,COOPÉRATIVEET SOLIDAIRE

16 novembre2017

CharleroiBois du CazierComptes rendus des workshops

L E R E N D E Z - V O U S D E L ’ E N T R E P R E N E U R I A T C O O P E R A T I F

Le Carnet du Forum des Cooperatives

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TABLE DES MATIÈRES

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AVANT-PROPOS 5COMMENT CE FORUM A-T-IL ÉTÉ CONSTRUIT ? 7

L’ÉCONOMIE SOCIALE ET COOPÉRATIVE, DE QUOI PARLE-T-ON ? 8

WORKSHOP 1 10COMMENT FAVORISER L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF CHEZ LES JEUNES ?

WORKSHOP 2 14Y A-T-IL MATCH ENTRE L‘ÉCONOMIE COLLABORATIVE ET LE MODÈLE COOPÉRATIF ?

WORKSHOP 3 18POURQUOI ET COMMENT MOBILISER L’ÉPARGNE CITOYENNE ?

WORKSHOP 4 22CRÉATEURS, INTERMITTENTS, TRAVAILLEURS AUTONOMES… LA COOPÉRATIVE DE TRAVAILLEURS ASSOCIÉS EST-ELLE LA SOLUTION ?

WORKSHOP 5 26CIRCUITS COURTS : LE MODÈLE COOPÉRATIF EST-IL UNE OPPORTUNITÉPOUR RAPPROCHER PRODUCTEURS ET CONSOMMATEURS ?

REMERCIEMENTS 30

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AVANT-PROPOS L’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation (AEI) anime un réseau d’opérateurs soutenant la création, le déve-loppement et la transmission des entreprises, ainsi que l’innovation. Elle favorise également le développement d’une culture entrepreneuriale et la diffusion des nouveaux modèles économiques.

Fin 2015, le Gouvernement wallon confiait à l’AEI la mission de sensibiliser et de promouvoir les entreprises sociales et coopératives en s’appuyant sur les Agences-conseil en économie sociale et les autres acteurs spé-cialisés.

Economie sociale et coopérative, entrepreneuriat social, innovation sociale… Toutes ces caractéristiques re-couvrent des réalités économiques pour entreprendre autrement :

Entreprendre de manière collectiveViser une finalité de services à la communautéPartager des aspirations aux enjeux sociétaux et environnementauxProposer une autre répartition des richessesAdopter une gouvernance participative

Le modèle coopératif s’est fortement développé en Wallonie, en réponse à certaines impasses économiques et environnementales.

Pour comprendre, découvrir et partager la connaissance de l’économie coopérative, l’AEI organisait son pre-mier Forum des Coopératives en 2016, en collaboration avec la SOWECSOM. Lors de cette première édition, celle-ci fêtait ses 20 ans de financement de ce secteur. Près de 300 participants s’étaient donné rendez-vous pour entendre des témoignages et assister à la conférence de Cyril DION, producteur et coréalisateur du film « Demain ». Ce long métrage a initié un véritable mouvement citoyen.

Le succès de cette manifestation a conduit l’AEI à éditer une seconde édition du Forum le 16 novembre 2017. Avec les Agences-conseil, l’AEI a souhaité susciter une plus forte contribution des participants en organisant cinq workshops participatifs afin d’échanger et de bâtir les modèles de demain.

L’économie coopérative a été discutée, challengée et coconstruite avec des coopérateurs, des porteurs de projet, des étudiants, des experts et des financeurs autour de cinq enjeux :

L’entrepreneuriat coopératif chez les jeunesL’économie collaborativeLe financement coopératifLes coopératives de travailleursLes circuits courtsCYRIL DION – FORUM DES COOPÉRATIVES 2016

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Près de trente contributeurs ont préparé cette rencontre en coopération avec l’AEI et les Agences-conseil. Des propositions concrètes pour soutenir, favoriser et pérenniser le modèle coopératif ont été déployées par 300 participants. Elles vous sont résumées dans ce cahier. Gageons qu’elles inspireront chacun là où il peut agir.

Ces workshops se sont clôturés par une conférence exceptionnelle de l’économiste de renommée internationale, Daniel COHEN. Celui-ci nous a apporté une autre vision de la croissance : « L’Homme veut être plus riche, et ça n’est jamais assez. La même frustration se répète, le progrès matériel n’est jamais suffisant. »

Au nom de l’AEI, je remercie l’ensemble des partenaires et des partici-pants qui ont œuvré à ce travail collectif et participatif.

Véronique CABIAUX,Directrice de l’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation

COMMENT CE FORUM A-T-IL ÉTÉ CONSTRUIT ? L’ensemble du Forum des Coopératives, et plus particulièrement les cinq workshops, ont été préparés avec nos partenaires selon un processus participatif. Le choix des cinq thématiques s’est ainsi fait en concertation. Pour chacune d’elles, un partenaire s’est engagé à en coordonner l’organisation.

La méthodologie d’animation, les points de débats et le choix des témoins/intervenants ont été coconstruits avec ce groupe de contributeurs.

Lors des workshops, après avoir introduit la thématique, chaque animateur a donné un court temps de parole à cinq ou six intervenants pour qu’ils apportent leur témoignage, soit en tant que coopérateur, soit en tant qu’ex-pert sur le sujet. Ensuite, les participants (entre 40 et 60 personnes par workshop) ont été amenés à échanger et à travailler sur trois aspects : les enjeux, la réponse coopérative et quelques propositions à formuler aux ac-teurs de l’économie coopérative ainsi qu’aux représentants publics/politiques.

C’est le fruit de cette démarche participative qui est résumé dans ce Carnet.© VICTORIEN LORIERS

© VICTORIEN LORIERS

DANIEL COHEN© VICTORIEN LORIERS

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QUELQUES CHIFFRES…

25.405 : sociétés coopératives actives en Belgique au 31 décembre 2015.

Près d’un millier de coopératives ont opté pour un modèle coopératif respec-tant les valeurs de l’Alliance Coopérative Internationale : 513 coopératives sont agréées par le Conseil National de Coopération (CNC) et 464 coopératives, non agréées au CNC, sont qualifiées à finalité sociale.

L’emploi au sein de ces coopératives agréées et/ou à FS s’élève à plus de 21.000 postes de travail. Source : Dufays F.& Mertens S. (2017), Belgian Cooperative Monitor, Leuven, Bruxelles : Cera-Febecoop

WALLONIE PIONNIÈRE

Le développement de l’économie sociale, coopérative et solidaire fait partie intégrante de la politique écono-mique menée en Wallonie depuis plusieurs années.

Plusieurs objectifs ont été fixés :

Prendre en compte l’entrepreneuriat sous toutes ses formesContribuer à la relocalisation de l’économieMobiliser des ressources nouvelles, dont l’épargne citoyenne

La Wallonie a d’ailleurs été la première région d’Europe à adopter, en 2008, un décret relatif à l’économie sociale. Celui-ci offre un cadre administratif solide et est un véritable levier pour les entrepreneurs sociaux, notamment grâce au renforcement des moyens de la SOWECSOM.

29%

Flandre

38%

Wallonie

33%

Région deBruxelles-Capitale

8 9

L’ÉCONOMIE SOCIALE ET COOPÉRATIVE, DE QUOI PARLE-T-ON ?De plus en plus d’entrepreneurs veulent entreprendre ensemble et autrement. Ils souhaitent mettre l’humain et le développement durable au cœur de leur activité. Ils visent aussi à mettre en œuvre un mode de gestion alternatif, basé sur la coopération, la gouvernance démocratique et participative, et l’affectation des bénéfices à d’autres objectifs que la rémunération du capital.

C’est ainsi que l’on observe, depuis quelques années, l’émergence de nouveaux modèles économiques qui expérimentent des pratiques en rupture avec le modèle de l’entreprise capitaliste. Coopératives citoyennes, coopératives de travailleurs, coopératives d’artistes, structures mixtes privées/publiques… Ces initiatives réin-ventent totalement nos modes de consommation, mais aussi les rapports entre consommateurs et produc-teurs, ou encore entre travailleurs et employeurs.

L’ENTREPRISE COOPÉRATIVE : D’AUTRES LOGIQUES

Rappelons que les entreprises coopératives sont des sociétés commerciales (presque) comme les autres. Elles contribuent au développement d’activités économiques productrices de biens et services, et sont soumises aux règles du marché.

Cependant, trois principes les distinguent des entreprises classiques :

1. Affectation des bénéfices à d’autres fins que la rémunération du capital : l’objectif d’une coopérative n’est pas la rémunération du capital. Les bénéfices sont principalement réinvestis dans l’entreprise et dans la poursuite de ses finalités.

2. Gouvernance démocratique et participative : l’entreprise coopérative implique dans les organes de gou-vernance, et fait participer aux décisions, l’ensemble des parties prenantes (non seulement les action-naires, mais aussi les travailleurs, parfois les clients, les fournisseurs…). Ce principe peut aller jusqu’à « un homme = une voix ».

3. Finalité de service à la collectivité : les entreprises coopératives ont pour objectifs de mieux prendre en compte les intérêts de leur communauté et d’y contribuer de manière positive.

UN CADRE FÉDÉRAL POUR PROMOUVOIR LE MODÈLE COOPÉRATIF

En Belgique, les sociétés coopératives qui fonctionnent conformément aux valeurs et principes coopératifs peuvent obtenir un agrément auprès du Conseil national de la Coopération (CNC).

Cet agrément implique pour les associés : la libre admission, un dividende limité à 6%, un droit de vote égal aux assemblées générales…

LA COOPÉRATIVE SELON L’ALLIANCE COOPÉRATIVE INTERNATIONALE (ACI) L’ACI définit la coopérative comme « une association autonome de personnes

volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective

et où le pouvoir est exercé démocratiquement. »

Selon l’ACI, les coopératives se fondent sur un socle commun de valeurs :entraide – auto-responsabilité – démocratie – égalité – équité - solidarité

RÉPARTITION DES SOCIÉTÉS COOPÉRATIVESSELON LEUR SIÈGE SOCIAL

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Depuis plusieurs années, les jeunes se montrent de plus en plus ouverts à l’entrepreneuriat. Parallèlement, suite à certaines dérives du modèle économique classique, incapable de répondre à une série de défis de notre pla-nète, ils aspirent à entreprendre autrement.

Face à ce double constat, l’entrepreneuriat social et coopératif apparaît comme une réponse aux enjeux socié-taux actuels. Mais avant de passer à l’action, les jeunes rencontrent une série de freins, dont les préjugés vis-à-vis de l’acte d’entreprendre de manière générale, et de la notion d’entreprise sociale plus spécifiquement, ou encore le fait qu’ils ont peu (ou pas du tout) été confrontés au modèle coopératif.

L’enseignement a certainement un rôle à jouer dans le développement de cet entrepreneuriat plus responsable. Les initiatives visant à inspirer et stimuler l’entrepreneuriat social et coopératif en témoignent.

COMMENT FAVORISER L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF CHEZ LES JEUNES ?

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workshop 1

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QUATRE INITIATIVES POUR INSPIRER LES JEUNES À L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF

KU Leuven | Depuis 2011, KU Leuven propose aux ingénieurs diplômés un Post-Master en Entrepreneuriat innovant. Dans le cadre du stage/projet à réaliser, une coopérative à finalité sociale a été créée, soutenue entre autres par plusieurs acteurs de l’économie sociale et solidaire. Cette coopérative fonctionne de façon auto-nome et permet aux étudiants de mettre en pratique les principes coopératifs.

Déclic en PerspectivES | La création de Déclic en PerspectivES est partie de divers constats : les jeunes ont envie de plus de sens, voire de lancer un projet à finalité positive. Mais très souvent, ils ne savent pas par où commencer. Au travers de différents programmes de formation et de sensibilisation, comme la « Tournée des Possibles », cette ASBL s’est donné pour mission d’aider ceux-ci à passer à l’action vers l’entrepreneuriat social.

VentureLab | Le VentureLab est un éco-système de soutien à l’entrepreneuriat à destination de tous les étudiants et des jeunes diplômés des institutions de l’Ensei-gnement supérieur du pôle académique Liège-Luxembourg. Il a développé le pôle BeeLab destiné à accompagner « les acteurs de changement ». Un des objectifs est d’éveiller l’entrepreneur et le porteur de projet à l’impact qu’ils peuvent avoir sur la société et son environnement.

AEI | Via le programme Générations Entreprenantes (#Génération-E), l’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation mène depuis plusieurs années différentes actions pour éveiller l’esprit d’entreprendre chez les jeunes. Depuis 2015, des actions spé-cifiques autour de l’économie sociale, coopérative et solidaire sont menées. L’AEI contribue ainsi à sensibiliser les étudiants des écoles secondaires et supérieures de Wallonie aux nouveaux modèles coopératifs alternatifs.

Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics

1. Favoriser les interactions entre l’économie sociale et l’enseignement

2. Utiliser l’intelligence collective dans l’enseigne-ment pour prouver que le collectif est une force

3. Améliorer la communication des entreprises so-ciales

1. Donner les moyens aux acteurs de l’enseignement pour adapter les programmes aux nouveaux mo-dèles de l’économie sociale

2. Introduire le modèle coopératif dans les disposi-tifs favorisant l’entrepreneuriat

3. Promouvoir et apporter un soutien financier à la création d’entreprises sociales

LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : DÉCLOISONNER ET COOPÉRER À TOUS LES NIVEAUX

TROIS FREINS À L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL ET COOPÉRATIF CHEZ LES JEUNES

1. Inadéquation des méthodes d’enseignement et des objectifs pédagogiques. 2. Méconnaissance de l’écosystème des entreprises sociales et coopératives ainsi que des enjeux sociétaux

auxquels celles-ci veulent répondre.3. Manque de confiance dans la dimension collective et dans le fait d’entreprendre à plusieurs.

Plus de neuf jeunes sur dix de moins de 30 ans ont une attitude favorable vis-à-vis de l’entrepreneuriat. (source : VentureLab)

Plus de 80% des Belges francophones veulent changer les choses autour d’eux. (source : Déclic en PespectivES)

93%

82,2%

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HEC LIÈGE : L’UNIVERSITÉ A BESOIN DE CONNEXION AU TERRAIN. HEC Liège est la première école en Belgique à avoir mis sur pied un Master complet en Management des Entreprises sociales. Parmi les objectifs de ce programme : revisiter les différentes disciplines de la gestion en lien avec les grands défis sociétaux de notre époque et encourager le développement de nouveaux projets d’entrepreneuriat social. « Au fil des années, nous avons modifié le programme pédagogique de ce Master de manière à rendre les étudiants plus proactifs. En effet, nous gardons le socle théorique, mais nous estimons que la recherche doit rester connectée à ce qui se passe sur le terrain », explique Maxime Bouchat, coordinateur au Centre d’Economie Sociale de HEC Liège. Toucher les jeunes en leur parlant de valeurs

Pour Maxime Bouchat, l’économie sociale et solidaire est plutôt complexe à appréhender avec des théo-ries. « Par contre, ce qui touche les jeunes aujourd’hui, ce sont les valeurs, le sens des choses… Stimuler l’entrepreneuriat social et coopératif chez les jeunes passe par l’inspiration, et donc par la ren-contre avec des entrepreneurs, des entreprises. » Ainsi, sur toute la durée du programme de forma-tion, visites d’entreprises, moments de réseautage, field trip à l’étranger et conférences thématiques sont au menu. Ces rencontres de terrain permettent aux étu-diants de développer leur réseau, mais aussi de développer leurs soft skills. Apprendre à tisser des liens est d’autant plus important dans un modèle d’entrepreneuriat coopératif… Maxime Bouchat constate que beaucoup d’étu-diants n’ont jamais entendu parler du fait que l’en-treprise peut être abordée d’une autre manière. Mais les choses bougent et une dynamique s’est enclenchée. « Nous avons la chance que les entre-prises sociales et l’éthique des affaires font désor-mais partie des pôles d’excellence de HEC Liège, signe d’une réelle préoccupation de l’école pour ce domaine. » FIELD TRIP MAROC 2017

VISITE DE 7AY (RABAT) PAR 17 ÉTUDIANTS DU MASTER EN MANAGEMENT DES ENTREPRISES SOCIALES (HEC LIÈGE)

MAXIME BOUCHAT© VICTORIEN LORIERS

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Y A-T-IL MATCH ENTRE L‘ÉCONOMIE COLLABORATIVE ET LE MODÈLE COOPÉRATIF ? workshop 2

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Pas une semaine ne passe sans que soit annoncé le lancement, en Wallonie ou à Bruxelles, d’une nouvelle plate-forme numérique créant des raccourcis entre propriétaires et locataires, restaurants et livreurs à vélo, ménages et aide-ménagères…

L’économie collaborative séduit de plus en plus d’usagers. Mais elle a ses limites et n’est pas exempte de dé-rives, notamment en modifiant fondamentalement notre perception de la valeur réelle des biens et des ser-vices. Les conditions des travailleurs dépendant de ces plateformes peuvent aussi être considérées comme préoccupantes.

Dans ce contexte, des entrepreneurs coopératifs se mobilisent pour proposer des initiatives économiques ins-pirées de l’économie collaborative, visant à développer une activité plus humaine, plus solidaire et durable. Mais pour qu’ils constituent de véritables alternatives, il faut les amener à être au centre du jeu.

QUATRE ENJEUX POUR QUE LE MODÈLE COOPÉRATIF TROUVE SA PLACE DANS L’ÉCONOMIE COLLABORATIVE

1. Conditions de travail : Comment faire pour développer des conditions de travail de qualité ? 2. Fiscalité juste : Comment repenser la redistribution du capital et des ressources ? 3. Mentalités : Comment renforcer un changement de mentalité pour redonner du sens aux actes d’achat et

de consommation ? 4. Finalité : Comment répondre à quels besoins et à quelle finalité ? Se poser la question est essentiel.

LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : ÉVOLUTION ET COHÉRENCE« La réponse coopérative est une solution à l’émergence des plateformes collaboratives si et

seulement si le mouvement coopératif parvient à s’approprier la révolution numérique, tout

en conservant les valeurs coopératives et sociales. »

Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics

1. Diffuser une image positive et claire de l’entrepre-neuriat coopératif et de ses impacts (au niveau des coopératives ET des fédérations)

2. Secteur concret à développer : créer une plateforme dédiée aux services à la personne afin de rendre ce secteur moins fragile et y maintenir la valeur « emploi »

1. Clarifier, et plus ambitieusement harmoniser, les statuts des travailleurs concernés par l’économie collaborative pour éviter la concurrence déloyale entre travailleurs dits autonomes et les autres

2. Clarifier et harmoniser le statut des entreprises qui hébergent ces plateformes collaboratives

ILS ONT DIT ...

Quand on lance une entreprise alternative, on manque de repères.

Je travaille souvent la peur au ventre.

Axer toute notre communication sur nos valeurs était une erreur.

Nous sommes dans un secteur extrêmement compétitif.

Les coursiers sont une variable d’ajustement.

Jean-Philippe Lens, co-fondateur de Topino

« L’entrepreneuriat classique est un univers bien construit, où il existe une sémantique, des structures d’accom-pagnement et de nombreux mécanismes de soutien. Mais quand on lance une entreprise alternative, on manque de repères, et nous appeler des ‘start-up’ n’est pas adapté. »

Alain, chauffeur Uber

« Pour avoir 1.000 euros/semaine, je dois prester environ 72 heures/semaine. Par contre, je travaille souvent la peur au ventre car nous sommes harcelés par les chauffeurs de taxi, voire la police. »

Jean-Philippe Lens, Topino

« Nous avons démarré avec un idéal assez fort, axant toute notre communication sur les valeurs. Mais c’était une erreur car nous sommes tous des ‘homo consumens’. Cela nous a poussés à nous recentrer sur les besoins des clients et à proposer des services qui y répondent. »

Benoît Renard, co-fondateur de Rayon 9

« Nous sommes dans un secteur extrêmement compétitif où la vision que la livraison doit être gratuite est très forte. »

Arnaud, ancien coursier pour Take it Easy et coursier pour Deliveroo

« Personnellement, je n’ai pas de problème et j’ai des missions en suffisance, mais il est clair que chez Deliveroo, les coursiers ne sont qu’une variable d’ajustement. »

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WISHARE-WIBEE : LES GENS VEULENT PARTAGER, À CONDITION QUE ÇA SOIT FACILE ET FIABLE.

A la base du projet Wishare, une vision : « Pour sortir du chaos de la mobilité, nous pouvons fonctionner comme tout le monde et nous procurer par exemple des applications qui servent à contourner ou éviter les bouchons. Ou alors changer de comportement, chacun dans son cadre, et inviter nos voisins à suivre le mouvement. »

Pierre Oldenhove a commencé avec la plateforme de partage de véhicules wibee.be, qui tourne bien depuis 2015. Puis est venue l’envie d’aller plus loin en proposant au public un nouveau mode de consom-mation, coopératif, basé sur le principe d’autonomie. « Avec la coopérative Wishare, les gens deviennent co-propriétaires de véhicules partagés. Ces véhicules peuvent aussi être mis en location sur la plateforme wibee.be. »

Le projet Wishare est sur les rails depuis septembre 2017. Il est complémentaire à la plateforme wibee.be. « Wishare part de l’idée que l’achat a peu de sens. Nous voulons aussi créer de la valeur pour nos coopéra-teurs », explique Pierre Oldenhove.

Pas de solution bancale

Mais celui-ci insiste : les entreprises coopératives doivent utiliser les mêmes armes que les plateformes classiques, tout en utilisant un mode de gouvernance qui fera la différence.

« Les valeurs ne doivent pas passer au-dessus de l’efficacité. Pour amener les gens à changer, il faut que l’offre proposée soit parfaite d’un point de vue tech-nologique. Tout le monde est prêt à partager sa voiture, mais il faut que ça soit confortable et efficace. Pour créer Wishare, nous avons travaillé sur toutes les contraintes et les freins au partage, tout en ayant en tête que nous devions nous intégrer dans un marché. »

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POURQUOI ET COMMENT MOBILISER L’ÉPARGNE CITOYENNE ?

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workshop 3

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En 2014, le Baromètre des Investisseurs1 a révélé que 51% des investisseurs belges envisagent qu’au moins une partie de leur épargne soit investie en considération de l’impact social et environnemental des activités financées. Une autre enquête de 20162 a permis de considérer que près d’1% de la population adulte belge a déjà souscrit à un ou plusieurs produits financiers labellisés Financité & FairFin.

Pour les coopératives, il existe donc aujourd’hui un contexte favorable à la mobilisation de l’épargne ci-toyenne. Proposer au grand public d’investir dans son entreprise constitue une réelle opportunité : la coo-pérative crée, fidélise ou élargit une communauté autour de son projet, tout en diversifiant ses sources de financement.

TROIS ENJEUX POUR MOBILISER L’ÉPARGNE CITOYENNE

1. Renforcer les soutiens publics, notamment au travers d’incitants fiscaux et d’une couverture de risques favorisant l’investissement privé.

2. Mettre davantage en valeur la plus-value sociale via une communication efficace et positive.3. Mettre en place un label qui promeut les projets solidaires et garantit un investissement solidaire.

1 Etabli par TNS à la demande d’ING en collaboration avec l’Université de Gand et les quotidiens L’Echo et De Tijd2 Baromètre 2016 du label Financité & FairFin

Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics

1. Se fédérer via une vitrine/plateforme commune

2. Créer ou amplifier des outils et des méthodologies pour mesurer l’impact sociétal des activités coo-pératives

3. Recourir à la consultance et l’accompagnement pour améliorer la communication et la gestion fi-nancière

1. Créer une certification des produits financiers solidaires ainsi qu’un cadre fiscal pour les coopé-ratives (exemples : un Tax Shelter spécifique aux coopératives, ou des incitants fiscaux pour les pro-duits financiers solidaires)

2. Mettre en place un Guichet unique pour les entre-preneurs coopératifs et les investisseurs citoyens

3. Prévoir une clause sociale dans les marchés publics

ELLES ONT DIT ...

L’investisseur est prêt à investir dans des projets solidaires.

Un soutien à la dynamique coopérative et citoyenne.

Le label s’est imposé.

Isabelle Philippe, directrice de Crédal

« L’investisseur aime investir en direct dans quelque chose de tangible. Crédal est né il y a une trentaine d’années suite à une prise de conscience de citoyens : à quoi était utilisé leur argent placé sur les comptes d’épargne ? Cela manquait de transparence. Ils ont donc décidé de créer une coopérative et d’investir dans des projets sociaux, environnementaux … »

Flora Kocovski, directrice de la Sowecsom

« Depuis 2010, de nouveaux types de projets, coopératifs, se mettent en place avec une dynamique citoyenne. Le Gouvernement wallon a souhaité donner une impulsion à ce mouvement coopératif grâce notamment à la mesure Brasero, qui permet d’investir dans le capital des coopératives aux côtés d’autres investisseurs.»

Sophie des Mazery, directrice de Finansol (France)

« Pour favoriser l’investissement des particuliers dans les placements solidaires, l’idée de labelliser les produits soli-daires s’est imposée. L’objectif de Finansol est que 1% de l’épargne soit investi en solidaire. L’attribution du label est sévère. Un comité d’experts indépendants vérifie trois critères : la solidarité, la transparence et l’action commerciale. »

ANIMATION DU WORKSHOP 3 PAR BERNARD BAYOT – DIRECTEUR FINANCITÉ

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VIN DE LIÈGE : AGIR CONJOINTEMENT.

Domaine viticole de 15 hectares, Vin de Liège veut produire du vin bio, de qualité et respectueux des per-sonnes. Pour faire face à ses besoins d’investissements importants, l’appel à épargne citoyenne était à la fois nécessaire et cohérent. Cette coopérative liégeoise figurait alors parmi les pionniers du crowfunding en Belgique et a dû développer ses propres outils.

Les débuts ont été un peu lents… Vin de Liège n’avait au départ qu’un plan financier pour convaincre. Mais très vite, la coopérative a fait le pari de la mobilisation citoyenne et a multiplié les occasions d’impliquer ses coopérateurs et bénévoles : présentations à des foires commerciales, présence au marché de Noël, planta-tion d’un premier vignoble expérimental, recrutement de nouveaux coopérateurs, soirées « Tupperwine », vendanges…

Cette mobilisation très concrète a fini par payer. Lors de son premier appel de fonds, Vin de Liège a récolté 400.000 euros en un an. En juin 2017, elle a réussi à drainer 1 million d’euros en un seul week-end !

Fabrice Collignon, président de la SCRL Vin de Liège : « Fondamentalement, les gens ont envie de s’im-pliquer dans la mise en place de solutions pour un avenir meilleur. Nous avons donc compris qu’il faut leur proposer la possibilité de faire autre chose que de mettre de l’argent à disposition, et que du côté de la coopérative, nous devions être sérieux et respecter nos engagements. »

Pour lui, le Forum des Coopératives 2017 a mis en avant cette prise de conscience des acteurs : il est nécessaire d’agir conjointement. « Maintenant, il est temps de rassembler nos forces pour une meilleure reconnaissance de nos spécificités. »

Ses deux conseils pour mobiliser l’épargne citoyenne :

Pour convaincre les investisseurs, n’hésitez pas à jouer sur tous les sens et pas uniquement sur le côté intellectuel

« Lors de nos premières présentations, nous n’avions qu’un document financier à présenter. Alors nous avons fait goûter du vin belge, qui n’était pas le nôtre, pour montrer que c’était possible ! »

Assurez un suivi professionnel « Ce n’est pas tout d’avoir un message convaincant et un beau site internet, il faut aussi assurer un suivi

professionnel des citoyens qui ont, à un moment ou à un autre, manifesté leur intérêt pour le projet. Chez Vin de Liège, dès que quelqu’un se montrait intéressé, ses coordonnées étaient encodées dans la base de données. Chaque personne était ensuite relancée jusqu’à ce qu’elle prenne une part, ou qu’elle refuse de façon définitive. »

DE NOMBREUX COOPÉRATEURS PARTICIPENT AUX VENDANGES© VIN DE LIÈGE

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CRÉATEURS, INTERMITTENTS, TRAVAILLEURS AUTONOMES… LA COOPÉRATIVE DE TRAVAILLEURS ASSOCIÉS EST-ELLE LA SOLUTION ?

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workshop 4

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La plupart des créateurs, artisans, intermittents, artistes et travailleurs autonomes combinent des rythmes de travail et de vente atypiques, liés à la nature de leur activité. Une forme d’autonomie les caractérise, mais aussi d’exclusion des circuits d’emploi classiques. La frontière entre salariés et indépendants est de moins en moins nette.

Face à cette évolution, des coopératives de travailleurs associés ont apporté des solutions innovantes en termes de modalités et d’organisation du travail. Elles ont ainsi contribué à la sécurisation de parcours atypiques. Le modèle SMart est bien connu, mais d’autres formes d’organisations existent. Aujourd’hui, ces coopératives de travailleurs constituent de véritables laboratoires de transformation des modèles d’entreprises et des formes d’emploi.

TROIS ENJEUX POUR PERMETTRE AUX COOPÉRATIVES DE TRAVAILLEURS DE RÉPONDRE AUX MUTATIONS DE L’EMPLOI

1. Expliquer le modèle des coopératives de travailleurs associés et les solutions qu’elles mettent en place afin

d’inspirer d’autres secteurs de la société.2. Mettre en place une organisation interne, au sein de la coopérative, en adéquation avec ses missions.3. Interroger, adapter et dépasser les statuts sociaux et fiscaux existants afin d’aller vers des statuts en

phase avec la réalité des nouvelles formes d’emploi.

DiES | DiES est une coopérative d’emploi. Elle rassemble un ensemble de travailleurs autonomes dans une structure commune : des entrepreneurs solidaires, indépendants ou salariés. DiES donne la possibilité à des travailleurs autonomes d’intégrer une structure juridique au sein de laquelle ils pourront acquérir le statut salarié, tout en gardant leur autonomie dans la gestion de leur activité. Ils vont ainsi bénéficier de services ad-ministratifs et comptables mutualisés. Par ailleurs, en fonction de leur revenu moyen annuel, ils obtiennent un salaire mensuel lissé.

SMart | Initialement créée sous forme d’ASBL, SMart est une coopérative d’emploi qui permet aux intermit-tents et travailleurs autonomes de bénéficier d’un contrat de travail intérimaire lorsqu’ils travaillent pour un donneur d’ordre. SMart devient ainsi, en tant qu’agence Interim, l’employeur de ses membres pour la durée de leur mission et prend en charge la conversion de la facture du client en contrat de travail. En janvier 2017, SMart est devenue une coopérative avec quelque 13.000 coopérateurs-utilisateurs de ses services.

Le Comptoir des Ressources Créatives | L’ASBL Le Comptoir des Ressources Créatives (CRC) fonc-tionne selon une dynamique coopérative. Son leitmotiv est « pour les créateurs et par les créateurs ». L’objet social est la création de services matériels et immatériels mutualisés pour les artistes et créateurs. Elle les oriente, elle part de leurs besoins, elle influence les opérateurs pour qu’ils répondent aux attentes de son public, et si les services n’existent pas, elle soutient les créateurs dans la création de solutions mutualisées innovantes, comme c’est le cas avec la coopérative Dynamo Coop, que le CRC a contribué à créer.

Entre 2004 et 2016, la part de la population occupée ayant un deuxième emploi en Belgique a augmenté de 16%.

Evolution entre 2010 et 2015 (en Belgique) du nombre d’indépendants dont les revenus dépendent à plus de 75% du client principal.

En Wallonie, 15% des indépendants ont opté pour ce statut faute d’alternative.

Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics

1. Le mouvement coopératif devrait se structurer pour dégager des moyens humains et financiers destinés à mieux communiquer vers les entre-prises classiques et le grand public.

2. Ce mouvement pourrait aussi produire des conte-nus pédagogiques afin d’éduquer les enfants et les adultes à la coopération.

3. Le secteur coopératif devrait mettre sur la table des pouvoirs publics des propositions pour la re-connaissance de statuts en phase avec l’évolution des formes d’emploi.

1. Créer un statut social et fiscal qui corresponde à la réalité de bon nombre de travailleurs.

2. Développer un statut « projet » en marge des diverses dispositions législatives existantes, une sorte de « statut-test » reconnu, afin d’instituer le droit à l’expérimentation. Et pouvoir s’en inspirer pour adapter, le cas échéant, les lois et réglemen-tations.

3. Intégrer dans les programmes scolaires des contenus pédagogiques permettant de découvrir la coopération.

LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : RÉINVENTONS LE MONDE DE L’EMPLOI« Le modèle coopératif s’adapte bien à la réalité des statuts autonomes, c’est donc un choix in-

téressant, mais il faut éviter que cela soit interprété comme une normalisation de la flexibilité ! »

+16%

+15%

+120%

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DYNAMO COOP : ACHATS GROUPÉS DE BÂTIMENTS, UNE SOLUTION AUDACIEUSE POUR LES CRÉATEURS.

Basée à Liège, Dynamo Coop est une coopérative immobilière à finalité artistique. En quelques mots, elle propose aux artistes, artisans et créateurs de devenir co-propriétaires de bâtiments culturels mutualisés en rejoignant la coopérative. « L’idée est partie d’un constat : le secteur créatif est sous-équipé en termes d’infrastructures et d’équipements », explique Marc Moura, co-fondateur de Dynamo Coop. Créée en 2015, cette coopérative s’est donc donné pour mission de combler ces besoins criants des créateurs en ache-tant, rénovant et louant des ateliers à bas prix.

Actuellement, deux projets sont déjà sur pieds : les Espaces Mutualisés Dony, un hangar de 1.400 m2 si-tué dans le quartier Saint-Léonard, et le KulturA, en Outremeuse, qui propose entre autres deux salles de concerts, une galerie d’art, des bureaux…

Permettre aux gens de se renforcer les uns les autres

« Nous démarrons un projet non pas parce que nous avons détecté une opportunité de faire du business comme le font les promoteurs immobiliers, mais parce que des besoins collectifs sont exprimés par des porteurs de projet à caractère coopératif », poursuit Marc Moura.

Dès le départ, les choses se font en co-construction. « Nous demandons aux porteurs de projet quel prix ils sont prêts à payer pour louer leur espace, et à partir de là, nous réfléchissons ensemble à la manière d’atteindre cet objectif. Cela demande donc l’implication de chacun. » Celle-ci va de la participation aux tra-vaux, à la mobilisation de son propre réseau dans le cadre d’un appel à épargne citoyenne… Plus l’implication est importante, plus le loyer pourra être bas.

Marc Moura souligne : « Notre modèle promeut la collaboration alors que la société pousse à la compétition et à l’individualisme. Nous ne proposons pas que des ateliers à louer, mais de véritables lieux de connexion où les créateurs peuvent se rencontrer, les poussant ainsi à sortir de l’isolement auxquels ils sont souvent confrontés. »

© DYNAMO COOP

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Diverses initiatives autour des circuits courts se développent un peu partout en Wallonie, plus particulièrement pour renforcer un modèle de production et de consommation locales. Des citoyens/consommateurs et des producteurs trouvent des intérêts communs à faire émerger des alternatives basées sur un système alimentaire de proximité.

Le modèle coopératif n’est pas la seule réponse, mais il présente de nombreux atouts pour rendre viables et pérennes des initiatives entrepreneuriales impliquant les différents acteurs de la chaine alimentaire. Une de ses forces réside notamment dans les principes de gouvernance qui permettent de faire émerger des processus décisionnels participatifs.

TROIS ENJEUX POUR PÉRENNISER D’AUTRES MODÈLES D’AGRICULTURE

1. Rééquilibrer les rapports de force entre tous les maillons de la chaine alimentaire.2. Faciliter l’accès à une nourriture de qualité au plus grand nombre de consommateurs.3. Eduquer les consommateurs aux circuits courts afin que ceux-ci constituent une réelle alternative à la

grande distribution.

CIRCUITS COURTS : LE MODÈLE COOPÉRATIF EST-IL UNE OPPORTUNITÉ POUR RAPPROCHER PRODUCTEURS ET CONSOMMATEURS ?

AGRICULTEURS CONSOMMATEURSCIRCUITS COURTS

Valoriser la production

au prix juste

Connaître la provenance

de ce qui est dans l’assiette

workshop 5

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LA RÉPONSE COOPÉRATIVE : RASSEMBLER ET ENCOURAGER« Le mouvement coopératif permet de rassembler et d’encourager la coopération entre tous

les acteurs d’une filière autour de valeurs communes. »

ILS ONT DIT ...

La force du modèle coopératif est la proximité.

La collaboration est très positive pour les agriculteurs.

Le modèle coopératif permet de travailler sur base d’un modèle et d’objectifs communs.

Stéphan Vincent, CEO d’Ethiquable et Administrateur de Coopéco

« La coopérative n’est pas LA solution mais une alternative possible. Aujourd’hui, il existe une multitude de producteurs et de consommateurs. Et malheureusement, aussi un goulot d’étranglement contrôlé par un nombre limité d’acteurs. La force du modèle coopératif est la proximité. Cela permet de récréer un dialogue, de personne à per-sonne, et un rapport de force équilibré. »

Aurélie Noiret, conseillère au service Étude de la FWA (Fédération Wallonne de l’Agriculture)

« La collaboration est très positive pour les agriculteurs. De plus, ceux-ci sont réellement demandeurs d’un rap-prochement avec les consommateurs. Mais la coopérative n’est qu’une forme de collaboration. Elle demande une réflexion et une formation sur le fonctionnement interne du mouvement. »

Francis Bebronne, porte-parole de la filière Marguerite Happy Cow

« L’avantage du modèle coopératif réside dans la réduction de la distance entre les agriculteurs et les consom-mateurs. Par essence, le lait est une matière première difficile à commercialiser en direct, ce qui éloigne la rela-tion producteur-consommateur. Le modèle coopératif a pour but de rassembler ces différents acteurs afin de travailler ensemble, agriculteurs et consommateurs. Il permet de travailler sur base d’un modèle et d’objectifs

communs. »

Pistes pour les acteurs de terrain Pistes pour les pouvoirs publics

1. Assurer la transparence de chaque maillon sur les prix tout au long de la chaine alimentaire, ainsi que sur les conditions de travail

2. Eveiller les consommateurs aux bienfaits d’une nourriture de qualité, y compris dans les écoles

3. Créer des espaces démocratiques de concerta-tion avec les acteurs d’une chaine

1. Adapter le cadre réglementaire pour faciliter le recours aux produits locaux (AFSCA et marchés publics)

2. Former et conscientiser les enfants à l’alimenta-tion durable et locale

3. Mettre en place un système où les produits sont vendus au prix juste, c’est-à-dire un prix qui tient compte du coût environnemental et social réel du produit

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RÉSEAU SOLIDAIREMENT : LES CIRCUITS COURTS ONT BESOIN DE LOGISTIQUE.

Le point de départ du Réseau Solidairement est la mobilisation de citoyens, aidés par les autorités d’une petite commune près de Virton, pour reprendre l’épicerie du village. Depuis 10 ans, cette coopérative tourne grâce à la motivation citoyenne. Au fil du temps, elle a donné naissance à une série d’initiatives favorisant les circuits courts dans la région.

Ainsi, la part des produits locaux dans l’assortiment de l’épicerie croît d’année en année. Dans la foulée ont été lancés des paniers de légumes saisonniers. De 4 maraichers au départ, ils sont aujourd’hui 24 à fournir des légumes localement. Ce mouvement a aussi impulsé la création de l’Epi lorrain, une monnaie locale destinée à favoriser les échanges économiques locaux.

Organiser l’acheminement des producteurs aux consommateursMais pour que ces produits locaux arrivent jusque dans les épiceries, les GAC (Groupes d’Achats en Com-mun) ou les restaurants, il a fallu régler un problème de taille : la logistique. Centraliser les commandes, ra-tionaliser l’acheminement… C’est ce qu’ont fait les fondateurs du Réseau Solidairement. Très vite, ce réseau est devenu le lien manquant indispensable entre consommateurs et producteurs de la région.

En 2017, le Réseau Solidairement a franchi une nouvelle étape : afin de trouver les moyens de financer ses besoins en locaux et en matériel, il s’est constitué en coopérative. Quasi tous les acteurs de la filière, producteurs, épiceries et restaurateurs, sont ainsi devenus coopérateurs, aux côtés des nombreux ci-toyens qui rejoindront l’aventure - c’est ce qu’espèrent les fondateurs - dans le futur.

Un changement de fondSelon Pascal Van Bever, administrateur du Réseau Solidairement et membre-fondateur, tout ce travail mené depuis 2007 a changé pas mal de choses dans le Sud de la Province du Luxembourg. « Nous avons permis à certains maraîchers de s’installer puisqu’ils étaient assurés d’écouler une bonne partie de leur production. Nous avons aussi permis à certains agriculteurs de se diversifier. Quant aux consomma-teurs, nous les avons sensibilisés et leur avons donné accès aux produits de leur territoire. »

Une des preuves est que le chiffre d’affaires de l’épicerie et du Réseau Solidairement est en constante hausse depuis des années, et que l’expérience a inspiré la création de nouvelles épiceries du même genre dans la région. Aussi, face à ce bilan, Pascal Van Bever appelle les pouvoirs publics à s’appuyer sur les initiatives citoyennes et à les soutenir.

« Les personnes qui créent des coopératives citoyennes sont suffisamment motivées pour porter les valeurs coopératives et faire les choses bien. La réponse coopérative n’est bien sûr pas la seule aux dérives de l’industrie agro-alimentaire, mais nous avons pu constater que lorsque l’initiative part des ci-toyens, cela permet de s’accorder sur les valeurs à défendre et permet à chacun de s’approprier le projet. Cela mobilise les énergies. »

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REMERCIEMENTS Le Forum des Coopératives est organisé par l’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation en coopération avec ses partenaires de l’économie sociale et coopérative :

Les Agences-conseil en économie sociale qui accompagnent les porteurs de projets et les entrepreneurs sociaux : Crédal Conseil, Febecoop, Progress, Propage-s, SAW-B, Step Entreprendre et SynecoConcertEs, chargé de la concertation des acteurs wallons de l’économie socialeLa SOWECSOM, partenaire financier wallon des entreprises sociales et coopérativesLe Centre d’Economie Sociale de HEC Liège Le réseau Financité, qui réunit citoyens et organisations pour des financements éthiques et solidairesEt aussi les écoles pilotes qui ont mené des projets entrepreneuriaux coopératifs : Haute École Provinciale Condorcet (Ath), Haute École Provinciale de Namur, IPEPS–La Samaritaine (Charleroi) et la Haute École Albert Jacquard (Namur)

Nous les remercions vivement pour leur apport et remercions la trentaine de contributeurs (témoins et experts) qui ont participé à ce processus.

L’Agence pour l’Entreprise & l’Innovation

Ce carnet est téléchargeable sur :

www.forum-cooperatives.be

CONTACT

Agence pour l’Entreprise & l’Innovation (AEI)rue du Vertbois, 13b

B-4000 LiègeTéléphone : +32 (0)4/220.51.00

Mail : [email protected]

EDITEUR RESPONSABLE

Véronique CABIAUX,Agence pour l’Entreprise & l’Innovation

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ÉCONOMIESOCIALE,COOPÉRATIVEET SOLIDAIRE


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