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Le coaching : fabrique de l’exception et désubjectivation · 2019. 7. 7. · Le coaching, à...

Date post: 29-Aug-2020
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1 Le coaching : fabrique de l’exception et désubjectivation 1 . Baptiste Rappin Maître de Conférences à l’ESM-IAE de Metz [email protected] 06 51 99 26 83 Adresse professionnelle publiable : IPEFAM, 1 rue Augustin Fresnel, BP 15100, 57073 Metz Cedex 3 1 Article publié dans la revue Économies et Sociétés, série « Études Critiques en Management », KC, 2015, n°4, p.227-247.
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Le coaching : fabrique de l’exception et désubjectivation1.

Baptiste Rappin

Maître de Conférences à l’ESM-IAE de Metz

[email protected]

06 51 99 26 83

Adresse professionnelle publiable :

IPEFAM, 1 rue Augustin Fresnel,

BP 15100,

57073 Metz Cedex 3

                                                                                                                         1 Article publié dans la revue Économies et Sociétés, série « Études Critiques en Management », KC, 2015, n°4, p.227-247.

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Le coaching : fabrique de l’exception et désubjectivation2.

Résumé : Cet article considère le coaching comme un dispositif de l’état d’exception. Pour

argumenter en ce sens, nous montrons en quoi les approches foucaldiennes peuvent être

complétées et prolongées en direction d’une prise en compte de la désubjectivation : c’est

pourquoi nous nous tournons vers Agamben pour appréhender le biopouvoir de l’état

d’exception, et rendre ainsi compte du coaching à travers cette grille de lecture.

Mots Clefs : coaching, Foucault, Agamben, biopouvoir, état d’exception, désubjectivation.

Coaching: making of exception and desubjectification.

Summary: This article highlights the coaching as a state of exception apparatus. We show that

foucaldian approaches can be completed and extended by taking desubjectification into

account: that’s why we mobilize Agamben’s philosophy to tackle with the state of exception

biopower. We last take a new look at the coaching with this analysis grid.

Key Words: coaching, Foucault, Agamben, biopower, state of exception, desubjectification.

                                                                                                                         2 Je remercie sincèrement les évaluateurs ainsi que les rédacteurs pour leurs nombreuses remarques et leurs précieux conseils : leur travail m’a permis d’améliorer nettement la réflexion menée. Ma reconnaissance s’adresse particulièrement au Professeur Allard-Poesi pour sa patience et sa rigueur.

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Introduction.

Dans Le nouvel esprit du capitalisme, Boltanski et Chiapello [1999] dressent le portrait du

septième monde de l’économie des grandeurs : la cité par projets propre à l’ère du néo-

management. Cette dernière se caractérise par la valorisation du réseau, de l’interaction, de la

connexion, de la flexibilité, de l’adaptabilité ainsi que par la critique symétrique de

l’immobilisme, de la rigidité et de la spécialisation du travail. La cité par projet est un univers

en perpétuelle mutation, dans lequel l’exception semble devenir la règle : c’est pourquoi

l’épreuve reine est celle du passage d’un projet à l’autre. Trois personnages incarnent ce

monde : le chef de projet, le médiateur et le coach.

L’objectif de cet article est d’étudier la présence de l’exception dans les pratiques

managériales et son impact sur la construction des sujets, sur leur processus de

subjectivation : le coaching se présente alors comme un « objet » privilégié dans la mesure où

le coach est expressément appelé par le prescripteur pour travailler sur la subjectivité du

coaché à des fins de développement personnel et professionnel. Mais comment rendre compte

de l’exception dans le coaching ? Quel regard adopter ? C’est justement ici qu’intervient le

choix des philosophes Michel Foucault et Giorgio Agamben et que se dessine l’économie de

notre réflexion : car la relecture archéologique du biopouvoir par le philosophe italien permet

précisément de prendre en compte l’exception dans les pratiques de gouvernement des autres

et de soi.

Voici donc comment nous procéderons : nous présentons tout d’abord le champ théorique du

coaching avant de mettre en exergue le mouvement de dénaturalisation opéré par les

approches foucaldiennes. Toutefois ces dernières insistent trop fortement sur le potentiel de

subjectivation inhérent au dispositif considéré. Cette critique nous permet d’introduire la

pensée d’Agamben, et plus particulièrement la manière dont le philosophe italien déplace la

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problématique foucaldienne du biopouvoir vers l’état d’exception et la figure de l’homo sacer.

Le coaching est alors analysé avec cette nouvelle grille de lecture.

I) La désubjectivation, point limite de la critique foucaldienne du

coaching.

Nous dressons tout d’abord un état des lieux des recherches portant sur le coaching, et

montrons que ce dernier fait récemment l’objet d’un travail de dénaturalisation, dans le sens

promu par les études critiques en management. Foucault y tient une place importante : c’est

pourquoi nous relevons la façon dont sa pensée est mobilisée avant d’en souligner avec

Deleuze l’impensé : la prise en compte de la désubjectivation.

1. Le coaching : points de repères.

Le coaching, apparu en France au début des années 1990, est une pratique d’accompagnement

des managers, visant à développer leur potentiel dans le but d’atteindre des objectifs fixés

préalablement entre le coach, le coaché et le prescripteur. Comme le montre Cloet [2007], le

recours à ce type de pratique répond aux besoins de plusieurs situations professionnelles

(prise de nouvelles responsabilités, développement de compétences managériales, rencontre

de difficultés, etc.) et problématiques (individuelles, relationnelles, managériales et

organisationnelles).

Suivant Persson, Rappin et Richez [2011], nous pouvons dresser une cartographie du

coaching qui relève ses multiples sources d’inspiration : sociologique, comprenant des

orientations soit fonctionnalistes visant à clarifier le rôle du coaching dans les organisations

[Minvielle Y. (2002) ; Salman S. (2008) ; Nizet J. et Fatien P. (2012)], soit critiques qui

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mettent en évidence la domination et l’aliénation à l’œuvre dans cette pratique

d’accompagnement [De Gaulejac V. (2005) ; Gori G. et Le Coz G. (2006) ; Guilhaume G.

(2009)] ; psychologique, avec plus spécifiquement une approche psychanalytique mettant en

exergue le narcissisme du coaching [Amado G. (2002] ou la fabrication d’un faux-self

[Dubouloy M. (2004)] ; anthropologique et philosophique, avec comme interrogations la

place du coaching dans la fabrique du lien entre individu et organisation [Persson S. (2005)]

ainsi que les fondements utilitaristes du coaching [Chavel T. (2006) ; Rappin (2006a)] ; enfin,

gestionnaire, interrogeant, entre autres, le nouvel acteur qu’est le coach [Gand S. et Sardas J.-

C. (2007)], ou encore le coaching comme outil de médiation des contradictions [Fatien P.

(2007)] voire de régulation [Vernazobres P. (2008)].

L’étude du coaching prend depuis peu une nouvelle direction et se tourne vers les Critical

Management Studies. La littérature a tout d’abord été composée des ouvrages écrits par les

coachs eux-mêmes, dans un double souci d’explicitation et de promotion de leur pratique. Le

coup d’envoi fut donné par Lenhardt [1992], suivi en cela par de nombreux confrères [Persson

S. (2005)]. De même, les premiers écrits académiques sur le coaching tendent à vouloir rendre

compte du coaching par une rationalité fonctionnelle, une approche très largement ancrée

dans le monde anglo-saxon comme en témoigne encore le récent dossier que la revue Gestion

[2010] consacra à ce thème. Parallèlement, les premières critiques, souvent véhémentes,

prononcées à l’encontre du coaching sont prononcées par des voix extérieures au champ des

sciences de gestion, et plus particulièrement par les sociologues cliniques et les

psychanalystes cités ci-dessus.

Toutefois, le programme de dénaturalisation [Alvesson M. et Willmott H.C. (2003), Grey C.

et Willmott H.C. (2005)] promu par les études critiques du management commence à prendre

forme et se manifeste par l’écriture d’articles publiés dans des revues gestionnaires, et écrits

par des enseignants-chercheurs de sciences de gestion. Entendons par « dénaturalisation » le

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refus de prendre pour argent comptant un discours, ce qui implique de s’attacher à « l’analyse

précise des mécanismes de génération et de justification des discours dominants » [Golsorkhi

D., Huault I., Leca B. (2009), p. 12], ou encore de déconstruire ce qui semble aller de soi et se

donne comme intangible. Suivant cette ligne directrice, Fatien et Nizet [2011] analysent les

discours des coachs critiques à la lueur des sociologies de Bourdieu et Giddens, et Persson et

Rappin [2013] rendent comptent de la pluralité des discours du coaching en utilisant la grille

de lecture du storytelling [Boje D. (1991, 1995)].

2. Approches foucaldiennes du coaching.

Nous nous centrons à présent sur la mobilisation de Foucault dans les études critiques sur le

coaching. Pourquoi ? Pour deux raisons, l’une quantitative, l’autre qualitative. Tout d’abord,

Foucault est une référence incontournable des études critiques du management, l’un des

philosophes les plus largement mobilisés depuis l’article séminal de Burell [1988]. Ce qui

nous amène au second point : l’étude du management semble, à tort ou à raison, pouvoir

s’inscrire dans la lignée des travaux du philosophe, que ce soit du point de la discipline, de la

biopolitique ou encore du souci de soi. Il y aurait comme une « compatibilité naturelle » ou

« intuitive » entre l’œuvre foucaldienne et le management. Observons à présent comment se

marque sa présence dans l’analyse du coaching à travers les trois thèmes suivants : le pouvoir

pastoral, le souci de soi et le gouvernement de l’âme.

Nous devons à Brunel [2004] un essai dans lequel elle fait appel à la notion de « pouvoir

pastoral » développée par Foucault [1979] pour comprendre la façon dont s’exerce le pouvoir

à travers le développement personnel (dont le coaching mobilise les concepts et les outils :

voir les travaux généalogiques réalisés par Briffault et Champion [2005], ainsi que par Rappin

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[2011]). À l’inverse du pouvoir de l’État, localisé, centralisé, visible, recourant à la sanction et

à la violence afin d’assurer l’obéissance aux lois, émanations de la souveraineté, le berger, ou

le pasteur, exerce un contrôle sur les brebis de son troupeau par sa connaissance intime de leur

personnalité et de leurs besoins : « Le pouvoir pastoral suppose une attention individuelle à

chaque membre du troupeau » [Foucault M. (1979), p. 958]. Sa proximité génère un sentiment

de sécurité qui lui permet de les orienter vers une finalité. Le philosophe fait état de la genèse

de ce pouvoir pastoral ; il montre plus précisément que cette modalité de gouvernement des

hommes est étrangère à la tradition politique grecque car elle est le propre du monothéisme,

émergeant dans le judaïsme et se perfectionnant dans le christianisme, notamment sous la

forme de la confession. Ainsi, à côté du pouvoir étatique lié la souveraineté et à la puissance

de la loi, émerge un nouveau type de pouvoir, pastoral, qui s’exerce sur les individus,

concrets, vivants et considérés dans leur multiplicité. Brunel [(2004), p. 147-148] opère alors

le rapprochement avec les pratiques de développement personnel en entreprise : ces dernières

rompent avec l’autorité traditionnelle et les formes pyramidales d’organisation jugées

surannées ; elles proposent un accompagnement individualisé avec une prise en charge de la

singularité de chacun ; l’empathie du coach, son écoute active et sa bienveillance génèrent la

sécurité et la confiance ; son intervention a pour but de faire progresser le coaché, dans

l’atteinte des objectifs fixés par le contrat tripartite. La sociologue propose d’actualiser la

métaphore du troupeau afin de la rendre compatible avec l’individualisme contemporain :

c’est pourquoi elle parle de « pouvoir pastoral narcissique » pour caractériser la spécificité du

pouvoir exercé par le développement personnel, à savoir la liberté accordée à l’individu, dans

l’accompagnement, de se conformer de lui-même aux normes du troupeau.

Pezet [2007], quant à lui, prend pour point de départ le souci de soi afin d’appréhender le

coaching ; il procède alors, dans un second temps, à la liaison avec la thématique du pouvoir.

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Il se réfère plus particulièrement aux cours que Foucault donna au Collège de France en 1981-

1982 et qui traitent de l’herméneutique du sujet. Le souci de soi désigne « un certain nombre

d’actions, actions que l’on exerce de soi sur soi, actions par lesquelles on se prend en charge,

par lesquelles on se modifie, par lesquelles on se purifie et par lesquelles on se transforme et

on se transfigure. Et, de là, toute une série de pratiques qui sont, pour la plupart, autant

d’exercices qui auront […] une très longue destinée. Par exemple, ce sont les techniques de

méditation ; ce sont les techniques de mémorisation du passé ; ce sont les techniques

d’examen de conscience ; ce sont les techniques de vérification des représentations à mesure

qu’elles se présentent à l’esprit, etc. » [Foucault M. (2001), p. 12-13]. L’auteur passe en revue

les différentes techniques utilisées dans le coaching (psychanalyse, analyse transactionnelle,

programmation neuro-linguistique, etc.) et montre qu’elles sont à l’origine d’un examen de

soi fondé sur la science psychologique, à la différence des pratiques antiques [Gros F. (2007)].

Toutefois, l’analyse du coaching ne saurait en rester à ce stade du souci de soi : « Avec le

coaching, il faut étudier la « physique du pouvoir », l’agencement des objets matériels,

conceptuels, juridiques à partir desquels s’établit la relation de savoir-pouvoir » [Pezet É.

(2007), p. 81]. En effet, le coach utilise, outre le questionnement et la reformulation, trois

outils lui permettant de guider la parole du coaché : le contrat (comme outil juridique), le

cadrage (comme outil cognitif) et le transfert (comme outil conceptuel) assurent la

surveillance du coaché, et peuvent, même si ce mouvement n’est pas inéluctable, faire glisser

le coaching vers une pratique disciplinaire.

En dernier lieu, nous pouvons rapprocher le coaching des pratiques de « gouvernement de

l’âme », expression que l’on doit à Rose qui la définit ainsi : « Dans Governing the Soul, je

montre que, par la production de connaissances positives, d’affirmations possiblement vraies

ainsi que d’une expertise apparemment dépassionnée, la psychologie permet le gouvernement

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des sujets à travers ces pratiques et ces dispositifs qui ne sont pas basés sur l’autorité arbitraire

mais sur la nature réelle d’êtres humains envisagés comme sujets psychologiques » [Rose N.

(1999), p. viii]. Tout savoir, pour Foucault, est producteur d’un pouvoir, c’est-à-dire d’une

capacité stratégique d’influence sur autrui ; il en va ainsi de la psychologie qui, s’appuyant sur

sa légitimé scientifique, édicte des normes de jugement, de comportement et d’action. Et cette

gouvernementalité « psy » est en accord avec son temps, caractérisé par les valeurs libérales

de l’autonomie, de la responsabilité et de l’auto-détermination.

De plus, cette gouvernementalité « psy » et son empire normatif ne s’accompagnent pas d’une

« casse du sujet » pour reprendre l’expression de Pierre Legendre, mais constituent une

nouvelle modalité de la construction du sujet : « Ces nouvelles formes de régulation ne

concassent pas la subjectivité. En fait, elles fabriquent des sujets – des hommes, des femmes

et des enfants – capables de supporter le fardeau de la liberté » [Rose N., ibid.]. Les pratiques

« psy », auxquelles nous rattachons le coaching par ses origines, sont le nouveau lieu de la

subjectivation de l’homme moderne : non plus tournée vers l’extérieur et la contemplation du

monde, mais vers l’intériorité, le psychisme, la conscience [Gros F. (2007)]. Or, si nous

admettons le lien entre savoir, pouvoir et subjectivité, l’ambition de cet article est bien

d’aboutir à une conclusion inverse : les nouveaux types de savoir et de pouvoir du

management, dont nous étudions ici un aspect à travers le coaching, ne fabriquent plus des

sujets et ne constituent plus des lieux de subjectivation.

3. Critique de la subjectivation : du pli au dépli.

La thèse de Rose, selon laquelle le savoir-pouvoir psychologique ne constitue pas un obstacle

à la subjectivation, est cohérente avec la pensée de Foucault. Ce dernier, en effet, ne

considérait pas la coercition et la construction de soi comme deux forces opposées ; plus

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précisément, la première ne supprime pas la possibilité de la seconde : « Il faut tenir compte

des points où les technologies de domination des individus les uns sur les autres font appel

aux processus par lesquels l’individu agit sur lui-même ; et inversement, il faut tenir compte

des points où les techniques de soi s’intègrent dans des structures de coercition et de

domination » [Foucault M. (1980), p. 38]. De ce point de vue, l’on comprend bien pourquoi le

coaching peut s’interpréter à la fois comme une technique de gouvernement des autres

(discipline, pouvoir pastoral) et comme une technique de soi. Mais les spécificités du

coaching ont-elles été assez prises en compte pour se risquer à avancer une telle thèse ?

La réponse à cette question nécessite un détour : en quoi les champs de pouvoir et les champs

de savoir rendent-ils possibles, chez Foucault, la constitution du sujet ? « L’idée fondamentale

de Foucault, c’est celle d’une dimension de la subjectivité qui dérive du pouvoir et du savoir,

mais n’en dépend pas » [Deleuze G. (1986/2004), p. 108-109). Le pli désigne alors ce

« dedans du dehors » : les Grecs ont inventé des techniques de soi engendrant une domination

de soi sur soi qui aménage un espace d’indépendance par rapport aux jeux de force extérieurs.

Si la conceptualisation du pli apparaît dès 1986 dans son Foucault, Deleuze en donne une

thématisation complète deux ans plus tard : il met notamment en avant l’infinité du pli dans le

Baroque dont la finalité n’est pas de mettre fin au pli, mais au contraire de le prolonger

continument selon des rythmes, des angles et des trajectoires différents [Deleuze G. (1988), p.

48-49]. C’est pourquoi la subjectivité risque toujours d’être reprise dans les diagrammes, si

elle ne continue pas ce perpétuel mouvement de différenciation : « La lutte pour la

subjectivité se présente alors comme droit à la différence, et droit à la variation, à la

métamorphose » [Deleuze G. (1986/2004), p. 113].

Effectivement, avec le temps, les institutions sapent la zone d’indépendance et procèdent à la

réintégration de la subjectivité pliée dans les systèmes de pouvoir et de savoir : c’est

l’opération du dépli qui procède d’une part du « recodage » de la subjectivité dans de

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nouveaux diagrammes, et, d’autre part, du désir de rester fixé à l’identité construite à travers

les techniques de soi [Deleuze G. (1986/2004, p. 110] : dans les deux cas, c’est l’arrêt du

mouvement et l’organisation de la transparence qui sont à l’origine du dépliement du pli.

La possibilité du dépli semble s’accroître dans le contexte de la société de contrôle qui se

caractérise moins par l’enfermement, propre à la discipline, que par le « contrôle continu et

[la] communication instantanée » [Deleuze G. (1990/2003, p. 236]. Dans le champ du

management stratégique, Allard-Poesi minore précisément la possibilité de la résistance des

subjectivités du fait de l’injonction qui leur est faite de « déclarer leurs intentions, de

communiquer les résultats obtenus et de décrire leurs propres méthodes de supervision et de

contrôle » [Allard-Poesi F. (2010), p. 177]. Cette objectivation de soi que génèrent les

pratiques stratégiques implique un dépli de la subjectivité qui, réduite à la planéité de sa

surface, est toute prête à se réinscrire dans les relations de pouvoir et de savoir.

Ce raisonnement peut s’étendre au coaching, lieu de fabrique de la transparence de la

subjectivité [Rappin (2006b)] : par le jeu du dialogue et de la reformulation, par l’effet miroir,

par tous les exercices proposés, le coaché est sommé de se mettre à nu, de révéler son

intériorité dans le but d’atteindre les objectifs préalablement définis. Dans ce processus

d’exposition, la subjectivité se vide de toute profondeur pliée pour livrer sa vérité à un

dispositif managérial de pouvoir et de savoir. Tout comme le management stratégique, le

coaching est moins une pratique disciplinaire que la mise en place d’un dispositif de contrôle,

et même d’autocontrôle. Cette remise en cause de la possibilité de la subjectivation, du fait de

l’opération de dépli qui se joue dans le coaching, invite alors à un déplacement des analyses

foucaldiennes : c’est pourquoi nous nous tournons à présent vers un philosophe dont la

réflexion prolonge et déplace celle de Foucault : il s’agit de Giorgio Agamben.

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II) De Foucault à Agamben.

Snoek [2010] recense de façon exhaustive les pans de l’œuvre d’Agamben dans lesquels

l’influence de Foucault est manifeste : le pouvoir, la liberté, la philosophie du langage, la

méthode. Nous centrons nos analyses sur le passage du biopouvoir à l’état d’exception et en

envisageons les conséquences quant à la désubjectivation des individus.

1. Du biopouvoir à l’état d’exception.

Influence ne signifie pas fidélité : comment Agamben s’approprie-t-il, parfois au risque de la

dénaturer, la pensée de Foucault ? Envisageons donc le déplacement qu’Agamben opère dans

la problématique du biopouvoir. Là où Foucault faisait état d’une irréductibilité foncière entre

les trois modalités d’exercice du pouvoir (souveraineté, pouvoir disciplinaire, biopolitique), là

où il plaidait en faveur de l’incompatibilité et de la discontinuité, le philosophe italien

envisage le rapport de la souveraineté à la vie, allant jusqu’à voir dans cette seconde le

fondement ultime et secret de la première : « La présente recherche concerne ce point de

jonction caché entre le modèle juridico-institutionnel et le modèle biopolitique du pouvoir.

L’un des résultats auxquels elle est parvenue est précisément le constat que les deux analyses

ne peuvent être séparées, et que l’implication de la vie nue dans la sphère politique constitue

le noyau originaire – quoiqu’occulté – du pouvoir souverain. On peut dire en fait que la

production d’un corps biopolitique est l’acte originaire du pouvoir souverain » [Agamben G.

(1995/1997), p. 14]. Agamben retourne alors chez Aristote, qui assure le départ entre le bios,

le mode de vie politique, et la zoé, la vie naturelle, cette seconde se trouvant exclue d’emblée

de la cité : la vie politique se fonde et se constitue dès son coup d’envoi grec par l’inclusion

d’une exclusion, la souveraineté repose dès le départ et constitutivement sur l’exception et la

relation de ban. Ce que Foucault [(1974), p. 1482] pensait être le propre de la séquestration du

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XIXe siècle, en opposition à la réclusion du XVIIIe : « Il s’agit donc d’une inclusion par

exclusion. Voilà pourquoi j’opposerai la réclusion à la séquestration ; la réclusion du XVIIIe

siècle, qui a pour fonction essentielle l’exclusion des marginaux ou le renforcement de la

marginalité, et la séquestration du XIXe siècle, qui a pour fonction l’inclusion et la

normalisation. », Agamben l’étend à l’ensemble de la philosophie politique occidentale

(notons au passage que les deux penseurs utilisent la même expression « inclusion par

exclusion »).

Le philosophe italien s’appuie alors sur une figure énigmatique que l’on rencontre dans le

droit romain, celle de l’Homo sacer, cet homme jugé pour crime qu’il est impossible de

sacrifier mais dont l’assassin ne sera pas condamné pour homicide : « L’Homo sacer

présenterait la figure originaire de la vie prise dans le ban souverain et garderait ainsi la

mémoire de l’exclusion originaire à travers laquelle s’est formée la dimension politique.

L’espace politique de la souveraineté se serait alors constitué à travers une double exception,

telle une excroissance du profane dans le religieux et du religieux dans le profane qui dessine

une zone d’indifférence entre le sacrifice et l’homicide. On dira souveraine la sphère dans

laquelle on peut tuer sans commettre d’homicide et sans célébrer de sacrifice ; et sacrée,

c’est-à-dire exposée au meurtre et insacrifiable, la vie qui a été capturée dans cette sphère »

[Agamben G. (1995/1997), p. 93]. Le ban est la prérogative du souverain à l’origine de l’état

d’exception comme structure d’inclusion par l’exclusion, le banni se trouvant sous le coup de

l’arbitraire souverain tout en étant a-ban-donné par la loi : il se trouve en un seuil où vie et

droit se confondent, où intérieur et extérieur entrent en une zone d’indistinction et

d’indétermination, en un endroit où il n’existe plus de hors-la-loi, la loi se maintenant dans sa

propre privation, s’appliquant dans sa non-application : « la vie nue est ce qui est banni au

double sens de ce qui est exclu de la communauté, mis au ban, mais qui est de cette manière

mis sous l’enseigne du souverain » [Genel K. (2004), p. 7].

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La vie nue deviendra paradoxalement, avec l’avènement de la modernité, la forme de vie

dominante en fusionnant avec l’espace politique lui-même : bios et zoé entrent dans une zone

d’indifférenciation qui explique précisément la montée en puissance du biopouvoir à partir

des XVIIe et XVIIIe siècles. Mais dire que « la vie nue se libère », c’est affirmer dans le même

temps que nos sociétés modernes ont fait de l’exception une règle : « Dès lors, la création

volontaire d’un état d’urgence permanent (même s’il n’est pas déclaré au sens technique) est

devenue l’une des pratiques essentielles des États contemporains, y compris ceux que l’on

appelle démocratiques » [Agamben G. (2003), p. 11].

2. De la subjectivation à la désubjectivation.

Les ouvrages que le philosophe italien consacre à l’Homo Sacer et à l’État d’exception

appartiennent tous deux au champ de la philosophie politique : il n’y est pas fait mention d’un

rapport quelconque avec la problématique de la constitution du sujet. Le lien peut toutefois

être réalisé par un détour : celui qui conduit à l’opuscule Qu’est-ce qu’un dispositif ? dans

lequel Agamben semble justement jeter un pont entre biopouvoir et désubjectivation : « Les

sociétés contemporaines se présentent comme ainsi comme des corps inertes traversés par de

gigantesques processus de désubjectivation auxquels ne répond aucune subjectivation réelle »

[Agamben G. (2007), p. 46]. Le philosophe met ici en relation d’un côté la société

contemporaine, caractérisée par la vie nue et l’état d’exception, et des processus de

désubjectivation. Explorons cette piste.

Que faut-il tout d’abord entendre par « dispositif » puisque telle est la porte d’entrée de

l’opuscule ? Établissant des parallèles et des rapprochements entre le Gestell heideggérien, la

notion foucaldienne de dispositif et la dispositio des théologiens, Agamben constate que tous

renvoient « à une économie, c’est-à-dire à un ensemble de praxis, de savoirs, de mesures,

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d’institutions dont le but est de gérer, de gouverner, de contrôler et d’orienter – en un sens qui

se veut utile – les comportements, les gestes et les pensées des hommes » [Agamben G.

(2007), p. 28]. Le philosophe donne une extension très large à cette notion, puisqu’il

considère les stylos, la philosophie voire le langage comme des dispositifs ; il en repère

l’origine dans la séparation entre le profane et le sacré opérée par le sacrifice (d’où son appel

à la profanation considérée comme un contre-dispositif de ré-unification [Agamben G.

(2006)]). Poursuivant son raisonnement dans le sillage de Foucault, Agamben montre que le

gouvernement des hommes, c’est-à-dire le biopouvoir, nécessite la subjectivation, la

production de sujets : « Tout dispositif implique un processus de subjectivation sans lequel le

dispositif ne saurait fonctionner comme dispositif de gouvernement, mais se réduit à un pur

exercice de violence » [Agamben G. (2007), p. 41-42]. La constitution des corps dociles et

utiles, dans les prisons, les asiles et les usines, préserve paradoxalement encore une liberté à

l’intérieur de la docilité : elle en est même le ressort. La normativité de la discipline est à

l’origine de l’aménagement d’un espace d’actions et d’expériences, celui de l’application de

la norme, dans lequel le l’individu se produit comme sujet.

Cela n’est plus le cas dans la phase actuelle du capitalisme [Ek R. and al., (2007)] ; il existe

ainsi une différence fondamentale entre les dispositifs traditionnels et les dispositifs

contemporains : alors que les premiers étaient à l’origine de la production de sujets,

production parfois incontrôlée d’ailleurs, les seconds n’engendrent que des processus de

désubjectivation, ou, plus précisément, établissent une indifférence voire une réciprocité ou

encore une équivalence entre subjectivation et désubjectivation : « Un moment de

désubjectivation était bien enveloppé dans tout processus de subjectivation et le Moi de la

pénitence [dans le cadre de la confession] ne se constituait effectivement qu’en se niant ; mais

aujourd’hui, processus de subjectivation et processus de désubjectivation semblent devenir

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réciproquement indifférents et ne donnent plus lieu à la recomposition d’un nouveau sujet,

sinon sous une forme larvée, et pour ainsi dire, spectrale » [Agamben G. (2007), p. 44].

III) L’état d’exception : une nouvelle grille d’analyse pour le coaching.

Nous débutons cette dernière partie en circonscrivant la place qu’Agamben occupe en

sciences de gestion et constatons que sa mobilisation, principalement centrée sur la notion de

dispositif et sur l’archéologie théologique, occulte ses travaux sur l’état d’exception. Nous

montrons ensuite comment l’espace du coaching peut être considéré comme une zone

d’indistinction avant de mettre en évidence la fabrique de l’homo sacer par des techniques

constructivistes.

1. Agamben en sciences de gestion : l’exception oubliée.

Agamben reste assez peu mobilisé en sciences de gestion, surtout si nous comparons sa

présence à celle de Foucault. De quelle façon est-il introduit dans notre corpus disciplinaire ?

En premier lieu par des réflexions qui concernent la théologie [Sørensen et al. (2012) ; Le

Goff (2012)], dans lesquelles nous trouvons plus précisément son archéologie des dispositifs

et sa relecture de la machine bipolaire du pouvoir occidental. Ces deux éléments apparaissent

comme l’application de sa réflexion sur la méthode [Agamben G., (2008)] – le paradigme, les

signatures et l’archéologie –, qui n’est guère citée en sciences de gestion, à l’exception du seul

Duclos [(2008), p. 43]. Tout au contraire, le court écrit que le philosophe italien consacre aux

dispositifs connaît un succès plus important. Nulle surprise à ce constat, étant donnée

l’inflation que connaît le champ sémantique de l’instrumentalité en sciences de gestion :

technologies et instruments de gestion [Berry M. (1983)], outils [Moisdon B. (1997)],

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dispositifs ou encore agencements [Girin J. (1995)]. C’est pourquoi Dumez [(2009), p. 35]

ainsi que Pezet et Pezet [(2010), p. 16] utilisent la définition agambienne du dispositif dans le

cadre de leurs travaux respectifs.

Quels sont les grands absents de cette revue de littérature ? Précisément les premiers concepts

qu’Agamben employa pour prolonger et déplacer les problématiques foucaldiennes : la vie

nue, l’homo sacer, l’exception. Révélateur à ce propos est le passage de l’article de Sørensen

et al. [(2012), p. 272] dans lequel les auteurs parlent tout à la fois d’Agamben et du sacré (le

latin sacer est dans le texte), mais sans aucunement mentionner l’homo sacer. Comme si

l’emballement à propos des dispositifs avait occulté leur origine, et leur enracinement dans

une réflexion qui précède de dix ans l’opuscule qui leur est consacré. Or cette omission a une

double conséquence : soit le regard se porte désormais vers le management comme théologie

sécularisée ; soit l’on mobilise la notion agambienne de dispositif tout en restant dans le cadre

foucaldien. Deux voies pour le moins fécondes mais qui obstruent, chacune à sa manière, le

passage vers une pensée du management comme ensemble de dispositifs de l’état d’exception.

Observons à présent comment le coaching peut se prêter à une telle analyse.

2. Le coaching, une zone d’indistinction.

Afin de saisir le coaching comme un dispositif de l’état d’exception, nous opérerons en deux

temps : tout d’abord, nous montrerons en quoi l’espace du coaching est une zone

d’indistinction ; ensuite, nous mettrons en exergue la fabrique de la vie nue à travers les

méthodes, outils et processus mobilisés dans le coaching.

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Comme le souligne Brophy [(2009), p. 202], le lieu de l’état d’exception est la zone

d’indistinction. Quelles en sont les dimensions ? Edkins [(2000), p. 7] les énumère :

indistinction entre le biologique et le politique, le fait et le droit, l’inclusion et l’exclusion, le

dedans et le dehors. Dimensions auxquelles nous ajouterons celle de l’indistinction entre sujet

et objet relevée par Diken et Lausten [(2002), p. 293].

• Indistinction entre l’inclusion et l’exclusion : sur le plan juridique, la prestation de

coaching est un contrat tripartite signé entre le coach, le coaché et le prescripteur. D’un

côté, le coaché est exclu des activités « ordinaires » de l’organisation qui suspend de fait

provisoirement son autorité ; de l’autre, il soumet sa subjectivité, c’est-à-dire sa vie

privée, à une enquête introspective en vue d’améliorer ses performances professionnelles.

Le coaché se trouve dans la situation de « l’exclusion inclusive » caractéristique de l’état

d’exception.

• Indistinction entre le dedans et le dehors : à la zone d’indistinction créée par le cadre

juridique succède celle qui concerne la spatialité et la géographie du coaching. Si les

séances se déroulent dans les locaux de l’organisation, alors le coaché est dedans tout en

étant dehors (travail sur soi oblige) ; si le coach officie dans ses propres installations, le

coaché est dehors tout en étant dedans (contrat oblige).

• Indistinction entre le fait et le droit : si, juridiquement, le coach est lié à l’entreprise par le

contrat signé, et doit donc accompagner le coaché vers l’atteinte d’objectifs fixés au

préalable par les trois parties, force est de constater que d’aucuns, dans les faits,

considèrent la personne du coaché et son épanouissement comme prioritaires [Fatien P. et

Nizet J. (2011)], parfois en rupture avec le cadre légal : qui pilote le coaching ? Le

prescripteur ? Le coach ? Ou le coaché dont on dit qu’il est le seul acteur de son

développement ?

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• Indistinction entre le biologique et le politique, qui rejoint le clivage précédent entre fait

et droit : le coaché est de prime abord un sujet de droit : d’une part, en tant que travailleur

salarié lié par un contrat de travail à son employeur ; d’autre part, par le contrat d’affaires

qu’est la prestation de coaching. Toutefois, ce sujet juridico-politique s’estompe voire

s’efface devant la naturalisation psycho-biologique du coaché qui s’opère à travers les

techniques de coaching (voir infra le point 3.).

• Indistinction entre le sujet et l’objet : l’une des dimensions du sujet mobilisées dans les

exercices du coaching est le cartésianisme : à savoir cette faculté qu’a l’âme de se

dégager du sujet pour le prendre comme objet de calcul [Rappin (2012)]. La possibilité de

ce dédoublement de soi sur soi autorise le sujet à se créer comme sujet en même temps

qu’il se constitue comme objet lorsqu’il se prend lui-même comme matière de

questionnement. De plus, si le coaché est « l’acteur » du coaching, il n’en reste pas moins

l’objet du contrat.

Si donc, à la suite de cette énumération, nous convenons que le coaching est une zone

d’indistinction, c’est-à-dire le lieu de la vie nue et de l’état d’exception, il nous reste encore à

montrer comment s’opère la fabrique de l’homo sacer.

3. Coaching et désubjectivation.

La désubjectivation résulte de l’adaptation permanente des individus au régime de

l’exception. Ou, formulé en d’autres termes, l’état d’exception réduit l’homme à ses

comportements adaptatifs, ce que l’on pourrait rapprocher de la « vie nue » d’Agamben. La

logique de l’adaptation diffère de celle de la conformité ou, plus exactement, elle l’intègre et

la déborde : alors que la seconde relève de la copie d’une norme fixe (« copie conforme »), la

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première n’est jamais « solide » et arrêtée en ce sens qu’elle doit perpétuellement faire face à

l’exception.

Le coaching, à travers la méthodologie et les techniques qu’il déploie, opère cette fabrique de

l’individu désubjectivé. Le principe de non-directivité, que les coachs héritent de la

psychologie humaniste de Carl Rogers, se traduit par un dialogue à jamais ininterrompu entre

le coaché et son coach, ce dernier adoptant une posture de miroir, c’est-à-dire de

reformulation questionnante. Nulle instance tierce ne saurait venir ici donner le signal de la

fin, sauf celle, strictement fonctionnelle et a-symbolique, de l’atteinte des objectifs. Par

ailleurs, dans ce jeu de questions et de réponses, le coaché est perpétuellement reconduit à lui-

même : le mythe de l’autofondation se noue à cet endroit, dans l’injonction qui est faite au

coaché de trouver en soi, et seulement en soi, les ressources nécessaires pour apporter des

solutions aux questions posées. La subjectivité est ici soumise à un impératif technique : celui

de la résolution du problème, c’est-à-dire de la transparence intégrale de l’homme et du

monde [Rappin (2006b)]. Toute l’intériorité est vouée à être extériorisée, et ce perpétuel dépli

empêche toute forme de résistance d’émerger.

Le discours du coaching insiste fortement sur l’adaptation : c’est ce que confirme l’analyse de

quarante-quatre sites internet de coachs par Fatien [2008]. Cette étude met en évidence d’une

part l’hétérogénéité des pratiques et des attentes, mais d’autre part l’homogénéité dans la

conception normative du coaching comme outil d’adaptation à un contexte marqué par des

crises et des turbulences. Notons toutefois que l’adaptation n’est pas à sens unique : la relation

duelle et fonctionnelle entre la coaché et son environnement implique l’adaptation du premier

au second, et vice-versa. Le processus est sans fin, l’état d’exception permanent, car tout

changement d’un relata modifie la relation elle-même : la frontière entre le sujet et son

environnement s’estompe au profit d’une synchronicité qui appelle la perpétuelle

reconfiguration de la subjectivité au sein des champs de pouvoir et de savoir.

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Prenons un exemple : celui de Véronique, trente-quatre ans et responsable d’une cinquantaine

d’ingénieurs [Devillard O. (2001), p.164-168]. Elle consulte un coach car, seule femme dans

un univers masculin, elle ne supporte plus les remarques sexistes de ses collègues et voudrait

être reconnue pour ses compétences. Sa demande est celle d’une adaptation : « [….] peut-être

mieux intégrer…les sentiments dans la façon dont je peux traiter avec les gens de mon

entourage, enfin au niveau professionnel ». Dès le départ, les aspects moraux et politiques des

préjugés sont écartés au profit d’une approche psychologisante centrée sur la coachée,

l’indistinction entre sujet de droit et sujet biopsychologique est ainsi établie d’entrée de jeu :

« […] la perception que je renvoie aux autres m’amène à dire que je pourrais effectivement

paraître plus féminine […] ». Tout le travail de questionnement et de reformulation aboutit à

remettre en question le style de management de Véronique, qu’elle qualifie de « masculin »,

et l’invite au final à assumer sa féminité au travail. Le raisonnement sous-jacent est le

suivant : les remarques sexistes proviennent d’un style de management inadapté ; Véronique

doit donc changer ses représentations puis ses comportements managériaux afin de pallier ce

problème. La technicité du coaching évacue tout tiers, dans le cas présent celui de la dignité

humaine, et réduit les situations rencontrées à leur pure fonctionnalité. Véronique est toujours

reconduite à son propre cadre de référence ainsi qu’à ses croyances : c’est là le matériau sur

lequel le coach agit pour que le coaché trouve une solution à ses problèmes. Mais loin que ce

mouvement perpétuel n’emmène sa subjectivité à se plier et à inventer des formes de

résistance, il l’assigne constamment à la surface comportementale (« que dois-je faire

pour… ? ») dans un va-et-vient permanent avec l’environnement : il ne s’agit donc pas

seulement de se conformer à des normes attendues, car celles-ci sont trop nombreuses et

changent très vite, mais d’ « apprendre à apprendre », c’est-à-dire de se vivre soi-même sur

fonds d’instabilité et d’exception.

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La place de l’autofondation et des relations duelles dans le coaching s’expliquent si l’on prend

la peine d’envisager l’histoire de cette pratique. Une recherche généalogique [Rappin (2013)]

montre son origine au Nouvel Âge, à l’école de Palo Alto ainsi qu’à la cybernétique : ses

fondements sont constructivistes, et les techniques d’accompagneme²nt qui en découlent font

appel à la logique de la communication (entre autres, Paul Watzlawick), à la programmation

neurolinguistique (Richard Bandler et John Grinder), à l’analyse transactionnelle (Eric

Berne), à la Gestalt-Thérapie (Fritz Perls) ou encore à la psychologie humaniste (Carl Rogers

et Abraham Maslow). Autant de courants et de techniques qui proposent une compréhension

de l’homme comme « être relationnel » [Wittezaele J.-J. (2003)] et qui donnent le primat alors

à la communication et au traitement de l’information, c’est-à-dire au travail sur les cadres de

référence (cadrage-recadrage, programmation-déprogrammation). Le fonctionnement

cognitivo-comportemental est l’objet central de l’intervention du coaching : le coach

recherche l’adaptation, réactive ou proactive, du coaché à son environnement. Le

constructivisme, entendu ici comme la capacité de l’être humain à fabriquer la réalité, justifie

philosophiquement l’autofondation et la reconnaissance de la toute-puissance du potentiel des

coachés : l’anthropologie qu’il propose est le levier de l’adaptation permanente des individus

au régime de l’exception généralisée.

Conclusion

Le coaching est un lieu de biopouvoir : mais loin d’être une technique de gouvernement

permettant un processus de subjectivation, il est avant tout un dispositif désubjectivant de

l’état d’exception : une zone d’indistinction où se joue la fabrique de l’homo sacer. Dans cette

pratique d’accompagnement, l’individu est non seulement le témoin mais, plus encore,

l’acteur de sa propre désubjectivation.

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Une première piste d’approfondissement de notre réflexion consisterait à comparer les

analyses de la désubjectivation menées ici à partir de Foucault, Deleuze et Agamben, avec

celles, plus marquées par la tradition psychanalytique, de Legendre et Stiegler. Car cette

question est au centre des préoccupations de ces deux auteurs : pour le dire avec

Legendre [(2005), p. 99-100] : « la question de la désubjectivation est à l’ordre du jour. Plus

précisément, la question de la casse du sujet […] surgit devant nous » ; et avec Stiegler : « Le

capitalisme a besoin de contrôler les comportements et pour cela il développe des techniques

de captation du désir, qui sont aussi une massification de ce désir, ce qui conduit

tendanciellement vers une destruction du désir, parce que c’est inévitablement une destruction

de la singularité » [Stiegler B. (2008), p. 95)]. Les pensées de Legendre et Stiegler peuvent-

elles être mobilisées pour compléter les analyses précédentes ? Et si oui, de quelle façon ?

En outre, le regard porté ici sur le coaching ouvre la voie à l’analyse d’autres dispositifs

managériaux. Il semblerait en effet, en suivant Boltanski et Chiapello, que l’ensemble du

management contemporain soit frappé du coin de l’instabilité, de l’urgence et de l’adaptation :

jamais le slogan du « changement permanent » n’a connu autant de succès. L’exception

pourrait s’avérer être une catégorie originale permettant de subsumer sous son chapeau un

ensemble de « pratiques » et de « notions » apparemment hétérogènes : l’entreprise agile (qui

s’adapte et anticipe les évolutions de l’environnement), la génération Y (que l’on décrit,

malgré les réfutations des études scientifiques, comme la génération du zapping), ou encore le

leadership charismatique (qui sait s’adapter à l’incertitude) sont des illustrations d’une

possible extension de la pensée d’Agamben à d’autres champs de la gestion et du

management.

Bibliographie

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