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Le syndrome de l'intestin irritable: intérêt du microbiote ...

Date post: 27-Nov-2021
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HAL Id: dumas-01552088 https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01552088 Submitted on 30 Jun 2017 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Le syndrome de l’intestin irritable : intérêt du microbiote intestinal et place du pharmacien d’offcine dans le parcours de soin du patient Grégory Hugues To cite this version: Grégory Hugues. Le syndrome de l’intestin irritable : intérêt du microbiote intestinal et place du pharmacien d’offcine dans le parcours de soin du patient. Sciences pharmaceutiques. 2017. dumas- 01552088
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HAL Id: dumas-01552088https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01552088

Submitted on 30 Jun 2017

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Le syndrome de l’intestin irritable : intérêt dumicrobiote intestinal et place du pharmacien d’officine

dans le parcours de soin du patientGrégory Hugues

To cite this version:Grégory Hugues. Le syndrome de l’intestin irritable : intérêt du microbiote intestinal et place dupharmacien d’officine dans le parcours de soin du patient. Sciences pharmaceutiques. 2017. �dumas-01552088�

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UniversitédeBordeauxU.F.R.DESSCIENCESPHARMACEUTIQUES

Année2017 N°49

Thèsepourl'obtentionduDIPLOMEd'ETATdeDOCTEURENPHARMACIE

PrésentéeetsoutenuepubliquementLe09Juin2017àBordeaux(Gironde)

ParGrégoryHUGUESNéle15Juin1992àBrou-sur-Chantereine(Seine-et-Marne)

LeSyndromedel’intestinirritable:intérêtdumicrobioteintestinaletplacedupharmaciend’officine

dansleparcoursdesoindupatient

DirecteurdethèseFrançoiseAMOUROUX

Jury

MmeIsabelleBERQUE-BESTEL ProfesseurdesUniversités Président

MmeFrançoiseAMOUROUX Pharmaciend'Officine Directeur

MrMarcDUFRENNE Pharmaciend'Officine Juge

MrBernardMULLER ProfesseurdesUniversités Juge

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REMERCIEMENTS

Je tiens toutd'abordà remercierMmeAmouroux,pour avoir acceptédedirigermathèse,etpour son investissement,en tantquedirectricede thèsebien sur,maisaussientantquepharmaciend'officineetprofesseurassociée.Mercid'apporterduconcretdanslesenseignementsuniversitairesetdenousfairepartagervotreexpérienceducomptoiretlesanecdotesdevotrevieprofessionnelle.Votreengagementquecesoitauprèsdel'Ordre,del'université,delaformationcontinueetdesétudiantsvoushonoreetgrandit laprofessionde pharmacien.Nous avons besoin de gens comme vous pour faire progresser les chosesdansnotremétier.

MerciégalementàMmeBesteld'avoiracceptéd'êtremaprésidentedejury,ellequia

tantœuvré au sein de la faculté pour faire en sorte que nos études et leur organisationsoient améliorées d'année en année malgré le contexte de réforme. C'est grâce à desinitiatives comme les vôtres et votre engagement, que la relation entre étudiants etprofesseurs ne pourra qu'être émulatrice et aboutir à des changements positifs dans laperspectivedelarefondationdesétudesdepharmacie.

Merci à Mr Dufrenne d'avoir été mon maitre de stage durant mes derniers mois

d'étudiant.Vousfaitespartiedecesgensquiontpourvaleurlatransmissiondusavoiretlesentiment d'apporter quelque chose chez les personnes que vous avez l'occasion derencontrer. C'est une force, gardez toujours cet esprit en vous. J'ai été ravi d'être votrestagiaireetemployédurantlesderniersmois.

Merci àMrMuller d'avoir acceptémon invitation dansmon jury, etmerci de nous

avoiraccompagnétoutaulongdenotrevieétudiantedanslabonnehumeuretl'entraide.Jegarderaisdessouvenirsancrésdemavieétudianteengagée,courtemais intense,dans lesdifférentsconseilsetcommissions.Merciégalementd'avoirtoujours,quandilétaitpossible,donné la parole aux étudiants. C'est grâce à cela que les évolutions dans l'université, àBordeauxouailleurs,pourrontêtreprogressistesetnovatrices.

Merciàtousceuxquiontpuassisteràlasoutenancedemathèse,etàtousceuxqui

m'ont accompagné durantmes 6 années de pharmacie.Merci à Léa, Julie et Elodie,mesamies les plus fidèles qui m'ont accompagné depuis le lycée où on s'est clairement bienmarrés.Merciàmescolocatairesetamis,Sarah,Olivia,BenjaminetSylvain,avecquimalgrétous les rebondissements qui ont secoué nos vies, j'ai passé lesmeilleures années demacourteexistence.Jen'oublieraijamaislesmomentspassésavecvous.ToutparticulièrementSarah,quigrâceàelle,mavien'aurapujamaislemêmegoutetlemêmesens.Jepensequedansuneautrevie,nousaurionsétéfrèreetsœur.MerciBenjaminpourtonapportdanslarédaction de ma partie phyto/aroma, je pense que dans une prochaine vie tu serasréellementunFicusbenjamina.

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Merciàmesamiesquiellesm'ont subi,m'ontaccompagné,m'ont faitmarré,m'ontfaitm'énerver,m'ontfaitpartirenvacances,m'ontfaitdébattre,m'ontfaitdécouvrir,m'ontfaitgrandir,m'ontfaitaimer,m'ontfaitdétester,m'ontfaitpartagerlesmeilleursmoments:Maëva, Agathe, Laura,Marina, Clara, Solène, Pauline et Fanny. Lesmoments passés avecvousontétéetserontlesmeilleurscommetoujours.MerciénormémentMaevapouravoirdesheuresdurant reluma thèsepourquecelle-ci soit lisible !Merci àAgathe,enqui j'aitrouvéuneamie,maisqui est égalementquelqu'und'exceptionnel.Rare sont les femmescommetoi,nechangejamais,j'espèretegarderauprèsdemesamitiéslesplusforteslepluslongtempspossible.

Merci également à l'ensemble des collègues qui m'ont accompagné durant mesdifférentes expériences enofficine.A la pharmaciePiat deVillandrautoù j'ai débuté, à lapharmaciedelaRocadedeVillenaved'OrnonetàlapharmacieMarbotindeMérignac,quim'ontdonnél'enviedecontinueràœuvrerpourlaprofessiondepharmacien.

Enfinmerciàmafamille,papa,maman,quim'ontaccompagnéetaimédepuiscelundi

15juin1992,quim'ontnourri, logé,habillé,scolarisé,aimé,engueulé,élevé,émancipé,etquiont fait l'hommeque je suis aujourd'hui.Merci d'avoirpu concrétisermes rêves,mesdésirsetd'avoirpuaccéderàdesgrandesétudes.Mercid'êtretoujourslàpourmoi,jevousaime.

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TABLEDESMATIERES

INTRODUCTION……………………………………………………………………………..4LISTEDESABREVIATIONS……………………………………………………………….6

I.Lesyndromedel'intestinirritable..............................................101)Définition,symptomatologie.................................................................102)Epidémiologieetaspectsévolutifsdelamaladie...................................133)Physiopathologie,étiologies..................................................................17

a)Troublesdelamotricité...........................................................................................................17b)Troublesdelasensibilitéetanomaliesdu"brain-gutaxis".....................................................22c)Micro-inflammationdelamuqueuseintestinale.....................................................................27d)Etiologiesparticulières.............................................................................................................30e)Rôledumicrobioteintestinal...................................................................................................31

II.Priseenchargethérapeutique..................................................561)Traitementsmédicamenteuxactuelsetfuturs.......................................56

a)Antispasmodiques....................................................................................................................56b)Laxatifs.....................................................................................................................................60c)Antidiarrhéiques.......................................................................................................................63d)Argiles,silicatesetadsorbantsintestinaux..............................................................................64e)Antidépresseurs(tricycliquesetISRS)......................................................................................68f)Médicamentsagissantsurlesystèmesérotoninergique.........................................................70g)Autrestraitementsanecdotiquesouàvenir...........................................................................74

2)Traitementsnonmédicamenteux..........................................................75a)Modificationsdurégimealimentaire.......................................................................................76b)Thérapiesalternatives.............................................................................................................91c)Thérapeutiquesnaturelles.......................................................................................................95

III.Utilisationdesprobiotiquesdanslesyndromedel'intestinirritable......................................................................................1021)Définitions,origine,méthodesdefabrication......................................1022)Usages,indications,sécuritéd'emploi.................................................1143)Etudesetessaiscliniquesdansletraitementdusyndromedel'intestinirritable...................................................................................................124

IV.Interventiondupharmaciend'officinedanslapriseenchargedusyndromedel'intestinirritable...................................................133CONCLUSION……………………………………………………………………………..143ANNEXES……………………………………………………………………………………144BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………….154

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LISTEDESANNEXESAnnexe1:QuestionnaireIBS-QoL…………………………..……………………………………146Annexe2:QuestionnaireSF-36……………………………………………………………………148Annexe3:MédicamentsutilisésenGastro-entérologie……………………………….152Annexe4:Teneurmoyenneenfibresdesaliments……………………………………..154Annexe5:RésumédesdifférentstraitementsduSIIenconseilspharmaceutiques………………………………………………………………………………………….155

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INTRODUCTION

Le syndrome de l'intestin irritable est une maladie méconnue en France. Nonseulement par les médecins, qui la perçoivent soit comme un syndrome inventé par lesindustries pharmaceutiques ou soit comme une nouvelle pathologie psychosomatique àlaquelle les patients dits névrosés se réfèrent comme source de tous leurs maux. Maiségalement incomprise par les patients eux-mêmes, qui au décours de leur rechercheinternetpourensavoirdavantagesurleurssymptômes,s'auto-diagnostiquentcesyndrome,alorsqu'ilssouffrentd'unebanaleconstipation.Lagastro-entérologieestundomainedelasanté qui nous touche quotidiennement au comptoir en pharmacie d'officine. Lesmédicamentsetlesproduitsdesantéquis'enréfèrentfontpartiedesplusgrossesventesenofficineaprèsledomainedel'antalgie.

De nos jours, de nombreux fantasmes et parfois des doutes entourent notre

alimentationquotidienne.Eneffet,desscandalesconcernantdeprèsoude loin l'industrieagro-alimentaire ou l'agriculture éclatent et remettent en cause notre mode de vieoccidental et notre façonde s'alimenter, notamment via les plats industriels. Les patientsayantdessymptômesgastro-intestinauxàtypededouleursabdominales,deballonnementsoude troubles du transit y voient commeune conséquencede la "malbouffe", de l'excèsd'additifs dans les produits alimentaires vendus en grandes surface ou même parfois dumoded'alimentationactuelmajoritairedansnotresociété.Commelefaitdemangerde laviande,desproduitslaitiersoudescéréalescontenantdugluten.Ceteffetdemodeestdeplusenplusprésentdans lesmentalitésdespersonnesquiontungrand intérêtpour leursantéouleurbien-êtreetcelledeleurfamille.Cettemêmemodesuitlatendanceactuellequivadumangersain,manger"healthy",auvégétarisme,véganismeetautresrégimesdits"paléo"quiinondelesréseauxsociaux,forumsdediscussionoumêmeslesrayonnagesdeslibrairies.Carcestendancesdemodesdeviequirentrentdans lacasedesrégimes"sans"comme le régime sans lactose ou sans gluten, demeurent une véritable source de profitspour certains acteurs de l'édition, de l'industrie agro-alimentaire ou encore de l'industriepharmaceutique. Elles y voient une nouvelle manne pour que cette population, qui nesouhaite plus consommer de viande ou de produits laitiers, puisse acheter de nouveauxproduitsditstendances,souventpluschersquelesproduitsdeconsommationstandards.Demêmequecestendancessontsouventvécuesparcertainespersonnescommeunnouveaudogmeàappliquerdansleurviequotidienne,souspeinedebouleversementcompletdeleuréquilibrephysiqueetmental.Lespatientsnousimposentrégulièrementleurspréceptesaucomptoir. Parfois même en remettant en cause le diagnostic de leur médecin ou notreconseil.

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J'ai vécu depuis le début de mon expérience en officine l'arrivée de nombreuxcompléments alimentaires dans les rayonnages de nos espaces de ventes, et notammentceuxàbasedeprobiotiques.Cemotprobiotique,quivadepairavecceluidemicrobioteoude flore intestinale,nous l'entendonsà longueurde journéequece soit au comptoir, à latélévision,dans les journauxoudans labouchedecertainscommerciaux. Ilsnousvententles mérites de petites bactéries qui solutionnerait les problèmes de pans entiers desdysfonctionnements de notre organisme : troubles gastro-intestinaux, défensesimmunitaires, prévention des cancers, traitement de certaines maladies auto-immunes,prévention de l'allergie, de l'atopie, de l'eczéma, éradication d'Helicobacter pylori, et plusencore.Lesbactériesquionttantétécombattuesavecacharnementdurantunsièclesuiteàladécouvertedesantibiotiques,seraientau21esièclenosamiespourlavie?Deplus,descomplémentsalimentairesàbasedeprobiotiquessortentenvirontouslestroismoisetlescommerciaux redoublent d'efforts pour nous vendre un nouveau produit miracle quiréglerait comme par magie l'ensemble des symptômes des patients, même parfoiscontradictoires.Monespritdecuriositéetmonanalysecritiquem'ont fait réfléchirsur lestenantsetlesaboutissantsdusuccèsgrandissantdesprobiotiquesetdel'intérêtàlafoisdeschercheursetdugrandpublicsurlesbactériesdenotreintestin,etrechercherlavéritésurcelles-ci.

Durantmacourteexpérienceaucomptoir,nombreuxontétélespatientsquisesont

interrogéssurleurstroublesintestinaux.Cetypedetroublesestsouventmalvécu,mêmesicelapeutparaîtrebénin. Lesmédecinsgénéralistes consultésparfoispour ces symptômesn'yportent souventpas grand intérêtetn'informentpas réellement leurspatients sur lesconduites à tenir, les causesou lesoriginesde cette typologiede symptômes.Alors ils setournentversnous,pharmaciens,enpartageantleursdoutesmaisaussiparfoisenémettantdesvérités toutes faites,affirmantqu'uneseulecausepourraitêtre l'originede tous leursmaux et lesmêmes refrains reviennent à chaque fois, avec des phrases comme : "je suisallergiqueaugluten", "je suis allergiqueau lactose", "j'ai le côlon tout irrité", "jenepeuxplusrienmanger","j'aibesoindenettoyermoncôlon".Ces témoignagesm'interpellentetmefontm'interroger:cessymptômessontréellementvécusparcespatientsetleurgâcheleur vie, quelles en sont les causes ? Quelle est la physiopathologie de ce syndrome ?Comment peut-on définir rationnellement le syndrome de l'intestin irritable ? Quellesréponses apporter à ces patients ? Celles-ci doivent-elles être systématiquementmédicamenteuses?Lesdifférentsrégimesques'imposentlespatientssont-ilsrationnelsetefficaces ? Les vérités affirmées par certaines pseudo-thérapeutiques sur internet et lesréseauxsociauxont-ellesdesfondements?Lemicrobioteintestinala-t-ilvraimentunrôleàjouer dans cette maladie ? Les probiotiques ont-ils un intérêt dans l'amélioration dessymptômes?

C'estlaréponseàtoutescesquestionsquim'adonnéenviederédigerunethèsesur

cethème.Larecherchedelavérité,démêlerlevraidufaux,expliqueretfairecomprendreaux patients et professionnels de santé les tenants et les aboutissants de cette vérité, cesontcesmotivationsquim'ontpousséàrédigerunethèsesurcettemaladiequirecoupede

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nombreux domaines de la santé comme la gastro-entérologie bien sur mais aussi lanutrition,lapharmacologie,lamicrobiologieouencorelaphytothérapieoul'aromathérapie.Egalement,lerôlequepeuxjouerlepharmaciend'officinedanslapriseenchargedecettepathologie chronique, et qu'est-ce que peut apporter celui-ci concrètement dansl'amélioration de la qualité de vie du patient et de ses symptômes. Dans cette thèse,j'aborderais quatre parties : une première sur la définition du syndrome de l'intestinirritable. Sa physiopathologie, ses origines, ses symptômes, son diagnostic. Un focus seraégalementfaitsurlerôledumicrobioteintestinal.Dansundeuxièmetemps,j'aborderaislesdifférents axes thérapeutiques de cette maladie, avec les traitements médicamenteuxclassiquesouditnaturels,etnonmédicamenteux.Dansunetroisièmepartie,j'aborderaislaquestiondesprobiotiques, leurdéfinition, leur intérêtengénéral etplusparticulièrementdansletraitementdusyndromedel'intestinirritable.Enfin,jeferaislepointsurlerôlequepeut jouer le pharmacien d'officine dans la prise en charge d'un patient atteint de lamaladie,quecesoitentantqu'accompagnateurd'unepriseenchargemédicaleouinitiateurd'untraitement.

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LISTEDESABREVIATIONS5-HT:5-hydroxytryptophane=sérotonineAFSSA:Agencefrançaisedesécuritésanitairedesaliments(ex-ANSES)AGCC:AcidesgrasàchainecourteANSES:Agencenationaledesécuritésanitairedel'alimentation,del'environnementetdutravailANSM:AgencenationaledesécuritédumédicamentetdesproduitsdesantéC-SII:SIIavecconstipationprédominanteCGRP:CalcitoningenerelatedpeptideCMM:ComplexemoteurmigrantD-SII:SIIavecdiarrhéeprédominanteDGCCRF:Directiongénéraledelaconcurrence,delaconsommationetdelarépressiondesfraudesEFSA:EuropeanFoodSafetyAuthorityECR:EssaicontrôlérandomiséFAO:FoodandAgricultureOrganizationoftheUnitedNationsFDA:FoodandDrugAdministrationFODMAP:Fermentable,Oligo-,Di-,Mono-saccharidesAndPolyolsHAS:HauteautoritédesantéIBS:IrritablebowelsyndromeISRS:InhibiteurssélectifsdelarecapturedelasérotonineM-SII:SIIavecalternancediarrhée-constipationMICI:Maladieinflammatoirechroniquedel'intestinNFκB:Nuclearfactor-kappaBNMDA:N-méthylDaspartateOMS:OrganisationmondialedelasantéPAMP:Pathogen-associatedmolecularpatternsPEG:PolyéthylèneglycolPI-SII:SIIpost-infectieuxPNNS:ProgrammenationalnutritionsantéSII:Syndromedel'IntestinIrritableTFI:TroublesfonctionnelsintestinauxTLR:TolllikereceptorUE:UnionEuropéenneVIP:VasoactiveIntestinalPeptide

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I. Lesyndromedel'intestinirritable

1) Définition,symptomatologie

Lesyndromedel’intestinirritable(SII)estuntroublefonctionnelintestinaldanslequeldesdouleurs abdominales et/ou un inconfort digestif sont associés à lamodification dutransit intestinal et de la consistance des selles. Un ballonnement et/ou une distensionabdominale sont également fréquemment associés. Il est également appelé syndromeducôlon irritable ou colopathie fonctionnelle et fait partie de la grande famille des troublesfonctionnels intestinaux. Autrefois pathologie non codifiée et parfois considérée commesyndrome psychosomatique, il est désormais acquis comme trouble à part entière dufonctionnementdelapartiebassedusystèmedigestif.

LescaractéristiquesdecettemaladiesontdécritesdanslescritèresdeRome1,quisont

descritèresélaboréspardesgastro-entérologuesexpertsdumondeentier réunisàRomepour différencier les différentes grandes symptomatologies des troubles fonctionnelsintestinaux.Actuellement,ilexistequatrecritèresaveclescritèresdeRomeI(1992)quiontétélespremiersàêtrepubliés,puislescritèresdeRomeII(1999),III(2006)etIV(2016)pourles plus récents. Chacun de ces différents critères rassemble les différents symptômes dusyndrome, leurs caractéristiques, leur fréquence et leur durée. Ils sont de plus en plusrestrictifsaufuretàmesuredescongrèsdeRome.

CritèresdeRomeIII1:Syndromedel'IntestinIrritableDouleur abdominale ou inconfort digestif (sensation abdominale désagréable nondouloureuse)survenantaumoins3joursparmoisdurantles3derniersmoisassociéavecaumoins2descritèressuivants:

- Améliorationparladéfécation- Survenueassociéeàunemodificationdelafréquencedesselles- Survenueassociéeàunemodificationdelaconsistancedesselles.

Les sous groupes sedéfinissent en fonctionde la consistancedes selles selon l'échelledeBristol(type1à7):

SIIavecconstipationprédominante(C-SII)

Bristol1-2≥25%dutemps Bristol6-7≤25%dutemps

SIIavecdiarrhéeprédominante(D-SII)

Bristol1-2≤25%dutemps Bristol6-7≥25%dutemps

SIIavecalternancediarrhée-constipation(M-SII)

Bristol1-2≥25%dutemps Bristol6-7≥25%dutemps

SIInonspécifiéabsencedecritèressuffisants

pourrépondreauxcritèresdesautresSII

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Figure12:EchelledeBristol

CritèresdeRomeIV3:Syndromedel'IntestinIrritable

Douleur abdominale survenant, enmoyenne, aumoins un jour par semaine durant les 3derniersmoisassociéeavecaumoins2descritèressuivants:

- Douleurenrelationavecladéfécation- Survenueassociéeàunemodificationdelafréquencedesselles- Survenueassociéeàunemodificationdelaconsistancedesselles.

Il existe certaines manifestations extra-digestives1 : fatigue chronique, céphalées,

lombalgieschroniques,symptômesurinaires,dyspareunie,fibromyalgie,syndromedevessiedouloureuse.Maiscessymptômessontassociésàdesformesplussévèresdelamaladie.Deplus, 50% des patients SII ont des traits de personnalité anxieuses, dépressives ouhypochondriaques.De tous temps, les troubles fonctionnels intestinauxontétéassociésàdes patients ayant un terrain anxiogène très marqué. Il existe bien un lien entreexacerbationdessymptômesetépisodesdestressmaisiln'existepasd'échelledemesurepourévaluercelien.

Ces critères sont avant tout utiles pour inclure des groupes de patients dans desétudescliniquesafind'obtenirdeséchantillonsdepatientshomogènes.Enpratique,ilssontpeu utilisés par les médecins spécialistes, voire pas du tout par les généralistes, mais ilspeuventserviràfaireconnaîtrelamaladieauprèsdesmédecinsgénéralistesafind'améliorerlediagnosticetlapriseenchargedespatients1.

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Cescritèresdedéfinitionspermettentd'améliorerlesphasesdudiagnosticcarcelui-ciest très complexe. En effet, il est, la plupart du temps, undiagnostic d'exclusion dans leprocessus de recherche d'une anomalie organique du tube digestif, avec présences desymptômes intestinaux. De nombreux patients sont également inquiets des perturbationsengendrées par la pathologie et ont peur du diagnostic, et notamment d'une éventuelleannonced'un cancerdu côlon.4Or,dans laplupartdes cas, il ne s'agit enaucun casd'uncancer.LespatientssouffrantduSIIontunrisquedecancerducôlonidentiqueàceluidelapopulation générale.4 En conséquence, lorsqu'un patient consulte son médecin pour lessymptômes du SII, le praticien aura pour objectif d'éliminer tous les autres diagnosticsdifférentiels en prescrivant des examens complémentaires, assez couteux pour la plupart,comme une endoscopie, haute et/ou basse, des bilans sanguins, une échographie, unetomodensitométrie, etc… Cela engendre de nombreux surcouts pour la Sécurité Sociale5alorsquelediagnosticduSIIpeutêtreassezsimple,grâceàl'utilisationdescritèresdeRomeet la recherche de signes d'alarme décrits par les sociétés savantes en Hépato-gastroentérologie1,4.

Le diagnostic du SII repose donc sur le respect des critères de Rome dans les

symptômes décrits par le patient, et la recherche de signes d'alarme. En 2013, la SociétéNationaleFrançaisedeGastro-entérologiearetenu5signesd'alarmeàrepérer6:

- unâgesupérieurà50ans- laprésencedesangdanslessellesoud’anémie- dessymptômesnocturnes- unamaigrissement- uneapparition/modificationrécentedessymptômes.

Endehorsdecessignesd'alarme,quipeuventorienterversundiagnosticdifférentieldontlepronostic est plus grave, le diagnostic du SII peut être posé sans autres examenscomplémentaires. Il existe cependant une exception en ce qui concerne le D-SII, où lacoloscopieet lafibroscopiepeuventpermettred'éliminerunecolitemicroscopiqueouunemaladie cœliaque. La coloscopie, souvent effectuée en complément de la démarchediagnostique, ne doit rentrer en compte que dans le cadre d'un dépistage de cancer ducôlon,enrespectantlesrecommandationsactuelles. Il existe un certain nombre de diagnostics différentiels, que lemédecin doit exclureassezrapidement1,4,6:

- Maladie cœliaque : cette maladie auto-immune est caractérisée par la présenced'auto-anticorpsagissantcontreleglutencontenudanscertainescéréalescommeleblé, l'orge ou le seigle. Le diagnostic de cette pathologie repose sur la recherched'anticorps anti-endomysium et d'anticorps anti-transglutaminase. Leur présenceconduit à une biopsie du grêle et une recherche d'aspects histologiques de lamuqueuse intestinale caractéristiques est effectuée7. Dans la plupart des cas, larecherche des anticorps chez un patient atteint de SII se révèle négative, et laprescriptionmêmedecetterechercheserévèleinutile4.

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- Intolérance au lactose : le déficit en lactase, enzyme permettant la digestion dulactose, sucre naturellement présent dans le lait, est assez élevé dans les paysoccidentaux (23% en France). Des études ont démontré que la prévalence del'intoléranceau lactosechez lespatientsatteintsdeSIIétaitde23à25,8%,autantquelapopulationgénérale.Iln'yadoncpasd'intérêtàdépisterledéficitenlactasecard'autantplusquelerégimed'évictionest,laplupartdutemps,faitparlepatientdelui-même1.

La démarche diagnostique doit également faire appel aux capacités d'attention et

d'écoutedumédecingénéralisteouspécialiste1. Lapriseencharge initialedupatientdoitdébuterparuninterrogatoiresoigneuxprécisantletypeetl’anciennetédessymptômes,lessignesdegravité,lesantécédentspersonnelsetfamiliauxenparticulierslesantécédentsdecancers digestifs. Souvent, le patient consulte pour un symptôme prédominant (douleurabdominale,ballonnement,troublesdutransit)etc'estaumédecind'orienterlesquestionsde son interrogatoire pour évoquer l'éventualité d'un diagnostic de SII. Les prisesmédicamenteusesantérieures(antispasmodiques,modificateursdutransit,antidépresseurs)devrontêtresoigneusementrecherchéesafind'affinerletraitementàproposer.Demême,ilest important de noter les traitements associés pour une autre pathologie dont certainspeuventinduireoumajorerl’intensitéd’unsymptômedigestif.Unexamencliniquecompletseraégalementréalisé.

Auparavant, la démarche diagnostique du SII reposait sur l'éviction d'autrespathologies organiques et des différents diagnostics différentiels, aboutissant à undiagnostic d'exclusion. Désormais, elle consiste au respect des critères de Rome et àl'absencede signesd'alarme. Si cesdeux critères sont respectés, lediagnostic de SII peutêtreposéet letraitementpeutdébuter.S'ilyaprésencedesignesd'alarme,desexamenscomplémentairespeuventalorsêtreprescritsafindemieuxcernerlapathologiedupatient.

2) Epidémiologieetaspectsévolutifsdelamaladie

Selond'anciennesétudes,àl'époqueoùlescritèresdeRomen'étaientpasétablis, laprévalenceduSIIétaitde10 à 20%dans lespays industrialisés.5Depuis leurcréation,ceschiffresont tendanceàbaisser,nonpaspar ladiminutiondenombredemaladesatteintspardestroublesfonctionnelsintestinauxmaisparl'augmentationducaractèrediscriminantdescritèresd'inclusiondansleSII.Laprévalencedecettepathologieestàpeuprèslamêmedanslesautrespaysdumonde,avecdesdifférencesconcernantlescritèresdediagnosticdusyndrome (critères de Rome I, II ou III, critères de Manning ou d'autres critères)8.Cependant, si l'on compile les différentes études épidémiologiques concernant le SII, leschiffres peuvent être très variables voire contradictoires. Cela est dû au fait que lesmodalités de sélection des patients peuvent varier selon le critère utilisé. Les symptômespeuvent rester, dans certains cas, très subjectifs et les études sont plus ou moinsrigoureuses.

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EnFrance, leschiffresconstatésdans lesdifférentesétudessontcomparablesàceuxobservésdans lesautrespaysoccidentaux9,10.Deuxenquêtesdatantde2004réaliséesparBommelaeretal.ontété réalisées surunéchantillon représentatifde lapopulationet lescritèresdeRomeIIontétéutilisés.Danslapremièreétude,onretrouveuneprévalencede4,7%alorsquedanslasecondeétude,laprévalenceestde1,1%.Cesontlescritèreslesplusrécentsquiabaissentletauxdeprévalencecarilssontplusrestrictifsentermesdedurée.Laprévalence chez les femmes est très importante avec un sex ratio de 2, sans qu'aucunélément ne l'explique. Dans certains pays, ce sex ratio s'inverse8. La classe d'âge où l'onrencontre fréquemment cette pathologie se situe entre 40 et 50 ans. Il s'agit d'un despremiersmotifsdeconsultationenGastro-entérologie4.LeSIIestunepathologiechronique,dufaitdesadéfinition,maisaussidesonretardaudiagnostic.Lessymptômesressentisparlespatients,etnotammentlesdouleursoul'inconfortabdominal,sontretrouvéspresque10ansauparavantdanslaplupartdesétudes10.LesdifférentescatégoriesdeSIIsontrépartiesuniformémentdanslapopulationtouchée5,9.

Chez les patients atteints de SII, on retrouve plusieurs comorbidités associées.

Notamment les pathologies psychologiques comme l'anxiété, la dépression, la peur enrelationaveclessymptômes8.Maisilenexisted'autrescommeladyspepsie,lerefluxgastro-œsophagien, la fibromyalgie, le syndrome de fatigue chronique, le syndrome de vessiedouloureuse ou cystite interstitielle6,11. On voit bien qu'il existe un lien entre pathologiespsychologiques,somatisationetSII,maison leverraplustard, ilnes'agitpasde l'alphaetl'omégadecettepathologie.

L'évolution du SII se caractérise par des phases dites de "poussées", brèves, de

quelques jours, entrecoupéesdephasesde "rémissions", brèves également. L'analysedesdonnéesmontre que l'amélioration clinique précoce à troismois concerne 20 à 40% despatients mais qu'à long terme, 60 à 70% des patients restent symptomatiques12. Lapathologie se caractériseégalementpar la variabilitédes symptômesen intensitéetdansleurexpression.Certainspatientspeuventpasserd'unecatégoriedeSIIàuneautreaucoursde l'histoire de leur maladie. De plus, la fluctuation de leurs symptômes s'associe à lavariabilitédesréponsesthérapeutiquesselonleparcoursdesoindespatients.

Chez les patients M-SII, les poussées symptomatiques sont brèves et durent moinsd'unesemaine.Maiselles reviennent fréquemmentcar la rémissionpour2/3despatientsarrive dans les 3 jours12. D'où l'intérêt, on le verra par la suite, des thérapeutiques quiagissentrapidement.Cependant,à longterme(horizondes2ans),30à50%desmaladesont une intensité inchangée des symptômes, chez 2 à 18% d'entre eux, on observe uneaggravation et pour le reste de l'échantillon, les symptômes ont disparus ou ont étéaméliorés. Globalement 30 à 40% des SII vont voir leurs symptômes disparaître à termemaisl'évolutionrestenonprédictible.S'ilexistedesfacteursdecomorbiditépsychologiquenégatifschezlespatients,celaauneimportancenotablesurl'évolutiondeleurssymptômesetleurintensité.

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Lespatientsqui consultentunmédecindans le cadrede lapriseen chargede leursdouleursoudeleurinconfortintestinal,consultentdansunpremiertempsleurgénéraliste,puisselonleuraméliorationunspécialiste,habituellementungastro-entérologue.Selonuneétudesurlestroublesfonctionnelsintestinauxportantsurplusde1400patients13,aucoursdes12derniersmois,lenombredeconsultationsliéesàlapriseenchargedesTFIaétéde5,7 ± 4,5 dont la majorité par le médecin généraliste (3,4 ± 3,3). Le nombre moyen deconsultationsavecungastro-entérologuedansl'annéeécouléeaétéde2,3±2,1.Doncdanslaplupartdescas,lespatientsconsultentdansunpremiertempsleurgénéralistepourleursymptômes,puisdansunsecondtempsungastro-entérologue.

Le SII étantunepathologie chronique, il aun impactprononcé sur laqualitédevie.

Dans les études concernant l'impact de la maladie sur la qualité de vie des patient, lesquestionnairesd'évaluationutiliséssontl'IBS-QoL(Annexe1)oudesquestionnairesdesantégénéraux comme le SF 36 (Annexe 2).5 Le questionnaire SF 36, est un questionnairegénéralistesurlaqualitédevieetévalue8dimensions:activitéphysique,limitationsduesàlasantéphysique, limitationsduesàdesproblèmesémotionnels,vitalité/fatigue,bien-êtreémotionnel,comportementsocial,douleur,santéglobale.Unitemsupplémentaireconcernelaperceptiondechangementsdansl’étatdesantéparrapportàl’annéeprécédente.L’autreéchelle,spécifiquedemaladie,est l’IBS-QoL(IrritableBowelSyndromeQualityofLife).Elleévalue 9 dimensions : santé émotionnelle, santé mentale, sommeil, vitalité, activitéphysique, retentissement physique, alimentation, relations sexuelles, retentissementsocial14.Lesélémentsleplussouventperturbéssontlesactivitésquotidiennesdebase,leshabitudesalimentaires,laviesexuelleetlesactivitésprofessionnelles5.Laqualitédeviesedégradeavecl’anciennetédestroubles,pourcertainesdimensions,tellesqueleshabitudesalimentaires14. Dans toute la littérature scientifique, la qualité de vie pour les patientsatteintsdeSIIesttrèsdiminuée.Deplus,dansdesétudescomparant laqualitédeviedespatientssouffrantdeSIIavecd'autrespatientsatteintsdepathologieschroniquescommelediabèteoul'insuffisancerénalechroniquemaisaussiunepathologieaigueethandicapantecommelagrippe,lesscoresdediminutiondequalitédeviesontsensiblementlesmêmes.Ilpeutêtredifficiledes'imaginerque lespatientssouffrantdeSIIprésententunequalitédevieaussialtéréequelespatientssouffrantd'unegrippe,d'autantplusquecettesituationestprésentependantdenombreusesannées.Uneétudefrançaiseamontréquel'altérationdela qualité de vie était corrélée à l'intensité de l'inconfort ou de la douleur abdominale.14Etant donné ces constats, les critères d'améliorationdequalité de vie devraient être plusprésents dans les études cliniques portant sur les traitements futurs ou actuels du SII.Jusqu'àprésent,ilssontconsidéréscommedescritèressecondaires.

Onl'avu,lediagnosticduSIIpeutêtrelongetcompliqué,d'autantplussilepraticien

consulténeconnaîtpaslapathologie.Ladémarchediagnostiqueseraalorsconsommatricede soins, d'examens complémentaires, de traitements médicamenteux parfois inutiles ettout cela impacte le budget de la protection sociale des pays, notamment de la SécuritéSociale en France. De plus, la prévalence pouvant être élevée, le coût pour les patientsdiagnostiqués de consommationde soin peut être élevé, faisant du SII unepathologie de

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poidspesantdans lesdépensesdesanté5.Onaborderadanscettepartie lescoutsdirectsliésauSIIetàsapriseencharge,puislescoutsindirectsliésauxconséquencesduSIIsurlepatientdanssavieactiveouprofessionnelle.

Plusieursétudesonttentédedéterminerlecoutglobald'unpatientsouffrantdeSII:

une étude réalisée par téléphone en 2004 rapportait un coutmoyen par patient de 71,8eurosparan,alorsqu'unétudepharmaco-économiqueréaliséeen2006auRoyaume-Unietaux Etats-Unis relevait une dépense par patient de 8700 dollars par an. Un tel écart dechiffres s'explique par les différences deméthodologie des deux études, des systèmes desantéquinesontpaséquivalentsàtraverslespayschoisisdanslesétudesetparladifficultéde savoir si les coutsdirectsengendrés sontdusessentiellementauSIIouàd'éventuellesautres comorbidités qu'a le patient5. De plus, selon les différents types de SII, les coutsdirectsneserontpaslesmêmescarlepatientsouffriraplusoumoinsdesessymptômesetauradesbesoinsdifférentsenmédicamentsouenthérapeutiquesqued'autrespatients.

On entend par coûts directs induits par le SII, le nombre de consultations chez le

médecin généraliste et chez le spécialiste, la prescription et la réalisation des examenscomplémentaires,lanécessitéd’unehospitalisationetenfinlaprescriptionmédicamenteuseet l’achatdesmédicaments.DanslecadreduSII,onsaitquetouslespatientsnevontpasconsulterleurmédecinpourleurpathologie,sielleneserévèlepastrophandicapanteousilepatientadhèreà l'automédication.Maisuneétudeépidémiologiqueamontréque80%des sujets présentant un SII consultaient unmédecin aumoins une fois au cours de leurhistoiremédicale fonctionnelle, avec dans plus de 50% des cas consultation d’un gastro-entérologue5. Les consultations chez les différents praticiens ont un cout en eux-mêmesmais c'est surtout la prescription par la suite d'examens complémentaires comme lacoloscopie ou l'échographie qui engendre de fortes dépenses. Plus de 66 % des sujetsprésentantunSII,ontbénéficiéd’examens.Unefoissurdeuxils’agissaitd’unecoloscopie.Les couts directs impliquent également la prescriptiondemédicaments. Ceux-ci, selon lesdifférentescatégoriesdeclassesmédicamenteuses,nesontpaslespluscherssurlemarché.Cependant,certaines thérapeutiquesnesontpas rembourséespar l'AssuranceMaladieenFrance,notammentcertainsmédicamentspourlesballonnements,etlesprobiotiques.Celaengendreenplusd'uncertaincoutpour laSécuritéSociale,uncoutdirectpour lepatientégalementqui,chaquemois,grèvesonbudgetpourleconsacrerengrandepartieàsasantéetàlapriseenchargedesonSII.

D'après les différentes enquêtes réalisées par l'Association française de l’industriepharmaceutique pour une automédication responsable (AFIPA, http://www.afipa.org/) surl'automédicationenFrance,lesfrançais,malgréleurattachementfortàlarelationqu'ilsontavec leur médecin traitant et à sa consultation prise en charge par l'AssuranceMaladie,deviennent de plus en plus adeptes du concept d'automédication. Elle consiste enl’utilisation,horsprescriptionmédicale,pardespersonnespourelles-mêmesoupourleursprochesetde leurpropre initiative,demédicamentsconsidéréscommetelsetayantreçul’AMM,aveclapossibilitéd’assistanceetdeconseilsdelapartdespharmaciens(définition

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adoptée par l'Ordre National des Médecins en 2001). Dans le cadre des troublesfonctionnelsintestinaux,denombreuxmédicamentssontdisponiblessansordonnancedansles pharmacies et les patients viennent acheter ces produits soit sous conseil de leurpharmacien,soitdeleurpropredécision.Parfois,cesmêmesmédicamentssontdesversionsdites "sans ordonnance" des médicaments qui ont auparavant été prescrits. Exemples :DEBRICALM® pour le DEBRIDAT®, SMECTALIA® pour SMECTA® ou TRANSIPEGLIB® pourTRANSIPEG®. Cesmédicaments sont alors réglés par le patient et peuvent représenter uncout supplémentairepourcelui-ci si celui-cin'estpaspasséparuneconsultationmédicalepar manque de temps ou de moyens matériels et/ou financiers. Les autres alternativesthérapeutiquesnonmédicamenteusesparfoisutiliséesdanslapriseenchargeduSIIsontlaplupartdutempsnonrembourséesparl'AssuranceMaladie.Cequiengendreraunsurcoutégalementpourlepatient.

DescoutsindirectssontégalementliésauSII,notammentpourlepatientetlasociété

engénéral.Eneffet,beaucoupplusdifficilesàévaluer,ilsconcernentlesconséquencesdessymptômesetnotammentlesdouleurs,surlaviequotidienneetactivedupatient.Ils'agitparticulièrementdesarrêtsdetravailetdespertesdeproductivitéquiontunimpactnégatifpourlaviedesentreprises.UneétuderéaliséeenFranceparDapoignyetal.datantde2009montrait qu'environ 10% des sujets qui travaillent et qui présentent un SII, ont bénéficiéd'unearrêtdetravail,aumoinsunefoisdansl'annéequiprécédaitl'étude5.UneautreétudeadémontréquelespatientsprésentantunSII,avaientunebaissedel'efficienceautravailetquelesdifficultésàtravaillersontbiencorréléesaveclasévéritédessymptômes:40%despatientsontdesdifficultésdans leur travail si lasymptomatologieestmodéréeousévère.Cesdonnéessontàcomparerauxchiffrestrouvésdanslemêmetyped'étudesconcernantl'asthmeoulamigraine,entermesdecoutsindirectssurl'absentéismeouunprésentéismeperturbé5.

3) Physiopathologie,étiologies

Acejour,laphysiopathologieexactedusyndromedel'intestinirritablen'esttoujourspasconnue.Demêmequelesétiologiesetlesdifférentescausesdesonapparitionnesontpas identifiées pour la plupart. Néanmoins, de nombreuses pistes sont avancées par leschercheurstravaillantsurlestroublesfonctionnelsintestinauxafind'essayerdecomprendrelesdifférentsmécanismesimpliquésdanslamaladie.

a) Troublesdelamotricité15,16

Dansdenombreusesétudes,desanomaliesauniveaude lacontractilitéde l'intestingrêleetducôlonontétéretrouvées.Physiologiquement,lespéristaltismesintestinauxsontprovoquésparlepassagedubolalimentairedanslalumièredutubedigestifetprovoquentalors une stimulation de récepteurs sensoriels qui à leur tour stimulent les cellulesmusculaires lissesautourdes intestins.Cepéristaltismeaunordrebienprécispourque lebol alimentaire progresse toujours dans lemême sens. La régulation des contractions est

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assurée au seinmême de lamuqueuse intestinale, dans le plexusmyentérique, entre lesdeuxcouchesmusculeuseslongitudinalesetcirculaires.Aucœurdescellulesépithélialesdela muqueuse, se trouvent des cellules qui ont une activité pace maker, en générant desondes lentes et établissent le rythme des contractions car elles sont électriquementcoupléesauxcellulesmusculaires.CescellulessontappeléescellulesdeCajal.Ellesontuneactivitéautonome,maisellespeuventêtreinfluencéesparlesystèmenerveuxautonomeetnotamment le système parasympathique provenant du nerf vague. Lors du passagealimentaire,l'étirementdelaparoivaprovoquerunestimulationdesneuronessensitifsquiremplissent la muqueuse intestinale. Ils vont, par l'intermédiaire de la sérotoninenotamment, stimuler d'autres neurones à leur tour, des interneurones, provoquant lacontractiondesmuscleslisses.

Figure216:Schémasimplifiéduréseauentériquecontrôlantlepéristaltismeintestinal

Les neurones sensitifs vont, au travers d'interneurones cholinergiques, stimuler enamontdesneuronesascendantsexcitateurs,libérantdelasubstancePoudel'acétylcholineafin de provoquer la contraction des muscles du côté oral. Au même moment, d'autresinterneuronescholinergiquesvont stimulerdesneuronesdescendants inhibiteurs, libérantdu monoxyde d'azote ou du Vasoactive Intestinal Peptide (VIP), provoquant ainsi larelaxationdesmusclesducôtéanal.Toutceciafind'amenerlebolalimentairetoujoursdanslemêmesens,verslecôlonpuislerectum.Lamotricitépostprandialedugrêleconsisteenune activité contractile soutenue, seulement interrompue de courtes périodes de reposmoteur. Elle se caractérisepar des contractions irrégulières, souvent groupées en courtesboufféesde3à6contractionssuccessives.

En dehors des périodes postprandiales, la motricité interdigestive du grêle a uneorganisationcycliquequicomprendlasuccessionde3périodes:unephasedereposmoteur(phaseI),unephased'activitémotriceirrégulièrenonpropagée(phaseII)etunepériodedequelquesminutes pendant lesquelles survient un train de contractions régulières dont lafréquenceestprochedelafréquencecontractilemaximaleautoriséeparl'activitéélectriquedebase (10à13contractions/mindans leduodéno-jéjunum,7à8 contractions/mindansl'iléon), et qui se propage sur une longue distance sur le grêle. Cette phase III esttypiquementsuivied'unelonguepériodedereposmoteur.Lasuccessiondeces3périodescomposelecomplexemoteurmigrant (CMM).LaduréeduCMMestenmoyennede85à

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120minutes.Mais elle varie beaucoup d'un sujet à l'autre, et d'un jour à l'autre chez unmêmesujet.Lavariabilitédesurvenuedesphases IIIestaussinycthémérale, lesphases IIIétant plus fréquentes la nuit, pendant le sommeil, que le jour. Le rôle duCMMà l'heureactuellen'estpastotalementélucidé,maisilestacquisqu'ilcontribueàdébarrasserlegrêledes derniers éléments du repas et des sécrétions résiduelle. Il contribue également à laprévention des pullulations bactériennes endo-luminales. Le CMM est le témoin d'uneactivitéautonomedusystèmedigestif.Eneffet,iln'estpeuoupasinfluencéparlesystèmenerveux autonome,mais il est régulé par les cellules de Cajal et leur activité pacemaker,ainsi que par des hormones intestinales comme la motiline ou la somatostatine quimodulentlasurvenuedesCMMviadeseffetsparacrinesouendocrines.Lafloreintestinalejoue un rôle dans la survenue des phases III du CMM. Lors de la phase postprandiale, larégulation de la motricité se joue via le système nerveux extrinsèque et les neuronessensitifs de la muqueuse intestinale. En effet, selon les caractéristiques qualitatives etquantitativesdurepas(richesencalories,lipides,protides,glucides…),lamotricitéseraplusoumoinslente.Ilyauraégalementuneinfluencedeshormonesintestinalessécrétées.C'estnotammentlàquesejouelarelationentrelesystèmenerveuxcentraletl'intestin.

Figure315:Exempled'unephaseIIIjéjunaletypique

ducomplexemoteurmigrantinterdigestif

Danslesyndromedel'intestinirritable,destroublesdelamotricitéontétéretrouvésdansdenombreusesétudes.Lesanomaliesmotriceslesmieuxcaractériséesontétédécritesdans l'intestin grêle et ont été surtout observées chez les malades diarrhéiques. Ellesconcernent les deux profils moteurs grêliques : interdigestifs et postprandial. Dans lesétudes, lescomplexesdephase III sontplusnombreuxetdeuxfoisplussouventpropagésjusque dans l'iléon. Cela pourrait expliquer le raccourcissement du temps de transitorocæcal. Les autres phénomènesmoteurs grêliques évocateurs d'un SII sont de courtessalves de contractions, rythmiques, survenant typiquement toutes les minutesessentiellement dans la journée, avant de disparaitre pendant la partie nocturne del'enregistrement.Egalement,descontractionsiléalesdegrandesamplitudespropagéesdanslecæcum.Detellescontractions iléalessontcontemporainesdansplusde60%descasdecrampesabdominales.

sation douloureuse, les sujets SII activent beaucoupplus cette région cingulaire antérieure qu’une po-pulation témoin. De plus, les patients avec SII pré-sentent un phénomène d’anticipation de la réponsedouloureuse qui les conduit à rapporter une sensa-tion douloureuse pour des stimuli de moindre inten-sité que les sujets normaux.5 Cette activation esttout particulièrement marquée chez les femmes.Ceci est un argument supplémentaire pour uneprédisposition différente des deux sexes à l’appari-tion d’un SII. Les données que nous possédons surl’intégration centrale des stimuli d’origine diges-tive au cours du SII sont encore fragmentaires. Maisil est indiscutable que cette approche par imageriefonctionnelle offre des possibilités nouvelles réel-les pour progresser dans la compréhension de laphysiopathologie du SII.

Troubles de la motricité

Un trouble de la motricité digestive a été la pre-mière explication apportée aux symptômes du SII.3

Il est clair que les perturbations motrices digestivesne peuvent résumer la physiopathologie du SII, carleur présence est inconstante et leur co-incidenceavec les symptômes, notamment les douleurs abdo-minales, rarement observée. De plus, les médica-ments destinés à corriger ces troubles moteursaméliorent les troubles du transit mais n’ont engénéral qu’une faible efficacité sur les douleursabdominales. Cependant, les anomalies motricesdigestives ne peuvent être oubliées. Elles ont étédécrites dans le côlon et dans l’intestin grêle. Lamise en évidence de troubles moteurs non limitésau côlon a rendu la terminologie « colopathie fonc-tionnelle » impropre et explique l’introduction duterme « syndrome de l’intestin irritable ».

GrêleLes anomalies motrices les mieux caractérisées ontété décrites à l’intestin grêle et ont été surtoutobservées chez les malades diarrhéiques. Ellesconcernent les deux profils moteurs grêliques, in-terdigestif et postprandial. La motricité interdiges-tive normale du grêle se caractérise par la survenuecyclique de complexes moteurs migrants, dontl’élément le mieux identifié est la phase III, traind’ondes régulières qui se propage le long du grêleen propulsant le contenu luminal sur une grandedistance (Fig. 2). Chez les malades souffrant d’unSII avec diarrhée, les phases III sont plus nombreu-ses et deux fois plus souvent propagées jusque dansl’iléon. Cette incidence accrue des phases III a étéune des explications apportées au raccourcisse-ment du temps de transit orocæcal. Les autresphénomènes moteurs grêliques évocateurs d’un SII

sont de courtes salves de contractions, rythmiques,survenant typiquement toutes les minutes (rythmeminute) essentiellement dans la journée, avant dedisparaître pendant la partie nocturne de l’enregis-trement (Fig. 3), et des contractions iléales degrande amplitude propagées dans le cæcum(Fig. 4). De telles contractions iléales sont contem-poraines dans plus de 60 % des cas de crampesabdominales. Avec l’alimentation, le stress est unsecond facteur déclenchant des troubles moteursgrêliques. Des salves de contractions jéjunales,comparables à celles de la Figure 5, ont été obser-vées lors d’enregistrements ambulatoires, pendantdes périodes de stress psychologique. Leur surve-nue a été souvent contemporaine de douleurs abdo-minales. De telles anomalies motrices ne sont pas

Figure 2 Exemple d’une phase III normale du complexe moteurmigrant interdigestif sur un enregistrement manométrique jéju-nal à 12 niveaux (J1-J12).

Figure 3 Exemple de salves de contractions grêliques réalisantun « rythme minute ».

Figure 4 Exemple de « rythme minute » au cours duquel uneconcordance entre douleur abdominale et trouble moteur a puêtre démontrée.

404 P. Ducrotté

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Figure417:Enregistrementmoteurdansl'iléonterminal(I2-I4)montrantdescontractions

iléalesdegrandeamplitudeassociéesàlasurvenuedecrampesabdominales.Lescontactionssontsecondairementpropagéesdanslecæcum.

Avecl'alimentation,lestressestunsecondfacteurdéclenchantdestroublesmoteurs

grêliques. Des salves de contractions jéjunales (fig. 4) ont été observées lorsd’enregistrements ambulatoires, pendant des périodes de stress psychologique. Leursurvenue a été souvent contemporaine de douleurs abdominales. De telles anomaliesmotrices ne sont pas spécifiques d'un sous-groupe de SII (diarrhéiques, constipés oualternancedesdeux).

Auniveaucolique,lesperturbationsmotricessontmoinsnettes.Aucuneanomaliedes

ondes lentesoude lamotricitébasaleducôlonn'aétéclairement identifiée. Les troublesmoteurss'observentaucoursd'unrepas.Parrapportàungroupecontrôle,certainspatientsatteints de SII, en particulier les malades diarrhéiques, ont une réponse motricerectosigmoïdienne à l’alimentation plus marquée et/ou anormalement prolongée.Inversement, d’autres malades ont une réponse colique à l’alimentation anormalementfaible.Lesperturbationsdelamotricitéaffectentletransitdesgazdigestifs.Dansuneétuderécente, une rétention des gaz dans l’intestin, concomitante d’une sensation d’inconfortabdominal avec ballonnement, a été mise en évidence lors d’épreuves de perfusionintestinale de gaz chez des patients souffrant d’un SII. Une majorité des malades a étéincapabled’évacuerlatotalitédugazinfuséetlarétentiongazeusereproduisaitlasensationinconfortablededistensionabdominalesignaléespontanément.Pourunmêmevolumederétentiongazeuse,lasensationdedistensionétaitbeaucoupplusmarquéechezlesmaladesque chez les témoins. Cet inconfort était partiellement amélioré par l’administration deprokinétiques(moléculestimulantl'avancéedubolalimentairedanslesystèmedigestif).

Uneétuded'uneéquipebarcelonaise17amontréqu’unemajoritédepatientssouffrant

d’un ballonnement fonctionnel ou d’un SII avec ballonnement retient une importanteproportionduvolumeinfusédufaitd’unealtérationdutransit intestinaldesgaz.Chezdessujetssains,lamêmeperfusionintestinales’accompagned’uneaugmentationduvolumedegaz émis par l’anus, d’autant plus importante que le volume perfusé est grand. Chez lesballonnés, cette rétention gazeuse déclenche habituellement une sensation de

spécifiques d’un sous-groupe de SII (diarrhéique,constipé ou alternance des deux).

CôlonLes perturbations motrices coliques sont moins net-tes. Aucune anomalie des ondes lentes ou de lamotricité basale du côlon n’a été clairement iden-tifiée. Les troubles moteurs coliques s’observentsurtout après la prise d’un repas : par rapport à ungroupe contrôle, certains patients atteints de SII,en particulier les malades diarrhéiques, ont uneréponse motrice rectosigmoïdienne à l’alimenta-tion plus marquée et/ou anormalement prolongée.Inversement, d’autres malades ont une réponsecolique à l’alimentation anormalement faible.Les perturbations de la motricité affectent le

transit des gaz digestifs. Récemment, une réten-tion des gaz dans l’intestin contemporaine d’unesensation d’inconfort abdominal avec ballonne-ment a été mise en évidence lors d’épreuves deperfusion intestinale de gaz chez des patients souf-frant d’un SII.6 Ces épreuves étaient réalisées avecun mélange gazeux composé d’azote, de gaz carbo-nique et d’oxygène dans des proportions compara-bles à celles calculées dans le sang veineux. Unemajorité des malades souffrant d’un SII a été inca-pable d’évacuer la totalité du gaz infusé et larétention gazeuse reproduisait la sensation incon-fortable de distension abdominale signalée sponta-nément. Pour un même volume de rétention ga-zeuse, la sensation de distension était beaucoupplus marquée chez les malades que chez les té-moins. Cet inconfort était partiellement améliorépar l’administration de prokinétiques.Il est probablement simpliste de n’envisager que

les seuls troubles sensitifs pour interpréter la phy-siopathologie du SII sans prendre en compte lesanomalies de la motricité. Du fait des interrelations

entre motricité et sensibilité, des troubles de lasensibilité pourraient expliquer certains troublesmoteurs et vice versa. Des évènements moteurscomme les phases III jéjunales ou les salves decontractions iléales peuvent occasionner une dou-leur ou un simple inconfort, par le biais de l’hyper-pression localisée qu’ils entraînent. Inversement,en raison des boucles sensitivomotrices qui coor-donnent le fonctionnement digestif, l’hyperexcita-bilité des afférences sensitives peut déclencher desréactions motrices anormales, inhibitrices ou exci-tatrices. Une sensibilité excessive aux lipides aainsi récemment été mise en avant pour expliquerla réponse motrice gastrocolique excessive dontsouffrent certains patients avec SII.

Syndrome de l’intestin irritable, séquelled’une infection ?

Après des observations anecdotiques, plusieurs sé-ries prospectives ont montré le développementd’un authentique SII à distance d’une gastroenté-rite aiguë chez 7 à 32 % des malades. On estimeactuellement que sur dix SII, un ou deux pour-rai(en)t être postinfectieux (SII-PI).7 Il s’agit le plussouvent d’un SII à forme diarrhéique avec urgencedu besoin exonérateur et ballonnement. Les fac-teurs de risque de développer un SII-PI sont un âgejeune, le fait d’être une femme, d’avoir souffertd’une diarrhée infectieuse prolongée, d’avoir reçudes antibiotiques, d’avoir des troubles psychologi-ques comme une anxiété et d’être soumis à desévènements de vie stressants. Les mécanismes in-voqués pour ce SII-PI sont l’activation de récepteursnociceptifs habituellement silencieux, la sensibili-sation des mastocytes présents au contact des ter-minaisons nerveuses sensitives digestives, l’aug-mentation de la densité des mastocytes, deslymphocytes T, des cellules entérochromaffines etla libération de cytokines pro-inflammatoires. Lepronostic à long terme de ce SII-PI paraît non diffé-rent de celui des SII non PI, avec une disparition dessymptômes à 6 ans chez 43 % des malades contre31 % en dehors de tout contexte infectieux.

Autres pistes physiopathologiques

Perturbation de l’immunité intestinaleavec micro-inflammation ?L’hypothèse d’une activation de l’état immunitairede la muqueuse iléale et/ou colique au cours du SIIest une notion récente. Les études qui ont conduit àcette conclusion étaient essentiellement basées surdes biopsies permettant l’étude de différents typescellulaires potentiellement impliqués dans lessymptômes : les mastocytes, les cellules entéro-chromaffines et les cellules immunocompétentes.

Figure 5 Enregistrement moteur de l’iléon terminal (I2-I4) mon-trant des contractions iléales de grande amplitude associées à lasurvenue de crampes abdominales. Les contractions sont secon-dairement propagées dans le cæcum.

405Physiopathologie et traitement des troubles fonctionnels intestinaux

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ballonnementàpartird’unvolumeretenude400mLetdevientd’autantplusintensequelevolume retenu est important. Ces ballonnements peuvent être à l'origine de douleursabdominalesoud'inconfortdigestif,exacerbésparunehypersensibilitéviscérale,développédanslapartiesuivante.Pointimportant,lesiteetlesmécanismesderétentioninfluencentl’intensitédelasensationdeballonnement:lasensationlaplusintenseestdéclenchéeparune rétention jéjunale. D’un point de vue mécanique, la rétention gazeuse peutthéoriquementêtresecondairesoitàundéfautdepropulsion,soitàunerésistanceaccrueàl’écoulement. D'autres études ont montré qu’un défaut de propulsion déclenchait unedistension abdominale souvent peu symptomatique alors qu’une résistance accrue àl’écoulement, provoquée par une évacuation rectale des gaz volontairement contrariée,aboutissaitàuninconfortabdominalplusnet.

L’intensité des symptômes paraît donc dépendre d’un défaut de coordination de la

motricitéauniveaudugrêle,amenantlaconstitutiondepetitespochesgazeusessuccessiveslelongdugrêle.Cespochesamplifientlesymptômeparunphénomènedesommationdesinfluxnociceptifs.Lesvariationsdutonusintestinal jouentcertainementunrôlepuisquelapropulsiondesgazestassurée,aumoinspartiellement,parunecontraction toniquede laparoi intestinale réduisant la capacitance digestive. Le mécanisme de cette rétentiongazeuseestencore incomplètementcompris. Ilestaumoinspartiellementsecondaireà laperturbation des réflexes viscéro-viscéraux qui coordonnent l’activité motrice le long dutubedigestif.Desfacteursluminauxinterviennentégalement:larétentionestfavoriséeparl’infusionpréalabledelipidesoul’ingestionquotidiennede30gdepsyllium.Enfin,letransitdigestifglobaljoueunrôlepuisquelorsdestestsdeperfusion,lesmaladessouffrantd’unSIIavec constipation retiennent davantage de gaz que les patients décrivant un SII avecdiarrhée.

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b) Troublesdelasensibilitéetanomaliesdu"brain-gutaxis"

Undysfonctionnementdesafférencessensitivesneuronalesauniveauintestinalaétéretrouvédansdenombreuses études. Eneffet, le systèmedigestif est undesorganes lesplus innervés de l'organisme, notamment par des neurones sensitifs. Ils permettentl'intégration d'informations recueillies par des récepteurs sensitifs, souvent polymodaux(mécanorécepteurs,récepteurssensiblesàcertainessubstanceschimiquesouorganiques),qui influencent les efférences motrices ou endocrines afin de réguler au mieux l'activitédigestive.

Figure518:Représentationschématiquedesafférencesviscéralesdigestives

Le réseau nerveux sensitif au niveau digestif est représenté par deux types

d'afférences : d'une part, le système nerveux entérique situé au sein de la muqueusedigestive,composédedeuxréseaux:

- leplexusmyentériqueouplexusd'Auerbach,situéentrelesdeuxcouchesdecellulesmusculaireslisses,ayantaussiunrôledanslecontrôledelamotricité;

- leplexussousmuqueuxouplexusdeMeissner,situéentrelacouchemusculeuseetlamuqueuse,ayantégalementunrôledanslecontrôledessécrétionsgastriques.

D'autrepart,lesystèmenerveuxextrinsèqueavecdesafférencesvagalespassantparlenerfpneumogastrique et aboutissant dans le tronc cérébral au niveau du noyau du tractussolitaire, puis des afférences au niveau du cortex et des voies supérieures. D'autresafférences digestives arrivent au niveau spinal et passent par la corne postérieure de lamoelleépinièreetremontentverslesvoiessupérieures.

Une partie seulement de ces afférences et des informations sensitives qui lesaccompagnent arriveauniveau supérieur cortical, etdoncà laperception consciente. Lesmédiateurs impliqués dans les transmissions d'informations au niveau des récepteurssensitifsnesontpasspécifiques.Cesontceuxretrouvésdanslesautresneuronessensitifsetnociceptifs dans d'autres organes. On peut citer notamment : la somatostatine, la

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sérotonine,desendorphines,lesenképhalines,lasubstanceP,leVIP,lemonoxyded'azote.Certains ne sont impliqués qu'au sein du système digestif comme la cholécystokinine.18Enfin, les afférences viscérales apportant des informations concernant la sensibilité oumême la nociception, rejoignent les mêmes centres supra spinaux d'intégration. Ellespeuventrejoindredesbouclessensitivo-motricesquipeuventalorsinfluencerlesneuronesefférentsmoteursousécréteurs.Toutceciparticipeàl'homéostasiedel'organisme.Parfois,les informations récoltées dans lamuqueuse intestinale, et notamment via les afférencesnociceptives, peuvent être intégrées au niveau cortical et du système limbique, impliquédans les émotions, dans le cortex cingulaire. Ces informations nociceptives sont alorsperçuesparleconscientetdéclenchentdesdouleurs,comparablesàcellesimpliquéesdansleSII.Cesmêmesinformationspeuventêtreinfluencéesparlecortexetlesystèmelimbiqueavec des rétrocontrôles inhibiteurs ou excitateurs de cette douleur. Les structuresimpliquéesdans lecontrôledelasensibilitéviscéralepar leszonessupérieuresducerveaunesontpasconnuesàl'heureactuelle.

L'hypersensibilitédigestiveaétédécritedès197315grâceàuneméthoded'étudedela sensibilité simpliste mais efficace. Elle consiste en l'introduction puis le gonflage d'unballonnetdanslecôlonoulerectum.Laprésenceounondedouleurset/oud'inconfortetdel'intensitédeceux-ciselonlegonflementduballonnetseranotifiéeparlepatient.Cetteméthodefaitréférenceaujourd'huidansl'évaluationdeladouleurviscéralechezlespatientsSII dans le cadre de protocole d'études cliniques. Dans toutes les études utilisant cetteméthode,ladistensionrectaledéclenchaitunedouleurchez50à60%despatientsSII,quelquesoitletype,alorsmêmequelevolumededistensionn'étaitperçuquepar6%dessujetscontrôles.Cettehypersensibilitén'estpasretrouvéesystématiquementlorsdesphasesdeladigestion,oùlamotricitéestmaximale.Cecidémontrequecettehypersensibilitén'estpasforcément liée à un péristaltisme trop intense chez les SII, remettant en cause laphysiopathologie motrice du SII. Cependant, du fait de l'existence de boucles sensitivo-motrices, des informations provenant des afférences sensitives peuvent influencer lespéristaltismes viscérauxetdoncprovoquerdesmouvements anormauxet ainsi entretenirsoitladiarrhée,soitlaconstipation,oul'alternanceentrelesdeux.Maiscetteinfluencedelasensibilité sur la motricité peut également apparaître au niveau du système nerveuxentériquelui-même,avecinterventiondelasérotonine19.

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Figure64:Perceptiondeladouleurviscéralemesuréeparlaméthodedubarostat.

LeseuildeperceptiondouloureusedémarreàdespressionsplusbasseschezlespatientsatteintsdeSII.

L'originedecettehypersensibilitén'estpasencoretotalementappréhendée.Plusieurs

mécanismes, éventuellement associés, sont envisagés. Des arguments existent pour unmécanisme périphérique, avec une sensibilisation des neurones afférents primaires de laparoi digestive et/ou la mise en place de récepteurs pariétaux normalement silencieux.Dans l’hypersensibilité périphérique, les neurones afférents primaires seraientanormalementstimuléspardesmédiateurs(sérotonine,certainescytokineslibéréesparlescellulesentérochromaffines...)et/oupar lesmastocytessituésaucontactdesterminaisonssensitives dans la paroi digestive, et qui semblent jouer un rôle clé. Par le biais demédiateurs comme l’histamine, la sérotonine ou certaines cytokines, ces mastocytesabaisseraient le seuil de sensibilité de ces neurones afférents15. Dans certains cas, leurimplication découlerait d’une inflammation muqueuse initiale (voir plus loin), auto-entretenue par des processus classiques d'inflammation neurogène faisant intervenir unréflexe d'axone. S'en suit une libération périphérique de différents neuromédiateursalgogènes,enparticulierlasubstancePetleCalcitoningenerelatedpeptide(CGRP).

L’hypersensibilité pourrait également provenir d’une hyperexcitabilité des neurones

de la corne postérieure de la moelle, amplifiant les messages sensitifs et/ou nociceptifsd’originedigestive.Danscecas, lesinfluxsensitifsd’intensiténormalepeuventêtreperçusde façon conscientealorsque,dans les conditionsnormales, ils sont intégrésàunniveausous-cortical. Enfin, comme le suggèrent les nouvelles techniques d’imagerie cérébralefonctionnelle,l’hypersensibilitépeutrésulterd’untroubledel’intégrationdesinfluxsensitifsdigestifs.Lorsd’unestimulationdigestive,lespatientssouffrantd’unSIIactiventdavantagecertainesrégionscérébralestellesquelarégioncingulaireantérieureducortexpréfrontal,zoned’intégrationdenosémotions. Lorsd’une stimulationcoliqueparunedistensionquiatteint le seuil douloureux ou lorsque les patients anticipent la survenue d’une tellePour citer cet article : Duboc H, et al. Le syndrome de l’intestin irritable : nouvelles pistes physiopathologiques et conséquences pratiques.

Rev Med Interne (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.12.030

ARTICLE IN PRESSG ModelREVMED-5101; No. of Pages 8

H. Duboc et al. / La Revue de médecine interne xxx (2016) xxx–xxx 3

Fig. 2. Perception de la douleur viscérale mesurée par méthode du barostat. Leseuil de perception douloureuse démarre à des pressions plus basse chez les patientatteints de SII (moyenne ± SEM). * : p < 0,05, patients (triangles inversés), témoins(ronds). D’après Mertz et al. [11], reproduit avec permission.

santé directs sont évalués entre 560 et 860 euros par patient et paran, principalement en examens complémentaires, avec des coûtsindirects socio-économiques allant de l’équivalent au double [9].Compte tenu du nombre de sujets atteints, le coût pour la sociétéest élevé.

3. Axes physiopathologiques : passé, présent et futur

Le modèle physiopathologique actuel s’est considérable-ment complexifié ces dernières années, s’organisant autour dedeux grands axes : périphérique, (altération du signaling neuro-entérique en réponse au microbiote, système immunitaire, acidesbiliaires, etc.) et central (anomalies du contrôle médullaire et céré-bral de la douleur).

3.1. Troubles moteurs et hypersensibilité viscérale

« Multifactoriel » est le qualificatif qui introduit toutes les revuesconcernant le SII : mais avant l’exploration de nouveaux axestels que les anomalies sérotoninergiques coliques, la dysbiose dumicrobiote, en interdépendance avec le « brain-gut axis », c’est his-toriquement par la description chez l’homme d’anomalies motriceset sensorielles viscérales que la maladie s’est trouvée une réa-lité physiopathologique « mesurable », et s’est faite rebaptiser : onne parle plus de « côlon » irritable mais bien d’intestin irritable,car les anomalies motrices corrélées aux douleurs abdominalesconcernent plus le grêle que le côlon [10]. La motricité n’expliquepas tout et l’hypersensibilité viscérale, à savoir la diminution duseuil de perception à la douleur, est présente chez la majoritédes patients [11]. Elle se quantifie objectivement chez l’hommepar distension d’un ballon intra-rectal (Fig. 2) : l’amélioration dece seuil après une étude interventionnelle constitue d’ailleurs lemeilleur critère objectif d’efficacité d’un médicament dans le SII,bien plus performant que les questionnaires. Il faut souligner quecette hypersensibilité se retrouve quel que soit le phénotype, diar-rhéique ou constipé [12].

3.2. Sérotonine : médiateur de la douleur

Chez l’homme, 90 % des stocks de sérotonine se trouvent dansle côlon, au sein des cellules entérochromaffines qui la libèrent enréponse à des stimuli chimiques ou mécaniques : elle y exerce desactions pro-sécrétoires, motrices, et régule la transmission affé-rente sensitive entre intestin et système nerveux central. Chezl’homme, certains travaux contradictoires ont décrit des concen-trations différentes de sérotonine dans la muqueuse colique despatients, mais ce sont surtout les niveaux de sérotonine circulantequi ont été corrélés aux phénotypes de la maladie [13]. C’est sur cesdonnées qu’un agoniste des récepteurs de la sérotonine (5HT4),le tégaserod, fut développé, puis admis par la FDA en raison deson efficacité sur la douleur et de son action prokinétique chez lespatients constipés : la molécule améliorait objectivement les seuilsde perception à la douleur, mais des effets secondaires cardiovas-culaires ont conduit à son retrait en 2007 [14].

3.3. Contrôle médullaire de la douleur, stress et « brain-gut axis »

Souvent l’unique et parfois vexante réponse donnée auxpatients, le « stress » est autant une évidence clinique qu’un facteuraggravant démontré [15]. En conséquence de quoi, le « brain-gut axis » est un axe physiopathologique qui s’est développé ces15 dernières années : il s’agit de l’étude des divers facteurs (stress,microbiote, sérotonine, acides biliaires, etc.) qui influencent lescommunications bidirectionnelles entre le cerveau et l’intestin(Fig. 3). Au cours du SII, il a été démontré chez l’homme que lecontrôle médullaire de la perception douloureuse est altéré. Destechniques de réflexologie et la mesure du réflexe R3 permettentd’explorer les contrôles inhibiteurs diffus nociceptifs médullaires.Ils exercent normalement un contrôle physiologique qui faitqu’entre deux stimuli douloureux perc u, le plus important « efface »le second. Lors de mesures de la douleur viscérale contemporainede stimuli douloureux électrique périphérique, là où la percep-tion douloureuse rectale est down-régulée chez les sujets sains,l’altération du réflexe R3 a été constatée chez une majorité depatients ayant un SII, correspondant à une hyperexcitabilité spinalenociceptive [16].

Dans le sens des efférences, le système nerveux central (SNC)influence également la douleur et le transit via le stress quiinfluence objectivement l’apparition et l’évolution du SII [17]. Chezl’animal, suivant la méthode de mesure et le type de stress psy-chologique utilisé, on peut constater soit une hyperalgésie, soitune analgésie viscérale post-stress [18]. Chez l’homme, la survenued’événements traumatisants dans l’enfance est associée au déve-loppement de la maladie [19], et ces événements sont connus pourêtre associés avec des altérations structurelles et fonctionnellesdu cerveau en imagerie [20] ainsi que des profils de méthylationde certains gènes [21]. L’hyperactivité de l’axe hypothalamo-hypophysaire est discutée [22]. Le lien potentiel entre stress etsymptômes le plus étudié est la « corticotrophin releasing hor-mone » (CRH), médiateur du stress, dont on sait qu’elle augmenteles réponses motrices chez le patient ayant un SII. Le « traitementde la donnée douleur », à savoir l’intégration corticale des mes-sages afférents douloureux viscéraux, est également modifié. Encomparant deux populations de femmes ayant un SII et présen-tant ou non une hypersensibilité viscérale, une équipe a montréen IRM fonctionnelle, que l’activation de l’insula (impliquée dansla sensation viscérale) et du cortex cingulaire antérieur (attention,émotion, humeur) était plus importante chez les sujets ayant unehypersensibilité viscérale [23].

Dans le sens des afférences, la théorie globalement admiseet explorée veut que le processus de sensibilisation périphé-rique passe par de multiples anomalies du microenvironnementmuqueux intestinal [24] : le microbiote, ainsi que ses métabolites,

Trianglesnoirs:patientsSIIRondsblancs:témoins

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sensation douloureuse, les sujets SII activent beaucoup plus cette région cingulaireantérieure qu’une population témoin. De plus, les patients SII présentent un phénomèned’anticipation de la réponse douloureuse qui les conduit à rapporter une sensationdouloureusepourdesstimulidemoindreintensitéquelessujetsnormaux.Cetteactivationesttoutparticulièrementmarquéechez lesfemmes.Ceciestunargumentsupplémentairepouruneprédispositiondifférentedesdeuxsexesàl’apparitiond’unSII.

Danstouslescas,aucuneanomalieorganique,structurelleouhistologiqueauniveaude la paroi digestive n'a été retrouvée dans les études concernant l'hypersensibilitéviscérale.Ils'agitdoncd'unehypersensibilitéessentielleetvraieoùleseuildesensibilitédeladouleurestabaisséchezlespatientsatteintsdeSII.Onobserveégalementqueleszonesducerveauimpliquéesdanslesémotionsetcellesimpliquéesdanslescentresderégulationdelasensibilitéviscéralesontintimementliées.Oncomprenddoncquelesétatsdestress,d'anxiété,dedépressionetdetroublesdel'humeur,peuventfortementinfluencer,enbienou en mal, les troubles fonctionnels intestinaux. Chez l’animal, suivant la méthode demesureet le typedestresspsychologiqueutilisé,onpeutconstatersoitunehyperalgésie,soit une analgésie viscérale post-stress. Chez l’homme, la survenue d’événementstraumatisantsdansl’enfanceestassociéeaudéveloppementdelamaladie.Cesévénementssontconnuspourêtreassociésàdesaltérationsstructurelleset fonctionnellesducerveauenimagerieainsiquedesprofilsdeméthylationdecertainsgènes.L’hyperactivitéde l’axehypothalamo-hypophysaireestdiscutée.Lelienpotentielentrestressetsymptômesleplusétudié est la corticotrophin releasing hormone (CRH), médiateur du stress, dont on saitqu’elleaugmente lesréponsesmotriceschez lepatientayantunSII.L’intégrationcorticaledesmessagesafférentsdouloureuxviscéraux,estégalementmodifiée.EncomparantdeuxpopulationsdefemmesayantunSIIetprésentantounonunehypersensibilitéviscérale,uneéquipe a montré en IRM fonctionnelle, que l’activation de l’insula (impliquée dans lasensationviscérale)etducortexcingulaireantérieur(attention,émotion,humeur)étaitplusimportantechezlessujetsayantunehypersensibilitéviscérale4.

Dans d'autres études, une hypersensibilité d'origine médullaire a été mise en

évidence20. De nombreux arguments suggèrent qu'il existerait des anomalies dansl'intégrationspinaledeladouleuroudanslesmécanismesrégulateurssituésàceniveau.Eneffet, lesafférencessensoriellesd'origineviscéralesetsomatiquesconvergenttoutesdeuxvers la corne postérieure de lamoelle épinière, puis ces informations sont remontées auniveau supra-spinal. Cette organisation représente le substrat neurophysiologique duphénomène de projection des douleurs d'origine viscérale vers un territoire cutané. Unensemble de données suggère que desmodifications du territoire des douleurs projetéespourraienttémoignerd'unehyperexcitabilitédesneuronesnociceptifsdelamoelle.

Ces phénomènes de sensibilisation centrale font intervenir des récepteurs de typeNMDA (N-méthyl D aspartate), contribuent à amplifier la douleur et jouentvraisemblablementunrôlecapitaldans lesprocessusdechronicisation. Ilaégalementétémontréquecesontaussi lessystèmesdescendantsmodulant latransmissionspinaledela

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douleur, viscérale et somatique, qui posent problème dans le SII. Une augmentation descontrôles inhibiteurs diffus nociceptifs, impliqués dans l'affinage de la localisation de ladouleurdansl'organisme,vial'inhibitionduréflexeRIII,aétéretrouvédanscertainesétudeschezlespatientsatteintsdeSIIauquelunballonnetavaitétégonfléprogressivementdanslerectum20. Cette sensibilisation spinale, non seulement diminue le seuil d’excitation desneuronespost-synaptiquesdesvoiesnociceptivesascendantesenamplifiant leur réponse,maisentraîneégalementuneréponseaxoniqueantidromique(delapériphérieverslecorpscellulaire) des neurones afférents primaires associée à la libération périphérique desubstancesalgogènessensibilisantàleurtourlesnocicepteursdanslazonedeprojection21.

On a parlé précédemment de l'influence du stress et de son principalmédiateur, le

CRH.Laréactiondestressnormaleestphysiologique,elleestdited’adaptation.Cependant,lorsqu’il y a une rupture d’équilibre entre les capacités d’adaptation et les exigences dumilieu, la réaction de stress devient pathologique, conduisant à l’apparition de troublesfonctionnels,métaboliques,voirlésionnels.Leseffetsdustresssurlafonctiondigestiveontété associés à des modifications de la sensibilité douloureuse mais aussi de la réponseinflammatoirelocaleetdelamotricitédigestive.Ilestmaintenanttrèsclairquelestressestuneffecteurmajeurdanslaphysiopathologiedenombreuxtroublesdigestifs,primairesouassociés, et notamment du SII. Lesmécanismes de défense impliqués dans la réponse del’organismefaceauxsituationsdestressconduisentàl’activationde:

- l’axecorticotrope- lesystèmelimbique- l’axesympathique(balancesympatho-vagale)- lesystèmeimmunitaire.

Ces différents systèmes participent de façon combinée à lamise en place d’une réponseadaptéevisantà rétablir l’homéostasiedumilieu intérieur. LespatientsSII sontexposésàdesévènementsdevieperçusstressantsplusnombreuxetplussévèresque lapopulationgénérale.Ilsontégalementuneplusgrandecapacitéàappréhenderunesituationstressanteenanticipantlesréactions,etcelainflueaussisurleurssymptômes.Lesuivid’unecohortede 300 malades a permis de vérifier la corrélation existant entre l’exacerbation dessymptômes et la survenue d’un événement de vie dans les 3 mois précédents. Le stresschroniqueenlui-mêmeexerceuneffetpro-inflammatoireetlesétudesrécentessuggèrentque le SII pourrait être associé àun trouble inflammatoire s’accompagnantd’unexcèsdeproduction de TNF-alpha et d’IL-6. Ces cytokines pro-inflammatoires seraient alorsresponsables des symptômes du SII notamment la douleur ainsi que l’anxiété quil’accompagne.LesprincipauxneuromédiateursdustresssontreprésentésparleCRFetsesapparentés,lesurocortines(Ucn1,2,3)quiontunedistributiondansleSNCmaiségalementen périphérie, dans le tube digestif notamment. Le système CRFergique (central etpériphérique), de par son rôle dans le stress, intervient dans la physiopathologie du SIIcommecelaaétémontrédansdesmodèlesexpérimentauxmaiségalementchezl’Homme.

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c) Micro-inflammationdelamuqueuseintestinale

Les mécanismes de physiopathologie impliquant une perturbation de l'immunitéintestinale ont été évoqués précédemment. En effet, ces anomalies auraient commeconséquences lesdifférentstroublesde lasensibilitéetde lamotricitécitésplushauts.Lesystème immunitaire intestinal comporteunegrandevariétéde types cellulaires.Onpeutschématiquement séparer l’immunité intestinaleenunecomposante innéeconstituéedescellules épithéliales et des cellules présentatrices de l’antigène, et une composanteadaptativeconstituéedes lymphocytes.Lessites impliquésdans lacomposanteadaptativesontessentiellementlesplaquesdePeyeretlesfolliculeslymphoïdesisolés.LesplaquesdePeyer, les ganglions lymphatiques mésentériques et l’appendice sont des structuresidentifiables macroscopiquement. Apparentés aux plaques de Peyer, les folliculeslymphoïdes isolés constituent des structures plus petitesmais très nombreuses, répartiesdans tout le tube digestif, avec une prédominance dans l’iléon. Le système immunitaireintestinaltientuneplaceimportanteàlafoisdanssonrôledeprotectionetdedéfensedel'organisme, car le système digestif est la porte d'entrée de nombreuxmicro-organismes,maisaussidans lesphénomènesdetolérancevis-à-visdesnutrimentsdel'alimentationoudumicrobioteintestinal,afind'éviterlesdésordresinflammatoiresouauto-immunspouvantnuireaubonfonctionnementdecetorgane.

Les premières hypothèses d'une composante inflammatoire du SII sont apparues

lorsque certaines études mettaient en évidence le lien entre SII et infection intestinale,virale, bactérienne ou parasitaire. En effet, chez certaines personnes ayant uneprédisposition,suiteàunépisodedegastro-entériteaigue,ilexisteundéveloppementd'unSII,notammentd'unD-SII22.Cephénomèneest retrouvé,selon lesétudes,chez3,7à36%des patients ayant une infection intestinale. Les micro-organismes impliqués sont ceuxretrouvés habituellement dans les gastro-entérites : Campylobacter jejuni, Shigella spp,Salmonella enteritidis, Norovirus, Entamoeba hystolytica, Giardia intestinalis… LessymptômesnotésparlespatientsatteintsdeSIIpost-infectieux(PI-SII)sontlesmêmesqueceuxdécritsdans lescritèresdeRome.On retrouve les troublesdu transit,notamment ladiarrhée, les ballonnements et les douleurs viscérales. Les biopsies effectuées chez cespatients,mêmeunanaprès l'infection,montrentune infiltration lymphocytairemaisaussiune augmentation du nombre demacrophages et une persistance d'une hyperplasie descellules entéro-chromaffines, riches en sérotonine. Or, on sait qu'il existe un lien entrehypersensibilité viscéraleet cellulesentéro-chromaffines richesen sérotonine.Cependant,danscertainesétudes,cettehyperplasien'estpastoujoursretrouvée.

Uneaugmentation du nombre demastocytes a été retrouvéedansd'autresétudes

chez des patients SII, post-infectieux ou non15,22. Elle est comparable pour les différentssous-typesdeSII.Lesbiopsiesprofondesrévèlentquel’augmentationdedensitéetsurtoutledegrédedégranulationdesmastocytesestbeaucoupplusélevéprèsdesplexusetdansles terminaisons nerveuses et qu’il existe une étroite corrélation entre le nombre demastocytes, leur degré de dégranulation et la sévérité des symptômes. La tryptase,

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l’histamineoulenervegrowthfactor(NGF),contenusdanslesmastocytesetlibéréslorsdeleur dégranulation, sont des médiateurs reconnus dans l’hypersensibilité viscérale. Ilexisteraitégalementuneinfluencepsychologiquedansl'entretiendelamicro-inflammationintestinale chez les patients SII, médiée par l'activation des mastocytes. Dans les étudesanimales, le stress a été impliqué pour augmenter le nombre de mastocytes et leuractivation.Lesétudeshumainesappuientcetteconclusionindirectement.Ainsi,dansleSII,les échelles de score impliquant la fatigue et la dépression sont corrélés de manièresignificativeavec latypologiedecellulesde la laminapropriaet lenombredemastocytes.D'autres études sur les humains ont rapporté une hyperplasie des mastocytes dans leséchantillons de biopsie du jéjunum des patients SII en situation de stress22. La tryptaseparticipeégalementàl'ouverturedesjonctionsserréesauniveaudesentérocytesdelaparoiintestinale.Ladégranulationdesmastocytespouvantêtreprovoquéepardessituationsdestress,commevuplushaut,celle-cilibèrealorsdessubstances,commelatryptasequiauneaction sur les récepteursPAR-2oudes sérines-protéasesafind'augmenter laperméabilitéintestinale23.

D'autres éléments ont été retrouvés de façon trop importante ou en qualité

insuffisante chez les patients SII. On a pu observer une augmentation du nombre delymphocytes Touuneaugmentationdu tauxsanguind'IL-1,d'IL-6oud'IL-8,qui sontpro-inflammatoires. Dans un groupe de sujets souffrant d’un SII après infection parCampylobacter, une forte densité de lymphocytes CD3, CD4 et CD8 a été décrite dans lalamina propria, ainsi qu’une forte infiltration lymphocytaire dans toute la paroi du côlon.Environ 40 % des patients n’ont pas d’infiltration notoire alors que 60 % ont uneaugmentation de plus de 100 % du nombre de lymphocytes CD3 et 6,5 fois plus delymphocytesCD25.L’augmentationdunombredesneutrophilesetdeslymphocytesCD3estplusélevéechezlesD-SIIquepourlesautresformes(mixtesetconstipés).Inversement,unnombredemastocytesplusélevéaété rapporté chez lesC-SII alorsqu’aucunedifférenceentre les groupes n’a été observée en ce qui concerne l’augmentation des lymphocytesCD25etdecellulesNKCD3.Surdesbiopsies jéjunalesprofondes, les lymphocytes infiltréssont essentiellement localisés à proximité ou dans les ganglions constituant les plexusmyentériques.Cettelocalisationpouvantêtreàl’originedestroublesmoteursliésauSII.

Lesmicro-inflammationsretrouvéesdanslamuqueuseintestinalevontdoncparticiper

à la survenue d'autres éléments de physiopathologie comme l'augmentation desneuromédiateursdeladouleur(substanceP,sérotonine),l'apparitiond'anomaliesmotrices,et de la perméabilité intestinale ainsi que l'implication du microbiote intestinal.L’augmentation de la perméabilité paracellulaire intestinale est un facteur favorisant lapénétrationdetoxines,d’antigèneset latranslocationbactériennepouvantêtreà l’originede réponses inflammatoires locales associées à une présence accrue de cellulesimmunocompétentes et surtout demédiateurs de l’inflammation. Ceux-ci sont capables àleurtourdesensibiliser lesterminaisonsdesneuronesafférentsprimairesetenparticulierles mécanorécepteurs pariétaux répondant aux stimuli mécaniques. Ceci pourrait être àl’originedel’hypersensibilitéàladistensionidentifiéechezlessujetsSII.ChezdessujetsSII,

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des modifications de la perméabilité paracellulaire digestive ont été observéesessentiellementdans legrêlepour lesSII-PIavecconstipationetdans lecôlonpour lesSIIavec diarrhée. Les études expérimentales chez l’animal ont apporté la preuve que toutfacteur,telqu’unstressaiguouunchocseptique,augmentantlaperméabilitéparacellulairecolique,entraîneunabaissementduseuildesensibilitérectaleàladistension.Inversement,la restauration d’une perméabilité colique normale, prévient l’état d’hypersensibilité. Lesprotéasesbactériennesactiventcertainsrécepteursauxprotéases(PAR-2)situéssurlepôleapical des entérocytes, augmentant la perméabilité des jonctions serrées épithéliales etinduisantunehypersensibilité.Les inhibiteursdecesprotéasessupprimeraient leurseffetssur lasensibilité.Uneaugmentationdutauxdesérinesprotéasesaétéretrouvéechez lespatients D-SII23. L’hypothèse selon laquelle cette augmentation de perméabilitéparacellulairecoliqueestàl’originedessymptômes,etenparticulierdeladouleurviscérale,n’apasencorereçuconfirmationchezl'homme15.

Labarrièreépithélialedigestiveassureunefonctiondeprotectiondel’organisme.Ellefavorise la reconnaissance de l’origine et la nature des éléments nutritionnels ouindésirables transitant dans l’intestin en présence de la microflore commensale. Le toutétant régulé par le système immunitaire sous-muqueux. Cette barrière possède donc uneperméabilitéindispensablepourcetéquilibreréaliséenparticulierparlesystèmedefiltrageque constituent les espaces intercellulaires et plus précisément les jonctions serrées. Cesjonctions serrées sont constituées de protéines (occludine, claudines) ancrées aucytosquelette de cellules adjacentes par l’intermédiaire de protéines de liaisonintracytoplasmiques.Lesfilamentsd’actinomyosineducytosqueletteformentàceniveauunanneau périjonctionnel pouvant se contracter sous l’influence de facteurs luminaux etendogènes. L’ouverture de ces jonctions serrées faisant suite à la contraction ducytosquelette favorise le passage de toxines, allergènes, fragments membranaires etbactéries de la lumière intestinale ou colique vers l’espace sous-muqueux. L’un desmécanismeslesplusclassiquesderéponseimmédiatedecontractiondescellulesestliéàlaphosphorylation rapide des chaînes légères de myosine (MLC) par laMyosin Light ChainKinase(MLCK).

Denombreusessubstancesexogènesetendogènestrouvéesdanslecontenudigestifsontsusceptiblesd’activer laMLCKet induire l’ouverturedes jonctionsserrées : lesacidesbiliaires, le trypsine et autres protéases d’origine exogène et endogène, des composantsbactéries (LPS), le stress, les antibiotiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens, ouencoreunealtérationdelaflorecommensale.Lessérine-protéasestellesquelatrypsineoulatryptasesontsusceptiblesd’activerlesrécepteursPAR-2situésaupôleapicaldescellulesépithéliales, entraînant une augmentation de la perméabilité colique à l’origine d’uneréaction inflammatoire pariétale23. La phosphorylation rapide des chaînes légères de lamyosine est due à une activation rapide de la MLCK, l’activation des PAR-2 favorisantl’apparition d’un complexe calmoduline/MLCK. Toutefois, certaines sérine-protéases enparticulierlibéréesparlesmastocytestellelatryptasepeuventactiverlesrécepteursPAR-2auniveaubasolatéraldescellulesépithéliales.

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Récemment,l’existenced’untauxélevédesérine-protéasesdanslessellesdepatientssouffrantd’unsyndromedel’intestinirritableaamenéàrechercherunimpactpossiblesurlabarrièreépithélialeetsesconséquencessurleplansymptomatiqueenparticulierdanslagenèsede ladouleurabdominale23. Il existeeneffet chez lespatients souffrantd’unSII àprédominance diarrhéique un taux très élevé de sérine-protéases sans élévationconcomitante des protéases d’origine endogène trouvées dans le contenu colique. Laparticipationdelafloreàcetteélévationdesprotéasesendoluminalescorrespondsoitàunesécrétion accrue par certaines bactéries, soit une diminution de la flore à activitéantiprotéasique.Eneffet,certainslactobacillessécrètentdesfacteursantiprotéasiques(misenévidentepourL.farciminis).Lesconséquencesdel’ouverturedesjonctionsserréessontmultiples.Cependantmajoritairement,onnoteunehypersensibilitécoliqueà ladistensionquin’apparaîtquequelquesheuresaprèsactivationdesrécepteursPAR-2.Celacorrespondaudélainécessaireà la sensibilisationdes terminaisonsnerveusespar lesmédiateurspro-inflammatoires et les substances algogènes. La perfusion intracolique de surnageants deselles de sujets D-SII déclenche une hypersensibilité colique à la distension chez la sourisavecaltérationdel’expressiondesprotéinesdeliaisonaucytosqueletteetphosphorylationdelaMLCK23.

d) Etiologiesparticulières

D'autres aspects physiopathologiques, plus ou moins corrélés à la définition et auxsymptômes du SII, ont été décrits dans certaines études concernant le SII. De nombreuxpatients notifient à leur praticien des intolérances alimentaires nombreuses et variées :lactose, gluten, certains fruits, certaines protéines, etc… Ils rapportent qu’un régimed’exclusion améliore parfois les symptômes alors que la réintroduction des alimentsincriminés les fait réapparaître. Ladémonstrationd’une telle relationde causeà effet estbeaucoupplusaléatoirelorsquelesépreuvesderéintroductionsonteffectuéesenaveugle.Même si la sensibilisation des mastocytes intestinaux et les troubles de la perméabilitéintestinalesontdesconditionspouvantfavoriseruneintolérancealimentaire,iln’existepasde preuve scientifique formelle. Cependant, certains régimes d'exclusion ont prouvé leurefficacitéthérapeutiquecommenousleverronsplustard.

Le D-SII peut être parfois confondu avec un syndrome assez rare, mais connu : lamalabsorptionprimitivedesacidesbiliaires.Ainsi,20à30%despatientsétiquetésD-SIIsonten faitdessyndromesdemalabsorptionprimitivedesacidesbiliaires. Laphysiopathologiede cettemaladie a étéexplicitée récemment24 : il s'agit d'unemballementde la synthèsehépatique d'acides biliaires, par perte du rétrocontrôle iléal (sécrétion de FGF19), quidiminue physiologiquement leur production hépatique. Le traitement de cette pathologieest simple et consiste en l'administration d'un chélateur d'acides biliaires comme lacholestyramine.

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Lesétudesconcernantuneoriginegénétiquedusyndromedel'intestinirritablen'ontpas permis de mettre en avant une déficience de gènes ou une présence de marqueursgénétiquesassociésàlapathologie.

e) Rôledumicrobioteintestinal

Lemicrobioteintestinalestl'ensembledesmicro-organismes(bactéries,virus,archées,protozoaires, champignons) présent dans notre système digestif. La flore intestinale,essentiellementcoliqueetanaérobie,comprendenviron1014micro-organismesensymbioseavecl'hôte,soitplusdedixfoislenombredecellulesdel'organisme.Sonétudealongtempsreposésurlaculturedesfècesmaisaujourd'hui,grâceauxméthodesd'analysemoléculaires,lemondebactérien de notre intestin devient de plus en plus accessible aux scientifiques.Chaqueindividuhébergeunediversitéd'espècesqui luiestpropre,stabledans letempsàl'âgeadulte.Lesfloresd'individusdifférentsn'ayantencommunquetrèspeud'espèces.Lerôle dumicrobiote intestinal a de nombreux rôles, complexes et variés, au sein de notreorganisme,etcertainsmécanismesnesontpastotalementélucidés.Danscettepartiejevaisprésenter d'abord la composition quantitative et qualitative de cemicrobiote au sein denotre système digestif. Puis j'aborderai les différents rôles et qu'apportent ces micro-organismes à notre organisme. Enfin, je parlerai des différentes implications de la floreintestinaledansleSII.•Compositionquantitativeetqualitative

La flore microbienne digestive se caractérise par sa complexité et sa diversité. Desvariations dans le temps et l'espace caractérisent la composition du microbiote d'unindividu. Ainsi, les flores digestives du nouveau-né, du nourrisson puis de l'adulte, sontdifférentes. Demême, sa composition varie selon les segments du tube digestif avec ungradientdanslesensoral-anal.Enrevanche,unefoisétablie,celle-ciestrelativementstablechezunmêmeindividudansdesconditionsnormales,bienqu'ellepuisseêtreinfluencéeparles facteurs environnementaux tels que l'alimentation et les traitements antibiotiques25.L'analysebactériologiquedelafloreintestinaletotale,comprenantplusde99%debactériesanaérobies strictes et des espèces variées, fait appel à des techniques de cultures assezcomplexes. En effet, plus de 50% des espèces observables ne sont pas cultivables. C'estgrâce aux méthodes moléculaires basées sur l'analyse des ARN ribosomaux (ARNr) desbactériesquelarecherchesurl'analysedumicrobioteintestinalapuavancer.

Danslafloredigestivecolique,ondistingueunefloreendogènerésidenteetuneflore

de transit. La flore endogène représente l'ensemble des micro-organismes présents defaçon permanente dans l'écosystème du tube digestif. Ces souches, caractéristiques d'unindividu,présententuntropismecellulaireettissulairespécifiqueetsontisoléesenculturedefaçonrégulièresurunelonguepériodedetemps.Enrevanche,lafloreditedepassageoude transit,correspondàdesmicro-organismesqu'onneretrouvequesuruncourtlapsde temps dans le tube digestif. Ces espèces peuvent provenir de l'alimentation ou de

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l'utilisationdeprobiotiquesnotamment.OnpeutretrouverlesmêmesespècesdebactériescommeEscherichiacolioudesbifidobactériesàlafoisdanslaflorerésidenteetdanslafloredetransition.Ellesn'aurontpaslesmêmescaractéristiques:unedessouchesvas'implanter,pas l'autre. La capacité d'une espèce bactérienne à coloniser et persister dans le milieucoliqueestlaconséquenced'interactionscomplexesbactérie-hôteetbactérie-bactérie.Lescapacitésd'adhérenceaumucus intestinaletauxcellulesentérocytaires,demêmequelescapacités à dégrader les substrats, peuvent influencer la capacité colonisatrice et lapersistanced'unesouchedanscetécosystème.Destravauxrécentsontmisenévidencequelesbactériescolonisatricessontcapablesdedialogueravecl'hôteetd'adresserdessignauxpermettant demoduler l'expression des gènes de l'hôte afin de créer un environnementfavorableàleurimplantation26.Ainsi, ledialoguebactérie-hôteetlesinteractionsbactérie-bactérie sont à l'origine de vagues successives de colonisation, avec création de nichesécologiques spécifiques et apport de nutriments appropriés aux différentes espècesbactériennescolonisantletubedigestif.

Enfonctiondeszonesdel'intestin,unefloredifférenteestretrouvée,correspondantà

des habitats différents ou des niches écologiques spécifiques. La flore microbienne sedensifiedel'intestingrêle,àmotricitéimportante,aucôlon,àmotricitéréduite.Auniveaude l'intestin grêle, le pH intraluminal oscille entre 7 et 8 et l'oxygène se raréfie. La floreaugmenteprogressivementduduodénumjusqu'à l'iléon.Celleduduodénumn'excèdepas104 à 106 UFC/g de contenu intestinal et est composée d'espèces aérobie-anaérobiesfacultatives (Streptococcus, Lactobacillus, Enterobacteriaceae) appartenant à la flore depassage. Celle iléale atteint 105 à 107 UFC/g, avec des bactéries anaérobies strictesprédominantes appartenant au genre Bacteroides associées à une flore anaérobiefacultative.Ellen'apasdefonctionmajeureendehorsdessituationspathologiques.C'estauniveaucoliquequel'onretrouveraleplusdebactéries.Lestauxatteignent109à1011UFC/gde contenu. Le côlon, où la compétition pour l'espace et les nutriments contribue àmaintenirl'intégralitédelamicroflore,estlaseulezonecoloniséedefaçonpermanenteparuneflorerésidente25.Lemicrobioteestessentiellementanaérobieetpossèdedenombreuxrôlesdansnotresystèmedigestif,quenousdétailleronsparlasuite.

Enfin, la florecontenuedans les fèces,ou flore fécaleaété laplusétudiée,carplussimpleàmettreenculture.Ellecontient109à1011UFC/gdefèces.40%dupoidsdessellescorrespondàdesmicro-organismes.Auniveaufécal, la floredominanteprésentedestauxde109à1011UFC/getestcomposéedebactériesanaérobiesstrictes,parmilesquellesdesbacillesàGramnégatifdugenreBacteroides,leplusreprésenté,desbacillesàGrampositifdes genres Eubacterium, Bifidobacterium, Clostridium, ainsi que des cocci à Gram positifcommePeptostreptococcusouRuminococcus.Lafloresous-dominante,présenteàdestauxde 106 à 108 UFC/g, se compose de bactéries aéro-anaérobies facultatives. Ces bactériesappartiennentàdifférentesespècesdelafamilledeEnterobacteriaceae(surtoutEscherichiacoli) et aux genresStreptococcus,Enterococcus, Lactobacillus, etc. La flore de passage estvariable et ne s'implante pas au sein du tube digestif, sauf lors de circonstancespathologiques.Cettefloresetrouveàdestauxinférieursà106UFC/g.Trèspolymorphe,elle

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est représentée par des entérobactéries du genre Citrobacter, Klebsiella, Proteus ouEnterobactermaisaussipardesPseudomonas,desstaphylocoquesetdeslevuresdugenreCandida.

Comme dans tout écosystème bactérien, plus de 90 % des espèces du microbiote

intestinal ne sont pas cultivables. En effet, vivant dans la plupart des cas en absenced’oxygène, leurenvironnementpossèdedespropriétésphysicochimiquesquisontsouventdifficilesàcaractériseretàreproduire.Desapprochesculture-indépendantesbaséessur leclonage et le séquençage du gène codant l’ARN ribosomal 16S, par exemple, ont étédéveloppées afin d’appréhender la grande diversité du microbiote intestinal. Deux typesd’échantillons peuvent être analysés afin d’accéder aux espèces bactériennes composantl’écosystème intestinal : les populations bactériennes liées à la muqueuse et cellescontenues dans la lumière intestinale. Elles présentent des fonctions et une compositionbiendifférentes.Lemicrobioteissud’échantillonsfécauxestleplussouventétudiéenraisonde la facilité de collecte. Même si les différences dans la composition et le rôle dumicrobiote fécal versus le microbiote muqueux sont importantes et reconnues, ellesdemeurentàcejourmalévaluées27.

Grâce aux techniques de cultures anaérobies classiques, l'étude de la flore fécale a

permis d'explorer demanière simple une partie dumicrobiote intestinal. Cependant, ellen'est pas forcément représentative de la flore intestinale, liée à la muqueuse. Ainsi, desbiopsieseffectuéessurdespatientsvolontairesetétudiéesgrâceauxtechniquesd'analysesmoléculairessebasantsurleclonageetleséquençagedel'ARNr16S,ontpermisl'étudedumicrobiote intestinal humain demanière plus approfondie. Trois lignées phylogénétiquesbactériennesrassemblentlaplusgrandepartdesbactériesfécalesdominantes:

- Le phylum des Firmicutes (bactéries à Gram positif) est toujours fortementreprésenté.Ilcomprendtoutd’abordlegroupeditEubacteriumrectale–Clostridiumcoccoides, souvent le plus important (14 à 31%desbactéries totales enmoyennesuivantlesétudes).Cegroupeestcomposéd’espècesbactériennesappartenantauxgenres Eubacterium, Clostridium, Ruminococcus, Butyrovibrio. Le phylum desFirmicutes comprendégalement legroupeClostridium leptum,avecnotamment lesespèces Fæcalibacterium prausnitzii, Ruminococcus albus et Ruminococcusflavefaciens,groupequiestaussitrèssouventdominant(16à22%enmoyenne).

- Les Bacteroidetes sont représentés par les genres apparentés à Bacteroides(Bacteroides,PrevotellaetPorphyromonas).Ilssonttoujoursprésentsetpartagentladominanceavec lesgroupesprécédents (9à42%desbactéries totales suivant lesétudes).

- LephylumActinobacteriaestmoinssystématiquementdétectéendominancemaisilreprésente enmoyenne quelques pourcents des bactéries totales.On y trouve lesbifidobactéries(0,7à10%)etlesbactériesdugroupeCollinsella–Atopobium(0,3à3,7 % en moyenne). Les entérobactéries sont plus rarement observées dans lemicrobiotefécaldominant(enmoyenne0,4à1%),demêmequeleslactobacillesetstreptocoques(2%).

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Figure728:Compositionetdensitédumicrobioteintestinal

En raison d’une diminution des coûts du séquençage haut-débit de l’ADN et de

l’améliorationdesoutilsd’analysebio-informatique,ilestaujourd’huipossibledecomparerla composition des communautés bactériennes du tractus digestif d’un grand nombre depersonnes (enfant/adulte/personne âgée, patients atteints d’obésité, patients atteints demaladies inflammatoires chroniques de l’intestin, etc.). L’analyse de l’ensemble desgénomes bactériens présent dans un écosystème donné est appelée analysemétagénomique.Degrandsprogrammesd’analysedumétagénome intestinalhumainontété entrepris ces dernières années, exemple avec le programme MetaHIT. Dans ceprogramme, l’analysede396échantillonsdesellesapermisd’obteniruncataloguede3,9millionsdegènesrépartisdans7381groupesdeco-abondancedegènes.Environ10%decesgroupes correspondent à des bactéries (plus des 3/4 de ces bactéries n’ayant jamais étéréférencéesdanslesbasesdedonnées).Les90%restantscorrespondentàdesgroupesdevirusbactériens(bactériophages),deplasmides(fragmentsd’ADNbactérienscirculaires)ouencore des gènes protégeant les bactéries d’attaques virales (connus sous le nom deséquencesCRISPR).

La composition du microbiote intestinal peut être donc riche et variée. Elle peut

égalementévoluerdemanièrequantitativeetqualitative.Elle vad'ailleursévoluerduranttoute la période post-accouchement jusqu'à l'enfance. De nombreux facteurs vontinfluencer la mise en place de la flore intestinale chez un individu donné. Durant la viefœtaleetimmédiatementaprèslasortieduventrematernel,letractusdigestifdunouveau-né est stérile. La colonisation commence après la rupture des membranes fœtales. Le

LES FONDAMENTAUX DE LA PATHOLOGIE DIGESTIVE © CDU-HGE/Editions Elesevier-Masson - Octobre 2014 Toute reproduction ou traduction de l’ouvrage est interdite sans l’accord préalable de l’éditeur

Partie II : Chapitres de synthèse - Chapitre 13 : Microbiote et immunité intestinale - Page 9/13

Figure 13.5 : Composition et densité du microbiote intestinal La concentration en micro-organismes augmente entre la bouche et le côlon. Les bactéries constituent la grande majorité

des micro-organismes du microbiote intestinal. Illustration : Carole Fumat

Propriétés Diversité Le microbiote intestinal de chaque être humain est composé de plusieurs centaines d’espèces bactériennes différentes dont le pool de gènes est 100 à 150 fois supérieur à celui du génome humain. Le microbiote intestinal est donc porteur d’une très grande diversité d’espèces bactériennes et de fonctions potentielles. Chaque individu a un microbiote intestinal différent en termes d’espèces bactériennes. Néanmoins, certaines espèces présentes chez la majorité des individus semblent représenter les piliers du microbiote. Par ailleurs, malgré cette diversité interindividuelle en termes de composition de bactéries, les fonctions portées par le microbiote sont globalement conservées entre les individus.

Stabilité et résilience Une fois le microbiote mis en place, et si les conditions environnementales ne changent pas, la composition en grands groupes bactériens et en espèces dominantes est stable dans le temps. En revanche, les populations sous-dominantes, minoritaires, peuvent varier. Des facteurs

Œsophage

Estomac

Côlon

Intestin grêle

109–1012 CFU / g :- Bacteroides- Faecalibacterium- Eubacterium- Clostridium- Ruminococcus- Bifidobacterium

103–108 CFU / g :- Lactobacillus- Streptococcus- Enterobacteriaceae

Modifié d’après Dave et al. Translational research 2012

101–103 CFU / g :- Lactobacillus- Streptococcus

BacteroidetesProteobacteriaActinobacteria

FirmicutesAutresFusobacteria

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nouveau-nésetrouvebrutalementplongédansununiversbactérienricheetvariéetvasecoloniser rapidement avec une flore simple, à partir des flores maternelles vaginales,intestinalesetcutanéesetdesfloresdel'environnement.Bienquel'enfantsoitexposéàdenombreusesespècesbactériennes,toutesnecolonisentpassontubedigestif.Eneffet,desinteractions bactérie-hôte et bactérie-bactérie interviennent dans l'établissement de laflore.Dansdesconditionsnormales,lespremièresbactériesàs'implantersontlesbactériesaérobies-anaérobies facultatives (staphylocoques, entérocoques, entérobactéries). A cestade,lepotentield'oxydo-réductioncoliqueestélevéetnepermetpasledéveloppementdebactériesanaérobiesstrictes.Cesbactériesaérobies-anaérobiesfacultatives,dontletauxatteint rapidement 1010 à 1011 UFC/g de contenu colique, consomment de l'oxygène,entrainant ainsi une diminution du potentiel redox. Cela permet l'implantation, dès lapremière semaine de vie, des genres anaérobies stricts tels que les Bifidobacterium,BacteroidesetClostridium. Inversement, l'oxygènediminuant, leniveaud'implantationdesgenresaérobiesrégresse29.

Si le nouveau-né se colonise rapidement, toutes les bactéries qu'il rencontre ne

s'implantentpas.Latransmissiondesbactériesdesfloresvaginaleetfécaledelamèreaétéclairementmontréeetlaflorefécaleapparaîtêtreledéterminantessentiel,lesnouveau-nésétantcolonisésplutôtparlesentérobactériesetbifidobactériesd'originefécalequeparleslactobacilles d'origine vaginale. En parallèle, la transmissionmanuportée par le personnelhospitalier n'est pas négligeable. Les conditions d'hygiène ayant une influence sur lacolonisation digestive du nouveau-né. L'impact sur la santé de l'enfant des différencesd'implantationdesa floreestencoreassezpeuconnu.Certainsgenresbactériens,dont legenreBifidobacteriumdominantchezl'enfantnéàtermeetallaité,sontconsidéréscommebénéfiques.Parailleurs,lafloredigestiveestreconnuedepuislongtempscommeparticipantaux effets de barrière responsables de la résistance à la colonisation par des bactéries àpotentialitépathogèneainsiqu'àlamaturationdusystèmeimmunitaireintestinal.25

De nombreux éléments sont connus pour modifier cette cinétique d'implantation.

Cependant les facteursbactérienspermettant l'implantationd'une souchedonnée restentpeu connus. Pour le reste, il existe d'autres facteurs où certaines études ontmontré uneinfluence:

- L'influencedumoded'accouchement : lespremièresbactériesque rencontrent lesenfantsnésparcésariennesontmajoritairementcellesdeleurenvironnement(airetpersonnel soignant). Ainsi, les premières bactéries implantées seront toujours lesespècesanaérobiesfacultatives(entérobactéries,entérocoques,staphylocoques).Enrevanche, la flore anaérobie stricte s'implantera beaucoup plus tardivement. Ceretard portant principalement sur les genres Bifidobacterium et Bacteroides.Cependant, les bactéries anaérobies capables de sporuler et donc présentes dansl'environnementcommelesClostridiumpourronts'implanterrapidement.Ceretardd'implantationpeutpersisterplusieursmois25,30.

- L'influencedutermedenaissance:lesenfantsnésprématurémentonteuxaussiuneimplantationdelafloredigestiveperturbée.Eneffet,souventnésparcésarienne,ils

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viventassezrapidementaprès l'accouchementdansunenvironnementaseptisé,encouveuse, séparés de leurmère. Il arrivemême que certains soient soumis à uneantibiothérapieàlargespectre.LesbactériescommeBifidobacteriumetBacteroidesauront alors un retard à l'implantation beaucoup plus important que pour lesnouveau-nésmisaumondeparvoiebasse.

- L'influencedel'alimentation:lemoded'alimentationdunouveau-néestlefacteurleplus étudié. Lamicroflore du nouveau-né allaité estmoins diversifiée que celle dunouveau-né nourri au lait artificiel, l'allaitement favorisant l'implantation en floredominante du genre Bifidobacterium. Parallèlement, l'implantation desentérobactéries, et surtout celle des Clostridium et des Bacteroides est retardéeet/ou s'effectue à un niveau moins élevé. Dès qu'une alimentation mixte estintroduite, La floreprend rapidementunprofil de floredenouveau-nésnourris aulaitartificiel.Cettedifférencedecolonisations'expliqueraitparl'absencedepouvoirtampon du lait maternel, entraînant un pH colique faible (5 à 6) favorable àl'implantation des bifidobactéries et lactobacilles et défavorable aux autres genresbactériens. Certaines études montrent une implantation à haut niveau par lesbifidobactéries chez les enfants nourris avec un lait adapté, mais les espècesdominantes les colonisant semblent être différentes. De nos jours, les différencesentre les deux populations semblent s'atténuer, d'une part, par l'amélioration desformules de laits adaptés pouvant contenir des facteurs bifidogènes comme lesoligosaccharideset,d'autrepart, en raisondesmodificationsdesautres conditionsd'implantationde floreobservées.Aumomentdu sevrage, les différencesde flores'atténuententrelesdeuxgroupesquihébergentunefloreprochedelafloreadulteversl'âgededeuxans.

- L'influencedel'antibiothérapie:cetaspectn'aétéquetrèspeuétudié.Goldmanetal.31n'ontpasobservédemodificationdel'implantationdelaflorechezlenouveau-némêmeavecuneantibiothérapiedeplusdetroisjours,maisseulelafloreaérobieaété étudiée. Dans l'étude de Bennet32, 60 à 80% des enfants ayant reçu uneantibiothérapieontétécolonisésparunefloreanaérobieàunniveaun'excédantpas106bactéries/gdefèces,alorsque100%desenfantsnontraitésontétécolonisésàunniveaude107/g.Laplupartdesétudesn'analysantpaslatotalitédelaflore,entreautrelafloreanaérobie,lerôleexactdel'antibiothérapieestdifficileàévaluer.

- L'influence de l'environnement et des conditions d'hygiène : l'environnement peutinfluencerlacolonisationintestinale.Ainsi,lafloreintestinaledesenfantsnésdansles pays en développement diffère de celle des enfants nés dans des paysdéveloppés.D'autresétudesontrelevédesdifférencesentrelafloreintestinaledesenfantsnésenmilieururaletcelledesenfantsnésenmilieuurbain.Oubienencored’un enfant né à domicile ou à l’hôpital. Depuis une dizaine d'années, les étudesmontrentuneévolutionde l'implantationde la floreavecun retardd'implantationdes bactéries de la flore normale. La colonisation bactérienne par les bactériesd'origineentérique(entérobactéries,Bacteroides,Bifidobacterium)àunesemainedevien'estplusuneconstante.Dansuneétudecomparantdesnouveau-néssuédoisetestoniens,nésàterme,parvoiebasseetallaités,seulement50%desnouveau-nés

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suédoisétaientcolonisésàunmoisdeviepar legenreBifidobacterium. Ce retardserait expliqué par des conditions d'hygiène plus strictes entourant lesaccouchementsenSuède,réduisantl'expositiondel'enfantàlafloremicrobiennedesa mère et favorisant l'acquisition de souches provenant de l'environnement.L'explicationlaplusprobablepeutêtretrouvéedansl'utilisationlargedel'antisepsiede la sphère vaginale, ainsi que l'usage plus large de l'antibioprophylaxie. Parexemple,uneétudeamontréquecetteantibioprophylaxiemodifiait l'implantationde la flore du nouveau-né en diminuant la colonisation par les genres sensibles àl'antibiotique :Bifidobacterium etClostridium. Cettemodification de flore pourraitaltérer l'effetbarrière favorisant la colonisationpardesgermes résistantset, ainsi,être responsable de l'augmentation observée des infections néonatales à germesrésistantsàl'antibiotiqueadministréenperpartum.Parailleurs,lesconséquencesàlong terme de ces modifications ne sont pas connues ; elles pourraient être unfacteur clé dans l'augmentation des allergies dans nos pays occidentaux, par unemauvaiseorientationdusystèmeimmunitaireintestinal.

Figure833:Comparaisondelacompositiondumicrobiotefécalchezdeuxpopulations

d'enfantsprovenantd'unvillageduBurkinaFaso(A)etdelabanlieuedeFlorenceenItalie(B)

Cette illustration confirme que la composition dumicrobiote est influencée par nos

modesdeviesetnoshabitudesalimentaires.Eneffet,dansl'étudedeDeFilippoetal.33,onobserveuneplusgrandeproportiondebactériesdugroupeBacteroideteschez lesenfantsburkinabè que chez les enfants italiens. L'environnement microbien et les conditionsd'hygiène en Afrique et en Europe ne sont pas du tout lesmêmes, et d'autant plus quel'alimentation de base africaine est beaucoup plus riche en fibre que l'alimentationeuropéenne.Onobservebienquedenombreuxfacteursinfluencentlamiseenplacedelamicroflore digestive au cours du développement du nouveau-né. Cependant cettecompositionquantitativeetqualitativedumicrobioteintestinalpeutégalementévoluerau

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cours du temps chez l'adulte, de manière beaucoup plus minime. Cela peut avoir desconséquencesentermedequalitédevieoudepathologie.•Rôlesdumicrobioteintestinal

Lemicrobioteintestinalvaavoirdenombreusesfonctionsauseindenotreorganisme.Unerelationcommensalevoiresymbiotiquesecréeentrelesbactériesetnotreorganisme.Ellesontbesoindesubstratscarbonésapportésparnotrealimentationpourvivre.Enretour,ellesnousapportentdesfonctionsetdescapacitésquenotreintestinnepossèdepas.Toutd'abord,nousverronslesaspectsmétaboliquesliésàlaflore,puisnousverronslesaspectsliésàlamuqueuseintestinaleetl'influencedumicrobiotesurcelle-ci,etenfinnousverronslelienentreimmunitéintestinaleetflorecolique.

Lesbactériessontdesespècesprocaryotescontenanttoutunbagageenzymatiqueetcellulaire permettant la transformation de certains substrats en d'autres produits. Cessubstratssontapportésengrandepartiepar l'alimentation. Ils sont issusdesglucidesnondigérés dans la partie supérieure du tube digestif, ainsi que des lipides et des protéinesingérés,presquetotalementabsorbésdansl'intestingrêle.Cesglucidessontprincipalementreprésentéspar l'amidon résistant, lespolyosides végétaux (paroicellulaireet réserve)etcertains oligosides et oses. L'amidon résistant à l'action des amylases pancréatiques ainsique les polyosides constituant la paroi des végétaux sont quantitativement les plusimportants.Environ10%del'amidonconsommééchappeàladigestiondel'intestingrêleetconstituelesubstratexogènemajeurparvenantaucolon(8à40gparjour).Lespolyosidesde la paroi des végétaux comme l'inuline, les gommes ou les mucilages, sont égalementfermentescibles.Certainsdecespolymèresétantégalementutiliséscommeémulsifiantsouagent de texture par l'industrie agroalimentaire, l'apport exogène total de ces polyosidesvégétauxestestiméà8-20gpar jour.Enfin, certainsoses,oligosideset sucre-alcoolsnondigestiblesparviennentaussiaucôlon,telsqueleraffinoseetlestachyosecontenusdanslesharicotsou lesfructo-oligosaccharidesprésentsdans l'artichaut, l'oignonainsiquecertainsédulcorants. Il existe également des substrats endogènes fournis par l'organisme etdirectement utilisés par les bactéries. Ils peuvent provenir de l'intestin grêle (enzymespancréatiques, stérolsbiliaires, cellules épithélialesdesquamées,mucines…)etde laparoiintestinale elle-même (muco-polysaccharides, mucines…). Les cellules épithélialesdesquamées sont un substrat endogène important, le renouvellement de l'épithélium del'intestin grêle et du côlon étant très rapide. Les sécrétions pancréatiques, contenant unegrandevariétéd'enzymeshydrolytiques,représententunedessourcesimportantesd'azoteorganiquepour la florebactérienne.Enfin,diversstérols (cholestérol,acidesbiliaires)et labilirubineprovenantdessécrétionsbiliairesparviennentégalementaucolôn25.

Physiologiquement, ladigestiondesglucidesdans l'organismesefaittoutau longdutube digestif, de la bouche jusqu'au côlon. Les sucres alimentaires sont ingérésprincipalement sous forme d’amidon (polymères de molécules de glucose liées par lesliaisons alpha 1-4 et alpha 1-6), de sucres simples disaccharidiques (saccharose [glucose-

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fructose],lactose[galactose-glucose])etmonosaccharidiques(fructoseetsorbitoldesfruits)et de polyosides (surtout cellulose) contenus dans les fibres végétales. La digestion desamidons est amorcée par la salive et se déroule essentiellement dans l’intestin grêle,conduisant à l’absorption du glucose par transport actif au niveau des entérocytes. Lespolyosides végétaux traversent intacts l’intestin grêle. Les polyosides végétaux nondigestibles traversent intacts le côlon et sont expulsés dans les selles. Les polyosidesvégétaux digestibles, les amidons et le lactose ayant résisté à la digestion dans l’intestingrêle, ainsi que certains polyosides endogènes (provenant de cellules desquamées), sontpartiellementoutotalementfermentésparlafloremicrobienne28.

Ladégradationanaérobiedespolyosidesdanslecôlonestunprocessuscomplexequi

implique lacontributiondeplusieursgroupesbactérienspossédantdesactivitésvariéesetcomplémentaires. Ces micro-organismes interagissent entre eux pour former une chainetrophique, assurant la transformation des macromolécules glucidiques en acides gras àchaine courte (principalement acétate, propionate et butyrate) et en gaz (hydrogène,dioxydedecarboneetméthanechezcertainsindividus).

Figure925:Schémaglobaldelachaînetrophiquededégradationetdefermentationdes

glucidesparlamicroflorecolique.

Lapremièreétapedelachaineestreprésentéeparl'hydrolysedespolyosidesparlesbactérieshydrolytiques, aboutissant à la libérationde fragmentsosidiquespluspetits. Lesproduitsdelafermentationdesosesparlesbactérieshydrolytiquesetglycolytiquesincluentcertains intermédiaires comme le formate, l'éthanol, le succinate et le lactate, qui nes'accumulent pas dans l'écosystème mais sont métabolisés par d'autres espècesbactériennesenproduits finaux.L'hydrogèneformélorsdecesprocessusfermentairesesten majeure partie réutilisé in situ par les bactéries hydrogénotrophes. La microflorehydrogénotrophejoueainsiunrôlefondamentalauseindel'écosystèmecarellemaintient

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la pression partielle en hydrogène à un niveau faible, ce qui assure l'éfficacité de ladégradationdelamatièreorganiquedanslecôlon(oxydationpluscomplètedessubstratsetaugmentationdugaintotald'ATPpourlamicroflore).Laproductiondeméthane(CH4)lorsdumétabolisme de l'hydrogène (H2) par les archéesméthanogènes dans le côlon, séparel'humanitéendeuxgroupes,selonquelesindividusquilescomposentexcrètentounoncegaz (sujetsméthano-sécréteurs et nonméthano-sécréteurs).On verra plus tard que cettedistinctionpeutavoiruneimportancedanscertainsTFIcommeleSII.

Les principales espèces bactériennes, pour lesquelles une activité hydrolytique àl'égard des polymères glucidiques a été démontrée, appartiennent au genre Bacteroides,Bifidobacterium et Ruminococcus ainsi qu'à quelques espèces des genres Clostridium etEubacterium. Ces bactéries sont capables de synthétiser différents types depolysaccharidases et/ou de glucosidases, enzymes non produites par l'organisme humain,qui leurpermettentd'hydrolyser lespolyosidesetd'utiliser les fragmentsosidiques libéréscommesourcedecarboneetd'énergie.Deplus, laplupartdesespècesmajeuresducôlonhumainsontcapablesd'utiliserl'amidoncommesourced'énergie.Toutefois,Bacteroidesestconsidéré comme le genre amylolytique dominant. Tous les autres types de polyosides,comme la cellulose, l'hémicellulose, la pectine, les gommes, l'inuline, ou d'autrespolysaccharides sont eux aussi dégradés par les mêmes types de bactéries grâce à leursystème enzymatique. La dégradation d'une structure aussi complexe que lespolysaccharides comme la cellulose des végétaux nécessite vraisemblablement lacontribution de plusieurs espèces bactériennes aux activités complémentaires. D'autressubstratssontdégradésparlesbactériescommelesmucinesetlesmucopolysaccharides.Lagrandevariétédespolyosidesdégradésdanslecôlongénèreunnombreimportantd'osesdenatures différentes, contribuant ainsi aumaintien de la diversitémicrobienne au sein del'écosystèmeintestinal.

Figure1025:Principalesvoiesmétaboliquesdefermentation

desglucidesparlamicroflorecolique.

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La plupart des substrats osidiques formés par les différents processus enzymatiquescités plus hauts vont être catabolisés par la microflore selon un nombre relativementrestreintde voiesmétaboliques, communesà cellesutiliséespar les celluleshumaines. Lamajoritédesespèces,àl'exceptiondesbifidobactéries,utiliselaglycolysepourconvertirlesosesenpyruvate.Lavoiedespentoses-phosphatesestégalementempruntéeparcertainesbactéries coliques et contribue également à la synthèse de pyruvate. Le pyruvate,métabolite central des processus fermentaires, est ensuite transformé selon différentesvoies en produits terminaux de fermentation. Ces métabolites seront principalementl'acétate, le propionate et le butyrate. Toutefois, un certainnombred'espècesproduisentégalement des métabolites intermédiaires comme le succinate, le lactate, l'acrylate,l'éthanol,leformateainsiquel'H2etleCO2,afind'assurerlaréoxydationdeleurcofacteursréduits, comme le NADH,H+ produit lors de la glycolyse. La synthèse de ces produitsintermédiaires contribue également au maintien de la diversité colique et participe laproduction d'énergie via la synthèse d'ATP pour la microflore mais l'organisme humainégalement.

Lesproduitsissusdelafermentationcoliquessousformedegazsontprincipalement

représentés par l'hydrogène (H2), le dioxyde de carbone (CO2) et le sulfate (SO4). C'estmajoritairementl'hydrogènequiseraproduitavecenviron300mL/gdesubstratfermenté.Maislafloreimpliquéedanslaproductiond'hydrogènerestemalappréhendée.Invitro,onretrouve les genres Clostridium,Ruminococcus et Eubacterium. L'H2 produit est en partieexcrétéeparvoiepulmonaire (15%)etanalevia les flatulences (10%),mais laplusgrandepart est réutilisée par les micro-organismes hydrogénotrophes. Trois mécanismeshydrogénotrophesontétédécritsdanslecôlonhumain:

Figure1125:Devenirdel'hydrogènedanslecôlon.

- laMéthanogenèse:elleconduitàlaformationduméthane(CH4)àpartirdel'H2et

duCO2.Seulesdeuxespècesd'archaeaméthanogènesontétédécritesdanslecôlonhumain. Ils'agitdeMethanobrevibactersmithiietdeMethanosphaerastadmaniae.Leniveaudelapopulationméthanogènevarieainsidel'indétectableà107/gchezlessujets non méthano-excréteurs et est supérieure à 107/g chez les méthano-

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excréteurs. La proportion d'individus méthano-excréteurs dans la populationoccidentalevariede30à50%34.

- la Sulfato-réduction : elle correspond à la réduction du sulfate en sulfured'hydrogène (H2S), tout en générant de l'ATP. Les espèces sulfato-réductrices ducôlon humain appartiennent à différents genres bactériens, le genre prédominantétant Desulfovibrio. L'activité hydrogénotrophe de la flore sulfato-réductrice estdépendantedelaquantitédesulfatedisponibledansl'écosystèmeprovenant,soitdesubstrats alimentaires sulfatés, soit de sécrétions endogènes. La disponibilité ensulfateétantvraisemblablementdifférenteenfonctiondurégimealimentaireetdessécrétionsdemucus,lafloresulfato-réductricedoitdoncêtrecapabledes'adapteràdesvariationsimportantesdeconcentrationensulfatedansl'écosystème.

- l'Acétogenèse réductrice : il s'agitd'unevoieparticulièredebiosynthèsed'acétatepar réduction de deux CO2 par quatre H2. Ce métabolisme aboutit à la synthèsed'ATP.Cetteproductiond'acétatedemanièreautotrophepermetàcesbactériesdese développer sans la présence de substrats glucidiques dans l'environnementproche. Cela leur permet de s'adapter aux variations de conditions nutritionnellesdansl'écosystème.Lesespècesacétogèneshydrogénotrophesisoléesappartiennentà des genres variés commeClostridium,Ruminococcus et Streptococcus. L'aptitudede certaines espèces à co-métaboliser un substrat organique et l'H2 leur confèreaussi un avantage écologique par rapport aux autres micro-organismeshydrogénotrophes.Eneffet,celaleurpermetd'obtenirunequantitéplusimportanted'énergieparunitédetempsetparquantitédesubstratfermenté.

Lesbactériesducôlonproduisentetconsommentdoncdelargesquantitésdegaz.La

floreintestinalejoueainsiunrôlemajeurdansl'homéostasiedesgaz intestinaux,maisdenombreux aspects de la relation flore-gaz intestinaux demeurent inconnus. Cettehoméostasieestunprocessusfinementrégulé.Eneffet,denombreusesétudesmenéessurdespopulationsvariées,mettantenjeudifférentestechniques,ontdémontréque,malgrélatrèsgrandecontenancedu tractusgastro-intestinal, le volume totaldesgaz intraluminauxs'élèveseulemententre100et200mL.L'entréedesgazs'effectuelorsdeladéglutition,deréactionschimiques,de ladiffusionàpartirdusangetde la fermentationbactérienne.Lasortie des gaz résulte de l'absorption et de l'excrétion respiratoire, de la consommationbactérienneetdel'évacuationanale.Ladéglutitionintroduitunepetitequantitéd'airdansl'estomac,quiestplusimportanteencasd'absorptiondeboissonsgazeuses.L'airenexcèsest éliminé de l'estomac par éructation, absorption ou vidange dans l'intestin. Les gazintraluminaux tendent à s'équilibrer avec les gaz du sang veineux selon trois facteurs : lapression partielle de chaque gaz des deux côtés de la barrière intestinale, sa capacité dediffusionetletempsd'expositiondugazàlasurfacedediffusion,quidépenddelavitessede son transit. Ainsi, des gaz fortement diffusibles présents en grandes quantités dans letubedigestif,telqueledioxydedecarbone(CO2),sontfacilementabsorbés.

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Aladifférencedesprocessusdemétabolisationdesglucidesoudesprotides,lerôledela microflore sur le métabolisme des gaz varie de façon très importante d'un individu àl'autre.Deuxtypesdefloressontimportants:lesmicro-organismesquiproduisentdesgazetceuxquienconsomment.Unepartiedelaflorecoliqueconsommelesgazintestinaux,cequipeutexpliquerunegrandepartiede ladisparitiondesgaz intraluminaux.Une fractiondes gaz produits par les bactéries coliques diffuse dans le sang et est excrétée dans larespiration.L'homéostasiedesgazestfinalementréguléeparletransitetl'évacuationanaledes gaz en excès. Or, pour des individus issus d'une même population ayant les mêmeshabitudesalimentaires,onobserveunedifférencedanslamétabolisationdesgaz,montrantdesdifférencesintra-individuellesdelamicroflorecoliqueentrechaqueindividu.Laquantitédegaz intraluminalvaégalementvarierselon lesdifférentsaliments ingérésaucoursd'unrepas.

Tableau125:Exemplesd'alimentsflatogéniques,ayanttendanceàaugmenterlesflatulences

Alimentsfortementflatogéniques

Alimentsmodérémentflatogéniques

Alimentspeuflatogéniques

HaricotssecsChouxdeBruxellesOignonsCéleriCarottesRaisinssecsBananesJusdePruneauAbricotsGermesdebléBeignets

PommesdeTerreAuberginesAgrumesPommesPâtesPain

Viandes:volaille,poissonŒufsRizPop-cornLaitueTomatesAvocatBrocoliChou-fleurAspergeCerisesRaisinNoisettesChocolat

Lesalimentsglucidiquesconduisantàlaproductiondegazdanslecôlonpeuventêtre

classésdelafaçonsuivante:- Certaines fibres alimentaires, telles que les xylanes et la pectine, sont

fermentesciblesetproduisentdesgaz,tandisquelesfibresnonfermentables,tellesquelacelluloseetlesondemaïs,n'enproduisentpas.

- Une proportion significative (10 à 30%) de l'amidon ingéré échappe à l'absorptiondansl'intestingrêleetcontribueàlaproductiondegazdanslecôlon.Parexemple,l'amidon desmacaronis et du pain blanc est incomplètement absorbé, tandis quel'absorptiondel'amidondupainàbasedefarinepauvreenglutenoudefarinederizestcomplètedansl'intestingrêle.

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- Certains oligosaccharides, tels que le raffinose et le stachyose, semblent être lasourcedegazlaplusimportantedesharicotssecscarilsnesontpasabsorbésdansl'intestingrêle.

- Certains sucres, telsque le sorbitolet le fructose, sontégalement incomplètementabsorbésetfermententdanslecôlon.

- D'autres composants d'un repas normal exercent un rôle modulateur surl'absorption. Par exemple, les haricots secs contiennent une protéine qui inhibel'amylasepancréatiqueetcontribueainsiàlamalabsorptiondesglucides.Enfin, ilaété décrit des interactions entre les différents composants alimentaires. Parexemple,lesfibresmajorentlamalabsorptiondel'amidon.

Letempsdetransitdesgazintraluminauxdansl'intestinvariepeud'unindividuàun

autre. Et lors d'expériences où un volume de gaz constant est introduit dans l'intestin, lamotricitécoliquevas'adapterauvolumedegazprésentdansl'intestinetlesujetévacuerales gaz sans symptômes gênants. Toutefois, le type d'activité motrice qui détermine letransit gazeux n'est pas connu à ce jour. Ce transit est régulé par différents réflexesintestinaux.Leslipidesintraluminauxleretardedefaçondose-dépendanteetentrainentlarétentiondesgaz.Al'opposé,d'autresréflexesaccélèrentlavitessedutransit.Parexemple,ladistensiongastriqueproduituneévacuationimmédiatedesgazendogènesprésentsdansle tube digestif et accélère le transit des gaz exogènes, ce qui suggère lamise en jeu deréflexesgastrocoliques.

Lamicroflore colique intervient égalementdans la dégradationdes protéines et despeptides,générantdesmétabolitespotentiellementtoxiquespour l'hôte(phénols, indoles,ammoniaque,amines).Lesprotéinesetlespeptidesétantlaprincipalesourceazotéedanslecôlon, lesbactériesdoiventhydrolyser cespolymèresafindedisposerdes carbonesetdel'azotequi lescomposent.Laprotéolyseestainsiunprocessusfondamentaldans lecôlon.Lesmécanismesrégulantceprocessussontencoremalconnus.Ungrandnombred'espècesbactériennes coliques possèdent une activité protéolytique. Les bactéries protéolytiquesprédominantes appartiennent aux genres Bacteroides, Clostridium, Propionibacterium,Fusobacterium,StreptococcusetLactobacillus.Bienquetrèspeuétudiés,lespeptidesontunrôleimportantauseindel'écosystèmeintestinal. Ilssont,eneffet,capablesdestimuler invitro la croissance de nombreuses espèces bactériennes coliques. Leur utilisations'accompagnefréquemmentde l'excrétiond'acidesaminésnonnécessairesà lacroissancede labactérie.Cesacidesaminés libresdeviennentalorspotentiellementdisponiblespourd'autresespècescoliquesn'assimilantpas lespeptides.Unnombre importantdebactériesutilisentlesacidesaminéscommesourceprincipaled'énergie,cesbactériesnefermentantpas les glucides. Il s'agit des genres Veillonella, Peptococcus, Fusobacterium,Acidamonicoccus, Clostridium et Eubacterium. Toutefois, de nombreuses espècesglycolytiques utilisent aussi les acides aminés et les peptides uniquement comme sourced'azote.

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Figure1225:Principalesvoiesdumétabolismedesprotéinesdanslecôlon.

Lesproduitsobtenusparlemétabolismedesprotéinessontprincipalementl'acétate,

lepropionateetlebutyrate,eux-mêmestransformésparcertainesespècesbactériennesenacides gras à chaine courte ou en acides gras ramifiés. Les composés phénoliques etindoliques sont issus de la dégradation des acides aminés aromatiques (tyrosine,tryptophane, phénylalanine) effectuéepar certaines espèces deClostridium, Lactobacillus,Bifidobacterium et d'entérobactéries. Ces métabolites sont absorbés et détoxifiés par lamuqueusecolique,puisexcrétésdanslesurines.Cettedégradationdesprotéinesestaussiàl'origine de la formation d'ammoniaque. D'ailleurs celle-ci constitue lamajeure partie del'ammoniaque présent dans l'organisme, l'urée ne contribuant que faiblement à cetteproduction. L'ammoniaque formée par la flore intestinale est absorbée par la muqueusecoliqueettransportéejusqu'aufoieparlaveineporte,oùelleestconvertieenuréequiestexcrétée vers les urines. Elle représente également la source d'azote préférentielle d'ungrandnombred'espèces coliques. La concentration en ammoniaquedans le côlon résulted'unéquilibreentre ladésaminationdesacidesaminéspar lesbactérieset l'utilisationdel'ammoniaquelibéréeparlescellulespourleursbiosynthèses.Lesautresproduitsissusdeladégradation des protéines sont les amines et polyamines, ayant un rôle plus ou moinstoxique pour l'organisme. Ils pourraient jouer un rôle important dans diverses affections(migraine, schizophrénie, gastro-entérites infantiles…). Les amines sont, en effet,susceptiblesd'affecterungrandnombredefonctionschezl'homme.

Les bactéries intestinales vont également participer au métabolisme des stérols

comme le cholestérol, les acides biliaires ou les hormones stéroïdiennes. Leur bagageenzymatique leurpermetdemétaboliserendifférentsselsbiliairessecondaires, lesacidesbiliairesnonréabsorbésparlamuqueuseduodénale,cequipermetd'enréduirelatoxicité.Une partie des hormones stéroïdiennes (2mg par jour) serait métabolisée par la floreintestinale.Lesmétabolitesforméssontprincipalementréabsorbésettransportésaufoieoùilssontdenouveauconjuguésetexcrétésdanslabile.

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Les substrats obtenus par la fermentation colique vont servir à l'organisme pour denombreusesautres fonctionsmétaboliques.Cesmétabolites vontnotammentêtreutiliséspar laparoi intestinaleafindenourrir lescellulesqui laconstitue,commelesentérocytes.Lesacidesgrasàchainecourte,commelebutyrate,vontconstituerunsubstraténergétiquemajeur de l'épithélium colique. Chez l'adulte sain, le maintien de l'homéostasie del'épithéliumreposesur l'équilibre, finement régulé,entre lenombredecellulesproduites,d'unepart,etcelleséliminées,d'autrepart.Cetéquilibrepeutêtrerompu,notammentdansle cadredemaladies inflammatoires chroniquesde l'intestin comme lamaladiedeCrohn.Lesautresmétabolitesissusdelafermentationcoliqueutilisésparlesentérocytessontlesautres AGCC, le glucose et la glutamine, d'origine sanguine. Ces éléments sont utilisés ausein de lamitochondrie des cellules de la paroi intestinale et vont aboutir à la formationd'ATPvialecycledeKrebsetàlaformationdecorpscétoniques.Denombreusesétudesontmontré l'action du butyrate sur la trophicité de la muqueuse intestinale35,36. Il agitnotammentenstimulantlasynthèsedefacteursdecroissancetelsquel'EGFetagitsurlesvoies de l'apoptose en les régulant. En revanche, la production d'ammoniaque par lafermentationcoliquepeutavoiruneffetinversesurlatrophicitécolique.Elleaugmenteraitle renouvellement cellulaire au niveau des cryptes coliques, augmentant ainsi le taux derenouvellement cellulaire, et réduirait l'utilisation cellulaire de butyrate dans lesentérocytes.

Danscertainesétudes37,38, lamanipulationde lacolonisationdetelleoutellesouche

de bactérie au sein du microbiote de rats dépourvus de flore a permis d’observer desmodificationsdel’épithéliumcolique.Onconstatenotammentunehypoplasiemarquéedela muqueuse colique ainsi qu’une diminution d’environ 20% du nombre de cellules parcryptechezl’animalaxénique(dépourvudeflore)comparéauxanimauxconventionnels.Lavitesse de production des cellules est aussi diminuée. L'administration chez ces animauxaxéniques de butyrate a démontré une activation du renouvellement cellulaire dans lamuqueuse colique. Chez les rats dépourvus de flore, les capacités métaboliques desentérocytes sont également diminuées, avec une diminution de la synthèse de corpscétoniques, mais une augmentation de la capacité à utiliser la glutamine. Ces résultatssuggèrent aussi que la glutamine puisse représenter pour l'entérocyte un substraténergétiquecompensateurenl'absenced'AGCC.

La muqueuse intestinale est l'interface principale entre le système immunitaire et

l'environnement externe. Ainsi, il n’est pas surprenant de constater que les tissuslymphoïdes associés à l’intestin contiennent un nombre important de cellulesimmunocompétentes. Le dialogue entre l'hôte et les bactéries à l'interface muqueusesemble jouer un rôle dans le développement d'un système immunitaire compétent. Lesanimauxélevésdansunmilieusansgermesontde faiblesdensitésdecellules lymphoïdesdans lamuqueuse intestinale. Lesstructuresganglionnairesspécialiséessontpetiteset lesconcentrations circulantes d'immunoglobulines dans le sang sont faibles. La colonisationmicrobiennedu tractusgastro-intestinalaffecte la compositiondu tissu lymphoïdeassociéau tube digestif (GALT). Immédiatement après l'exposition aux microbes luminaux, le

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nombre de lymphocytes intra-épithéliaux augmente considérablement. Les centresgerminatifs avec des cellules productrices d'immunoglobulines apparaissent rapidementdans lesganglionsetdans la laminapropria.Enfin, lesconcentrationsd'immunoglobulinesaugmententsubstantiellementdanslesérum39.

De nombreuses et diverses interactions entre les bactéries, l'épithélium et le tissu

lymphoïde associé à l'intestin sont impliquées dans la modélisation des mécanismes demémoire de l'immunité. Par exemple, la flore a été régulièrement impliquée dans lesphénomènesdetoléranceorale.Laréponsesystémiqueàunantigènespécifiquepeutêtreabrogéeaprèsl'ingestiondumêmeantigène.Ceteffetpersistependantplusieursmoischezla souris avec la flore conventionnelle alors que chez les souris sans germe, l'insensibilitésystémique persiste seulement quelques jours. Après administration orale d'ovoalbumine,les souris sans germesmaintiennent une réponse immunitaire Th2 et produisent des IgEcontre l'ovoalbumine. Il est intéressant de noter que l'anomalie peut être corrigée par lareconstitutiondelafloreconventionnelle,maiscetteprocéduren'estefficacequechez lesnouveau-nésetnonchezlessourisplusâgées.L'interactionentreletissulymphoïdeassociéà l'intestin et la flore, précocement dans la vie, semble cruciale pour le développementappropriédecomplexesmuqueuxetlesmécanismesimmunorégulateurs.

Chez les adultes, l'immunité peut être constamment modifiée par des interactions

persistantes qui se produisent entre l'hôte et ses bactéries intestinales. Les organismescommensaux essaient de contourner la réponse immunitaire. Par exemple, Bacteroidesfragilis, une espèce prédominante dans le côlon humain, peut changer son pouvoirantigéniquedesurfaceenproduisantdespolysaccharidescapsulairesdistincts.Ladiversitédesurfacesemblepermettreà labactéried'échapperà l'immunosurveillanceetmainteniruneniche écologiqueprédominantedans le tractus intestinal.Cependant, lesdéfensesdel'hôtes'adaptentetmaintiennentuncontrôleactifdelacroissancebactérienne.

Laréponseimmunitaireauxmicrobesreposesurdescomposantsinnésetadaptatifs,

telsquelasécrétiond'immunoglobulines.Laplupartdesbactériesprésentesdanslesselleshumaines sont revêtues d'unités d'IgA spécifiques. Les réponses innées sontmédiées nonseulement par les leucocytes tels que les neutrophiles et les macrophages pouvantphagocyter et tuer les pathogènes,mais aussi par les cellules épithéliales intestinales, quicoordonnent les réponses de l'hôte en synthétisant une large gamme de médiateursinflammatoiresetentransmettantdessignauxauxcellulessous-jacentesdanslamuqueuse.Le système immunitaire inné doit discriminer les pathogènes potentiels des bactériescommensales, en utilisant un nombre restreint de récepteurs préformés. Les cellules demammifères expriment une série de toll-like receptors (TLR), reconnaissant les motifsconservés sur lesbactériesne se trouventpasdans leseucaryotes supérieurs. Le systèmepermetune reconnaissance immédiatedesbactériespour répondre rapidement àundéfiéventuel. Par exemple, l'incubation de bactéries non pathogènes avec une muqueuseintestinale humaine enflammée provoque différents types de réponses immédiates aux

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cytokines, transduites au tissu sous-jacent. Cela favorise donc des changements dans lephénotypedeslymphocytesdelalaminapropria.

La flore bactérienne va également avoir un rôle dans lamodulation de l'expression

génique de l'hôte. Elle est capable de moduler de nombreux aspects de la physiologieintestinalede l'hôte.Desétudesontmisenévidenceque l'absencedeflores'accompagned'uneaugmentationoud'unediminutionde l'expressiond'environunecentainedegènes.Ceux-cicodentpourdesprotéinesimpliquées:

- dans letransportdenutrimentset lemétabolismedesenzymes impliquéesdans laproductiond'énergiecellulaire

- danslafonctiondebarrièredel'épithélium- danslaréponseauxhormones- danslacompositiondelamatriceextracellulaire- danslesvoiesdetransductiondusignal

Leseffetsdedifférentessouchesbactériennesvis-à-visdel'expressiondesgènesciblesontété testés. Les profils d'expression génique diffèrent selon les souches bactériennesinoculées.Ainsi,ilexistedesréponsesspécifiquesdel'intestinàuntypedebactériedonné,soulignantladifficultéd'analyserlerôled'uneflorecomplexedanslefonctionnementetlerenouvellementdel'épithélium.•Facteursdecontrôlesdelaflore

Chez l'Homme, la composition quantitative et qualitative de la flore intestinale estassez stable dans le temps. Malgré cela, cet équilibre peut être perturbé à cause dedifférents facteurs. Cela aboutit à des désordres liés à l'absence de métabolites et defonctionsapportéesparlesbactériesdumicrobiote.Cettedysbioseintestinalesemblealorsêtre à l'origine de certains troubles fonctionnels intestinaux comme le SII ou d'autresaffections intestinalescomme lamaladiedeCrohnou lescancerscoliques.Dans l'intestin,lesprincipauxfacteursécologiquesabiotiquespouvantmoduler lacompositionde lafloresont : le pH, le degré d'anaérobiose, les acides biliaires, les enzymes pancréatiques, ladisponibilité de substrats endogènes ou exogènes d'origine alimentaire, les sitesd'adhérencepotentielsdesmicro-organismesà l'épithéliumouaumucuset la "vitesseducourant"dutransitintestinal.Cesfacteursn'étantstablesnilelongdutubedigestifnidansletemps,chaquepartiedutubedigestifdoitêtreanalyséecommeunécosystèmeoriginal.Parexemple, lecôlondroit,quireçoitplusdesubstratsetdebactériesalimentairesquelecôlon gauche, est plus acide. Il contient des quantités plus importantes d'AGCC, et doncdiffèredelafloreducôlongauche.Cesfacteursabiotiquescontrôlantlacompositiondelaflore sont difficilement contrôlables par des médicaments ou le mode de vie (exceptél'alimentation).Cependant,d'autresfacteurspeuventinfluencerlacompositiondelaflore,ils'agit des facteurs biotiques, avec l'utilisation d'antibiotiques pour réduire le nombre demicro-organismes,oubiendeprobiotiques,dontnousverrons ladéfinitionplus loin,pourapporterdesmicro-organismesabsentsoudéficients.Nousaborderonsdanscettepartielesfacteurscontrôlantlafloredetypeabiotiqueetbiotique.

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La sécrétion acide constitueun facteurdedéfensemajeur contre la colonisationdutubedigestif, enaval de l'estomac,pardespathogènes. Le risqued'infections intestinalesest,modérémentmaissignificativement,augmentéencasd'achlorhydrieoudetraitementantisécrétoires, car le nombre de bactéries nécessaires pour déclencher une infection estalors réduit. Le fait que le risque ne soit que discret en pratique clinique témoigne de laprésenced'autresfacteursantimicrobiensdansletractusdigestifetdurôledelamotricité.Lesacidesbiliairesontaussidespropriétésantimicrobiennesimportantes,exercéessur lesmembranes bactériennes. Des variations assez faibles de ces acides dans l'intestininfluencent, par exemple, significativement la survie de lactobacilles ou bifidobactériesingérées. L'influence d'autres sécrétions digestives, comme celle du mucus ou desdéfensines,n'estquepartiellementconnue.Lemucusformeunebarrièrephysiqueentrelalumièreetlescellulesépithélialesdel'estomac,del'intestingrêleetducôlon.Lasécrétiondemucus est diminuée par le jeûne et l'alimentation parentérale totale. La flore peut enmodifierlacompositionetlespropriétésnonseulementenledégradantpartiellementmaisaussieninfluantsursasynthèse.Lemucus,formenonseulementunebarrièrephysiqueàlasurface de l'épithélium,mais aussi concentre dans son réseau demailles de nombreusessubstancesantimicrobiennescommelesimmunoglobulinesAsécrétoires, la lactoferrine, lalactoperoxydaseetlelysozyme.Ilaaussilacapacitédefixerdiversmicro-organismesgrâceàcertainsdesessucresmimantdesrécepteursbactériens.Lesdéfensinessontdespeptidesantimicrobiens sécrétés dans la partie basale des cryptes intestinales par les cellules dePaneth. IlsagissentpardestructiondelamembranebactérienneetsontactifsnotammentcontreEscherichiacoli,Listeriamonocytogenes,SalmonellaetCandidaalbicans.Leuractionéventuellesurlafloresaprophyten'estpasconnue.

Les différences demotricité de l'intestin grêle et du côlon expliquent la localisation

essentiellementcoliquedelafloreintestinale.Enparticulier,lesCMMinterdigestifsdanslegrêle jouent lerôledenettoyeursetdevidangedesbactériesexpliquant lapauvretéde lafloredanscetorgane,àl'exceptiondel'iléonterminal.Toutfacteurdestasedansl'intestingrêleentraineunerichecolonisationbactérienneparunefloreintermédiaireentrecelledel'oropharynxetcelleducôlon.Enfinlepotentield'oxydo-réductiontrèsbasrégnantdanslecôlonexpliqueladominancedelafloreanaérobieàsonniveau.

La composition de la flore commensale s'installant dès la naissance et se stabilisant

durant l'enfance, elle évoluera très peu dans vie d'un adulte sain. L'influence del'alimentation sur le microbiote n'est que très peu étudié étant donné que l'étude dumicrobiote en lui-même est complexe àmettre enœuvre. L'alimentation va apporter aumicrobiotedenombreuxsubstratsquiservirontànourrircelui-cietpermettre lasynthèsedesmétabolitesbénéfiquesounonàl'organismehumain.Lesnutrimentsquiinfluerontsurlemicrobioteenaugmentantlaquantitéd'unecertainesoucheparrapportàd'autres,fontpartiede la familledesprébiotiques. Ladéfinitionexacted'unprébiotiqueconsisteenuningrédientalimentairenondigestiblequistimuledemanièresélective,auniveauducôlon,lamultiplication ou l'activité d'un ou d'un nombre limité de groupes bactériens susceptiblesd'améliorerlaphysiologiedel'hôte40.D'autresauteursprécisentquecesnutrimentsdoivent

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résisteràl'aciditégastrique,auxenzymesdeladigestionetàl'absorptionintestinale;maisilsdoiventêtreégalementfermentéspar lamicroflorecoliqueetstimulersélectivement lacroissanceet/oul'activitédesbactériesdumicrobioteassociéàunmeilleurétatdesanté41.Les prébiotiques les plus connus sont les fructanes (fructo-oligosaccharides (FOS),oligofructose,inuline)etd'autresoligosidesdegalactoseettransgalactose(GOSetTOS).Denombreux autres glucides pourraient revendiquer l'appellation de prébiotiques (xylo-oligosaccharides,isomalto-oligosaccharides,gluco-oligosaccharides,etc.).Onvoitbiendoncque selon les aliments ingérés dans notre régime alimentaire, les substrats vont êtredifférentsetdonclesconséquencessurlemicrobiotepeuventfluctuer.

L'utilisationdesantibiotiquesdansnossociétésoccidentalesest trèscourante,voire

mêmeexcessive.Enpratiquedeville,laplupartsontutilisésparvoieoraleetpeuventavoiruneactionauniveaucoliquequecesoitparvoielocaledirecteenétantnonabsorbéparlamuqueuseouparvoiesystémiquevial'absorptionparlegrêle.Denombreuxantibiotiquespeuvent influer sur la flore. Cette influence dépend du spectre antibactérien et de lapharmacocinétique de l'antibiotique. Des effets indésirables peuvent en résulter,notammentunediminutionde lacapacitéde fermentation (responsabled'un risqueaccrude diarrhée), une diminution de l'effet de barrière (responsable d'un risque accrud'émergencedepathogène,aupremierrangdesquelsClostridiumdifficile),maiségalementl'apparitionpuisladisséminationd'unerésistanceauxantibiotiques.

Il est donc possible demoduler de façon quantitative et qualitative la flore colique

grâceauxalimentsprébiotiquesmaisaussiauxantibiotiques.Cependant,ilexisteégalementun troisième facteur influençant la composition de la flore bactérienne : il s'agit desprobiotiques.Ceux-ciserontégalementabordésdanslatroisièmepartiedemathèse.•ImplicationsdansleSII

Comme vu précédemment, le microbiote est impliqué dans de nombreux rôlesmétaboliquesauseindel'organisme,notammentdanslaproductiondegazauniveaudelalumièreintestinaleetdansl'homéostasiedelamuqueuseintestinale.Ilestdonclogiquedesedemandersi laflore intestinaleaunrôledans laphysiopathologieet lessymptômesduSII. De même, sa modification quantitative et qualitative pourrait être à l'origine de lamaladieouinfluencersonévolution.AucoursdesTFI,etenparticulieraucoursduSII,desaltérationsde lamicrofloreontétérapportées,notammentuneaugmentationdunombredebactériesfacultatives,etuneréductiondunombredelactobacillesetdebifidobactéries.Une production accrue de méthane et d’hydrogène produits par fermentation colique aégalementétérapportée.Onpeutenconclurequecetteflorejoueunrôle,aumoinsdanscertaines formes de SII. Cependant, actuellement, aucun argument ne permet d’asseoirformellementunetelleaffirmation15.

51

Lesargumentsenfaveurdel’implicationdelafloreintestinalesontdeplusieursordres:lesbactériesintestinalesinfluencentlaphysiologiedigestive;chezcertainspatients,leSIIapparait au décours d’une gastro-entérite aiguë (SII-PI) et des différences qualitatives etquantitatives dans la composition de la flore colique et grêlique ont été observées entrepatientsSIIetlessujetscontrôles42.

Chez les animaux génétiquement dépourvus de flore, plusieurs anomalies digestivesont été démontrées : une gastroparésie, un transit dans le grêle significativement ralenti,une importantedilatationcaecale. La reconstitutiond’une flore s’associeà la réapparitiond’unemotricité grêlique organisée avec la survenue de phases III des complexesmoteursmigrants se propageant jusque dans l’iléon. Elle provoque également l’expression accrued’enzymes impliqués dans la synthèse de neuro-modulateurs (tel que le GABA) et lastimulation de la synthèse de protéines musculaires spécifiques. Ces effets pourraientdécoulerde l’activitécataboliqueque laflore,essentiellementcolique,exercésvis-à-visdenombreux substrats exo- ouendogènes43. Les produits de cette fermentation colique, gaz(H2et/ouCH4)etacidesgrasàchaînescourtes,modulentégalementlamotricitédigestive,notammentauniveaudelarégioniléo-colique.Ilsaffectentlefonctionnementdescellulesépithélialesetimmunitairesintestinalesetpeuventinfluencerlasensibilitédigestiveaveclapossibleapparitiond’unehypersensibilité42.

L’un des rôles essentiels de la flore colique est la transformation des résidusglucidiques, via les processus de fermentation. Il aboutit à la production de gaz,principalement l'hydrogène et le méthane. Lors d'un régime standard, la productiond’hydrogène est excessive chez des patients SII alors que le volume des gaz produit estnormal.Cefaitaétédémontréparlamesuredecetteproductionsur24heures,grâceàuncalorimètrecorpsentier,aucoursd’unealimentationnormale.Laproductionnycthéméraled’hydrogèneétait deux foisplusélevéeau coursdu SII quedansunepopulation contrôleavecunevitessedeproductiondecegazbeaucoupplusrapideaprèsunrepas.Lesauteursdutravailontégalementdémontréunecorrélationentrelasurvenuedessymptômeset lavitessedeproductiond’hydrogène.Lorsd’unrégimeexcluantlescéréalesautresquelerizainsiquelesproduitslaitiers,laproductiond’hydrogèneétaitsignificativementréduitechezlesmêmessujetsSIImaispaschezlescontrôles.Cetteréductiondelaproductionentraînaituneaméliorationdessymptômesdéclenchéshabituellementparlaprisealimentaire44.

Desmodifications quantitatives de la florebactérienneontété rapportées.Certainsauteurs avancent l’hypothèse de perturbations quantitatives de la flore avec l’existenced’unepullulationbactérienneauniveaugrêlique, sur labasedes résultats anormauxd’untest respiratoire mesurant la production d’hydrogène après charge en lactulose45. Cettecolonisation bactérienne chronique du grêle est une cause de production accrued’hydrogèneetdeméthanepuisque lazonede fermentationdesrésidusglucidiquesn’estplus limitée au côlonmais se produit aussi dans l’iléon etmême le jéjunum distal. Cettepullulation favorise l’apparition d’une inflammation intestinale et déclenche des troublesmoteursgrêliques.Legazmajoritairementproduitinfluenceraitleprofilsymptomatiquedes

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malades avec une production accrue de méthane particulièrement fréquente chez lespatientsdécrivantunSIIavecconstipationetunecorrélationentrelaquantitédeméthaneproduiteetlasévéritéduralentissementdutransit46.

DesmodificationsqualitativesontégalementétédécritesaucoursduSII.Enl’absencede toute colonisation bactérienne chronique du grêle, des données font état demodificationsdelacompositiondelafloreendoluminalemaisaussiprésentedanslebiofilmau contact de la muqueuse. Les premières études, basées sur la culture de la florebactérienne fécale, ont fait état d’une diminution des coliformes, des lactobacilles et desbifidobactéries et d’une augmentation des entérobactéries, des coliformes et desbactéroides47. Cependant, sur un plan méthodologique, ces résultats n’étaient pascomplètementsatisfaisantspuisquecertainessouchesbactériennesdelaflorehumainenesontpascultivables.UntravailfinlandaiscomparantlaflorebactériennefécaledepatientsSII(répondantauxcritèresdeRomeIIetn’ayantpasprisd’antibiotiques),àcellerecueilliechezdestémoinssains,aévitécebiaisméthodologiqueencaractérisantlesbactériesparleséquençagedelafraction16Sribosomale48.Cetteétudeaconduitàdeuxtypesderésultatstrèsimportants.Elleatoutd'abordconfirméquelafloreétaitdifférenteentrepatientsSIIettémoinssains.ChezlespatientsSII,onobserveunenettediminutiondeslactobacillesetdesCollinsella.Dansunsecondtemps,cetteétudeaétélapremièreàidentifierdesdifférencesnotablesdanslacompositiondelaflorefécaleentrelessous-groupesdeSII.L'analyseamisen évidence une plus grande proportion de Bacteroides et d'Allisonella chez les patientsdécrivantunealternancediarrhée-constipationetunplusfaiblenombredebifidobactériesdanslesous-groupedesdiarrhéiquespurs.

Lesperturbationsdumicrobioteintestinal,appeléeségalementdysbioses,incluentdeschangementsdanslamotricitéintestinale,dansladouleurviscérale,desaltérationsdanslasécrétion des entérocytes, la fonction de barrière et la fonction inflammatoire etimmunologique.Denombreusesétudessontbaséessurlacomparaisonentredesanimauxdépourvus de flore et ceux dont la flore est présente. Certaines ont fait en sorte deprovoquerunedysbioseartificielle,via l'introductiond'antibiotiques,etontévaluéensuiteleseffetsprovoquésparcettedysbiosesur laphysiologie intestinale.Uneautre49évaluantleschangementschezl'hôteenutilisantuncocktaild'antibiotiquescommelabacitracineoulanéomycineafindeprovoquerunedysbiose, adémontréunediminution du seuil de ladouleur viscérale, via la méthode du ballonnet. Cette augmentation de la douleur estaccompagnéed'uneaugmentationdelasécrétiondesubstancePetdeCGPdansleplexusmyentérique,quisontdeuxsubstancesimmunoréactives.L'administrationd'antibiotiquesaétéassociéeàunedéplétiondelactobacilles,deBacteroidesetd'entérocoques.Cependant,dans une autre expérience, l'administration de lactobacillus paracaseii prévient leschangementsinduitspar ladysbiosesur ladouleurviscérale.Lesperturbationstouchantlasensibilitéinduitesparladysbiosesontaccompagnéesparunemicro-inflammation.Touscesarguments prouvent que les expérimentations sur l'induction d'une dysbiose chez desanimaux induisent une micro-inflammation et une diminution du seuil de sensibilité à ladouleur, rappelant les différents aspects physiopathologiques du SII. A l'opposé, dans

53

d'autres études, il est montré que l'introduction d'antibiotiques, afin de provoquer unedysbiose,amélioraitlessymptômes,notammentsurlasensibilitéetladouleur.Celaillustrelefaitqu'ilestdifficiledecomparerlesétudesprovoquantunedysbiosechezdesanimaux,car elles utilisent des méthodes d'approches différentes et que de nature, les animauxpeuventavoirunmicrobiotedifférentsentrechaqueindividu50.

Commementionné précédemment, la dysbiose expérimentale peut conduire à uneactivation immunitaire et une micro-inflammation, ce qui entraîne à son tour deschangements dans la physiologie intestinale. Une étude51 a évalué le rôle du systèmeimmunitaireinnédansunmodèlededysbioseinduiteparantibiotiques.Leschercheursontutilisé des souris dépourvues de composants essentiels du système immunitaire inné(cellules immunitaires et protéines de l'inflammation). La dysbiose induite par lesantibiotiquesaentraînéunretardsignificatifdelamotricitégastro-intestinale,accompagnéd'une réduction du nombre de neurones dans le côlon. Parce qu'un profil similaire a étéobservé chezdes souris avecunedélétion spécifiquede la crêteneuraledeMyd88et deTLR4, les auteurs ont conclu que le microbiote influence la fonction motrice gastro-intestinalevial'activationdusystèmeimmunitaireinnéetdesrécepteursTLR4.

Actuellement, la meilleure stratégie pour établir la pertinence fonctionnelle du

microbiotechezlespatientsSIIdanslaproductiondedysfonctionnementsdel'intestin,estl'utilisationd'animauxassociésaumicrobiotehumain50.CettestratégieconsisteàcoloniserdessourissansgermesavecunmicrobioteprischezdespatientsSIIoudestémoinssains.Crouzet et al.52 l'ont utilisé pour démontrer la capacité du microbiote à induire unesensibilité viscérale chez le rat. Lacolonisation de rats sans germes par desmicrobes depatients SII, présentant une hypersensibilité viscérale démontrable, a entraîné uneaugmentationdesréponsesàladistensioncolorectalechezlesanimauxreceveurs.Cecin'apas été accompagné par des changements dans la perméabilité intestinale ou dans ladensitédesmastocyteschezlessourisreceveuses.Dansunerécenteétude53,dessourissansgermesontétécoloniséesavecunmicrobiotedepatientsD-SII,avecousansanxiété,oudesujets contrôles sains. Leur fonction intestinale et le comportement ont été évalués. Lessouris associées au microbiote du sujet D-SII ont développé un transit rapide, uneaugmentation de la perméabilité intestinale et de la sécrétion, ainsi que des signesd'activationimmunitaireinnée.Lessouriscoloniséesparlemicrobiotedepatientssouffrantd'anxiété présentaient un comportement anxieux tandis que les souris recevant unmicrobiotedepatientsSIIsansanxiétéprésentaientuncomportementnormal.Cesrésultatsappuient fermement l'idée que le microbiote intestinal des patients atteints de D-SIIcontribueà lafoisauxmanifestations intestinalesetcomportementalesdecetteaffection.Zheng et al.54 ont récemment soutenu l'idée que lemicrobiote intestinal contribuait à lapsychopathologie en montrant que le microbiote fécal des patients déprimés altérait lachimieducerveauetlecomportementaprèslacolonisationdesanimauxsansgermes.

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Les différences de composition de la flore sont importantes à prendre en compte,notamment depuis que des arguments de plus en plus convaincants plaident en faveurd’une activation immunitaire de la muqueuse avec production accrue de cytokines pro-inflammatoires au cours du SII. L’effet anti-inflammatoire de certaines souches delactobacilles et de bifidobactéries a été démontré43. La réduction de certaines coloniesbactériennespourraitêtreundesfacteursentretenantl’activationdusystèmeimmunitairedel’hôte,notammentaprèsunepremièreinfectionintestinale.Parailleurs,ons'estaperçuque lesdifférentes coloniesbactériennesn’ontpas lesmêmespropriétésmétaboliques.Atitre d’exemple, les bifidobactéries transforment principalement les oligosaccharides alorsque les Bacteroides ont une action à la fois protéolytique et saccharolytique43. Lesdifférencesdans laproductiondesgaz intestinauxsoulignéespar le travaildeKingetal.44pourraient s’expliquer par ces différences qualitatives de flore. De plus, une productionaccruede gazoudebutyratepourrait induireunehypersensibilité rectale ou colique à ladistension,mêmesilestravauxnesontpastousconcordantssurlesujet.Parallèlement,ledéveloppementdecoloniesbactériennesplusgrandesproductricesdegazetd’acidesgras,etdoncplusaptesàdéconjuguerlesacidesbiliaires,estunfacteursusceptibled’altérerlestransferts d’eau et d’électrolytes, la sensibilité et la motricité du côlon et de favoriserl’apparitiond’unediarrhée.

Certainesétudesonttentédedémontrerl'influencedelaflorecoliquesurlamotricitécolique25 grâce à plusieursméthodesd'évaluation. L'uned'elle consiste à éliminer la florebactérienne ou à apporter des bactéries via les probiotiques. Les résultats sontcontradictoires selon les études et les méthodes d'analyses. Certaines montrent uneaugmentation du temps de transit, d'autres une accélération. Elles ont également prouvél'influencedesmétabolitesdumicrobioteintestinalalorsqued'autresdémontrentquecesmétabolites n'ont aucune activité sur la motricité colique. La flore colique peut sedévelopper parce que la motricité colique l'y autorise. Les relations entre ces deuxpartenairessontcertainementmultiples,complexes,sansdouteindirectesvialesréactionsde fermentation. Cependant, elles restent mal connues, essentiellement à cause dedifficultésméthodologiques.

Commeabordéprécédemment,l'undesprincipauxsymptômesduSIIestlasurvenuede ballonnements. Ils associent souvent une rétention gazeuse avec une distensionabdominale et une sensation d'inconfort voire des douleurs associées. Deuxmécanismesphysiopathologiques ont été proposés pour expliquer cette symptomatologie : uneproductionexcessive,dueàunemalabsorptionouàunefermentationcoliqueanormale,etune altération dans la disponibilité intestinale des gaz. L'excès de gaz produit par la floremicrobienneprovientdelafermentationexcessivedecertainsnutrimentsnondigérésparl'intestin grêle, eux-mêmes apportés en excès dans l'alimentation. L'effet des fibresalimentairesestunbonexempledanscecontexte.CertainspatientsatteintsduSIIontunapportimportantenfibresalimentairesenaugmentantlesfermentationscoliquesd'autressubstratsetlaproductiondegaz.Ilaétéconfirméquelesfibrespouvaientavoirdeseffetsdélétères sur les symptômes du SII et il est clair que la réduction de l'apport en fibres

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entraineunréelbénéficeencasdesurcharge.Uneétudeintéressanteamontréque,chezdessujetsexposésauxmêmessubstratsnonabsorbables,laproductioncoliquedegazétaitplusimportantechezlespatientsatteintsduSIIquechezlessujetssains,cequisuggèrelaprésenced'unedysbiosecoliquechezlespremierssujets44.

Cependant,uneproductionintestinaledegazaccruen'expliqueraitpaslessymptômes

duSII comme lesdouleurs abdominales liées auxballonnements. Laplupartdes sujets enbonnesantépropulsentetévacuentdetrèsgrandesquantitéssansenavoirconscience. Ilfautalorsplussetournerversdesanomaliesdesensibilitéviscérale,toutennotifiantqu'uneproductionexcessivedegaz intestinauxpourraitaccentuercettehypersensibilitéviscérale.Lesmécanismesderétentiongazeusepourraientaussiprovoquercessensationsd'inconfort.L'évacuation rectale des gaz intestinaux s'accomplit habituellement par une légèrecontraction abdominale associée à une relaxation anale. Chez certains patients, cettecoordinationneseproduitpasetlesphincterneserelâchepas.Ilapparaîtdessymptômesabdominaux, probablement liés à une rétention fécale avec une durée de fermentationaccrue,etunealtérationde l'évacuationdesgaz. Ilaétémontréque larétentiongazeuseinduiteparunepropulsionaltéréeétaitbientoléréeetn'entrainaitpasdesymptômes,alorsque lemême volume de rétention produit par une résistance accrue au flux de gaz étaitassocié à des symptômes abdominaux significatifs.Une rétention gazeuse symptomatiquedans des conditions pathologiques pourrait donc être liée à une incoordination de lamotricitéplutôtqu'àuneréductiondelapropulsion25.

Danscettemaladiemultifactoriellequ’estleSII,deplusenplusd’argumentsexistentpour considérer que les différences qui existent dans la composition et les activitésmétaboliquesdelafloreintestinaleparrapportàunepopulationcontrôle,peuventjouerunrôle non négligeable dans la physiopathologie de l’affection. Ces arguments ouvrent desperspectives thérapeutiques en rendant logique d’essayer d’agir sur la flore parl’administration de pro- et/ou de prébiotiques et, peut-être, d’antibiotiques. Les résultatsdesprobiotiquesdanscetteindicationsontencourageants.

56

II. Priseenchargethérapeutique

Le SII est une pathologie chronique et récurrente alternant des périodessymptomatiquesetd’accalmies.Promettreaupatientuneguérison complèteetdéfinitivegrâceàuneinterventionthérapeutique,quellequ’ellesoit,n’estpasréalisteenl’étatactueldes traitements disponibles. En revanche, fixer des objectifs thérapeutiques raisonnables,commeparexempleunediminutiondel’intensitédeladouleurabdominalede50ou60%,estuneattitudepluspragmatique,surtoutlorsquelessymptômessontanciensetinstallés.

Le soulagement de la douleur abdominale est l’objectif thérapeutique principal aucoursdusyndromede l’intestin irritable.Aucunmédicamentnes’imposedans lastratégiethérapeutique.Lesantispasmodiques, lesargiles, les laxatifsou les ralentisseursdu transitdemeurent l’option thérapeutique initiale habituelle même si le déremboursement d’unnombrecroissantdespécialitésestdorénavantunobstacleàleurprescription.Concernantladiététique, l’enrichissementde larationalimentaireexcessifpardesfibresasouventuneffet symptomatique délétère. Quelques patients sont probablement intolérants à desalimentsmaisaucunepreuvesatisfaisanten’aétéapportéejustifiantunrégimed’exclusion.D'autresalternativesthérapeutiquesexistentactuellementetprennentdésormaisunepartimportante aux côtés des thérapeutiques médicamenteuses traditionnelles, commel'hypnose,lapsychothérapie,laphytothérapieoul'utilisationdesprobiotiques.

Dans cette partie, nous aborderons les différents médicaments actuellement

disponibles pour traiter le SII, les différents thérapies nonmédicamenteuses qui peuventexister en accompagnements des traitements conventionnels et les perspectives d'avenirqu'offre la recherche sur la physiopathologie des différents troubles fonctionnelsintestinaux.

1) Traitementsmédicamenteuxactuelsetfuturs

a) Antispasmodiques

Cesontlespremiersmédicamentsquelespatientsvontconnaîtredansleurhistoriquemédicamenteux.Cesontpourlaplupartdevieuxmédicaments(DEBRIDAT®,AMMen1969etSPASFON®,AMMen1964),maisleurmécanismed'actionprécisn'esttoujourspasconnuà l'heure actuelle. Leur utilisation en pratique courante repose sur l'aspectmoteur de laphysiopathologieduSIIetsonlienaveclasensationdouloureuseressentieparlespatients.Eneffet,commeleurnoml'indique,cesmédicamentsagiraientdirectementsurlescellulesmusculaires lisses au niveau du système digestif. Si les antispasmodiques réduisent lamotricité colique et le réflexe gastro-colique lors de la prise alimentaire, leur effetsymptomatique est discuté. L’efficacité des antispasmodiques a fait l’objet de plusieursméta-analyses. Toutes soulignent que ces essais ont eu d’importantes faiblessesméthodologiques(définition insuffisantedescritèresdesélection,défautdepuissancedes

57

essais, schémas d’études inadaptés, critères de jugement imprécis, important nombre deperdusdevue…).Lesmédicamentsantispasmodiquesmontrentsystématiquementuneffetbénéfique sur la douleur abdominale et produisent une amélioration dans l'évaluationglobaledessymptômes. Iln'estpasclair,cependant,desavoirdansquelssous-groupesdemédicamentsantispasmodiquesceluiquiestindividuellementefficace.

Troisméta-analysesde Jaiwala et al. et Poynardet al.55–57, reposent respectivement

sur 26, 23 et 16 essais contrôlés, ont conclu que seuls certains antispasmodiques(trimébutine,pinavérium,mébévérine)étaientsupérieursauplacebodanslesoulagementdeladouleurabdominale(améliorationdans53%descascontre41%pourleplaceboavecunnombredemaladesàtraiterpourobtenirchezunmaladeuneffetsupérieurauplacebo(NNT)de8,3.Laprobabilitéd’améliorationglobaleétaitdeuxfoissupérieureàcelleobtenuepar leplacebo(56%despatientsamélioréscontre38%avec leplacebo)avecunNNTde5,5. Ces méta-analyses ont conclu à leur inefficacité dans la correction des troubles dutransit.

Onobserveégalementdans laméta-analysedeLesbros-pantoflickovaetal.58,que le

rôledesantispasmodiquesrelaxantslescellulesmusculaireslissesdansletraitementduSIIest confronté à des problèmes méthodologiques. Certains antispasmodiques tels que lebromuredepinavériumet la trimébutinesesontrévélés inefficacesdans le traitementduSII. Plusieurs autres antispasmodiques tels que le bromure de cimétrope, le bromured'octylonium, la mébévérine, l'hyoscine et l'huile de menthe poivrée ont rapporté desrésultatspositifs,maissurlabased'essaisquineconcluentpasd'efficacitésignificative.Eneffet, en excluant les essais de faible qualité de la méta-analyse, seul le bromured'octylonium (non commercialisé en France) semble être efficace pour soulager lessymptômes globaux du SII. Néanmoins, cette conclusion ne repose que sur deux études.L'hétérogénéitédesessais,lespectredifférentdessymptômes,desmesuresd'efficacitédespatients,lefaiblenombredepatientsinclusetlenombreélevéd'abandonspendantlesuivi(jusqu'à60%)rendentlejugementsurlavaleurthérapeutiquedesantispasmodiquesdansleSIIimpossible.Danslecasdel'huileessentielledementhepoivrée,quisembleêtreefficaceseloncertainesétudes,uneautreméta-analyseutilisantlesmêmesdonnéesestarrivéeàunrésultat négatif. Par conséquent, la méta-analyse de Lesbros-pantoflickova et al. va àl'encontre de celle de Poynard et al. qui a conclu que les antispasmodiques sont desmédicaments efficaces dans le SII. Ces données sur l'analyse de l'efficacité desantispasmodiquesdansleSIIsoulignelespiègesetleslimitesdesméta-analyses.Enplusdesinterrogationsconcernantl'efficacité, lesantispasmodiquespeuventprovoqueretaggraverlaconstipation.

C'est en raison des nombreuses divergences des différentesméta-analyses récentes

sur l'utilisation des antispasmodiques dans le traitement symptomatique du SII que lacommissiondetransparencedelaHauteAutoritédeSanté(HAS)aévaluéleservicemédicalrendu de cette classe thérapeutique comme faible. Elle reste donc remboursée par

58

l'Assurance Maladie à un taux de 15%, compte tenu de l'absence d'alternatives dans letraitementsymptomatiqueduSIIetd'unecertaineefficacitéobtenuedansquelquesétudes.

Figure1356:méta-analysesurl'efficacitédesantispasmodiquessurl'évaluationglobalede

l'étatcliniquedupatientatteintdeSII.Les antispasmodiques actuellement disponibles peuvent être classés en trois sous-

classes principales: les anti-muscariniques (ex : mébéverine), les relaxants musculaireslisses (agents de type papavérine) et les inhibiteurs calciques (ex : pinavérium, huileessentielle de menthe poivrée). Cette distinction est cependant arbitraire, en raison despropriétéspharmacologiquesmixtesdecesagents.LesantispasmodiquesontpourrôlederéduireladouleurassociéeauSIIparl'inhibitiondesvoiesdesignalisationcontractilesdansla paroi musculaire.58 Le cimétropium, le pinavérium, la trimébutine, l’octilonium, lamébévérine et l’alvérine possèdent une activité spasmolytique musculotrope et/ouneurotrope.Lesmécanismesd’actionnesontjamaissimples,avecdeseffetsmusculotropesdirects liésàuneactionsur les canauxcalciques (alvérine,pinavérium)souventassociésàuneactiviténeurotrope.Toutcecimodulantlacomposantecholinergiqueparactiondirectesur les récepteurs muscariniques (cimétropium, octilonium) ou indirecte parblocage/activationde récepteurs tels les récepteurs opioïdes (trimébutine), adrénergiquesousérotoninergiques(mébévérine,octilonium).Toutefois,ilestsouventconstatéqueleurseffetssontassociésàuneactivitésur lasensibilitéet l’hyperalgésieviscéraleconstatéeen

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59

pharmacologie clinique chez l’homme ou expérimentalement sur des modèles animaux.Cetteactionantalgiqueviscérale,bienquemodérée,participeàl’efficacitéthérapeutiquedeces molécules. Elle implique des récepteurs multiples le plus souvent localisés sur lesterminaisonsdesneuronesafférentsspinaux59.

Lephloroglucinol,antispasmodiqued’actionrapideleplusprescritenFrancemaisnoncitédanscesméta-analyses,s’estrécemmentrévéléefficacedansunessaicontrôlédanslesoulagement rapidement la douleur des malades au cours d’une poussée de SII60. Lesdonnées épidémiologiquesmontrent que la durée d’une poussée douloureuse s'élève enmoyenneentre1à3jourschez40%desmaladesetentre4à9jourschez29%.Entrecespoussées, lemaladeestpauci-ouasymptomatique.Lerésultatdecetessaisuggèrequ’untraitement pourrait être proposé seulement lors dephénomènesdouloureux abdominauxparoxystiques et non en continu. Il faut cependant souligner que les auteurs étaient tousmembresduconseilconsultatifouemployésdulaboratoirecommercialisantleSPASFON®61.De plus le laboratoire en question a parrainé et financé l’étude ainsi que l’écriture del’article, ce qui pourrait laisser penser qu’il existerait un conflit d’intérêts. Au total, lephloroglucinol n’a pour l’instant pas apporté la preuve solide de son efficacité dans letraitementdeladouleurabdominale,notammentdansleSII.

Aucun des six antispasmodiques musculotropes existant en France ne peut être

considérécommeayantunhautniveaudepreuved’efficacitédansladouleurabdominale.Auvudesdonnéesdisponiblesàcejourdanslalittératureinternationaleetdesrésultatsdecertainesméta-analyses,seullepinavériumpeutêtreconsidérécommeefficacedanscetteindication avec un niveau de preuve correct. L’alvérine, la mébévérine et la trimébutinepeuvent être considérées comme efficaces avec un faible niveau de preuve. Les autresmoléculesn’ontpasapportélapreuvedeleurefficacité.Comptetenudescoûtssupportéspar la société pour le remboursement de ces médicaments et l’existence d’effetsindésirablesparfoisgraves,notammentdesréactionsallergiques,uneréflexions’imposeauxautoritésdesantéquantàlaréalisationd’étudescliniquesdebonnequalitéafindeclarifierlasituation.

Tableau2:PrincipauxantispasmodiquesutilisésenFrance(Vidal)

DCI Dosages Spécialité

Trimébutine 100,200mg DEBRIDAT®

Phloroglucinol 80,160mg SPASFON®

Alvérine+Siméticone 60mg+300mg METEOSPASMYL®

Pinavérium 50,100mg DICETEL®

Mébévérine 100,200mg DUSPATALIN®

Phloroglucinol+Siméticone 125mg+80mg METEOXANE®

Papavérine+Charbon 14mg+70mg ACTICARBINE®

60

b) Laxatifs

Laconstipationestuneplaintefréquentechez lespatientsatteintsdeSII.Elleestunsymptôme non spécifique signalé par les patients qui ont un transit lent du côlon, unedéfécationetunepousséedéfectueuse,ouuncôlonsensibleprovoquantunsentimentdeballonnement et un désir de déféquer sans résultat. Ce sont donc principalement lespatients atteintsdeC-SII voiredeM-SII, chezqui l'utilisationde laxatifspeut rentrerdansunepriseenchargesymptomatiquedelaconstipationsansforcémentaméliorerl'évaluationglobaleduSII.Eneffet,nousleverronsplustard, l'améliorationdutransitchezunC-SIInesoulagepassystématiquementlesdouleursabdominalesoulesballonnementsdupatient.

Généralement dans la prise en charge de la constipation chronique, l'utilisation des

laxatifs est recommandée en deuxième intention, après suivi des mesures hygiéno-diététiques que nous développerons par la suite62. Les laxatifs osmotiques sontrecommandés en première intention pour leur efficacité et leur bonne tolérance. Ilsaugmentent la fréquence des selles, modifient leur consistance et limitent les efforts depoussée. Les laxatifs polyols (lactulose, sorbitol et lactitol) sont des disaccharides desynthèsequi ne sontni digérés, ni absorbéspar l'intestin (du fait dumanquedematérielenzymatique adapté). Ces sucres augmentent l'osmolarité dans la lumière intestinale etprovoquentunappeld'eauetd'électrolytes,d'oùuneffluentiléalaugmenté.L'effetlaxatifest dépendant de la dose ingérée. Ces sucres peuvent cependant être l'objet defermentation par la flore bactérienne colique. Ce phénomène entraîne deux types deconséquences : une partie des métabolites de fermentation peut être réabsorbée et uncertain apport calorique est possible, d'autre part, la fermentation peut entraîner desdouleursabdominales,desballonnements,des flatulences,cequipeutêtredommageablechez un patient atteint de SII. Les macrogols sont des mélanges de polymères depolyéthylèneglycol(PEG)dehautpoidsmoléculaire.Ilsentraînenteuxaussiunappeld'eauintra-intestinal mais ne sont ni absorbés, ni l'objet de fermentation. À charge osmotiqueégale, l'effet laxatif des PEG est donc généralement plus élevé et sans induction defermentation colique. Les laxatifs de lest (psyllium, ispaghul, gomme de sterculia, son deblé)formentunballastquiretientl’eaudanslalumièreintestinale.Leureffetrésultedelacorrélationentrelevolumeducontenucoliqueetlafréquencedescontractionspropulsives.Les laxatifs de lest augmentent la fréquence des selles et améliorent leur consistance. Ilssont également recommandés comme traitement de première intention. Les laxatifsémollients (ou lubrifiants) peuvent être proposés en seconde intention. Ils sontessentiellement représentés par les huiles de paraffine non absorbables qui modifient letransitenlubrifiantlebolfécal.L’utilisationdeceshuilesminéralesdefaçonprolongéepeutmajorerl’incontinenceanaleet/oufavoriserlessuintementsanaux.Leurpriseaulongcourspeut également être à l’origine de déficits en vitamines liposolubles A,D, E et K. Enfin, ilexisteunrisquedefaussesrouteschezlessujetsâgés(pneumopathieshuileuses).

61

Leslaxatifsstimulants(anthracénosides,bisacodyl,docusateetpicosulfatedesodium,huilede ricin),utilisésdemanièreprolongée, sontsusceptiblesdeprovoquerdes troubleshydro-électrolytiques,d’altérer l’épithéliumcoliqueetdefavoriser l’accoutumanceincitantà augmenter les posologies. Plus rarement, ils sont responsables d’ostéoarthropathies, decolites hémorragiques (séné) ou d’insuffisance cardiaque à l’arrêt du traitement. Dans lesmodèles animaux, les dérivés anthracéniques induisent le gonflement et la fragmentationdes neurones entériques63 et ces conséquences sont irréversibles sur la continence ou lasensibilitéviscérale.Enl’étatactueldesconnaissances,l’administrationprolongéedelaxatifsstimulants aux doses habituellement recommandées n’a pas d’effet carcinogène sur lecôlon. Il est recommandé de réserver leur usage à des situations particulières (sujet âgé,constipationréfractaireauxautrestraitements),surdecourtespériodesetsoussurveillancemédicale, en seconde intentionen raisonde leurseffets secondaires. Les laxatifspar voierectale(suppositoiresetlavements)sontrecommandésdansdessituationsparticulières,encasdetroublesdel’évacuation,chezlessujetsâgésoulesmaladesatteintsdepathologiesneurologiques.

L'odds ratio pour le bénéfice dans le soulagement global des symptômes avec les

fibresestde1,33,maisbienquelessymptômesdelaconstipationpeuvents'amélioreriln'yaaucunavantagepour ladouleurabdominale64.Globalementseulement10%despatientssontamélioréspar les laxatifsde lest.Parailleurs, lesfibres insolubles(commeleson)ontété évaluées dans des essais randomisés versus placebo. Il en est ressorti qu’elles n’ontaucuneffetsurladouleuretn'exacerbentpaslesflatulencesetlesballonnements.Ceciestreconnupar lespatients SII, dontenviron lamoitiéaffirmequecertaines fibresaggraventmême leurssymptômes.Lessels inorganiques (parexemple, lesselsdemagnésiumet leslaxatifs à base de polyéthylène glycol, comme le macrogol) agissent comme un laxatifosmotique. Ils sont efficaces et bien tolérés dans la constipation chronique, bien que lesdonnées ne contiennent pas de SII-C. L'un des rares essais contrôlés randomisés dans laconstipation chronique a montré que le polyéthylène glycol avait une efficacité et unetolérance supérieures au lactulose, avec moins de flatulences. Les laxatifs stimulantsagissentaléatoirementetsontassociésàlatachyphylaxie(phénomènedetolérancerapide)età ladépendance.Lesstimulantssontdoncgénéralementrecommandésseulementpouruneutilisationoccasionnelle64.

BienqueleslaxatifsdelestsoientlargementprescritspourleSII,lamiseencommun

de11étudesn'apasdémontréuneffetbénéfiquepourladouleurabdominale,l'évaluationglobale ou le score des symptômes65. Des laxatifs de lest ont été étudiés dans un certainnombre d'essais. Seules 6 des études incluses avaient plus de 30 patients et toutes lesétudesavaientdesproblèmesdequalité(méthodederandomisation,doubleaveuglement,dissimulation de l'allocation de traitement, description des abandons). Deux revuessystématiquesontétépubliéessurl'utilisationdelaxatifsdelestchezlespatientsatteintsduSII. Enutilisantdes critèresd’exclusionmoins strictesque l'examenprécédent, Jailwalaetal.55aégalementconclu, suruneanalysede13études,que l'efficacitédes laxatifsde lestn'estpasclairementétablie.Akehurstetal.66ontinclus7étudessurleslaxatifsdelestdans

62

unerevuedesthérapiesduSIIetontconcluqu'iln'yavaitaucuneraisondecroirequelesagentsdechargeétaientefficacespour leSII.Troiscritèresdifférentsontétéutiliséspourévaluer l'efficacité des laxatifs de lest : la douleur abdominale, l'évaluation globale et lescoredessymptômes.Étantdonnélespropriétéspharmacologiquesdeslaxatifsdelest,leureffetprésumésurlaconsistancedessellesetlecomportementintestinal,l'améliorationdel'évaluation globale peut être le critère d'évaluation le plus approprié. En revanche, lesrésultatspositifssur l'évaluationglobaledelamaladiedesdifférentesétudesn'étaientpasstatistiquementsignificatifs65.L'hétérogénéitédescatégoriesdespatientsSIIdanslesétudesinclusessuggèrequel'utilisationdeslaxatifsdelestnedoitpasêtrecomplètementrejetée,car ils peuvent être utiles pour des sous-groupes de patients qui reste à définir.L'améliorationdelafréquenceetde laconsistancedessellespeutêtre leprincipalfacteurd'améliorationdel'évaluationglobalechezlespatientsprédominantsparlaconstipation.

Bien que le PEG soit approuvé par la FDA américaine dans le traitement de la

constipation, iln'apasété largementétudiéchez lespatientsatteintsdeSII-C.Uneétudeouverte portant sur 27 adolescents atteints de SII-C a suggéré que le PEG améliorait lafréquence des sellesmais pas la douleur67. Deux essais contrôlés randomisés concernantl'utilisationduPEGdans leSIIontétéévaluéspar l'AmericanCollegeofGastroenterology.Dansl'un,iln'yavaitaucuneffetstatistiquementsignificatifsurlesmouvementsintestinauxou l'inconfort et la douleur. Dans l'autre, qui a recruté 139 patients atteints de SII avecconstipation, l'augmentation moyenne des selles spontanées était significativement plusélevéeaveclePEGcomparativementauplaceboà4semaines.Cependant,onneretrouvaitaucune différence d'effet sur la douleur abdominale ou l'inconfort. Les taux de réponse,définis par plus de quatre selles spontanées par semaine et aucune aggravation de ladouleur ou de l'inconfort abdominal, étaient significativement plus élevés avec le PEG(36,5%contre17,5%avec leplacebo,P<0,05).Cependant,aucunedifférencesignificativen'estapportéedanslaproportiondepatientsavecuneréponseàladouleur,définiecommeunediminutionde10%(61,9%vs47,6%,P>0,1).Lestauxd'événementsindésirablesétaientplusélevésaveclePEG(38,8%contre32,9%),maislaplupartétaientlégersoumodérés.Iln'existeaucunepreuveàl'heureactuellequelesformulationsdePEGsoulagentladouleuroufournissentunsoulagementglobaldessymptômesdansleSII.

En résumé, l'utilisation des laxatifs dans le traitement du SII est purement à visée

symptomatique.Ilspermettentaupatientd'améliorersonconfort,laqualitédesontransitet sa qualité de vie dans son quotidien mais ne permettent en rien l'amélioration del'évaluation globale du SII, notamment sur les symptômeshandicapant comme la douleurabdominale. Leur utilisation doit donc être raisonnable et ne doit pas entrainer d'effetsindésirablesoudecomorbiditéssupplémentairesenplusdelamaladiedupatient.Deplus,leurusagedoitimpérativementsefaireencomplémentdesmesureshygiéno-diététiquesàrespecterdanslecadred'uneconstipationchronique.

63

Tableau3:PrincipauxlaxatifsutilisésenFrance(Vidal)

DCI Dosages Spécialités

Laxatifsosmotiques

Macrogol4000 10g FORLAX®

Macrogol3350 2,95,5,9,13,125g TRANSIPEG®MOVICOL®

Lactulose 10g DUPHALAC®

Lactitol 10g IMPORTAL®

Laxatifsdelest

Ispaghul 2,3,7g SPAGULAX®TRANSILANE®

GommeKaraya 4g POLYKARAYA®

GommeSterculia 62g/100g NORMACOL®

Laxatifslubrifiants

Paraffineliquide -LUBENTYL®LANSOYL®

MELAXOSE®TRANSULOSE®

Laxatifsdecontact

Bisacodyl 5mg DULCOLAX®CONTALAX®

Docusatesodique 50mg JAMYLENE®

Dérivésanthracéniques:Bourdaine,Séné,Cascara,Aloès

DRAGEESFUCA®IDEOLAXYL®MODANE®HERBESAN®GRAINSDEVALS®

c) Antidiarrhéiques

Lesanaloguesopioïdescommelelopéramide(IMODIUM®)stimulentlesrécepteursau

niveaudusystèmenerveuxentériqueinhibantlepéristaltismeetlasécrétiondeliquide.Lelopéramide n'est pas plus efficace que le placebo dans la réduction de la douleur, desballonnements ou des symptômes globaux du SII, mais c'est un agent efficace pour letraitement de la diarrhée, la réduction de la fréquence des selles et l'amélioration de laconsistance des selles68. Des essais contrôlés randomisés comparant le lopéramide avecd'autresantidiarrhéiquescomme le racécadotriln'ontpasété réalisés. Lesdonnées sur satoléranceetsasécuritéd'utilisation fontdéfaut.LespatientsatteintsdeD-SIIaffichentuntransitintestinalplusrapidequelessujetssains.Parconséquent,lesagentsquiretardentletransitintestinalpeuventêtrebénéfiquespourréduirelessymptômes.Lelopéramideestleseul antidiarrhéique suffisamment évalué dans les essais randomisés contrôlés pour letraitementduD-SII.Parmi lesessaisévaluant sonefficacitédans le traitementduSII avecdes symptômes prédominants de diarrhée69,70, deux essais contrôlés randomisés ontimpliqué42patients SII avecdes symptômesprédominantsde ladiarrhée. Il n'y apaseud'effetsstatistiquementsignificatifsdu lopéramidesur lessymptômesglobauxpar rapport

64

auplacebo(risquerelatifdenonaméliorationdessymptômesduSII=0,44;IC95%=0,14-1,42).Lesdeuxessaisontrapportéque100%dugroupetraitéaulopéramideavaitamélioréla consistance des selles, comparativement à 20-45 % des témoins (p = 0,006). L'analysecombinéedelafréquencedessellesasuggéréquelerisquerelatifdelafréquencedessellesnon améliorée avec le lopéramide était de 0,2. (IC à 95% = 0,05-0,9). Aucun évènementindésirablen’aété rapportépendantcetteétude.Encequi concerne l’autreessai,quatreontétédécrits.

Le lopéramide n'a aucun effet sur les symptômes de ballonnements, d'inconfort

abdominaloudesymptômesglobauxduSII. Ilexisteuneffetbénéfiquepouraméliorer lafréquenceetlaconsistancedesselles,bienquel'impactglobalsurlessymptômesduSIInesoit pas statistiquement significatif. D'après ces résultats, le lopéramide est considérécommeun traitementefficace contre ladiarrhée,donc il peut rentrerdans le cadrede laprise en charge du SII uniquement en tant que traitement symptomatique. L'utilisationprolongée de cemédicament n'entrainant que très peu d'effets indésirables, et une trèsfaible dépendance pharmacologique. Il s'agira de trouver la bonne dose à efficacitéconstante.L'utilisationduracécadotril(TIORFAN®,TIOFANOR®)peutêtrerationnelledanslecadredu traitementde ladiarrhée chezunpatientD-SIImais cettemoléculen'est jamaiscitée dans les différents articles et recommandations trouvées sur les bases de donnéesscientifiques.

d) Argiles,silicatesetadsorbantsintestinaux

L'argileestuntypederochequel'onretrouvecommunémentdansdifférentspaysdumonde. Elle est composée de minéraux et de métaux, notamment des moléculespolymériques appelées silicates. Les silicates sont des sels composés essentiellement desilice (SiO2) associés à d'autres oxydes métalliques comme le magnésium, le calcium,l'aluminium,lelithium,lezinc,etc.Selonlacompositiondusilicateendifférentsmétauxetselonsaconformationpolymérique,ilestclasséenplusieurscatégories.Danscescatégoriesonretrouvelesdifférentesappellationsdessilicatescommelakaolinite,letalc,l'attapulgite,l'illite ou lamontmorillonite. Les différentes variétés d'argiles retrouvées dans différentsproduitsouappellationsvontdoncsedistinguerlesunesdesautresselonleurcompositionen silicates. Depuis l'antiquité, les argiles sont utilisées par l'homme de manièretraditionnelle afin de traiter certaines pathologies que ce soit par voie orale, dans lestroublesdigestifs,ouparvoiecutanée,pourtraiterlesproblèmesdepeaux,ousousformedecataplasmedanslesaffectionsmusculaires.Encequiconcernelespathologiesdigestives,desmédicamentsoudescomplémentsalimentairesàbased'argileexistentetcontiennentdifférents silicates. On peut citer la diosmectite dans le SMECTA®, la montmorillonitebeidellitique dans le BEDELIX® ou l'attapulgite de mormoiron dans l'ACTAPULGITE®. Lesindications de ces médicaments sont notamment le traitement symptomatique de ladiarrhéeouletraitementsymptomatiquedesmanifestationsfonctionnellesintestinales.Lemécanismed'actiondessilicatessurlaréductiondeladiarrhéeoudestroublesfonctionnelsintestinaux n'est pas clairement établi. De par leur structure, les silicates ont une

65

conformationdansl'espaceenfeuilletsquileurdonneunestructurelamellaire,cequileurconfèreunpouvoiradsorbant.Lafinessedesparticulesvapouvoirainsitapisserl'ensembledutubedigestif.

Raresontétélesétudescliniquesmontrantuneefficaciténotabledessilicatessurles

affectionsgastro-entérologiquesetnotammentleSII.SeulesdeuxétudesversusplaceboontétudiéleurefficacitédansleSII.DanslapremièreétudecontrôléerandomiséedeDucrottéetal.71,524patientsrépondantauxcritèresdeRomeIontétéexposésàlamontmorillonitebeidellitiqueduBEDELIX®ouauplacebotroisfoisparjourpendant8semaines.DanslesousgroupedesmaladesC-SII,lesilicateaamélioréladouleurabdominaleetleconfortdigestifdefaçonsignificativementsupérieureauplacebo(49,4%vs.31,5%,P<0,016).Danslesdeuxautressousgroupes(D-SIIetM-SII),seuleunetendancenonsignificativepouruneefficacitésupérieureàcelleduplaceboaétéobservée(p<0,18).Enrésumé,cetessaidémontrequelamontmorillonitebeidellitiquenesemblepasêtreuneoptionthérapeutiquepourtouslessous-types du SII, mais pourrait améliorer la douleur abdominale ou l'inconfort chez lespatients souffrant de C-SII. L'efficacité de cette thérapeutique bien tolérée doit êtreconfirméepard'autresessaischezlespatientsatteintsdeC-SII.

Figure1471:Douleurabdominaleet/ouaméliorationdel'inconfortdansl'échantillontesté.

DanslesecondessaiproposéparChangetal.72,c'estladiosmectiteduSMECTA®quia

ététestéechezdespatientssouffrantdeD-SII.Onconnaîtl'efficacitédeladiosmectitedansle traitement de la diarrhée aigüe, notamment d'origine infectieuse, mais elle est peuétudiéedansladiarrhéechronique.Danscetessaicontrôlérandomisé,104patientsdont52répondantsauxcritèresdeRomeIIetétiquetésD-SII,ontreçupendant8semaines,troisfoispar jour, 3g de diosmectite ou de placebo. Les résultatsmontrent principalement que ladiosmectite semble être plus efficace que le placebo dans l'amélioration de l'évaluationglobale du SII ainsi que dans l'intensité de la douleur abdominale/inconfort après letraitement de 8 semaines. Comme lamontmorillonite, lemécanisme d'action exact de ladiosmectiten'estpasconnu.Cetteargilenaturellesemblerenforcerlafonctiondebarrièreintestinale. Elle conduit à la prévention des dommages muqueux ainsi qu'à une actioncytoprotectricesurlamuqueusegastro-intestinale72.

subgroup bodily pain decreased more for those treatedwith beidellitic montmorillonite [median: 19()51 to 78)vs. 10 ()78 to 52)], P ¼ 0.032).

Safety

A total of 123 adverse events were recorded in 95 out ofthe 524 patients who received at least one dose of thestudy drug. In beidellitic montmorillonite group 59adverse events (23 D-IBS, 14 C-IBS, 22 A-IBS) werereported in 45/263 patients (17.1%) and in placebogroup 64 adverse events (16 D-IBS, 27 C-IBS, 21 A-IBS)were observed in 50/261 patients (19.2%). Fouradverse events (AE) were serious, as they requiredhospitalization for diagnosis assessment. The two casesin the beidellitic montmorillonite group were one case ofheadache subsequently related to migraine and one caseof inguinal hernia repair. The two cases in the placebo T

able

2.Average

numberof

stoo

lsperda

yin

each

irritablebo

wel

syndrom

e(IBS)

grou

p(intent-to-treat

popu

lation

)

Number

ofstoo

lperda

y

IBS

C-IBS

D-IBS

A-IBS

Placebo

Beidellitic

mon

tmo-

rillo

nite

All

Placebo

Beidellitic

mon

tmo-

rillo

nite

All

Placebo

Beidellitic

mon

tmo-

rillo

nite

All

Placebo

Beidellitic

mon

tmo-

rillo

nite

All

Before

1.38

(0–6

.86);

259

1.38

(0–1

0);

260

1.38

(0–1

0);

519

0.75

(0–3

);n¼

91

0.75

(0–2

.75);

83

0.71

(0–3

);n¼

174

3.0

(1–6

.88);

80

2.76

(0.75–1

0);

92

2.86

(0.75–1

0);

172

1.35

(0.25–6

);n¼

88

1.29

(0.25–3

.88);

85

1.33

(0.25–6

);n¼

173

After

1.25

(0.13–5

.63);

223

1.13

(0.13–4

.75);

228

1.14

(0.13–5

.63);

451

0.94

(0.25–3

.75);

76

1.00

(0.13–2

.88);

70

1.00

(0.13–3

.75);

146

1.87

(0.75–5

.63);

68

1.75

(0.63–4

.75);

83

1.75

(0.63–5

.63);

151

1.25

(0.13–3

);n¼

79

1.00

(0.25–3

.5);

75

1.13

(0.13–3

.5);

154

A-IBS,

alternatingconstipation/diarrhoea-IBS;

C-IBS,

constipation-predo

minan

tIBS;

D-IBS,

diarrhoea-predom

inan

tIBS.

Improvement in ITT population

0.0

10.0

20.0

30.0

40.0

50.0

60.0

Overall IBSpatients

D-IBS C-IBS A-IBS

Per

cent

age

of im

prov

emen

t

PLACEBO

BEIDELLITICMONTMORILLONITE

* NSNSNS

* P < 0.016

Figure 1. Abdominal pain and/or discomfort improvement forintent-to-treat population (primary end-point).

00 1 2 3 4 5 6 7 8

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

8-day period

Act

uari

al r

ate

(%)

Beidellitic Montmorillonite placebo

NS *

Logrank test: P = 0.0314.

Figure 2. Time to improvement of abdominal pain and/ordiscomfort (C-IBS group).

440 P. DUCROTTE et al.

! 2005 Blackwell Publishing Ltd, Aliment Pharmacol Ther 21, 435–444

66

Onpeutconcluresurl'utilisationdesargilesdansletraitementduSIIqu'ilpeuts'agird'untraitementutilepouraméliorercertainssymptômescommeladiarrhéeoulesgaz,maisilne s'agitenaucuncasd'un traitementquivaavoiruneefficacitéglobale sur l'ensembledes symptômes. Leur tolérance est globalement assez bonnemais une constipation peutsuivreuneprisetropimportantedediosmectite,maiselleestcontrôléeparlabaissedelaposologie. Cependant, certains s'inquiètent du fait que ces argiles étant des composés,certes naturelsmais issus de la terre, peuvent contenir une certaine quantité demétauxlourdscommeleplomb.Eneffet,deparsastructureenfeuillet,lesargilesontunegrandecapacitéd'adsorption,quipeutêtreutileenthérapeutique,maisellevaadsorberégalementde nombreux composés provenant de la terre comme le plomb, ou d'autres substancespotentiellementtoxiques.Cependant,àcejour,aucuneétuden'apermisdeprouverquelesargiles une fois ingérées dans l'organisme relargeraient une quantité importante ouinsignifiante de plomb au niveau sanguin et risquer le développement éventuel d'unsaturnisme73.

Lesadsorbantsintestinauxsontreprésentésessentiellementpardeuxprincipesactifs:lecharbonactifouactivéetlediméticoneetsesdérivés.Lecharbonactifestunmatériauconstituéessentiellementdematière carbonéeà structureporeuse. Il peutêtreproduit àpartir de toutematière organique végétale riche en carbone : bois, écorce, pâte de bois,coquesdenoixdecoco,coquesdecacahuètes,noyauxd'olives,oubiendehouille,tourbe,lignite,résiduspétroliers.Engénéral,lecharbonactifàusagemédicalestfabriquéàbasedeboisoudecoquesdenoix.Sa fabrication reposesur leprincipedecarbonisation,avecunpassage à haute température puis d'activation qui va augmenter le pouvoir adsorbant ducharbon. Le principe d'utilisation de ce principe actif dans le traitement des troublesfonctionnel intestinauxetnotammentdesballonnementsetdumétéorisme, reposesur lacapacité qu'a le charbon actif à adsorber différentes substances tels que les gaz ou lesrésidus. Ilestégalementtotalementneutrepour l'organismecaressentiellementcomposéde carbone. Il n'est donc pas digéré par l'intestin. Ses propriétés adsorbantes ont étéétudiéesenprofondeur,etcettepropriétéest largementutiliséedans l'industrieainsiquedans le traitement des intoxications humaines. En revanche, peu d'études ont étudiél'utilisation du charbon actif dans le traitement du SII. Les études publiées évaluent sonutilisationdansl'améliorationdesballonnements,desmétéorismesetdesgazmalodorants.Seulementellessontsouventcontradictoires.DansuneétudedeSuarezetal.74,5patientsnonatteintsduSIIont ingéré520mgdecharbonactifquatrefoisparjouret ilsontévaluél'efficacitésur l'augmentationduvolumedesgazexpulsés.Lesrésultatsontmontréquelecharbon activé n'a pas réduit de manière significative le taux de libération des gaz. Lesinvestigateurs supposent que l'efficacité du charbon actif est dose-dépendante. Ainsi, laquestionseposedesavoirsiunedosesupérieureà520mgquatrefoisparjourutiliséedansl'étudepourraitavoirdémontréuneefficacité.Ladoseutiliséeétaitcellerecommandéeparlefabricant.Parailleurs,lefaitdedevoiringérerplusde8comprimésparjourpourraitêtreunfreinàsonutilisation.Unautreproblèmepotentielestsoulevéavecl'ingestionchroniquedefortesdosesdecharbonactifestquedetellesdosespourraientdiminuerladisponibilitédesnutrimentsessentielsainsiquedesmédicamentsadministréssimultanément.Ainsi, ils

67

concluent que l'administration de charbon activé ne fournit pas un moyen pratique deréduire la libérationdegaz fécal.Deplus,étantdonnéque lessitesde liaisonducharbonactif dans les fèces seraient exposés à des gaz de soufre (ainsi qu'à une variété d'autrescomposés) lorsdupassageàtravers l'intestin, iln'estpassurprenantquetous lessitesdeliaisonaientétéremplisaumomentoùlesmatièresfécalesontatteintlerectum.

Danslesautresadsorbantsintestinaux,ilexisteunautreprincipeactif,lediméticone.Ils'agitd'undérivésiliconé,doncunpolymèredesiloxaneassociantsiliciumetdesradicauxorganiques.Lediméticoneestunesubstancephysiologiquementinerteetn'apasd'activitépharmacologique. Ilagitenmodifiant latensionsuperficielledesbullesdegazprovoquantainsileurcoalescence.Ilpeutêtreassociéàdelasilicesousformedesiméticone.Commelecharbon activé, les études concernant l'utilisation du diméticone dans le SII sont peunombreuses.UneétudeconcernantleCARBOSYLANE®,médicamentcontentantducharbonactivé et de la siméticone, a démontré que, comparativement au placebo, l'intensité dugonflementabdominalétaitsignificativementplusfaibledanslegroupetraité(P=0,045,RRI=1,2,ICà95%=1,0-1,4comparativementàRR=1,4,ICà95%=1,0-1,8)75.Deplus,89%despatientsontsignaléuneaméliorationdessymptômesversus71%avecunplacebo.Encequiconcernelesaméliorationsglobales,ladifférenceétaitplusimportante:67%danslegroupeCARBOSYLANE®contre43%danslegroupeplacebo.

En conclusion de cette partie, il n'existe pas à l'heure actuelle d'études précises et

étenduessurl'utilisationdessilicatesetdesadsorbantsintestinauxdanslapriseenchargeduSII.Mais lesseulsessais trouvésdans les revuesscientifiquesdémontrentunecertaineefficacité de ces traitements en ce qui concerne les ballonnements, les flatulences ou ladiarrhée,maiscelle-cirestemodéréevoireminime.CestraitementspeuventrentrerdanslapriseenchargeduSIIenaccompagnementd'autresmédicamentsagissantdirectementsurlesdouleursouletransit.

Tableau4:Principauxmédicamentsàbased'argilesetd'adsorbantsintestinauxutilisésenFrance(Vidal)

DCI Spécialité

Diosmectite SMECTA®

Monmorillonitebeidellitique BEDELIX®

AttapulgitedeMormoiron ACTAPULGITE®

CharbonactivéCHARBONDEBELLOC®FORMOCARBINE®

CARBOLEVURE®CARBOSYLANE®

SiméticoneSILIGAZ®CARBOSYLANE®METEOSPASMYL®

METEOXANE®POLYSILANEDELALANDE®IMODIUMDUO®

Diméticone POLYSILANEUPSA®PEPSANE®RENNIEDEFLATINE®

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e) Antidépresseurs(tricycliquesetISRS)63–65,68,76

Lesantidépresseurssontdespsychotropesayantpourbutdepotentialiserlaprésencedeneurotransmetteurscomme lasérotonineou lanoradrénalinedans la fentesynaptiquedecertainsneuronescentrauxoupériphériques.Commeleurnoml'indique,ilssontsurtoututilisésdans letraitementde ladépressioncaractériséeoudanscertainstroublesanxieux,mais ilspeuventêtreégalementutilisésdans letraitementdecertainesdouleursappeléesdouleurs neuropathiques. Les antidépresseurs sont classés en plusieurs catégories, selonleur mode d'action. C'est la composante douloureuse et neurologique de laphysiopathologieduSIIquivaêtrecibléeparl'utilisationdecetypedemédicaments.Deuxclassesd’antidépresseurssontàprivilégierdansletraitementdesdouleursneuropathiqueset potentiellement dans le SII: ce sont les antidépresseurs tricycliques et les inhibiteurssélectifsdelarecapturedelasérotonine(ISRS).

Les antidépresseurs tricycliques vont inhiber de manière non sélective les

transporteurs des monoamines au niveau de la fente synaptique permettant ainsid’augmenter les concentrations en sérotonine et noradrénaline. Cependant, ils ontl'inconvénient (ou l'avantage selon les cas) d'avoir un pouvoir antagoniste sur d'autresrécepteurs comme les récepteurs adrénergiques, histaminergiques ou cholinergiques. Lesantidépresseurs tricycliques sont utilisés dans certaines spécialités pour leur capacité àpotentialiser les analgésiques et avoir une action sur la réduction des douleurs d'origineneurogène. Ces douleurs sont notamment dues à un déséquilibre entre lesneurotransmetteursauniveaudesinfluxnerveuxnociceptifsousensitifs.Cesmédicamentspeuventmodifier laperceptionde ladouleur, indépendammentde leureffetantidépressifouanxiolytique.Environ10%despatientsatteintsdeSII,généralementceuxquiprésententdes symptômes réfractaires, ont recours aux antidépresseurs tricycliques64. Lemécanismesous-jacentdubénéficeapportédansleSIIparlesantidépresseurstricycliquesestinconnu,mais il pourrait êtredûàune réductionde la sensibilitédesnerfspériphériquesouàdesaltérations auniveaudu cerveau.Dans les troubles fonctionnels de l'intestin, lesdonnéessontmitigéesquantàlacapacitédesantidépresseurstricycliquesàmodifierlesseuilsdeladouleur viscérale. L'effet antidépresseur des antidépresseurs tricycliques ne semble pasnécessairepouravoirdeseffetsbénéfiquessurl'intestin.Eneffet,ilssontefficacesdanslesdeuxsemainessuivantledébutdutraitement,etdesdosescomplètesd'inhibiteurssélectifsde la recapture de la sérotonine ne fournissent pas lesmêmes avantages. En théorie, leseffets bénéfiques des antidépresseurs tricycliques pourraient être dus à leurs propriétésanticholinergiques.

Uncertainnombred'essaisrandomisésetcontrôlésontdémontréunediminutiondes

symptômeschezlespatientsprenantdesantidépresseurstricycliquesàfaibledosecommel'amitriptyline,ladesipramine,laclomipramine,ladoxépineetl'imipramine77,78.Uneméta-analyseapasséenrevuecestraitementsutilisésdanslesyndromedel'intestinirritableetaindiquéunoddsratiopourunbénéficede4,0parrapportauplacebo77.Cependant,malgréde faibles doses utilisées, les effets secondaires tels que la constipation, la sécheresse

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buccale, la somnolence et la fatigue, surviennent chez plus d'un tiers des patients. Cesdésagrémentsempêchentsouventunebonneobservance.Ilestdoncessentield'informerlepatient demanière adéquate sur la survenue éventuelle de ces effets indésirables. Il estégalementimportantdeleurexpliquerlerationneldel’utilisationd’unantidépresseurdansleurpathologie.CertainesétudesindiquentdesbénéficesplusimportantschezlespatientssouffrantdeD-SIIquechezlesautrestypes.Parcequeleseffetssecondairescomprennentlaconstipation, un traitement anticipé de la constipation est suggéré si les antidépresseurstricycliques sontutiliséspour leC-SII.Dans lesposologiesclassiquesd'antidépresseurs, lesantidépresseurstricycliquesontétéassociésàunearythmiecardiaqueetàunediminutionduseuilépileptogène.Ceseffetssemblentextrêmementraresàdefaiblesdoses.

Les antidépresseurs tricycliques sont recommandés pour le syndrome de l'intestin

irritable modéré à sévère dans lequel la douleur est importante ou lorsque d'autresthérapiesontéchoué. Ilspeuventêtrecombinésàdesagentsantispasmodiquessi l'unoul'autre traitement a eu un succès partiel. Entrainant une somnolence, leur prise doits’effectueraucoucher.Unedosequotidiennecompriseentre10et25mg,avecuneescaladeprogressivepossiblejusqu’à100mg,estsuggérée.Bienqueleseffetsapparaissentauboutd’une semaine, la poursuite du traitement durant quatre semaines est conseillée. Lesantidépresseurs tricycliquespeuventêtrepoursuivispendant6à12mois.Aprèsquoi,unetentativedoitêtrefaitepourréduireladose.

Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et autres antidépresseursplus récents ont été utilisés pour traiter le SII. En effet, ils n'ont pas les nombreux effetsindésirables des antidépresseurs tricycliques et ont une efficacité similaire pour ladépression. Les ISRS n'ont pas les mêmes effets antinociceptifs que les antidépresseurstricycliquesetdoiventencoreprouverleurefficacitédansleSIIoutoutautretroublegastro-intestinalfonctionnel.LesISRSsontunesecondeoptionthéoriquementséduisantecomptetenudeseffetsneuromodulateursdelasérotonineetdesonrôledanslestroublesmoteursetsensitifs.Enadministrationaigue, lecitalopramstimule lamotricitéphasiquecoliqueetatténuelaréponsecoliqueàl’alimentation79.LesrésultatsdesISRSsontmoinsconvaincantsqueceuxdestricycliques80–82mêmesi toutes lesméta-analysesnesontpasconcordantes.Dansplusieursessais,ilestnotammentdifficiled’individualiserdansl’améliorationglobalelapart revenantà l’améliorationpsychologiquede celle liéeà la réductionde l’intensitédessymptômes. L’absence de relation entre effet antalgique et effet antidépresseur estconfirméepar l’échecde ces inhibiteurs sélectifs de la recapturede la sérotoninedans lesoulagement de la douleur alors que les troubles thymiques sont améliorés. Des étudescomplémentairesapparaissentdoncnécessairesafindesavoirsilesISRSontuneplacedansla stratégie thérapeutique des TFI, notamment dans les formes sévères. Ils peuvent êtreutiles lorsque leSII estaccompagnéetexacerbéparun troublede l'humeur.Bienque lespreuves à l'appui de son utilisation fassent défaut, cette classe de médicament peutégalementêtreessayéesil’utilisationd’unantidépresseurtricycliqueaboutitàunéchec.

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Enrésumé,seulel'utilisationdesantidépresseurstricycliquesaprouvésonutilitédansl'améliorationdeladouleuretdel'évaluationglobaleduSII,notammentchezlesD-SII.Cetteamélioration est sans doute due à l'effet anticholinergique mais aussi à un effet surl'humeur. Cependant, des études plus importantes et statistiquement plus fortes doiventêtremenéespourconfirmerleurseffetsbénéfiques.Encequiconcernel'utilisationdesISRS,leurefficacitéresteincertaine.Ilfaudraattendreplusd'étudessurleurutilisationdansleSII.L'amélioration de la douleur chez un patient SII peut être plus importante qu'avec lesantispasmodiquesmais leseffets indésirablessontplusnombreux. Il faudraalors informerlespatientsdeceseffetsindésirablesetutiliserladoseefficacelaplusfaiblepossible.

Tableau5:Antidépresseursayantl'AMMdansletraitementdesdouleursneuropathiques(Vidal)

DCI Dosages Spécialité

Amitriptylline 25,50mg LAROXYL®

Clomipramine 10,25,75mg ANAFRANIL®

Imipramine 10,25mg TOFRANIL®

f) Médicamentsagissantsurlesystèmesérotoninergique

La raison d'être des recherches sur les ligands des récepteurs de sérotonine (5-

hydroxytryptamine, 5-HT) dans le SII repose principalement sur le fait que la sérotonine,libérée par des cellules semblables aux cellules entérochromaffines, a un certain nombred’effetsmoteurssurletractusgastrointestinal,auncertainnombred'effetsmoteursbiendocumentés sur le tractus gastro-intestinal. Elle peut produire une hyperalgésie dansplusieursmodèlesexpérimentaux83.Chezlesmammifères,letractusgastro-intestinalestlasource la plus importante de sérotonine. Elle peut augmenter la sensibilité des neuronesviscéraux se projetant entre le tractus gastro-intestinal et le systèmenerveux central. Lesrécepteurs à la sérotonine, connus pour affecter la fonction motrice du tractus gastro-intestinal, appartiennentaux sous-types5-HT1,5HT2,5-HT3,5-HT4et5-HT7.Parmieux, lessous-types5-HT3et5-HT4sontlesplusétudiésengastro-entérologie.Leurimplicationdansla régulation de la motilité du tractus gastro-intestinal est illustrée sur la figure 15. Lesrécepteurs neuronaux de la sérotonine peuvent augmenter ou inhiber la libération deneurotransmetteurs et comprennent les sous-types 5-HT1A (inhibiteur), 5-HT3 et 5-HT4(excitateurs). Les récepteurs de la sérotonine des muscles lisses peuvent contracter ourelaxer les cellules effectrices et appartiennent aux sous-types 5-HT2A (régulateurs de lacontraction), 5-HT4 et 5-HT7 (tous deux régulateurs de la relaxation). Dans l'intestin grêlehumain, les récepteurs 5-HT2A régulant la contraction et les récepteurs 5-HT4 régulant larelaxation,coexistentsurlescellulesmusculaireslisses.

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Figure1583:Modulationdelamotricitéintestinaleparlesrécepteurssérotoninergiques.

Ainsi,lasérotonineagissantnotammentsurlesrécepteurs5-HT3et5-HT4,joueunrôle

importantdanslecontrôledelamotilitégastro-intestinale,delasensibilitéetdessécrétionsgastro-intestinales. En outre, des observations récentes montrent que les concentrationsplasmatiquesdesérotoninesontréduiteschezlespatientsatteintsdeSIIavecconstipation,maisaugmentéeschezlespersonnessouffrantdediarrhée,enparticuliercellesprésentantdes symptômes postprandiaux. Cela renforce leur participation au dysfonctionnementmoteuretsensorielassociéàcetteaffection64.Ainsi, ilexisteun intérêtconsidérablepources récepteurs en tant que cibles thérapeutiques possibles pour le SII. Les agonistes durécepteur5-HT4vontalorsaugmenterlapropulsiongastro-intestinale,enayantuneactionqualifiéedeprokinétique.Lesantagonistesaurécepteur5-HT3vontquantàeuxralentirletransitgastro-intestinaletréduirelasensationviscérale.

Les effets moteurs des antagonistes des récepteurs 5-HT3, comme l'alosétron,comprennentunediminutiondutempsdetransitducôlon,unréflexegastro-coliqueréduitetunecompliancecoliqueaccrue.Lesantagonistessemblentréduirelasensibilitéintestinaleà la distension chez l'homme, ainsi que dans plusieurs modèles animaux. L'alosétronaugmente la compliance du côlon chez les patients souffrant de syndrome de l'intestinirritable et peut réduire la sensibilité à la distension. Il en résulte une réduction de ladiarrhée et de son urgence. Tous ces effets visent les anomalies physiologiques connuesdanslesyndromedel'intestinirritableprédominantparladiarrhée.Dansdeuxgrandsessaisrandomisés,endoubleaveugleetcontrôlésparplacebo,l'alosétron(1mgdeuxfoisparjour)était bénéfique chez les femmes atteintes d'un SII sans constipation. Une réponse a étésignaléechez43%dessujetsd'uneétude(uneaugmentationabsoluede17%parrapportaugroupeplacebo,P<0,001)etchez41%dansl'autre(uneaugmentationabsoluede12%avecletauxdanslegroupeplacebo,P<0,05).L’utilisationdel’alosétron,comparéeauplacebo,estassociéeàuneaméliorationdelaqualitédeviequecesoitsurleplanalimentaire,socialouphysique.Laconstipationaétéuneffetsecondaireretrouvéchez25à30%dessujets,

ron reduced bowel frequency and improved stoolconsistency in the diarrhoea-predominant sub-group (28 patients).[58]Further evidence in favour of a role for 5-HT3

receptors in humans was provided by Prior andRead,[59] who found a dose-dependent reduction ofpostprandial colonic motility with granisetron, andby von der Ohe et al.,[60] who reported a reductionof the postprandial colonic hypertonic response incarcinoid diarrhoea with ondansetron.Recently, Sanger[61] reviewed the pros and cons

of selective 5-HT3 receptor antagonists for thetreatment of functional bowel disorders. Table IIIprovides a synopsis of putative actions of 5-HT3receptor antagonists in the GI tract. Apart from thewell known involvement of 5-HT3 receptors in me-diating (centrally and peripherally) emesis of var-

ious origin, several animal models point to theirrole in modulating visceral sensitivity.[9] Graniset-ron and tropisetron (but not ondansetron) werefound to inhibit the fall in blood pressure and in-tragastric pressure observed in rats after duodenaldistension.[62]Whether the site of serotonin receptorsmodulating afferent information is on peripheralafferent nerve fibres or outside the GI tract, how-ever, is unclear. For instance, alosetron, adminis-tered either centrally or peripherally in dogs, seemsto modulate the visceral nociceptive effect of rectaldistension in dogs.[63] In humans, reduced percep-tion of colonic distension may also depend on anincreased compliance of the colon to distension.[15]An important issue when evaluating different

studies with 5-HT3 receptor antagonists is that,even in the same experimental model, differences

Intraluminal content

Smooth muscle

5-HT2A

5-HT4

5-HT7

Ascending reflex

contraction

Descending reflex

relaxation

NO/VIP/ATP

Inhibitory

motor neuron

ACh/TK

ACh/TK ACh/TK ACh/TK

+Excitatory

motor neuron

5-HT1A

5-HT4

5-HT3

5-HT4

5-HT3 5-HT

45-HT

1A

5-HT4

Sensory

neuron

5-HT3

5-HT/SOM/

VIP/NO/ACh

+ + +

+ +

+

+−

−−

− −

−+

(?)

Fig. 1. Modulation of intestinal motility by serotonergic receptors. Distension by intraluminal contents stimulates sensory neurones

(intrinsic primary afferent neurones), which trigger an ascending excitatory reflex (leading to contraction) and a descending inhibitory

reflex (leading to relaxation). Transmitters released by interneurones in the ascending reflex include acetylcholine (ACh) and sub-

stance P, whereas descending interneurones belonging to different subpopulations may use serotonin (5-hydroxytryptamine; 5-HT),

somatostatin (SOM), vasoactive intestinal polypeptide (VIP), nitric oxide (NO), ACh and other mediators as transmitters. Excitatory

motor neurones release ACh and tachykinins (TK) at the neuromuscular junction, whereas inhibitory motor neurones may release

NO, VIP or adenosine triphosphate (ATP) depending on the gastrointestinal tract level and on the animal species. 5-HT3 and 5-HT4

receptors have an excitatory effect on enteric neurones, whereas 5-HT1A receptors inhibit transmitter release. Serotonergic receptors

may also directly contract or relax smooth muscle cells via 5-HT2A, 5-HT4 and 5-HT7 receptors. + indicates stimulation; – indicates

inhibition; (?) indicates limited data.

322 De Ponti & Tonini

© Adis International Limited. All rights reserved. Drugs 2001; 61 (3)

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expliquant,enpartie,letauxd'abandonde10%.L'alosétronétaitsupérieuràlamébeverinepourladouleurassociéeauSII(parexemple,lestauxdesoulagementdeladouleurétaientde10à13%plusélevésàdeuxettroismois)dansunessaieuropéenmulticentrique.Bienque l'incidencedeseffetssecondairesétaitsimilairedanschaquegroupedetraitement, laconstipationétaitplusfréquentedanslegroupedel'alosétron(22%)63.

Aux Etats Unis, l’administration d’alosétron a provoqué une colite ischémique chezenvironunpatientsur7000.Cetincidentaétéàl’originedesonretraitdumarché.Enpartiegrâceàdesgroupesdedéfensedesintérêtsdespatients, laFoodandDrugAdministration(FDA)américaineaautorisélaréintroductiondel'alosétronenjuin2002,suivantdeslignesdirectricesprécisesquiobligentlespatientsàsignerunformulairedeconsentementetauxmédecins prescripteurs de signer un certificat. Compte tenu de ses effets secondairesconnus, letraitementdoitêtrelimitéauxfemmesatteintesd'unSIIsansconstipationdontlessymptômessontsuffisammentgravespourjustifierlerisquedecoliteischémiqueinduitepar le médicament et qui n'ont reçu aucune réponse à d'autres traitements. D'autresmédicamentsde cette classe sonten coursdedéveloppement,bienque leur innocuitéetleurefficacitésoientinconnues.

Cemédicament n'étant disponible qu'aux Etats-Unis, il n'existe pas d'alternative en

France,endehorsdesautresantagonistesdesrécepteurs5-HT3commel'ondansétronoulegranisétron. Ils seront alors utilisés hors AMM, car leur indication est restreinte autraitement des nausées et vomissements chimio-induits. Chez l'homme, l'ondansétron n'aaucuneffet sur le transit de l'intestin grêle chez les volontaires sainsou chez les patientssouffrantdeD-SII.Cependant, il ralentit le transitauniveauducôlonet inhibe la réponsemotrice colique à un repas chez des individus sains. Dans une étude en double aveugle,contrôléeparplacebo,sur50patientsatteintsdeSII,l'ondansétronaréduitlafréquencedecontraction de l'intestin et amélioré la consistance des selles dans le sous-groupe D-SII.D'autres preuves en faveur d'un rôle des récepteurs 5-HT3 chez l'homme ont trouvé uneréductiondose-dépendantedelamotricitécoliquepostprandialeaveclegranisétron83.

Desprokinétiquesbienconnus,telsquelecisapride,sontclassésparmilesagonistesdesrécepteurs5-HT4carilexistedespreuvesquel'effetprokinétiqueetaumoinscertainsdeseffets indésirables sontmédiéspar ce sous-typede récepteur. En cequi concerne leseffetsindésirablescardiaquesducisapride,ilestbienconnuquelemédicamentpeutinduiredesarythmiesventriculairesetprolongerl'intervalleQTparsespropriétésantiarythmiquesdeclasseIIIetnonparl'activationdesrécepteurs5-HT4.Ceux-cisontdusàl'inhibitiond'unsous-ensemblede canauxK+ impliquésdans la repolarisation cardiaque. Les agonistesdesrécepteurs5-HT4dedeuxièmegénération telsque le tegaserodet lemosapride semblentdépourvus de propriétés antiarythmiques de classe III. Certains d'entre eux (tegaserod,prucalopride) peuvent être plus actifs au niveau du côlon que le cisapride. De façonintéressante,lemosapride,dontlemétaboliteprincipalestunantagonistedurécepteur5-HT3, présente peu ou pas d'activité prokinétique dans le côlon, semblable à ce qui est

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observéaveclecisapride,àlafoisagonistedurécepteur5-HT4etantagonistedurécepteur5-HT3.

Parmilesagonistesdesrécepteurs5-HT4,letegaserod,leprucaloprideetlemosaprideont subidesessais cliniques.Chezdes volontaires sains, 6mgde tegaserod deux foisparjour accélère la vidange gastrique et le transit intestinal. Le taux de transit colique a étélégèrementaccéléréà48heures,maispasà24heures.Chez lespatientsatteintsdeC-SII,unedosede2mgdetegaseroddeuxfoisparjouraccélèreletransitdel'intestingrêleetleremplissagecæcal,maisn'aaucuneffetsur lavidangegastriqueouletransitcoliquetotal.Troisgrandsessais randomisés,endoubleaveugle, contrôlésparplacebosur le tegaserodpour le SII prédominant par la constipation indiquent qu'il procure un bénéficesymptomatique.L’utilisationdutegaserod,àuneposologiede6mgdeuxfoisparjour(doseapprouvéeparlaFDA)duranttroismois,adémontréunbénéficepourlepatient.Ilapermisde réduire les symptômes de la douleur et la constipation, et ce dès le premiermois. Aucoursduderniermois de traitement, 52%despatientsprenantdu tegaserodavaientuneamélioration des symptômes globaux du SII (+ 9,3% par rapport au placebo). Les étudesdisponibles, bien qu’elles aient été sous-alimentées d'un point de vue statistique pourdétecterlesdifférencesfondéessurlesexe,suggèrentquecesavantagesnesemanifestentquechezlesfemmes63.LetegaserodaétéapprouvéparlaFDApouruneutilisationjusqu'à12 semaines chez les femmes atteintes deC-SII. Les effets secondaires du tegaserod sontgénéralementlégers,avecdeladiarrhée,généralementbrève(seproduisantdans10%despatientes). Malgré une bonne expérience initiale en matière de sécurité, l'utilisation dutegaserod a été récemment restreinte en raison des inquiétudes concernant un nombre,certesrestreint,maisnotabled'ischémiesmyocardiquesetd'accidentsvasculairescérébraux(13événements sur11614patients traités).Cemédicamentadoncété retirédumarchéaméricainen2007.L’apparitiondeceteffetindésirablemajeurn’entravecependantpaslarechercheetledéveloppementd’autresagonistes5-HT4.

Leprucaloprideestétudiédansbeaucoupdepathologies,ycomprisleC-SII.Dansune

étude en double aveugle et croisée chez 24 volontaires sains, le prucalopride administrépendant1semaine,asignificativementaugmentélenombredesellesetlepourcentagedeselles molles/aqueuses par rapport au placebo. Ces paramètres sont revenus au niveauinitial dans un délai d'une semaine après l'arrêt du prucalopride. Le prucalopride aégalementraccourcisignificativementletempsdetransitcoliquemoyenetletempstotaldetransitdesvoiesgastro-intestinales.Ladiarrhéeestl'effetindésirableleplusfréquemmentrapporté chez les volontaires sains et chez les patients atteints de constipation. Lemosapride a été récemment approuvé au Japon,mais il est ciblé pour le traitement destroublesdutractusgastro-intestinalsupérieur,telsquelerefluxgastro-oesophagien83.

EnFrance,ilexistepeudemédicamentsjouantsurlestransmissionssérotoninergiquesetayantuneAMMengastro-entérologie.Certainsprincipesactifs ayantuneffetagonistesur les récepteurs 5-HT4, comme le cisapride, le prucalopride (RESOLOR®) ou même lemétoclopramide (PRIMPERAN®), n'ont pas d'AMM dans le SII. Ces derniers médicaments

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sontmêmeutilisésavecuneextrêmeprécautionenraisondeleurrisqued'allongementdel'espaceQTavecrisquedetorsadesdepointe,etontmêmefaitl'objetderetraitdumarchédans certains pays comme les Etats-Unis. Les études démontrant l'efficacité desmédicamentssérotoninergiquesconcernentleplussouventlesmoléculesayantétéretiréespour les raisonsprécédemmentévoquées.Cependant,denouvellesmoléculesn'ayantpascespropriétéssontentraind'êtreévaluéesetlesrésultatsnevontpastarderàapparaîtredans les années à venir et vont surement aboutir à la sortie sur le marché de cesmédicamentsdansletraitementduSII.

g) Autrestraitementsanecdotiquesouàvenir

Commevuprécédemment,uneétudearévéléqu'environlestroisquartsdespatientsSII présentaient une réaction positive au test respiratoire à l'hydrogène marqué aprèsingestiondelactulose.Leschercheursontinterprétécettedécouvertecommesuggérantlaprésenced'uneproliférationbactériennedel'intestingrêle,justifiantuneantibiothérapie64.Le collège américain de gastroentérologie a identifié 6 essais contrôlés randomisésimpliquant1916participantsévaluantlathérapieantibiotiquechezlespatientsatteintsduSII67. Dans l'ensemble, elle a amélioré les symptômes du SII par rapport au placebo, sanshétérogénéité significative entre les études. Un essai a évalué la néomycine chez 111patientsavecuneffetsignificatifensafaveur(RR=0,73,IC95%:0,56-0,96).Les5essaisrestants ont évalué la rifaximine chez 1 805 patients atteints du SII. Il y a un avantagestatistiquement significatif en faveur de l'antibiotique (RR = 0,84; IC 95%: 0,78 - 0,90). Ilexistedoncunintérêtdesantibiotiques,notammentdelarifaximine,dansletraitementduSII et notamment celui prédominant par la diarrhée. Cependant, ces effets seraient decourteduréeetcelaobligeraituneexpositionprolongéeauxantibiotiquespouvantaccélérerunerésistancebactérienneacquise.

La prégabaline inhibe la libération neuronale de neurotransmetteurs excitateurs(glutamate,noradénaline,substanceP)enseliantàunesous-unitédescanauxcalciquesdelamembraneneuronale.Endehorsdusoulagementdesdouleursneuropathiques,elleestindiquée chez l’adulte dans le traitement de certaines formes d’épilepsie et des troublesanxieux généralisés. Dans un essai contrôlé en groupes parallèles contre placebo, cettemoléculeàunedosequotidiennede600mg(200mg×3)apermisdecorrigerlasensibilitérectale chez des patients SII hypersensibles. L’obtention progressive (12 à 21 jours) de ladosethérapeutiqueavaitpermisdelimiterleseffetssecondairesdutraitement76,84.

Le linaclotide est un peptide de 14 acides aminés structurellement similaire auxhormonesappartenantàlafamilledespeptidesdelaguanyline.Lespeptidesdeguanylinesontdeshormonesendogènes.Ellesaidentàlarégulationdufluideintestinaletaumaintiende l'homéostasie électrolytique par liaison et activation des récepteurs de la guanylatecyclaseC(GCC)présentsauniveaudel'épithéliumintestinal.L'activationdelaGCCentraîneuneaugmentationduguanosinemonophosphatecyclique (GMPc)quidéclencheuneséried'événementsconduisantàl'activationdurégulateurdeconductancetransmembranairede

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lafibrosekystiqueconduisantàlasécrétiondebicarbonateetdechloruredanslalumière,suivieparlefluxdesodiumetd'eaudanslalumièreintestinale,ainsiquelamodulationdescapteursafférentsàladouleur.Troisessaiscliniquesrandomiséschezdespatientsatteintsdu SII ont été identifiés, impliquant 2028 patients67. Il y a eu un effet statistiquementsignificatifenfaveurdulinaclotideparrapportauplacebo(IC95%5-8),sanshétérogénéitésignificativeentrelesétudessurladouleurabdominale.

Le lubiprostoneactivelecanaldechloruredetype2(CIC-2)surlasurfaceapicalede

l'épithéliumintestinal.Ilenrésulteunfluxdechlorureetd'eaudanslalumièreintestinale,entrainantuntransitplusrapideàtraverslepetitetgrosintestin.QuatreessaiscliniquesdelubiprostonechezdespatientsatteintsduSIIontétérapportésdanstroisarticlesdistincts.Cependant,l'uned'entreellesévaluaitunepopulationmixtedepatientsatteintsduSIIetdeconstipation chronique. Il y a eu un effet statistiquement significatif en faveur de lalubiprostonecomparativementauplacebo,sansaucunehétérogénéitésignificativeentrelestroisrésultatsdesessaisindividuels.LaqualitédelapreuveaétéclasséecommemodéréeselonlescritèresGRADE,carl'effetsurlessymptômesglobauxduSIIétaitmodesteetl'ICà95%pourleRRétaitrelativementproched'uneffetnul67.

En résumé, les agents prosécréteurs comme le linaclotide et le lubiprostone sont

efficaces dans le SII avec constipation prédominante. Comme ces deux agents ont étéévaluésversusplaceboplutôtqu'àlathérapieclassique,leurpositiondansunalgorithmedetraitementduSII (c'estàdireenalternativeàd'autres traitementsoucommethérapiedepremière intention)estdifficileàdéfinir.Ceciestcompliquéparunmanquedeconsensussur la thérapie"standard"àappliquerdans leSII,étantdonné les limitesdesdonnéessurd'autresagents.Cesdeuxmoléculesn'ontpasd'AMMenFrance.

2) Traitementsnonmédicamenteux

Dans la médecine occidentale, l'usage des médicaments ou des principes actifspharmacologiques dits allopathiques est très utilisé pour soulager les symptômes despatients. Lesmédicaments font partie intégrante de la prise en charge de la plupart despathologiesaiguesouchroniques.Maisdepuisdenombreusesannées,lessociétéssavanteset les autorités de santé rappellent également que les conseils prodigués par lesprofessionnels de santé auprès des patients sur leurmode de vie, leur alimentation, leurexposition environnementale ou leur activité physique ont également une placeprépondérante dans la prise en charge des pathologies, d'autant plus si elles sontchroniques.Demêmequelapriseenchargepsychologiquedesmaladespeutaméliorerleurquotidien, en recentrant la place dumaladedans sonparcours de soin. Ces deux aspectsaméliorentlapriseenchargedupatientdanssamaladieetpeuventaméliorerd'autantplusl'efficacité des traitements médicamenteux classiques. En ce qui concerne le SII, deuxthérapeutiques peuvent influer sur l'amélioration globale de la maladie. Il s'agit de lamodificationdurégimealimentairedumaladeetdesapriseenchargepsychologique.Enfin,lemédecinmaissurtoutlepharmacienaunrôleàjouerdansleconseilaupatientbiensûr,

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mais aussi dans la possibilité qu'à le patient d'obtenir des traitements associés à sontraitement standard, comme l'usage des médicaments ou produits de phytothérapie,d'aromathérapie,ouencore l'usagedesprébiotiquesouencoredesprobiotiques,qui feral'objetdelatroisièmepartiedecettethèse.

a) Modificationsdurégimealimentaire

Les patients atteints de SII décrivent souvent un lien chronologique entre la prisealimentaireetlasurvenueoul’aggravationdessymptômes.Laquestiondel’alimentationestdoncrécurrente,occupantsouvent lapremièreplaceparmi leurspréoccupations.D'autantplus que l'émergence de modes concernant les habitudes ou les pratiques alimentaires,relayéeparlesmédias,certainespersonnalitésouparl'intermédiaired'ouvragesvendusenlibrairie ou d'articles de magazines et d'internet, amènent les patients à se questionnerconstammentsurleurproprealimentationetleurmodedevie.Certainsrégimescommelerégime sans gluten, sans lactose, ou encore le végétarisme voire le végétalisme, quiprennentuneplacedeplusenplusimportantedansnotresociété.Ilsparticipentàlaremiseencausedel'alimentationquotidiennedespatientsSII.D'autantplusquecesrégimessontsouvent associés par ceux qui les pratiquent à des prétendus bénéfices pour leur santé,notamment intestinale. Les patients souffrant de SII sont souvent dans une impassethérapeutiqueoùlesmédicamentsnesoulagentpasassezleurssymptômes.Ilsrecherchentalors une solution alternative pour aider à améliorer leurs maux. Ils sont alorsparticulièrementattentifsauxconseilsdiététiquesquipeuvent leurêtreprodigués,quecesoitdansl'idéal,parunprofessionneldesantécommeleurmédecin,leurpharmacienouundiététicien/nutritionniste, ou encore par des ouvrages ou articles piochés au hasard surinternetoudanslesmagazines,dontlarigueurscientifiquepeutêtreremiseencause.

Les symptômes du SII sont souvent aggravés par l'alimentation, ce qui conduit denombreuxpatientsàconclurequ'ilssouffrentd'unecertaineforme"d'allergie"alimentaire.L'allergiealimentaireréelleetdiagnostiquéeseproduitchez6-8%desenfantset1-4%desadultes. La réactionallergiquealimentaire,qui estprovoquéepar l'immunoglobulineE, seproduit dans les 2 heures qui suivent l'ingestion de l'aliment, et se manifeste par ungonflement, des démangeaisons, une urticaire, une respiration sifflante, des nausées, desvomissements, des diarrhées, des douleurs abdominales et un effondrement. Il n'existeaucunepreuvequ'unetelleréactionallergiqueait lieudansleSII85.Unegrandeproportiondes patients atteints de SII se plaint d'intolérance subjective à divers aliments, comme lelactose, le gluten, oumême certains fruits ou légumes. L'intolérance alimentaire est uneréaction non-toxique, non immune-médiée, aux produits chimiques bioactifs dans lesalimentstelsqueleshistamines,lessulfitesetleglutamatemonosodique.Lessymptômessemanifestanthabituellementendehorsdutractusgastro-intestinal.Iln'existeaucunepreuvedocumentéequecette intolérancesemanifestedans leSII85.Lasensibilitéauglutennon-coeliaque(SGNC)areçul'attentiondesmédiasetdugrandpubliccesdernièresannéesetaétéconfondueavec laspéculationpopulaireselonlaquelle lateneurélevéeenglucidesdubléestresponsabledesaspectsnégatifsdelasantételsquel'obésité.LaSGNCsemanifeste

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par des symptômes gastro-intestinaux et extra-gastro-intestinaux similaires au SII, sansmaladiecœliaqueouallergieaublédiagnostiquée.Cependant,lessymptômessontsoulagéspar un régime sans gluten et les symptômes réapparaissent après reprise du gluten. Laprévalence de la SGNC représenterait 0,55 à 6% de la population des Etats-Unis85. Pourmémoire, leglutenestunesubstanceprotidiqueissuedecertainescéréalescommeleblé,l'orge ou le seigle, contenant principalement deux protéines : la gliadine et la gluténine.C'est cette dernière qui permet notamment le processus de panification en donnantl'élasticitéetlatexturedespainsfaitàbasedefarinedebléoudeseigle.

Ilestànoterque,danslesétudesmontrantdeseffetsbénéfiquessurlessymptômes

des patient intolérants au gluten mais non diagnostiqués maladie cœliaque, ces effetsrésulteraientduretraitdubléplutôtqueleretraitdugluten.Uneétudecroisée,contrôléeparplacebo,aétéréaliséechezdespatientsatteintsdesymptômesdetypeSIImenantunrégime sans gluten à leur propre initiative. Les symptômes gastro-intestinaux ontconstammentetsignificativementétéamélioréslorsqu'ilsconsommaientunrégimepauvreenoligo-,di-,monosaccharidesetpolyols(appelésFODMAPs,dontnousparleronsplusloin),etcessymptômesn'ontpasétéaggravésparunefaibledoseouunedoseélevéed'apportdegluten85. Il semble donc que la teneur en glucides (fructanes et galactanes) de blé plutôtqu'en gluten est responsable du déclenchement des symptômes de la SGNC. 24% despatientsprésentaientdessymptômesnoncontrôlésmalgréunrégimesansgluten,27%nesuivaientpascemêmerégimeseulet65%évitaientd'autresalimentscontenantdesniveauxélevésdeFODMAPs.Cesrésultatsappuientdavantagel'idéequelessymptômesdelaSGNCnesontpasdéclenchésparleglutenprésentdansleblé.

D'autrespatients,n'hésitentpasàexcluredeleuralimentationunélémentconnudans

notre société occidentale, les produits laitiers contenant du lactose. Le lactose est leprincipalsucrecontenudanslelait.Habituellementbientoléré,ilpeutêtreresponsabledesymptômeslorsqu’iln’estpasabsorbéparlamuqueuseintestinale.Encasdemalabsorption,ilpeutprovoquerunediarrhéeainsiquedesballonnements,desdouleursabdominales,oudesflatulencesparuneffetosmotiqueetparfermentationcolique.L’absorptiondulactosenécessite au préalable une hydrolyse par la lactase présente dans la bordure en brosseintestinale. L’activité de la lactase est maximale à la naissance, puis diminueprogressivementpouratteindreunevaleurtrèsbasseaprèslesevrage.Cettefaibleactivitélactasiqueestmaintenuechezlaplupartdessujetscaucasiensdel’EuropeduNord-Ouestetd’Amérique du Nord tout au long de l’âge adulte. Cela s'explique par l'importance del'industrie laitière dans notre société occidentale. Les causes de déficit en lactase sontvariables : déficit congénital,malabsorption primaire par immaturité digestive de l’enfantprématuré, malabsorption secondaire à une gastroentérite aiguë ou une entéropathiechronique.Unrégimepauvreenlactoseentrainelasuppressiondel’ensembledeslaitsetdenombreuxproduitsdérivés,issusnotammentdesafermentationpardesbactérieslactiques.La fermentation du lait (yaourt, fromage) entraîne unediminution de la concentration enlactose, variable selon les produits, expliquant que de nombreux laitages soient autoriséstoutcommelesfromagesàpâtecuite.Unemalabsorptionvraieaulactose,démontréepar

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un test respiratoire après charge en lactose, ne s’accompagne pas toujours d’uneintoléranceaulactosequisedéfinitcommelasurvenuedesymptômesaprèsl’ingestiondelactose. De plus, un apport moyen de l’ordre de 12 à 20 g de lactose par jour esthabituellementtoléréparlesmaladesayantuneauthentiquemalabsorptiondulactose86.Eneffet, celui-ci est digéré par notre propre flore bactérienne.Un régime pauvre en lactosen'est dorénavant indiqué que lorsque la malabsorption du lactose s’accompagned’intolérance. Il faudra également être prudent car le fait de ne plus consommer desproduits laitiers peut entrainer une carence en apports de calcium et engendrer desproblèmesosseuxsi l'apportnutritionneljournaliernecorrespondpasà900mgdecalcium(ANSES). Cependant, il existe d'autres sources de calcium dans l'alimentation comme leslégumes,lesfruitssecsouleseauxminérales.

Il existe donc peu de preuves que les réactions immédiates de type IgE soientparticulièrement importantesdans leSIIdanssonensemble.Bienquechezceuxsouffrantdediarrhéesetprésentantégalementuneatopie,cemécanismepeutêtreplusimportant.Ilsembletoutefoispeuprobableque lespatientsSIIprésententune intolérancealimentaire,mais les mécanismes impliqués dans ces réactions ne sont pas connus. Actuellement, lemoyenleplusrobusted'identifieruneintolérancealimentaireestlaprovocationalimentaireendoubleaveugle,bienquecelademandebeaucoupdetempsetdemain-d'œuvre.Dansuneétudeportant sur 21patients atteints deD-SII64, il a étédémontréquedans environ66% des cas, l'intolérance alimentaire pouvait être identifiée en utilisant un régimed'exclusionsuivied'uneréintroductionenséried'alimentsindividuels.Chezcertainsdecespatients,lavaliditédel'intoléranceétaitconfirméeparuntestendoubleaveugle.Unerevuesystématique de sept études a tenté de reproduire ces résultats montrant des taux deréponse variant de 15% à 71%. Cependant, l’absence de preuves n’a pas permis derecommandercetteapprochesystématique.Néanmoins,ilnefaitaucundoutequecertainspatientsréagissentàl'exclusionalimentaire,cequipeutvaloirlapeined'êtreessayéchezlespatientsplusréfractaires. Ilest importantdeserendrecompteque l'exclusionalimentairepeutdevenirproblématiquesilerégimealimentairedevienttellementrestreintqu'ilrisqued'êtrenutritionnellementinsuffisant.Ilestdoncpréférablequeceprocessussoitsuperviséparundiététicien/nutritionniste.

Lesfibresalimentairesconstituentégalementunesourcedenutrimentspouvantavoir

une action sur le transit intestinal et sur la bonne santé du tube digestif en général. Lesfibres alimentaires sont originellement reconnues comme des constituants des paroiscellulairesvégétalesnondigestibles,auxpropriétésbénéfiquespourlarégulationdutransitintestinal87. Contrairement aux glucides, lipides et protéines, la Communauté scientifiqueinternationale peine à déterminer une définition consensuelle des fibres alimentaires.Aujourd’hui, les fibres sont définies comme étant des polymères de naturepolysaccharidique non digérés par les enzymes endogènes du tractus digestif humain. Cesont les liaisons chimiques entre les différents oses, non hydrolysables par les enzymesendogènes, qui leur permettent d’échapper aux processus de digestion dans la partie

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proximale du tube digestif. Retrouvées dans les végétaux, les fibres suivantes sont desconstituantsdelaparoivégétale:

- Lacelluloseestunpolymèreconstituédemoléculesdeglucoseliéesenβ-1,4.Elleestleprincipalpolymèreproduitparlemondevivant.

- Leshémicellulosessontconstituéesd’unechaînecentraled’hexosesoudepentosesliés en β-1,4, et de chaînes latérales. La nature des oses prédominant dans leschaînes latéralesest indiquéepar lapremièrepartiedunomdeceshémicelluloses.Ainsi,unxyloglucanepeutêtrecomposéd’unechaînecentraledeglucanes(glucosesliés en β-1,4) et de chaînes latérales composées principalement de xylose. Lesxyloglucanes, glucomannanes, mannanes, xylanes, arabinoxylanes (mais pas lesarabinogalactanes)sontinclusdansladéfinitionchimiquedeshémicelluloses.

- Les pectines sont constituées d’une chaîne principale formée d’acides D-galacturoniques méthylés ou non, et de rhamnose. Les chaînes latérales sontconstituéesd’autresosescommel’arabinoseoulegalactose.

Lesgommesderéservesontégalementconsidéréescommedesfibres.Ils’agitdelagommearabique,sécrétéeparl’acacia,etconstituéedegalactomannanesoudelagommedeguarproduiteparlesharicotsguarconstituéed’arabinose,degalactose,d’acideglucuroniqueetde rhamnose. Les mucilages produits dans les vésicules de Golgi de végétaux tels le lin,l'ispaghuloulepsylliumsontdespolymèresdeD-xylose,glucose,acideglucuroniqueet/ougalactose. Les carraghénanes constitués de molécules de galactose plus ou moinssubstituéesetlesalginatesconstituésdepolymèresdel’acideD-mannuroniqueetdel’acideL-guluronique, sont extraits des algues et font également partie des fibres. Ils sontessentiellementutiliséscommeadditifspour leurspropriétésgélifiantes,épaississantesoustabilisantes. Il existe également une fraction de l’amidon non digérée par les amylasessalivaire et pancréatique : il s’agit de l’amidon résistant. On compte trois catégoriesd’amidon résistant : les amidons encapsulés ou physiquement inaccessibles retrouvésnotamment dans les légumes secs ; les amidons (dits « natifs ») de certains alimentsconsommés crus tels que la banane, dont la teneur en amidon résistant est inversementproportionnelleaudegrédematuritédufruitetlesamidonsrétrogradésdesalimentscuitspuis conservés sans déshydratation préalable. Les fructanes sont constitués de polymèresexclusivementcomposésdemoléculesdefructoseoudelongueschaînesdefructoseliéesàuneunitédeglucose. L’inuline, composéed’unmélangedesdeux typesdepolymèresestretrouvée en grande quantité dans la chicorée et le topinambour. Les fructo-oligosaccharides (FOS), retrouvés dans les oignons et les artichauts sont essentiellementproduitsparhydrolysepartiellede l’inuline,ouparbiosynthèseenzymatiqueàpartird’unmélangedesaccharose,glucoseetfructose.

Lesfibrespeuventêtreclasséesselonleurscaractéristiquesdesolubilité87,88.Lesfibres

solublesforment,dansl’eau,dessolutionsdeviscositéplusoumoinsimportante,ouencoredesgels.Ellesregroupentlespectines,certaineshémicelluloses,lagommedeguaroulesond’avoine(β-glucanes).Cescomposéssontainsiexploitéscommeadditifsalimentairespourleurspropriétésémulsifiantesouépaississantes.Ellesserventdesubstratsnutritionnelspourlamicroflorecoliqueetontdoncungrandintérêtdanslestroublesfonctionnelsintestinaux.

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Ellesontégalementun rôlemétabolique indirectnonnégligeablepuisqu’elles limitent, enamont du côlon, la biodisponibilité des glucides et des lipides en les enserrant dans unmagmavisqueux. Les fibres solubles se trouventessentiellementdans la structure internedes fruits et légumes frais. Quant aux fibres insolubles, elles restent en suspension etpeuventabsorberd’importantesquantitésd’eau(3gà25gd’eauparg).C’est lecasdelacellulose, certaineshémicelluloses,etdu sondeblé.Cettedifférencede solubilitépermetd’expliquerenpartielesdifférencesd’effetsphysiologiquesdesfibres.Lesfibresinsolublessont,quantàelles,peudégradéesparlaflorecolique.Ellesrégularisentletransitintestinal,enl'accélérant.Touslesvégétauxcontiennentàlafoisdesfibressolublesetinsolublesmaisdans des proportions très variables. Les fibres insolubles se concentrent surtout dans lesenveloppesdesgrainesdecéréales,deslégumineusesetlapeaudesfruitsetlégumesfrais.

Il est assez difficile de prédire les propriétés laxatives des fibres. Il est toutefois

reconnuquelesfibreslespluslaxativessontengénérallesmoinsfermentescibles:lesondeblépartiellementdégradédans le tubedigestifaugmente levolumefécal.L’ispaghulquiaunefortecapacitéderétentiond’eauaugmente lepoidsd’eauexcrétédans lesselles.Lesfibrespeuventégalementagirsurl'exonérationdessellesenaugmentantleurteneureneauet leurplasticité.Ellesaugmententégalement la fréquenced’exonération. L’augmentationdelafermentationcoliqueentraînelaproductiond’acidesgrasàchaînecourte:l’acétate,lepropionate,et lebutyrate.L’augmentationde laproductiondebutyratepourraitentraînerune augmentation de l’absorption intestinale de l’eau et de certains sels minéraux, uneactionsurlamotricitéintestinaleetlarégulationdelaproliférationcellulaireauniveaudelamuqueuse colique87. De nombreux facteurs comme la fermentescibilité, la solubilité, laviscosité et la capacité de rétention d’eau des fibres influencent leurs propriétés. Leurseffetssontspécifiquesetdépendentàlafoisdeleurstructuremaisaussideleurspropriétésphysico-chimiques.Lesrisquesliésàlaconsommationimportantedefibresrestentmodéréspour le sujet sain. Une consommation brutale et trop élevée de fibres moyennement àhautementfermentescibles,commelesoligosides,peutentraînerdesdouleursabdominalesetdes flatulences.Cequipeutêtrepréjudiciablepourdessujetsayantunesensibilitéà ladistensionintestinale,commechezlespatientsSII.

Depuis environ un siècle, l’industrialisation de l'alimentation des pays occidentaux aprogressivementmodifiélerégimealimentairedesfrançais.Initialementtrèsricheenfibre,ladiminutiondelarationcaloriquejournalière,leraffinagedesfarinesetladiminutiondelaconsommation de pain ont entraîné une baisse de leur consommation. En France, lesapports moyens de fibres sont aujourd’hui compris entre 15 g et 22 g87. Basés sur lesrésultats des études épidémiologiquesmontrant un abaissement des risques relatifs pourune consommationde fibres supérieuresà25g/j, il est recommandéd'en consommeraumoins 25 g par jour et si possible 30 g pour les adultes. Afin d’en augmenter laconsommation par les français, la promotion des fibres est assurée par des messagesrecommandant l’augmentation de la consommation d’aliments sources de glucidescomplexescommelescéréalescomplètesouencoredefruitsetlégumes.Cettestratégiea

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notamment été adoptée au niveau international par l’OMS et national via le PNNS. Unrapportrécentde2016del'ANSESconfirmelesrecommandationscitéesplushaut.

Beaucoup de patients avec SII considèrent que le régime alimentaire est un facteur

important.Plusde60%rapportentuneaggravationdeleurssymptômesaprèslesrepas76.Bienque la recommandationdiététique laplus fréquente faiteauxpatientsatteintsduSIIsoit d'augmenter la consommation de fibres alimentaires, en mettant particulièrementl'accent sur le sonde céréales, il existepeudedonnéesà l'appuide cette approche.Uneenquête basée sur les patients consultant desmédecins spécialistes a révélé que la fibrecéréalièreaggravaitlessymptômesdansenviron55%descasetseulement11%déclaraientun bénéfice64. D'autres formes de fibres, en particulier les variétés solubles, ne sont pasaussi préjudiciables. L'ispaghul (bien qu'il soit un mucilage soluble de gomme) estrelativementmalfermenté,cequi luiconfèredesavantagesuniques.Cesrésultatsontétédémontrésdanslesessaiscontrôlésrandomisés.Ilestégalementintéressantdenoterquelamajoritédesessais thérapeutiquesexaminant l'effetde la fibredans leSIIn'apasmontrébeaucoupd'avantagesetasouffertdufaitqu'ilsn'étaientpasconçuspourdétecteruneffetnégatif.Uneétudesystématiquerécentede17essaiscliniquesapermisdeconclurequelesavantages de la fibre dans le SII étaientmarginaux et que les fibres insolubles pouvaientaggraver la maladie89. Il est important de souligner qu'aucune de ces études n'a étéentreprisedanslessoinsprimaires,oùlaréponseàl'altérationdelaprisedefibrespeutêtreplus encourageante. Il est donc intéressant d'essayer une période d'exclusion de la fibrecéréalière,surtoutchezlespatientsdontlaconsommationestexcessive.Cependant,sil'onpensequelasupplémentationenfibresestnécessaireetquecelanepeutpasêtreréalisépar l'alimentation seule, alors les variétés solubles (ispaghul, sterculia ouméthylcellulose)sontprobablementlemeilleurchoix.

Laplusgrandeétudemenéeàcejourainclus275patientsdont53à58%deC-SIIet19

à 29%deD-SII. Trois bras ont été établis, répartissant au hasard les participants. Dans lepremier, 10g de fibres solubles d’ispaghul ont été apportées. Dans le deuxième, 10g defibres insolubles de son de blé. Et enfin dans le troisième 10g d’un placebo. Le toutadministré une fois par jour pendant 12 semaines67. Au cours du premier mois, uneproportionsignificativementplusélevéedepatientsrecevantdel'ispaghul,maispasduson,a signalé un soulagement adéquat des symptômes pendant au moins 2 semainescomparativementauplacebo (57%contre35%d'ispaghulversusplacebo).Lesondebléaétéplusefficaceque leplacebopendant le troisièmemoisde traitement seulement (57%contre32%).Après3moisdetraitement,lagravitédessymptômesdanslegroupeispaghulaétéréduitede90pointscomparativementà49pointsdanslegroupeplacebo(P=0,03)et58pointsdanslegroupeduson(P=0,61parrapportauplacebo).Aucunedifférencen'aététrouvéeencequi concerne laqualitédevie. Lesabandonsontétésplusmarquésdans legroupeson,leplussouventenraisond'uneexacerbationduSII.L’analysede20essaisd’unequalitéméthodologiqueacceptablerévèlequ’unbénéficeaumaximummarginalpeutêtreattendudececonseildiététiqueetquelebénéficethérapeutiquenepeutêtreespéréquedans le sous-groupe SII-C76. Un travail anglais a également montré l’inefficacité

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symptomatique d’un régime enrichi quotidiennement par 10 à 20g de son pendant 12semaines chez des malades C-SII76. De nombreux articles traitant de l'utilisation d'unenrichissementenfibresdanslerégimealimentairedespatientsatteintsdeSIImontrentunbénéficemarginaldanslapriseenchargedutransit,deladouleuroudelaqualitédeviedespatients85,89,90.L'apportd'alimentsrichesenfibresinsolublescommelesondeblécontenudanslesfarinescomplètespeutavoirunintérêtdansl'améliorationd'uneconstipationchezun C-SII. Cependant, elle peut être délétère car cela va potentiellement augmenter lesdouleurs dues à l'augmentation du péristaltisme ou du volume de gaz libérés par lafermentationcolique.Cetteaugmentationdel'apportdefibresinsolublechezleC-SIIdoitsefairedemanièretrèsprogressives'ilyauneaméliorationdessymptômesliésautransit.Ence qui concerne l'apport en fibres solubles comme celles contenues dans les fruits etlégumesoudanslesmucilagescommel'ispaghul,celles-ciontunintérêtdansl'améliorationdutransit,quecesoitchezlespatientsC-SIIouD-SII.Ellesontégalementl’avantagedeneprovoquerquetrèspeud’effetsindésirables.

Comme dit précédemment, des intolérances alimentaires, réelles ou supposées,

peuventêtreretrouvéeschezdenombreuxpatientsSII.Celles-civontamenerlespatientsàchangerleurmoded'alimentation.Etantdonnélesétudesdémontrantquel'intoléranceauglutenouaulactosechezcespatientsétaitleplussouventsubjectiveetnonprouvéeparunprotocole de diagnostic scientifique, les chercheurs ont tenté de trouver les alimentsresponsables de l’aggravationdes symptômesdu SII dans nos sociétés occidentales. Et cesont leschercheursaustraliensquiont tentédedéterminer lesnutrimentspouvantêtreàl'origine de troubles digestifs liés à la prise alimentaire. Une nutritionniste australienneappelée Sue Shepherd, atteinte de la maladie cœliaque, a travaillé sur le concept deFODMAPs et notamment sur le lien entre FODMAPs et troubles fonctionnels intestinaux,dontleSII.L'acronyme"FODMAP"(FermentableOligo-,Di-,Mono-saccharidesAndPolyols)soit les oligo-, di- et monosaccharides et les polyols fermentescibles, a été inventé pourdécrireungroupe,autrefoissansrapportlesunsaveclesautres,deglucidesàchaînecourteetd'alcoolsdesucre(polyols).Ilscomprennentlefructose,lelactose,lesfructo-etgalacto-oligosaccharides (fructanes,galactanes),etdespolyols (telsque lesorbitol, lemannitol, lexylitoletlemaltitol),touslestroispossédanttroispropriétésfonctionnellescommunes:

- Une faible absorption dans l'intestin grêle : l'absorption médiocre se produit enraisondemécanismesdetransport lentsetdefaiblecapacitéàtravers l'épithélium(fructose), d'une diminution de l'activité des hydrolases de la bordure de brosse(lactose), du manque d'hydrolases (fructanes, galactanes) ou de molécules tropgrandespourladiffusionsimple(polyols).

- Une petite taille et une activité osmotique : cet effet a été démontré avec unFODMAPsynthétique(lactulose)exerçantuneffet laxatif lorsqu’ilestadministréendose suffisante. Cela a entrainé l’augmentation de la teneur en eau du contenuluminaletamodifiéultérieurementlamotilitéintestinale.

- Une rapidité àêtre fermentéspar lesbactéries : elleestdictéepar la longueurdechaîneduglucide:lesoligosaccharidesetlessucressonttrèsrapidementfermentésparrapportauxpolysaccharidestelsquelesfibresalimentairessolubles.

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Tableau691,92:CatégoriesetprincipalessourcesalimentairesdesFODMAPs

TypedeFODMAP Sourcesalimentaireslesplusriches

Oligosaccharides Fructo-oligosaccharides(FOS)(fructanes)

Blé,seigle,oignon,ail,artichauts,chouxdebruxelles,betteraves,brocolis

Galacto-oligosaccharides(GOS)

Légumineuses(lentilles,poischiches,haricotsrougesetblancs)

Disaccharides Lactose Lait,produitslaitiers

Monosaccharides Glucose,Fructose Miel,pommes,poires,melons,pastèques,mangues,sodas,fruitsausirop

Polyols Sorbitol Pommes,poires,fruitsànoyau,menthesetgommessanssucre

Mannitol Champignons,chou-fleur,menthesetgommesanssucre

Denombreuxarticlesont fait suiteaux travauxdeSueShepherd. Ilexistedésormais

despreuvesconsidérablesque lesFODMAPscontribuentaux symptômesabdominauxdesTFI.Destestsaigusdeprovocationavecdulactose,desfructo-oligosaccharides(FOS)oudusorbitolprovoquentdessymptômesabdominauxtelsquedesballonnements,desdouleurs,desnauséesetdestroublesdel'intestin(diarrhéeet/ouconstipation)chezdenombreusespersonnes91.Lerôledulactoseetdespolyolsdansl'inductiondessymptômesintestinauxaétébiendécritdanslapratiqueclinique.Lerégimealimentairepourlapriseenchargedelamalabsorptiondulactoseaétéabordédemanièreexhaustiveet lamentionobligatoirede"consommation excessive peut avoir un effet laxatif" a étémise enplace sur les produitsalimentairescontenantdespolyols, telsque lesorbitol.La flatulenceet lamodificationdutransit intestinal après avoir consommé des légumes les plus souvent en cause dans lesmétéorismes, comme les lentilles et les haricots cuits, sont bien connues, bien quel'implicationdesgalactanes,enplusdel'amidonrésistantcontenusdansceslégumineuses,peuventnepas jouerunrôle.Leseffetsadditifsdufructose,dusorbitol,du lactoseetdesfructanessurlessymptômesabdominauxsontégalementbiendécrits91.

Il existe deux composantes clés dans le concept FODMAP, qu'il est importantd'appréhender91. Premièrement, l'approche diététique limitant la prise de FODMAPs, lesrestreignent dans leur ensemble, pas individuellement. La restriction individuelle deFODMAPs a été utilisée avec un succès variable dans la gestion des troubles fonctionnelsintestinaux pendant une longue période. Lemeilleur exemple est la restriction du lactosealimentaire chez lespatients souffrantd'intoléranceau lactose. La restrictiondu fructose,avecousanssorbitol,aégalementétérapportée.Cependant,detellesapprochesn'ontpasété répandues dans leur application, peut-être en partie liées à leur succès limité. Larestriction isolée d'un FODMAP seul ignore la probabilité qu'il existe potentiellement unegammedeFODMAPsdans l'alimentation,quiont tousdeseffets similairesdans l'intestin.L'innovation dans le concept FODMAPest que la restriction globale devrait avoir un effet

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beaucoupplusgrandetpluscohérentquedes restrictions limitées.Ainsi, l'objectif centralestderéduirel'apportdetouslessucresàchaînecourtefaiblementabsorbéspourêtreplusefficacedanslaréductiondeladistensionluminaleplutôtquedeseconcentrersimplementsur l'un d'entre eux. Une telle approche globale pour restreindre les glucides ayant desactions similaires (effet osmotique élevé et fermentation rapide) devrait optimiser lecontrôledessymptômeschezlespatientsatteintsdeSII.Secondairement,lesFODMAPsnecausentpasleTFIsous-jacent,maisreprésententuneoccasionderéduirelessymptômes.Ceconceptestimportantcarilévitelesconceptsplustraditionnelsdel'"intolérance"aulactosepar rapport à la "malabsorption" ou à l'"intolérance" au fructose par rapport à la"malabsorption".Laraisonpour laquelle lessymptômessontdéclenchéspar l'ingestiondelactose ou de fructose chez l'individu est la réponse du système nerveux entérique à ladistension luminale. Celle-ci est imputable à l'hypersensibilité viscérale, à la productionexcessivedegazdueàlanaturedumicrobioterésidentouauxproblèmesdemobilitéavecélimination du fluide/gaz. Les symptômes douloureux ne sont donc pas dus à unemalabsorptiondessucresquiseraitanormaleoupathologique.Aprèstout,l'administrationdeFODMAPsaupetitintestindistaletaugrosintestinproximalestunphénomènenormalqui générera des symptômes si la réponse intestinale sous-jacente est exagérée ouanormale.

Bien que tous les FODMAPs soient potentiellement importants dans la genèse dessymptômes,lacontributionrelativedesdifférentssous-groupesdeFODMAPsvarieselonlesgroupes ethniques et alimentaires en raison de la dose administrée dans le régimealimentaire. Dans les régimes nord-américains et d'Europe occidentale, le fructose et lesfructanessontdeloinlesplusrépandusdansl'alimentationet lespatientsatteintsdeSIIysont donc exposés via leur alimentation quotidienne. En outre, le fructose joue un rôleimportantcarsonabsorptiondans l'intestingrêlevariebeaucoup.Son importancedans lerégimealimentaireseraparconséquenttrèsvariableselonlespersonnescarilestsouventaccompagnédanslanourritureparlesorbitol.Unecompréhensiondudevenirdufructoseetdes fructanes dans l'organisme est donc essentielle à la mise enœuvre appropriée d'unrégimealimentaire.Lefructoseestprésentdanslesfruits,lemieletlesiropdemaïsàhauteteneurenfructose.Ilestprésentéàlalumièreintestinalesousformed'hexoselibredanslesalimentsouaprèsl'hydrolysedusaccharose.Ilestabsorbéàtraversl'épithéliumdel'intestingrêle via deuxmécanismes. Tout d'abord, le fructose libre est repris par un transporteurfacultatif de faible capacité, GLUT-5, présent dans tout l'intestin grêle. Deuxièmement,lorsqu'il est en présence de glucose, le fructose est absorbé plus efficacement. Cephénomène est peut être lié à l’insertion de GLUT-2 dans la membrane apicale del'entérocyte.Ainsi,lamalabsorptiondufructosesemanifestelorsquelefructoselibre(c'est-à-dire en excès par rapport au glucose) se trouve dans la lumière. C'est la raison pourlaquelle lefructoseapportésousformedesaccharosen'estmalabsorbéquesi l'activitédesucrase est diminuée91. La capacité d'absorber le fructose libre varie grandement d'unindividu à l'autre. Si son absorption est efficace chez un individu, alors la restrictionalimentairedesalimentsrichesenfructoselibredevraitêtreinutile.Ilestdoncsouhaitabled'identifier ceux qui absorbent complètement une charge de fructose. Ceci est

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effectivement réalisépardes testsd'hydrogèneà l'haleine,où l'ondétermine le tauxd'H2dans l'air expiré après ingestion d'une certaine quantité de fructose (ou d'autres sucreséventuellement).CetH2provenantessentiellementde la fermentationcolique,estensuiteévacuéengrandepartiedanslespoumonsvialacirculationsanguine.

Lesfructanessontdespolymèresdefructoselinéairesouramifiés.Cesontlesglucidesnaturelsdestockaged'unevariétédelégumes,incluantlesoignons,l'ailetlesartichauts,lesfruitstelsquelesbananesetlescéréales.Lebléestunesourcemajeuredefructanesdansl'alimentation. Il contient 1 à 4%de fructanes sur lamatière solide91.D'autres sourcesdefructanessontl'inuline(principalemententantquefructaneàchaînelongue)etlesFOS,deplusenplusajoutésauxalimentspour leurseffetsprébiotiques.Parceque l'intestingrêlemanqued'hydrolasescapablesderomprelesliaisonsfructose-fructose,etquelesfructanesnepeuventpasêtretransportésàtraversl'épithélium,ilsnesontpasabsorbésdutout.Unexamenformeldecetteétudeaconfirméque34à90%desfructanes ingérésnesontpasabsorbés91.Desrendementsplus faibles,enparticulierdes fructanesàchaînecourte,sontprobablementdusàladégradationmicrobienneparlamicroflorecolonisantl'intestingrêledistal.

Les légumineuses,ycompris les lentilles, lespoischicheset lesharicots rouges,sont

dessourcesalimentairesimportantesdegalactanes.Lesvégétarienseningèrentsouventdegrandes quantités en raison de leur consommation accrue de légumineuses. Ils sontcourammentutiliséscommeunesourceimportantedeprotéinesdanslerégimevégétarien,en particulier ceux suivant les régimes végétaliens purs. Le dahls (plat indien à base delentilles),lescurrys,lessoupesdusous-continentindienmaiségalementlechiliconcarneetlesharicots fritsduMexiquessontdesalimentsapportanténormémentdegalactanesauxpersonnes qui en consomment. Les polyols sont relativement sous-explorés commeFODMAP,mais ilssont largementrépandusdanslesaliments. Ilsn'ontpasdesystèmesdetransport actifs associés dans l'intestin grêle et sont probablement absorbés par diffusionpassive. Le taux d'absorption est lié à trois facteurs. Tout d'abord, la diffusion se fait par«pores»dansl'épithéliumetdépenddoncdelataillemoléculaire.Deuxièmement, ilexisteunevariationde la tailledespores le longde l'intestingrêle, lesplusgrandssesituantenamont. La rapidité du transit à travers le jéjunum influenceradonc le degréd'absorption.Enfin,latailledesporesestaffectéeparcertainesmaladiesdesmuqueuses.Parexemple,latailledesporesdiminuedanslamaladiecœliaqueoùl'érythritolestmalabsorbé.Lespolyolssontprésentsdanslesaliments(ex: lesorbitolsetrouvesouventdansdesalimentsrichesen fructose libre, le mannitol se trouve dans les champignons) et sont utilisés commeédulcorants artificiels, identifiés par les numéros additifs suivants sur les emballagesalimentaires : sorbitol (E420), xylitol (E967), mannitol (E421), maltitol (E965), et isomalt(E953).

L'efficacitédelarestrictiondufructosealimentaireet/oudusorbitolaétérapportéedans plusieurs études observationnelles. Les bienfaits semblaient être durables91,93.Cependant, la nature des régimes utilisés est généralement mal définie. En utilisant une

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alimentationbiendéfinie,larestrictiondufructoseetdesfructanes,conjuguéeàl'évitementgénérald'autresFODMAPs,aconduitdansuneétuderétrospectiveàuneréponseglobaleaux symptômes impressionnante chez trois patients sur quatre atteints de SII et demalabsorption du fructose. L'efficacité était durable et étroitement liée à l'observancealimentaire.Lefaitquel'efficacitédurégimepauvreenFODMAPssoitdueàlarestrictiondufructose et/ou des fructanes dans le régime alimentaire a été démontrée de manièreconvaincante dans un essai randomisé en double aveugle quadruple-bras contrôlé versusplacebo. Dans l’essai d’Halmos et al.94, un régime appauvri en FODMAPs amélioraitdavantagelessymptômesdigestifs,notammentlasévéritédesdouleursabdominalesetdesballonnements, des patients souffrant d’un SII, qu’un régime australien standard. Le gainsymptomatiquedurégimeappauvrienFODMAPsétaituneréductiond’environ50%de lasévérité des symptômes, notamment les ballonnements. Il est important de noter quel'efficacité ne se limite pas aux patients atteints de SII prédominant par la diarrhée,maisqu'elles'appliqueégalementàtouttypedetransits intestinaux.Ainsi, l'efficacitébaséesurlespreuvesdurégimepauvreenFODMAPsestmaintenantconcrète.

Revenonsun instant sur lespatientsdéclarantune"intolérance"auglutenmaisnondiagnostiquésmaladiecœliaque.Cespatientshypersensiblesauglutenvoientréapparaîtreleurssymptômesdigestifsàlaréintroductiondugluten86.Pourcertainspatients,cependant,letestdediagnosticdelamaladiecœliaqueestnégatifetleursymptomatologiepourraitenfaitêtreliéeauxfructanesprésentsdanslesmêmescéréalesquecellescontenantleglutenetnotamment leblé.Unessai récentamontréqu’aprèsuneaméliorationsymptomatiqueinitialefrancheobtenueparunrégimeappauvrienFODMAPs,l’introductionde2gou16gde gluten n’aggravait pas plus l’inconfort digestif qu’un placebo, infirmant le rôle nocifpotentieldugluten.L’interprétationdesrésultatsdecetessaiestcependantrenduedélicatepar l’importance de l’effet nocebo (semble nuisible selon les patients même s'ils sontobjectivementinoffensifs)observédanslesdiversgroupes,notammentavecleplacebo94.

Evidemment, le régime pauvre en FODMAPs a des limites, comme tous les régimesalimentairespromettantuneaméliorationdessymptômesd'unepathologie intestinale.Cerégimen'estpasunepanacéepourlespatientsatteintsdeTFI.Ilfournitunbonsoulagementdes symptômes chezenviron75%despatients,mais apeud'avantagesdans certains. Lesétudes n'ont pas encore identifié les facteurs prédictifs du bénéfice en dehors del'observancealimentaire.Lessymptômesintermittents,bienquetolérables,demeurentchezbeaucoupdepatients,carleTFIsous-jacentn'estpasdirectementtraitéparlerégime.Lespatientsnedevraientpass'attendreàune«guérison».UnehyperréactivitésymptomatiqueàlaréintroductiondeFODMAPsdansl'alimentationaétédécritedemanièreanecdotique,bienquecetaspectn'aitpasétéformellementétudié91.Lemécanismeimpliquén'apasnonplus été évalué. Cependant, chez les rats nourris via des régimes pauvres en fructose,l'expressiondeGLUT-5diminue,toutcommelacapacitéd'absorberlefructosedel'intestingrêle. Que cela se produise chez les humains justifie une enquête plus approfondie. Uneautreétudeadémontréquel'efficacitéd'unrégimepauvreenFODMAPsn'apportepasplusdebénéficesqu'unrégimealimentaireéquilibréquel'onpourraitconseilleràunpatientSII

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(supplémentation légère en fibres, pauvres en aliments fermentescibles et pauvres engraisseseten sucres rapides)95.Cette restrictionaégalementuneffetnégatif se justifiantpar une diminution des composants alimentaires a effets prébiotiques. Cela pourraitpotentiellementnuireàlasantéducôlon,bienqu'aucuneétuden'aitabordécettequestionà ce jour. D'autres travaux ont rapporté que le passage de la nourriture typiquementaustralienneàunrégimepauvreenFODMAPsachangélemicrobioteintestinal85.Ainsi,unrégime pauvre en FODMAPs chez des sujets sains et chez des patients SII a réduitl'abondance bactérienne totale, tandis qu'un régime australien typique a augmentél'abondance relative de Clostridiun cluster XIVa produisant du butyrate et AkkermansiamuciniphiaassociéeaumucusetréduitlaquantitédeRuminococcustorques.Larestrictiondes produits à base de blé peut conduire à une réduction de la consommation de fibres,mais une partie du conseil alimentaire est d'assurer une consommation adéquate etcontinued'amidonrésistantetdepolysaccharidesnonamylacés.Celadoitêtreabordélorsd'uneconsultationdiététique.Bienquecessuggestionsnesoientpastoutesétayées,ellesrappellent que cette intervention diététique est établie pour ceux qui ont des troublesfonctionnelsdel'intestin,telsqueleSII.Iln'estpasunrégimepourlespersonnesenbonnesantéparailleurs.

LerégimeconsistedoncàélimineraumaximumlesFODMAPspendant3à4semaines,de juger l’effet symptomatique de cette réduction puis d’essayer de les réintroduireprogressivement pour déterminer la dose tolérable par le patient. Le régime strict, trèsrestrictif, est souvent difficile à suivre. Les études prospectives ont révélé que si 75%desmalades adhéraient au régime, seulement 12,2% le suivaient en permanence92. Lacompliance étant un élément clé du succès éventuel d’un tel régime, l’aide d’undiététicien/nutritionniste peut être utile. Il paraît donc indispensable que les patientssouhaitantrecouriràcetypederégimesoientaccompagnésparunprofessionneldesanté,dans l'idéal diététicien/nutritionniste,mais aussi unmédecin ou pharmacien, afin d'éviterdesproblèmespotentielsdecarenceétantdonnélepotentielrestrictifdecetypederégime.

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Tableau786:Sourcesd'alimentscontenantdesFODMAPsetalternativesn'encontenantpasoupeu.

Groupesd'aliments SourcesprincipalesdeFODMAPs

Alternatives

Fruits Pomme,abricot,cerise,mûre,mangue,nectarine,pêche,poire,kaki,prune,pastèque

Banane,myrtille,melon,pamplemousse,raisin,citron,mandarine,orange,fruitdelapassion,fraise,framboise,rhubarbe

Légumes Artichaut,asperge,chou-fleur,choudeBruxelles,brocoli,poireau,ail,champignon,oignon,échalote,pois

Carotte,poivron,ciboulette,concombre,aubergine,gingembre,haricotvert,laitue,olive,pommedeterre,épinard,tomate,courgette

Sourcesdeprotéines Légumineuse,pistache,noixdecajou

Viandes,poissons,œufs,noixdemacadamia,arachide,noix,pignon,tofu

Céréales Blé,seigle,orge Sarrasin,maïs,avoine,polenta,quinoa,riz

Produitslaitiers Laitconcentréoulyophilisé,fromageblanc,ricotta,crèmeanglaise,crèmeglacé,lait,yaourt

Beurre,produitslaitierssanslactose,autresfromages

Autres Miel,sorbitol,mannitol,siropdemaïsricheenfructose,fructose

Mélasseetdérivés,siropd’érable,saccharose,glucose

D'autres travaux scientifiques récents ont tenté de comprendre l'intérêt de certains

nutrimentsnécessairesàlabonnesantéintestinalesurlesélémentsdephysiopathologieduSII, notamment ceux concernant laperméabilité intestinale. Les travauxdeZhouet al96–98ont notamment rapporté que la régulation positive dumicroARN29A dans lamuqueusecoliquedespatientssouffrantdeD-SIIestresponsablede laréductiondeclaudine-1etdufacteurréprimant leNFkBmenantàuneaugmentationde laperméabilité intestinale.CesdonnéesontétéconfirméeschezdessourisneprésentantpaslemicroARN29A.Zhouetalconfirment également des études antérieures montrant une augmentation de laperméabilité du côlon et de l'intestin grêle chez les patients atteints de D-SII, avec uneexpressionréduitedesprotéinesdejonctionserrées,enparticulierl'occludineetlaclaudine1. Dans un article précédent, ces auteurs ont montré que le micro ARN 29A cible l'ARNmessager de la glutamine synthétase conduisant à une diminution de l'expression de laglutamine synthétase dans la muqueuse de l'intestin grêle et du côlon chez les patientsatteintsdeD-SII.Zhouetalontalorsspéculéque la réductionde laglutamine synthétasepeut affecter l'expression de la claudine-1, mais les mécanismes sous-jacents demeurentinconnus.Eneffet, lateneurenglutaminedanslamuqueusedespatientsD-SIIn'apasétéévaluée jusqu'à présent. La glutamine est un combustible majeur pour les cellules

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intestinales et le rapport entre la teneur en glutamine desmuqueuses et la perméabilitéintestinalechezlespatientsatteintsduD-SIInécessitedavantaged'investigations.Plusieursétudes rapportentque la teneurenglutamine régule laperméabilité intestinale,enpartiepar lamodification des protéines de jonction serrées. En effet, la privation de glutaminedanslescellulesépithélialesintestinales,associéeàunepertedel'expressiondel'occludine,delaclaudine-1etdeZO-1,conduitàuneperméabilitéparacellulairealtérée.Enrevanche,la supplémentationenglutamine restaure lesprotéinesde jonctionétancheet labarrièreintestinale dans de nombreux modèles expérimentaux in vivo. Zhou et al ont égalementrapportéd'autresciblesdumicroARN29Atellesquel'ubiquitineC.

Nousavonsdécritprécédemmentuneexpressiond'occludinealtéréechezlespatients

SIIenraisond'uneaugmentationdesadégradationparlesystèmeubiquitine-protéasome.Celui-ciestégalementimpliquédanslavoieNF-kBpardégradationd'IkB.Laglutaminepeutcibler cesdeux voies via une activationplus faibledeNFkB viauneubiquitination réduited'IkB. Toutes ces données suggèrent que la supplémentation en glutamine peut êtrebénéfiquechez lespatientsD-SIIpour réduire l'hyperperméabilité intestinale,etpeut-êtrel'hypersensibilitéviscérale.Cependant,lameilleureméthodededistributiondelaglutamineresteàdéterminer, carparvoieorale,elleest rapidementabsorbéepar l'intestingrêleetn'atteint pas le côlon. Cette question a déjà été soulignée dans les maladies intestinaleschroniques inflammatoires. Une faible teneur en glutamine a été observée dans lamuqueuse intestinale et colique chez ces patients atteints deMICIs.Malgré des donnéesprometteuses dans des modèles expérimentaux de colite, les études cliniques nedémontrent aucun effet bénéfique de la supplémentation en glutamine dans les MICIs.Alors,ya-t-ilvraimentuneplacepourlasupplémentationenglutaminechezlespatientsD-SII?D'autresétudesonttentéderépondreàcettequestion.

DansunétudeinvitrodeBertrandetal.99,lesrésultatssuggèrentquelaglutamineest

capablederestaurerlesprotéinesdesjonctionsserrées,laclaudine-1etl'occludine,danslamuqueusecoliquedespatientsprésentantunD-SIImontrantunefaibleexpressionbasaledeces protéines. Ainsi, une perméabilité intestinale altérée a été rapportée dans plusieursétudesaucoursduSIIavecdiarrhéeprédominante.Enoutre, il aété récemmentobservéquelesprotéinesdesjonctionsserréesétaientprincipalementaffectéesdanslamuqueusecoliquedespatientsatteintsdeD-SIIcomparativementàd'autressous-typesdeSII,avecunediminutionde leur expressionetune localisation cellulaire altérée.De façon intéressante,Martinez et al.100 ont également montré une perturbation des jonctions serrées dans lamuqueusede l'intestingrêlechez lespatientsatteintsdeD-SII.Lerôlephysiopathologiquede l'augmentation de la perméabilité intestinale reste controversé, mais des corrélationsentre la perméabilité intestinale et l'hypersensibilité viscérale ou entre l'expression de laprotéinedesjonctionsserréesetl'hypersensibilitéviscéraleontétérapportées.

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Danslaprésenteétudepilote,Bertrandetal.ontdémontréquedesdosesélevéesdeglutamine appliquée sur lamuqueuse colique des patients atteints deD-SII augmentaientl'expressionde la claudine-1.Enutilisantunevoie rectaleouuneadministrationcibléedeglutamine,desconcentrationsélevéesdeglutaminepeuventêtrefacilementatteintesdansla lumière colique. Même si les acides aminés luminaux ne sont pas considérés commecapablesd'entrerdanslesentérocytes,lesdonnéesantérieuresontrapportéuneréductiondelaréponseinflammatoirecoliqueaprèsunapportrectaldeglutaminechezlesanimauxetchez l'homme.Plus intéressant, ilsontobservéque leseffetsde laglutaminedépendaientde l'expression basale de la claudine-1, ce qui suggère que plus l'expression basale de laclaudine-1 est basse, plus les effets de la glutamine sont importants. Une corrélationsimilaireaétéobservéepourl'occludine.Dansleslignéescellulairesépithélialesintestinales,la glutamine a également restauré l'expression de la protéine des jonctions serrées aprèsprivation de glutamine. Malheureusement, ils n'ont pas été en mesure de détecterl'expressiondeglutaminesynthétasedanstousleséchantillonsdepatientsatteintsdeD-SIIdans leur étude. Ainsi, ils ne peuvent pas fournir de données sur la corrélation entrel'expressiondesprotéinesdesjonctionsserréeset l'expressiondelaglutaminesynthétase.Cependant,leurétudesuggèrequecertainspatientsprésentantunD-SIIaffichentunefaibleexpressiondeprotéinesdes jonctions serréesnepermettantpas à la glutamined’exercerseseffetsbénéfiques.D'autresétudesdevraientévaluerdansuneplusgrandepopulationdepatients, la relation entre la teneur en glutamine de la muqueuse et la perméabilitéintestinale. Mais aussi les effets de la supplémentation de glutamine sur la perméabilitéintestinale in vivo. Enfin, à ce jour, il n'existe aucune étude démontrant l'efficacité d'unesupplémentationenglutamineparvoieoralesurlessymptômesdespatientsatteintsdeD-SIIcommeladiarrhéeoulesdouleursabdominales.

Enfin, lacurcuminecontenuedanslecurcumaprésentedespropriétésremarquablesdans l'inflammation et le stress oxydatif et c'est un puissant immunomodulateur101. Lacurcumineaégalementétédémontréecommeétantefficacedans lacoliteexpérimentaleainsi que dans l'inflammation du côlon chez les sourismultirésistantes présentant un SII.Ainsi,ellepourraitêtreunboncandidatpouraméliorer leSII,maiselleprésentecertaineslimites théoriques.Eneffet, comme laplupartdesantioxydants, la curcuminedevraitêtreutilisée à des doses modérées car à des doses élevées, elle peut provoquer un stressoxydatif.Deplus,lacurcumineestrapidementéliminéeetconjuguée,cequipeutlimitersonefficacité thérapeutiqueen tantqu'agentunique.Bienque lesmécanismesd'actionprécisdes deux composés, curcumine et glutamine (en particulier la glutamine) ne soient pasencoreélucidés,uneassociationentre laglutamineet la curcumine serait intéressanteenraison de leurs propriétés complémentaires, qui correspondent bien aux perturbationspathologiques caractérisant les lésions des cellules épithéliales intestinales. Testerl'associationentrelesdeuxcomposésseraitcliniquementintéressant.

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b) Thérapiesalternatives

Lerôledesfacteurspsychologiquesdansl'apparitionetlaprogressiondusyndromedel'intestin irritable est complexe et reste controversé. Il va desmodulations subtiles de lafonction du système nerveux entérique et du comportement inadapté, à la comorbiditédéclaréecommel'anxiété,ladépressionouletroubledelasomatisation.Sanssurprise,uneséried'approchespsychologiquesde lagestionduSIIaétéélaboréeet,enraisondedéfisimportants en termes de conception des études, de sélection des patients etd'interprétationdesrésultats,unecertaineincertitudedemeurequantaurôledesthérapiespsychologiques dans la gestion de lamaladie. La plupart des patients atteints de SII sontgérésdanslessoinsprimaires,oùlepilierdutraitementestl'explicationetlaréassuranceentermescompréhensiblespourlepatient,letoutcoupléàdesconseilsaviséssurlemodedevie,ycompris l'alimentationet lesdifférentessourcesdestresset,sipossible,uncontrôledessymptômes.Uneapprochepsychologiquedanslapriseenchargedevraitêtreintégréedèslapremièreconsultation.Ilestessentield'obtenirlesraisonsdeconsultationdupatientet ses opinions sur les causes de leurs symptômes. Les craintes de cancer ou d'autresmaladiesgravessontfréquentesetsontdesraisonsimportantespourdemanderl'aided'unmédecin.Lespatientsquiattribuentleurssymptômesàunemaladiephysiqueplutôtqu'austress sont plus susceptibles d'être référés des soins primaires à secondaires et consulterleurmédecingénéralisteplussouvent.Danslessoinssecondaires,lepatientquicraintunemaladiegraveestplus susceptibled'être rassurési lemédecinacorrectementdéterminé,lors de la première entrevue, si les symptômes sont attribués au stress ou àunemaladiephysique.Ilestintéressantdeconstaterquelescraintesmarquéesd'unemaladiegravenesemblentpas apaiséespardenombreusesenquêtesou consultations, alorsque le fait devoirlemêmemédecinàdifférentesconsultationssembleimportant.

Une consultation gastro-entérologique standardisée de 30 minutes, incluant undiagnostic positif, une éducation du patient à l'aide d'un dépliant et une réassuranceexplicite quant à l'absence de maladie grave, peut être suivie d'un nombre réduit deconsultations pour des symptômes gastro-intestinaux etmoins de douleurs par la suite64.Une telle prise en charge ne semble cependant pas être suivie d'une amélioration de laqualité de vie liée à la santé ou d'une réduction de l'anxiété au sujet de nombreuxsymptômes corporels. Ceci est important, parceque lorsque l'anxiété, la dépressionou letrouble de somatisation sont présents, les patients ne sont pas rassurés par desinvestigationsnormales.Ilsconsultentplusfréquemmentetontunequalitédeviealtérée.IlestimportantquelacomorbiditépsychologiquesoitdétectéeettraitéeefficacementdansleSII.

Deuxrevuessystématiques récentes traitantdu traitementpsychologiquedans leSIIfournissentun résuméutiledesétudes lespluspertinentes102,103. L'uneestprudentedanssonappuipour les traitementspsychologiques,en soulignant lesprincipauxproblèmesdeconception avec de nombreux essais. Huit études ont été identifiées comme ayant unequalitéméthodologiqueacceptabledanslesdeuxrevues,etquatred'entreellesontmontré

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unbénéficenetpour lespatientsen termesdesymptômesduSII.Ellescomprenaientdesétudes sur la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), la psychothérapie et la thérapiecomportementalemulticomposée.Ladeuxièmerevue,adoptantuneméthodologiesoignéeet novatrice pour sélectionner et analyser les études, a révélé que les traitementspsychologiquesétaientsignificativementsupérieursauxcontrôlesentermesd'améliorationdeladouleurabdominale,dudysfonctionnementintestinal,deladépressionetdel'anxiété.Les méta-analyses n'étaient pas entièrement satisfaisantes. Cet examen a conclu qu'ilexistait des preuves générales de l'efficacité des traitements psychologiques, avec peu dechoixentre lesdifférentes formes.Troisessaisplusvastesutilisantuneméthodologieplusrigoureuseontparlasuiteétépubliés,ajoutantunsoutiensupplémentairepourl'efficacitéde la TCC et de la psychothérapie, seule ou en association avec un traitementantidépresseur64.L'interprétationdecesessaisest renduedifficilepar le faitqu'ilsontétéconduitsdansdifférentscontextes,ycomprislapopulationgénérale,lessoinsprimaires,lescliniques de gastroentérologie et les patients souffrant de SII chronique ou résistant autraitement.IlestprobablequelespatientsrecrutésaprèsunéchecdutraitementdecourteduréedanslessoinsprimairesontunSIImoinsgravequeceuxrecrutésdansdescliniquesde gastroentérologie qui n'ont pas répondu aux traitements habituels.Malgré cela, il estprouvé que le traitement psychologique des différents types de troubles somatiques (ycomprisleSII)estplusefficacelorsqu'ilssontadministrésauxpatientsdansleshôpitauxoucliniques spécialisésquedans lesétablissements communautaires comme lesdispensairesoulescabinetsdeville.

L'anxiétéet ladépression sont fréquentesdans leSII, et lespatients rapportentunerelationétroiteentrelestress,leurssoucisetleurssymptômesintestinaux,fournissantunejustification pragmatique pour la thérapie psychologique. Il existe différentes formes dethérapiestravaillantsurl'aspectpsychologiquedelapathologie:

- Les exercices de relaxation : cela est utile lorsque le stress provoque uneexacerbation des symptômes. Il peut être soulagé par la relaxation musculaireprogressive,lebiofeedbacketlesméditationstranscendantalesoudeyoga,bienqu'ilsoitdifficilededéterminerdansquellemesurelebénéficeestlerésultatdufacteurnonspécifiqued'uneattentionaccrued'unthérapeute.

- Les techniques cognitivo-comportementales (TCC) : les TCC sont aussi basées surl'hypothèse que les symptômes du SII sont une réponse à des événements de viestressants ou des tracas quotidiens, produisant un comportement inadapté et desattributions inappropriées des symptômes. Le traitement consiste à identifier lesdéclencheursdel'exacerbationdessymptômes,àcomprendrelaréponsedupatientaux symptômes et à enseigner sur les façons les plus adaptées de répondre. Lapreuvede l'efficacitéde laTCCrestecontroversée.L'étude laplusrécenteensoinsprimaires (dans laquelle la TCC a été associée à la mébéverine) démontre uneamélioration des symptômes jusqu'à trois mois et un ajustement social etprofessionnel amélioré jusqu'à un an64. Une étude plus poussée sur les soinssecondaires a montré peu d'effet sur la douleur abdominale ou la qualité de viespécifiqueauSII,bienque lasatisfactionet lebien-êtreglobalaientétéaméliorés.

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Les deux études suggèrent que la TCC peut aider les patients à faire face à leurssymptômessansnécessairementlesabolir.

- La thérapie psychodynamique interpersonnelle (PIT) : la PIT tente de fournir aupatient des informations sur les raisons pour lesquelles les symptômes sedéveloppent.Enplusd'aiderlepatientàcomprendrecommentl'étatémotionnelestlié au stress, le lien entre les émotions et les symptômes intestinaux peut aussidevenirplusclair.Encasdesuccès,cetraitementpeutconduireàdeschangementsimportants de la vie ainsi qu'à une amélioration de l'état émotionnel et dessymptômes du SII. Deux études de PIT comparées à «l'écoute de soutien» avec lemême thérapeute, ont montré des améliorations significatives par rapport auxgroupesdecomparaison.Ungrandessaiderentabilitéamontréque lePITàcourtterme est largement acceptable et conduit à une amélioration significative de laqualitédevieliéeàlasantéetuneréductiondescoûtsdessoinsdesanté.

Une revue des traitements psychologiques pour le syndrome de l'intestin irritable a

identifié 12 essais contrôlés randomisés dans lesquels le niveau des symptômes était leprincipal résultat63. Huit de ces études ont rapporté des réponses positives à lapsychothérapie. Deux études ont indiqué que l'amélioration marquée des symptômespendantlapsychothérapieinitialeaduréjusqu'àunan.Ladiarrhéeetladouleursemblentrépondre à la psychothérapie, contrairement à la constipation. Les patients souffrantd'anxiété ou de dépression semblent avoir un meilleur résultat en réponse à lapsychothérapie que les patients sans ces conditions. Il est difficile de rendre aveugles lesétudes concernant les traitements de psychothérapie. Aucun des essais publiés sur lapsychothérapien'estàdouble insuoucontrôléparplacebo.Dans laplupartdesessais, lespatientsnesontpasreprésentatifsdeceuxobservésenpratiquegénérale,maissontplutôtidentifiés dans les pratiques tertiaires et prêts à s'inscrire en thérapie. En outre, lapsychothérapie nécessite un praticien qualifié, de sorte que les résultats des centressélectionnésnepuissentpasêtre reproduitsenpratiquegénérale.Malgréces réserves, lapsychothérapieestconsidéréecommeutilepourcertainspatientsatteintsdusyndromeducôlonirritable,enparticulierceuxayantdessymptômesrelativementgravesouréfractairesoudesproblèmespsychosociauximportants.

Le choix du traitement psychologique dépendra du type de thérapie disponiblelocalementetde lapréférencedupatient.Certainspatients sont très réticentsà l’idéedesuivre thérapie psychologique. Cependant, ils sont prêts à être mis sous une faible dosed’antidépresseur afin de juger si elle aide dans la gestion de la douleur ou d'autressymptômes. Beaucoup d'autres patients sont prêts à accepter que les facteurspsychologiquespourraientêtreimportantsetpréféreraientunethérapiepsychologique,ou"parlante", au traitement médicamenteux. Comme ces patients qui ne souhaitent pasprendredesantidépresseurs,ilestimportantderespecterleurpréférencepourcetypedetraitement. Toutes les approches de gestion du SII devraient être éclairées par unecompréhensionpsychologique,enreconnaissantquel'aspectleplusimportantdelagestionest la relation entre le patient et le médecin. L'écoute empathique, en respectant les

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opinions des patients sur la causalité des symptômes, et en donnant des explicationshonnêtesetclairesde l'interactionentre lessymptômespsychologiquesetphysiquessontessentielles. Inversement, l'obstination dans la recherche d'une cause physique etl'exécutiond'enquêtessansfindoitêtreévité.Lerenvoiàuntraitementpsychologiqueensoinsprimairesdoitêtreenvisagésilepatientlesouhaiteous'ilyadessymptômesmarquésd'anxiété ou de dépression. Il y a eu récemment une augmentation générale de ladisponibilitédesthérapies"parlantes"dans lessoinsprimaires.Dans lessoinssecondaires,untraitementpsychologiqueplusspécialisé,axésurleSII,estpréférables'ilestdisponible.Les gastro-entérologues sont encouragés à développer des liens étroits avec unpsychothérapeute particulier. Cela facilite le renvoi des patients pouvant exprimer desréserves au sujet de tels traitements, sauf ils semblent faire partie de l'ensemble duprocessusdepriseenchargeetnonpascommeunrejetparlegastro-entérologue.

De nombreuses études ont également analysé l'intérêt de l'hypnose sur lesoulagement des symptômes liés au SII. L’hypnose correspond à un état modifié de laconscience. Il s’agit d’une expérience suggestive qui dépend de l’aptitude du cerveau àrecevoirouévoquerdesidéesetdesatendanceàlesréaliseretàlestransformerenactes.Les résultats dépendent de la motivation du sujet, mais 95 % des patients sonthypnotisables. En fait, toute techniquede relaxation induit unehypnose. Soushypnose, ilexiste unmeilleur vécudes sensations désagréables et les IRM fonctionnelles ontmontréqu’elleprovoquaituneactivationducortexcingulaireantérieur.L’effetdel’hypnothérapieaétésurtoutévaluéparl’équipedeManchesterquiatravaillédurantdenombreusesannéessur ce thème.Une des études les plus intéressantes porte sur les résultats à long terme.Danscetessai104204patientsontbénéficiéd’unesériede12séancesd’hypnose(1séanced’uneheurechaquesemaine).71%decesmaladesontétéconsidéréscommerépondeursetont été suivis jusqu’à 5 ans. Parmi ces répondeurs initiaux, 81 % gardaient un bénéficethérapeutiqueàlongtermeportantsurlafréquenceetl’intensitédeleurssymptômes,leurqualitédevie,leuranxiétéouleurdépressionavecuneréductiondesconsultationsetdelaconsommationdemédicaments.Uneautreétudebritanniquerandomiséeaétéconduiteenmédecinegénérale105.Danscetessai,81patientsontétéinclusetsuivis12mois:40traitéspar hypnothérapie et 41 contrôles. Une amélioration significative était observée sur ladouleur,laconstipationouladiarrhée,maiscontrairementàl’étudeprécédentelebénéficesemblait diminuer avec le temps. Plusieurs équipes, notamment celle deManchester, ontdémontré que l’hypnose avait également un effet bénéfique sur les symptômesdyspeptiquesassociésauxmanifestationsdeSIIetlessymptômesextradigestifs(céphalées,douleurs dorsales, asthénie…). De plus, l’hypnose a également des effets objectifsmesurables sur la sensibilité viscérale jouant un rôle majeur dans le SII. Prior et al. ontobservéaprèshypnoselarécupérationd’unseuildouloureuxrectalnormallorsd’épreuvesde distension du rectum chez les sujets initialement hypersensibles106. Il existe peu desrecherchessur la façondont l'hypnothérapiepeutapporter seseffetsbénéfiques. Ilexistedes preuves suggérant que chez les patients atteints de SII, elle normalise la sensationviscérale,réduit lescontractionsphasiquesducôlonetrenverse lespenséesnégativesdespatients sur leur état64. Comme cela a déjà étédiscuté ci-dessus, l'activationde certaines

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zones du cerveau, en particulier le cortex cingulaire antérieur, en réponse à un stimulusrectal douloureux, semble exagérée dans le SII par rapport aux témoins. Il est doncintéressant que la réduction de la douleur somatique par l'hypnose soit associée à uneréductiondel'activationdecetterégionparticulière,suggérantquel'hypnothérapiepourraitpermettreauxsujetsSIIdemodifierleurréponsecentraleàladouleur.

L'hypnothérapie,commetouslestraitementscomportementaux,souffredeplusieurs

inconvénients, notamment concernant son manque de disponibilité et le manque dethérapeutessuffisammentqualifiéspourladispenser.Elleexigebeaucoupdemain-d'œuvre,nécessitant jusqu'à 12 séances d'une heure de traitement, tout en étant extrêmementdépendants de l'opérateur. Elle est donc soumise à des variations dans la qualité de laprestation.Bienquelaplupartdesindividuspuissentêtrehypnotisés,pouruneapplicationthérapeutiqueréussie,ildoityavoirunepratiquerégulièreetunengagementdelapartdupatient,sanslequell'hypnosesestsusceptibled'échouer.Lameilleurepreuved'efficacitéestretrouvéechezlespatientsréfractairesauxtraitementsstandards.Sonefficacitéentantquetraitementdepremièreligneestdoncincertaine.Ainsi,cetteformedetraitementestplutôtréservée aux patients les plus réfractaires. Ils peuvent alors être traités dans un nombrelimité de centres spécialisés, où l'hypnothérapie peut être intégrée dans un ensemble desoins. Cette thérapie parait donc être une approche intéressante, mais d’autres étudescontrôlées réalisées par des équipes différentes et incluant un grand nombre de patientssont nécessaires pour confirmer son efficacité. De plus, elle est en pratique difficile àproposer car elle consomme beaucoup de temps pour les professionnels compétents quidemeurentpeunombreuxdufaitd’uneformationspécifiqueassezlongue.

Il existe également d'autres thérapeutiques non conventionnelles pouvant avoir unintérêt dans l'amélioration des symptômes du SII comme la pratique du yoga oul'ostéopathie. Deux études systématiques montrent leur intérêt107,108, mais ces revuesincluentunfaiblenombred'étudesetlestechniquespeuventdifférertrèslargementselonlespaysoulesméthodesd'apprentissage,cequipeutinfluerdanslesrésultats.

c) Thérapeutiquesnaturelles

De tout temps, les plantes ont été utilisées par l'Homme dans le traitement destroublesdigestifs.Quecesoitdefaçonrécurrente,carcertainesplantesquenousmangeonsontdespropriétésthérapeutiques,maisaussidemanièreépisodiquequandcesplantesontune action, prises endehorsde l'alimentation.Denombreuses indications thérapeutiquessontplutôtd'unusagetraditionnel.Cependant,dansplusieurscas,desprincipesactifsclairsextraitsdesplantesutiliséesdansdesmédecinestraditionnellesetdesétudesontdémontréleur action et parfois leur efficacité dans le traitement de troubles digestifs comme laconstipationou lesdouleurs abdominales.Dans cettepartie, je tenterai de citer certainespartiesdeplantesouextraitsdeplantespotentiellementutilesdanslecadredutraitementdes symptômes du SII. En effet, si l'allopathie classique ne permet pas actuellement deguérirtotalementdecettepathologie, lessubstancesactivesnaturellesnepromettentpas

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non plus une guérison totale. Mais elles peuvent permettre dans certains cas uneamélioration significative des symptômes et répondent à une demande des patients enrecherchedesoinsnaturelsetnonissusdel'industriechimique.

Tout d'abord, je vais présenter les plantes utilisées traditionnellement dans le

traitement symptomatiquede la constipation.Avecenpremier lieu, lesplantescontenantdesmucilagesoudesgommes,puislesplantescontenantdesdérivésanthracéniques.Puisj'aborderai unegrande familledeplantes, lesApiaceae, utiliséesengrandepartie commeépicesdanslesdifférentescuisinesdumondeetquiontungrandintérêtdanslestroublesdigestifs comme lesdouleurs abdominaleset lesmétéorismes. Enfin, j'aborderai quelqueshuilesessentiellesissuesdeplantesconnuespouravoirdeseffetsantispasmodiques.

Lesmucilagessontdespolysaccharidesvégétauxquiontlacapacitédeformerungelvisqueuxaucontactdel'eau.LafamilledesPlantiginaceaeestunefamilledeplantesquiencontiennent beaucoup dans leurs graines appelées psyllium. Le terme de "psyllium",systématiquement utilisé dans les publications, prête à confusion. En effet, alors que lesbotanistes et la Pharmacopée européenne distinguent le psyllium (graine entière dePlantagoafraL.oudeP.indicaL.)etl'ispaghul(graineoutégumentdelagrainedePlantagoovataForssk.),desorganismescommelaFDAdéfinissent lepsylliumhusk (tégumentde lagraine)commeétant"l'enveloppeséchéedelagrainedeP.ovata,connuesouslenomdepsylliumblondoupsylliumindienP.indicaouP.psyllium".Defait,ladénominationlatinedel'espèce productrice des "plantago seeds" n'est que très rarement mentionnée dans lesrapports d'essais cliniques. Le "psyllium" utilisé dans ces essais est, le plus souvent, letégumentdelagrainedeP.ovata.

L'ispaghul(graineettégumentdelagraine)etlepsyllium(graine)sontclassésdansla

catégoriedeslaxatifsayantuneffetdelest.Leureffet,purementmécanique,est liéà leurmucilage : lesmacromolécules polysaccharidiques très peu fermentescibles absorbent ungrand volume d'eau et forment, au niveau du côlon, un gel volumineux augmentant lamasse, le degré d'humidité et d'acidité du bol fécal, stimule le péristaltisme et facilitel'exonération sanspourautantmodifier sensiblement laduréedu transit (en l'absencedeconstipation).Lemucilagen'estpasdépolymériséauniveaudel'intestingrêleetn'estquetrèspartiellementdégradépar lesbactériesdu côlon (formationdegazetd'acidesgrasàchaines courtes). Les graines de psyllium contiennent 12% de mucilages, avecessentiellementduD-xylose(70%)etduL-arabinose(10%).Lesgrainesd'ispaghulpeuventcontenir jusqu'à 70% de mucilages majoritairement constitués de D-xylose (85%)109.L'administration doit se faire en mélangeant environ 1 g de graines entières ou destégumentsavecaumoins30mld'eau,delait,dejusdefruitsoud'autresliquides.Letoutdoitêtre remuérapidementetavalé leplus rapidementpossible.Leproduitdoitêtreprispendantlajournéeaumoins½à1heureavantouaprèsl'ingestiond'autresmédicaments.L'utilisation du psyllium ou de l'ispaghul dans le traitement symptomatique de laconstipationchezunC-SIIestrecommandéeenpremièreintentionlaplupartdutempscarelleresteefficaceetentrainepeud'effetsindésirables.

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La gomme de Sterculia est le produit durci à l'air, de l'exsudat visqueux naturel ouprovoqué par incision, du tronc et des branches de Sterculia urens et d'autres espècesvoisines.Lagommeestobtenueaprèsincisionoubrûlage.Lesexsudatssontensuiteréunis,débarrassés des écorces résiduelles et triés selon le taux dematières étrangères et selonleur couleur. Le produit commercial est généralement concassé ou broyé. La gomme deSterculia ou gomme "Karaya" a une capacité à former des dispersions visqueuses engonflantfortement.Cettepropriétéfaitdecettegommeunlaxatifayantuneffetdelest109.Elle est non absorbée, non fermentescible, non dégradée et non toxique. Elle est doncindiquéedansletraitementsymptomatiquedelaconstipation.

De nombreuses plantes, utilisées depuis des centaines d'années, ont une actionlaxativevoirepurgativedeparleurcontenuendérivésanthracéniques.Lesanthracénosidessont des composés phénoliques, hétérosidiques, dérivés de l'anthracène et de degréd'oxydation variable. Cedegréd'oxydationpeut varier en fonctionde l'état de la plante :fraicheousèche,cequipeutinfluersurl'efficacitédeleuraction.Selonladoseadministrée,les dérivés anthracéniques exerceront une action laxative ou purgative plus ou moinsviolente.Auxdosesthérapeutiqueshabituelles,cesontdeslaxatifsstimulants.L'activitéestliée à la structure des composés : les hétérosides d'anthraquinones et de dianthrones,moléculespolaires,hydrosolublesetdemassemoléculaireimportante,nesontnirésorbésnihydrolysésauniveaudel'intestingrêle.Parvenusauniveauducôlon,ilssonthydrolyséspar les enzymes de la flore intestinale et les anthraquinones libérées sont réduites afind'exercer leuraction. Leshétérosidesanthracéniquespeuventêtreconsidéréscommedesprodroguescar lesosesauraientunefonctiondetransporteur,empêchant l'absorptiondumotif actif avant qu'il ne soit libéré dans le côlon sous l'influence des enzymesbactériennes109.Lesanthracénosidesaccroissent lamotilitécolique,cequi réduit le tempsdetransitetl'absorptiondesfluides.Ilaétémontréinvivoquelarhéineanthrone(dérivéanthracénique) interagit par contact direct avec les cellules épithéliales de la muqueuseintactedel'intestin.Onpensequelesanthracénosidesagissentsurlemouvementdel'eauet des électrolytes par inhibition de l'activité Na/K ATPasique des entérocytes. Ilsprovoquent une inhibition de la résorption de l'eau, du sodium et du chlore et uneaugmentationdelasécrétiondupotassiumauniveaudelamuqueuseintestinale.D'autresmécanismessontégalementenvisagéspourexpliquer l'activitédecesdérivés,notammentuneactionsurlasynthèsedesprostaglandines(impliquéesdansletransportdel'eauetdesélectrolytes),unmécanismeimpliquantlecalcium,etc.

Les plantes contenant des anthracénosides font partie de différentes familles. On

retrouvecescomposésdansdifférentespartiesdecesplantes.Lesprincipalesencontenantetutiliséesenthérapeutiquessontrésuméesdansletableau8.

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Tableau8109:Principalesespècescontenantdesanthracénosides

Nomlatin Nomcommun PartieutiliséeAnthracénosidesmajoritaires

Cassiasennaouangustifolia

Séné Folioleset/oufruitsséchés

SennosidesAetB

RhamnusfrangulaouFrangulaalnus

Bourdaine Ecorce FrangulosidesAetB

Rhamnuspurshiana Cascara Ecorce Cascarosides

AloeveraetAloeferox

AloèsdesBarbadesetAloèsduCap

Succoncentré Aloïnesetaloïnosides

Laposologiemaximalequotidienneenanthracénosidesestde30mg. Laprise se fait

généralementlesoiretl'effetthérapeutiqueestattenduaprèsuneprisede2à3unitésparsemaine (comprimé, gélules avec extrait sec titré ou tisane en infusion) et dans la limited'une à deux semaines110–112. Cependant, l'usage quotidien et prolongé des laxatifsstimulants,endehorsdes recommandations,peutentraînerdes troublesnonnégligeablesetunesituationdedépendanceappeléeégalement"maladiedes laxatifs":définiecommeune colite réactionnelle avec diarrhées et douleurs abdominales, nausées, vomissements,puis mélanose recto-colique, altérations de la muqueuse du côlon, troubles hydro-électrolytiques avec hypokaliémie entrainant une dégradation de l'état général.L'hypokaliémie entrainée par une utilisation intensive de ces produits peut potentialiserl'effet de certains autres médicaments jouant sur le rythme cardiaque ou pouvant lemodifier (antiarythmiques,neuroleptiques,antidépresseurs)pouvantêtredélétèrepour laconductioncardiaque.Demême,lesmédicamentsmodifiantl'équilibrehydro-électrolytiquecommelesdiurétiquesoucertainsantihypertenseurspeuventcontre-indiquerd'utiliserdesanthracénosides. Il est donc important de vérifier ces différentes contre-indications avantd'employer ces substances naturelles, car elles peuvent parfois être dangereuses. C'estnotammentpourcelaque les laxatifsstimulantsnesont indiquésqu'endernière intentiondans le cadre du traitement symptomatique d'une constipation. Enfin, l'utilisation desdérivésanthracéniquedansletraitementsymptomatiquedelaconstipationchezunC-SIIestsouventpeufructueusecarelleexacerbelesdouleursabdominales.

Les Apiacées anciennement appelées Ombellifères, comprenant environ 3.000espèces,serépartissentdanstouteslesrégionstempéréesmaissurtoutdansl’hémisphèreNord. C’est une famille très homogène facile à reconnaître grâce à son inflorescence enombelles composées. Certaines plantes de la famille des Apiacées peuvent être utiliséescommealiments.Lesracinesde lacarotte(Daucuscarota),dupanais (Pastinacasativa)etdu céleri (Apium graveolens) peuvent être consommées ainsi que les feuilles de persil(Petroselinumcrispum)etdecéleri.Lecerfeuil(Anthriscuscerefolium)estutiliséentantquecondiment. Les souches et le pétiole d’angélique (Angelica archangelica) sont utilisés enconfiserie (sous forme confite) car riches en glucides. Certaines espèces constituent de

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nombreux épices et condiments comme l'aneth (Anthum graveolens), la coriandre(Coriandrumsativum), lecumin(Cuminumcyminum)oul'anis(Pimpinellaanisum).Maiscequinousintéresseicic'estleurutilisationdansletraitementdestroublesdigestifs.Eneffet,lesprincipesactifs contenusdans lesApiacées sontdérivésde leurshuilesessentielles. Ladéfinition officielle d'une huile essentielle donnée par l'ANSM et la PharmacopéeEuropéenne est un "produit odorant, généralement de composition complexe, obtenu àpartird’unematièrepremièrevégétalebotaniquementdéfinie,soitparentraînementparlavapeur d’eau, soit par distillation sèche, ou par un procédé mécanique approprié sanschauffage.L’huileessentielleestleplussouventséparéedelaphaseaqueuseparunprocédéphysique n’entraînant pas de changement significatif de sa composition." Les huilesessentiellesdesApiacéessontsurtoutcontenuesdanslesfruits.L'utilisationdesApiacéesentantquemédicamentàbasedeplantepeutsefairededeuxfaçons:soitenphytothérapie,via l'ingestion des fruits séchés, via par exemple une infusion, ou en aromathérapie vial'ingestionoul'applicationcutanéed'huilesessentiellespuresoudiluées.

Tableau9109:Principalesespècesd'Apiacéesutiliséesenthérapeutique

Nomlatin Nomcommun Partieutilisée Chémotype Propriétés

Foeniculumvulgare

Fenouil Fruit Trans-anétholeMéthyl-chavicol

AntispasmodiqueStomachique,apéritiveCarminative

Pimpinellaanisum

Anisvert Fruit Trans-anétholeMéthyl-chavicol

AntispasmodiquedigestifCarminativeEupeptique

Carumcarvi Carvi Fruit D-CarvoneLimonène

Stimulantdigestif,Carminative

Coriandrumsativum

Coriandre Fruit Linalol Toniqueetanti-inflammatoiredigestif

Cuminumcyminum

Cumin Fruit Cuminaldéhyde Diminuelesstasesdigestives

Anethumgraveolens

Aneth Fruit D-CarvoneLimonène

StimulantetantispasmodiquedigestifCarminative

Certaines études ontmontré un intérêt des différentes Apiacées dans le traitement

symptomatiquedu SII113–118. Cependant, elles sont pour la plupart de faible étendue avecdeséchantillonspeunombreux,nonrandomisés,noneffectuéesendoubleaveugle,rendantles résultats peu fiables..Deplus, des freins peuvent porter atteinte à la vente et donc àl'utilisationdeceshuiles.Eneffet, laventedeshuilesessentiellespuresdeFenouil,d'AnisvertoumêmedeBadianedeChineestsoumiseàlalégislationdesspiritueuxetdonclimitée

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à la délivrance sur ordonnance. Il est donc difficile pour le patient d'accéder à cestraitementscarpeudemédecinssontformésàlaphytothérapieouàl'aromathérapie.Etantdonnéquelaventelibreestinterditeàl'officineouenherboristerie,lespatientsn'yontpasaccès. Ces huiles essentielles sont néanmoins présentes dans les extraites de plantesfraiches ou séchées que l'on retrouve en l'état et en vente libre dans les pharmacies etherboristeries.Ellespeuventdoncêtreutiliséesentisane,etleshuilesessentiellesdeCuminoudeCarvisontellesdisponiblesà lavente.Cependant,certainesétudesontmontréquel’huileessentielledeCarvipossèdedeseffetsœstrogéniques,pouvantcontre-indiquersonutilisationchezcertainspatientsoulimitantsaduréed’utilisation117.

D'autres plantes, contenant notamment des huiles essentiellesmais pas seulement,peuventêtreutiliséesenphytothérapiedansletraitementdestroublesdigestifsengénéraletnotammentdansletraitementsymptomatiquedesballonnements,douleursabdominalesetdyspepsies. Ils'agitnotammentde laMélisse (Melissaofficinalis),de laMenthepoivrée(Menthaxpiperita),del'Estragon(Artemisiadracunculus)ouduBasilic(Ocimumbasilicum).Concernant l'utilisation des huiles essentielles deBasilic et d'Estragon, riches enméthyl-chavicol ou estragol, elles sont traditionnellement employées dans le traitementsymptomatiquedesspasmesoudesdouleursabdominales,etne fontpas l'objetd'étudesparticulièressurleSII.Cependant,certainesétudesrévèlentunpotentieleffetgénotoxiquedu méthyl-chavicol et donc potentiellement un effet cancérogène à long terme durantl'utilisationdeshuilesessentiellesquiencontiennent119.L'utilisationdeshuilesessentiellesdeBasilicoud'Estragonseferaalorssurdecourtespériodes.Concernantl'huileessentielledeMenthe poivrée, celle-ci fait l'objet de quelques études dans son utilisation chez lespatients atteints de SII, et son effet sur les douleurs abdominales se révèle supérieur auplacebodansdenombreusesétudes,certesde faibleampleur65,68,116,120,121. Lessubstancesactives impliquées dans le soulagement des spasmes intestinaux sont le menthol et lamenthone.Enraisondurisquedediminutionduseuilépileptogène,cettehuileessentiellene doit pas être utilisée chez la femmeenceinte et les enfants demoins de 8 ans. Enfin,toujoursdansunusagetraditionnel,l'usaged'extraitsderacinesdeCurcumalonga,associésà la pipérine contenue dans le Poivre noir (Piper nigrum) dans le but d'augmenter labiodisponibilitéde la curcumine,oud'Encens olibans (Boswellia carterii)auraituneactionanti-inflammatoireetpeutêtreutilisédanslaréductiondelacomposanteinflammatoireduSII. Cependant cet usage ne fait l'objet d'aucune étude sérieuse sur l'efficacité ou sur lemoded'actiondecesplantes,etmêmecertainesétudesnemontrentaucuneefficacitédansle traitement symptomatique du SII122–124. L'utilisation de la phytothérapie ou del'aromathérapiepeutêtreutiledanslesoulagementdessymptômesduSIImais ilnes'agitenaucuncasd'untraitementcuratif. Il faudraégalementvérifiersi le traitementenvisagéparlepatientouparunprofessionnelestadaptéàlapathologieet au patient, car sousleur image de thérapies naturelles, les plantes peuvent avoir des effets néfastes. Ilconviendraalorsqueletraitementsoitinitiéoucontrôléparunpharmacienouunmédecinforméconvenablementàlaphytothérapieoul'aromathérapie.

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Enfin,pourconcluresurlesdifférentesthérapiesalternativesdansletraitementduSIIet pour introduire la troisième partie de cette thèse concernant les probiotiques, je vaisaborder l'utilisationdesprébiotiquesdans lapriseenchargeduSII.Unprébiotiqueestun"ingrédientalimentairenondigestiblequistimuledemanièresélective,auniveauducôlon,lamultiplicationoul'activitéd'unoud'unnombrelimitédegroupesbactérienssusceptiblesd'améliorer la physiologiede l'hôte"25. Lesprébiotiques lesplus connus sont les fructanes(fructo-oligosaccharides(FOS),oligofructose, inuline)etd'autresoligosidesdegalactoseettransgalactose (GOS et TOS). De nombreux autres glucides pourraient revendiquerl'appellation de prébiotiques (xylo-oligosaccharides, isomalto-oligosaccharides, gluco-oligosaccharides,etc.).Le lactuloseestégalementunprébiotique,etmêmele lactosechezlessujetsdéficientsenlactase.Lebutdoncdesprébiotiquesestd'augmenterlaquantitédebactériesdanslecôlon,notammentdesbactérieslactiquescommelesbifidobactériesouleslactobacilles.Enaugmentantlevolumedelafloreintestinale,c'estl'actiondecettefloresurlesystèmedigestifquivaêtredéveloppée,commelaproductiond'AGCC.Lesprébiotiquespeuventdoncintégrerlacatégoriedesfibresalimentaires.D'ailleurs,lesprincipalessourcesde fibres alimentaires comme les fruits et légumes constituent les sources principales deprébiotiques. Ainsi, la chicorée constitue par exemple une source importante d'inuline109.Lesoligosaccharidesconstituants lesprébiotiquespeuventégalementêtresynthétisésafind'êtreconditionnésdansdescomplémentsalimentaires.Lesétudesconcernantl'intérêtdesprébiotiquesdansletraitementduSIIsontpeunombreusesetsontsouventlesmêmesquecelles concernant les fibres alimentaires, étant donnée leur proximité structurelle. Lesprébiotiquesontdoncunfaibleimpactentermesd'améliorationglobaledessymptômesduSII. Ils peuvent même être préjudiciables s'ils sont ingérés en trop grande quantité. Lacapacitédefermentationcoliquearrivantàsaturation,lesprébiotiquesaurontalorsuneffetosmotiqueintensepouvantentrainerunediarrhéeetuneaugmentationdutransitetdelamotricitécolique.Deplus,laplupartdesprébiotiquesfontpartiedelafamilledesFODMAPs,et leur consommation en grande quantité peut aggraver, on l'a vu précédemment, lessymptômesduSII.

En conclusion de cette partie, on l'a vu les différents principes actifs et thérapies

utiliséesou endéveloppementdans le traitementdu syndromede l'intestin irritable sontrichesetvariables.Cesdifférentesthérapiespeuventavoiruneefficacitédansl'améliorationglobale de lamaladie ou dans certains de ses symptômes, comme les ballonnements, lesdouleursabdominales,ladiarrhéeoulaconstipation,maisellesneconstituentenaucuncasune réponse thérapeutique adéquate entrainant une guérison de lamaladie. Les aspectsphysiopathologiquesn'étanthélaspastotalementélucidés, ilestdifficilepourlarecherchedetrouveruntraitementquirépondeà100%auxattentesdespatients.Enattendant,ceux-cipeuventbénéficierd'untraitementsymptomatiquequipeutaméliorerleursmauxjusqu'à80%pourcertainstraitements.Néanmoins,ils'agirapourleprescripteurdebienconnaîtreles différents symptômes du patient et ses attentes afin répondre au mieux par lesmédicaments ou les thérapies alternatives. L'association de plusieurs traitements estsouventnécessairepourpotentialiserleurefficacité.Enfin,ilestimportantqueletraitementsoitpersonnalisépourchaqueindividu.

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III. Utilisation des probiotiques dans le syndrome de l'intestinirritable

Depuisquelquesannées,unenouvellevagueatteintlesrayonnagesdespharmacieset

desespacesbienêtreet santédessupermarchés : cesont lesprobiotiques.Denombreuxmédias font l'échode cettenouvellemode, et des livres sortent régulièrement, écrits pardeschercheurs,médecinsoumêmeparfoisdespseudo-spécialistessurlafloreintestinaleetson lien avecnotre santéou sur l'utilisationdesprobiotiques.Derrière cette tendanceenréalité,lesprobiotiquesonttoujoursfaitpartiedenotrequotidien.Eneffet,onlesretrouvedanscertainsalimentscommelesyaourts, les laits fermentés, les légumes, lescéréales, legerme de blé, la levure de bière ou encore le kéfir. La fermentation fait partie, avec lefumage ou le salage, des moyens traditionnels de conservation des aliments. Pour lafermentation,lesbactérieslesplusutiliséessontlesbactérieslactiques.Ellesacidifientleurmilieu en produisant de l’acide lactique et empêchent le développement des organismespathogènes.Lafermentationintervientaujourd’huidanslafabricationdelabière,duvin,duvinaigre, du thé, du café, du chocolat ou du pain. Cependant, les bactéries sont souventtuéesparlacuisson,latorréfactionoulastérilisation,ousontéliminéeslorsdesétapesdeclarificationduvin,duvinaigreoude labière.Depuisquelquesannées,grâceà l'évolutiondestechniquesdeméthodesd'étudesdumicrobioteintestinal,onarriveàmieuxpercevoirlaphysiopathologiedecertainespathologiesintestinales.Commeonl'avuprécédemment,la flore microbienne pourrait avoir un rôle prépondérant dans différentes pathologiescommelesMICIs, lesdiarrhéespost-antibiotiquesoulesyndromedel'intestinirritable.Denombreux chercheurs pensent que les probiotiques pourraient avoir un intérêt enthérapeutiquepourmoduler,améliorerourenforcerlemicrobioteintestinal.

Les probiotiques sont-ils victimes d’un effet de mode ou ont-ils réellement uneefficacité?Ont-ilunréelintérêtdanslesyndromedel'intestinirritable?Quelestleurmoded'action?Quelsprobiotiquesutiliser?Existe-t-ildeseffetsindésirablesàleurutilisation?Cesonttoutescesquestionsauxquellesj'essaieraiderépondredanscettepartiedemathèse,avec en dernier lieu une partie sur le rôle que peut jouer le pharmacien d'officine sur leconseil lors de la vente de produits à base de probiotiques, et plus généralement sur leconseilàadopterfaceàunpatientsouffrantdeSII.

1) Définitions,origine,méthodesdefabrication

Il y un siècle, ElieMetchnikoff (scientifique russe, lauréat du Nobel et professeur àl’InstitutPasteurdeParis)apostuléquelesbactérieslactiquesoffraientdesbénéficespourla santé conduisant àuneplus grande longévité, enobservant la longueduréedeviedespopulations bulgares, malgré leurs conditions de vie difficiles. Il a suggéré que "l’autointoxication intestinale" et le vieillissement prématuré qui en résultait pouvaient êtresupprimés enmodifiant la floremicrobienne de l’intestin. Notamment en remplaçant lesmicrobesprotéolytiquestelsqueClostridium,produisantdessubstancestoxiquescommeles

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phénols,lesindolesetl’ammoniumàpartirdesprotéinesdeladigestion,pardesmicrobesutiles. Il développa un régime alimentaire à base de lait fermenté par une bactérie qu’ilappela "Bacille bulgare". En 1917, avant la découverte de la pénicilline par Sir AlexanderFleming,leprofesseurallemandAlfredNissleisolaunesouchenonpathogèned’Escherichiacoli à partir des selles d’un soldat de la première Guerre mondiale. Celui-ci n’avait pasdéveloppéd’entérocolite lorsd’uneépidémiesévèredeshigellose.Les troublesdutractusintestinal étaient fréquemment traités par des bactéries vivantes non pathogènes pourmodifierouremplacerlafloremicrobienneintestinale.Lasouched’EscherichiacoliisoléparNissle en 1917 est un des rares exemples de probiotique qui ne soit pas une bactérielactique.UnebifidobactérieaétéisoléeparHenryTissier(del’InstitutPasteur)àpartird’unenfant nourri au sein. Il l’appela Bacillus bifidus communis. Tissier affirma que labifidobactérieremplaceraitlabactérieprotéolytiquequicauseladiarrhéeetilrecommandal’administrationdebifidobactériesauxenfantssouffrantdediarrhée.

Leterme“probiotique”futintroduitpourlapremièrefoisen1965parLillyetStillwell.Paroppositionauxantibiotiques,lesprobiotiquesfurentdéfiniscommedesfacteursdérivésdesmicro-organismesetstimulantlacroissancedesautresorganismes.En1989,RoyFulleramis l’accentsur lanécessitédeviabilitédesprobiotiqueseta introduit l’idéequ’ilsavaientun effet bénéfique sur l’hôte. Trois éléments ont depuis contribué àmodifier encore leurdéfinition.Lepremierestquecertainsmicro-organismespeuventavoirdeseffetssurl'hôtesans nécessairement modifier sa flore (effets directs enzymatiques ou par uneimmunomodulation). Les termes de "micro-organismes en transit" et d'agents"biothérapeutiques" ont été alors proposés et apparaissaient plus "factuels" puisqu'ils nepréjugeaient pas du mécanisme d'action. Le second élément est l'intérêt de certainsindustriels à ne pas labelliser "probiotique" des micro-organismes "génériques", toutparticulièrement ceux du yaourt standard. Afin de réserver ce label à des produitsd'apparence et de goûts voisins, mais contenant des micro-organismes dont la valeurajoutéejustifiaituncoûtsupérieur.Letroisièmeélémentestledésirdecertainschercheursetdenombreuxindustrielsd'excluredeladéfinitionlesmicro-organismestués.Eneffet,sicertainsmicro-organismes(notammenttuésparlachaleur)peuventexercercertainseffetsbénéfiques pour l'hôte, des travaux ont montré que ces effets étaient souvent moinsmarqués que ceux des micro-organismes ingérés vivants. La Food and AgricultureOrganization (FAO) des Nations Unies et l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ontétabli, en 2001, des lignes directrices pour l'utilisation du terme "probiotique" dans lesalimentsetformuléladéfinition:"micro-organismesvivantsqui,lorsqu'ilssontadministrésenquantitésadéquates,produisentunbénéficepourlasantédel'hôte"25,125.

Les probiotiques sont donc des organismes vivants. Cependant, tous les organismesvivants ne peuvent pas être inclus dans la catégorie des probiotiques et ne peuvent êtreingérés.Eneffetleprincipalrisqueredoutélorsd'uneentréedegermesdansl'organismeestl'infection. De plus, les différents micro-organismes n'ont pas tous un intérêt lors d'unapport en quantité importante dans le système digestif. Les probiotiques peuvent êtreintégrésdansdifférents typesdeproduits, y compris les aliments, lesmédicaments et les

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complémentsalimentaires.LesbactériesdugenreLactobacillusetBifidobacteriumsontlesplus communément utilisées comme probiotiques, mais les levures Saccharomycescerevisiaeouboulardiietquelquessouchesd'EscherichiacolietdeBacillussontégalementutilisées comme probiotiques. Les bactéries lactiques, y compris des espèces deLactobacillus, utilisées pour la conservation de la nourriture par fermentation depuis desmilliers d’années, peuvent jouer un double rôle comme agents de la fermentationalimentaireetcommeagentsbénéfiquespourlasanté.Dansl'alimentation,lesprobiotiquesontdenombreuxrôles,etnotammentlafermentationdesalimentsquileurdonneungoûtparticulieretdiminue lepH, cequiempêche la contaminationpardesagentspathogènespotentiels.Lafermentationconcerneglobalementunvasteensembledeproduitsagricoles(céréales,racines,tubercules,fruits,légumes,lait,viande,poissons,etc.)125.

Onl'adit,lesmicro-organismesutilisésdansdespréparationsprobiotiquessontpourlaplupartdesbactériesoudeslevures.Pourrappel,lesbactériessontdesprocaryotes,c'estàdiredesorganismesnedisposantpasdenoyau,nid'organitesetontune structure trèssimple.Cequicaractérise lesbactériesc'est laprésenced'uneparoiqui,à lacolorationdeGram, va diviser en deux catégories la plupart des bactéries : les Gram positifs avec uneparoi richeenpeptidoglycaneset lesGramnégatifsavecuneparoi richeenprotéines.Ondistingueégalementlesbactériesselonleurmorphologie:coques,bacilles,oumêmecocco-bacilles. Les lactobacilles sont des bactéries lactiques à Gram positif, immobiles, nonflagellés,nonsporogènes.Ellepeuventêtresoithomofermentaires (produisantàpartirduglucose plus de 85% d'acide lactique), soit hétérofermentaires et produisant du CO2, del'acidelactique,del'éthanol(et/oudel'acideacétique)enquantitéséquimolaires.Ellessontégalementaérotolérantesouanaérobies126.LesBifidobactériessontdesbactérieslactiqueségalement, à Gram positif, immobiles, non flagellés, anaérobies strictes. Enfin les levuresfont partie du règne des Fungi, appelés communément les champignons. Ce sont descellules eucaryotes, constituées d'un noyau et d'une paroi constituée principalement dechitine. Elles sont hétérotrophes, c'est à dire qu'elles nepeuvent synthétiser elles-mêmesleur source de carbone et ont besoin de molécules carbonées comme carburant de leurmétabolisme.D'oùleurviepour laplupartsaprophyte,parasiteouparfoissymbiotique.LegenreSaccharomycesestleplusutiliséentantqueprobiotique.Ils'agitd'unchampignondelafamilledesAscomycètesnedonnantpasdemycélium.Sonmétabolismepeutêtreàlafoisaérobie et anaérobie selon les conditions de vie. Son arsenal enzymatique lui permet decatabolisertoutessortesdesubstrats,aboutissantàlafabricationdenombreuxmétabolitescomme l'éthanolou leCO2.Les levurescommeSaccharomycescerevisiae sontutiliséesenagro-alimentaire depuis desmillénaires dans la fabrication du pain, du vin ou de la bièregrâceàlafermentationalcooliqueouaérobie.

Les bactéries comme Bifidobacterium et Lactobacillus, et la levure Saccharomycesboulardii sont retrouvées dans le microbiote intestinal. Cependant, les deux genres debactéries probiotiques précitées ne sont retrouvées qu'en faible quantité au niveauintestinal:pourlesbifidobactéries,0,7à10%etpourleslactobacilles,jusqu'à2%127.Encequi concerne Saccharomyces boulardii, il s'agit d'une levure d'origine naturelle, non

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génétiquementmodifiée, isoléeàpartirde l'écorcede lychéesen Indochineen1923. Elleunetempératureoptimalededéveloppement inhabituellementélevée,de l'ordrede37°C,d'où sonqualificatif d'"ultra-levure".Saccharomycesboulardii est une variété voisinemaisdistincte de Saccharomyces cerevisiae dont elle se différencie par différentescaractéristiquestaxonomiques,métaboliquesetgénétiques25.Onpeutlaconsidérercommefaisantpartiedelafloredetransitcarendehorsdesonapportvial'alimentation,ilnes'agitpas d'une flore autochtone. Une souche probiotique est identifiée par son genre, sonespèce, et par des caractères alphanumériques correspondant à la souche. La souche estune variante génétique ou sous-type d'une espèce de bactérie. Dans la communautéscientifique, il existe une nomenclature reconnue et acceptée pour lesmicro-organismes,respectantlecodeinternationaldenomenclature.Parexemple,LactobacilluscaseiDN-114001ouLactobacillusrhamnosusGG.Cettedénominationparsouchepermetdedéterminerdanslesessaislabactériesélectionnéeenlaboratoirequiaeuleseffetsescomptésdanslesobjectifs de l'étude.Carparfois d'une soucheà l'autre au seinde lamêmeespèce, onneretrouvepaslesmêmespropriétés.Celapeutêtredueàcertainesdifférencesgénétiquesausein d'une même espèce. La souche qui est isolée par le laboratoire doit être ensuitedéposée dans une collection de cultures reconnue à l’échelon international, comme parexemple,l'InstitutPasteur.

In fine, ces probiotiques vont avoir pour objectif d'obtenir une action au niveau

intestinal. Et pour avoir cette action, il faut amener ces probiotiques au niveau du tubedigestif.Deuxpossibilitéss'offrentànous:uneadministrationinsituviaunesonde,maisceprocédéparaîtpeuenvisageablepouruneutilisationrationnelledesprobiotiques.Soitparingestiondeceux-ci,cequienfait leurvoied'administrationprincipale.Or,cetteingestionpeutposercertainsproblèmesconcernant laviabilité des organismes vivants.Eneffet, labarrière que constitue l'acidité gastrique peut remettre en cause l'arrivée intacte desbactériesauniveauintestinal.Ilfaudradoncéviterunemiseencontacttropprolongéedesprobiotiquesingérésavecl'aciditédel'estomac.Unpassagerapidedansl’estomacfavoriséparunepriseà jeun,ainsique laprotectiondesbactériespardessystèmesgaléniquesdeprotection tels que l’enrobage, permettent de protéger les probiotiques contre l’aciditégastrique128. La dose de probiotiques ingérée est également un facteur important pourobtenirdesconcentrationsélevéesdanslesdifférentscompartimentsdutubedigestif.

Les probiotiques ne doivent pas être seulement capables de résister à leur passage

dans le tubedigestifmais avoir aussi la capacitédeproliférerdans l’intestinpourexercerleurs effets bénéfiques sur l’hôte. Les tests in vitro visent à établir leur aptitude à resterviablessurlesitecibleetàêtreefficacesdansleurspécificitéd’action.Cestestssontréalisésdemanièreàcequ’ilscorrespondentaumieuxauxrésultatsinvivoquel’onsouhaiteavoir.Lesprincipauxtestsréaliséssurlessouchesprobiotiquessont:

- Larésistanceàl’aciditégastrique- Larésistanceauxsucsbiliaires- L’adhérenceàlamuqueuseintestinale- L’activitéantimicrobiennecontrelesbactériespathogènes

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- Lacapacitéàréduirel’adhésiondesagentspathogènessurlamuqueuse- Lacapacitéàhydrolyserlesselsbiliaires129.

Laquantitédeprobiotiquestransitantvivantsdansl’intestindépenddelasouche,de

la dose ingérée, de facteurs liés à l’hôte et de l’aliment vecteur ou de la galénique. Larésistancedesprobiotiquesàl’acidité,auxselsbiliairesetleursurviedansl’environnementdigestif sont très variables en fonction de la souche. De nombreuses souches debifidobactériesetdelactobacillessurviventbienpendantletransitintestinalpourarriverengrande quantité dans les fèces. Les souches utilisées dans le yaourt meurent en grandepartie dans la partie haute du tube digestif et seulement 1% de survie est observée auniveauiléal.Lesbactériesingéréespersistentpendantlapériodedeconsommationetsontensuite éliminées en quelques jours sans colonisation durable. L’acidité gastrique et lessécrétions bilio-pancréatiques constituent les principaux mécanismes endogènesd’inactivationdes bactéries ingérées. La protection contre l’acidité gastriquepeut se faireparunpassagerapidedansl’estomac,enprotégeantlesbactériesparlepouvoirtampondel’aliment vecteur ou par des systèmes galéniques de protection tels que la micro-encapsulation. Ladose ingéréedeprobiotiquesestun facteur importantpourobtenirdesconcentrations élevées dans les différents compartiments de tube digestif. A titred’exemple, Saxelin et al. en 1995, ont montré qu’une quantité de 1010 UFC devait êtreconsommée pour détecter L. rhamnosus GG dans les fèces. Il est souvent cité que lesconcentrations de probiotiques doivent être supérieures ou égales à 106 UFC/mL dansl'intestin grêle (iléon) et 108 UFC/g dans le côlon. Cependant la base scientifique de cesaffirmations est fragile. Ces concentrations dans l'intestin grêle ont été proposées car detellesconcentrationss'associentàdeseffetscliniques(diarrhée)chezdessujetsayantunecolonisationbactériennechroniquedel'intestingrêle.Cesconcentrationsdanslecôlonontétéproposéescarellescorrespondentàmoinsde1/1000de la floreautochtoneprésente(dont il est raisonnable de penser qu’elle a le plus de chances d'être active que la floreprésenteàdesniveauxencoreplusfaibles)127.Lessouchesexogènesn’ontpaslesavantagesécologiquesnécessairespourpersisterauseindelafloreetsontsupplantéesparlessouchesautochtones,àl’arrêtdelaconsommation.

Lesprobiotiquessontpardéfinitiondesmicro-organismesingérésvivants.Laquestion

a toutefois été posée de savoir si des micro-organismes non vivants (corps microbiensdétruits par un processus quelconque) ou des produits du métabolisme de probiotiques(milieu de culture par exemple) pouvaient avoir tous, une partie ou aucun des effets desprobiotiques. Peu de travaux ont comparé demanière rigoureuse les effets de bactériesvivantes par rapport à ceux des bactéries tuées. Les études concernées sont assezcontradictoires.Certainseffetsdepréparationsbactériennespeuventêtredusàcertainsdeleurs métabolites et/ou à leur ADN. Ils peuvent alors aussi être observés avec despréparationsnonvivantes.Cependant,d’autreseffetsnesontobservésqu’avecdesmicro-organismes vivants. La survie dans le tractus digestif de souches ingérées n’implique pasforcément l’existence d’effets bénéfiques. La non-survie n’implique pas nécessairementl’absenced’effetsbénéfiques.Certainesétudesontfaitintervenirlesprobiotiquescontenus

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dans le médicament LACTEOL®, contenant deux souches bactériennes : Lactobacillusfermentum et Lactobacillus delbrueckii avec un milieu de culture fermenté neutralisé.L'intérêt du LACTEOL® dans cette étude est que les probiotiques ont été inactivés parthermisation.Uneétudeamontréune certaineefficacitédu LACTEOL® contre ladiarrhéechronique,évaluéversusdeslactobacillesvivants130.UneautreétudeaévaluéleLACTEOL®chez des patients atteints de D-SII et a égalementmontré une certaine efficacité dans ladiminution des symptômes, cette fois-ci versus placebo131. Cependant ces études ne sontpasd'unegranderigueurscientifiqueetl'effetplaceboestcommesouventprépondérantoulesformesgaléniquestestéesnesontpascellesretrouvéesenpratiqueclinique.

Pourconcluresurlanécessitéounond’utiliserdesprobiotiquesvivants,onpeutdireque dans les études comparant les effets des bactéries vivantes par rapport à ceux desbactéries tuées, la rigueur des fondations de ces essais sont discutables (souches testées,formesgaléniques,effetplacebo,testsstatistiques,nombred'échantillons…).Ilfaudraitquela seuledifférenceentre legroupe testéet legroupecontrôlede l’étude soit le caractèrevivantdelabactérie.Lescomposantsd'unebactérieprisséparémentpeuventapporterunbénéfice sur la santé intestinale, en apportant les nutriments nécessaires à sonfonctionnement.Cependant,unebactérievivantevaavoir,enplusdespropriétéspropresaux constituants de sa paroi, d’autres activités immunomodulatrices associées à laproduction de métabolites bactériens agissant directement ou indirectement, via desmodificationsdelafloreintestinale,surl’immunitédel’hôte.Ilyadoncunesupérioritédelabactérievivantepourl’effetsanté.Deplus,dansladéfinitionOMSd'unprobiotique,ilestindiquéquecemicro-organismeingérédoitêtrevivant.Or,pourrestervivantetavoiruneaction insitudans l'intestin, il faudraque leprobiotiquepuisseêtreviableaumomentdel'ingestion et que donc la galénique puisse être compatible avec ceci. Le probiotique doitarriverenquantitésuffisantedans l'intestin,aprèspassagepar l'estomacetsonacidité, leduodénum et les sels biliaires. Les bifidobactéries et lactobacilles utilisées dans lescomplémentsalimentairesditsprobiotiquesrésistentassezbienàl'aciditégastriqueetauxselsbiliairesetsontretrouvésenquantitésuffisantedansl'intestin.Lagaléniquepermettraéventuellementd'offriruneprotectionvis-à-visde l'aciditégastriqueviadesgélulesouunenrobage gastro-résistant. Il faudra également que le produit fini contienne une certaineconcentration de probiotiques garantie dans le temps. Le fait que l'industriel ait testé leproduitafindedoserlaquantitédeprobiotiquesrestantàladatelimitedeconsommationindiquéesurleproduitestungagedequalité.

Lesindustrielsquifabriquentlescomplémentsalimentairesoulesproduitsàbasedeprobiotiquesutilisentdesprocédéstechnologiquesdepointedansledomaineàlafoisdesbiotechnologies, de la microbiologie et de la galénique. Tout d'abord, les souchessélectionnées en laboratoires pour leurs propriétés vont être retirées de la congélation.Plusieurs contrôles qualité sont effectués pour détecter les contaminations et vérifier lacaractérisationbiochimiquedechaquesouche.Ensuite,unmilieudecultureadapté, richeen nutriments, appelé inoculum, est préparé dans des conditions stériles. L’inoculum estintroduit progressivement dans un milieu de culture adapté où les bactéries deviennent

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activesetcommencentàsemultiplier.Unefoissaqualitéetsapuretévérifiées,l’inoculumest transféré dans des conditions stériles vers un pré-fermenteur où les conditions decroissancesontsurveilléesenpermanence:pH,température,pression…Aprèslecontrôle,la culture est transférée au fermenteur industriel. Les conditions de vie dans cette cuvepeuventêtremoduléesenfonctiondesbactériesoudeslevuresquel'onveutfairecroitreàl'intérieur. Les bactéries vivantes sont ensuite séparées du milieu de culture parcentrifugation ou ultra-filtration : environ 75% de l’eau est éliminée à ce stade, ce quiaugmente la concentration des bactéries vivantes. Les bactéries sont ensuite mélangéesavecuneformulecryoprotectriceadaptée,pourlesaideràsurvivredurantlalyophilisation.Aucoursde la lyophilisation, lesbactéries sontexposéesàune température trèsbasseetl’eaurestanteestéliminéeparsublimationsousbassepression.Lesbactériesformentunemassesemi-solide,contenant2à4%d’eau.Celle-ciestbroyéepourobtenirunepoudrefineet homogène. Chaque grain de poudre peut contenir jusqu’à unmilliard de bactéries. Lapoudredebactéries peut êtremélangée avecd’autres ingrédients tels quedes agents dechargeoudesdiluantsquivontagirpourobtenirlaconcentrationdésiréeenbactéries,sousuncontrôlestrictde la températureetde l’humidité. Leconditionnementestcrucialpourassurerlasurviedesbactériestoutaulongdeladuréedeviedesproduitsfinis(Source:siteinternetdeLALLEMAND, fabricantdeprobiotiquescanadienhttp://www.lallemand-health-solutions.com/production/procede-de-fabrication/).

L'OMSet laFAOontrédigéunrapportconcernant l'utilisationdesprobiotiquesdansl'alimentationen2002etontémisunavissurlesprocédésdefabricationetétiquetagedesprobiotiques. La viabilité et l’activité du probiotique doivent être maintenues pendanttouteslesopérationsdetransformation,demanipulationetdestockageetêtrevérifiéesàlafin de la durée de conservation de ce produit. Les méthodes de production de poudresprobiotiques séchéesdoiventêtre tellesqu’unnombre suffisantdebactériesprobiotiquesviablesysoitmaintenuaprèsfabrication.Laviabilitéduprobiotiquedoitdoncêtreassuréepar:

- Unebonneméthodededessiccation- Unemballageassurantlaprotection- Des conditions de stockage adéquates : la stabilité des probiotiques durant le

stockageestinversementliéeàlatempérature- Debonsprocédésderéhydratation

Enfin,desprogrammesd’assurancequalitéadéquatsdoiventêtremisenplace.Ilfautsuivreles bonnespratiques de fabricationdurant la productiondeprobiotiques. La Consultationrecommandequelesprincipesgénérauxd’hygiènealimentaireduCodexAlimentariusetlesdirectives pour l’application du système HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point ousystèmed'analysedesdangers-pointscritiquespourleurmaîtrise)soientappliqués132.

Commeditprécédemment, lesprobiotiquesdiffèrententermedegenreetd'espècemais aussi de souche. En l’absencededonnées fiables sur leurs principes actifs impliquésdanschaqueeffet,ilestprudentdesupposerqu’ilsdiffèrenteuxaussi,mêmeentresouchesproches. Lesdifférences intrinsèquesentreprobiotiques concernent génome, composition

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deparoi,enzymes,propriétéstechnologiques,résistanceàdiversesagressionsrencontréesdansletubedigestif(acide,bile),capacitéd’adhérenceàdescellulesépithélialesencultureouàdumucus,capacitédeproduiredessubstancesantimicrobiennes.Ellessontindéniablesetparfoistrèsimportantes.Endehorsdecescaractéristiquesintrinsèquesauxsouches,lesconditionsdans lesquellesunprobiotiqueest ingérépeuventprobablement influersursespropriétés dans l’intestin. La "matrice" alimentaire a un effet tampon plus ou moinsprononcé dans l’estomac, protégeant le probiotique de l’acidité. De nombreux travaux, ycompriscliniques,ontmontrédesdifférencesdepropriétésintrinsèquesentreespèces(etafortiorientregenres).Parexemple,lasurviedansl’intestingrêleet/ouletubedigestifentierde l’homme diffère entre divers L. acidophilus, L. bulgaricus, L. plantarum, L. casei et L.johnsonii133.

De nombreux travaux ont montré des différences intrinsèques de propriétés

physiologiques entre souches d’une même espèce. Mais il faut rester attentif car si denombreux articlesmentionnent des comparaisons de souches (ce qui n’est pas faux), lesmicro-organismescomparéssontsouventaussid’espècesdifférentes.D'autrestravauxontrapporté des différences de propriétés antimicrobiennes entre diverses souches debifidobactéries.Ceciaaussiétéobservéentresouchesdelactobacilles,ouentresouchesdeBacillus127. Peu de travaux chez l’animal, mais aucun chez l’homme ont recherché desdifférencesd’effetsprobiotiquesentresouchesd’unemêmeespèce.Danscertainscas,ilesthautement probable que certaines souches aient des propriétés identiques. Ainsi parexemple, plusieurs travaux (mais qui n’étaient pas réalisés chez les mêmes sujets) ontmontré que des yaourts différents (et donc très probablement contenant des souchesdifférentesdeL.bulgaricusetdeS.thermophilus)amélioraientladigestiondulactosechezl’hommedéficientenlactase133,134.Aucuneétuden’acependantcomparécessouchesentreelles selonunprotocole rigoureux.Dansd’autres cas,des souchesdifférentesavaientdeseffetscliniquesdifférentschezl’animal.Jen'aipastrouvéd’exempled’étudechezl’homme,ayantcomparédeseffetscliniquesdedeuxsouchesprobiotiquesd’unemêmeespèce.

Lesdifférencesdepropriétésentresouchesnesignifientpasdemanièrecertaineque

tous leurseffets sur l’hôte seraientdifférents ; cependantellesdoivent jusqu’àpreuveducontrairelelaisserenvisager.Rienn’exclutquel’ondémontrequelaprésenced’unprincipeactif bien identifié dans un probiotique suffise pour permettre une prédiction fiable del’obtentiond’uneffet.Néanmoins,ceciestimprobabledansunfuturprocheetnécessiteraunevalidationsolide.Ilestdoncadmisdemanièreconsensuellequeleseffetsd’unesouchene peuvent être extrapolés à une autre. En d’autres termes, des études cliniques sur lasouche elle-même sont nécessaires pour toute allégation. Les industriels peuvent utilisercettecaractéristiquepourprotégerlesspécificitésdeleursproduits.Lescommunicationsouallégationsseréférantàdessouchesvoisinesnedoiventpasêtreutiliséesdansdesdossiersou brochures scientifiques ou publicitaires (ni a fortiori prises en compte dans leurévaluation).127Maisonverraquecesallégationspeuventêtremisesàmalparlesautoritéslégalesdanscertainspaysoucommunautésdepays.

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Lesprobiotiquespeuventêtre considérés commedesprincipesactifs,maisà l'heureactuelle seuls trois médicaments à base de micro-organismes ont une AMM en France :l'ULTRA LEVURE® contenant des souches de Saccharomyces boulardii, le LACTEOL®,contenant des souches inactivées de Lactobacillus fermentum et Lactobacillus delbrueckiiavec unmilieu de culture fermenté neutralisé et le BACILOR®, contenant des souches deLactobacillus casei var rhamnosus. La plupart des autres produits vendus notamment enpharmacie et contenant des souches dites probiotiques ont un statut de complémentalimentaire ou sont intégrés directement dans des aliments comme les yaourts ou lefromage par exemple. Sont considérées comme compléments alimentaires, les denréesalimentairesdontlebutestdecompléterlerégimealimentairenormaletquiconstituentunesource concentrée de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ouphysiologiqueseulsoucombinés,commercialiséssousformededoses,àsavoirlesformesdeprésentation tellesque lesgélules, lespastilles, les comprimés, lespilulesetautres formessimilaires, ainsi que les sachets depoudre, les ampoulesde liquide, les flaconsmunis d'uncompte-gouttes et les autres formes analogues de préparations liquides ou en poudredestinéesàêtreprisesenunitésmesuréesdefaiblequantité(Décretn°2006-352du20mars2006relatifauxcomplémentsalimentaires).

Endehorsdufaitquelacompositiondesprincipauxprincipesactifsdescomplémentsalimentaires soit limitée en nombre et en quantité, contrairement aux médicaments, lacommercialisation des compléments alimentaires ne nécessite pas d'autorisationindividuelledemisesurlemarchéfondéesurl'évaluationparuneinstanced'expertised'undossiersoumisparl’industrielsouhaitantlescommercialiser.L'industrielestresponsabledela conformité des compléments alimentaires mis sur le marché avec les dispositionsréglementairesenvigueur,tantenmatièredesécuritéqued’informationduconsommateur(non-tromperie du consommateur). Dépendant du code de la consommation, lescomplémentsalimentairesfontl'objetdedéclarationsauprèsdelaDirectiongénéraledelaconcurrence,delaconsommationetdelarépressiondesfraudes(DGCCRF)quiexamineleurcompositionetréalisedescontrôlesàl'instardesautrescatégoriesdedenréesalimentaires.C'estlaDGCCRFquivérifieralaconformitédescomplémentsalimentairescontrôlésvis-à-visdelaloi,notammentencequiconcernelacompositionexactedesproduitsetlesallégationssanté inscrits sur le conditionnement par l'industriel. Une autre instance de l'Etat estchargée notamment de l'évaluation de ces produits. Il s'agit de l'Agence nationale desécuritésanitairedel'alimentation,del'environnementetdutravail(ANSES).Cetteagenceest régulièrement sollicitée et rend des avis sur l’évaluation de l’innocuité de substancesdont l'introduction dans les compléments alimentaires est envisagée,mais également surl’impact de projets de réglementation nationale et communautaire concernant lescompléments alimentaires. Elle agit également via le dispositif de nutrivigilance enpermettant aux professionnels de santé et aux consommateurs de déclarer les effetsindésirables ou les incidents liés aux compléments alimentaires, ce qui permet de faireremonter les informationsà l'agencequivaémettreun rapportoumêmeunavis surunecatégoriedecomplémentsalimentairesetpotentiellementameneràchanger la législationsurcesproduitsdesanté.

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L'Union Européenne a également un rôle dans la régulation du marché descomplémentsalimentairescarc'estellequi contrôle lesdénominationsdesallégations desantéaffichéessurlesconditionnementsdescomplémentsalimentairesoudesalimentsengénéral.Parallégationdesanté,onentendtoutementionutiliséesurlesétiquettes,lorsdecampagnes de marketing ou de publicité, selon laquelle la consommation d’un alimentdonnéoud’undesesingrédients–telsque,parexemple,vitaminesetminéraux,fibresetbactéries "probiotiques" –peut avoir desbienfaits pour la santé. Il existedifférents typesd’allégations de santé. Par exemple, les affirmations selon lesquelles un aliment peutcontribuer à renforcer les défenses naturelles de l’organisme ou améliorer les facultésd’apprentissage sont appelées des allégations fonctionnelles génériques. On trouveégalementdesallégationsportantsurlaréductiondurisquedemaladiesousurlaprésencede substances susceptibles d’améliorer ou de modifier les fonctions normales del’organisme,parexemple:"lesphytostérolscontribuentàlabaissedestauxdecholestérol,un facteur de risque dans le développement desmaladies coronariennes" ou "le calciumpeutcontribueràaméliorerladensitéosseuse".

L’European Food Safety Authority (EFSA) ou Autorité européenne de sécurité desaliments (AESA) est chargée par la commission européenne de vérifier le bien-fondéscientifique des demandes d’allégations, certaines étant déjà utilisées actuellement oud’autres étant proposées par des industriels qui souhaitent soumettre des allégations auprocessusd’autorisationdel’UE.Cesinformationssontensuiteutiliséescommefondementscientifique par la Commission européenne et les États membres pour décider s’ilsautorisent ou non l’utilisation de ces allégations. Jusqu'en 2007, un industriel quimet unproduitsurlemarchén’apasobligationdefournirlespreuvesscientifiquesquisous-tendentles allégations qu’il utilise. L’évaluationdes allégations est réalisée auniveaunational parl'ancienneAgence françaisede sécurité sanitairedesaliments (AFSSA)aposteriori, c’estàdireunefoisleproduitdéjàsurlemarché.AinsienFrance,encasdedoutesurlapertinenced’uneallégationetsanatureà"tromperlepublic",laDGCCRFsaisitl’AFSSA.L’agenceévaluealors le dossier fourni à laDGCCRFpar l’industriel. Cependant, l'entreprise qui utilise uneallégationdoitpouvoir justifierdesavéracité.Ainsi,uneallégationdoittenirsapromesse,être cohérente avec les recommandations nutritionnelles nationales, et être fondéescientifiquement.Uneallégationn'estpasfondéelorsqu'elleesttropvague(ex:"contribueàdiminuerlestress"),ouprécisemaisnonmesurable(ex:"favoriselebronzageetprotègelapeaudesméfaitsdusoleil").Entre2000et2008,l'Agenceaainsiévalué590"doutes"enmatière d'allégation. Près de 80% étaient légitimes : seules 20% des allégations étaientfondéesscientifiquement.

Depuis l'entrée en vigueur du règlement 1924/2006 CE, l'ANSES n'est plus

systématiquementsollicitéepourl'évaluationdesallégations.Eneffet,depuiscettedirectiveeuropéenne,lesallégationsfontl'objetd'uncadreharmonisé.Lesallégationsnutritionnellesautoriséessontinscritesàl'annexedecerèglement.Depuis2007etl'entréeenvigueurdecetexte,c'est l'EFSAquiestchargéed'évaluer lesallégationsdesantéapriori,c'est-à-direavant la mise sur le marché, et c'est la Commission européenne qui établit le registre

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d'allégationsautorisées.L'ANSESparticipeàl'évolutiondelaréglementationenlamatière,en fournissant un appui scientifique et technique à l'Etat français. Ainsi, dans le cadre del'élaboration du registre communautaire des allégations autorisées, l'ANSES a évalué unepartie de celles soumises par les industriels français. La DGCCRF a donc transmis à laCommissioneuropéenneune listedéjà consolidéeauniveaunational.Doncnous sommespasséd'unsystèmed'autorisationaposteriorioùl'industrielpouvaitafficherlibrementuneallégation,uncontrôlepouvantêtreeffectuéparlaDGCCRFparlasuite,àuneautorisationen amont par la commission européenne qui a établi une liste fixe d'allégationsfonctionnelles génériques et portant sur la réduction du risque de maladies. (Sources :ANSES,EFSA,DGCCRF,Commissioneuropéenne)

Cependant,encequiconcernelescomplémentsalimentairesàbasedeprobiotiques,il

n'existeàl'heureactuelleaucuneallégationdesantés'yréférantetquiestautoriséniparlacommissioneuropéenne,niparl'Etatfrançais.Eneffet,depuisladirectivede2007,l'EFSAaanalysé toutes les demandes des industriels concernant l'autorisation d'apposer uneallégationdesantésurleurproduitsettoutesontétérejetéescarlesétudesfourniesparleslaboratoires n'ont pas révélé d'efficacité ou demodification notoire d'une physiologie del'organisme par les probiotiques testés. C'est à dire qu'à ce jour, selon l'EFSA, lesprobiotiques n'apportent pas d'intérêt dans l'alimentation humaine et dans le bonfonctionnement du système immunitaire ou digestif. De ce fait, sur les emballages descomplémentsalimentairescontenantdesprobiotiques,letermemêmede"probiotique"neserajamais inscritetaucuneallégationsanténepourraêtreinscriteconcernantl'usagedumicro-organisme utilisé. En revanche, les compléments alimentaires contenant desprobiotiquessontsoumis,commelesmédicaments,àdesrèglesd’étiquetageparticulières.Doiventfigurersurl’emballageuncertainnombred’informations:

- Lenomexactduoudesprobiotique(s)(genre,espèce,souche)etlaconcentrationdeceux-ciexpriméenUFCpargramme,millilitreouunitédeconditionnement

- La dose journalière de produit dont la consommation est recommandée, avec unavertissementindiquantqu'ilestdéconseillédedépasserladosejournalièreindiqué

- Desrecommandationsd'utilisationetdeconservationduproduit- Unedéclarationvisantàéviterque lescomplémentsalimentairesnesoientutilisés

commesubstitutsd'unrégimealimentairevarié- Unavertissementindiquantquelesproduitsdoiventêtretenushorsdelaportéedes

jeunesenfants- L'adressedelasociétécommerciale

(Source:Décretn°2006-352du20mars2006relatifauxcomplémentsalimentaires)

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Figure16:Décrypteruneétiquetted'uncomplémentalimentaireprobiotique

(SourceISAPP)

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En conclusion de cette partie, malgré une définition assez consensuelle du termeprobiotiqueédictéeparl'OMS,cettedénominationmêmeàl'heureactuelleenFranceetenEuropenepeutêtrerevendiquéeparlesindustrielscommercialisantlesproduitsàbasedeprobiotiques.Dufaitd'unelégislationstricteconcernantlesallégationsdesanté,iln'estpaspossiblepourleslaboratoiresd'afficherlespropriétésexactesdesmicro-organismesutilisésdansleurpréparation,hormislesproduitsayantstatutdemédicamentavecAMM.Ils'agiradoncpourleprofessionneldesantéquiserahabilitéàconseillerouprescrirecesproduitsdes'assurer que la souche contenue sera utile et adaptée à l'usage que veut en faire leconsommateur. Cependant, tous les produits contenant des probiotiques ne sont pasvendusdansdesstructuresdeventedeproduitsdesantécommeunepharmacie.Endehorsdecela, ilexisteplusieursqualitésdecomplémentsalimentairesàbasedeprobiotiques. Ils'agira également de vérifier la conformité du produit aux recommandations édictéesnotamment par l'OMS ou l'ANSES, et de contrôler la qualité du produit en évaluant lessystèmesqualitésmisenplaceparl'industriel,lesprocédésdefabricationainsiquelestestseffectuésparlelaboratoirepouranalyserlescaractéristiquesdelasouche.Nousallonsvoiràprésentàquoipeuventservircesprobiotiques,quelssontleurusage,leurmoded'actionetleursécuritéd'emploi.

2) Usages,indications,sécuritéd'emploi

Les bactéries lactiques sont utilisées pour la conservation de la nourriture parfermentationdepuisdesmilliersd’années.Lafermentationdesalimentsleurdonneungoûtparticulieretdiminue lepH, cequiempêche la contaminationpardesagentspathogènespotentiels.Lafermentationconcerneglobalementunvasteensembledeproduitsagricoles(céréales, racines, tubercules, fruits, légumes, lait, viande,poissons,etc).Ainsi,depuisdescentaines d'années, les probiotiques sont utilisés dans des processus de fermentationalimentaire de produits laitiers tels que le kéfir, le yaourt, le beurre ou le fromage,maiségalementdesalimentsnonissusdulaitanimalcommelepain,levin,labière,levinaigreouencore la choucroute. Ce sont principalement les enzymes contenues dans les micro-organismes utilisés qui vont avoir un intérêt comme la lactase qui va digérer le lactosecontenudanslelaitendiversproduitscequivamodifierlaconformationdesprotéinesdulaitetchangerlatextureduproduitfinal;ouleprincipedelafermentationalcooliquequivatransformer les sucres contenusdans certainesboissons issuesdeplantesoude fruits enalcool.

Le début de la recherche concernant les probiotiques et leur intérêt en santé,notamment intestinale, a consisté en l'étude des yaourts principalement. Ce sont despréparations laitières originaires des Balkans et qui ont une origine très lointaine, car onretrouve des traces de ce type de préparations laitières depuis le début de l'élevage desmammifères produisant du lait dans l'Antiquité. Le yaourt est un produit issu de lafermentation du lait grâce à l'action de deux ferments : Streptococcus thermophilus etLactobacillus delbrueckii subsp. bulgaricus. Des ingrédients tels que des préparations defruitoudusucrepeuventyêtreajouté.Sateneurenmatièregrassevarieselonqu'onutilise

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dulaitécrémé,demi-écréméouentier.Pourdesraisonssanitaires,leplussouvent,lelaitestpasteurisé ou stérilisé. Le lait (éventuellement additionné de poudre de lait) est,successivement,pasteurisé,homogénéisé,refroidiàlatempératureidéaledefermentationetensemencédesdeuxfermentsprécités.Lactobacillusbulgaricusproduitessentiellementde l'acide lactique qui intervient entre autres dans le goût acide du yaourt tandis queStreptococcus thermophilus synthétise à la fois de l'acide lactique et de l'acide formique.L'actiondecesfermentssurlelaitestappelée"fermentationlactique",ellesedérouleàunetempératurevoisinede43°C,dansuneétuveoudansunecuve.L'acidelactiqueproduitparles ferments, en augmentant l'acidité du lait, provoque la précipitation de certainesprotéines, les caséines : le lait prend en masse et on obtient du yaourt. Après lafermentation, les yaourts sont réfrigérés et stockés en chambre froide. Lesmodalités destockage et de conservation (durée et température) sont bien encadrées (la températuredoittoujourssesituerentre0°et6°etladatelimitedeconsommationestcourte).

Pour pouvoir désigner le produit fini "yaourt", conformément à la réglementationfrançaise,lesdeuxsouchesdefermentsdevrontrestervivantestoutaulongduprocessusdefabricationainsiquedansleproduitfini,àraisond'aumoins10millionsd'UFCpargramme,etcejusqu'àladatelimitedeconsommation.Lafabricationdesautreslaitsfermentéssuitlemême type de fabrication ; seuls les ferments et les paramètres de fermentation(température, durée,...) diffèrent. Dans le langage courant, lemot "yaourt" recouvre unelargegammedelaitagesfermentésconditionnésenpot.MaisledécretfrançaisN°88-1203relatifaux laits fermentésetauyaourtdéfinit trèsprécisément la significationdes termes"laitfermenté"et"yaourt":cesappellationssontprotégées.Unlaitfermentéestunproduitlaitierpréparéàpartirdedifférentstypesdelaits(écréméounon,concentré,enpoudre,...),ayantsubiuntraitementthermiqueaumoinséquivalentà lapasteurisationetensemencéavecdesmicroorganismesspécifiques.Ladénomination"yaourt"ou"yoghourt"estréservéeau lait fermenté ensemencé des seules bactéries lactiques Lactobacillusbulgaricuset Streptococcus thermophilus. En France, les produits traités thermiquementaprès fermentationn'ontpas ledroit à l'appellation "yaourt".Deplus, dansnotrepays, àpartirdumomentoùunlaitfermentécontientunouplusieursfermentsautresquelesdeuxbactéries du yaourt, il ne peut plus prétendre à la dénomination "yaourt". On doit doncl'appelersimplement"laitfermenté".Cetterestrictionestnationale.

Auniveauinternational,l'ajoutd'untroisièmefermentauxdeuxfermentsspécifiques

duyaourtpermettoujoursl'utilisationdumot"yaourt"dansladénominationdevente...EnFrance,ontrouvedeuxgrandstypesdelaitsfermentés,ceuxquisontensemencésavecdeslactobacillesL.acidophiluset/ouL.casei,ceuxquisontensemencésavecdesbifidobactéries.Au-delà des ingrédients laitiers qui doivent représenter auminimum 70% du produit fini,d'autres ingrédients peuvent être ajoutés permettant ainsi de multiplier les recettes etd'offrirauxconsommateursunelargepalettedeproduits:sucrés,auxfruits,auxcéréales...L’utilisation de produits laitiers comme matrice pour l’ajout de probiotiques estextrêmementlogique,carlescomposantsdulaitpermettentlacroissancedessouchesetla

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productiondesubstances,tellequel’acidelactique,etpermetd’inhibercettecroissanceauniveaudésiré135.

Doncon l'avuprécédemment, la symbioseentre la floremicrobienneet l’hôtepeutêtre optimisée par une intervention pharmacologique ou nutritionnelle sur l’écosystèmemicrobien de l’intestin en utilisant des probiotiques. Ces probiotiques peuvent agir sur lafloreoulemétabolismeintestinaldeplusieursfaçons,etainsiagirsurdespathologiesaigüesou chroniques par des modalités différentes. En voici quelques exemples que jedévelopperaiparlasuite125:Effetsimmunologiquespositifs:

- Activation desmacrophages locaux pour augmenter la présentation des antigènesaux lymphocytes B et augmenter la production d’immunoglobulines sécrétoires A(IgA)àlafoissurunplanlocaletsystémique,afindestimulerl'immunitéintestinalevoireglobale

- Modulation du profil des cytokines et augmentation des cytokines anti-inflammatoiresetdiminutiondecellespro-inflammatoires

- Inductiond’uneréponseréguléeauxantigènesalimentairesetainsipréventiondesphénomènesd'allergietypésTh2

Effetsnonimmunologiquespositifs:- Digestiondecertainsnutrimentspeudigestiblesafind'améliorerleconfortdigestif- Modification du pH local de manière à créer un environnement défavorable aux

pathogènes- Production des bactériocines, "antibiotiques" naturellement sécrétés par les

bactériesprobiotiques,afind'inhiberlespathogènes- Elimination des radicaux superoxydes et action antioxydante et préventive contre

certainscancers- Stimulationdelaproductiondemucusparl’épithéliumetaméliorationdelafonction

delabarrièreintestinale- Compétitionpourl’adhésionetpourlesnutrimentsaveclespathogènes- Modificationdestoxinesdérivéesdespathogènes

Uneffetstimulantdeplusieurssouchesprobiotiquessurladigestiondulactoseaété

démontrépardesétudesphysiopathologiques invivochez l’hommeadultehypolactasiqueouayantunsyndromedugrêlecourt127:

- Les probiotiques contenus dans le yaourt c’est à dire les souches Lactobacillusdelbrueckliisubsp.BulgaricusetStreptococcusthermophilusaugmententladigestiondulactosedansl’intestingrêle,parcomparaisonàunlaitstandard,oufermentépuisthermisé (où les ferments seront donc inactivés). Le yaourt améliore aussi latolérancecliniqueaulactose,sansquecelle-cisoitenstrictecorrélationavecledegrédemalabsorptiondudisaccharide.

- De nombreux autres probiotiques ont aussi un effet favorable, bien qu’en généralquantitativement moins prononcé. Ainsi, les laits fermentés suivants améliorentl’absorption du lactose (par ordre d’intensité décroissante au test d’excrétion

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respiratoiredel’hydrogène):laitsàL.Bulgaricus,àS.thermophilus,àL.acidophilus.Chez le volontaire sain, Saccharomyces boulardii augmente l’activité lactasique dujéjunum.

- Quantitativement, les souches probiotiques du yaourt réduisent la mauvaisedigestion d’une charge en lactose. Il n’y a pas d’effet dose réponse clairementrapporté ; les doses habituellement étudiées correspondent, pour le yaourt, auxdosescommerciales.

Lesmécanismesde l’effetfavorabledesprobiotiquessur ladigestiondulactosesont

principalement, l’ajout intra-luminal de lactase d’origine bactérienne (lactase résistantprobablement à l’hydrolyse enzymatique intraluminale)127 libérée par lyse cellulaire,notamment sous l’effet de l’acidité gastrique et des sels biliaires dans le grêle proximal,et/ou produite par les corps bactériens vivants et en transit. Egalement, l'activité de laperméase bactérienne (du probiotique) contribue à la digestion du lactose, permettantl'entrée de celui-ci dans la cellule probiotique et son hydrolyse, ce qui implique laconservation, au moins partielle, de l'intégrité bactérienne. Enfin peut-être, et de façoncomplémentairepourcequiestduyaourt,unralentissementdutransitoro-cæcalet/oudelavidangegastrique.Desdonnéespréliminairessuggèrentquel’ajoutintra-luminald’autresenzymes digestives (sucrase, lipase) pourrait être assuré par des vecteurs probiotiquesnaturelsougénétiquementmodifiés.Ceseffets sur ladigestiondu lactoseontétévalidésscientifiquementetontmêmeétéapprouvésparl'EFSAquiaattribuéauxprobiotiquesduyaourt (Lactobacilli delbruecklii subsp. Bulgaricus et Streptococcus thermophilus) uneallégationdesantéconcernantuneaméliorationde ladigestiondu lactose.C'estd'ailleurslesseulsprobiotiquesàavoirobtenusuneallégationdesantéparl'institutioneuropéenne.La digestion par l'organisme d'autres nutriments peut être améliorée par l'ingestion deprobiotiques comme le saccharose, le glucose, le calcium, le magnésium ou l'eau et lesodium.Cependant,cetteaméliorationn'apasétévalidéescientifiquement127.

En ce qui concerne les diarrhées aigües, l’effet bénéfique de souches définies deprobiotiques a parfaitement été démontré à l’aide de Lactobacillus rhamnosus GG etBifidobacterium lactisBB-12pour lapréventionetpour le traitementde ladiarrhéeaiguëcauséeprincipalementpardesrotaviruschezlesenfants132.Outrelesinfectionsàrotavirus,denombreusesespècesbactériennescausentlamortetlamorbiditéchezl’homme.Ilyadebonnespreuvesinvitroquecertainessouchesprobiotiques,etnotammentSaccharomycesboulardiietLactobacillusrhamnosusGG,peuventinhiberlacroissanceetl’adhérenced’unegamme d’entéropathogènes, et des études sur les animaux ont indiqué des effetsbénéfiquescontredesagentspathogènestelsqueSalmonella.Ilressortdecertainesétudesde la diarrhée du voyageur, où l’on suppose que certains des agents pathogènesresponsablessontdenaturebactérienne,queleseffetsbénéfiquespeuventaugmenteravecl’administrationdeprobiotiques.UnerevueCochranedesprobiotiquesentraitementdeladiarrhéeaiguëinfectieusechezl’adulteet l’enfant(23études,1917participants)rapporteuneguérisondeladiarrhéeplusfréquentesousprobiotiquesà3jours(RR:0,67;IC95%:0,55-0,77)età4jours(RR:0,36;IC95%:0,30-0,44),avecuneréductiondeladuréedela

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diarrhée de 29,20 heures (IC95 % : 25,14-33,25). Une méta analyse des probiotiques enpréventionde ladiarrhéeaiguë(34études,4844participants)rapporteuneffetpréventifchezl’enfantcommechezl’adulte136. Lesmécanismesquisous-tendentuneaméliorationdessymptômes lorsdediarrhéesaigües notamment infectieuses ne sont pas connus précisément. Cependant, on supposeque les actions des probiotiques vont agir à la fois sur unemodulation de l'immunitéintestinale, sur un potentiel antibactérien et une compétition pour la survie entremicro-organismes bénins et malins. L’homéostasie intestinale résulte de nombreux paramètresmutuellement dépendants. L’établissement d’un équilibre dépend de la capacité de lamuqueuse intestinaleàabsorber lesnutriments,deséchangeshydro-électrolytiquesetdumaintiendelabarrièreépithélialevisàvisdespathogènesetdesantigènesalimentaires.Cetéquilibre implique de multiples interactions entre les cellules épithéliales, endocrines,stromales, immunitaires et la microflore. Tout dysfonctionnement peut conduire à uneinflammation chronique locale, conduisant au déséquilibre des mécanismes d’absorption(nutriments, ions) et de sécrétion (ions,mucus, IgA). Lamicroflore bactérienne tient uneplace importantedans lamaturationet l’intégritéépithélialeainsiquedans lamodulationdesréponsesimmunitairesvisàvisdesantigènesluminaux.Toutcommelaflorerésidente,lesprobiotiquespeuventinterféreraveclesystèmeimmunitairedel’hôte.Ilstransitentdansla lumière intestinale et sont normalement séparés du système immunitaire local par labarrière épithéliale. Ils peuvent communiquer avec les cellules de la lamina propria soitindirectementenenvoyantdessignaux(cytokines)vialesentérocytes,soitdirectementparcontact, en casde translocation vers la laminapropriaet les ganglionsmésentériques.Cephénomène de translocation estminime en condition normale. Les probiotiques peuventaussilibérerdescomposésdanslalumièreintestinale,quisontsusceptiblesd’êtreabsorbésparl’épithéliumintestinaletd’agirsurlescellulesimmunitaires.

L’immunité innée utilise essentiellement desmécanismes visant à éliminer de façonrapideetnonspécifiquedesmicro-organismespathogènesparlesphagocytesouàéliminerdesmoléculesdunon-soiparlastimulationdel’activitédeslymphocytesnaturalkiller(NK).Cesmécanismes impliquent la phagocytose de bactéries pathogènes par lesmacrophagesvia une reconnaissancedemotifs bactériens hautement conservés appelés "PAMPS"pour"Pathogen Associated Molecular Patterns", par les cellules immunitaires. Les récepteursimpliqués dans la reconnaissance de cesmotifs sont les TLRs (Toll-like receptors), et leuractivation induit une cascade de signaux intracellulaires conduisant à la translocationnucléairedufacteurdetranscriptionNFκBetàlalibérationdecytokinesoudechemokinespro-inflammatoirestellesqueleTNFαoul'IL8.TLR4estunrécepteurdulipopolysaccharide(LPS), composant majeur des parois de bactéries gram négatif, TLR2 reconnaît lepeptidoglycanedesbactériesgrampositif,TLR3l’ARNdoublebrin,TLR5laflagellineetTLR9l’ADNbactérien.L’immunitéinnéeestgénéralementévaluéeparlerelargagedecytokines,laphagocytoseoul’activationNKsousl’effetstimulantdesbactéries(parois).

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Lesétudesinvitroindiquentquedesprobiotiquespeuvententraînerunestimulationde la sécrétiondecytokines,Th1 leplusgénéralement (IFNg,TNFa, IL-1b),par les cellulesimmunitaires,avecdeseffetsdépendantdessouches127.Cependant,cesétudesimpliquentuncontactdirectbactérie/celluleimmunitaire,cequin’estprobablementpasreprésentatifdelaphysiologieintestinale.Lesétudesinvitronetiennentpascomptedel’environnementcytokinique et des interactions avec d’autres types cellulaires intervenant in vivo, ce quipose la question de la pertinence des réponses obtenues dans ce contexte simplifié. Lasécrétion de cytokines étudiée sur les cellules immunitaires circulantes (et pas sur lescellules locales intestinales) ne reflète probablement pas les phénomènes locaux. Parexemple, on sait que le tonus suppresseur (TGFβ, IL-10) présent dans la muqueuseintestinale régule négativement l’expression des récepteurs du LPS (CD14) sur lesmacrophageslocauxetquecescellulesisoléesdelalaminaproprianerépondentdoncpasoupeuauLPScontrairementauxcellulescirculantes.Aucuneallégationnepeutdoncêtreétayéesurcestestsinvitro.L’ensembledesétudescliniqueschezl’hommeconvergentversunemodulationde l’immunité innée (activationde laphagocytoseetde lymphocytesNK)par l’administration orale de différentes souches de lactobacilles et de bifidobactéries.Cependant,lesconséquencesréellessurunemeilleureefficacitédelaréponseimmunitaireen cas d’infections bactériennes ou virales sur l’issue de cette infection (rapidité de laguérison,influencesurlestauxd’anticorps,incidencesurlestauxd’infectiondansuneclassed’âge,etc…)nesontquetrèspeuconnues.

L’immunité adaptative est spécifique d’un antigène et sera plus lente à mettre enœuvrequel’immunitéinnée.Aprèsuncontactavecunantigèneouunmicroorganisme, lesystème immunitaire répond par la production d’anticorps protecteurs (IgG, IgA) et parl’activationdecellulesTCD4+ouCD8+.Cetteimmunitéspécifiquepeutêtrelocalepourlaprotectiondesmuqueuses (IgA),oupériphérique (IgG)pouruneréponseplusgénéraledel’organisme.Lorsquedesantigènesinfectieux(antigènesbactériensouviraux)pénètrentparvoie orale, une réponse IgA sécrétoire est induite visant à bloquer l’entrée des agentspathogènes dans lamuqueuse. Lorsque l’on administre une flore intestinale à des sourisaxéniques, on observe l’apparition rapide de plasmocytes à IgA dans la lamina propriaintestinale.Iladoncétésuggéréquel’administrationdeprobiotiquesparvoieoralepourraitêtre utilisée pour activer l’immunité sécrétoire. Cependant, une augmentation des IgA neveutpasdirenécessairementeffetbénéfiquesurlasantésaufdanslesmodèlesinfectieux.La plupart des études ont concerné l’enfant : dans les diarrhées à rotavirus, Lactobacillusrhamnosus GG induisait une augmentation de la sécrétion d’IgA anti-rotavirus plusimportante lorsque les bactéries étaient vivantes127. Ces résultats indiquent la possibilitéd’unrenforcementdel’immunitésécrétoireIgAvisàvisdepathogènesvirauxoubactériens,au niveau de la muqueuse intestinale, par certains probiotiques. Cependant, le nombred’étudesresterestreint,surtoutchezl’adulte.Deplus,lacorrélationexistantentrelestauxplusélevésd’IgAsécrétoiresetlapréventiondesinfectionsrestecontroversée.

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Ingérer des micro-organismes à activité probiotique n’est pas sans effet pour lesystème immunitaire : en condition physiologique (Homme sain) et pour de nombreusessouches,laplupartdesétudesallantdelacelluleisoléeàl’essaicliniquemontrentuneffetimmunomodulateur (immunité innée et immunité spécifique notamment Th1). Lesconséquences de cet effet immunomodulateur sur la santé ne sont pas connues. Danscertaines conditions pathologiques, certains probiotiques exercent un effet anti-inflammatoiredontlemécanismeresteàélucider.Dansl’étatactueldenosconnaissances,on ne peut pas établir une liste positive de marqueurs universels de l’influence desprobiotiques sur le système immunitaire. La relation entre un effet biologique surl’immunité,quelqu’ensoitlesens,etuneffetsantéestàdémontreraussibienchezlesujetsainquedanslesconditionspathologiques.

D'autresmécanismespeuventexpliquerl'intérêtdecertainsprobiotiquesdanslaluttecontrelesdiarrhéesinfectieuses,ils'agitdel'effetditbarrièreetlerôledecertainessouchesdans lemaintiende lamuqueuse intestinale.On l'avu, leseffetsprotecteursdecertainessouches contre les infections intestinales s'exercent par des effets immunomodulateurs,mais aussi par l'inhibition de la croissance de bactéries intracoliques, la synthèse desubstances antibactériennes et la réduction du pH intracolique25. Les effets les mieuxdocumentés concernent l'inhibition de l'adhésion de bactéries pathogènes, lamodulationdes fonctions macrophagiques et l'élimination de toxines. L'inhibition de l'adhérence desbactéries pathogènes s'exerce par une compétition pour les mêmes récepteurs, uneexpression accrue des ARN messagers des mucines, la production de bactériocines(antibiotiques naturellement sécrétés par les bactéries), voire des modifications del'environnement comme la production de radicaux libres, d'acides organiques ou deperoxyded'hydrogène. La stimulationdes fonctionsdesmacrophagespar lesprobiotiquesentraineuneaugmentationdesphénomènesdephagocytosedeparticulesinertesou,danscertainscas,d'organismesvivantscommecelaapuêtredémontrépour les salmonelles25.Enfin,plusieursétudesontconfirméquecertainsprobiotiquespouvaientinhiberetparfoiséliminer des toxines (toxine A de Clostridium difficile pour Saccharomyces boulardii,aflatoxineB1pourlesbifidobactéries).

Expérimentalement, la flore commensale et divers probiotiques agissent sur lafonction barrière et la perméabilité intestinale127. Chez la souris axénique, il y aaugmentation de la résistance électrique muqueuse et diminution du transport desmacromolécules,c'estàdirequelamuqueuseintestinaleestaltérée.Certainessouchesontmontréuneaméliorationdecertainsdommagescréésounaturelschezcertainsanimaux :restaurationdelafonctionbarrièred’animauxinvalidéspourlegènedel’IL-10,réductiondel’hyperperméabilité aux petitesmolécules induite par d’autres germes ou par des agentsviraux, augmentation de la résistance électrique transépithéliale de base et doncrenforcement de la barrièremuqueuse et diminution de la perméabilité de lamuqueusejéjunale.Lesdonnéesconcernantlamuqueusedigestivehumainesontencorelimitées,maiscertainessouchesontmontrélesmêmesaméliorationsquechezlesmodèlesanimaux127.Invivo, chez le volontaire sain, Lactobacillus rhamnosus GG réduit significativement

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l’hyperperméabilitéde lamuqueuse gastrique (maispas cellede lamuqueuse intestinale)aux disaccharides, induite par l’indométacine. Chez des patients subissant une chirurgieabdominale majeure, L. plantarum 299V ne modifie pas des indices cliniques jugésreprésentatifs de la fonction "barrière"du tractusdigestif (translocationbactériennedanslesganglionsmésentériques,colonisationbactériennegastrique,incidencedecomplicationsseptiquespost-opératoires).

Finalement, l’effet des probiotiques sur la barrière muqueuse non-immune sembleêtrelaconjonction:

- d’effetsdirectssurl’expressiondesmucines,surlemaintien(structure,localisation,phosphorylation) des protéines du cytosquelette et des jonctions serréesintercellulaires,donc sur la résistanceélectrique, laperméabilité, et les fluxhydro-ioniquestransépithéliaux

- delaprobableinterfacedeceseffetsavecleversantimmundelabarrièremuqueuse(adhérencebactérienneet interférenceavec lespathogènes,translocation,réponseimmune non-spécifique et de type humoral, interférence avec l’inflammation etréponsecytokinique).

D'autressouchesdeprobiotiquesontmontréuneactionsur lesfonctions "barrière"

del'intestin,commel'inhibitiondelatranslocationbactériennedueàlaporositéintestinale,ladiminutionde l'apoptosedesentérocytesetenaméliorant latrophicitéde lamuqueuseintestinale.Plusieursprobiotiquesontchezl'animaluneffetfavorable,àl'instardelaflorecommensale,surlafonctionbarrièredel'intestin,augmentantlarésistancetransépithélialeetdiminuant laperméabiliténotammentauxmacromolécules.Deseffetscomparablesontétéobservésinvitrosurdeslignéescellulairesintestinaleshumaines;aucuneextrapolationà la situation in vivo n'est actuellement possible. Certains probiotiques diminuent chezl'animallatranslocationintestinaledebactériespathogènes.Aucunedonnéepositivedecetype n'est disponible chez l'homme : plusieurs travaux en période péri-opératoire n'ontconstaté aucun effet protecteur des probiotiques testés sur des indices cliniques etbactériologiques de translocation.Quelques probiotiques expriment in vitro un effet anti-apoptotique,dansdeslignéescellulairesanimalesethumaines.Aucunedonnéedecetypen'est disponible en physiologie ni en clinique humaine, mais il s'agit d'un champd'investigationintéressant,notammentpourcequiestdesaffections(commelesmaladiesinflammatoires chroniques de l’intestin) associées à une augmentation marquée del’apoptose des cellules intestinales. Divers probiotiques expriment chez l'animal un effetinducteur d'activités enzymatiques intestinales. Quelques données comparables existentchezl'hommepourunpetitnombredeprobiotiques,maisdemandentconfirmation.

D'autres modes d'actions des probiotiques sur la physiologie intestinale ont étédémontrésetnotammentsurlasensibilitéetlamotricitéintestinale,cesdeuxaspectssontimportantscarilspermettentd'établirlespremiersliensentreprobiotiquesettraitementduSII.Uneperturbationdelasensibilitéviscéraleestlaprincipaleanomalieobjectivemiseenévidenceaucoursdusyndromedel’intestinirritable.Chezl’animal,différentesexpériences

122

montrentque lesprobiotiquespeuventmoduler l’hypersensibilité viscéralepar lebiaisdeleurs propriétés anti-inflammatoires et neuro-modulatrices137. En ce qui concerne lamodulation de la motricité colique, la seule variable étudiée a été le temps de transitintraluminaloro-analoucolique,totalet/ousegmentaire.Unesouchedepropionibactériesaccélère le transit coliquegauche chez l’adulte sain (essainon contrôlé).Un lait fermentépar Bifidobacterium animalis souche DN-173 010 et par des bactéries lactiques accélèresignificativementletransitoro-analchezdesvolontairessainsâgésde60à75ans,defaçond’autantplusprononcéequeletempsdetransitinitialestpluslong(essairandomisé)127.Ceteffetaétéconfirmédansunautreessaicontrôlérandomisé(B.animalissoucheDN-173010etsouchesduyoghourt)chezdesvolontairessainsâgésde50à75ans : l’effetaété jugédosedépendantetprolongéjusqu’à6semainesaprèsl’arrêtduprobiotique.CeteffetdeB.animalissurletempsdetransitcoliquetotaletsigmoïdienaétéconfirméchezdesfemmesvolontairessainesâgéesde18à45ansdansunessaicross-overendoubleaveugle:poids,pH,massebactérienneetconcentrationsd’acidesbiliairesdessellesn'étaientpasmodifiés.LemélangeprobiotiqueVSL#3n’apasd’effet,aucoursdusyndromede l'intestin irritable,surlavitessedutransitgastro-intestinaltoutenatténuantcertainssignescliniquestelsquelemétéorismeabdominal138.Le(s)mécanisme(s)del’effetdesprobiotiquessurletempsdetransit intraluminal n’est (ne sont) pas établi(s). Donc certains probiotiques accélèrent letransit intraluminal oro-anal ou le transit colique, total et/ou segmentaire notammentsigmoïdien;l'impactclinique,chezl'hommesain,deceteffetaccélérateurresteàpréciser.Ladémonstrationd’uneaccélérationdutransitchezdessujetssainsnegarantitpasuneffetcliniquesignificatifchezdessujetsseplaignantdeconstipation.

Ilexisteégalementd'autresindicationsdanslesquelleslesprobiotiquesontmontréunintérêt dans leur utilisation chez des patients sains ou malade, et également dans despathologies extra-intestinales comme : l'allergie, l'atopie, les MICIs, l'éradicationd'Helicobacter pylori au niveau de l'estomac, une prévention du cancer du côlon, lesinfections urinaires, les vaginoses bactériennes ou candidosiques, ou tout simplement leconfortou le"bien-être" intestinal25,125,127,132.Toutesces indicationsouallégationsn'ontàl'heureactuellepasfaitl'objetd'étudessérieusesrandomiséescontrôléesendoubleaveuglesurdelargespopulationetn'ontdoncàcejourretenuel'attentiondequelconqueagencedesanté internationale ou nationale comme l'EFSA ou l'ANSES. Mais les études présentéespermettent d'obtenir d'avantages d'informations sur le microbiote intestinal et les effetspossiblesd'unesupplémentationenagentsbactérienscommensauxdansnotrealimentationou par des agents médicamenteux. Les modalités d'action des probiotiques dans cesdomaines recoupent celles vues dans les indications qui nous intéressent ici mais cellespourraientfairel'objetd'unethèseentièredoncjenefaisiciquelesciter.

Concernant lasécuritéd'emploidesprobiotiques, laconsultationFAO/OMSde2002estime qu’une série de principes généraux et de critères pratiques doit être établie pourélaborer des directives sur la manière de tester des micro-organismes probiotiquespotentielsdonnés,etd’enprouverl’efficacité,afinderéduirelerisquequ’ilsprovoquentousoientassociésàl’étiologiedelamaladie,aulieud’exerceruneffetbénéfiquesurlasanté

123

lorsqu’ils sont administrés à l’homme. Ces directives devraient reconnaître que certainesespèces peuvent nécessiter une évaluation plus rigoureuse que d’autres. Sous cet angle,l’évaluationde la sécuritéexigeraaumoinsquelquesétudesàeffectuerchez l’homme,etdoivent aborder des aspects de l’utilisation finale proposée de la souche probiotique.D’aprèslesinformationsdisponibles,leslactobacillessontutilisésdepuislongtempscommeprobiotiques sans risque établi pour l’homme, et cela reste la meilleure preuve de leursécuritésanitaire.Parailleurs,aucunepropriétépathogèneoudevirulencen’aététrouvéechez les lactobacilles ou les bifidobactéries132. Ceci étant établi, il est arrivé que danscertaines conditions, certaines souches de lactobacilles ont été associées à des effetsnégatifs, par exemple à de rares cas de bactériémie. Toutefois, selon une récente étudeépidémiologiquederapportssurdescasdebactériémieparlactobacillessystématiquementcollectésdansunpays,l’incidenceoulafréquencedelabactériémien’augmententpasavecl’utilisationaccruedelactobacillesprobiotiques.

En ce qui concerne Saccharomyces boulardii, de très rares cas d'hémocultures

positives ou de fongémies ont été publiées25. Dans les cas documentés, tous les patientsétaientporteursd'uncathéterveineuxcentraletétaient,pourcertainsd'entreeux,dansunétatd'immunodépressionqui aprobablementmajoré l'expressionde la symptomatologie.LesfongémiesàSaccharomycesboulardiiontcédé,soitspontanémentàl'arrêtduproduit,soit sous l'effet d'un traitement antifongique ; dans certains cas, l'ablation du cathéterveineux central a été nécessaire. La colonisation du cathéter lors de la manipulation desachets ou de gélules paraît être le mécanisme étiopathologique le plus probable. Enconséquence, il paraît judicieux de contre-indiquer l'administration de Saccharomycesboulardiilyophiliséchezlespatientsporteursd'unevoieveineusecentrale,d'autantpluss'ilssontenétatd'immunodépression.

Enconclusiondecettepartiesurl’évaluationdurisquesanitairedesprobiotiquessur

l’Homme, le groupe d’experts de la commission FAO/OMS recommande que les souchesprobiotiques soient testées afin d’assurer la sécurité sanitaire de la population. Ilrecommandedonc129:

- Dedéterminerlesmodèlesrésistantsauxantibiotiques,- D’évaluercertainesactivitésmétaboliquesdessouches,- D’évaluerleseffetssecondairesdurantlesétudesinvivo,- D’effectuer une surveillance épidémiologique des réactions secondaires survenues

chezlesconsommateursdesproduitsprobiotiquesaprèsleurmisesurlemarché,etleseffetsàlongtermedecesconsommations,

- Decontrôlerlessouchesquipeuventproduiredestoxines,- Dedéterminerl’activitéhémolytiquedecertainessouches,

Toutceladanslebutdequalifierlessouchesprobiotiquesde"GenerallyRecognizedasSafe"(GRAS),c’est-à-dire,denonpathogène.

124

3) Etudes et essais cliniques dans le traitement du syndrome de l'intestinirritable

Les études cliniques concernant l'utilisation des probiotiques dans le traitement du

syndromedel'intestinirritablesontnombreusesetvariées.Eneffet,ellesdiffèrententermed'échantillon de population, de robustesse dans leur méthodologie (contrôlées,randomisées,doubleaveugle…)maisaussidescritèresd'améliorationdessymptômes.Cescritèrespeuventprendreencomptedifférentsaspects cliniquesde lamaladiecomme : ladouleur, lesballonnements, leconfortdigestif, ladiarrhée, laconstipationou laqualitédevie.Lapriseencomptedecescritèresestimportantecarc'estencelaquelesétudesserontamenées à être puissantes ou sans intérêt. Car malheureusement, de nombreux essaisconcernantlesprobiotiquesetleSIIsontdemauvaisequalitéavecpeudesymptômesprisen compte. De plus, certains essais peuvent paraître contradictoires avec des effetsantagonistesprouvéspourunemêmesouche.Etc'estencelaqueleprofessionneldesantéamenéàconseillerouprescriredesprobiotiquesàunpatientdoitêtretenudeconnaîtrelessouches validées ou du moins qui ont le plus de chances d'avoir un intérêt dans lapathologie,cequin'estpasfacileàdéterminer.Jetenteraidanscettepartied'énumérerlesméta-analyses, le plus souvent, ou les essais ayant un intérêt dans le SII de manièrerésumée, car faire une liste de toutes les études concernant n'importe quelle souche deprobiotiqueet sonaction sur le SII ou ses symptômes serait fastidieuxet sans intérêt.Demême, certaines souches connues dans la littérature scientifique car présentes dans denombreusesétudesne se retrouvepas forcémentdans les compléments alimentairesdesrayonnagesdenospharmacies,alors je tenteraiégalementdansunsecond tempsdevoirl'intérêt des compléments alimentaires probiotiques le plus souvent vendus et conseillésdansnospharmaciesfrançaises.

Chez les patients souffrant d’un syndrome de l’intestin irritable, plusieurs étudescontrôlées ont été réalisées avec des résultats pour l’instant discordants137. On note uneréduction des douleurs abdominales chez tous les patients (n = 20) recevant pendant 4semaines Lactobacillus plantarum 299v, la moitié seulement (11 sur 20) étant amélioréedans le groupe placebo. Une réduction du ballonnement a été décrite au cours de deuxétudes testant Lactobacillus plantarum DSM9843 ou le mélange probiotique VSL#3.Inversement, troisétudesn’ontpasmontrédebénéficescliniques lorsde l’ingestiondeL.casei GG, L. plantarum 299v ou L. reuteri ATCC55730. Enfin, Saccharomyces boulardiiamélioreladiarrhée,maispaslesautressymptômes,chezdespatientsayantunsyndromede l’intestin irritable diarrhéique. Dans une étude récente incluant 75 patients lors depériodesd’ingestion,puisd’observation longues,Bifidobacterium infantis35624auneffetbénéfique supérieur au placebo, mais également à un autre probiotique, Lactobacillussalivarius UCC4331, autant sur les symptômes individuels (inconfort et douleursabdominales, ballonnements et difficultés d’évacuation) que sur un score symptomatiqueglobal.Cerésultatadeplusétéconfirméaucoursd’uneétudepragmatiqueayantinclus362patients;lessymptômesetlescoreglobalsontréduitsd’environ20-25%lorsdel’ingestionpendant 4 semaines de Bifidobacterium infantis 35624 par rapport à l’ingestion d’un

125

placebo.Cerésultatestloind’êtrenégligeablesionlecompareàceluiobtenuavecd’autresthérapeutiquesproposéesetacceptéesdanscettepathologiefonctionnelle.

D'autressouchesdeprobiotiquesontété testéesdans leSII76.Laplupartdesétudessouffrentdefaiblessesméthodologiquesavecnotammentunnombredesujets inclustropfaibleetl’absencedeconfirmationdelasurviedelasoucheadministréesurdesanalysesdeselles.Lesétudessontaussidifficilementcomparablescarlessouchestestéesainsiquelesdoses administrées étaient différentes. Enfin, le recours dans certains essais à unecombinaison de probiotiques ne permet pas d’identifier la souche potentiellement active.Malgréces limitesméthodologiques, lesrésultatssontencourageantsdans lamajoritédesessais et le recours aux probiotiques pour soulager les symptômes demeure une pistethérapeutiquetrèsactuelle.Uneméta-analysetrèsrécentecolligeant lesrésultatsobtenuspardesétudesrandomiséeschez918maladesaconcluàlasupérioritédesprobiotiquesengénéralsurleplaceboavecunrisquedenepasêtreamélioréparletraitementde0,71(IC95%:0,570,88)etunNNTde4(IC95%:3-12).Sil’efficacitédesprobiotiquesestdeplusenplusprobable,l’identificationdessoucheslesplusintéressantessurleplanthérapeutiquedemeure laquestionactuelle139. LeseffetsdémontrésdedifférentessouchesprobiotiquesdansleSIIsontrésumésdansletableau8,d'aprèsl'articledeP.Ducrotté.Parmilesautressymptômesabdominaux,leballonnementabdominalétaitsouventaméliorédanslesessaiscliniques.

Tableau1076:souchesdeprobiotiquesayantunintérêtdansletraitementduSII.

Dans l'article d'Aragon et al. de 2010140, neuf essais ont évalué différentescombinaisons probiotiques (le plus souvent incluant Bifidobacterium, Lactobacillus etStreptococcus)chez772patientsetontmontréuneffetsignificatifdans l'améliorationdessymptômesdu SII. Deux essais impliquantBifidobacterium,menés parO'Mahony et al. et

Option thérapeutiques médicamenteuses et diététiques actuelles S75

osmotiques ou à base de macrogol sont à préférer aux laxatifs de lest dans le SII-C.

Dans le SII-A, le lopéramide à la dose de 2 à 12 mg/j réduit significativement le nombre de selles et améliore leur consistance [3,89]. Le recours au lopéramide doit être prudent dans le SII-A. En cas d’échec du lopéramide, la colestyramine peut être proposée car une malabsorption des acides biliaires existe chez un sous groupe de malades [90].

Conclusions

Plusieurs traitements ont une efficacité démontrée dans le SII mais ils permettent rarement d’améliorer les malades des différents sous-groupes de SII. De nouvelles options émergent actuellement mais seulement quelques nouvelles molécules sont dans le pipe-line et arrivent au stade des essais cliniques. Elles pourraient permettre d’augmenter nos moyens pharmacologiques d’agir sur les communications bidirectionnelles entre tube digestif et système nerveux central. Les essais cliniques détermineront également si la prise en charge thérapeutique des TFI repose sur une monothérapie, sur des combinaisons médicamenteuses ou sur l’association d’un traitement médicamenteux avec une prise en charge non pharmacologique.

Il est enfin difficile d’oublier que les différences indivi-duelles de réponse à un traitement donné sont génétique-ment déterminées. Cette susceptibilité génétique explique que, pour une dose donnée d’un médicament, un individu réponde de façon satisfaisante ou non au traitement et qu’il est exposé ou non aux effets secondaires du même médicament. L’essor de la pharmaco-génomique devrait

permettre de mieux définir les types de malades apparais-sant les meilleurs candidats pour les différentes classes thérapeutiques actuelles et en développement [91].

Conflits d’intérêt

Philippe Ducrotté a participé à des essais cliniques en qualité d’investigateur pour les laboratoires Solvay-Pharma, Nestlé et Céphalon. Il exerce ponctuellement une activité de conseil pour les laboratoires Céphalon, Mayoli Spindler et Axcan Pharma. Il réalise ponctuellement des rapports d’expertise pour Céphalon. Il a été invité en qualité d’in-tervenant lors de conférences organisées par les laboratoires Céphalon, Axcan, Alfa Wassermann et Rosell-Lallemand, Mayoli-Spindler.

Références

[1] Longstreh GF, Thompson WG, Chey WD, Houghton LA, Mearin F, Spiller RC. Functional bowel disorders. Gastroenterology 2006;130:1480-91.

[2] Camilleri M, Talley NJ. Pathophysiology as a basis for understanding symptom complexes and therapeutic targets. Neurogastroenterol Mot 2004;16:135-42.

[3] Mertz HR. Irritable bowel syndrome. N Engl J Med 2003;349:2136-46.

[4] Bijkerk CJ, Muris JWM, Knottnerus JA, Hoes AW, De Wit NJ. Systematic review: the role of different types of fibre in the treatment of irritable bowel syndrome. Aliment Pharmacol Ther 2004;19:245-51.

[5] Rees G, Davies J, Thompson R, Parker M, Liepins P. Randomised controlled trial of a fibre supplement on the symptoms of irritable bowel syndrome. J R Soc Health 2005;125:30-4.

Tableau 3 Effet symptomatique de différentes souches probiotiques au cours du SII. Symptomatic effects of different probiotic strains in irritable bowel syndrome.

Auteurs N Probiotiques Effet symptomatique

Halpern 1996 [68] 18 Lactobacillus acidophilus LB Amélioration d’un score symptomatiqueNobaek 2000 [69] 60 Lactobacillus plantarum Amélioration de la douleur abdominale et des flatulencesO’Sullivan 2000 [70] 25 Lactobacillus GG Aucun effet symptomatiqueNiedzielin 2001 [71] 20 Lactobacillus plantarum Amélioration de la douleur abdominaleSen 2002 [72] 12 Lactobacillus plantarum Aucun effet symptomatiqueKim 2003 [73] 25 VSL 3 (5 probiotiques) Amélioration du ballonnement dans le sous-groupe SII

diarrhéiqueKim 2005 [74] 48 VSL 3 (5 probiotiques) Amélioration du ballonnement

Kajander 2005 [75] 103 4 souches probiotiques Amélioration de l’ensemble des symptômesNiv 2005 [76] 54 Lactobacillus reuterii Aucun effet symptomatiqueO’Mahony 2006 [65] 77 Bifidobacterium infantis

Lactobacillus salivarius

Amélioration de l’ensemble des symptômes

Aucun effet symptomatiqueWhorwell 2006 [77] 362 Bifidobacterium infantis Amélioration de l’ensemble des symptômesGuyonnet 2007 [78] 274 Bifidobacterium animalis Amélioration de l’inconfort abdominal, du ballon-

nement et de la qualité de vie. Amélioration de la constipation dans le sous-groupe SII avec constipation

Drouault-Holowacz 2008 [79]

100 4 souches probiotiques Effet non différent du placebo

Kajander 2008 [80] 86 4 souches probiotiques Amélioration symptomatique

126

Whorwell et al. ont été inclus dans cette méta-analyse et ont montré une tendance àl'améliorationdessymptômesduSIIchez379patients.Brenneretal.onteffectuéuneméta-analyse en 2009, qui comprenait 16 essais contrôlés randomisés évaluant l'efficacité, lasécuritéet la tolérancedesprobiotiqueschez lespatientsatteintsdeSII.B. infantis35624était leseulprobiotiquequiprésentaitunbénéficesignificatifdanslescoredesymptômescomposites des patients atteints de SII. Les bifidobactéries ont probablement un effetbénéfiquedanslesoulagementdessymptômesduSIIsoitentantqu'agentunique,soitencombinaison avec d'autres probiotiques, bien que les données disponibles soientinsuffisantesetqued'autresétudessoientencorenécessaires.

Dans laméta-analyse de l'AmericanCollege ofGastroenterology, 35 essais contrôlésrandomisés concernant l'études des probiotiques dans le traitement du SII ont étéanalysés141.Cette revuesystématiqueadémontréque lesprobiotiquessontdes thérapiesefficacespourleSII,encequiconcerneàlafoisl'améliorationdessymptômesgénérauxetl'améliorationdesdouleursabdominales,desballonnements,etlesscoresdeflatulences.Ilsonttrouvédespreuvespoursoutenir l'utilisationdecombinaisonsdeprobiotiquesentantquegroupe,maispaspourl'unedesdifférentescombinaisonsétudiéesindividuellement,L.plantarumDSM9843,E. coliDSM1752,etS. faecium,bienque lesdeuxderniersontétéutilisésseulementdansunECRchacun.IlyavaitaussiunetendanceàuneffetbénéfiquedeBifidobacterium,entermesd'améliorationdesscoresdessymptômesduSIIetdeladouleurglobale,bienquelefaitqu'unesoucheouuneespèceparticulièrepeutêtrebénéfiquerestepeu claire. Les effets indésirables restaient rares, mais ils étaient significativement plusfréquentsavecdesprobiotiques.

Ilyadeslimitesàcetterevuesystématiqueetcetteméta-analyse,quirésultentdanslanaturedesétudesdisponiblespourlasynthèse.Toutefois,lorsqu'aétéinclusdesétudesavecunfaiblerisquedebiais,l'effetbénéfiqueapersisté.Enoutre,bienqu'ilaététentédedécouvrirquellesespècesetquellessouchesdeprobiotiquesontétéefficaces,ilyavaitunnombrelimitéd'essaisdanscertainsdecesanalyses,cequisignifiequecesanalysesonteusuffisamment de puissance pour détecter une différence significative dans les effetsescomptés. Enfin, les souches individuelles de probiotiques peuvent avoir des effetsdifférents, et la mise en commun de toutes les études d'une espèce donnée peuventobscurcirleseffetsbénéfiquesdessouchesindividuellesauseindecetteespèce.Maiss'iln'yavaitpasd'étudesvalables,examinantchacunedecessouchesindividuelles,lesrédacteursdel'articleauraientétéplusenmesuredeporterunjugementsurl'efficacitédessouches,etdecomparerl'efficacitéentreelles.

Concernantlesétudesoùunesoucheouunmélangedesouchesprobiotique(s)aététestésurdespatientsSII,ellessontpeunombreusesàêtrepubliéesréellementsurlesbasesdedonnées scientifiques. Pour cellesque l'on retrouve, elles sont sans surprisesde faiblequalitéméthodologique,commeconstatédanslesméta-analyses.Jerésumeraisousformede tableau l'ensemble des études répertoriées et qui présente un intérêt car les souches

127

probiotiques testées sont de haut niveau de preuve ou qu'elles sont présentes dans lesrayonnagesdenospharmaciesfrançaises.

Tableau11:Sélectiond'étudescliniquesconcernantl'utilisationdesprobiotiquesoudemélangesdeprobiotiquesdansletraitementduSII

Auteurs,date SouchestestéesCaractéristiques

del'essaiRésultats

Yoonetal.(2014)142

B.bifidumKCTC12199BP,B.lactisKCTC11904BP,B.longumKCTC12200BP,L.acidophilusKCTC11906BP,L.rhamnosusKCTC12202BP,S.thermophilusKCTC11870BP

49patients5.109UFC/gdeprobiotiquesadministrés2/jpendant4semaines

68.0%(17/25)depatientssoulagésversus37.5%(9/24)(P<0,05)etaméliorationdeladouleurabdominaleetdesballonnementsdanslegroupeprobiotiqueetpasdanslegroupeplacebo

Cayzeele-Decherfetal.(2017)143

SaccharomycescerevisiaeCNCMI-3856

579patients500à1000mg/jdeprobiotiquesdosésà8.109UFC/gadministréspendant8à12semaines

Améliorationdeladouleurabdominaleetdesballonnementsdanslesecondmoisdesupplémentation(12,3%P=0,0134)

Pedersenetal.(2014)144

LactobacillusrhamnosusGG

123patients,versusunrégimepauvresenFODMAPs,6.109UFC/gdeprobiotiquesadministrés/jpendant6semaines

RéductionduscoreIBS-SSSparrapportàunrégimeclassiquechezpatientsrecevantleprobiotiqueetlerégimepauvreenFODMAPs;meilleureaméliorationchezlesD-SII

Spilleretal.(2016)145

SaccharomycescerevisiaeCNCMI-3856

379patients1g/jdeprobiotiquesdosésà8.109UFC/gpendant12semaines

Pasd'améliorationduconfortintestinal,nideladouleurabdominaleetdesballonnementssaufchezlespatientsC-SII

Drouault-Holowaczetal.(2008)146

B.longumLA101,L.acidophilusLA102,L.lactisLA103andS.thermophilusLA104(LACTIBIANEREFERENCE®dePileje)

100patients1010UFC/jdeprobiotiquespendant4semaines

Pasd'améliorationdanslesoulagementdessymptômesassociésauxTFI(42,6vs42,3%d’amélioration)maisdiminutiondeladouleurabdominaleentrelapremièreetladernièresemainedetraitementplusimportante(−41,9vs−24,2%,p=0,048)

128

Ducrottéetal.(2012)147

Lactobacillusplantarum299v(DSM9843)

214patients109UFC/jdeprobiotiquesadministrés/jpendant4semaines

Diminutiondelafréquenceetdelasévéritédesdouleursabdominalesetdesflatulencesetaméliorationdusentimentd'évacuationincomplet(p<0,05)

O'Mahonyetal.(2005)148

Bifidobacteriuminfantis35624ouLactobacillussalivariusUCC4331

77patients1010UFC/jdeprobiotiquesadministréspendant8semaines

RéductionplusimportantedesscoresdessymptômesconcernantlasoucheB.infantis35624pourlesdouleursabdominales/inconfort,ballonnements/distensionabdominaleetlestroublesdutransitontétésignificativementplusbasquepourleplacebo.Diminutiond'unétatpro-inflammatoireTh1.

Agrawaletal.(2009)149

BifidobacteriumanimalisDN-173010(ACTIVIA®deDanone)etlesfermentsduyaourt(L.bulgaricusetS.thermophilus)

34femmesatteintdeC-SII2potsdeyaourtscontenant1,2.1010UFC/potconsommésparjourpendant28j

Baissesignificativedeladistensionabdominalemaximale(-39%,IC95%(-78;-5);p=0,02);diminutiondeladistensionabdominalemoyenne(-1,52cm,(-3,33;0,39);p=0,096);accélérationdutempsdetransitdel’intestingrêle(-1,2h(-2,3;0);p=0,049)etdutempsdetransitcolique(-12,2h(-22,8;-1,6);p=0,026)etaméliorationdelasévéritédessymptômestotauxliésauC-SII[-0,5(-1,0;-0,05);p=0,032).

Whorwelletal.(2006)150

Bifidobacteriuminfantis35624

362patients3dosesdeprobiotiquesadministrés:106,108et1010UFC/mletparjourpendant4semaines

Aladosede108:améliorationsdessymptômesliésàladouleurabdominaleetauxballonnements.L'améliorationglobaledessymptômesparrapportauplaceboaétédeplusde20%(p<0,02)

129

Guglielmettietal.(2011)151

BifidbacteriumbifidumMIMBb75

122patients109UFC/jpendant4semaines

Réductiondel'évaluationglobaledessymptômesduSIIde-0,88points(IC95%:-1,07;-0,69)parrapportàseulement0,16pourleplacebo(IC95%:-0,32;0,00)(P<0,0001).améliorationdessymptômesliésàladouleur,l'inconfort,ladistension,lesballonnements,l'urgenceetlestroublesdigestifs.Lestauxderéponseglobauxétaientde57%danslegroupedesbifidobactéries,etseulement21%danslegroupeplacebo(P=0,0001).

Kimetal.(2003)138

MélangedeprobiotiquesVSL#3:B.longum,B.infantis,B.breve,L.acidophilus,L.casei,L.bulgaricus,L.plantarumetS.salivariussspthermophilus

25patientsD-SII225.109UFC3/jpendant8semaines

Améliorationdesballonnements(-13,7;IC95%:-2,5;-24,9)parrapportauplacebo(-1,7;IC95%:7.1;-10.4)(P=0,046).Pasd'améliorationdesautressymptômes.

Donc on le voit dans le tableau précédent, il existe quelques études, plus oumoins

sérieusesetplusoumoinsrobustesdansleurméthodologieetquimontrentunintérêtdesprobiotiquesdans letraitementduSII.D'après lesméta-analyseset lesarticlespré-cités, ilsembleraitquel'ensembledesprobiotiquesaitunavantagedansletraitementduSIIoudeses symptômes. Or, si on analyse bien ces données, les seules souches qui auraientréellementprouvéleurefficacité,etavecdesdonnéessolides,dansletraitementduSIIsontlessouchesBifidobacterium infantis 35624etLactobacillusplantarum 299V (DSM9843).Eneffet, lescaractéristiquesdesessaisquiconcernentcessouchessontplusrobustesquelesautresessaisetmontrentuneaméliorationdes symptômesglobauxduSII, ou toutdumoinsconcernant ladouleurabdominale.Cependant, l'ensembledesessaisquitententdedémontrer une efficacité des probiotiques dans le traitement du SII souffrent tous dequelquesfaiblessesméthodologiquesdansdenombreuxaspectsetsurtoutdansleurfaibleéchantillon.

Ilconvientdenoterqueleseffetssontspécifiquesàlasoucheouàlaformulationet

ne peuvent pas être extrapolés d'un probiotique à un autre. En outre, les probiotiquesspécifiques auront des effets différents chez des patients distincts. Un probiotique nefonctionnantpasdansune indicationpeutavoirdespreuvessoutenantuneffetbénéfiquedans une indication différente ou pour un symptôme différent. Lorsqu'on essaie unethérapie probiotique pour un problème gastro-intestinal chronique, il est essentiel que le

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produitsoitprisendosesadéquatespendantunepériodedetempsraisonnable,quidevraitêtred'aumoinsunmois,àmoinsqu'ilnepuisseêtretolérépourquelqueraisonquecesoit.La consommation régulière est importante parce que les souches probiotiques sonttransitoireset serontgénéralementéliminéesenquelques jours,bienquedesdifférencesspécifiques de la souche se produisent, par exemple, liées à la production de pili ou deprotéinesliéesàlamuqueuseparlesbactériesprobiotiques.

La nécessité d'orientations objectives et fondées sur des preuves sur le rôle desprobiotiquesdevientdeplusenplus importanteàmesureque la sensibilisationdupublicaux probiotiques augmente. Dans l'ensemble, les essais randomisés et contrôlés versusplaceboinclusdanslesanalysessupportent,avecunniveauélevédepreuves,unrôlepourles probiotiques spécifiques dans la prise en charge des symptômes généraux et desdouleursabdominaleschez lespatientsatteintsdeSII.Lesessaisappuient,avecunniveaudepreuvemodéré,unrôlepourlesprobiotiquesspécifiquesdanslagestiondessymptômesgénérauxchez lespatientsatteintsdeD-SII,dans l'améliorationdutransit intestinaletdesballonnementschezlespatientsatteintsdeSIIetdansl'améliorationdecertainsaspectsdelaqualitédevie.

Lesdonnéesdichotomiquessuggèrentquelesprobiotiquessonttrèsefficaces.Ceciestprobablement du à une surestimation, avec une surreprésentation des petites étudespositivesdansla littératurepubliée.Deplus, lesétudesdequalitésupérieureontrapportéuneffetdetraitementplusmodesteparrapportauxessaisdequalité inférieure.LeSIIestunétatde santéquiestbien reconnupouravoirun tauxde réponseélevéau traitementplacebo dans les essais, ce qui peut aussi avoir contribué au petit nombre de patients àtraiterpourprévenirlessymptômesrécidivants.

Dansunarticlede2012,MartijnBernardKatandel'Universitéd'Amsterdamadénoncé

lavéhémencesdes industriesproductricesdeprobiotiques,etnotammentcelles issuesdel'industrie agro-alimentaire152. En effet, dans son écrit, il rappelle que l'EFSA a retoquétoutes les demandes d'allégations de santé des industriels concernant l'utilisation desprobiotiques en 2011, sous prétexte que les études et essais cliniques avancés par lesdemandeursn'étaientpasconvaincants,cequeceux-cirejettentenbloc.EnFranceetdansdenombreuxpaysdel'UnionEuropéenne,lesindustrielsquisouhaitentcommercialiserunproduit qui a une influence sur la santé ont plusieurs stratégies à adopter et ils peuventvendre leurs produits sous différents statuts : un médicament avec AMM, un dispositifmédicalavecunmarquageCEetlapossibilitéd'annoncerunepréventionouuntraitementd'une maladie, un complément alimentaire avec une réglementation harmonisée et desallégations contrôlées ou un produit alimentaire avec également des allégationsnutritionnellesquisontréglementées.Cesdifférentsstatutsdeproduits"santé"sontclassésparordredecoûtspourl'industrielbienentendu,quipeutallerdumillierd'eurosaumilliardd'euros,maisausside forcedans lapreuved'efficacitéduproduit surunmétabolismedenotreorganismeouunepathologie.L'industrielauradoncunchoixstratégiqueàfairedans

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son projet de développement et ceci aura des conséquences sur la vente de son produitmaisaussisapromotionetsanotoriétéauprèsdesconsommateursoudespatients.

Depuis une vingtaine d'années, les industriels se détournent du médicament et du

statut d'AMM pour commercialiser des produits de santé. Ils lui préfèrent le DM ou lecomplément alimentaire beaucoup plus simple à développer et qui a un potentiel derentabilité à court terme beaucoup plus élevé, sans investissements faramineux initiaux.Cependant, la législationeuropéenneestprotectricepour leconsommateurencesensoùellenepermetpasàl'industrielderevendiqueruneallégationdesantésuruncomplémentalimentaire si elle n'est pas validée auparavant par l'EFSA. En ce qui concerne lesprobiotiquesdanslescomplémentsalimentaires,touteslesdemandesd'allégationsontétérefusées comme dit précédemment. Ce qui peut représenter un frein dans lacommercialisation et la promotion de produits comme les probiotiques auprès desconsommateurs.Deplus,uneloieuropéenneinterditunindustrieldel'agro-alimentairedepromouvoir la guérison d'une maladie via un aliment. Ceci peut paraître tout à faitprotecteurpour leconsommateuretéviteràtoutprix lecharlatanismequepeutredoutertout à chacun, mais cela constitue également un non-sens. Car la vitamine C contenuenaturellementdanslesagrumespermetdeguérirdelamaladieduscorbut,lavitamineB12contenuedanslesviandespermetdeguérirdecertainesanémies,lavitamineB9contenuedanscertainsalimentspermetdeprévenirlestroublesdefermeturedutubeneuralchezlefœtusaucoursdelagrossesse,ouencorelesprotéinesvégétalesouanimalesconsomméesvont naturellement permettre de combattre la dénutrition installée chez certainespersonnesâgéesouaffaibliespardesmaladiesgraves.Donclaréglementationeuropéenneconcernant les allégations de santé est très protectrice pour le consommateurmais peutparaîtreexagéréedanscertainsdesesaspects,etnotammentdupointdevuedesindustriesagro-alimentairesoupharmaceutiques.Dansl'articledeKatan,onvoitquecelui-cis'adresseen premier lieu aux industries agro-alimentaires et notamment laitières, car c'est surtoutelles qui ont publié de nombreux articles sur les probiotiques dans les produits laitierscomme le yaourt, et qui ont décidé d'en faire la promotion auprès du public afind'augmenter leurs ventes. Ce sont d'ailleurs elles les principales mécontentes de cetteréglementationeuropéenne.Lesindustriespharmaceutiquespeuventelless'appuyersurlesprofessionnelsdesantécommelesmédecinsoulespharmacienspourvanterlesméritedeleurproduit,mêmesilapromotiondesproduitsdesantéauprèsdesprofessionnelsestelleaussi réglementée.Alorsque les industrielsn'ont"que" lapublicitéet les informationssurl'emballagedeleursproduitpourvéhiculerunbénéficesanté.

L'inconvénient majeur de l'utilisation du statut de complément alimentaire pourcommercialiser un probiotique reste le manque de données scientifiques pour prouverl'efficacité des produits auprès professionnels de santé. En effet, pour lemédicament, undossierd'AMMdemandeàl'industrieldeprouverl'efficacitéduproduitsurunemaladieouun état de santé particulier grâce à des études importantes, robustes, puissantes et degrandesenvergures,parfoiscouteusesmaisindispensables.Cedossierdemanderaaussidesgaranties en ce qui concerne la qualité du produit avec respect des bonnes pratiques de

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fabrication et sa sécurité d'emploi, pour éviter des accidents liés à son utilisation. Maisassociéàlapauvretédudossierdemandéparlesautoritéspourdévelopperuncomplémentalimentaire,lefaitquelesallégationsdesantésontàl'heureactuelleinterditesconcernantles compléments alimentaires à base de probiotiques rend la communication del'informationsur leproduittrès insuffisante.Carsur lesconditionnementsdecesproduits,rienn'est indiquésur lebutthérapeutiquede lasouche incluse.Lepatient/consommateurn'apaslanoticecommepourunmédicamentquiluipermetdes'informerconvenablementsur le produit. Si la présence d'un professionnel de santé formé permet de pallier à cemanquelorsdel'achatduproduit,silepatient/consommateurdécided'acheterseulcetypedeproduitengrandesurfaceousurinternet,aumieuxl'effetrecherchéparlepatientneseferapassentirmaisaupire,celapeutavoirdesconséquencessurl'évolutiondesonétatdesantéetdumalêtresurlequelilsouhaitaituneavancéeparlecomplémentalimentaire.Laseulefaçonqu'aural'industrielpourannoncerlebutdelacommercialisationduproduitsefera via des publications sur des sujets comme l'immunité, la santé intestinale ou lemicrobiotesansreliercesinformationsauprobiotiquecommercialisé,mais leplussouventlenomdulaboratoireoudel'industrielseraenpremièreplacedanscespublications.Enfin,si le professionnel de santé est formé à l'utilisation des probiotiques dans certainespathologiescommeleSII,laplupartdutempscetteformationserafortementassociéeauxlaboratoiresfabricantetcommercialisantdesprobiotiques,cequipeutentrainerd'abordunmanquedeconnaissanceslibresetéclairées,maisaussipotentiellementunconflitd'intérêtcontrelepatient/consommateur.

On le voit bien, l'apport de preuves concernant l'efficacité des probiotiques pour

traiterdesétatsdesantécommeleSIIauprèsdumondemédicalestseméd'embuches,maisilestsurtout limitépar lescoûts.Cecipeutêtrecorréléauxmêmesproblèmesrencontrésparlesindustrielsvoulantinvestirdanslarechercheauprèsdesprincipesactifssynthétiquesstandards,dansuneautremesure.Or, les fondsquidoiventêtre réunispour financer cesrecherches,nepeut-ilpasêtretrouvédanslecoûtdelapublicitéfaiteparlesproduitsagro-alimentairessurlesproduitsprobiotiques?Lecoûtdelarechercheetl'analysecritiquedesdifférents articles scientifiques ou études cliniques seront les deux aspects qui seront lespoints limitantdans l'avancéede lapreuveapportéedesprobiotiquesdans l'améliorationdessymptômesduSII.Ilfaudraégalementtenircomptedesdifférentsconflitsd'intérêtsquepeuventavoircertainsarticlespubliésrendantcompted'uneefficacitédecertainessouches.Mais j'espère qu'à l'avenir, le statut de médicament avec AMM sera privilégié pourcommercialiserdesprobiotiques,carceseraplusdebénéficesetplusdesécuritépour lesprofessionnels de santé qui le conseilleront et pour les patients/consommateurs qui lesutiliseront.

Pour conclure sur cette partie concernant l'utilisation des probiotiques dans letraitement du SII, et comme ouverture pour la suite des études concernant le SII et lemicrobiote intestinal, je vais aborder l'utilisationnonpasde souchesprobiotiques commeon les a vues précédemment mais de souches bactériennes qui sont naturellementprésentesdansnotreorganismeetquivontpermettredeguérirunautrepatient.Ils'agitde

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la transplantation fécale ou greffe fécale. En effet, le microbiote intestinal peut êtreconsidéré comme un organe à part entière. En ce sens, cet organe peut être malade etdysfonctionner comme tout autre organe. Les pathologies intestinales comme le SII, lesMICIs ou la diarrhée post-antibiotique à Clostridium difficile, peuvent conduire ou être àl'origined'undysfonctionnementdecetorgane.L'analogieaveclesautresorganesducorpsontamenédeschercheursàvouloirgrefferunmicrobiote sainchezunpatientmalade153.Lesétudessontnombreusesconcernantladiarrhéepost-antibiotiquesàClostridiumdifficilesévère, résistante aux traitements conventionnels avec antibiotiques. Les résultats sontplutôt satisfaisants. En revanche,en cequi concerne le SII, les résultats sontplusmitigés,avecdescontradictionsmaiscelaouvrelavoieàd'autresmodesdethérapiesliésàlapriseencomptedumicrobioteintestinaldanslaphysiopathologieduSII153,154.

IV. Interventiondupharmaciend'officinedanslapriseenchargedusyndromedel'intestinirritable

Lepharmaciend'officineaunrôleprépondérantdansleparcoursdesoindespatients,

et notamment ceux souffrant de pathologies chroniques. Il dispensera les différentesordonnancesprovenantdesmédecinstraitantsetspécialistes, ilprodiguerasesconseilsetpourraorienter lepatients'il souhaiteversunethérapeutiquealternativepoursoigner lessymptômesmineursoumajeursdesamaladieouleseffetsindésirablesdestraitementsqu'ilprend.DanslecadredelapriseenchargedupatientsouffrantdeSII,deuxcasseprésententsouventàlapharmacie:soitlepatientestsuivipoursapathologieparsonmédecintraitantou spécialiste, en l'occurrence unGastro-entérologue, et vient chercher sesmédicamentspoursontraitementàl'officine.Soitlepatientvientrégulièrementacheterdesmédicamentsen automédication pour ses symptômes mais n'est suivi par aucun médecin et a déjàconsultéunmédecinpoursessymptômes,maiscelan'apasaboutiàuntraitementefficaceouquiconvientaupatient.Cesdeuxtypesdepatientsrévèlentsouventdeuxtypesdeprisesencharge,avecdespatientsacteursdeleursantéquicherchentàtoutprixunesolutionàleur souffrance, ou des patients résignés qui tentent de pallier à leur souffranceponctuellement, lors de crises douloureuses ou qui gênent grandement leurs activitésquotidiennesouprofessionnelles.Onretrouvecemêmetypedepatientèledanslaplupartdesmaladieschroniques. Lepharmaciend'officineauraalorsun rôled'orientationà jouerimportant. Avec dans un sens, un rôle d'accompagnement dans la prise en charge où lepatientdemanderaponctuellementconseilaupharmacienpourunenouvellethérapeutiquesouhaitée ou une demande d'avis concernant un choix thérapeutique prescrit par unmédecin. Dans l'autre sens, le rôle etmême le devoir du pharmacien sera de replacer lepatient dans un parcours de soin plus normalisé avec prise de rendez-vous chez unspécialiste pour un réel diagnostic de la maladie, une explication approfondie de lapathologie,unapportderéponsesauxquestionsdupatientetenfinuneffortaccruencequiconcerneleconseilenautomédication lorsquelepatientnesouhaitepaspasserpar lacasemédecin.

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LorsquelepatientSIIseraprisenchargecorrectementparunmédecincompétentetconnaissantcettemaladie, lepatient seraplusàmêmedecomprendre ses symptômesetserarassuréconcernantsesdoutessursesmauxquiluigâchelavie.Leproblèmeétantqueles professionnels de santé : pharmaciens, médecins généralistes et même spécialistes,soientformésàl'appréhensiondusyndromedel'intestinirritable.C'estletravailquemènecertainessociétéssavantescommelaSociétéNationaleFrançaisedeGastro-Entérologieoule Groupe Français de Neuro-gastroentérologie. Certaines associations de patients enrelationsavecdesmédecinsspécialistesduSIImilitentégalementpourlareconnaissanceetlameilleureappréhensiondecettepathologie,etnotamment l'AssociationdesPersonnesSouffrant du Syndrome de l'Intestin Irritable (APSSII). Cette association pourra d'ailleursaccompagnerlespatientsdansleurpriseenchargeetpermettral'établissementdegroupesdediscussionentrepatientspourmieuxcomprendreleurmaladieetmieuxvivreavec.UneapplicationmobileappeléeTIFANIEdéveloppéepar les laboratoiresTEVAen lienavecdesgastro-entérologuesetl'APSSII,pourraaiderlepatientàmieuxcomprendresamaladieetluidonneradesconseilssursonalimentationetsonmodedevie.Lepharmaciend'officinequiconnaîtramieuxleSIIpourraégalementêtreàmêmederépondreàcertainesquestionsdespatientsatteintsmaisaussirépondreetorienterlesmédecinsdansleurprescriptions,cequivaloriserasonmétieretlerôledanslapriseenchargedupatient.

AprèsavoirvérifiéquelepatientaitconsultéunmédecinquiluiadiagnostiquéunSII

etquecepatientneprésentepasdecomorbiditésgravesoudesymptômestropimportants,lepharmacienpourraégalementaiderlepatientdanslesoulagementdesessymptômesenluiproposantdesmédicamentsoudesthérapeutiquesalternatives.Eneffet,on l'avuplushaut,lapriseenchargethérapeutiqueduSIIestplurielleetdoitsurtoutêtreadaptéeselonlepatient.Maisdanslaplupartdescas,ellereposesurdestraitementssymptomatiquesdela douleur, des ballonnements, de la diarrhée ou de la constipation. Des domainesd'interventionoùlepharmacienpourraaiderlepatientvialeconseiletlaventedeproduitsdesantédiversetquisontdanssesattributions.Eneffet,l'automédicationdespatientsSIIest assez grande car ils connaissent bien leurs symptômes et savent la plupart du tempscomment lessoulager.Cespatientviendrontdoncà lapharmacieprendre leur traitementsansforcémentpasserparlacasemédecin.Deplus, lestraitementsmédicamenteuxduSIIsontpour laplupartdisponiblessansordonnanceet lesconditionnementssontadaptés àunepriseenchargedecoutredurée,enattendantuneéventuelleconsultationmédicale.Lerôledupharmaciend'officineserad'autantplusrenforcé.

Les principaux conseils que pourra apporter le pharmacien lors d'une délivrance demédicaments ou d'une demande spontanément d'un patient souffrant de SII seront lesadaptations du régime alimentaire du patient. On l'a vu précédemment, l'alimentationinflue beaucoup sur les symptômes des patients, que ce soit sur leurs douleurs, leursballonnementsouleurtransit.Cesmodificationsdurégimealimentairesontindispensablesàconseilleravanttoutepriseenchargemédicamenteuse.Bienévidemment,silepatientlesouhaite, il peut être réorienté vers un professionnel de santé compétent comme undiététicien/nutritionniste forméà lapathologie,afindemieuxcomprendre lemodedevie

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du patient, et lui faire un régime alimentaire adapté.Mais le pharmacien d'officine peutrappelerquelquesrèglesdebaseafind'améliorerlaqualitédeviedupatient.Jevaisabordertrois régimes alimentaires adaptés selon les symptômes du patient :flatulences/ballonnements,constipationetdiarrhée.

Lorsquelepatientsouffredeflatulencesexcessivesavecballonnementsetdistensionabdominale,unedespremièresquestionsàseposerestdedéterminersilepatientsouffred'unemalabsorptionquelconque(lactose,fructose,certainssucres…).D'oùl'intérêtd'inciterle patient à consulter un médecin lors des premiers symptômes de SII. Si le patient neprésentepasparticulièrementdemalabsorption,unrégimealimentaireadaptépeutluiêtreconseillé17,155.Lesoligosaccharidesdesfruits,légumesetlégumineuses,lesféculentsàbased’amidon,saufleriz,etlesfibresalimentairessontlesprincipauxalimentsresponsablesdeflatulences.Onpeutciterlepain, lescéréalesàgrainsentiers(sondebléetsond’avoine),les légumesde la familledescrucifères (choux,navets, radis), les légumineuses (poissecs,poischiches,haricotsblancsetrouges),lesfruits(pommes,pruneaux,bananes,abricots)etlespommesdeterre.Cesalimentssonteneffetpourlaplupartfermentésparlemicrobioteintestinal et cela peut alors aboutir à la formation de gaz dans le tube digestif et doncprovoquer une distension. Un régime d’exclusion n’est bien entendu pas envisageablepuisqu’ilfautrespecterunealimentationvariéeetéquilibrée.Onpeutcependantconseillerd’éliminerunàunlesalimentsquicausentleplusd’inconfortafindedéterminerlequeldoitêtre(sipossible)évité.Lerizestleseulhydratedecarbonetotalementabsorbéetdoitdoncêtrepréféréauxautrespolysaccharides.Changerl'eaudecuissonpouréliminerlesgazdesaliments peut également réduire la charge des aliments en gaz ou en nutrimentsfermentiscibles. En cas de crise douloureuse, un régime pauvre en FODMAPs peut êtreproposé,enfaisantattentionàcequelepatientnesuivepascerégimetroprégulièrementafind'évitertoutrisquedecarences.Lesboissonsgazeusescontiennentdel’airetpeuventdonc augmenter le débit rectal de gaz. Les lipides augmentent quant à eux la rétentiongazeuse. Il faut donc essayer de limiter les aliments gras comme les viandes grasses, lessauces grasses, les fromages contenant plus de 25 % de matières grasses et les graissescuites.Lesalimentsentraînantlemoinsdeflatulencesetqu’ilfautdoncprivilégierchezunmaladesouffrantdeflatulencesexcessivessontlesœufs,lesviandesmaigres,lespoissons,lavolaille(sanslapeau),lefenouiletleriz.Unepartiedesgazémisàl’anusprovientdel’airdéglutienmangeantetenbuvant.Bienmastiquer,mangerpluslentement,etboireavantetaprès le repas plutôt que pendant sont desmesures qui permettent aussi de réduire lesflatulences. Il existe en revanche peu demoyens permettant de lutter plus efficacementcontrel’aérophagiequirésulted’unmécanismeinconscient.

En cas de constipation chez un patient SII, le régime riche en fibre reste un goldstandard. Il est leplusefficacepouraugmenter levolumedubol fécal, stimuler le réflexepéristaltique,augmenterlenombredesellesetaméliorerleurconsistance.Ilconsistedoncàaugmenterl'apportd'alimentsrichesenfibresdansl'alimentation.Onl'avuprécédemment,lesalimentsrichesenfibressontprincipalementlesfruits,leslégumes,lescéréales,lesfruitssecs et les légumineuses. Cependant, il existe deux types de fibres, et cela va avoir une

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importance dans le SII : les fibres solubles et insolubles. Leur composition chimique vadifférer et ainsi leur digestibilité et leur fermentiscibilité vont aussi différer. En effet, lesfibres alimentaires ne vont pas être digérées et assimilées par le système digestif. Ellesseront alors soit éliminées par le transit intestinal, soit fermentées par les bactéries dumicrobiote intestinal et être transformées en divers produits comme des AGCC, desvitamines,desprotéinesoudesgaz.Lesfibressolublesonttendanceàêtreplusfermentéespar les bactéries et améliorent la consistance des selles. Les fibres insolubles elles, sontmoins fermentées et réduisent plus facilement le temps de transit. Cependant, chez unintestinirritable,lefaitd'augmenterlafermentationcolique,lepéristaltismeintestinaletlevolume de gaz produit par les bactéries coliques peut entrainer des ballonnements, unedistension abdominale, un inconfort digestif ou même un accroissement des douleurs. Ilfaudra alors que le patient privilégie les fibres solubles qui sont en général moinspourvoyeuses de fermentation colique que les fibres insolubles, en faisant attention à ceque le patient les tolère bien. Cette augmentation progressive de l'apport en fibres dansl'alimentationdoitsefairedemanièretrèsprogressivesur10à15jours,jusqu'àobtenirunapportenfibrede20g/j.Encasdedouleursoud'inconfort,ilfaudraopérerunchangementdetypesdefibresoualorsstoppercetteaugmentation.Cependant,bienquelerégimericheen fibre ait prouvé son efficacité pour lutter contre la constipation chez les patientsclassiques (hors SII), ce même régime chez un patient C-SII n'a pas prouvé une forteefficacitépourluttercontrelaconstipation.Deplus,sicetteconstipationestplutôtdistale,l'augmentationd'apportenfibresn'aurapasd'intérêt,SIIounon64,86–88,156.

Cette augmentation de l'apport en fibres doit s'accompagner d'un apport hydrique

suffisant.Cetapporthydriquesupplémentaireseuln'apasdémontréd'efficacitépourluttercontrelaconstipation.Demêmequ'uneaugmentationdel'activitéphysiqueseule,mêmesiune augmentation de celle-ci est bénéfique dans le cadre d'une amélioration de la santéglobale. Le respect du temps défécatoire doit être instauré. Car en effet, les patientsconstipés ont tendance à ne pas respecter leur propre réflexe défécatoire. Dans denombreuses situations, on constate une disparition des réflexes, secondaires à unerépressiondesenviesparmanquedetemps,dérangementsfréquents,contrainteshoraireset sociales. Le résultat en est de transformer l’acte défécatoire en un processusessentiellementvolontaire.L’objectifestdoncderéapprendreprogressivementàsuivrelesphénomènes réflexes tout en adaptant l’alimentation. Il faut également éviter que lesefforts défécatoires exagérés n’engendrent des complications mécaniques telles que deshémorroïdesoudesfissuresanales.Cettehygiènedeviepeutêtrecompliquéeàmettreenœuvrechezcertainspatientsavecunrythmedevieeffréné,maiselleestindispensablepourlutter le plus efficacement contre la constipation, du moins en première intention.Cependant, chez la plupart des patients SII, les règles hygiéno-diététiques seules sontsouvent inefficaces voire pires on l'a vu, elles peuvent augmenter les symptômes dedouleursetd'inconfort,etlestraitementslaxatifsserontalorsprescrits.

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Encasdediarrhée,lesrégimesinfluençantcelle-cisontassezpauvres.Eneffet,seulunrégime dit sans résidus permet de mettre en repos le côlon et donc d'augmenter laconsistancedessellesetd'augmenterletempsdetransitintestinal.Ilconsisteàéliminerdel’alimentation les résidus dont les fibres. Les résidus sont toutes les portions nonabsorbablesdesaliments. Ils contiennentprincipalement les fibresalimentairesmaisaussicertains sucres faiblementassimilés.Commeun tel régimepauvreen résidus, lorsqu’ilestsuividemanière stricte,n’autoriseque trèspeud’aliments, il n’estproposéquedansdessituations aiguës et ne doit pas être recommandé au long cours ; il doit également êtreadaptéaupatient.Lesalimentsautoriséssont : lesviandes, lepluspossibleblanches,peugrassesetgrillées,lesœufs,lessucressimples,lespates,leriz,lespommesdeterreoulescarottes. Ce régime peut donc être utile en cas de forte diarrhée accompagnée de crisesdouloureuses,maisnedoitêtreperpétuéplusde3à5 jours86.Endehorsdecerégime, laconsommation d'aliments riches en graisses permet d'augmenter le temps de transitintestinal. Cependant, une alimentation riche en lipides augmente de façon significativel'apport caloriqueet augmente le tauxde cholestérol et de triglycérides sanguins et doncpeutameneràuneaugmentationdurisquecardiovasculaireetd'obésité.L'apporthydriqueen cas de diarrhée est primordial car la diarrhée, qui plus est chronique, provoque unedéshydratationintensechezlespatients,notammentchezlapersonneâgée.Doncilfaudraque les patients boivent régulièrement des liquides, principalement de l'eau, maiségalement des tisanes, des boissons sucrées ou non pour réguler l'apport hydrique dansl'organisme.

La diarrhée est le symptôme le plus prépondérant en cas d'intolérance ou de

malabsorption de certains nutriments. Ces intolérances doivent être détectées trèsprécocementchezunpatientSII,d'oùl'intérêtdeconsulterunmédecinencasdediarrhéechronique associée à des douleurs abdominales. L'intolérance la plus connue restel'intoléranceaulactose. Celle-ci est facile à réduire car le traitement consisteen l'évictiondesproduitslaitierscontenantdulactose.ChezunintolérantnonSII,laprésencerésiduellede lactose dans l'alimentation peut rester asymptomatique, cependant chez un SII, lessensationsabdominalesetintestinalessontdécupléesetlesdouleurspeuventpersister.Lesintolérantsaulactosepeuventcontinuerdeconsommerdesproduitslaitiersfermentéscarlelactoseestdanscecasengrandepartiedigéréparlesbactéries.Leseulproblèmedecerégimerestelefaitdepriverdesonalimentationungrandapportencalcium.Cecipeutêtreréduit par le fait de consommerdes légumes riches en calciumbiodisponibles comme lesépinards, lebrocolis, lechou, lesblettes, lesharicotverts,maisaussi les légumineuses,oucertainesalguescommel'Ascophylle,leFucus,leWakaméouleKombu(Ciqual2016ANSES).

Enfin,lerégimealimentairequimériteuneattentionparticulièreetquidonnedetrèsbonsrésultatschez lespatientsSIIestsansconteste lerégimepauvreenFODMAPs. Ilestsouvent très efficace pour réduire les douleurs abdominales, l'inconfort intestinal, lesballonnements, les météorismes et parfois les problèmes de transit, et notamment ladiarrhée. Les fondements de ce régime ont été explicités plus haut, je ne vais pas lesrappeler. Cependant, malgré une certaine efficacité de ce régime, celui-ci ne doit pas

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systématiquement être appliqué chez les patients atteints de SII. En effet, si les patientsappliquent les règles hygiéno-diététiques de base et qu'ils observent un bien être et unsoulagementde leurssymptômes,unrégimesansFODMAPs,n'estpasforcémentutile.Eneffet,celui-cirestetrèsrestrictif.LaprésencedecesFODMAPsdansdenombreuxalimentsrenduntelrégimedifficileàréaliserenpratiqueetnécessiteunepriseenchargediététiquepourdéterminer ladose-seuil toléréeafind’éviterdes régimes trop restrictifsetdoncdescarencesalimentairespotentielles.

Pourconcluresur lesmesureshygiéno-diététiques,celles-cisont importantesdans lesyndromedel'intestinirritablecaronl'avu,l'alimentationinflueénormémentsurleressentides symptômes des patients comme les ballonnements, la distension abdominale, lestroubles du transit ou la qualité de vie. De plus, bien que la plupart de ces régimesaméliorentquepartiellement lessymptômesdespatients, ilssontpour laplupart facilesàmettre en place et surtout faciles à expliquer au patient. Ces régimes, peuvent êtreconseillés par le médecin qui a diagnostiqué le SII, un diététicien/nutritionniste maiségalement par unpharmaciend'officine forméet qui souhaite prendre en chargedans lecadredesoinsprimairesunpatientsouffrantdeSIIavecdessymptômeslégersàmodérés.Enfin,cesmesuressontàtesterprioritairementavanttoutemiseenœuvred'untraitementmédicamenteux,ouenaccompagnementdecelui-ci.

Si les mesures hygiéno-diététiques n'ont pas été efficaces ou n'ont amélioré les

symptômes que partiellement, un traitement médicamenteux pourra alors être entamé.Celui-cidoitêtreadaptéaupatientetàsessymptômes,quipeuventêtrediversdansleSII.Celui-cipourraêtremisenplaceparunmédecin,généralisteouspécialiste,danslecadredudiagnosticdelamaladie,ouparunpharmacien,si lessymptômesrestentmodérés.Encasd'échecd'unpremiertraitement,lepatientnedevrapashésiteràreconsultersonmédecin,carl'efficacitédecertainstraitementsesttrèsaléatoireselonlespatients.Lepatientpourraégalement discuter des traitements proposés avec son pharmacien pour savoir de quoi ils'agit et d'en savoir plus sur les effets indésirables de ces différents traitements. Donc lepharmaciend'officineauraunrôleàjouerdanslapriseenchargedupatient,commedansn'importequ'ellepriseenchargedemaladiechronique.Ilauraaussiunrôledeconseildansl'automédicationdupatientSII,quipeutêtreimportante,etnotammentdanslapréventionde l'iatrogénie que peut recéler certainsmédicaments. Dans cette dernière partie je vaisénumérerlesdifférentsmédicamentsconseilsquepeutproposerlepharmacienàunpatientqui souhaite obtenir un traitement sans ordonnance pour soulager ses symptômes. Jetenteraisaussid'énumérerlesprincipesactifsnaturelsdephytothérapieoud'aromathérapieutilesenconseilpourleSII,carc'estunedemandedespatientsdeplusenplusimportante.Touscesconseilssontrésumésdansl'Annexe5.

Les médicaments des domaines thérapeutiques de la douleur et des symptômes

gastro-entérologiques sont parmi les plus vendus en pharmacie en France157. En cas dedouleurs abdominales, l'utilisation d'antalgiques de palier I tels que leparacétamol restepréconisée. Les AINS ne sont pas indiqués et leurs effets indésirables contraignent leur

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utilisationencasdedouleurschroniques.Sileparacétamolestinefficaceouinsuffisammentefficace, on pourra proposer au patient l'utilisation d'antispasmodiques. Les spécialitésdisponiblessansordonnancesont leSPASFON®, leDEBRICALM®, leMETEOSPASMYL®et leMETEOXANE®.Onl'avu,l'efficacitédecesprincipesactifspeutêtrealéatoireetn'estpasde100%. Il faudra proposer au patient de changer demolécule si l'un desmédicaments estinsuffisamment efficace. L'association de plusieurs antispasmodiques n'a pas prouvé sonefficacité. L'utilisation du phloroglucinol serait plus adaptée en cas de crise douloureuseaigüe, sur une courte période. Les spécialités comme le METEOSPASMYL® ou leMETEOXANE®associentauxprincipesactifsantispasmodiquesdusiméticone,unadsorbantintestinal améliorant les ballonnements. Si le patient souhaite s'orienter vers desthérapeutiques naturelles, l'utilisation d'huiles essentielles de Basilic ou d'Estragon, enmassagepar voie localeouen ingestionpeutêtreefficacepour lutter contre les spasmesintestinaux.Lemassageparvoielocalepeutsefairepuravec1à2gouttesoudiluédansunehuilevégétale.Lavoieoralepeutsefaireunmettant1à2gouttessurunsucre,unecuillèredemielouuncompriméneutre.Cesdeuxhuilesessentiellespeuventserajouterencuissonégalement.L'utilisationdel'huileessentielledementhepoivréeestégalementindiquéelorsdespasmesintestinauxoud'inconfortdigestif.Ceshuilesessentiellesserontutiliséesencasdecrisesdouloureusesaigues,maisellesnedoiventpasêtreutiliséesàlongterme.Ilfaudraprivilégieralorslaphytothérapieetl'utilisationdeplantesdelafamilledesApiacées,commelefenouil,l'anisvert,l'anethoulecumin.Cesplantespeuventseconsommerbienentendudans l'alimentation,en tantqu'alimentprincipal, condimentouaromates,maiségalementen tisaneouenextraitsdeplantessous formedegélules.Cetteutilisationpourrase fairequotidiennement2à3foisparjour.

En cas de ballonnements, de distension abdominale ou d'inconfort, le régime

alimentaire adapté reste le plus efficace pour diminuer ces symptômes. Cependant, si lepatient lesouhaiteets'ilestendemanded'untraitementpharmacologique,onpourra luiproposer les différents adsorbants intestinaux disponibles. Ils contiennent la plupart dutemps trois types de principes actifs : le charbon activé, le siméticone et les argiles. Cesspécialités devront êtres prises en général avant chaque repas. En ce qui concerne lesprincipes actifs naturels, l'huile essentielle de carvi ou d'aneth est utilisée en cas demétéorisme et de spasmes intestinaux. Son utilisation pourra également se faire par voielocaleenmassageouparvoieorale.L'utilisationdeceshuilesdoitsefaireégalementà lademande,surunecourteduréeetdanslerespectdesprécautionsd'emploiconcernantleshuilesessentielles.

En cas de constipation, si un régime riche en fibres n'a pas été efficace ou n'a pasconvenuaupatient,l'utilisationdeslaxatifsestlasolutionefficaceetrelativementrapideàluiproposer.Leslaxatifsditsdelestetleslaxatifsosmotiquessontlesdeuxtypesdelaxatifsderéférencedansletraitementdelaconstipationchronique,etnotammentencasdeC-SII.Les spécialités contenant des laxatifs de lest sont des principes actifs naturels issus deplantes. On peut citer l'Ispaghul (SPAGULAX®), le Psyllium, la gomme de Sterculia(NORMACOL®) également appelée gomme Karaya (POLYKARAYA®). Ces laxatifs sont

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efficacespour luttercontre laconstipationmais ilsontégalement l'avantagede réguler letransitintestinal,cequipeutêtreintéressantchezlesM-SII,avecalternancedediarrhéeetde constipation. Les laxatifs osmotiques sont répartis en deux groupes : les polyéthylèneglycol avec le Macrogol (FORLAX®, TRANSIPEG® MOVICOL®), et les sucres non absorbéscomme le Lactulose (DUPHALAC®) ou le Lactitol (IMPORTAL®). L'avantage des laxatifsosmotiquesc'estqu'ilssontengénéralplusefficacespourluttercontrelaconstipationqueleslaxatifsdelest,etilsagissentplusrapidement.Cependant,encequiconcerneleslaxatifsosidiques comme le lactulose, ils peuvent aggraver les sensations de ballonnements etd'inconfortpar le fait qu'ils ne sontpasdigéréspas le systèmedigestif, et ils seront alorspotentiellementfermentésparlesbactériesdumicrobiote.Dansunautresens,ilspourrontnourrir la flore intestinale et ainsi améliorer sonmétabolisme. Tout dépendra du type defloredupatient,maisceciétantaléatoireetnonprévisible,ilsneserontpasàconseillerenpremière intention chez un patient C-SII ou M-SII. Que ce soit les laxatifs de lest ouosmotiques, l'administrationdecesdeuxmédicamentsdevrasefaireenaccompagnementd'unapporthydriquesuffisantdanslajournéeafind'améliorerl'actionlaxative.Deplus,ceslaxatifsserontpeuefficacesencasdeconstipationdistale.Danscecas,ilfaudraprivilégierlesdispositifsd'évacuation locaux comme les suppositoiresdeglycérine,ou les lavementsrectauxcommeleMICROLAX®ouleNORMACOLlavement®.

Les laxatifsde lestétantdesprincipesactifsnaturels, ilsconviendrontàdespatients

souhaitantun thérapeutiqueàbasedeplante. Si lesdifférents laxatifs citésplushautsneconviennentpas aupatient, uneautre catégoriede laxatifs peutêtreproposéemais avecdesgrandesprécautionsd'emplois.Cesontleslaxatifsstimulants,qu'ilssoientsynthétiquesou naturels. On peut citer le bisacodyl (DULCOLAX®, CONTALAX®) ou les dérivésanthracéniquescontenusdanscertainesplantescommeleSéné,laBourdaine,leCascaraoul'Aloès.Cependant,ilsnesontpasàrecommanderchezunpatientC-SII,carilsonttendanceàstimulertropbrutalementlamuqueuseintestinaleetdoncàl'irriter,cequipeutaggraverles symptômes douloureux et leur utilisation à long terme expose à des troubles hydro-électrolytiques commeune hypokaliémie et donc à des troubles du rythme cardiaque. Lepharmacien aura dans ce cas un rôle important dans la lutte contre l'iatrogénie etmêmed'addictovigilance car en effet, certains patients souffrant de constipation chronique etparfois de symptômes apparentés au SII consomment une grande quantité de cesmédicaments, ce qui les rends dépendant et rend leur côlon complètement atone. Cespatients ne peuvent plus aller correctement à la selle sans prendre ces médicamentsquotidiennement.Nonseulementcelapeutleurrevenirchercarcestraitementsnesontpasremboursés,maisenplusilss'exposentàdeseffetsindésirablesimportants,etnotammentchezlapersonneâgée.Unprotocoledesevragepeutêtreentaméenlienaveclemédecinréférentafinque lepatientpuissesedéfairedecettesoumission,oualorsqu'ilpuisse lesutiliserdemanièrebeaucoupplusoccasionnelle,commeilssontindiquésinitialement.Silepatient souhaite tout de même utiliser ces traitements, il faudra privilégier les plantesfaiblement dosées en anthracénosides comme l'Aloès et les utiliser de manière trèsponctuelle,pasplusdedeuxfoisparsemaine.

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Si lepatient souffredediarrhées,on l'a vuprécédemment, les régimesalimentairescommelerégimesansrésiduspeuventêtretroprestrictifs.Doncl'optionmédicamenteuseparaîtlaplusefficaceàcourttermeetmêmeàlongterme.L'utilisationderalentisseursdutransitcommelelopéramide(IMODIUM®)ouleracécadotril(TIORFAST®)peutêtreutileencas de diarrhée aigue ou chronique chez les patients D-SII. Le lopéramide, de par sonmécanismed'actionparaîtmêmelamoléculelaplusefficacepourluttercontreladiarrhée,ilfaudrafairecependantattentionànepasavoirl'effetinverseenamenantlepatientàêtreconstipé par excès de stase intestinale. L'utilisation d'argiles comme la diosmectite(SMECTA®, SMECTALIA®) peut être également utile en cas de diarrhée chronique, enaméliorantlaconsistancedesselles.Elleseraitmêmeàprivilégierenpremièreintentioncarelleestmoinspourvoyeusedeconstipationquelesautresprincipesactifs,etellebénéficiedu statut de thérapeutique "naturelle", attendue par certains patients. L'hydratation serabienentenduetoujoursassociéeautraitementpharmacologique.

Onadoncvul'ensembledestraitementsquepeutproposerlepharmacienenconseil

dans le cadre d'une demande spontanée ou en accompagnement d'une dispensationd'ordonnance.Onlevoitbien,sonrôledeconseilestprivilégiédanslecadred'unepriseencharge d'un syndrome de l'intestin irritable, car les patients viennent pour beaucoupcherchercetypedetraitementssanspasserparleurmédecin,carilsconnaissentbienleurssymptômeset leurpathologie.C'est lorsd'un conseil d'unedemande spontanéepourdessymptômes de type diarrhée, constipation ou douleurs abdominales que le pharmacienpourra être à l'initiative d'une prise en charge plus globale du patient pour samaladie. IlpourrainciterlepatientàconsultersonmédecingénéralisteouunspécialisteafindeposerundiagnosticdeSII.C'estencesenségalementque lepharmacienparticipeauréseaudesoins primaires et entre au cœur de la prise en charge du patient pour une maladiechroniquetellequeleSII.

Enfin, pour conclure, on l'a vu, le rôle du microbiote intestinal dans le SII estprépondérant. De par sa composition au sein du système digestif, il peut influencer lessymptômes du patient ou les thérapies proposées à celui-ci. Car l'efficacité de certainstraitements comme les régimesalimentaires richesen fibresoupauvresenFODMAPs,oul'utilisationdemédicamentscommelelactuloseoulesprobiotiquespeuventêtreinfluencéeparlacompositionoul'étatdesantédumicrobioteintestinal.Silesbactériescoliquessontpropicesàproduiredugazlorsdelafermentation,celles-cienformerontdavantageencasd'apport en fibres. De même que si les bactéries sont propices à produire des AGCCstimulant le péristaltisme intestinal, celles-ci en formeront encore davantage si elles sontnourriesmassivementparunapportdeprébiotiquesoudefibres.C'estencesensoùcetteinfluencepeutêtreprépondérantepourunpatientSII,maiscettecompositionnepeutêtreappréhendéeaumomentdelaprescriptiond'unmédicament,niparlepharmacien,niparlemédecin.A l'avenir peut être, le patient pourra lors dudiagnostic de son SII, connaitre lacarted'identitéexactedesonmicrobioteetonpourraalorsluiproposerdesthérapeutiquespersonnaliséesetplusprécisespouratténuersessymptômes.C'est lesensdesrecherchesqui sont actuellement menées par les chercheurs. En attendant cela, les probiotiques

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peuvent améliorer les symptômes de certains patients, et pourront être proposés par lepharmacien d'officine. En effet, c'est principalement lui qui est le mieux placé pour luiconseiller ce type de traitement car ils ne sont que très peu prescrits par les médecins.Cependant, au vu des différents articles, études et essais cliniques impliquant lesprobiotiquesdansleSII,peudesouchessesontrévéléesefficaces.

Commecitéprécédemment,potentiellementdeuxsouchesauraientuneplusgrande

efficacitéqueleplacebo:Bifidobacterium infantis35624etLactobacillusplantarum299V(DSM 9843). Pour la première souche, celle-ci n'est pour l'instant pas commercialisée enFrance mais elle devrait l'être prochainement sous forme d'un complément alimentaireappeléALFLOREX® commercialisé par le laboratoire BIOCODEX®. La deuxième souche estelleaussipourl'instantpasprésenteenofficinemaisdevraitl'êtreégalementsouslaformed'uncomplémentalimentaireappeléSMEBIOCTA®commercialisépar IPSEN®.Etantdonnéqu'il n'y pas de recul sur ces souches dans une utilisation régulière en France, et enattendant leur commercialisation, le pharmacien pourra conseiller au patient d'autressouchesprobiotiques,ensachantqu'ellesn'ontpasprouvéleurefficacitédanslaréductiondes symptômesdu SII dansdesétudes sérieuses,mais enpratique, certainspatients sontaméliorésparlaconsommationrégulièredecessouches.Ilconviendraalorsderappeleraupatientlesrèglesdeconsommationdesprobiotiques:ilfaudralesingérerlepluspossibleàdistance des repas, l'estomac devra être vide, donc avant les repas et un schéma de 4semainesdecurepourraêtreobservéafind'évaluerl'efficacitédutraitement.Letraitementàbasedeprobiotiquesseferasoitseul,soitenaccompagnementdesautrestraitements.Ilpourramêmepotentiellementaméliorerl'efficacitédesautrestraitements.

Onl'avuégalement,lalégislationconcernantlesprobiotiquesaujourd'huiestfloueet

nepermetpasunecommunicationcorrecteenverslesconsommateurs.Lepharmacienauraalorspourrôled'informerlepatientsurcetypedeproduitdesantéetdel'informersurlesintérêtsdesprobiotiquesmaisaussileurséventuelseffetsindésirables.Lepharmacienauralàunrôledegardefou,commeill'aauprèsdesautresmédicaments.Lorsdel'arrivéed'unnouveauproduitprobiotique,laquestionposéeseradesavoirs'ildoitêtreintégrédanslesrayonnages de la pharmacie. Quelles seront les caractéristiques du produit qui serontintéressantespourprendrecettedécision?L'élémentprincipaldecetteréponsereposesurla souche contenue. Si cette souche est clairement définie sur l'emballage et qu'elle estconnue,celarend leproduitplus intéressant.Deplus,sicettesouchedéfinieestprésentedansdesessaiscliniquesoudesarticlesscientifiquesavecdessolidesarguments,celaenfaitunproduitàréférencerenpriorité.Lesautrescaractéristiquesconcernerontprincipalementlescritèresdequalitéduproduit:quantitéenUFC/unitésupérieureàunmilliard,quantitérestante à date limite de consommation, études sur la viabilité des probiotiques dans letemps et tout au long du système digestif, système de protection galénique vis à vis del'acidité gastriqueoudes sels biliaires et d'autres critères permettant de constater que lecomplémentalimentaireestd'unecertainequalité.Enfin,leprofessionneldesantéamenéàconseillerouprescriredesprobiotiquesdevraêtreformé.Maisleproblèmeseradetrouverune formation qui ne sera pas influencée trop fortement par des laboratoires ou des

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industries pharmaceutiques en lien avec la fabrication ou la commercialisation desprobiotiques.Cequiresteunedenréeraredenosjours.Laseulesolutionquiresteseradefairesespropresrecherchesauprèsdesbasesdedonnéesscientifiquesetdefairesapropreanalysecritiquedecesarticles.Maiscelaprenddutemps,cequin'estpasunechosefacileàtrouverentantquemédecinoupharmacien.

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CONCLUSION

Le syndrome de l'intestin irritable fait donc partie de ces pathologies dont on neconnaît toujourspasen2017 lestenantset lesaboutissantsexacts.Noussavonsquec'estunemaladiemultifactorielleet complexeavecdesaltérationsmotrices,des troublesde lasensibilité mais également une altération du microbiote et du système immunitaire. Lesévolutions dans les techniques de microbiologie et de biologie moléculaire ont permisd'accélérerlestravauxderecherchemaisn'onttoujourspaspermisd'affirmerlescausesetoriginesdecettemaladie.

On l'a vu, il existe différents traitements atténuant les symptômes, mais à l'heure

actuelle, aucun traitement curatif n'existe. Les principes actifs médicamenteux sontrelativementefficacespourtraiterlessymptômes,maislaplupartnel'ontpassuffisammentdémontré.LeprincipalproblèmedesétudesconcernantleSIIétantlefortpouvoirplaceboqui est retrouvé. Ceci a une incidence importante dans les résultats des essais cliniques,pouvantamenercertainsauteursàsurévaluerleseffetsdecertainstraitements.

L'implicationdumicrobiotedans laphysiopathologieduSIIest indéniable,mais ilest

impossible de déterminer pour l'instant si c'est une cause ou une conséquence de lamaladie.L'utilisationdeprobiotiques,danslaglobalitédesétudesarévéléuneffetpositif.Néanmoins, il est de notre devoir d'appliquer une certaine analyse critique dans cesdonnées.Eneffet,sinousanalysonsenprofondeur,lesétudesprésententdefortsbiais,uneffetplacebotoujoursimportantetdesfaiblessesméthodologiquesparfoisconséquentes.

Pourêtremieuxprisencharge,lesyndromedel'intestinirritabledoitd'abordêtreunemaladiemieux connuepar lesprofessionnelsde santé. Elle sera alorsmieuxexpliquéeaupatientetsonparcoursdesoinserabeaucoupplusorganisé.Laformationdecettemaladieauprès des médecins et pharmaciens est donc indispensable. Mais le mode de prise encharge de cettemaladie amène également à la question de la place du patient dans sonparcoursdesoin.Eneffetcelui-cidoitêtreacteuretnonspectateur.C'esttoutl'enjeudelamédecinedu21esiècle.Deplus, lesquestionsdespatientssurl'influencedeleurmodedeviesurleurmaladielesamènentàquestionnerleplussouventinternet,lesréseauxsociauxoulesmédiasplutôtqueleursprofessionnelsdesantéréférents,celafaitpartiemaintenantdenotrequotidien.Ilconvientalorspourlemédecinoulepharmaciennonpasdedémentirtoutcequelepatientapulireoucroiremaisdepartirdecequ'ilsaitoudecequ'ilavuetafind'essayerd'engagerunediscussionsurcesujetetd'amener lepatientàuneréflexionsurleschosesqu'ilapuliresurdifférentssupports.Larecherchedelavéritésurdifférentssujets, notamment en ce qui concerne la santé, est une préoccupation actuelle de notretemps.Cependantpersonnen'a lascience infuseet lesvéritéstoutesfaitesn'existentpas.Un bon professionnel de santé sera quelqu'un qui porte une réflexion profonde sur lesargumentsqu'ilpourratenir lorsd'unconseiloud'uneconsultation,etc'estencelaquelaconfianceseraretrouvéeentrelespatientsetlesprofessionnelsdesanté.

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ANNEXES

Annexe1:questionnaireIBS-QOL

Information Sheet on the Irritable Bowel Syndrome-Quality of Life Measure (IBS-QOL)

Commonly Asked Questions

What is the IBS-QOL? The IBS-QOL is a self-report quality-of-life measure specific to Irritable Bowel Syndrome (IBS) that can be used to assess the impact of IBS and its treatment. The IBS-QOL was developed using a needs based model. Who developed the IBS-QOL? The IBS-QOL was developed by a team of researchers from the University of Washington, Seattle under the direction of Dr. Donald L. Patrick and Dr. Douglas Drossman with sponsorship from Novartis Pharmaceuticals Corporation. Translations have been conducted by Health Research Associates under the direction of Mona Martin and MAPI Research Institute under the direction of Katrin Conway. What are the IBS-QOL items? The IBS-QOL consists of 34 items, each with a five-point response scale:

Items 1, 2, 4, 8-10, 12, 13, 16, 25-29, 34 1. Not at all 2. Slightly 3. Moderately 4. Quite a bit 5. Extremely Items 3, 5-7, 11, 14, 15, 17-24, 30-33 1. Not at all 2. Slightly 3. Moderately 4. Quite a bit 5. A great deal 1. I feel helpless because of my bowel problems. 2. I am embarrassed by the smell caused by my bowel problems 3. I am bothered by how much time I spend on the toilet. 4. I feel vulnerable to other illnesses because of my bowel problems. 5. I feel fat because of my bowel problems. 6. I feel like I'm losing control of my life because of my bowel problems. 7. I feel my life is less enjoyable because of my bowel problems. 8. I feel uncomfortable when I talk about my bowel problems. 9. I feel depressed about my bowel problems. 10. I feel isolated from others because of my bowel problems. 11. I have to watch the amount of food I eat because of my bowel problems. 12. Because of my bowel problems, sexual activity is difficult for me. 13. I feel angry that I have bowel problems. 14. I feel like I irritate others because of my bowel problems 15. I worry that my bowel problems will get worse. 16. I feel irritable because of my bowel problems 17. I worry that people think I exaggerate my bowel problems. 18. I feel I get less done because of my bowel problems. 19. I have to avoid stressful situations because of my bowel problems 20. My bowel problems reduce my sexual desire. 21. My bowel problems limit what I can wear. \\Stan\cdpr\SEAQOL\Instrument Distribution\IBSQOL - Do NOT Distribute\Instrument FAQ Information\IBSQOL Info.doc 3/22/07 10:37 AM

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22. I have to avoid strenuous activity because of my bowel problems. 23. I have to watch the kind of food I eat because of my bowel problems. 24. Because of my bowel problems, I have difficulty being around people I do not know well. 25. I feel sluggish because of my bowel problems. 26. I feel unclean because of my bowel problems. 27. Long trips are difficult for me because of my bowel problems. 28. I feel frustrated that I cannot eat when I want because of my bowel problems. 29. It is important to be near a toilet because of my bowel problems. 30. My life revolves around my bowel problems. 31. I worry about losing control of my bowels 32. I fear that I won't be able to have a bowel movement. 33. My bowel problems are affecting my closest relationships 34. I feel that no one understands my bowel problems. How is the IBS-QOL scored? The individual responses to the 34 items are summed and averaged for a total score and then transformed to a 0-100 scale for ease of interpretation with higher scores indicating better IBS specific quality of life. There are also eight subscale scores for the IBS-QOL (Dysphoria, Interference with Activity, Body Image, Health Worry, Food Avoidance, Social Reaction, Sexual, Relationships). The transformation formula used for the IBS-QOL total and scale scores is: The sum of the items - lowest possible score Score = * 100 Possible raw score range How is the IBS-QOL administered? The IBS-QOL is designed to be self-administered, and takes an average of 10 minutes to complete. The IBS-QOL can be interviewer-administered if necessary. What language versions of the IBS-QOL are available? The IBS-QOL is available in the following languages: Afrikaans Arabic for Egypt Chinese (Cantonese) for Hong-Kong) Czech Danish Chinese (Mandarin) for China and Hong-Kong Dutch (Belgium) Dutch (Netherlands) English (Australia) English (Canada) English (Ireland) English (New Zealand) English (South Africa) English (UK) English (USA) Finnish French (Belgium) French (Canada) French (France) German (Austria) German (Germany) Hebrew Hungarian Italian Korean Norwegian Spanish (Argentina) Spanish (Chile) Spanish (Columbia) Spanish (Ecuador) Spanish (Mexico) Spanish (Peru) Spanish (Spain) Spanish (USA) Swedish Is the IBS-QOL available for use?

\\Stan\cdpr\SEAQOL\Instrument Distribution\IBSQOL - Do NOT Distribute\Instrument FAQ Information\IBSQOL Info.doc 3/22/07 10:37 AM

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Annexe2:questionnaireSF-36

QUESTIONNAIRE GENERALISTE SF36 (QUALITE DE VIE)

Rubrique : auto-administré/généraliste

Note préliminaire : ces repères permettent de s’assurer de l’adéquation entre le patient et l’outilde bilan proposé.

BILAN D’UTILISATION COURANTE :International International, National Local« validé » (3) largement accepté (2) (1) (0)

Niveau du bilan : 3

POINT DE VUE UTILISATEUR (SI POSSIBLE)

Simplicitéd’utilisation

SCORE = 2

Facilitéde lecture

SCORE = 1

Sensibilitéaux très petitsécartsSCORE = 3

Fiabilitévérifiée

SCORE = 3

ReproductibleinterintraSCORE = 3

Scores appliqués : 3 = excellent 2 = bon 1 = acceptable 0 = questionnable

Présentation :Ce bilan de santé généraliste peut être utilisé en complément de bilans plus spécifiques.

Critères d’inclusion (les catégories majeures cliniques) :Toutes catégories de personnes ayant des difficultés de santé.

Critères d’exclusion (ne pas utiliser pour) :Aucun.

Critères de péjoration (diagnostic associé) :Dépression, difficultés relationnelles.

Evolution du score :Varie selon les items, afin de tester la vigilance du patient. La lecture des résultats fournit uneappréciation sémantique.

Le questionnaire généraliste SF-36

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QUESTIONNAIRE GENERALISTE SF36 (QUALITE DE VIE)

1.- En général, diriez-vous que votre santé est : (cocher ce que vous ressentez)

Excellente __ Très bonne __ Bonne __ Satisfaisante __ Mauvaise __2.- Par comparaison avec il y a un an, que diriez-vous sur votre santéaujourd’hui ?Bien meilleure qu’il y a un an __ Un peu meilleure qu’il y a un an __A peu près comme il y a un an __ Un peu moins bonne qu’il y a un an __

Pire qu’il y a un an __3.- vous pourriez vous livrer aux activités suivantes le même jour. Est-ce quevotre état de santé vous impose des limites dans ces activités ? Si oui, dansquelle mesure ? (entourez la flèche).

a.Activités intenses : courir, soulever des objets lourds, faire du sport.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

b.Activités modérées :déplacer une table, passer l’aspirateur.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

c.Soulever et transporter les achats d’alimentation.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

d.Monter plusieurs étages à la suite.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

e.Monter un seul étage.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

f.Vous agenouiller, vous accroupir ou vous pencher très bas.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

g.Marcher plus d’un kilomètre et demi.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

h.Marcher plus de 500 mètres____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

i.Marcher seulement 100 mètres.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

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QUESTIONNAIRE GENERALISTE SF36 (QUALITE DE VIE)

j.Prendre un bain, une douche ou vous habiller.____↓________________________↓_____________________↓____Oui, très limité oui, plutôt limité pas limité du tout

4.- Au cours des 4 dernières semaines, avez-vous eu l’une des difficultéssuivantes au travail ou lors des activités courantes, du fait de votre santé ?(réponse : oui ou non à chaque ligne)

oui nonLimiter le temps passé au travail, ou à d’autres activités ?Faire moins de choses que vous ne l’espériez ?Trouver des limites au type de travail ou d’activités possibles ?Arriver à tout faire, mais au prix d’un effort

5.- Au cours des 4 dernières semaines, avez-vous eu des difficultés suivantesau travail ou lors des activités courantes parce que vous étiez déprimé ouanxieux ? (réponse : oui ou non à chaque ligne).

oui nonLimiter le temps passé au travail, ou à d’autres activités ?Faire moins de choses que vous n’espériez ?Ces activités n’ont pas été accomplies aussi soigneusement que d’habitude ?

6.- Au cours des 4 dernières semaines, dans quelle mesure est-ce que votreétat physique ou mental ont perturbé vos relations avec la famille, les amis, lesvoisins ou d’autres groupes ?____↓_________________↓_________________↓_______________↓____Pas du tout très peu assez fortement énormément

7.- Avez-vous enduré des souffrances physiques au cours des 4 dernières semaines ?____↓_________________↓_________________↓_______________↓____Pas du tout très peu assez fortement énormément

8.- Au cours des 4 dernières semaines la douleur a-t-elle gêné votre travail ouvos activités usuelles ?____↓_______________↓____________↓_________________↓_______________↓_____Pas du tout un peu modérément assez fortement énormément

9.- Ces 9 questions concernent ce qui s’est passé au cours de ces dernières 4semaines. Pour chaque question, donnez la réponse qui se rapproche le plusde ce que vous avez ressenti. Comment vous sentiez-vous au cours de ces 4semaines :

a. vous sentiez-vous très enthousiaste ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

b. étiez-vous très nerveux ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___

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QUESTIONNAIRE GENERALISTE SF36 (QUALITE DE VIE)

Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

c. étiez-vous si triste que rien ne pouvait vous égayer ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

d. vous sentiez-vous au calme, en paix ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

e. aviez-vous beaucoup d’énergie ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

f. étiez-vous triste et maussade ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

g. aviez-vous l’impression d’être épuisé(e) ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

h. étiez-vous quelqu’un d’heureux ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

i. vous êtes-vous senti fatigué(e) ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

10.- Au cours des 4 dernières semaines, votre état physique ou mental a-t-ilgêné vos activités sociales comme des visites aux amis, à la famille, etc ?____↓________________↓________________↓___________↓_______________↓___Tout le temps très souvent parfois peu souvent jamais

11.- Ces affirmations sont-elles vraies ou fausses dans votre cas ?

a. il me semble que je tombe malade plus facilement que d’autres.______↓____________↓_____________↓__________↓_________↓__Tout à fait vrai assez vrai ne sais pas plutôt faux faux

b. ma santé est aussi bonne que celle des gens que je connais.______↓____________↓_____________↓__________↓_________↓__Tout à fait vrai assez vrai ne sais pas plutôt faux faux

c. je m’attends à ce que mon état de santé s’aggrave.______↓____________↓_____________↓__________↓_________↓__Tout à fait vrai assez vrai ne sais pas plutôt faux fauxQUESTIONNAIRE GENERALISTE SF36 (QUALITE DE VIE)

d. mon état de santé est excellent.______↓____________↓_____________↓__________↓_________↓__Tout à fait vrai assez vrai ne sais pas plutôt faux faux

Wade JE, Sherbourne CD. The MOS 36-item short-form health survey (SF-36). Medical Care1992;30:473–483.

151

Annexe3:MédicamentsutilisésenGastro-entérologie(d'aprèslesitehttp://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/Lesprixsontindiquéshonorairesdedispensationcompris=1,02€)

Spécialité StatutPrix/boitePrinceps

Prix/boiteGénérique

Prix/unité

SPAFSON®(Phloroglucinol)

PH15 2,99€bte30cp2,35€bte10lyoc80mg2,49€bte5lyoc160mg

-idem-

0,099€0,235€0,498€

DEBRIDAT®(Trimébutine)

PH15 4,56€bte30cp100mg7,43€bte30cp200mg

4,22€6,23€

0,152€/0,141€0,248€/0,207€

DICETEL®(Pinavérium)

PH15 4,28€bte20cp50mg6,07€bte30cp100mg

-5,45€

0,214€0,202€/0,182€

DUSPATALIN®(Mébévérine)

PHN/PH15 -(bte30cp100mg)11,45€bte30gél200mg(prixmoyenconstaté*)

2,60€3,51€

0,087€0,382€/0,117€

METEOSPASMYL®(Alvérine +Siméticone)

PH15 3,66€bte20caps - 0,183€

METEOXANE®(Phloroglucinol +Siméticone)

PH15 3,14€bte60gél - 0,052€

LIBRAX®(Chlordiazépoxide+Clidinium)

NR 7,76€bte30cp(prixmoyenconstaté*)

- 0,259€

FORLAX®(Macrogol4000)

PH30 3,78€bte20sach 3,43€ 0,189€/0,172€

TRANSIPEG®(Macrogol3350)

PH30 3,87€bte20sach5,9g4,90€bte30sach2,95g

--

0,194€0,163€

MOVICOL®(Macrogol 3350+autres)

PH30 4,20€bte20sach - 0,21€

DUPHALAC®(Lactulose)

PH30 3,55€bte20sach2,54€flc200ml

3,35€idem

0,177€/0,167€0,191€

SPAGULAX®(Ispaghul)

PH30 3,76€bte20sachmucpur8,28€700gmucpur3,76€bte20sacheff

---

0,188€0,083€0,188€

POLYKARAYA®(GommeKaraya)

PHN 17,46€bte30sach(prixmoyenconstaté*)

0,582€

152

NORMACOL®(GommeSterculia)

PH15 5,31€bte30sach9,86€1kgvrac

0,177€

IMODIUM®(Lopéramide)

PH30 3,34€bte20gél2mg 2,93€ 0,167€/0,146€

ARESTAL®(Lopéramide)

PH30 4,17€bte20cp1mg - 0,208€

TIORFAN®(Racécadotril)

PH30 7,61€bte20gél100mg5,83€bte12cp175mg

6,22€-

0,38€/0,311€0,485€

SMECTA®(Diosmectite)

PH30 4,35€bte30sach7,41€bte60sach

--

0,145€0,123€

BEDELIX®(Montmorillonitebeidellitique)

NR 9,13€bte30sach13,32€bte60sach(prixmoyensconstatés*)

--

0,304€0,222€

CARBOSYLANE®(Charbon +Siméticone)

NR 6,76€bte24dosesde2gél8,81€bte48dosesde2gél(prixmoyensconstatés*)

--

0,282€0,183€

CHARBONDEBELLOC®(Charbon)

NR 8,47€bte36caps10,10€bte60caps(prixmoyensconstatés*)

--

0,235€0,168€

PH15:Médicamentsremboursésà15%parl'assurancemaladiePH30:Médicamentsremboursésà30%parl'assurancemaladieNR:Médicamentsnonremboursésparl'assurancemaladie*D'aprèslesitehttps://www.pharmanity.com/

153

Annexe4:Teneurmoyenneenfibresdesaliments(TableCiqualANSES2016)

FarinesTeneurmoyenne

(g/100g)Légumessecs

Teneurmoyenne

(g/100g)

Sondemaïs 79 Haricotsflageolets 16,5

Sondeblé 42 Poiscassés 9,3

Farinedeseigle(T130) 23,8 Haricotsrouges 7,33

Sonderiz 21 Haricotsblancs 6,3

Sond'avoine 16,7 Lentilles 6

Farinedebléintégrale(T150)

12,5 Fèves 4,5

Farinedepoischiche 10,8 Graines,céréales,pâtes

Flocond'avoine 10,2 Boulgourdeblé 4,5

Farinedeblécomplète(T110)

7 Pâtesaublécomplet 3,3

Farinedeblé(T45) 4,6 Quinoa 2,8

Farinedesarrasin 4,2 Rizcomplet 2,3

Farinedemaïs 2,55 Pâtesaublé 2

Farinederiz 2,15 Semouledeblédur 1,6

Féculedemaïs 0,87 Semouledemaïs 1,3

Rizblanc 1

Fruits Légumes

Fruitdelapassion 10,4 Artichaut 8,3

Goyave 7,67 Petitspois 5,8

Framboise,Cassis,Cranberry

5-6 Aubergine 4,3

Mûre,Groseille,Kiwi 4-5 Haricots verts, Panais,Chou de Bruxelles,Poireau,Maïsdoux,

3-4

Kiwi,Poire,Figue,Rhubarbe,Myrtille,Prunes,Orange,Pêches

2-3,5 Carottes, Poivronrouge,Fenouil,Potiron

2-3

Bananes,Nectarine,Abricot,Cerise,Pomme

1-2 Courgette 1,5

154

Annexe5:RésumédesdifférentstraitementsduSIIenconseilspharmaceutiques

155

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SERMENTDEGALIEN

Jejure,enprésencedesmaîtresdelaFaculté,desconseillersdel’ordredesPharmaciensetdemescondisciples:

D’honorerceuxquim’ontinstruit(e)danslespréceptesdemonartetdeleurtémoignermareconnaissanceenrestantfidèleàleurenseignement;

D’exercer,dansl’intérêtdelasantépublique,maprofessionavecconscienceetderespecternonseulementlalégislationenvigueur,maisaussilesrèglesdel’honneur,delaprobitéetdudésintéressement;

Denejamaisoubliermaresponsabilitéetmesdevoirsenverslemaladeetsadignitéhumaine.

Enaucuncas,jeneconsentiraiàutilisermesconnaissancesetmonétatpourcorromprelesmoeursetfavoriserdesactescriminels.

Queleshommesm’accordentleurestimesijesuisfidèleàmespromesses.

Quejesoiscouvert(e)d’opprobreetméprisé(e)demesconfrèressij’ymanque.

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TITRELeSyndromedel’intestinirritable:intérêtdumicrobioteintestinaletplacedupharmaciend’officinedansleparcoursdesoindupatientRESUMELe syndrome de l'intestin irritable (SII) est un des premiers motifs deconsultation en gastroentérologie. Le SII se définit par la coexistence dedouleurs abdominales chroniques et de troubles du transit (constipation,diarrhée, alternance des deux) fluctuants. A l'heure actuelle, différentesthérapeutiques existent afin de contrôler les symptômes de cette maladie,mais aucun traitement curatif n'existe. Le microbiote intestinal a un rôleprépondérantàlafoisdanslaphysiopathologiedelamaladiemaisaussidanssapriseencharge. L'objectifde cette thèseestd'établirunétatdes lieuxdecette maladie et de ses traitements, et notamment l'utilisation desprobiotiques,maisaussidemontrer l'intérêtdupharmaciend'officinedansleparcoursdesoindupatient.DISCIPLINEPharmacieMOTSCLESSyndrome de l'intestin irritable ; Gastroentérologie ; Microbiote intestinal ;Probiotiques;Pharmacied'officineINTITULEETADRESSEDEL'U.F.R.UFRdesSciencesPharmaceutiquesUniversitédeBordeaux–CollègeSciencesdelaSanté146RueLéoSaignat33076BORDEAUX


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