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Traitement chirurgical des tumeurs infiltrantes de vessieCorrespondances en Onco-urologie - Vol. I -...

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Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 3 - octobre-novembre-décembre 2010 126 dossier thématique Vessie : le point sur les traitements adjuvants et néo-adjuvants Traitement chirurgical des tumeurs infiltrantes de vessie Radical surgery and urinary diversion for muscle-invasive bladder cancer A. Daché*, N. Barry-Delongchamps*, M. Zerbib* L a cystectomie totale est le traitement de réfé- rence du cancer infiltrant de la vessie (1). L’état général du patient et son âge doivent être pris en compte lors du choix de la chirurgie et du type de dérivation urinaire, car les résultats en termes de complications et de survie après cystectomie totale sont corrélés aux comorbidités du patient, en parti- culier au score ASA (2). Le délai entre le diagnostic de cancer de la vessie et la cystectomie totale est un critère pronostique du résultat carcinologique et des possibilités de dérivation urinaire. Selon la plupart des études, ce délai devrait être inférieur à 90 jours (3, 4). La cystectomie totale est indiquée chez les patients ayant un carcinome infiltrant de la vessie T2-T4a, N0-Nx, M0 (1). Les autres indications sont les tumeurs superficielles à haut risque, récidivantes après résec- tion endoscopique de la vessie (RTUV) et échec des instillations endovésicales de BCG : ce sont les tumeurs de haut grade, les tumeurs T1 et les carcinomes in situ (CIS). La cystectomie totale peut aussi être proposée à visée palliative en cas de fistule urinaire tumorale ou de réci- dive postradique, ou encore d’hématurie macrosco- pique récidivante (5). Cystectomie totale Cystoprostatectomie totale chez l’homme La voie d’abord de référence est la laparotomie médiane sous-ombilicale. L’intervention débute par l’abord de l’espace de Retzius et la réalisation d’une lymphadénec- tomie étendue bilatérale. Après ouverture de l’aponé- vrose pelvienne de part et d’autre de la prostate, le plexus de Santorini est lié puis sectionné, ce qui permet d’exposer l’urètre. Celui-ci est sectionné, en respectant le sphincter strié lorsqu’un rétablissement de la continuité urinaire est envisagé. La dissection se poursuit sur la face postérieure de la prostate. L’ouverture de l’aponévrose de Denonvilliers permet d’accéder au plan des canaux déférents et des vésicules séminales. Les canaux déférents * Service d’urologie, hôpital Cochin, Paris. Points forts highlights » La cystectomie totale est le traitement curatif de référence du cancer infiltrant de vessie non métastatique. » L’intervention consiste en une cystoprostatectomie totale chez l’homme et en une pelvectomie antérieure chez la femme. » Il existe 2 types de dérivation urinaire : anatomique et extra-anatomique. » Les principales complications sont liées au mode de dérivation urinaire. » Les stades tumoral et ganglionnaire sont les facteurs prédictifs majeurs de survie. » Le taux de survie globale varie de 58 à 84 % à 5 ans pour les tumeurs de stade inférieur ou égal à pT2N0 et il est inférieur à 50 % pour les tumeurs de stade supérieur ou égal à pT3. Mots-clés : Cancer infiltrant de la vessie – Cystectomie totale – Dérivation urinaire – Intervention de Bricker – Entéro-cystoplastie. Radical cystectomy is the gold standard treatment for non-metastatic muscle-invasive bladder cancer. The surgery consists in radical cystoprostatectomy for men and anterior pelvectomy for women. Main complications are related to the type of urinary diversion. Tumour and nodal status are the main predictive factors of survival. The 5-year overall survival rate ranges between 58 and 84% for tumors up to pT2N0 and lower than 50% for tumors pT3 or higher. Keywords: Muscle invasive bladder cancer – Radical cys- tectomy – Urinary diversion – Ileal conduit – Orthotopic neobladder.
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  • Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 3 - octobre-novembre-décembre 2010126

    d o s s i e r t h é m a t i q u e

    Vessie : le point sur les traitements adjuvants et néo-adjuvants

    Traitement chirurgical des tumeurs infiltrantes de vessieRadical surgery and urinary diversion for muscle-invasive bladder cancerA. Daché*, N. Barry-Delongchamps*, M. Zerbib*

    L a cystectomie totale est le traitement de réfé-rence du cancer infiltrant de la vessie (1). L’état général du patient et son âge doivent être pris en compte lors du choix de la chirurgie et du type de dérivation urinaire, car les résultats en termes de complications et de survie après cystectomie totale sont corrélés aux comorbidités du patient, en parti-culier au score ASA (2). Le délai entre le diagnostic de cancer de la vessie et la cystectomie totale est un critère pronostique du résultat carcinologique et des possibilités de dérivation urinaire. Selon la plupart des études, ce délai devrait être inférieur à 90 jours (3, 4).La cystectomie totale est indiquée chez les patients ayant un carcinome infiltrant de la vessie T2-T4a, N0-Nx, M0 (1). Les autres indications sont les tumeurs superficielles à haut risque, récidivantes après résec-tion endoscopique de la vessie (RTUV) et échec des instillations endovésicales de BCG : ce sont les tumeurs de haut grade, les tumeurs T1 et les carcinomes in situ (CIS).

    La cystectomie totale peut aussi être proposée à visée palliative en cas de fistule urinaire tumorale ou de réci-dive postradique, ou encore d’hématurie macrosco-pique récidivante (5).

    Cystectomie totale

    Cystoprostatectomie totale chez l’hommeLa voie d’abord de référence est la laparotomie médiane sous-ombilicale. L’intervention débute par l’abord de l’espace de Retzius et la réalisation d’une lymphadénec-tomie étendue bilatérale. Après ouverture de l’aponé-vrose pelvienne de part et d’autre de la prostate, le plexus de Santorini est lié puis sectionné, ce qui permet d’exposer l’urètre. Celui-ci est sectionné, en respectant le sphincter strié lorsqu’un rétablissement de la continuité urinaire est envisagé. La dissection se poursuit sur la face postérieure de la prostate. L’ouverture de l’aponévrose de Denonvilliers permet d’accéder au plan des canaux déférents et des vésicules séminales. Les canaux déférents

    * Service d’urologie, hôpital Cochin, Paris.

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    » La cystectomie totale est le traitement curatif de référence du cancer infiltrant de vessie non métastatique.

    » L’intervention consiste en une cystoprostatectomie totale chez l’homme et en une pelvectomie antérieure chez la femme.

    » Il existe 2 types de dérivation urinaire : anatomique et extra-anatomique. » Les principales complications sont liées au mode de dérivation urinaire. » Les stades tumoral et ganglionnaire sont les facteurs prédictifs majeurs de survie.

    » Le taux de survie globale varie de 58 à 84 % à 5 ans pour les tumeurs de stade inférieur ou égal à pT2N0 et il est inférieur à 50 % pour les tumeurs de stade supérieur ou égal à pT3.

    Mots-clés : Cancer infiltrant de la vessie – Cystectomie totale – Dérivation urinaire – Intervention de Bricker – Entéro-cystoplastie.

    Radical cystectomy is the gold standard treatment for non-metastatic muscle-invasive bladder cancer.

    The surgery consists in radical cystoprostatectomy for men and anterior pelvectomy for women.

    Main complications are related to the type of urinary diversion.

    Tumour and nodal status are the main predictive factors of survival.

    The 5-year overall survival rate ranges between 58 and 84% for tumors up to pT2N0 and lower than 50% for tumors pT3 or higher.

    Keywords: Muscle invasive bladder cancer – Radical cys-tectomy – Urinary diversion – Ileal conduit – Orthotopic neobladder.

  • Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 3 - octobre-novembre-décembre 2010 127

    Traitement chirurgical des tumeurs infiltrantes de vessie

    sont sectionnés et les vésicules séminales libérées de leurs attaches au plancher pelvien, ce qui permet de poursuivre la dissection jusqu’à la face postérieure du col vésical. On se porte ensuite au niveau de la face postérieure de la vessie, qui est libérée en haut et en avant par section de l’ouraque. Le péritoine est ouvert, ce qui permet d’exposer le dôme et le fond vésical. Les faces latérales de la vessie sont libérées après section de la partie haute des canaux déférents et section des 2 artères ombilicales. La dissec-tion se poursuit latéralement et en arrière jusqu’au trigone vésical. Les uretères pelviens sont libérés et sectionnés sur clip. Les 2 plans de dissection (rétroprostatique et vésical) se rejoignent en avant du rectum, la vessie n’étant fixée au plancher pelvien que par ses attaches postéro-latérales. Celles-ci sont ligaturées puis sectionnées, et la pièce opératoire est extraite en un bloc comprenant la vessie, la prostate et les vésicules séminales. À ce stade de l’intervention se pose le problème du mode de dérivation urinaire. Des recoupes urétérales et une recoupe urétrale sont adressées pour examen extemporané afin de confirmer l’absence d’atteinte carcinomateuse. En cas d’envahissement urétéral, des recoupes sont effectuées en zone saine. La présence d’un envahissement urétral contre-indique un rétablissement anatomique de la continuité urinaire (entérocystoplastie), et pose l’indication d’une urétrectomie complémentaire.

    Cystoprostatectomie avec préservation de la coque prostatique La préservation de la coque prostatique nécessite de réa-liser une résection endoscopique de prostate de stadifica-tion afin d’éliminer une extension tumorale prostatique.Cette technique a pour objectif de diminuer le risque d’incontinence urinaire et d’insuffisance érectile post-opératoire (6). En effet, la préservation de la capsule pros-tatique permet, d’une part, de préserver les bandelettes vasculo-nerveuses et, d’autre part, d’augmenter la lon-gueur urétrale et de conserver les attaches anatomiques pelviennes de l’urètre (ligaments pubo-prostatiques, aponévrose pelvienne). Néanmoins, l’évaluation de cette technique a montré de mauvais résultats carcinologiques. Une étude prospective publiée en 2004 ayant porté sur 34 patients a rapporté un taux de métastases précoces de 18 % après un suivi moyen de 26 mois (7, 8). Cette tech-nique chirurgicale n’est donc plus proposée actuellement.

    Cystectomie totale chez la femme (pelvectomie antérieure)Chez la femme, l’intervention de référence est la pelvec-tomie antérieure emportant la vessie, l’utérus et la paroi antérieure du vagin. La conservation ovarienne dépend de l’état hormonal de la patiente.

    L’incision est médiane sous-ombilicale et la voie d’abord est transpéritonéale. L’intervention débute par une lymphadénectomie ilio-obturatrice bilatérale. L’hystérectomie commence par la ligature-section du ligament rond de part et d’autre de l’utérus. La dis-section se prolonge par l’incision du péritoine latéral entre les ligaments ronds et lombo-ovariens, puis l’ouverture du feuillet postérieur du ligament large jusqu’à l’insertion utérine des ligaments utéro-sacrés. Les artères utérines et cervico-vaginales sont liées, ce qui permet de pédiculiser l’isthme utérin et d’ouvrir le cul-de-sac vaginal postérieur. Le dôme vésical est libéré par ligature-section de l’ouraque. La face antérieure du col de la vessie est libérée par ligature-section du plexus de Santorini, ce qui expose l’urètre et la face anté-rieure du vagin. Les 2 uretères sont disséqués dans leur portion pelvienne et sectionnés sur clip. À ce stade de l’intervention, le bloc constitué par la vessie et l’utérus n’est plus retenu que par l’urètre, la paroi antérieure du vagin et les ailerons vésicaux latéraux. Une fois ces éléments sectionnés, la pièce opératoire est extraite, et une analyse extemporanée des recoupes urétrales et urétérales est réalisée. L’intervention s’achève par la fermeture du vagin puis la dérivation des urines.

    Cystectomie totale chez la femme avec préservation urétrale et remplacement de la vessieDans certains cas particuliers, l’exérèse peut être limitée en préservant le bloc utéro-vaginal. Cela est possible sur le plan carcinologique en cas de tumeur vésicale respectant le plan postérieur et de tumeur limitée n’infiltrant que superficiellement le muscle vésical. La conservation de la paroi antérieure du vagin et de l’urètre permet donc techniquement de réaliser une dérivation anatomique des urines. Il est conseillé de ne pas réaliser d’hystérectomie afin de limiter le risque de rétention postopératoire lié au basculement de la néovessie dans le pelvis. Néanmoins, les résultats fonctionnels après entérocystoplastie chez la femme sont moins bons que chez l’homme, et ce type de dérivation n’est réalisé que chez les femmes jeunes et motivées (9).

    Cystectomie totale et laparoscopie (cœlioscopie et robot)Les cystectomies totales laparoscopique et robot-assistée peuvent être effectuées selon les mêmes principes que la voie ouverte chez l’homme et chez la femme. Ces techniques restent néanmoins expéri-mentales en l’absence de résultats carcinologiques et fonctionnels fiables (10-13).

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    Vessie : le point sur les traitements adjuvants et néo-adjuvants

    Figure �2. Entérocystoplastie avec détubulisation en “Z” (image extraite du rapport AFU 2002, avec l’aimable autorisation du Pr Zerbib).

    Figure �1. Dérivation urinaire de type Bricker (image extraite du rapport AFU 2002, avec l’aimable autorisation du Pr Zerbib).

    Dérivations urinaires après cystectomie totale

    GénéralitésLes dérivations urinaires après cystectomie totale sont classées en deux catégories : les dérivations externes cutanées (continentes et non continentes) et les déri-vations internes (14, 15).Parmi les dérivations externes cutanées, l’intervention de référence est l’urétérostomie cutanée transiléale (intervention de Bricker). Parmi les dérivations urinaires internes, on distingue les dérivations orthotopiques (vessie de remplacement tubulée ou détubulée) et les dérivations recto-sigmoïdiennes.

    Urétérostomies cutanées trans-iléales (dérivation de Bricker) Il s’agit d’une dérivation externe cutanée non conti-nente (figure 1). Elle est indiquée sur le plan carcino-logique en cas d’envahissement urétral, du col vésical ou de l’urètre prostatique.Après avoir repéré la dernière anse grêle (à 20 cm de la jonction iléo-cæcale), un segment de 10 à 15 cm de l’intestin grêle est prélevé avec son méso par liga-tures-sections du mésentère et section du tube digestif. La continuité digestive est rétablie par l’anastomose des segments d’amont et d’aval de l’iléon. La partie proximale du segment de l’intestin grêle prélevé est fermée par un surjet de fil résorbable, la partie d’aval étant laissée ouverte en vue de la stomie.Après avoir libéré les 2 uretères jusqu’à leur portion lombaire, on fait passer l’uretère gauche à droite, sous la racine du mésentère. Deux anastomoses urétéro-iléales sont réalisées, le plus souvent en implantant directe-ment les uretères sur la partie proximale du segment iléal prélevé. Ces anastomoses sont réalisées sur des

    sondes urétérales afin de diminuer le risque de fistule et de sténose postopératoire. La partie distale du segment iléal prélevé est montée à la peau en péri-ombilical droit, puis fixée par des points séparés. Les sondes urétérales sont extériorisées par l’iléostomie.

    Entéro-cystoplasties de substitutionLe résultat fonctionnel d’une entérocystoplastie dépend essentiellement de la sélection rigoureuse des patients. Il est important de préciser que l’objectif principal de la chirurgie est le résultat carcinologique. Ainsi, en cas de maladie évoluée, lorsque l’espérance de vie est limitée, une entérocystoplastie ne paraît pas justifiée.Plusieurs techniques ont été proposées, celles utili-sant une vessie détubulée étant les plus couramment proposées. Parmi ces techniques, la plus pratiquée est l’entérocystoplastie avec détubulisation en “Z” (figure 2), en “M” ou en “W”, selon Hautmann.

    Urétérostomies cutanéesCe type de dérivation est le plus simple à réaliser techni-quement, car il ne nécessite pas de prélèvement digestif. Les suites chirurgicales sont elles aussi plus simples, en raison de l’absence d’anastomose digestive. Les urété-rostomies cutanées peuvent donc être proposées aux patients fragiles ou ayant des antécédents digestifs ne permettant pas le prélèvement intestinal. Néanmoins, ce mode de dérivation nécessite la réalisation de deux stomies cutanées, et les soins à long terme sont plus lourds, car les uretères doivent être intubés en perma-nence par des sondes spécifiques afin d’éviter une sténose.

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    Traitement chirurgical des tumeurs infiltrantes de vessie

    Complications postopératoires Le taux rapporté de mortalité périopératoire est infé-rieur à 1 %. Les complications postopératoires pré-coces concernent jusqu’à un tiers des patients. Elles sont dominées par les iléus prolongés et les fistules anastomotiques digestives. Les complications tardives (après 3 mois) sont habituellement classées en quatre catégories : mécaniques, métaboliques, infectieuses et lithiasiques (16).

    ✓ Complications mécaniques. Il s’agit de complica-tions liées au mode de dérivation des urines. La sténose de l’anastomose urétéro-digestive est la complication tardive la plus fréquente. Le reflux urétéral est une autre complication mécanique après cystectomie totale.

    ✓ Complications métaboliques. La dérivation urinaire selon Bricker n’entraîne quasiment aucune modification métabolique. En revanche, les entérocystoplasties sont à l’origine de modifications métaboliques. Celles-ci sont spécifiques au segment intestinal concerné par la reconstruction. L’utilisation d’un segment iléo-colique peut entraîner une malabsorption de la vitamine B12, tandis que l’utilisation d’un segment colique expose à une acidose hyperchlorémique.

    ✓ Complications infectieuses. Les principales compli-cations infectieuses sont les pyélonéphrites sur obstacle ou liées à un reflux urétéral. Près de 80 % des patients porteurs d’une dérivation cutanée, continente ou non, ont une bactériurie asymptomatique, qui ne nécessite aucun traitement prophylactique. Environ 40 % des patients porteurs d’une vessie de remplacement ont une bactériurie asymptomatique, qui peut favoriser la formation de calculs.

    ✓ Complications lithiasiques. La maladie lithiasique est moins fréquente en l’absence de vessie de rem-placement. Les calculs sont localisés principalement au niveau du haut appareil urinaire. Néanmoins, ils peuvent aussi se former au niveau du réservoir ou de la néovessie en cas de bactériurie asymptomatique ou de résidu postmictionnel chronique.

    Surveillance après cystectomie totale

    La surveillance est à la fois carcinologique et fonctionnelle.

    Sur le plan carcinologiqueLe rythme de la surveillance est rapproché durant les deux premières années (tous les 3 mois), puis il est semestriel jusqu’à 5 ans, et enfin annuel.L’examen morphologique de référence est la tomo-densitométrie (TDM) thoraco-abdomino-pelvienne,

    à la recherche d’une récidive locale ou d’une seconde localisation (haut appareil), d’une récidive ganglionnaire ou métastatique.Sur le plan biologique, la cytologie urinaire permet de dépister une récidive tumorale du haut appareil (ou urétrale en cas de dérivation interne).Une surveillance du PSA est réalisée en cas de décou-verte fortuite d’un cancer de la prostate sur la pièce de cystoprostatectomie.

    Sur le plan fonctionnelLa surveillance repose sur l’évaluation de la fonction rénale et du bon fonctionnement du montage de dérivation. Elle dépend donc du type de dérivation, chacun pouvant être à l’origine de complications spécifiques.Dans tous les cas, les urines sont colonisées par des germes, ce qui ne constitue pas un critère d’instauration d’une antibiothérapie.

    ✓ En cas de dérivation de Bricker. Les sondes uré-térales sont habituellement retirées après un délai de 1 mois postopératoire.L’uro-TDM permettra de rechercher une sténose anas-tomotique (urétéro-digestive) à l’origine d’un retard excrétoire.

    ✓ En cas d’entérocystoplastie. Les sondes JJ sont retirées en consultation après un délai de 1 mois post-opératoire. De même, l’uro-TDM permettra de mettre en évidence une sténose anastomotique. Contrairement aux patients ayant eu une dérivation de type Bricker, ceux ayant une entérocystoplastie présen-tent un risque de stase urinaire et de lithiase au niveau de la néovessie, ainsi que de reflux urétéral. L’évaluation du résidu postmictionnel est donc essentielle.La surveillance biologique doit dépister une complica-tion métabolique (ionogramme sanguin, dosage de la vitamine B12 sérique).

    ✓ En cas d’urétérostomies cutanées. Ce mode de dérivation nécessite des sondes urétérales permanentes pour éviter une sténose des urétérostomies. Ces sondes sont donc changées toutes les 6 semaines.

    Résultats carcinologiques et fonctionnels

    Résultats carcinologiquesLe stade TNM et la présence d’un envahissement gan-glionnaire sont les principaux facteurs prédictifs de survie (17-19).Pour les tumeurs de stade inférieur ou égal à pT2N0, le taux de survie globale à 5 ans varie entre 58 et 84 % en fonction des séries. En cas de cancer localement avancé, il descend au-dessous de 50 %.

  • Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 3 - octobre-novembre-décembre 2010130

    d o s s i e r t h é m a t i q u e

    Vessie : le point sur les traitements adjuvants et néo-adjuvants

    Les taux de survie sans récidive et de survie spécifique à 5 ans sont de 58 % et 66 % dans une série récente de patients traités pour cancer localisé ou localement avancé de la vessie non métastatique (17). Dans cette étude, l’âge, la présence de CIS ou d’un envahissement lympho-vasculaire sur la pièce de cystectomie étaient également associés à la survie sans récidive (17).Dans une autre étude rétrospective, la survie a été évaluée chez 686 patients en fonction du statut gan-glionnaire. En cas de cancer localisé et d’absence d’at-teinte ganglionnaire, les taux de survie globale, de survie spécifique et de survie sans récidive à 10 ans étaient de 73 %, 62 % et 33 %. En cas de cancer locale-ment avancé (≥ pT3), ils descendaient à 50 %, 41 % et 23 %. En cas d’atteinte ganglionnaire, la survie spéci-fique et la survie globale étaient de 28 % et 21 % (18).Dans une autre étude (19), les taux de survie sans récidive à 5 ans ont été évalués en fonction du stade tumoral : ils étaient de 76 % chez les patients ayant une tumeur pT1, de 74 % en cas de pT2, de 52 % en cas de pT3 et de 36 % en cas de pT4 (19).

    Résultats fonctionnels ✓ Continence. Chez l’homme, le taux de continence

    postopératoire après entérocystoplastie varie entre 80 % et 100 % le jour et entre 50 % et 80 % la nuit, sous réserve

    d’avoir 1 ou 2 levers. Chez la femme, il est similaire, avec néanmoins un risque de rétention évalué à 15 %.

    ✓ Sexualité. Chez l’homme, en l’absence de conser-vation des bandelettes vasculo-nerveuses, le taux rap-porté de dysfonction érectile est de 80 %. Il diminue à 40 % en cas de conservation des bandelettes. Chez la femme, la cystectomie entraîne fréquemment une dyspareunie.

    ✓ Qualité de vie et mode de dérivation urinaire. Il est vraisemblable que chaque patient porteur d’une dérivation urinaire souffre de difficultés spécifiques à la dérivation choisie, ce qui finalement aboutit à un reten-tissement sur la qualité de vie globalement identique. Il a été montré que, pour avoir une meilleure qualité de vie après l’opération, il faut que le patient ait participé à la décision du type de dérivation urinaire choisi.

    Conclusion

    La cystectomie totale est l’intervention de référence en cas de cancer de la vessie non métastatique. Le choix de la dérivation urinaire doit reposer sur des critères carcinologiques, mais aussi sur une discussion entre le patient et son chirurgien afin que la qualité de vie après l’opération soit la meilleure possible. ■

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    R é f é r e n c e s


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