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Tunisia: Draft Press, Printing, and Publication Code · Web viewLes modalités de présentation...

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République Tunisienne: Décret-Loi Relatif à La Liberté de la Presse, De l’impression de l’édition

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Novembre 2011

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Résumé En novembre 2011, ARTICLE 19 a rédigé une analyse du Décret-Loi N° 215 du 2 novembre 2011 relatif à la liberté de la presse, de l’impression et de l’édition adopté par le gouvernement intérimaire tunisien en remplacement du Code de la Presse de 1975, jugé trop répressif par les journalistes.

En 2011, ARTICLE 19 a analysé trois versions préliminaires du Code de la Presse (en mars et août 2011) et apporté sa contribution aux parties prenantes et partenaires tunisiens durant la phase de rédaction. Bien que le Code publié constitue une amélioration par rapport à ces versions, il n’est toujours pas conforme aux standards internationaux sur de nombreux points essentiels et demeure très problématique au regard des droits de l’homme. En échouant notamment à protéger et à promouvoir de façon adéquate le droit à la liberté d’expression dans le cadre du droit international, le Code de la Presse a des implications dangereuses pour la liberté d’expression en Tunisie.

ARTICLE 19 est particulièrement préoccupé par les insuffisances suivantes :

La définition du « journaliste professionnel » incluse dans l’Article 7 est restrictive et ambiguë. Elle sert de facto à réserver le droit de s’exprimer dans la presse écrite à une catégorie limitée de personnes.

Le Code de la Presse impose injustement des obligations d’enregistrement indirect et le dépôt d’exemplaires gratuits des œuvres publiées.

Le Code de la Presse impose des obligations injustes et des conditions d’exercice aux directeurs de rédaction, rédacteurs en chef et journalistes. Ces dispositions favorisent une mainmise plus importante du gouvernement sur les journaux et privent le public de l’accès à des informations et des idées provenant des sources de son choix.

Les dispositions visant à garantir la transparence et le pluralisme de la presse écrite constituent une ingérence dans le domaine privé.

Le Code de la Presse prévoit des sanctions pénales contraires aux standards internationaux pour des actes commis par des journalistes et la presse écrite.

De manière générale, ARTICLE 19 estime que le Code de la Presse peut entraver la pleine jouissance du droit à la liberté d’expression en Tunisie. Il doit par conséquent être largement amendé afin de rester conforme aux standards internationaux.

ARTICLE 19 invite donc le gouvernement tunisien à amender le Code de la Presse comme suit :

Suppression des obligations d’enregistrement direct et indirect imposées à la presse écrite.

Suppression des obligations pénalisantes et des conditions d’exercice requises pour les directeurs de rédaction, rédacteurs en chef et journalistes.

Renforcement de la protection des droits des journalistes, de la confidentialité des sources et du droit à l’information pour tous.

Abrogation des sanctions pénales à l’encontre des journalistes et de la presse écrite stipulées dans le Code de la Presse.

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Table of Contents

A propos du Programme juridique d’ARTICLE 19..............................................5

Résumé des recommandations.......................................................................6

Introduction..................................................................................................9

Standards internationaux relatifs à la liberté d’expression............................11

Analyse du Code de la Presse et de l’Ordonnance..........................................14

Observations générales.................................................................................................14

Nécessité d’une réglementation de la presse et de la publication..............................14

Légitimité du Code de la Presse et de l’Ordonnance..................................................15

Champ d’application du Code de la Presse.................................................................15

Obligations d’enregistrement.....................................................................................15

Confusion entre presse écrite et presse électronique................................................16

Limitations des contenus............................................................................................16

Séparation inutile entre le Code de la Presse et l’Ordonnance...................................16

Aspects positifs du Code de la Presse et de l’Ordonnance.............................................16

Aspects négatifs du Code de la Presse et de l’Ordonnance...........................................17

Explication des causes et Références introductives...................................................18

Droits des journalistes professionnels........................................................................19

Droit d’accès à l’information......................................................................................20

Protection des sources...............................................................................................20

Licence indirecte et obligations d’enregistrement......................................................21

Obligations des directeurs de rédaction et rédacteurs...............................................23

Conditions d’exercice des rédacteurs en chef et journalistes.....................................23

Cartes de presse........................................................................................................25

Code de déontologie et devoirs..................................................................................25

Obligations des publications.......................................................................................26

Obligations de transparence inutiles et restrictives....................................................26

Publicité.....................................................................................................................27

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Dispositions sur le pluralisme.....................................................................................27

Droit de rectification et droit de réponse....................................................................29

Sanctions pénales spécifiques à la presse écrite et aux journalistes..........................30

Diffamation................................................................................................................32

Poursuites et sanctions (Chapitre 6)...........................................................................34

Code de la Presse et de l’Ordonnance..............................................................................36

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A propos du Programme juridique d’ARTICLE 19

Le Programme juridique d’ARTICLE 19 plaide sur la scène internationale pour le développement de normes progressistes sur la liberté d’expression et l’accès à l’information et pour leur mise en oeuvre dans les législations nationales. Le Programme juridique a publié plusieurs guides recensant les normes du droit international et comparé et les bonnes pratiques en matière de diffamation, accès à l’information et réglementation sur la radiodiffusion.

Se fondant sur ces publications et l’expertise juridique globale d’ARTICLE 19, le Programme juridique publie chaque année des analyses juridiques, des commentaires de projets de loi et de législations en vigueur qui entravent la liberté d’expression et rédige des notes d’orientation ainsi que divers documents juridiques. Mené depuis 1998 en vue de soutenir des réformes juridiques positives dans le monde entier, ce travail aboutit fréquemment à une amélioration substantielle des législations nationales en vigueur ou en projet. Toutes les ressources développées par le Programme juridique sont disponibles sur le site http://www.article19.org/resources.php/legal/.

Pour obtenir de plus amples informations sur ce rapport ou pour attirer l’attention d’ARTICLE 19 sur un point précis, contactez-nous à l’adresse [email protected].

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Résumé des recommandations Se fondant sur les standards du droit international et du droit comparé, ARTICLE 19 recommande d’amender comme suit le Code de la presse, de l’impression et de l’édition et l’Ordonnance d’accompagnement afin de respecter les standards internationaux relatifs à la liberté d’expression.

Il est recommandé d’abroger ou, au minimum, de réduire considérablement le champ d’application du Code. Eu égard à la nature transitoire du Code de la Presse et de l’Ordonnance, les deux lois doivent distinguer clairement les besoins et priorités immédiates exigeant une réglementation des médias jusqu’à la mise en place d’un processus de législation régulier. Par la suite, seules les questions nécessitant une réglementation immédiate devront être prises en considération dans le Code de la Presse et l’Ordonnance d’accompagnement.

Le Code de la Presse doit affirmer – soit dans le Préambule soit dans l’Article I – l’intention de promouvoir la liberté d’expression. En particulier, il doit affirmer que son objectif est d’abolir la censure et de garantir la liberté de la presse dans le respect du droit à la liberté d’expression.

Le Code de la Presse doit reconnaître explicitement que les médias ont pour principale mission de rendre compte de l’information et d’agir en observateur critique du gouvernement.

Le Code de la Presse doit également contraindre les organes étatiques à employer les moyens d’action les moins restrictifs lorsque leurs instances entravent l’exercice du droit à la liberté d’expression.

Les législateurs doivent prendre en considération l’énoncé alternatif de l’Article I du Code de la Presse afin de souligner l’importance du droit à la liberté d’expression et à la liberté de la presse.

Le champ d’application du Code de la Presse doit être clairement explicité dans un article séparé.

Le Code de la Presse doit reconnaître que le droit de s’exprimer dans les médias appartient à tous les citoyens et élargir la définition du « journaliste professionnel » afin d’inclure les journalistes citoyens.

La définition figurant dans l’Article 7 doit être modifiée comme suit : « Le journaliste est toute personne morale ou physique régulièrement ou professionnellement engagée dans la collecte et la dissémination de l’information auprès du public par tous moyens de communication de masse. »

L’énoncé de l’Article 10 doit être amendé en vue de garantir que le droit à l’information concerne toute information détenue par des organes publics, soit-elle ou non « confidentielle en vertu de la loi ».

La protection doit être élargie aux personnes qui dénoncent des abus et diffusent des informations sur des agissements répréhensibles.

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Les dispositions de l’Article 11 du Code de la Presse doivent être clarifiées en fonction des remarques énoncées ci-dessus. L’Article 11 doit également stipuler que l’obligation juridique de révéler ses sources doit être approuvée uniquement par un juge indépendant lors d’une audience publique équitable. La décision du juge peut également faire l’objet d’un recours en appel devant une autorité impartiale.

Toutes les dispositions du Code de la Presse relatives à l’enregistrement direct ou indirect de la presse écrite et aux sanctions prévues en cas de violation (Article 6 du Code) doivent être supprimées.

Les obligations d’enregistrement technique ne doivent être autorisées que sous certaines conditions : aucun pouvoir d’appréciation ne peut refuser l’enregistrement ; aucune condition liée aux questions de fond ne peut être imposée aux médias ; le système ne doit pas être excessivement lourd ; le système doit être régi par un organe indépendant. Le régime particulier en matière de distribution de publications étrangères doit être abrogé.

Les Articles 18, 19 et 21 doivent être totalement supprimés du Code de la Presse.

Les conditions d’exercice des journalistes, des directeurs de publication et des rédacteurs en chef doivent être supprimées du Code.

L’obligation relative à la carte de presse doit être supprimée et sa délivrance doit faire l’objet d’une auto-régulation. En aucun cas les cartes de presse ne peuvent être considérées comme une qualification pour l’emploi.

Le code de déontologie des journalistes doit être supprimé et faire l’objet d’une auto-régulation par les journalistes et les organes de presse.

L’obligation de dépôt légal des publications doit être limitée uniquement à la Bibliothèque nationale.

L’obligation de publier les comptes de résultats des organes de presse doit être supprimée.

Les dispositions concernant le contrôle des prix publicitaires doivent être retirées du Code.

Les restrictions sur l’accession à la propriété d’un journal par un éditeur étranger ne doivent pas être plus importantes que nécessaire afin de préserver le caractère local de la presse et favoriser l’accès des citoyens à l’information et aux idées émanant de leur propre société.

Les sanctions prévues dans les Articles 36-38 doivent être supprimées, celles des Articles 33-38 attentivement réexaminées à l’aune des standards internationaux actuels.

Les dispositions relatives à la concentration des médias doivent être modifiées dans le respect des standards internationaux actuels afin de garantir le pluralisme.

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Le chapitre relatif aux délits et infractions commises par voie de presse doit être retiré ainsi que celui sur les poursuites respectives. Le Code de la Presse ne doit en aucun cas contenir des dispositions pénales.

Toutes les dispositions pénales concernant la presse doivent incorporer le principe selon lequel les sanctions doivent entraver le moins possible le droit à la liberté d’expression. Les mesures et les sanctions se rapportant à la liberté l’expression ne doivent pas aller jusqu’à dissuader des individus et des organes de presse de participer à des débats sur des questions d’intérêt général.

Le Code de la Presse doit garantir que les sanctions maximales punissant les journalistes et les médias ne sont pas utilisées de façon abusive et discriminante.

Le Code de la Presse doit inclure des principes selon lesquels toute sanction pour entrave à la liberté d’expression doit être nécessaire et proportionnée, et nuire le moins possible au droit à la liberté d’expression.

Le discours de haine contre des groupes nationaux, raciaux ou religieux doit être sanctionné uniquement lorsqu’il constitue une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence. Néanmoins, cette question doit être régie par le droit pénal.

L’intention de promouvoir la haine publiquement - dont la charge de preuve incombe à l’accusation - doit être impérativement démontrée en cas de délit d’incitation à la haine; dans le cas contraire, l’absence d’intention doit constituer une défense suffisante.

La diffamation doit être dépénalisée et toutes les sanctions pénales pour diffamation et insultes supprimées, en particulier s’agissant d’entités et organes publics. Les dispositions pénales en matière de diffamation doivent être remplacées par les législations civiles appropriées.

L’Article 58 sur le droit d’invoquer une diffamation pour le compte d’une personne décédée doit être supprimé du Code.

Seules les déclarations de fait incorrectes nuisant à la réputation doivent être passibles de poursuites, et des défenses doivent être possibles pour la véracité et le caractère raisonnable de la publication.

La charge de preuve concernant des déclarations d’intérêt général doit incomber à l’accusation et des lignes directives sur les préjudices doivent être fournies.

Les sanctions pour diffamation doivent être nécessaires et proportionnées, et imposées uniquement dans le cadre de délibérations respectueuses des normes d’un procès équitable. Le niveau des amendes administratives doit être révisé à la baisse.

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Introduction Ce rapport analyse le Décret relatif à la liberté de la presse, de l’impression et de l’édition de Tunisie (DL n° 215 du 2 novembre 20011) (désigné ci-après « le Code de la Presse ») et l’Ordonnance d’accompagnement « concernant le contrôle des voies publiques » applicable au décret « concernant la presse, l’impression et l’édition (désignée ci-après « Ordonnance » ; les deux étant désignés ci-après « Réglementations ») ainsi que leur conformité avec les normes internationales sur la liberté d’expression.

Ces deux réglementations ont été promulguées par le Président par intérim de la République de Tunisie sur proposition de la « Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique ». Ce document fournira par conséquent une analyse des réglementations dans leur état actuel. Nos commentaires s’appuient sur une traduction de l’original arabe, fournie par des traducteurs externes.1

Ce rapport met en relief les aspects positifs des réglementations, identifie et explique leurs insuffisances, et propose des recommandations sur la manière dont leurs dispositions peuvent être modifiées afin de garantir la sauvegarde du droit à la liberté d’expression.

ARTICLE 19 comprend que le Code de la Presse et le Décret d’accompagnement sont de nature transitoire. Ils ont été promulgués par le Président par intérim afin de réglementer des questions relatives aux médias durant la période précédant la mise en place d’une nouvelle Constitution et d’un processus législatif régulier. Nous pensons également qu’un certain nombre de dispositions doivent figurer dans d’autres législations telles que le Code civil et le Code administratif adoptés ou modifiés dans le futur. ARTICLE 19 reste prêt à fournir d’autres analyses sur une future législation globale liée à des points traités dans ces lois intérimaires et à participer aux consultations publiques sur ces points. Les recommandations d’ARTICLE 19 sur la future législation seront mises en relief dans les sections et paragraphes concernés.

ARTICLE 19 a déjà fourni des commentaires et des analyses des versions initiales de ces réglementations (projets du 18 mars, du 30 mars 2001 et du 22 mai 2011).2 Nous prenons acte du fait que le Code de la Presse diffère à plusieurs titres des projets initiaux. Bien qu’ARTICLE 19 se réjouisse que plusieurs aspects positifs aient été intégrés suite à ses recommandations, de nombreux points négatifs demeurent. ARTICLE 19 propose des commentaires dans ce sens tout au long de l’analyse et recommande de nouveaux amendements tout en réitérant ses précédentes suggestions en vue de conformer ces lois aux standards internationaux.

ARTICLE 19 espère que ce document sera utile aux législateurs, aux médias, à la société civile et aux autres parties prenantes du futur processus législatif et qu’il contribuera à sauvegarder la liberté d’expression et la liberté de la presse en Tunisie.

1 La traduction anglaise est reproduite dans l’Annexe de cette analyse. ARTICLE 19 n’est pas responsable de l’exactitude de ces traductions ni des commentaires fondés sur une traduction erronée ou inexacte. 2 Pour consulter les analyses du projet de Code de la presse, consulter le site Internet d’ARTICLE 19 (www.article19.org) ou contacter le Programme juridique.

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Ce rapport est divisé en deux parties. La première fixe les normes internationales applicables en matière de liberté d’expression que la Tunisie est tenue de respecter et de promouvoir dans sa législation nationale. La seconde partie examine la conformité du Code de la Presse et de l’Ordonnance à ces standards, propose des recommandations sur les insuffisances de ces réglementations et les améliorations à apporter.

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Standards internationaux relatifs à la liberté d’expression Le droit à la liberté d’expression et à la liberté d’information est un droit humain fondamental. Sa pleine jouissance est indispensable à la réalisation des libertés individuelles et au développement de la démocratie, en particulier dans les pays traversant une période de transition vers la démocratie. La liberté d’expression est une condition nécessaire à la réalisation des principes de transparence et de redevabilité devant la loi qui sont à leur tour essentiels pour la promotion et la protection de tous les droits humains.

Le Code de la Presse et l’Ordonnance reposent sur une série de dispositions internationales sur les droits humains qui constituent le socle de l’analyse juridique présentée dans cette partie. Y sont identifiées les dispositions internationales les plus pertinentes en matière de protection de la liberté d’expression et en particulier les réglementations sur la radiodiffusion.

La Déclaration universelle des droits de l’homme3 (« DUDH ») est généralement considérée comme le fondement du droit international relatif aux droits de l’homme, légalement contraignant pour tous les Etats. L’ARTICLE 19 de la DUDH garantit le droit à la liberté d’expression dans les termes suivants :

Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.

Le Pacte International relatif aux droits civils et politiques (« PIDCP ») est un traité international, ratifié par la Tunisie en 1969, imposant aux Etats parties des obligations légalement contraignantes concernant le respect des droits humains énoncés dans la DUDH.4 L’Article 19 du PIDCP garantit le droit à la liberté d’opinion et d’expression dans des termes très similaires à ceux de l’Article 19 de la DUDH. Ayant ratifié le PIDCP, la Tunisie est non seulement liée sur le plan juridique international par les dispositions du PIDCP mais aussi contrainte de mettre en oeuvre ce traité dans sa législation nationale.

La Tunisie est également membre de l’Union Africaine,5 et signataire de l’instrument principal des droits de l’homme pour le continent africain, la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.6 L’Article 9 de la Charte africaine garantit la liberté d’expression dans les termes suivants :

1. Toute personne a droit à l’information.2. Toute personne a le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre

de lois et règlements.3 Adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948, Résolution 217A(III).4 Résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies 2200A(XXI) du 16 décembre 1966, entrée en vigueur le 23 mars 1976.5 Consulter la liste des Etats membres sur http://www.au.int/en/member_states/countryprofiles. 6 Adoptée le 27 juin 1981, OAU Doc. CAB/LEG/67/3 rev. 5, 21 I.L.M. 58 (1982), entrée en vigueur le 21 octobre 1986.

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La Déclaration de Principes sur la Liberté d’Expression en Afrique (« Déclaration africaine »), adoptée par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples en 2002,7 stipule également dans l’Article II :

1. Aucun individu ne doit faire l’objet d’une ingérence arbitraire à sa liberté d’expression.

2. Toute restriction à la liberté d’expression doit être imposée par la loi, servir un objectif légitime et être nécessaire dans une société démocratique.

L’Article XII de la Déclaration africaine, qui traite de la protection de la réputation d’autrui, stipule :

1. Les Etats doivent s’assurer que leurs lois relatives à la diffamation sont conformes aux critères ci-après : nul ne doit être puni pour des déclarations exactes, des opinions ou des déclarations concernant des personnalités très connues qu’il était raisonnable de faire dans les circonstances ; les personnalités publiques doivent tolérer beaucoup plus de critiques ; et les sanctions ne doivent jamais être sévères au point d’entraver l’exercice du droit à la liberté d’expression, y compris par les autres.

2. Les lois protégeant la vie privée ne doivent pas empêcher la diffusion d’informations d’intérêt général.

De même, dans l’Article XIII sur les mesures pénales, la Déclaration africaine contraint les Etats à revoir toutes les restrictions pénales sur le contenu pour assurer qu’elles servent un intérêt légitime dans une société démocratique. Il affirme également que la liberté d’expression ne doit pas être restreinte pour sauvegarder l’ordre public ou protéger la sécurité nationale, à moins qu’il existe un risque réel de préjudice à un intérêt légitime et un lien causal direct entre le risque et l’expression.

En termes de standards internationaux, on peut souligner que la Plateforme africaine sur l’accès à l’information récemment développée par des groupes à travers toute l’Afrique, dont ARTICLE 19, a été approuvée par le Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté d’opinion et d’expression et le Rapporteur spécial sur la liberté d’expression et l’accès à l’information de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.8 Ces principes guident les Etats africains en matière de droit à la liberté d’information, et soulignent l’importance de la lutte contre la corruption et de la protection des individus qui dénoncent des abus en vue de promouvoir un libre accès aux technologies de l’information et de la communication et à l’information électorale.

La Charte Arabe des Droits de l’Homme (désignée ci-après « Charte arabe »), adoptée par le Conseil de la Ligue des Etats arabes en 2004, vise à affirmer les principes de la DUDH, du PIDCP, ainsi que du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, de la Charte des Nations unies et de la Déclaration du Caire sur les droits de l’homme en lslam.9 Alors que la Charte arabe prévoit des protections moins fortes pour certains droits fondamentaux, l’Article 32 de la Charte arabe révisée protège le droit d’expression dans les termes suivants :

7 Adoptée au cours de la 32e Session de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 17-23 octobre 2002.8 Adopté en septembre 2011, voir http://www.pacaia.org/images/pdf/apai%20final.pdf 9 Ligue des Etats arabes, Charte arabe des droits de l’homme, 22 mai 2004. Entrée en vigueur le 15 mars 2008.

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1. La présente charte garantit le droit à l’information et la liberté d’opinion et d’expression et le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées par tout moyen, sans considération de frontières géographiques.

2. Ces droits et libertés sont exercés dans le cadre des principes fondamentaux de la société et sont soumis aux seules restrictions nécessaires au respect des droits et de la réputation d’autrui et à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé publique ou de la moralité publique.

L’Article 42 garantit par ailleurs la protection du droit à la recherche scientifique et artistique et à l’activité créative, et le droit de participation à la vie culturelle. Il est important de noter que l’Article 24 garantit aujourd’hui le droit de participer à la vie politique, y compris de pratiquer une activité politique, de constituer librement des associations avec d’autres et d’y adhérer et la liberté de réunion.10

Il est significatif que même ce texte controversé protège expressément les droits à la liberté d’expression et d’information.

Des garanties similaires du droit à la liberté d’expression sont prévues dans l’Article 13 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme11 et l’Article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales12. Si les décisions et déclarations dignes de foi adoptées par les organismes régionaux de défense des droits de l’homme hors d’Afrique n’engagent pas juridiquement la Tunisie, elles constituent des précédents dépourvus de force obligatoire pour le champ d’application et les implications du droit à la liberté d’expression.

10 Ibid. 11 Adoptée le 22 novembre 1969, entrée en vigueur le 18 juillet 197812 Adoptée le 4 novembre 1950, entrée en vigueur le 3 septembre 1953

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Analyse du Code de la Presse et de l’Ordonnance Observations généralesNécessité d’une réglementation de la presse et de la publicationEn préambule de ce rapport, ARTICLE 19 tient à préciser qu’il examine les législations de la presse avec précaution sachant qu’elles constituent souvent aux yeux des gouvernements un outil servant à restreindre exagérément, plutôt qu’à protéger, le droit à la liberté d’expression et d’information. Considérant l’importance instrumentale de la presse dans une société démocratique, on peut raisonnablement espérer que les journalistes et leurs publications ne soient pas soumis à des restrictions plus fortes de leur droit d’expression que des citoyens ordinaires. En effet, la plupart des démocraties avancées ont fini par abroger les législations spécifiques à la presse. La presse écrite y est régie par des réglementations générales telles que le Code civil et le Code commercial, applicables à tous les citoyens sans distinction.

ARTICLE 19 reconnaît que dans les pays dotés de lois spécifiques sur la presse écrite, comme la Tunisie, le gouvernement peut avoir d’autres motivations que le simple souci d’améliorer les standards journalistiques et la déontologie de la profession. Compte tenu de la nature transitoire de la législation concernée, il est également entendu que le gouvernement intérimaire vise à réformer l’ancien cadre juridique restrictif de la presse et des médias. Malgré la légitimité d’une telle intention, ARTICLE 19 souligne qu’une loi de la presse peut être aisément contournée dans le but d’imposer des réglementations contraignantes et de contrôler le contenu des journaux d’information générale et autres périodiques. Le principe internationalement reconnu d’un test – lequel est notoirement absent du Code de la Presse actuel – vise en partie à s’assurer que la réglementation des médias est réduite au minimum. Cette préoccupation est particulièrement forte en Tunisie où les précédents Codes de la Presse et autres législations ont contribué dans le passé à limiter et contrôler les médias critiques.

La plupart des démocraties avancées reconnaissent que la presse écrite ne nécessite pas une réglementation, contrairement à des médias comme la télévision et la radio. Dans la plupart des démocraties établies, favorables à une politique délibérée de prévention des réglementations inutiles, il n’existe pas de réglementations spécifiques à la presse écrite.

ARTICLE 19 est par conséquent convaincu de la nécessité d’abroger ou, au minimum, de réduire considérablement le champ d’application du Code de la Presse. Nous pensons que cela est faisable dans la mesure où la presse écrite ne peut en aucun cas pâtir d’un vide juridique. Les exemples de certains pays d’Europe de l’Est (la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie ou la Bulgarie, qui, comme la Tunisie, ont enclenché un processus de démocratisation après une longue période de dictature) démontrent que même de jeunes démocraties dotées de médias libres immatures ne nécessitent pas de législation sur la presse.

Cela ne signifie pas qu’une loi spécifique à la presse ne peut jamais être conforme au droit international. Toutefois, en pratique, ces législations limitent presque toujours les personnes habilitées à publier des informations et les contenus qu’elles sont

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susceptibles de publier, ou dupliquent des dispositions d’application générale, envoyant un « double message » paralysant à la presse. ARTICLE 19 pense qu’il en est de même avec le Code de la Presse tunisien.

Comme nous l’avons précédemment mentionné, ARTICLE 19 a eu l’occasion de réviser des versions préliminaires du Code de la Presse. En particulier, dans nos commentaires sur la version du mois d’août 2011, nous nous étions inquiétés que toutes les dispositions utiles prévues dans la version du 18 mars relatives aux droits à la protection des journalistes, à la liberté d’information, la protection des sources et au droit de réponse, avaient été éliminées. Nous sommes satisfaits de constater que ces dispositions ont été réintroduites et maintenues dans la version finale du Code de la Presse.

Nous sommes également satisfaits de la réduction des obligations de license, notamment dans le domaine des transports et des ventes de la presse écrite et des publications produites à l’étranger. Les restrictions pesant sur les publications étrangères ont été également retirées. Néanmoins, un trop grand nombre de ces restrictions ont été maintenues.

Nous nous inquiétons également de la présence persistante de vastes mesures destinées à pénaliser et sanctionner les activités de la presse et les journalistes malgré les recommandations répétées d’ARTICLE 19 appelant à les retirer. Comme souligné dans nos précédents commentaires, ces dispositions restreignent inutilement le droit à la liberté d’expression et servent souvent à réprimer les médias et les journalistes.

Légitimité du Code de la Presse et de l’Ordonnance ARTICLE 19 est conscient que les deux réglementations promulguées par le Président par intérim sont nécessaires pendant cette période de transition. Cependant, elles ont pour effet d’assujettir la liberté d’expression et les médias au contrôle du gouvernement. Des règles régissant le fonctionnement des médias sont certes acceptables lorsqu’elles sont nécessaires à la réalisation d’intérêts légitimes tels que la protection de l’ordre public, de la réputation et des droits d’autrui, de la santé publique ou de la sécurité nationale. Mais elles doivent être fixées par le Parlement et non par le gouvernement. Seuls les parlements sont habilités à légiférer sur les droits de l’homme, dont l’objectif est de protéger les individus du gouvernement lui-même. Le véritable rôle du gouvernement exécutif est de légiférer sur des questions liées à l’administration publique. Ces mesures, en l’occurrence, ne concernent pas l’administration publique mais la liberté d’expression et la liberté de la presse. Si les réglementations visent à fournir un cadre de fonctionnement à la presse et aux médias durant la période de transition, elles doivent identifier clairement les besoins immédiats durant cette période. Par conséquent, seules les questions nécessitant une réglementation immédiate doivent être traitées dans le Code de la Presse et l’Ordonnance.

Champ d’application du Code de la PresseSous sa forme actuelle, le champ d’application du Code de la Presse manque de clarté. Il omet des garanties importantes de la liberté d’expression alors qu’il réglemente un grand nombre de questions relatives aux médias, dont l’enregistrement des organes de presse et le statut, les droits et les obligations des professionnels des médias. En temps normal, ces questions relèvent de législations distinctes, dont le Code pénal, le Code civil ou le Code administratif, ou font l’objet

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d’une autorégulation par les médias. Pour les professionnels et les non-professionnels des médias, l’existence de différentes lois facilite la compréhension et la navigation dans chaque secteur des réglementations. Considérant la nature transitoire de cette législation, nous comprenons que la Commission ait choisi de ne pas opter pour cette approche mais pour une réglementation complexe. Bien qu’ARTICLE 19 juge légitime le besoin d’identifier des questions clés et d’y répondre durant cette période intérimaire, nous recommandans de restreindre et de clarifier le champ d’application du Code de la Presse.

Obligations d’enregistrementLes obligations d’enregistrement imposées à la presse écrite ont été considérablement réduites par rapport aux versions préliminaires revues par ARTICLE 19. Toutefois, considérant les nombreuses obligations – sous forme de déclarations – incombant à la presse écrite et à ses directeurs et rédacteurs, le Code de la Presse impose à ce secteur et à ses employés des contraintes proches de celles de la licence. ARTICLE 19 juge néanmoins que la majorité de ces obligations sont inutiles dans une société démocratique et contribuent à créer des lourdeurs administratives importantes qui entravent la liberté d’expression. Certaines obligations peuvent être légitimes (pour sauvegarder notamment l’ordre public), mais elles sont inutiles et disproportionnées eu égard au but poursuivi. Pour cette raison, le Code de la Presse doit systématiquement préconiser que les restrictions à la liberté d’expression, sans considération de sa forme, soient toujours conformes aux critères du test en trois volets sur la légalité. Comme expliqué ci-dessous, ce test exige non seulement que ces restrictions soient fixées par la loi mais aussi qu’elles soient proportionnées et utilisées en dernier ressort.

Confusion entre presse écrite et presse électroniqueBien que le Code de la Presse vise à régir la presse, l’impression et l’édition, plusieurs de ses dispositions (Articles 4, 7 ou 50 par exemple) se réfèrent à l’audiovisuel ou à la presse numérique. Cela crée une confusion quant au champ d’application du Code de la Presse.

Limitations des contenusARTICLE 19 est d’avis que les lois régissant la presse écrite ne doivent contenir aucune restriction de contenu. Si la publication d’une catégorie précise de déclaration présente un risque suffisant de préjudice justifiant une limitation de la liberté d’expression, le fait doit être considéré indépendamment de la manière dont la déclaration est diffusée , que ce soit dans un journal, un livre, par voie orale ou autre. Il en résulte que la restriction doit relever d’une loi d’application générale. ARTICLE 19 recommande par conséquent que toutes les restrictions de contenu soient supprimées du Code de la Presse.

Séparation inutile entre le Code de la Presse et l’Ordonnance ARTICLE 19 s’interroge sur la raison pour laquelle la réglementation se divise en deux : le Code de la Presse et l’Ordonnance. Nous constatons que les dispositions de l’Ordonnance contiennent essentiellement des définitions de termes figurant dans le Code de la Presse et des points liés à des dispositions spécifiques du Code. Nous pensons que ces définitions peuvent être aisément incorporées dans le Code de la Presse, soit dans la première section soit dans celles traitant de ces questions

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spécifiques, à la lumière de nos commentaires sur la nécessité de réduire son champ d’application.

Aspects positifs du Code de la Presse et de l’Ordonnance Du point de vue de la liberté d’expression, ARTICLE 19 se félicite des aspects positifs suivants du Code de la Presse :

Références aux conventions et normes internationales sur les droits de l’homme dans la note explicative du Code de la Presse, dont une référence au droit des citoyens au pluralisme et à la diversité et à l’instauration de droits pour les journalistes, la protection des sources, ainsi que la réduction des monopoles et de la concentration économique ;

Définition du droit à l’expression inspirée des instruments internationaux des droits de l’homme et nécessité d’un test en trois volets en cas de restrictions (Article 1);

Définitions claires des termes clés utilisés dans le Code de la Presse (Article 2);

Réduction du nombre d’instances dépositaires et du nombre d’exemplaires à déposer, sachant que les services du Ministre de l’Information doivent remettre deux exemplaires au Centre national de documentation et deux exemplaires à la Bibliothèque nationale (Article 5);

Intégration de dispositions relatives aux droits des journalistes (Chapitre 3 du Code de la Presse);

Elargissement du droit d’accès à l’information à tous les citoyens (Article 10);

Intégration de garanties protégeant les sources du journaliste (Article 11);

Suppression des conditions d’exercice pour les rédacteurs en chef requises dans les versions précédentes (Articles 16 - 17);

Elargissement et amélioration des dispositions relatives à la transparence (Articles 23-32);

Distinction entre droit de « rectification » et droit de « réponse » et élargissement de ces droits à tous les citoyens et non uniquement aux autorités publiques (Article 39-40);

Mise en place d’un droit de « rectification » en cas de publication d’ « informations erronnées » concernant des personnes ayant un « intérêt direct et légitime » à faire procéder à la rectification, et possibilité d’exercer un droit de « réponse » pour ceux qui ont subi un « préjudice à leurs droits personnels » (Article 39 - 40);

Dispositions permettant de rejeter un droit de réponse lorsqu’un périodique a publié une rectification réparant le préjudice causé (Article 45);

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Clarification des conditions dans lesquelles l’affichage sur la voie publique est autorisé (Article 47 - 49);

Suppression des peines d’emprisonnement pour plusieurs délits contre la personne, dont la diffamation (Article 54 - 59);

Suppression de références spécifiques à des « organismees publics » dans les articles relatifs à la diffamation (Article 54 - 59);

Restriction du droit à invoquer un délit de diffamation pour le compte de personnes décédées, réservé uniquement aux cas où les héritiers et les proches ont subi un préjudice (Article 58).

Aspects négatifs du Code de la Presse et de l’OrdonnanceComme précédemment souligné, ARTICLE 19 apprécie qu’un certain nombre de nos précédentes recommandations ont été incorporées dans la version finale du Code de la Presse. Néanmoins, nous considérons que de nombreux aspects du Code de la Presse restent problématiques et entravent de ce fait les standards internationaux de la liberté d’expression. En omettant de respecter pleinement les instruments internationaux des droits de l’homme et les garanties de la liberté d’expression, le Code de la Presse ouvre la voie à des restrictions inutiles et disproportionnées du droit à la liberté de la presse. Dans la majorité des cas, il s’agit simplement de clarifier le langage et de restreindre le champ d’application des définitions.

ARTICLE 19 est particulièrement préoccupé par les dispositions suivantes :

Explication des causes et Références introductivesARTICLE 19 note que le Code de la Presse et l’Ordonnance sont accompagnés d’une note intitulée « Explication des causes » qui décrit le contexte de cette législation et justifie son bien-fondé. Toutefois, il est nécessaire de préciser si cette note fait partie intégrante de l’actuelle législation ou si elle constitue un cadre général de référence pour le Gouvernement par intérim.

Si cette note explicative consacre plusieurs principes primordiaux et standards internationaux relatifs à la liberté d’expression, ARTICLE 19 note que ces principes seraient mieux défendus si la note était intégrée dans le préambule du Code de la Presse ou dans l’Article 1 du Code. L’incorporation de l’Explication des causes dans le corps actuel du Code de la Presse serait utile pour souligner le caractère universel de cette réforme et expliquer la nécessité contextuelle de cette législation.

ARTICLE 19 est satisfait de noter que la référence au droit à la liberté d’expression a été élargie dans l’Article 1 du Code de la Presse en vue d’inclure une référence aux instruments internationaux des droits de l’homme – ainsi que le test en trois volets relatif aux restrictions. Nous pensons que ces dispositions doivent être ultérieurement renforcées par la reconnaissance spécifique de la liberté de la presse et des libertés des médias.

Recommandations: Le Code de la Presse doit déclarer – dans le Préambule ou dans l’Article 1 –

l’intention de promouvoir la liberté d’expression. Il doit notamment affirmer

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qu’il vise à abolir la censure et à promouvoir la liberté des médias dans le respect du droit à la liberté d’expression.

Le Code de la Presse doit reconnaître explicitement que la mission principale des médias est de rendre compte de l’information et d’agir en observateur critique du gouvernement.

Le Code de la Presse doit également contraindre les différents corps de l’Etat à toujours utiliser les moyens d’action les moins restrictifs lorsqu’ils interfèrent dans l’exercice du droit à la liberté d’expression.

Les législateurs doivent considérer l’énoncé alternatif suivant de l’Article 1 du Code de la Presse afin de souligner l’importance du droit à la liberté d’expression et à la liberté des médias.

« Article 1 – Liberté des médias1. La liberté et l’indépendance des médias de tous types, y compris la

presse écrite, régis par cette loi, sont garanties. 2. Le droit à la liberté des médias comprend le droit de chaque personne

morale et physique de recevoir et de répandre des informations par le biais des médias sans obstacle préalable d’une autorité publique.

3. Toute restriction du droit mentionné dans les paragraphes précédents ne peut être établie que si elle satisfait aux critères du test en trois volets suivant:

a. La restriction doit permettre la réalisation d’un des objectifs légitimes suivants: le respect des droits et de la réputation d’autrui, la protection de la sécurité nationale, de l’ordre public ou de la morale et de la santé publiques.

b. La restriction doit être nécessaire pour la réalisation d’un objectif légitime, impliquant que i) il répondra à un besoin social pressant, ii) il sera proportionné à un objectif légitime, défini dans le paragraphe 3.a, et iii), il entravera le moins possible le droit à la liberté d’expression.

4. Les médias ne peuvent être censurés ni contraints de rendre publiques des informations élogieuses pour le gouvernement ou l’opposition.

5. L’Etat ne doit pas:a. Exercer un contrôle ou entraver l’action des personnes engagées

dans la circulation d’une publication, ou la dissémination d’une information par n’importe quel moyen ;

b. Harceler ou pénaliser toute personne pour ses opinions ou ses points de vue, ou le contenu de n’importe quelle publication et diffusion d’information.

6. Tous les médias, y compris la presse écrite qui est régie par cette loi, doivent être indépendants et impartiaux et offrir des opportunités équitables et faciliter la diffusion de points de vue divergents et d’opinions dissidentes. »

Le champ d’application du Code de la presse doit être clairement explicité dans un article séparé.

Droits des journalistes professionnelsSi ARTICLE 19 constate avec satisfaction que des dispositions relatives aux droits des journalistes ont été incluses dans le Code de la Presse (ARTICLE 19 avait recommandé de les maintenir), nous notons que la définition du « journaliste » fournie dans l’Article 7 est restrictive et ambiguë. Les restrictions concernant les

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personnes habilitées à exercer la profession ou employées dans le secteur des médias ont été longtemps considérées comme une violation de la garantie internationale de la liberté d’expression. Les conditions d’exercice telles que celles décrites dans le Code de la Presse réservent de facto le droit de s’exprimer dans la presse écrite à une petite catégorie d’individus. Ce concept est en contradiction avec les standards internationaux de la liberté d’expression et présente le risque de restreindre le flux d’informations importantes vers le public.

Par ailleurs, ces dispositions omettent de reconnaître que le droit de s’exprimer dans les moyens de communication de masse appartient à tous les citoyens, et non uniquement aux personnes considérées qualifiées ou adaptées. Le Code de la Presse (ou une autre législation) doit reconnaître ce droit. Il doit également inclure une définition suffisamment large du journaliste, dont les journalistes citoyens et autres individus impliqués dans la collecte et la dissémination de l’information.

ARTICLE 19 s’inquiète également que la disposition relative à la « carte de presse » de l’Article 8 peut être utilisée pour subordonner les droits des journalistes à la délivrance d’une carte de presse. Comme expliqué précédemment, la restriction de ces droits constituerait une violation des standards internationaux sur la liberté d’expression.

Recommandations: Le Code de la Presse doit reconnaître que le droit de s’exprimer dans les médias

appartient à tous les citoyens et doit contenir une définition suffisamment large du « journaliste » pour englober les journalistes citoyens.

La définition proposée dans l’Article 7 doit être amendée comme suit: « Le journaliste est toute personne morale ou physique régulièrement ou professionnellement engagée dans la collecte et la dissémination de l’information par tous moyens de communication de masse. »

Droit d’accès à l’informationTout en se réjouissant de l’élargissement du droit d’accès à l’information à tous les citoyens (Article 10) conformément à nos commentaires antérieurs, nous nous inquiétons du fait qu’il est soumis à un autre décret  (n° 41 du 26 mai 2011 amendé par décret n° 54 daté du 11 juin 2011). Le champ d’application de ce droit est réduit de facto par l’élargissement aux seules « données, informations et statistiques », et l’exclusion des éléments « confidentiels en vertu de la loi ».

Comme nous l’avons mis en relief dans notre précédente analyse (en particulier dans nos commentaires sur la version du 18 mars 2011), la disposition limitant le droit d’accès des journalistes à la seule information « non confidentielle » va à l’encontre des standards internationaux sur l’accès à l’information. ARTICLE 19 note que le droit d’accès à l’information s’applique à toute information détenue par des organes publics, quelle que soit la raison pour laquelle elle est détenue. Bien que nous connaissions mal les réglementations tunisiennes actuelles sur le secret d’Etat, nous supposons qu’elles ne sont probablement pas conformes aux standards internationaux reconnus sur la transparence, qui n’autorisent que dans certains cas exceptionnels la protection de la confidentialité, la rétention d’informations quand leur divulgation peut porter gravement préjudice à un ou plusieurs de ces intérêts et que ledit préjudice excède l’intérêt général en cas de divulgation de l’information.

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En matière d’accès à l’information, la tendance internationale actuelle est d’imposer aux organes publics de plus en plus d’obligations positives en faveur d’une publication anticipée de l’information. Il est important de garantir aux individus l’accès à une plateforme minimale d’informations sur les organes publics et de promouvoir la transparence en général. Nous recommandons par conséquent d’amender l’Article 10 en vue d’affirmer que le droit d’accès à l’information s’applique à tous les citoyens, et à toutes les informations détenues par des organes publics, indépendamment de l’utilisation qui en est faite.

Recommandation: L’énoncé de l’Article 10 doit être amendé et stipuler que le droit d’accès à

l’information s’applique à toutes les informations détenues par les organes publics, indépendamment du fait qu’elles sont « confidentielles en vertu de la loi ».

Protection des sourcesARTICLE 19 accueille favorablement les dispositions garantissant la protection des sources des journalistes prévues dans l’Article 11 du Code de la Presse. Ce sont des mesures progressistes dignes d’éloge qui peuvent faire considérablement progresser la liberté des médias en Tunisie.

Nous notons que cet article stipule également que la confidentialité des sources peut être enfreinte par autorisation du juge dans les circonstances précisées dans l’Article, ou lorsque cela est justifié par un «  besoin pressant lié à la sécurité de l’Etat ». Plus loin dans l’Article 11, il est stipulé que la confidentialité des sources peut être remise en cause « en cas d’autorisation du juge judiciaire compétent et à condition que ces informations se rapportent à des crimes représentant un grave danger pour l’intégrité corporelle des tiers, que l’obtention desdites informations est indispensable afin d’éviter ces crimes ou qu’elles soient de la catégorie des informations qu’on ne peut obtenir par un autre moyen ». Cette dernière section est louable car elle respecte des normes internationales,13 régionales14 et nationales15

sur la question.

Quoi qu’il en soit, il reste à clarifier le lien entre ces deux dispositions, à savoir si le « besoin pressant lié à la sécurité de l’Etat » est un cas spécifique distinct ou s’il est juste élaboré dans la section suivante.

Outre la clarification précédente, les dispositions de l’Article 11 pourraient être renforcées en spécifiant que l’obligation juridictionnelle doit être approuvée par un

13 Rapport de Mr Abid Hussein, Rapporteur spécial de l’ONU chargé de la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, établi en application de la résolution 1997/27.14 Déclaration de Principe sur la liberté d’expression, adoptée le 27 juin 1981; entrée en vigueur le 21 octobre 1986. Document de clôture de la Réunion de Vienne 1986 des représentants des Etats ayant participé à la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe; Déclaration de principes sur la liberté d’expression de la Commission Interaméricaine des droits de l’homme, octobre 2000. Voir également l’Exposé des motifs de la Recommandation n° R(2000)7 du Comité des ministres aux Etats membres sur le droit des journalistes de ne pas révéler leurs sources d’information, par. 40-41.15 Au plan national, plus de 100 pays dans le monde ont accordé aux journalistes le droit de protéger leurs sources. Voir l’enquête internationale sur la protection des sources de David Banisar, Silencing Sources: An International Survey of Protections and Threats to Journalist’s Sources (Privacy International, 2007).

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juge indépendant lors d’une audience publique équitable avec possibilité d’un recours en appel devant une autorité judiciaire impartiale.16

ARTICLE 19 pense que l’Article 11 du Code de la Presse pourrait être amélioré en garantissant la protection des individus qui diffusent des informations sur des actes repréhensibles et qui dénoncent des abus. Cela peut constituer une soupape de sécurité importante pour la protection de l’information, et garantir l’accès de tous les citoyens à des informations primordiales. Cette protection doit s’appliquer également dans le cas où la divulgation d’informations est considérée comme un refus de se soumettre à une obligation juridique ou professionnelle.

Recommandations: La protection doit s’étendre aux personnes dénonçant des abus et révélant des

informations sur des actes répréhensibles. Les dispositions de l’Article 11 du Code de la Presse doivent être clarifiées

comme spécifié ci-dessus. L’Article 11 doit également stipuler que l’obligation juridictionnelle de divulguer ses sources doit être approuvée uniquement par un juge indépendant lors d’une audience publique et équitable avec possibilité d’un recours en appel devant une autorité impartiale.

Licence indirecte et obligations d’enregistrementARTICLE 19 note avec satisfaction que certaines de nos recommandations sur les obligations de licence sont prises en compte dans la version finale. Contrairement aux obligations de « déclaration » énumérées dans la version du mois de mars, les Articles 4 et 5 du Code de la Presse publié ne mentionnent plus l’obligation de soumettre une déclaration à une autorité de l’Etat pour des oeuvres imprimées.

Toutefois, les Articles 3 et 9 de l’Ordonnance se réfèrent à des obligations prévues dans le Code de la Presse pour le « dépôt légal » et « l’enregistrement ». Ce dépôt légal autorise l’Administration à recevoir des exemplaires de toute œuvre mentionnée au présent décret-loi à des fins d’archivage et de sauvegarde de la mémoire nationale. (Article 2 du Code).

L’Article 10 de l’Ordonnance impose également un « permis » « associé » à un dépôt légal. Alors que le terme « permis » n’est pas défini dans l’Ordonnance, la comparaison avec les versions préliminaires démontre qu’il a la même signification que le terme « déclaration » utilisé dans d’autres dispositions de l’Ordonnance et dans les versions préliminaires. Cela signifie en susbstance que l’obligation contestable de « déclaration » des œuvres imprimées est maintenue dans l’Ordonnance actuelle.

Lorsque l’obligation de « dépôt légal » est conjuguée avec celle d’un vague « permis/déclaration », il est nécessaire de préciser si ce permis/déclaration doit être soumis à l’approbation des autorités publiques concernées. Cette contrainte ambiguë de « permis/déclaration » est liée aux diverses obligations d’enregistrement. Ce point particulièrement problématique et a été mis en relief par ARTICLE 19 dans une précédente analyse.

Par ailleurs, les obligations d’enregistrement stipulées dans l’Ordonnance sont identiques à celles de la version antérieure du Code de la Presse et de l’Ordonnance

16 Pour en savoir plus, lire “Proposed Guidelines on Protection of Journalists’ Sources” in David Banisar, Silencing Sources: An International Survey of Protections and Threats to Journalist’s Sources (Privacy International, 2007), 96.

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(mars 2011), que nos précédents commentaires avaient jugés insatisfaisantes à l’aune des standards internationaux pertinents.

Ces critères équivalent de facto un système de licence injustifiable de la presse écrite. Par ailleurs, l’Article 2 de l’Ordonnance impose spécifiquement une licence pour les journaux quotidiens et autres périodiques sans qu’il soit fait nulle part mention dans le Code de la Presse ou l’Ordonnance d’une procédure de licence ou d’une autorité habilitée à délivrer ces licences. Cela est similaire au projet de décret accompagnant la version du 30 mars du Code de la Presse.

ARTICLE 19 rappelle que les normes internationales relatives à la liberté d’expression ne reconnaissent pas le système de licence des journaux. Ces systèmes ne sont pas considérés comme admissibles dans le cadre du test de « nécessité » ci-dessus mentionné. Seule la licence des opérateurs de radiodiffusion a été reconnue nécessaire, ne serait ce que pour éviter le chaos sur les ondes. Par conséquent, on ne trouve aucun système de licence pour la presse écrite dans les pays démocratiques. Considérant cela, ARTICLE 19 ne pense pas qu’un quelconque intérêt légitime puisse justifier l’instauration d’un système de licence pour la presse écrite en Tunisie.

Dans les règlementations internationales, l’obligation d’un enregistrement technique peut ne pas entraver la garantie de la liberté d’expression dans les conditions suivantes :

▪ Aucune instance n’est habilitée à refuser un enregistrement quand l’information a été fournie.

▪ Le système n’impose pas de conditions substantielles aux médias. ▪ Le système ne présente pas de lourdeurs excessives. Et ▪ Le système est administré par un organe indépendant du gouvernement.

Le Comité des Droits de l’Homme, en charge de l’application du Pacte International relatif aux droits civils et politiques, a également noté que des mesures efficaces étaient nécessaires pour empêcher le contrôle des médias susceptible d’entraver le droit à la liberté d’expression d’autrui. Les obligations d’enregistrement irrespectueuses de ces conditions enfreignent les principes de la liberté d’expression dans la mesure où elles ne sont justifiées par aucun fondement du Pacte international relatifs aux droits civils et politiques tels que le droit ou la réputation d’autrui, la sécurité nationale, l’ordre public, la santé ou la morale publiques.

Nous pensons que le système proposé dans le Code de la Presse n’est pas conforme à ces critères fondamentaux. De plus, le Code de la Presse ne spécifie pas sur quelle base les autorités peuvent refuser un permis d’enregistrement, ni quelles sont les modalités d’une modification ou d’un recours en appel contre un tel refus. Dans la mesure où il introduit des restrictions et un contrôle gouvernementale sur la distribution de la presse écrite, le système de license enfreint le droit de recevoir librement des informations et des idées.

Les dispositions concernant les publications produites hors de Tunisie (Article 5 du Code) doivent être également supprimées. Nous soulignons que le droit à la liberté d’expression appartient à tous les individus et non uniquement à des citoyens d’un territoire donné, et qu’il n’y a par conséquent aucune justification à ce régime particulier.

Recommandations:

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Toutes les dispositions du Code de la Presse relatives aux obligations d’enregistrement direct ou indirect de la presse écrite et les sanctions prévues en cas de violation (Article 6 du Code) doivent être supprimées.

Les obligations d’enregistrement technique peuvent être autorisées sous certaines conditions : si aucune autorité ne peut refuser l’enregistrement, si aucune condition substantielle ne peut être imposée aux médias, si le système ne présente pas de lourdeurs excessives, et si le système est administré par un organe indépendant.

Le régime particulier relatif à la distribution des publications étrangères doit être supprimé.

Obligations des directeurs de rédaction et rédacteurs ARTICLE 19 attire l’attention sur le fait que malgré ses recommandations dans ce domaine sur les versions préliminaires du Code de la Presse, la version finale n’a incorporé que peu de modifications.

En particulier, les dispositions des Articles 18, 19 et 21 du Code – qui imposent l’obligation de présenter une déclaration écrite au Président du Tribunal de Première instance pour la publication de tout périodique et le dépôt de plusieurs exemplaires auprès des services du Ministre de l’Information ainsi que des sanctions en cas d’infraction à ces procédures – restent des restrictions injustifiables de la liberté d’expression.

Ces dispositions sont similaires à celles du chapitre « Des œuvres intellectuelles, littéraires et artistiques » du Code et élargissent les restrictions non seulement aux éditeurs mais aussi aux rédacteurs en chef et aux directeurs de rédaction. Les dispositions des Articles 19 et 21 du Code ne prévoient pas de recours en appel en cas de rejet des déclarations prévues au titre de l’enregistrement indirect. Ces dispositions sont ambiguës, imprécises et créent un système de quasi-enregistrement qui ouvre la voie à l’ingérence des autorités et à des abus. Nous renvoyons à nos commentaires précédents sur la nature et le bien-fondé de ce système.

Les sanctions prévues dans les Articles 19 et 21 du Code de la Presse sont excessivement sévères s’agissant d’infractions à des dispositions elles-mêmes illégitimes. Comme nous l’avons noté précédemment, le système de licence envisagé par le Code de la Presse peut ouvrir la voie à un contrôle étendu du gouvernement sur tout journal qui n’a pas ses faveurs. Il doit donc être supprimé.

Recommandation: Les Articles 18, 19 and 21 doivent être totalement supprimés du Code de la

Presse.

Conditions d’exercice des rédacteurs en chef et journalistes ARTICLE 19 note que les Articles 16, 17 et 20 du Code demeurent problématiques au vu de nos précédents commentaires. En particulier, ARTICLE 19 s’inquiète fortement du fait que les Articles 16, 17 et 20 du Code maintiennent des conditions d’exercice inacceptables pour les journalistes, directeurs et rédacteurs en chef. Toute restriction visant à choisir les personnes habilitées à pratiquer la profession de journaliste ou à être employées dans les médias sont depuis longtemps considérées comme une violation de la garantie internationale de la liberté d’expression. Les qualifications requises telles que celles mentionnées ci-dessus limitent dans les faits le droit de

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s’exprimer dans la presse écrite à une petite catégorie de personnes. Par ailleurs, ces dispositions ne reconnaissent pas que le droit de s’exprimer dans les moyens de communication de masse appartient à tous et non uniquement aux individus considérés comme particulièrement qualifiés ou adaptés à cette fonction.

En particulier, ARTICLE 19 propose de procéder aux modifications suivantes :

▪ Si les conditions d’exercice requises pour les rédacteurs en chef ont été retirées dans les versions précédentes, les conditions d’âge et de nationalité imposées aux rédacteurs en chef et directeurs de rédaction dans les Articles 16 et 17 du Code entravent toujours les règlementations internationales et privent le public du droit à recevoir des informations et des idées provenant des sources de son choix. Nous supposons que les auteurs des versions préliminaires ont cherché à garantir que la mission d’informer le public et les postes de rédacteurs en chef soient réservés à des personnes compétentes et expérimentées dotées des compétences professionnelles nécessaires. Toutefois, ces motifs sont injustifiables à l’aune des normes internationales. Aucune de ces conditions n’est nécessaire pour la réalisation d’un quelconque intérêt légitime reconnu, sachant que le marché agira à long terme comme un filtre approprié. Si de nouvelles publications emploient en un premier temps des personnes incompétentes ou sans éthique professionnelle, les lecteurs deviendront, eux, de plus en plus expérimentés et critiques et finiront par ne plus acheter les périodiques et magazines publiés, édités ou imprimés de façon inappropriée.

▪ Pour les mêmes raisons, les obligations relatives au nombre de journalistes employés à plein temps, à leur nationalité et leurs compétences professionnelles doivent être éliminées. ARTICLE 19 ne peut envisager aucun motif justifiant que l’Etat impose à des directeurs de rédaction un nombre précis de journalistes à plein temps. La nationalité et la formation requise sont elles aussi des restrictions inadmissibles, comme expliqué ci-dessus. Rappelons une fois de plus que les restrictions sur l’expression, sans considération de sa nature, doivent toujours répondre aux critères du test en trois volets ci-dessus mentionné. Cela signifie que les restrictions sont non seulement fixées par la loi mais proportionnées, et qu’elles ne constituent pas une mesure en dernier ressort. Les obligations imposées aux journalistes et aux rédacteurs ne sont pas conformes à ces critères.

▪ Nous observons que le Code de la Presse fournit une définition problématique du « journaliste professionnel », comme souligné dans les lignes portant sur l’Article 7. Selon les dispositions du Code, il semble qu’elle ne désigne que le journaliste « traditionnel », à savoir celui qui travaille pour les médias. Ce concept n’est pas conforme aux réglementations internationales sur la liberté d’expression et peut potentiellement restreindre le flux d’informations importantes délivrées au public. Nous répétons que le droit à la liberté d’expression est un droit humain spécifiquement protégé appartenant à tous les individus et non juste aux employés des médias. Le Code de la Presse doit reconnaître expressément ce droit. Comme nous l’avons déjà spécifié à propos de l’Article 7, le Code de la Presse doit aussi donner une définition large du journaliste afin d’englober les journalistes citoyens et autres individus engagés dans la collecte et la dissémination de l’information.

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ARTICLE 19 propose donc de réviser et d’amender substantiellement cette section et, en particulier, de supprimer toutes les obligations professionnelles s’appliquant aux journalistes, rédacteurs et directeurs.

Recommandation: Les conditions d’exercice requises pour être journaliste, directeur et rédacteur

en chef doivent être totalement supprimées du Code de la Presse.

Cartes de presseDans l’Article 20 du Code de la Presse, les cartes nationales de presse sont considérées comme une qualification requise pour l’emploi. Cette mesure permet de choisir les personnes habilitées à exercer la profession de journaliste ou à être employées dans le secteur des médias, et constitue une violation des garanties internationales de la liberté d’expression, comme expliqué dans les commentaires ci-dessus sur l’Article 7.

ARTICLE 19 note que cette disposition est inutile sachant que les cartes de presse sont normalement délivrées par l’entité même qui engage les services du journaliste ; par ailleurs, elle ne rentre pas dans le champ d’application de cette législation, le Code ne concernant que la presse écrite et les « journalistes » n’appartenant pas tous exclusivement à ce média.

Dans tous les cas, la délivrance des cartes de presse, soit-elle faite uniformément au niveau national, doit faire l’objet d’une autorégulation par les médias eux-mêmes, en coopération les uns avec les autres, au lieu d’être régie par la loi. Recommandation: L’obligation de détenir une carte de presse doit être supprimée du Code et faire

l’objet d’une autorégulation. Elle ne peut en aucun cas être perçue comme une qualification nécessaire à l’exercice de la profession de journaliste.

Code de déontologie et devoirs L’Article 13 du Code de la Presse se réfère au code de déontologie et aux devoirs auxquel sont soumis tous les journalistes. Le Code de la Presse n’énonce pas ces devoirs et ne donne aucune spécification sur le code de déontologie lui-même ; rien n’est dit non plus sur l’existence d’un tel code.

Comme nous l’avons précisé dans notre commentaire sur les versions préliminaires du Code de la Presse, ce code de déontologie doit faire l’objet d’une auto-régulation par les journalistes et les organes de presse eux-mêmes. Ces derniers doivent être libres d’adopter et de respecter de plein gré des standards déontologiques professionnels. Toute tentative des autorités de l’Etat de fixer ces standards afin d’assurer leur mise en œuvre constituerait un obstacle à la liberté d’expression et serait inutile dans une société démocratique.

Outre les sanctions prévues par l’Article 14 sur les violations de ce code de déontologie, ARTICLE 19 note également que la réglementation reste totalement silencieuse sur l’instance devant statuer sur ces violations. Nulle part dans la réglementation il n’est spécifié que seuls les organes de presse et les organisations de journalistes doivent se prononcer sur les conduites irrespectueuses du Code de la Presse. Notons également que dans la plupart des démocraties, les procédures de réclamation sont clairement liées à ces systèmes auto-régulés. Par ailleurs, la

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Déclaration africaine note que dans toutes les procédures de réclamation relatives aux médias, les réclamations doivent être déterminées en accord avec des règles établies et des codes de déontologie agréés par toutes les parties intéressées.

Recommandation: Le code de déontologie doit être supprimé du Code de la Presse et faire l’objet

d’une auto-régulation par les organes de presse et les médias.

Obligations des publications Comme dans les versions initiales du Code de la Presse, l’enregistrement obligatoire est accompagné d’une obligation de dépôt légal des publications.

Conformément à l’Article 5 du Code de la Presse (et à plusieurs dispositions ultérieures), l’imprimeur, le producteur, l’éditeur ou le distributeur de presse ont l’obligation de déposer six exemplaires gratuits de chaque œuvre auprès des services du Ministre de l’information avant leur mise à disposition au public.

Dans ses commentaires sur les versions préliminaires, ARTICLE 19 a noté que cette obligation est inutile dans les sociétés démocratiques. L’obligation de dépôt légal a généralement pour but de créer, par exemple, une bibliothèque, et peut se justifier pour des besoins d’archivage. En créant une surcharge de travail administratif importante, cette mesure peut servir d’instrument de censure, une crainte particulièrement forte dans la mesure où l’on ignore dans quel but les autorités de l’Etat exigent ces cinq exemplaires gratuits de chaque publication non commerciale.

S’il est vrai que la réduction du nombre d’autorités de dépôt et du nombre d’exemplaires à déposer constitue une amélioration au regard des versions précédentes, ARTICLE 19 maintient ses commentaires sur le fait que le dépôt de ces exemplaires gratuits peut être excessivement coûteux pour les éditeurs et engendrer des restrictions excessives sur les droits de propriété des entrepreneurs de presse. Si les autorités de l’Etat souhaitent recevoir des périodiques, elles doivent s’y abonner comme tout individu ou toute institution. Nous craignons cependant que cette mesure serve à contrôler les médias et entrave le droit à la liberté d’expression. Par conséquent, nous proposons l’envoi d’exemplaires gratuits uniquement à la Bibliothèque nationale, dont la mission est de protéger le patrimoine culturel national. C’est une pratique standard dans le monde entier.

Recommandation: L’obligation de dépôt légal des œuvres doit être limitée à la Bibliothèque

nationale.

Obligations de transparence inutiles et restrictives Les dispositions traitées dans cette section ont été élargies et améliorées par rapport aux versions préliminaires. Toutefois, certaines mesures demeurent encore problématiques.

L’Article 23 du Code de la Presse enjoint les éditeurs de presse à publier leur bilan et leurs comptes de résultats annuels. L’Article 28 interdit aux périodiques d’information générale et à tous ceux qui sont en relation avec ledit périodique « d’accepter des fonds ou des avantages d’un quelconque gouvernement étranger, à l’exception des aides des parties gouvernementales ou non gouvernementales étrangères, relatives à des formations, à l’organisation de séminaires communs ou

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des ventes, des abonnements et des annonces publicitaires que le périodique perçoit en contrepartie de services fournis à ses clients ». L’Article 24 du Code de la Presse est un rajout par rapport aux versions préliminaires et contient des mesures visant à réglementer les transferts de capitaux sous forme de participations aux capitaux des périodiques ou des établissements publiant des périodiques.

ARTICLE 19 craint que ces dispositions visent uniquement à renforcer le contrôle de l’Etat sur chaque aspect du secteur de la presse écrite. Certains pays fixent des limites à l’acquisition de journaux par des éditeurs étrangers afin de préserver leur caractère local et permettre au public l’accès à l’information et aux idées émanant de sa propre société. Les lourdes interdictions pesant sur les aides provenant de l’étranger vont bien au-delà de cela et n’ont malheureusement pas été suffisamment adaptées pour éviter une domination étrangère excessive des médias. Cette interdiction inutile peut avoir pour fâcheuse conséquence d’empêcher le transfert d’aides étrangères ou d’investissements bénéfiques vers des entreprises de presse tunisiennes, qui manquent fréquemment de fonds et d’expertise.

Dans le même ordre d’idée, rien ne justifie la publication obligatoire des comptes de résultats des entreprises de presse. Dans la majorité des pays, le contrôle des comptes incombe à des organismes chargés de l’application de la loi, comme la police ou les autorités de régulation des entreprises et ne peut être requis qu’en cas de présomption d’actes répréhensibles. L’administration interne des organes de presse n’est pas une affaire d’intérêt général et la publication de telles données peut porter préjudice à la position concurrentielle d’une entreprise.

Recommandations: L’obligation pour les organes de presse de publier leurs comptes de résultats

doit être supprimée.

PublicitéL’Article 26 du Code de la Presse contraint les périodiques d’information générale à fixer leurs tarifs publicitaires – et le cas échéant les tarifs publicitaires communs à un ou plusieurs périodiques d’information générale – pendant trois mois et d’informer les parties concernées de leurs décisions, avec des amendes en cas de violation de ces dispositions. D’autres dispositions sur la publicité dans l’Article 31 du Code de la Presse stipulent qu’il est interdit aux périodiques d’information générale de faire de la propagande sous forme d’annonces publicitaires en faveur d’un parti politique.

ARTICLE 19 note que la publicité est l’une des principales ressources des journaux et que les tarifs demandés pour la publication d’annonces publicitaires sont un outil compétitif important entre publications. ARTICLE 19 est d’avis que les contraintes mentionnées ci-dessus permettent aux autorités d’interférer dans le marché de la publicité, qu’elles ne sont pas nécessaires pour servir un intérêt légitime, et qu’elles exposent à de sérieux risques d’abus. Nous craignons que ces dispositions permettent aux autorités de fixer des tarifs conventionnels susceptibles de paraître particulièrement élevés ou particulièrement bas pour un journal critique ou d’une quelconque manière défavorisé, les empêchant de trouver des annonceurs et de tirer des revenus équitables de la publicité. Le contrôle des prix publicitaires n’existe pas dans la majorité des pays et il n’y a aucune raison de croire que sa suppression poserait des problèmes.

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Recommandation: Les dispositions relatives au contrôle des prix publicitaires doivent être

totalement supprimées du Code de la Presse.

Dispositions sur le pluralismeLes Articles 33–38 du Code de la Presse visent à réglementer la concentration de la presse écrite. Comme le stipulent les standards internationaux et régionaux, un des éléments primordiaux du droit à la liberté d’expression – visant à protéger à la fois le droit à la parole et le droit de recevoir des informations et des idées – est le pluralisme et la diversité, en particulier dans les médias. En conséquence, les Etats sont contraints de prendre des mesures positives en vue de limiter la concentration excessive de l’appropriation des médias, susceptible de menacer le pluralisme et la diversité.

Le commentaire d’ordre général du Comité des droits de l’homme sur l’Article 19 affirme que le droit à la liberté d’expression a besoin de ces mesures positives pour « le développement des moyens de communication de masse modernes » et parce que « des mesures efficaces (sont) nécessaires pour empêcher que le contrôle des médias limite le droit de chacun à la liberté d’expression ».

L’importance du pluralisme et de la diversité dans les médias a été également reconnue dans la Déclaration de Principes sur la Liberté d’expression en Afrique datant de 2002, adoptée par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples. Le principe XIV(3) de la déclaration affirme que « les Etats devraient adopter des mesures efficaces pour empêcher une forte concentration de l’appropriation des médias, bien que de telles mesures ne doivent pas être draconiennes au point de freiner le développement du secteur des médias dans son ensemble ». Par ailleurs, il est clair que la Déclaration reconnaît que ces mesures peuvent également entraver la liberté d’expression, et que les mesures adoptées ne doivent pas à cet égard être excessivement restrictives.

ARTICLE 19 souligne également que la Déclaration conjointe sur la diversité dans la radiodiffusion adoptée en 2007 par les quatre mandataires spéciaux pour la protection de la liberté d’expression – le Rapporteur spécial de l’ONU pour la liberté d’opinion et d’expression, le Représentant de l’OSCE pour la liberté des médias, le Rapporteur spécial de l’OEA pour la liberté d’expression et le Rapporteur spécial de la Commission africaine des Droits de l’homme et des Peuples (CADHP) pour la liberté d’expression – contient des recommandations sur la concentration des médias (la Déclaration conjointe ne traite que de la radiodiffusion). Elle affirme que, reconnaissant l’importance particulière de la diversité et du pluralisme des médias pour la sauvegarde de la démocratie, des mesures spéciales incluant des lois anti-monopoles doivent être mises en place pour empêcher la concentration excessive ou la participation croisée dans les médias, que ce soit de manière horizontale ou verticale. Ces mesures doivent impliquer des contraintes strictes de transparence en ce qui concerne la propriété des médias à tous les niveaux. Elle doivent aussi impliquer une surveillance active, tenant compte de la concentration de la propriété dans l’attribution de licences, un signalement préalable des principales concentrations proposées, et un accroissement du pouvoir des organismes de contrôle pour empêcher la combinaison de ces médias.

D’autres standards comparatifs, dont la Recommandation 2007 (2) du Comité des ministres du Conseil de l’Europe sur le pluralisme des médias et la diversité du contenu des médias du 31 janvier 2007, sont applicables dans ce cas. Cette

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Recommandation affirme que les « règles devraient être adaptées à la taille et aux caractéristiques spécifiques du marché national, régional ou local des médias audiovisuels et/ou écrits auxquels elles auraient vocation à s’appliquer ». Elle souligne également plusieurs dispositions sur la transparence des médias et identifie cinq catégories primordiales d’informations à mettre à la disposition du public, dont l’information sur les personnes susceptibles d’exercer une influence et/ou de profiter des organes de presse, et toute mesure de soutien reçu par cet organe. La Recommandation renvoie également à l’introduction de « seuils » fondés sur des critères objectifs et réalistes tels que la part d’audience, la diffusion, le chiffre d’affaires, les parts sociales ou les droits de vote.

Les dispositions du Code de la Presse sur la concentration des médias et le pluralisme doivent être évaluées à l’aune de ces standards. ARTICLE 19 note que le but des dispositions des Articles 33–38 du Code étant de protéger la liberté d’expression et non de la limiter, les restrictions de la propriété ne doivent pas être soumises au test en trois volets. Quoi qu’il en soit, les dispositions du Code sur la concentration des médias doivent respecter des standards de légitimité. Si ce n’est pas le cas, les mesures limitant sérieusement la liberté d’expression en n’agissant pas contre la concentration de la propriété doivent être supprimées.

A cet égard, ARTICLE 19 estime que si les dispositions du Code de la Presse ont changé par rapport aux versions précédentes, elles ne sont toujours pas conformes aux standards internationaux. A titre d’exemple, l’obligation de ne posséder que deux périodiques d’information générale (Article 33) peut se révéler excessivement restrictive. L’Article 33 semble également empiéter sur l’Article 34 et la différence entre les deux articles n’est pas claire. Le Code ne tient pas compte non plus des problèmes liés à la concentration horizontale et verticale et la participation croisée, comme recommandé dans la Déclaration conjointe ci-dessus mentionnée.

Les Articles 33-38 ne cherchent pas à promouvoir la diversité du contenu ou à encourager le contenu des services publics. Ils ne cherchent pas non plus à assurer la disponibilité d’une variété suffisante d’organes de presse par des propriétaires de médias différents, privés ou publics. Si les Articles 33 et 34 semblent en partie destinés à empêcher l’accumulation par un seul propriétaire de plus de 30 % du tirage total d’une catégorie de journal ou de périodique, cela doit être clairement précisé. Par ailleurs, à la lumière de ces principes, ils doivent tenir compte du phénomène d’intégration horizontale, à savoir des fusions dans une même branche d’activité – dans ce cas les concentrations mono et multi-médias – et du phénomène d’intégration verticale, c’est-à-dire le contrôle par une seule personne, une société ou un groupe de quelques-uns des éléments essentiels de production, distribution et activités associées telles que la publicité ou les télécommunications.

Les sanctions prévues dans les Articles 36-38 correspondent à des articles qui enfreignent les standards internationaux, comme établi dans nos précédents commentaires sur le « contrôle financier » et la « publicité ». Elles doivent par conséquent être supprimées.

ARTICLE 19 estime que les provisions des Articles 33-38 ne visent pas à promouvoir le pluralisme de façon globale et doivent en conséquence être attentivement réexaminées à l’aune des standards internationaux en vigueur dans ce domaine.

Recommandations: Les restrictions sur la propriété de la presse écrite par des étrangers ne doivent

pas être plus sévères que nécessaire pour préserver le caractère local de la

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presse et assurer que tous les individus accèdent à l’information et aux idées émanant de leur société.

Les sanctions prévues dans les Articles 36-38 doivent être supprimées et celles des Articles 33-38 attentivement réexaminées à l’aune des standards internationaux en vigueur dans le domaine.

Les dispositions relatives à la concentration des médias doivent être modifiées dans le respect des standards internationaux en vigueur afin d’assurer le pluralisme.

Droit de rectification et droit de réponseEn premier lieu, ARTICLE 19 note que le droit de réponse et les droits associés sont un aspect hautement litigieux des réglementations des médias sachant que ces droits constituent une ingérence dans le droit à la liberté d’expression. Certains les considèrent comme une alternative peu coûteuse et accessible à des actions en justice onéreuses pour des individus dont les droits individuels (par exemple le droit à la protection de la réputation ou de la vie privée) se voient entravés par la publication de déclarations incorrectes ou erronées. D’autres les considèrent comme une ingérence inadmissible dans l’indépendance de la presse. ARTICLE 19 et le Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté d’expression et d’opinion ont fréquemment rappelé que le droit de réponse doit être idéalement volontaire. De ce fait, nous recommandons par principe que ces questions ne soient pas réglementées par le Code mais régies par des mécanismes d’autorégulation.

ARTICLE 19 se réjouit des modifications apportées aux dispositions sur les droits de rectification et de réponse (Section 5: Rectification et droit de réponse) suite à nos remarques très critiques dans nos analyses des versions préliminaires. Toutefois, bien que l’Article 42 du Code autorise dorénavant un journal ou un périodique à refuser l’insertion d’une « réponse », aucune mention n’est faite du refus d’insérer une « rectification ». En général, les dispositions spécifiques relatives à ce droit demeurent extrêmement restrictives et, dans le cas d’élections, extrêmement vagues. Elles doivent par conséquent être modifiées.

Le Code de la Presse omet totalement l’importance primordiale du débat public sur des questions d’intérêt général. Les réglementations du droit international et du droit comparé dans ce domaine reconnaissent spécifiquement que certains intérêts publics légitimes peuvent primer sur la protection de la vie privée et de la réputation. Un rectificatif ne doit pas être nécessaire lorsque la publication d’une déclaration est justifiée par des motifs d’intérêt général. Ces dispositions doivent être introduites dans le Code.

L’Article 39 reste flou sur la forme du « rectificatif » à insérer. Il doit être fait de manière identique à celle de l’information ou de la déclaration d’origine.

L’Article 44 du Code est vague et ambigu. En l’absence d’une définition précise des « associations habilitées en vertu de leur statut à défendre les droits de l’homme », on ne peut savoir qui peut exercer de plein droit ce droit de rectification et de réponse au nom de ces associations.

L’emploi des termes « rectification » et « réponse » reste encore confus dans les Articles 42 et 44 du Code de la Presse. Il semble qu’un seul de ces termes est utilisé alors que les deux doivent être mentionnés.

Recommandations:

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Le droit de réponse doit être idéalement régi par des mécanismes d’autorégulation et non par le Code de la Presse. Sinon, des dispositions autorisant le refus d’insérer une « rectification » doivent être prévues et les dispositions sur ce droit clarifiées.

La réglementation doit autoriser le refus d’un droit de réponse lorsque la déclaration se justifie par un intérêt général légitime primordial.

Il est nécessaire de préciser la forme du « rectificatif » à publier et quels sont les organes habilités à exercer les droits de réponse et de rectification.

Les droits de réponse et de rectification doivent être définitivement distingués l’un de l’autre.

Sanctions pénales spécifiques à la presse écrite et aux journalistesComme spécifié dans nos commentaires sur les versions préliminaires du Code, ARTICLE 19 est très préoccupé par le chapitre portant sur les délits liés à la presse et recommande l’abrogation de cette section du Code. ARTICLE 19 souligne que les dispositions de ce chapitre ont été modifiées conformément à certains de nos commentaires, mais la nature et les implications globales de ce chapitre restent très préoccupantes.

De façon générale, ARTICLE 19 remarque que les questions de droit pénal doivent être réglementées par le Code pénal tunisien. Les sanctions pénales n’ont pas leur place dans des réglementations sur les médias. Le Code ne doit donc contenir aucune disposition pénale, aussi minime soit-elle. Les sanctions pénales distinguant les journalistes et la presse écrite sont par nature contraires au droit à la liberté d’expression et doivent être évitées. Cela n’implique pas nécessairement que toutes les restrictions pénales de la liberté d’expression sont illégitimes. Toutefois, elles pèsent comme une épée de Damoclès sur les journalistes et les employés de la presse écrite et peuvent avoir un « effet paralysant » sur l’exercice du droit à la liberté d’expression. 

Il est difficile de comprendre pourquoi la réglementation des tentatives de délit se rapportant à la presse écrite doit figurer dans le Code de la Presse. Ces dispositions doivent être supprimées et traitées par le Code pénal – par exemple les mesures liées aux délits commis contre des journalistes et la liberté des médias. Si l’objetif de ces dispositions est d’imposer des sanctions spécifiques pour des délits commis par les journalistes, elles doivent être totalement supprimées. Rien ne justifie que les personnes engagées dans les médias soient traitées différemment du reste de la popultion lorsqu’elles commettent des meurtres, des vols ou des délits.

Nous recommandons donc de supprimer le Chapitre V dans son intégralité. Néanmoins, considérant que ce chapitre traite des restrictions de contenu, ARTICLE 19 souhaite commenter certaines dispositions pour expliquer ce que doit être une réglementation appropriée dans ces domaines.

i. Nature des sanctionsLe Code de la Presse prévoit de nombreuses sanctions pour punir des crimes et délits se rapportant à la presse, dont des peines d’emprisonnement et de lourdes amendes. ARTICLE 19 note que selon le droit international, la nature et la sévérité des peines imposées sont des facteurs à prendre en considération quand on évalue la proportionnalité d’une ingérence dans l’exercice du droit à la liberté d’expression. A la lumière de ces remarques, l’Etat doit assurer que les mesures ou les sanctions se rapportant à la liberté d’expression ne dissuadent pas les citoyens et les médias de

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participer aux débats sur des questions d’intérêt général légitime. ARTICLE 19 a plusieurs préoccupations concernant ces sanctions :

▪ Nous sommes inquiets que la totalité du Chapitre 5 du Code de la Presse traitant des infractions commises par voie de presse ne prenne pas en considération les dispositions des précédentes garanties de l’Article 1. Comme noté ci-dessus, l’Article 1 du Code est une disposition digne d’éloge qui délimite également le champ d’application des restrictions admisssibles. Ces dernières stipulent néanmoins qu’une sanction doit entraver le moins possible l’exercice du droit à la liberté d’expression. A ce propos, nous observons qu’aucune mesure ne garantit que les sanctions ne sont pas utilisées abusivement ou de manière discriminante contre les journalistes et les médias. Le Chapitre V néglige totalement cette obligation.

▪ Nous pensons également que la nature des sanctions prévues par le Code de la Presse, en particulier les peines d’emprisonnement, est dans la majorité des cas disproportionnée, notamment lorsque des mesures de remplacement peuvent sanctionner l’infraction concernée. Nous observons que les sanctions pénales dans ce domaine ne sont compatibles avec la liberté d’expression des journalistes que dans des circonstances exceptionnelles, notamment lorsque d’autres droits fondamentaux ont été sérieusement entravés – par exemple en cas d’incitation à la haine ou à la violence. Il est généralement admis que des sanctions sévères prescrites par la loi ont un effet paralysant sur l’exercice de la liberté d’expression même lorsqu’elles ne sont pas utilisées. Tel est l’effet de la simple possibilité d’une privation de la liberté prévue par la loi.

ii. Dispositions sur le discours de haineARTICLE 19 observe que les dispositions relatives au discours de haine ont été modifiées conformément à nos commentaires sur la version préliminaire du Code. ARTICLE 19 observe également que malgré ces modifications, les dispositions du Code de la Presse relatives aux discours de haine ne sont pas conformes aux standards internationaux applicables.

Les Articles 50 et 51 du Code de la Presse punissent les délits d’incitation au « meurtre, atteinte à l’intégrité corporelle d’autrui, viol ou pillage » et de « collaboration avec l’ennemi » par voie de « discours, de paroles, de menace dans les lieux publics, par voie d’affiches et annonces exposées au public ou par tout moyen d’information audiovisuelle et électronique ». L’Article 52 punit « celui qui aura directement incité à la haine entre les genres, les religions ou les populations en appelant à la discrimination et en utilisant des procédés hostiles ou la violence ou la propagation d’opinions fondées sur la ségrégation raciale ». Plus loin, l’Article 53 punit celui qui « utilise intentionnellement les lieux de culte à des fins de propagande partisane et politique et celui qui porte intentionnellement atteinte aux cultes religieux autorisés ». Ces dispositions restent extrêmement vagues et ne sont pas conformes aux standards internationaux dans ce domaine. Conscient que le discours injurieux est souvent interprété comme une incitation à la haine ou à la violence, la restriction en question est problématique dans la mesure où elle est expose à des abus. Même incorporées dans le Code pénal, ces dispositions doivent être profondément modifiées.

ARTICLE 19 souligne que toute provision sur le discours de haine doit se conformer strictement aux obligations de l’Article 20 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques. Le paragraphe 2 de cet Article ne demande pas aux Etats

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d’interdire les déclarations négatives envers des groupes nationaux, raciaux ou religieux. Il les contraint seulement à interdire les déclarations constituant « une incitation à la discrimination, l’hostilité ou la violence ». En autorisant des restrictions plus importantes du discours, le Code de la Presse ne réussit pas à incorporer ce standard.

Nous appelons également les auteurs des versions préliminaires à prendre connaissance des dispositions des Principes de Camden sur la liberté d’expression et l’égalité rédigés par ARTICLE 1917 qui examinent cette question dans le détail. Toute réglementation doit garantir que seul « un plaidoyer pour la haine nationale, raciale ou religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité et à la violence »18 est interdit. La législation doit également stipuler que les sanctions pour incitation à la haine ne peuvent être infligées que lorsqu’il y a eu intention de promouvoir la haine publiquement et l’absence de cette intention doit être une défense suffisante. Dans les cas de discours offensants, toutefois, la charge de preuve de l’intention incombe à l’accusation et la défense n’a pas à prouver l’absence de cette intention. Le Code de la Presse ne fait aucune référence à une telle obligation, ce qui constitue une carence sérieuse.

DiffamationSi nous observons que les peines d’emprisonnement pour de nombreuses infractions, dont la diffamation, ont été retirées du Code de la Presse suite à nos recommandations, les autres sanctions imposant de lourdes amendes sont encore restrictives et inutiles dans ce Code.

Les commentaires d’ARTICLE 19 sur la diffamation sont fondés sur les standards internationaux en vigueur dans ce domaine. Le droit international autorise des restrictions limitées du droit à la liberté d’expression pour protéger un certain nombre d’intérêts, dont la réputation. Toutefois, les paramètres de ces restrictions doivent rester conformes aux obligations de l’Article 19 du PIDCP. Nous nous référons également à la jurisprudence du Comité des droits de l’homme de l’ONU et aux standards du droit comparé dans ce domaine. Enfin, nous nous référons aux standards du droit international et comparé présenté de manière concise dans la publication d’ARTICLE 19, Defining Defamation: Principles on Freedom of Expression and Protection of Reputations (“Defining Defamation”)19 qui a été largement approuvée sur le plan international, y compris par les trois mandataires spéciaux pour la protection de la liberté d’expression – le Rapporteur spécial de l’ONU pour la liberté d’opinion et d’expression, le Représentant de l’OSCE pour la liberté des médias et le Rapporteur spécial de l’OEA pour la liberté d’expression.

Sur la base de ces standards, ARTICLE 19 recommande de dépénaliser la diffamation et de supprimer toutes les sanctions pénales se rapportant à la diffamation et aux 17 La définition de l’incitation à la haine est fondée sur les Principes de Camden sur la liberté d’expression et l’égalité, une interprétation progressiste du droit international et des réglementations traitant de l’équilibre entre les droits à la liberté d’expression et à l’égalité élaborée par ARTICLE 19 en consultation avec des hauts représentants gouvernementaux, des représentants de la société civile et des experts de la législation internationale sur la liberté d’expression et l’égalité. Voir sur http://www.article19.org/pdfs/standards/the-camden-principles-on-freedom-of-expression-and-equality.pdf. 18 ARTICLE 19 note que ces termes ont été élaborés dans les Principes de Camden mentionnés ci-dessus. 19 Londres: ARTICLE 19, 2000; disponible sur http://www.article19.org/data/files/pdfs/standards/definingdefamation.pdf.

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injures incluses dans les Articles 51-59 du Code. De plus, nous recommandons de réviser en profondeur les Articles 51-59. En particulier, nous proposons les recommandations suivantes :

▪ L’Article 55 prévoit des peines en cas d’allégations « directes » ou « indirectes » visant une « entité officielle ». Malgré le fait que le droit international, dont l’Article 19, paragraphe 3, du Pacte international, autorise des lois visant à protéger les droits et la réputation d’« autrui », cela ne s’applique pas à des entités et des organes publics, qui n’ont pas de « réputation » au sens premier du mot. Le Comité des droits de l’Homme de l’ONU a néanmoins recommandé que le délit pénal de « diffamation contre l’Etat » soit aboli. Le Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté d’opinion et d’expression a également établi que les organes gouvernementaux et les autorités publiques ne sont pas habilités à engager des poursuites pour diffamation ; le seul objectif des lois sur la diffamation et les injures doit être de protéger la réputation d’autrui et non pas d’empêcher des critiques à l’encontre du gouvernement ou de maintenir l’ordre public, des points pour lesquels des régulations spécifiques existent. Cette possibilité ne doit donc pas être fournie pour des organes officiels en Tunisie.  

▪ Nous nous réjouissons de noter que depuis nos commentaires sur la version préliminaire du 30 mars, les références spécifiques à des « organismes publics »  ont disparu des articles relatifs à la diffamation. Toutefois, le Code de la Presse ne prévoit aucune restriction spécifique aux dispositions sur la diffamation clarifiant qu’elles ne s’appliquent qu’à des personnes privées. L’énoncé est parfois général et nous pensons qu’il permettra d’appliquer par défaut les dispositions sur la diffamation à des entités officielles. L’Article 49 stipule qu’une personne peut être punie pour avoir enlevé ou déchiré une affiche électorale. Les personnes publiques, telles que les représentants politiques, doivent tolérer des critiques bien plus importantes sur leur fonctionnement qu’une personne privée. Le Comité des droits de l’homme de l’ONU a, par exemple, affirmé que les critiques sévères contre des membres du gouvernement sont un aspect essentiel de la démocratie. Nous recommandons par conséquent d’introduire une distinction entre des représentants publics et des personnes privées dans toutes les législations pertinentes sur la diffamation. Les représentants publics qui engagent des poursuites pour diffamation doivent être contraints de démontrer que la déclaration concernée est basée sur des faits, qu’elle est erronée et que le mensonge est intentionné et résulte d’une imprudence quant à sa véracité.

▪ Nous nous réjouissons de noter que l’Article 58 limite le droit d’invoquer une diffamation pour le compte de personnes décédées aux seuls cas où des héritiers ou des proches subissent des préjudices personnels. Cette disposition stipule essentiellement que des individus peuvent se défendre contre des actes ou des déclarations diffamatoires dirigés contre leur personne. Il n’y a ici aucune différence avec les dispositions des Articles 55-57, par conséquent la disposition est redondante et doit être supprimée. Le maintien de cette disposition crée une confusion sur la question de savoir si le Code octroie aux individus le droit de se défendre contre la diffamation de personnes décédées. Ce point est très problématique dans la mesure où le préjudice causé par une attaque injustifiée contre la réputation d’une personne est direct et personnel par nature. Contrairement aux biens, il ne s’agit pas d’un intérêt dont on peut hériter ; tout intérêt que des vivants peuvent trouver dans la réputation d’une personne décédée est fondamentalement différent de celui qu’une personne vivante peut trouver

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dans sa propre réputation. Par ailleurs, il est facile d’entraver un droit protégeant la réputation de personnes décédées et ce droit est susceptible d’empêcher un débat libre et ouvert sur des personnalités ou des événements historiques.

▪ Nous recommandons également de mettre toutes les dispositions relatives à la diffamation du Code de la Presse et partout ailleurs en conformité avec les standards internationaux et les bonnes pratiques en la matière, comme résumé ci-dessus. En vertu d’une telle loi, seules les déclarations de fait incorrectes portant préjudice à la réputation pourraient être passibles de poursuites judiciaires. De plus cette législation doit contenir les dispositions suivantes :

o Les défenses appropriées doivent inclure une défense de vérité et de la caractère raisonnable de la publication ;

o La charge de la preuve concernant des déclarations d’intérêt général doit incomber à l’accusation.

o Des lignes directrices doivent être fournies sur les préjudices. Eto Les responsables publics engageant une poursuite pour diffamation

doivent être contraints de prouver que la déclaration incriminée est fausse, dirigée contre leur personne et faite tout en sachant qu’elle était fausse ou sans considération aucune de la vérité.

Dans toutes les dispositions relatives aux infractions, le Code de la Presse doit incorporer le principe du droit international affirmant que les sanctions doivent être nécessaires et proportionnées et ne peuvent être imposées que dans des procédures respectueuses des critères d’un procès équitable. Les juges doivent garantir que le préjudice porté à la liberté d’expression causé par une restriction ne doit pas excéder ses bienfaits pour l’intérêt légitime visé.

Poursuites et sanctions (Chapitre 6)ARTICLE 19 note que ce chapitre traite des procédures pénales et de leur mise en œuvre dans les dispositions du Chapitre 5 sur les infractions commises par voie de presse ou tous autres moyens de publication. Comme recommandé ci-dessus, le Chapitre 5 doit être éliminé.

De plus, nous soutenons que les dispositions relatives aux procédures pénales n’ont pas leur place dans une législation sur les médias. Elles doivent relever d’une législation spécifique – le Code de procédure pénale – qui fixe des standards uniformes pour tous les délits. Nous notons que ces standards doivent également respecter le droit international relatif à la privation de la liberté et au jugement équitable. Aucune raison ne justifie la mise en place de procédures spécifiques aux journalistes et travailleurs des médias.

Recommandations: Le chapitre sur les infractions commises par voie de presse doit être supprimé

ainsi que celui sur les poursuites et sanctions. Le Code de la Presse ne doit contenir aucune disposition pénale.

Toutes les dispositions sur les sanctions commises par voie de presse doivent incorporer le principe selon lequel les peines doivent entraver le moins possible l’exercice du droit à la liberté d’expression. Les mesures et sanctions relatives à l’expression ne doivent pas contribuer à empêcher des individus et des organes des médias de participer à des débats sur des questions d’intérêt général légitime.

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Le Code de la Presse doit fournir des garanties en vue d’assurer que les sanctions maximales ne sont pas utilisées de manière abusive et discriminante contre des journalistes et des médias.

Le Code de la Presse doit incorporer les principes selon lesquels toute sanction en matière d’expression doit être nécessaire et proportionnée, et entraver le moins possible l’exercice du droit à la liberté d’expression.

Les discours de haine contre des groupes nationaux, raciaux ou religieux ne doivent être interdits que lorsqu’ils constituent une incitation à la discrimination, à l’hostilité et à la violence.

L’intention de promouvoir publiquement la haine, dont la charge de la preuve incombe à l’accusation, doit être prouvée en cas de poursuite pour incitation à la haine et l’absence de cette intention doit être une défense suffisante contre une telle accusation.

La diffamation doit être dépénalisée et toutes les sanctions pénales pour diffamation et insultes doivent être supprimées, en particulier lorsqu’il s’agit d’organes et d’entités publics. Les dispositions pénales relatives à la diffamation doivent être remplacées par les lois civiles appropriées.

L’Article 58 sur les allégations de diffamation pour le compte de personnes décédées doivent être retirées du Code.

Seules les déclarations de fait incorrectes portant préjudice à la réputation d’autrui doivent être passibles d’une action en justice et des défenses doivent être prévues pour la vérité ou le caractère raisonnable de la publication.

La charge de la preuve concernant les déclarations d’intérêt général incombe à l’accusation et des lignes directrices doivent être fournies sur les préjudices.

Les sanctions pour diffamation doivent être nécessaires et proportionnées et imposées uniquement dans des procédures respectueuses des standards d’un procès équitable. Le niveau des amendes administratives doit être révisé à la baisse.

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Code de la Presse et de l’Ordonnance Décret-loi n° 2011-115 du 2 novembre 2011, relatif à la liberté de la presse, de l’impression et de l’édition (traduction non officielle)

Le Président de la République par intérim,

Sur proposition de l’Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique,

Vu la loi n° 66-27 du 30 avril 1966, portant promulgation du Code du travail,

Vu la loi n° 75-32 du 28 avril 1975, portant promulgation du Code de la presse et l’ensemble des textes qui l’ont modifié et complété,

Vu le décret-loi n° 2011-6 du 18 février 2011, portant création de l’Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique,

Vu le décret-loi n° 2011-10 du 2 mars 2011, relatif à la création de l’Instance nationale indépendante pour la réforme du secteur de l’information et de la communication,

Vu le décret-loi n° 2011-14 du 23 mars 2011, portant organisation provisoire des pouvoirs publics,

Vu le Décret-loi n° 2011-41 du 26 mai 2011, relatif à l’accès aux documents administratifs des organismes publics, tel que modifié et complété par le décret-loi n° 2011-54 du 11 juin 2011,

Vu l’avis de l’Instance nationale indépendante pour la réforme du secteur de l’information et de la communication,

Vu la délibération du conseil des ministres,

Prend le décret-loi dont la teneur suit :

Chapitre I : Dispositions générales

Article premier – Le droit à la liberté d’expression est garanti et s’exerce conformément aux articles du pacte international des droits civils et politiques, aux autres conventions s’y rapportant, adoptées par la République tunisienne et aux dispositions du présent décret-loi.

Le droit à la liberté d’expression englobe la liberté d’échanger, de publier et de recevoir les informations, les opinions et les idées quelles qu’elles soient.

La liberté d’expression ne peut être limitée que par un texte législatif et à condition :

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- Que le but envisagé soit la réalisation d’un intérêt légitime consistant à respecter les droits et la dignité des tiers, la sauvegarde de l’ordre public ou la protection de la défense et de la sécurité nationale.

- Et que la limitation soit nécessaire, adaptée aux mesures devant être prises dans une société démocratique et sans présenter un danger au fondement du droit à la liberté d’expression et d’information.

Article 2 – Le présent décret-loi a pour but d’organiser la liberté d’expression. Au sens du présent décret-loi, on entend par :

- Les parties privées : les personnes physiques ou morales qui exercent toute activité commerciale, sociale ou toute profession privée.

- Les parties publiques : toutes les parties de quelque niveau qu’elles soient ou de quelque branche de l’Etat qu’elles soient, tous les établissements et entreprises publics et toutes les instances chargées d’exécuter un service public.

- Enregistrement : tous les travaux à caractère artistique qui ont pour but d’identifier les œuvres soumises au dépôt légal.

- Le dépôt légal : une procédure permettant à l’Administration d’avoir des copies de toute œuvre mentionnée au présent décret-loi et qui a pour but l’archivage et la sauvegarde de la mémoire nationale.

- Les travaux d’impression : tous les produits de l’impression destinés au public quelle que soit leur forme.

- Les œuvres : tous les écrits, les dessins, les images, les expressions orales ou tout autre mode d’expression destinés au public et consignés sur un support papier ou dans des supports de sauvegarde, magnétiques, numériques ou autres supports échangeables.

- Le livre : toute publication non périodique imprimée ou numérisée ayant 49 pages au moins, pages de couverture non comprises.

- Le périodique : toute publication périodique, quelle que soit sa forme, paraissant sous un seul titre dans des délais plus ou moins éloignés même de façon irrégulière, et ce à condition que sa succession soit décidée pour une durée indéterminée et ses numéros s’enchainent d’un point de vue chronologique et en terme de numérotation. Sont considérés des périodiques, en particulier, les journaux quotidiens, hebdomadaires, bimensuels, les magazines, les périodiques écrits et illustrés et les annales.

- Le périodique d’information générale : tout périodique général ou partisan, relatant au public les diverses actualités, informations et opinions à caractère politique ou toute information relative aux affaires publiques.

Article 3 – Toutes les œuvres destinées au public, à titre onéreux ou gratuit, doivent mentionner le nom et l’adresse de l’imprimeur, du producteur, de l’éditeur ou du distributeur.

Sont exceptés des dispositions du paragraphe premier du présent article :

- Les travaux d’impression administratifs,

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- Les travaux d’impression dits de commerce,

- Les travaux d’impression dits de ville,

- Les bulletins de vote et les titres de valeur financière.

Les travaux d’impression appartenant à la catégorie « œuvres périodiques », publiées régulièrement ou non, sont régies par les dispositions du chapitre 3 du présent décret-loi.

Chapitre 2 : Des œuvres intellectuelles, littéraires et artistiques

Article 4 – Toutes les œuvres mentionnées au paragraphe 1er de l’article 3 du présent décret-loi, sont enregistrées dans des registres spéciaux, et ce par l’imprimeur, le producteur, l’éditeur ou le distributeur selon les cas. Chaque enregistrement doit indiquer la date et lui est attribué un numéro de série continue.

Article 5 – Tout imprimeur, producteur, éditeur ou distributeur des œuvres imprimées non périodiques, mentionnées au paragraphe 1er de l’article 3 du présent décret-loi, produites ou reproduites en Tunisie, doit déposer six exemplaires auprès des services du premier ministère chargés de l’information, et ce avant leur mise à la disposition du public.

En cas de participation de plusieurs intervenants dans la production, le dépôt doit être effectué par le dernier intervenant.

Le dépôt des œuvres non périodiques produites à l’étranger et introduites en Tunisie en vue de la vente, est effectué par le distributeur en un exemplaire, auprès des services du premier ministère chargés de l’information, et ce avant leur mise à la disposition du public.

Lesdits services du premier ministère doivent communiquer, dans un délai maximum d’un mois de la date de dépôt, deux des six exemplaires des œuvres imprimées non périodiques produites ou reproduites en Tunisie, au centre national de documentation afin d’être documentés et deux exemplaires à la bibliothèque nationale pour la sauvegarde de la mémoire nationale.

Article 6 – Quiconque enfreint les procédures d’enregistrement et de dépôt légal mentionnés ci-dessus à l’article 5 du présent décret-loi, est puni d’une amende allant de 500 à 1000 dinars.

Chapitre 3 : Des journalistes et des revues périodiques

Section I : Du journaliste professionnel et des droits des journalistes

Article 7 – Est considéré journaliste professionnel conformément aux dispositions du présent décret-loi, toute personne détenant au moins une licence ou un diplôme scientifique équivalent, dont l’activité consiste en la collecte et la publication des informations, des opinions, des idées et leur transmission principalement au public de façon régulière, au sein d’un ou de plusieurs établissements d’information audiovisuelle ou d’information électronique et à condition d’en tirer ses principales ressources.

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Est aussi considéré journaliste professionnel, le correspondant en Tunisie ou à l’étranger, à condition qu’il remplisse les conditions mentionnées au précédent paragraphe.

Sont assimilés aux journalistes professionnels mentionnés au paragraphe 1er ci-dessus : leurs assistants directs, comme les rédacteurs, les traducteurs, les documentalistes, les dessinateurs, les photographes, les cameramans, à l’exception des agents publicitaires et de tous ceux qui ne présentent qu’une aide occasionnelle, quelle que soit sa forme.

Article 8 – La carte nationale est attribuée au journaliste professionnel par une commission indépendante composée de :

- Conseiller du Tribunal administratif désigné sur proposition du premier président du Tribunal administratif afin qu’il assume les fonctions de président de la commission,

- 3 membres proposés par l’organisation des journalistes la plus représentative,

- 1 membre représentant les directeurs des établissements d’information publics,

- 1 membre proposé par l’organisation des directeurs des journaux tunisiens la plus représentative,

- 1 membre proposé par l’organisation des directeurs des établissements d’information audiovisuelle privés la plus représentative,

Le président et les membres de la commission sont désignés par décret pour 4 années non renouvelables. La moitié des membres de la commission sont remplacés tous les deux ans et de façon alternée.

En cas de vacance, pendant les six derniers mois du mandat d’un membre, elle sera comblée dans les 15 jours qui suivent la survenue de la vacance, et ce en tenant compte des dispositions du 1er paragraphe du présent article.

Les membres de l’instance désignés pour combler la vacance, assument leurs fonctions dans la limite de la durée restante du mandat des membres qu’ils ont remplacés. Le mandat des membres remplaçants peut être renouvelé si la durée d’exercice de leurs fonctions n’a pas dépassé pas deux ans.

La commission ne peut délibérer qu’en cas de présence des deux tiers (²∕₃) de ses membres. En cas d’égalité des voix, celle de son président prévaut.

Les modalités de présentation d’une demande de carte de journaliste professionnel, les conditions de son octroi, la durée de sa validité et les modalités de son retrait sont fixées par décret sur proposition de la commission d’octroi de la carte nationale de journaliste professionnel.

Les décisions de la commission, peuvent faire l’objet de recours devant la Cour d’appel de Tunis, et ce dans un délai de 30 jours à partir de la date de notification. La Cour doit statuer dans le recours dans les deux mois qui suivent la présentation du recours. Les arrêts de la Cour d’appel de Tunis sont susceptibles d’un pourvoi en cassation devant le Tribunal administratif conformément à la législation en vigueur.

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Article 9 – Il est interdit d’imposer des limitations qui entravent la liberté d’échanger les informations, qui entravent l’égalité des chances des différents établissements d’information quant à l’accès aux informations ou qui entravent le droit du citoyen à une information libre, pluraliste et transparente.

Article 10 – Le journaliste et tout citoyen, ont le droit d’accès aux informations, données, statistiques et de les obtenir de leurs sources diverses, conformément aux conditions, aux modalités et aux procédures mentionnées au décret-loi n° 2011-41 du 26 mai 2011 relatif à l’accès aux documents administratifs des organismes publics, tel que modifié par le décret-loi n° 2011-54 du 11 juin 2011.

Le journaliste peut demander aux parties citées, les données, les informations et les statistiques, qui sont en leur possession, à moins que ces matières soient confidentielles en vertu de la loi.

Article 11 – Les sources du journaliste lors de l’accomplissement de ses fonctions et les sources de toutes les personnes qui participent dans la préparation de l’information sont protégées. La confidentialité de ces sources ne peut être mise en cause, directement ou indirectement, qu’en cas de motif urgent lié à la sécurité de l’Etat ou à la défense nationale, et ce sous le contrôle juridictionnel.

Est considérée violation de la confidentialité des sources, toute investigation, enquête, recherche, [interception] des correspondances ou écoutes des communications, qui peuvent être opérées par les autorités publiques à l’encontre d’un journaliste pour connaître ses sources ou à l’encontre des personnes qui sont en rapport privé avec lui.

Il est interdit de soumettre le journaliste à une quelconque pression de la part d’une quelconque autorité. Il est interdit de demander à n’importe quel journaliste ou à n’importe quelle personne qui participe à l’élaboration de l’information de révéler ses sources d’information, sauf en cas d’autorisation du juge judiciaire compétent et à condition que ces informations se rapportent à des crimes représentant un grave danger pour l’intégrité corporelle des tiers, que l’obtention desdites informations est indispensable afin d’éviter ces crimes ou qu’elles soient de la catégorie des informations qu’on ne peut obtenir par un autre moyen.

Article 12 –L’opinion exprimée par le journaliste ou les informations qu’il publie, ne peuvent justifier l’atteinte à sa dignité ou la violation de son intégrité corporelle ou morale.

Article 13 – Un journaliste ne peut être poursuivi pour avoir publié une opinion, des idées ou des informations conformément aux us et à la déontologie de la profession et ne peut être poursuivi pour son travail à moins que sa violation des dispositions du présent décret-loi soit prouvée.

Article 14 – Quiconque enfreint les articles 11, 12 et 13 du présent décret-loi et quiconque humilie un journaliste ou lui porte atteinte verbalement, par des gestes, par des agissements ou par des menaces entravant l’exercice de son travail, est passible de la peine encourue pour outrage à un fonctionnaire public assimilé, mentionnée à l’article 123* du Code pénal. (Selon le Code pénal publié en 2011, l’article en question est le n° 125)

Section II : Des périodiques nationaux

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Article 15 – La publication de tout périodique est libre et n’est pas soumise à une autorisation préalable, sous réserve de respecter les procédures de déclaration, indiquées à l’article 18 du présent décret-loi.

Article 16 – Tout périodique doit avoir un directeur responsable tunisien, majeur, disposant de ses droits civils et politiques et ayant un domicile connu en Tunisie.

Au cas où le périodique est publié par une personne morale, son directeur doit être choisi, selon le cas, parmi les membres de l’organe d’administration.

Au cas où le périodique est publié par une personne physique, cette dernière doit être le directeur du périodique.

Au cas où le directeur du périodique bénéficie d’une immunité quelconque, il faudra lui en choisir un autre directeur.

Article 17 – Dans tout établissement publiant un périodique, les fonctions de directeur et de rédacteur doivent être séparées. Chaque périodique doit avoir un directeur de rédaction qui, dans le cas où il n’a pas la qualité de journaliste professionnel, doit exercer ses fonctions avec l’appui d’un comité de rédaction. Dans ce cas, le directeur de rédaction est désigné par l’établissement qui publie le périodique.

Le directeur de rédaction doit être tunisien, être âgé de 30 ans au moins et disposer de ses droits civils et politiques.

Article 18 – Le directeur du périodique présente au Président du Tribunal de première instance, territorialement compétent, avant la première publication, une déclaration écrite sur papier portant un timbre fiscal, et ce contre récépissé. En cas de refus de délivrer ledit récépissé, la notification par lettre recommandée avec accusé de réception à la partie citée, vaut récépissé de déclaration.

La déclaration doit contenir:

- Le prénom, le nom, la date de naissance, la nationalité et le domicile du directeur du périodique,

- Le titre du périodique, son domaine de spécialisation, le siège de son administration et la périodicité de sa publication,

- L’imprimerie où il doit être imprimé,

- La langue ou les langues de rédaction adoptées,

- Un extrait du registre du commerce,

- Le prénom, le nom, la profession et le domicile de chacun des membres administrateurs du périodique.

Toute modification des indications mentionnées ci-dessus, doit être notifiée au Président du Tribunal de première instance, dans un délai de 15 jours, conformément aux mêmes procédures mentionnées au paragraphe 1er du présent article.

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Article 19 – Le dépôt légal est effectué en six exemplaires auprès des services du premier ministère chargés de l’information. Ces derniers doivent communiquer, dans un délai maximum d’un mois de la date de dépôt, deux des exemplaires déposés, au centre national de documentation afin d’être documentés et deux exemplaires à la bibliothèque nationale pour la sauvegarde de la mémoire nationale. En cas la procédure de dépôt est enfreinte, le directeur du périodique est puni d’une amende allant de 2000 et 5000 dinars.

Article 20 – Tout directeur d’un périodique d’information générale, doit être en mesure de justifier, à tout moment, qu’il emploie à plein temps des journalistes, dont le nombre ne peut être inférieur à la moitié du comité de rédaction. Ces journalistes doivent être détenteurs de la carte nationale de journaliste professionnel ou titulaires d’un diplôme de fin d’études en journalisme et sciences de l’information ou équivalent. Tout journal quotidien d’information générale, doit employer, à plein temps, un comité de rédaction composée de 20 journalistes professionnels au moins. Tout journal hebdomadaire d’information générale ou tout journal électronique, doit employer, à plein temps, un comité de rédaction composée de 6 journalistes professionnels au moins. En cas d’infraction desdites dispositions, le directeur du journal est puni d’une amende allant de 1000 à 2000 dinars. Cette amende est doublée, si la violation des dispositions du présent article persiste.

Article 21 – En cas de violation des dispositions des articles 16, 17, 18 et 19 du présent décret-loi, le directeur du journal ou du périodique sont punis d’une amende allant de 2000 à 5000 dinars. Le périodique ne pourra continuer à être publié qu’en cas de respect des dispositions des articles cités.

Si le périodique non déclaré continue à être publié, son directeur est puni d’une amende de 100 dinars pour chaque numéro publié en violation des dispositions ci-dessus citées.

Ladite amende est exécutée après l’écoulement d’un délai de 10 jours à partir de la date du prononcé du jugement contradictoire ou de 10 jours à partir de la notification du jugement par défaut ou réputé contradictoire.

Article 22 – Les procédures d’enregistrement et de dépôt légal indiqués aux articles 4, 5 et 19 du présent code sont fixées par décret.

Section III : Dispositions relatives à la transparence

Article 23 – Tout établissement publiant un périodique d’information générale doit publier dans ses colonnes :

a- Dans chaque numéro  :

1) Les prénoms, noms des personnes physiques propriétaires au cas où l’établissement n’a pas la personnalité morale,

2) La forme de l’établissement, sa dénomination sociale, les noms de ses trois principaux associés et sa durée, et ce au cas où elle a la personnalité morale,

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3) Le nom du directeur responsable et du directeur de rédaction,

4) Le tirage à chaque publication.

b- Pendant le 9 ème mois de l’exercice financier en cours et dans ses deux versions papier et électronique :

1) Les noms des personnes qui l’administrent et le nom de son gérant ou de la société qui le publie, au cas où l’établissement fait l’objet d’une gérance libre,

2) La moyenne de son tirage durant l’exercice financier précédent, le bilan annuel et le compte des résultats de l’établissement éditeur, auxquels sont joints, le cas échéant :

- les noms du ou des gérants ;

- ou la composition du conseil d’administration ;

- ou les membres du directoire et les membres du conseil de surveillance et la liste des actionnaires dans le capital social ;

- ou les noms des membres du groupement d’intérêts économiques auquel l’établissement appartient et le nom ou la dénomination sociale des sociétés qui le composent ;

- ou le groupe de sociétés auquel l’établissement appartient et le nom de la société mère, à la quelle il est subordonné de droit ou de fait, avec mention du nombre d’actions revenant à chaque société et tous les titres exploités par l’établissement éditeur.

Quiconque enfreint les présentes dispositions, est puni d’une amende allant de 50 à 100 dinars pour chaque numéro publié en violation des présentes dispositions.

Article 24 – La participation dans le capital social d’un établissement publiant un périodique d’information générale, doit être nominative. La participation doit aussi être nominative dans le capital des sociétés détenant, directement ou indirectement, 20 % au moins du capital social ou des droits de vote dans l’établissement qui publie un périodique d’information générale.

Le conseil d’administration ou de contrôle doit approuver toute cession de participation dans le capital social du périodique d’information générale. Si la cession ou la promesse de cession ont pour conséquence la détention, directe ou indirecte, de 20 % au moins du capital social de l’établissement qui publie un périodique d’information générale, il faut insérer une annonce, relative à la cession ou à la promesse, dans le journal ou les journaux liés à l’établissement.

Article 25 – Toute personne ayant prêté, de quelque manière que ce soit, son nom au propriétaire d’un périodique d’information générale ou au bailleur de fonds afin de cacher l’identité du propriétaire réel, est punie d’une amende allant de 10000 à 40000 dinars. La responsabilité pénale s’étend au président du conseil d’administration, au président du conseil de contrôle, au gérant ou à tous les

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dirigeants, au cas où l’opération de « prête-nom » a été faite par une personne morale.

Article 26 – Tout périodique d’information générale doit fixer ses tarifs de publicité et, le cas échéant, les tarifs de publicité commune avec un ou plusieurs autres périodiques d’information générale. Ledit périodique doit en aviser le public. En cas de violation des présentes dispositions, le propriétaire du périodique est puni d’une amende allant de 2000 à 5000 dinars.

Article 27 – Quiconque octroie ou promet d’octroyer au propriétaire ou au directeur de rédaction d’un périodique d’information générale ou quiconque de ces derniers accepte des fonds ou des avantages d’une quelconque partie, publique ou privée, en vue d’influencer la ligne rédactionnelle du périodique, est puni par une amende égale au double des avantages obtenus, avec un montant minimum de 5000 dinars.

Article 28 – Il est interdit à tout périodique d’information générale et à tous ceux qui sont en relation avec ledit périodique, d’accepter des fonds ou des avantages d’un quelconque gouvernement étranger, à l’exception des aides des parties gouvernementales ou non gouvernementales étrangères, relatives à des formations, à l’organisation de séminaires communs ou des ventes, des abonnements et des annonces publicitaires que le périodique perçoit en contrepartie de services fournis à ses clients. Quiconque enfreint les présentes dispositions, est puni d’une amende égale au double des avantages obtenus, avec un montant minimum de 5000 dinars.

Article 29 – Toute publicité publiée sous forme d’article doit être précédée ou suivie de l’indication « publicité », « annonce » ou « communiqué » et doit être présentée d’une façon qui la distingue clairement des autres informations et matières rédactionnelles. En cas de manquement à ces dispositions, le directeur du périodique est puni d’une amende égale au double des avantages obtenus par le contrevenant, avec un montant minimum de 5000 dinars.

Article 30 – Il est interdit au propriétaire, au directeur, au directeur de rédaction ou aux journalistes et travailleurs d’un périodique, d’accepter une somme d’argent ou tous autres avantages à valeur pécuniaire, en vue de travestir une annonce ou une publicité en information ou en article.

Quiconque enfreint ces dispositions, est puni d’une amende égale à la somme obtenue, avec un montant minimum de 10000 dinars. L’amende est doublée en cas de récidive. Si l’infraction est commise par un journaliste professionnel, le tribunal peut ordonner qu’il soit interdit d’avoir la carte de journaliste professionnel pendant 5 ans.

Article 31 – Il est interdit à tout périodique d’information générale, à l’exception des journaux des partis politiques, de faire de la propagande sous forme d’annonces publicitaires en faveur d’un parti politique ou d’un candidat à des élections générales. En cas de violation de ces dispositions, le directeur du périodique est puni d’une amende pécuniaire égale à la somme obtenue, avec un montant minimum de 10000 dinars. L’amende est doublée en cas de récidive.

Article 32 – Tout article emprunté totalement ou partiellement, dans sa langue d’origine ou traduit, doit être accompagné de l’indication de sa source. Tout manquement à ces dispositions est qualifié de plagiat et sera sanctionné par une

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amende allant de 2000 à 3000 dinars, et ce nonobstant la réparation du préjudice que pourrait réclamer la victime.

Section IV : Dispositions relatives au pluralisme

Article 33 – Toute personne physique ou morale peut être propriétaire, diriger, contrôler ou publier, au maximum, deux périodiques d’information politique générale qui diffèrent du point de vue de la langue de rédaction et qui ont la même périodicité de publication. Le tirage total des périodiques d’information politique et générale, qui sont la propriété ou sont dirigés ou contrôlés par une seule personne, ne peut dépasser 30 % du tirage total de cette catégorie de périodiques publiés en Tunisie.

Article 34 – Il est interdit d’acquérir un périodique d’information politique et générale ou d’en prendre le contrôle en détenant la majorité dans le capital social ou via les droits de vote ou via un contrat de gérance libre, si cette opération a pour conséquence de permettre à des personnes physiques, des personnes morales, un groupement de personnes physiques ou un groupement de personnes morales, de devenir propriétaires ou de contrôler, directement ou indirectement, des périodiques d’information politique et générale dont le tirage total dépasse 30 % du tirage total de cette catégorie de périodiques.

Article 35 – Toute personne désirant céder ou acquérir la propriété ou la majorité lui permettant de contrôler de fait un établissement publiant un périodique d’information politique et générale, doit en faire la déclaration au Conseil de la concurrence.

Le Conseil de la concurrence, peut via ses rapporteurs ou via les agents de l’administration générale de la concurrence, dans le cadre de l’auto-saisine ou à la demande du ministre chargé du commerce ou des tiers qui ont un intérêt, requérir des administrations et des personnes, tous les renseignements nécessaires au contrôle du respect des dispositions du présent décret-loi par les périodiques d’information politique et générale. Les administrations et les personnes concernées par cette procédure, ne peuvent, en l’absence de dispositions légales contraires, se prévaloir de l’obligation de secret professionnel.

Article 36 – Quiconque enfreint les dispositions des articles 33, 34 et 35 du présent décret-loi, est puni d’une amende allant de 50000 et 100000 dinars.

Article 37 – Le Conseil de la concurrence et toute victime des pratiques portant atteinte à la transparence financière ou victime de la concentration économique, mentionnées dans les articles 23 à 38 du présent décret-loi, peuvent demander aux tribunaux compétents d’engager des poursuites relatives auxdites infractions et d’y mettre fin, et ce nonobstant la réparation du préjudice.

Article 38 – Tous les établissements publiant des périodiques d’information politique et générale, avant la publication du présent décret-loi, doivent mettre en conformité leurs statuts avec les dispositions des sections (II), (III) et (IV) du présent chapitre, et ce dans un délai de 6 mois à partir de la date d’entrée en vigueur du présent décret-loi.

Section V : Rectification et droit de réponse

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Article 39 – Toute personne a le droit de demander la rectification d’un article contenant des informations erronées, à condition d’y avoir un intérêt direct et légitime et que la taille du texte de la rectification ne dépasse pas celle de l’article rectifié.

Le périodique publie obligatoirement et gratuitement le rectificatif dans l’un des trois numéros qui suivent la date de notification du rectificatif, et ce en ce qui concerne les journaux quotidiens et dans le numéro qui suivra, en ce qui concerne les autres périodiques.

Article 40 – Toute personne visée, explicitement ou implicitement, de manière à porter préjudice à ses droits personnels, a le droit d’exercer un droit de réponse.

Le périodique doit publier obligatoirement et gratuitement la réponse dans l’un des trois numéros qui suivent la date de notification de la réponse, et ce en ce qui concerne les journaux quotidiens et dans le numéro qui suivra, en ce qui concerne les autres périodiques.

La réponse est insérée dans le même emplacement, avec les mêmes caractères et dans la limite de la taille de l’article objet de la réponse, sans aucune intercalation et sans tenir compte du titre, des salutations, des réquisitions d’usage et de la signature. La réponse ne peut dépasser 200 lignes, même si l’article est plus long. Toute intercalation donne droit à une nouvelle réponse conformément aux mêmes règles.

La réponse ne peut contenir des expressions contraires à la loi, à l’intérêt légitime des tiers ou portant atteinte à l’honneur ou à la réputation de l’auteur de l’article.

Article 41 – Tout manquement aux articles 39 et 40 du présent décret-loi, est puni d’une amende pécuniaire allant de 1000 à 3000 dinars, et ce nonobstant la réparation du préjudice et la possibilité d’ordonner de publier le jugement d’insertion, conformément aux dispositions de l’article 42 du présent décret-loi.

Article 42 – Le tribunal de première instance dans le ressort duquel est situé le siège de l’établissement publiant le périodique, statue dans les actions relatives au refus d’insérer un droit de réponse, et ce conformément aux procédures de la justice en référé. Ledit tribunal statue aussi dans les actions tendant à limiter le droit de réponse contenant des expressions contraires à la loi, à l’intérêt légitime des tiers ou portant atteinte à l’honneur ou à la réputation de l’auteur de l’article.

Le tribunal statuera dans les 10 jours suivant la date de la citation et pourra décider que la partie du jugement ordonnant l’insertion, soit exécutée sur minute et nonobstant opposition ou appel. En cas d’appel, le tribunal compétent, statuera dans les 15 jours qui suivent la date d’enregistrement de l’appel au greffe du tribunal.

Article 43 – Le délai d’insertion mentionné à l’article 42, est réduit à 24 heures pendant la période électorale, et ce en ce qui concerne les journaux quotidiens. Dans ce cas, la réponse doit être notifiée au quotidien, dont l’article fait l’objet de réplique, avant 6 heures de l’horaire d’impression. Le quotidien doit, à partir du début de la période électorale, informer le ministère public de l’horaire de l’impression. A défaut, le quotidien sera passible de la sanction énoncée à l’article 41 du présent décret-loi. Le président du tribunal de première instance compétent, peut ordonner la comparution d’une heure à une autre. Le tribunal peut ordonner l’exécution sur

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minute de la partie du jugement relative à l’insertion, nonobstant opposition ou appel. La partie condamnée, qui refuse d’obtempérer au jugement d’insertion dans un délai de 24 heures de la date du prononcé, est punie d’une amende de 3000 à 5000 dinars.

Article 44 – Le droit de réponse, cité à l’article 39 du présent décret-loi, peut être exercé par les associations habilitées, en vertu des leurs statuts, à défendre les droits de l’homme, et ce au cas où un individu ou un groupe d’individus sont visés dans un périodique de façon portant atteinte à leur dignité ou honneur sur la base de l’origine, du genre ou de la religion. Aucune association ne peut exercer ce droit sans autorisation expresse de la partie concernée, et ce au cas où les allégations visent un individu ou des individus désignés en personne.

Article 45 – Le tribunal compétent, peut rejeter la demande de rectification ou de réponse, si le périodique a spontanément publié un rectificatif qui répare effectivement le préjudice causé aux tiers.

Article 46 – L’action en insertion forcée, est prescrite après 6 mois à partir de la date de publication du numéro du périodique objet de la réponse.

Chapitre 4 : De l’affichage sur la voie publique

Article 47 – Le président de la municipalité dans les zones communales et le gouverneur dans les zones non érigées en communes, désignent les emplacements réservés à l’affichage des textes imprimés émanant de l’autorité publique. Quiconque affiche des imprimés privés dans lesdits emplacements, est puni de l’amende prévue à l’article 315 bis du Code pénal.

Article 48 – L’autorité compétente détermine les emplacements destinés à l’affichage des annonces électorales, conformément aux conditions prévues dans les lois relatives aux différents types d’élections.

Article 49 – Est puni d’une amende de 500 à 1000 dinars, quiconque, de façon intentionnelle, déchire, enlève, cache, défigure une affiche électorale, mise à l’emplacement qui lui est réservé ou la rend illisible par quelque procédé que ce soit et de façon à en modifier le contenu.

Chapitre 5 : Des infractions commises par voie de presse ou par tous autres moyens de publication

Section I : Provocation aux délits

Article 50 – Seront punis, comme complices d’un acte qualifié de délit, selon les définitions prévues par les articles 51 et suivants du présent décret-loi, ceux qui incitent directement un individu ou plusieurs individus à commettre ledit acte, si l’incitation a été suivie d’effet, et ce par voie de discours, de paroles, de menace dans les lieux publics, par voie d’affiches et annonces exposées au public ou par tout moyen d’information audiovisuelle et électronique.

La tentative d’infraction est punissable conformément aux dispositions de l’article 59 du Code pénal.

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Article 51 – Seront punis d’un an à 3 ans d’emprisonnement et d’une amende de 1000 à 5000 dinars, ceux, qui incitent directement, par l’un des moyens énoncés à l’article 50 du présent décret-loi, au meurtre, à l’atteinte à l’intégrité corporelle de l’homme, au viol ou au pillage, et ce dans le cas où ladite incitation n’aura pas été suivie d’effet et indépendamment de l’application de l’article 32 du Code pénal. Si ladite incitation a été suivie d’effet, le maximum de la peine encourue est relevé à 5 ans d’emprisonnement.

Seront punis de la même peine, ceux, qui, par les mêmes moyens, auront fait l’apologie des infractions citées au paragraphe 1er du présent article, l’apologie des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou du crime de collaboration avec l’ennemi.

Article 52 – Est puni d’un an à trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 1000 à 2000 dinars, celui qui, par les moyens mentionnés à l’article 50 du présent décret-loi, aura directement, incité à la haine entre les genres, les religions ou les populations, et ce en appelant à la discrimination et en utilisant des procédés hostiles ou la violence ou la propagation d’opinions fondées sur la ségrégation raciale.

Article 53 – Est puni d’une amende de 1000 à 2000 dinars, celui qui, par les moyens cités à l’article 50 du présent décret-loi, utilise intentionnellement les lieux de culte à des fins de propagande partisane et politique, ainsi que celui qui porte atteinte, intentionnellement, aux cultes religieux autorisés.

Section II : Des délits contre les personnes

Article 54 – Est puni d’une amende de 2000 à 5000 dinars, celui qui, par les moyens cités à l’article 50 du présent décret-loi, propage intentionnellement de fausses informations pouvant perturber l’ordre public.

Article 55 - Il y a diffamation dans toute allégation ou imputation publique d’un fait incorrect qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne bien déterminée, à condition qu’il en résulte un préjudice personnel et direct à la personne visée.

La publication par voie directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne, non expressément nommée, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, appels, menaces, écrits, imprimés, affiches, dessins, annonces ou publications électroniques.

Article 56 – L’auteur de la diffamation, commise par l’un des moyens énoncés dans l’article 50 du présent décret-loi, est puni d’une amende de 1000 à 2000 dinars avec ordre d’insérer des extraits du jugement prononcé, dans un numéro du périodique condamné, qui suit la date la notification du jugement, et ce nonobstant la réparation du préjudice.

Article 57 - Toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait précis, est une injure. L’injure, commise par les moyens énoncés à l’article 50 du présent décret-loi, est punie d’une amende de 500 à 1000 dinars, avec ordre d’insérer des extraits du jugement prononcé, dans un numéro du périodique condamné, qui suit la date la notification du jugement.

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Article 58 – Les dispositions des articles 55, 56 et 57 du présent décret-loi, ne s’appliquent pas à la diffamation ou à l’injure dirigées contre la mémoire des morts, sauf si les auteurs de ces diffamations ou injures avaient l’intention de porter atteinte personnellement à l’honneur ou à la considération des héritiers.

Les héritiers ou les conjoints, peuvent user du droit de réponse, mentionné à l’article 40 du présent décret-loi, que l’auteur de la diffamation ait eu ou non l’intention de porter atteinte à leur honneur ou à leur considération.

Article 59 - La véracité du fait diffamatoire ne peut être établie dans les cas suivants :

a) lorsque l’imputation concerne la vie privée de la personne,b) lorsque l’imputation se réfère à un fait constituant une infraction amnistiée,

prescrite ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par réhabilitation.

La preuve contraire peut être rapportée dans les infractions de diffamation et d’injure mentionnées dans les articles 55, 56 et 57 du présent code.

Si la vérité du fait diffamatoire est établie, il est mis fin aux poursuites. La charge de la preuve incombe à l’accusé au cas où la diffamation ou l’imputation concernent les affaires publiques.

Lorsque le fait imputé est l’objet de poursuites pénales engagées par le ministère public ou sur la base d’une plainte du prévenu, il sera sursis au jugement de l’affaire de diffamation jusqu’à ce que l’issue desdites poursuites pénales soit connue.

Section III : De la publication interdite

Article 60 – Est puni d’un an à 3 ans d’emprisonnement et d’une amende de 3000 à 5000 dinars, celui qui reproduit, par quelque moyen que ce soit, des informations relatives à des crimes de viol ou de harcèlement sexuel, contre des mineurs, en citant intentionnellement le nom de la victime ou en laissant passer une indication permettant de la reconnaître.

Est puni de la même peine, celui qui, de façon intentionnelle, importe, distribue, exporte, produit, publie, expose, vend ou a en sa possession des matières pornographiques impliquant des enfants.

Article 61 – Il est interdit de publier les documents de l’instruction avant qu’ils aient été lus en audience publique, et ce, sous peine d’une amende de 1000 à 2000 dinars.

Est passible de la même peine, celui qui, sans autorisation du tribunal en charge, publie par reproduction par tous moyens et notamment par téléphones mobiles, photographies, enregistrement audio ou par tout autre moyen, tout ou partie des circonstances des jugements des crimes et délits prévus aux articles 201 à 240 du Code pénal.

Article 62 – Est interdite la couverture médiatique de tout procès en diffamation dans les cas prévus aux paragraphes « a » et « b » de l’article 59 du présent décret-loi, ainsi que des procès en reconnaissance de filiation, de divorce et d’avortement.

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Cette interdiction ne s’applique aux jugements qui peuvent, à tout moment, être publiés avec l’autorisation du pouvoir judiciaire.

Dans toutes les affaires civiles, les chambres et les tribunaux pourront interdire la publication des détails du procès. Il est également interdit de publier les délibérations secrètes des chambres et tribunaux.

Il est interdit, durant les plaidoiries et à l’intérieur des salles d’audience, d’utiliser les appareils photographiques, les téléphones mobiles, les appareils d’enregistrement audio ou audiovisuel ou tout autre moyen, et ce sauf autorisation de l’autorité judiciaire compétente. Tout manquement à ces dispositions, est puni d’une amende de 150 à 500 dinars avec confiscation des moyens utilisés à cette fin.

Article 63 – Ne donneront lieu à aucune action en diffamation ou outrage, le compte rendu fidèle, fait de bonne foi, des plaidoiries devant les tribunaux ou des rapports qui leurs sont communiqués.

La victime de la diffamation, qui n’était pas partie au procès pénal, peut dans tous les cas intenter une action civile.

Article 64 – En cas de jugement de condamnation, les tribunaux en charge pourront ordonner la confiscation des écrits, imprimés, affiches, dessins, annonces, films, disques, bandes magnétiques, moyens d’enregistrement numériques ou de publication ou autres incriminés. Les tribunaux peuvent aussi, dans tous les cas, ordonner la confiscation, l’annulation ou la destruction de tous les exemplaires mis en vente, distribués ou mis à la disposition du public. Les tribunaux peuvent aussi ordonner à supprimer ou à détruire seulement certaines parties de chaque exemplaire confisqué.

Toute condamnation pour récidive de chantage, entraîne la suspension du périodique ou des œuvres poursuivis, jusqu’à ce que leurs propriétaire obtempère aux ordres du tribunal en charge, et ce sans préjudice des dispositions du Code pénal, relatives au délit de chantage.

Chapitre 6 : Des poursuites et des sanctions

Article 65 - Seront passibles, comme auteurs principaux, des peines sanctionnant les infractions mentionnées au présent décret-loi :

1°) les directeurs des périodiques ou éditeurs, quelles que soient leurs professions ou leurs qualités,

2°) à leur défaut, les auteurs,

3°) à défaut des auteurs, les imprimeurs ou les fabricants,

4°) à défaut des imprimeurs ou des fabricants, les vendeurs, les distributeurs ou les afficheurs.

Article 66 - Lorsque les directeurs des périodiques ou les éditeurs sont en cause, les auteurs seront poursuivis comme complices.

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Pourront l’être au même titre et dans tous les cas, les personnes auxquelles l’article 32 du Code pénal pourrait s’appliquer. Ce paragraphe ne pourra pas s’appliquer aux imprimeurs en ce qui concerne les actes d’impression.

Toutefois, les imprimeurs pourront être poursuivis comme complices, si l’irresponsabilité pénale du directeur du périodique était prononcée par les tribunaux. En ce cas, les poursuites seront engagées dans les 6 mois qui suivent la date de l’infraction et au plus tard dans les 6 mois qui suivent la date de la constatation judiciaire de l’irresponsabilité du directeur du périodique.

Article 67 - Les propriétaires des œuvres imprimées, sonores, visuelles ou numériques, sont civilement responsables avec les personnes désignées dans les articles 65 et 66 du présent décret-loi, et, notamment, répondront solidairement avec lesdites personnes condamnées du montant des amendes et des dommages-intérêts.

Article 68 - L’action civile, résultant des délits de diffamation prévus par le présent décret-loi, ne pourra être poursuivie séparément de l’action publique, sauf dans les cas de décès, d’amnistie de l’auteur du fait incriminé ou d’un empêchement à engager des poursuites pénales.

Article 69 – Les poursuites relatives aux délits commis par voie de presse ou par tout autre moyen d’information, sont engagées conformément aux dispositions suivantes :

1) dans le cas de diffamation prévue par l’article 55 du présent décret-loi, et dans le cas d’injure prévue par l’article 557 du présent décret-loi, les poursuites n’auront lieu que sur la base de la plainte de la personne diffamée ou injuriée. Toutefois, les poursuites pourront être exercées d’office par le ministère public, lorsque la diffamation ou l’injure, est commise envers un groupe de personnes appartenant notamment à une race, à une ethnie ou à une religion déterminées et a pour but d’inciter à la haine entre les races, les religions ou les habitants, et ce en utilisant des actes hostiles ou la violence ou la propagation d’opinions fondées sur la ségrégation raciale conformément à l’article 52 du présent décret-loi.

2) Dans le cas de diffamation ou d’injure envers un témoin, les poursuites n’auront lieu que sur plainte du témoin qui se prétendra diffamé ou injurié.

3) Dans le cas de diffamation ou d’injure envers les présidents des Etats étrangers, les chefs de gouvernements étrangers, les présidents des missions diplomatiques, les poursuites auront lieu sur plainte du diffamé ou de l’injurié. La demande est envoyée au ministère des affaires étrangères qui la transmet au ministère de la justice afin d’ordonner l’engagement de poursuites.

Article 70 – Toute association, dont il est prouvé qu’elle a été constituée un an avant la commission de l’acte, et à condition qu’elle soit habilitée en vertu de ses statuts à défendre les droits de l’homme et à lutter contre toute forme de discrimination raciale, sexuelle ou religieuse, peut exercer l’action spéciale relative à l’infraction prévue par l’article 51 du présent décret-loi. Si l’infraction a été commise contre des personnes désignées personnellement, ladite action ne pourra être exercée qu’en cas d’accord écrit et exprès des personnes concernées.

ARTICLE 19 – Free Word Centre, 60 Farringdon Rd, London EC1R 3GA – www.article19.org – +44 20 7324 2500

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Novembre 2011

Article 71 – En cas de poursuites en vertu des articles 50 à 58 et des articles 60 à 66 du présent décret-loi, le tribunal en charge du fond, doit statuer en chambre du conseil dans 15 jours, et ce après avoir entendu les parties concernées.

Le délai de comparution sera réduit à 48 heures en cas de diffamation ou d’injure, envers un candidat à une fonction électorale, faits à partir de la date d’ouverture des candidatures. L’audience ne pourra être renvoyée au-delà du jour qui précède celui fixé pour le scrutin. Dans ce cas, les dispositions des articles 72, 73, 74 et 75 du présent décret-loi ne seront pas applicables.

La décision que prendrait le tribunal est susceptible d’exécution provisoire nonobstant appel. La cour d’appel statue dans un délai de 15 jours à compter de la date du dépôt de la demande au greffe de cette juridiction.

En cas de refus d’obtempérer à l’ordre du tribunal d’insérer des extraits du jugement de condamnation, le condamné, sera puni d’une amende de 10 dinars pour chaque numéro du périodique, paru sans obéir audit jugement.

Article 72 - La citation ou la sommation doit préciser la qualification du fait incriminé ; Elle doit indiquer le texte de loi applicable aux poursuites. Si la citation est faite à la requête du plaignant, elle contiendra, [en outre] élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et sera notifiée tant au prévenu qu’au ministère public, le tout à peine de nullité des poursuites.

Le délai entre la convocation et la comparution devant le tribunal sera de vingt jours au moins.

Article 73 - Quand le prévenu voudra être admis à prouver l’inexistence de la diffamation, conformément aux dispositions de l’article 59 du présent décret-loi, il devra, dans le délai de dix jours de la date de notification de la convocation, présenter une déclaration au ministère public par dépôt au greffe ou au plaignant, au domicile par lui élu, selon que la convocation émane de l’un ou de l’autre, contenant :

1°) les faits allégués et qualifiés dans la sommation ou la convocation, dont il entend prouver la véracité ;

2°) la copie des pièces justificatives ;

3°) les noms, professions et domiciles des témoins, par lesquels il entend faire sa preuve.

Le prévenu devra, en outre et dans les mêmes délais, élire domicile près le tribunal, le tout à peine de déchéance du droit de contester la diffamation alléguée.

Article 74 – Dans les cinq jours suivants la date de convocation, et, en tous cas, au moins trois jours avant l’audience, le prévenu est avisé par le plaignant via huissier de justice ou par le ministère public par voie administrative, que les copies des pièces et les noms, professions et domiciles des témoins, par lesquels il entend faire la preuve contraire, sont à sa disposition au greffe.

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Article 75 - En matière d’infractions pour diffamation et d’injure, mentionnées aux articles 55, 56 et 57 du présent décret-loi, le tribunal doit prononcer un jugement dans le délai maximum d’un mois à compter de la première audience.

Article 76 - L’action publique et l’action civile, résultant des délits ou contraventions prévus par le présent décret-loi, se prescrivent après 6 mois révolus à compter du jour de leur commission ou du jour du dernier acte de poursuite, s’il en a été fait.

Article 77 - L’article 53 du Code pénal est applicable dans tous les cas prévus par le présent décret-loi.

Chapitre 7 : Dispositions transitoires

Article 77 – Le renouvellement de la moitié des membres de la commission d’octroi de la carte nationale de journaliste professionnel, désignés de façon paritaire pour représenter les journalistes et les directeurs des établissements d’information, conformément à l’article 8 du présent décret-loi, se fait durant le premier mandat par tirage au sort.

Article 78 – Les dispositions du paragraphe 1er de l’article 7 du présent décret-loi, ne s’appliquent pas, en ce qui concerne la condition du diplôme scientifique, aux journalistes professionnels qui ont déjà travaillé en cette qualité pendant toute une année au moins avant l’entrée en vigueur du présent décret-loi, dans un établissement d’information écrite, sonore, visuelle ou électronique.

Article 79 – Sont abrogés tous les textes antérieurs et contraires, notamment le Code de la presse promulgué par la loi n° 75-32 du 28 avril 1975 et tous les textes qui l’ont complété et modifié, les articles 397, 404 et 405 du Code du travail.

Article 80 - Le présent décret-loi sera publié au Journal Officiel de la République Tunisienne et entrera en vigueur à compter de la date de sa publication.

Tunis, le 2 novembre 2011.

Le Président de la République par intérim

Fouad Mebazaâ

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