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Les théories de l'Etat

Date post: 21-Jan-2023
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L2 La nouvelle gouvernance financière publique Bibliographie M. Bouvier, M.C. Esclassan, J.P Lassale ; Manuel de finances publiques ; LGDJ ; 9 ème édition ; 2008. M. Bouvier ; Les finances publiques ; LGDJ ; 13 ème édition ; 2008. M. Bouvier ; Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l’impôt ; LGDJ ; 9 ème édition ; 2008. Les politiques se sont intéressés plus fortement aux finances publiques, ce qui explique que l’on parle de « gouvernance financière publique ». Il s'agit de l’étude des finances de l’Etat dont nous sommes les financiers à travers nos impôts et diverses taxes. Le système qui est le notre depuis la crise des années 1970 (chômage, moins d’argent, moins d’impôts, moins d’achats, etc.) a entrainé une hausse des dépenses publiques, qui ont augmenté tandis que les recettes décroissaient. Recettes et dépenses se sont croisées (effet de ciseau), et un déficit important a pu dès lors se développer. La solution a semblé être l’emprunt, qui lui aussi a augmenté de façon exponentielle. Ainsi, la dette publique de la France est aujourd’hui évaluée à hauteur de 1.200.000.000 euros, tandis que le PIB de la France est de seulement 1.900.000.000 euros. Introduction Le terme de finances publiques désigne les finances de l’Etat, les finances des collectivités locales (communes, départements, régions, etc.), ainsi que les finances des organismes de sécurité sociale. E.G : Lorsque l’on parle de dette publique, on ne parle pas seulement de la dette de l’Etat. La dette publique est la dette cumulée de l’Etat, des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale (plus de 1.200.000.000 d’euros donc). Les finances publiques sont également les recettes et les dépenses de ces trois groupements. On peut aussi employer le vocable de « denier public ». 1
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La nouvelle gouvernance financière publique

Bibliographie

M. Bouvier, M.C. Esclassan, J.P Lassale ; Manuel de finances publiques ;LGDJ ; 9ème édition ; 2008.M. Bouvier ; Les finances publiques ; LGDJ ; 13ème édition ; 2008. M. Bouvier ; Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l’impôt ; LGDJ ;9ème édition ; 2008.

Les politiques se sont intéressés plus fortement aux financespubliques, ce qui explique que l’on parle de « gouvernancefinancière publique ».Il s'agit de l’étude des finances de l’Etat dont nous sommes lesfinanciers à travers nos impôts et diverses taxes. Le système quiest le notre depuis la crise des années 1970 (chômage, moinsd’argent, moins d’impôts, moins d’achats, etc.) a entrainé unehausse des dépenses publiques, qui ont augmenté tandis que lesrecettes décroissaient. Recettes et dépenses se sont croisées (effetde ciseau), et un déficit important a pu dès lors se développer. Lasolution a semblé être l’emprunt, qui lui aussi a augmenté de façonexponentielle. Ainsi, la dette publique de la France est aujourd’huiévaluée à hauteur de 1.200.000.000 euros, tandis que le PIB de laFrance est de seulement 1.900.000.000 euros.

Introduction

Le terme de finances publiques désigne les finances de l’Etat, lesfinances des collectivités locales (communes, départements, régions,etc.), ainsi que les finances des organismes de sécurité sociale. E.G : Lorsque l’on parle de dette publique, on ne parle passeulement de la dette de l’Etat. La dette publique est la dettecumulée de l’Etat, des collectivités locales et des organismes desécurité sociale (plus de 1.200.000.000 d’euros donc).

Les finances publiques sont également les recettes et les dépensesde ces trois groupements. On peut aussi employer le vocable de« denier public ».

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Les recettes publiques sont essentiellement les prélèvementsobligatoires (impôts : T.V.A ; cotisations sociales – prélèvementseffectués sur les salaires pour le compte des organismes de sécuritésociale).

L’utilisation de l’argent public est représentée par ce que l’onappelle les dépenses publiques. Il s'agit par exemple des dépensesde l’Etat (universités, etc.), des collectivités locales(financement d’une piscine municipale, etc.), et les dépenses desorganismes de sécurité sociale (remboursements des médicamentsprescrits par le médecin, etc.).

Les finances publiques sont des finances à part, c’est pourquoielles nécessitent un contrôle important afin de veiller à leur bonneutilisation. L’argent public ne doit pas être gaspillé, il convientaussi d’éviter les malversations. Il existe pour cela d’une part desadministrations, mais également des juridictions chargées decontrôler la régularité des opérations effectuées par le secteurpublic. E.G. : L’Inspection générale des finances, la Cour des comptes, etc.

La décision politique appartient aux représentants des citoyens. Lebudget de l’Etat doit ainsi être adopté par le Parlement ; de même,le budget d’une collectivité territoriale doit être adopté par leconseil de cette communauté (conseil général pour le département,etc.)

La réforme des finances publiques s’est amorcée depuis la secondemoitié des années 1970. Elle a été déclenchée par la criseéconomique qui a provoquée une crise des finances publiques. Lesdépenses publiques ont augmenté mais les recettes publiques n’ontpas suivi le mouvement. C’est un phénomène international. La réformedes finances publiques a commencé par les pays développés, elle sepoursuit aujourd’hui du côté des pays en développement ou émergents.Cette réforme consiste essentiellement à adapter les méthodes degestion utilisées par les entreprises privées à la gestion dusecteur public. Notons tout de même que cette réforme est mondiale,protéiforme.

L’enseignement des finances publiques, ou la manière de lesappréhender, s’est faite en plusieurs étapes.

- La première étape est la législation financière. Au XIXème et audébut du XXème siècle, les finances publiques étaient uniquementconsidérées sous leur aspect juridique. C’est une conception qui vaprédominer jusqu’aux années 1950.

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- La deuxième étape est l’économie financière publique. Elle estapparue à partir des années 1950 lorsque l’Etat a été obligéd’intervenir de façon massive dans la vie économique.- La troisième étape est la gestion financière publique. Le souci demieux gérer le secteur public est apparu au début des années 1980.La crise financière de l’Etat a conduit à rechercher de nouvellesmanières de gérer le secteur public. On a alors commencé à adapterles méthodes de gestion de l’entreprise à la gestion publique.

Derrière la réforme des finances publiques, c’est une réforme del’Etat dans son ensemble à laquelle nous sommes en train d’assister.Depuis 1996, des révisions importantes de la Constitution sontintervenues en matière de finances publiques.

Première partie   : Les finances publiques et le pouvoir politique

Les finances publiques sont à l’origine du pouvoir politique. Ons’appuie aujourd’hui sur la réforme des finances publiques pourréformer l’Etat. Cela n’a rien d’étonnant car l’Etat tire sesorigines de la création d’un dispositif financier public.

Première sous partie   : Les finances publiques et les transformations du pouvoir politique

Sans le pouvoir de lever des impôts, mais aussi sans le pouvoird’utiliser librement cette ressource, il ne peut pas exister depouvoir politique. Sans le pouvoir financier, aucun pouvoirpolitique ne peut exister. Aujourd’hui le pouvoir financier tire salégitimité de l’existence d’un droit qui en organise lefonctionnement : le droit public financier.

Il comprend trois branches : le droit fiscal (droit des impôts), ledroit budgétaire (c'est-à-dire le droit qui pose les règlesconcernant par exemple la présentation des budgets publics, ouencore la prise de décision) et le droit de la comptabilitépublique. C’est très largement à travers la construction du droit publicfinancier que le parlementarisme démocratique s’est construit.

Chapitre 1   : Finances publiques et naissance du pouvoir politique

Le pouvoir politique a pris naissance en s’enracinant dans lepouvoir financier et en premier lieu à partir du pouvoir fiscal.

Section 1 : La naissance du pouvoir politique et de l’impôt

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L’impôt est à la source du système financier public et de laconstruction de l’Etat. Par la suite, c’est de l’impôt que dépend lapuissance du pouvoir politique.

I – Une forme désordonnée de prélèvement et de pouvoir : le pillage

Le pillage est une forme lointaine, primitive, de l’impôt. Ce qui lecaractérise en effet est qu’il s'agit d’un prélèvement obligatoireirrégulier dans le temps. Or, ce qui caractérise l’impôt est sarégularité. Le pillage est soumis au hasard, aux besoins d’un groupede pillards. Il consiste le plus souvent à prélever la totalité desbiens qui sont possédés ou qui sont produits par les victimes.

Le pillage est un prélèvement obligatoire (une des caractéristiquesde l’impôt) qui ne laisse pas le temps aux victimes de reconstituerleur patrimoine par la suite. Cela est stupide car il est alorsimpossible aux victimes de créer de nouvelles richesses. Il n’estplus possible dans ce cas de reconstituer des richesses économiques,et les pillards, en s’accaparant la totalité des biens de leursvictimes, ne leur laissent plus aucune possibilité de produire denouveaux biens ni même de survivre dans certains cas. Autrement dit,ils les condamnent à disparaître et perdent en même temps leursource de revenus. Les pillards n’ont aucune conception de lamaitrise de leurs ressources sur la durée. Ils vivent dansl’instant, ne se projettent pas dans l’avenir. Autrement dit, ilsn’ont aucune stratégie.

II – Le tribut

Le tribut est l’ancêtre de l’impôt. C’est aussi avec lui que lespillards les plus avisés ont commencé à bâtir un pouvoir politique.Les pillards ont compris qu’il fallait :

- Laisser à la disposition des peuples conquis une partie de leurproduction, de leur laisser leurs moyens de production (outils quileur servent à cultiver la terre, etc.) Par conséquent, ils ontcompris qu’il fallait que leurs victimes soient en mesure decontinuer à cultiver leurs terres, à produire de nouvelles richessesdont une partie pourra être ultérieurement prélevée.

- Effectuer des prélèvements réguliers, à date fixe après lesrécoltes. Ils ont donc compris qu’il était plus judicieux de laisserles individus libres de travailler, de leur laisser de quoientretenir leur force de travail (c'est-à-dire se nourrir, se vêtiret se loger). Dès lors, on assiste déjà à la naissance d’uneconception gestionnaire et stratégique.

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Cette conception traduit une capacité de se projeter dans l’avenir,mais également la capacité d’organiser un territoire, un espaceterritorial.

Le tribut possède déjà les principales caractéristiques de l’impôt.Il est ainsi obligatoire et peut être effectué par la force. C’estun prélèvement qui intervient à date fixe. Il laisse aux individusde quoi survivre et de quoi produire de nouveaux surplus quipourront être prélevés. Enfin, il s'agit d’un prélèvement effectuésur la différence entre ce qui est produit et ce qui est consommépour continuer à produire, car prélever plus conduirait àl’extinction de la source du prélèvement.

Section 2 : La naissance de l’Etat et de l’impôt

Les Etats ont pu se constituer à partir du moment où l’on a inventédes formes de prélèvement obligatoire structurées, c'est-à-dire àpartir du moment où l’on a mis en place une organisation du pouvoirfiscal.

I – L’organisation du pouvoir fiscal et l’administration de l’impôt

L’Etat est apparu lorsqu’a été mis en place un système definancement stable et permettant par ailleurs de rémunérer une arméeet une administration, tout d’abord fiscale. Autrement dit,l’organisation du pouvoir financier constitue un préalable àl’organisation d’un pouvoir politique.

Le passage du tribut à l’impôt se caractérise par le fait que l’oncrée une organisation de plus en plus performante pour effectuer lesprélèvements fiscaux. En effet, le prélèvement de l’impôtnécessitait non seulement la force, c'est-à-dire une armée, maiségalement de connaître le mieux possible ce que l’on pouvaitprélever. Par conséquent il est indispensable de connaîtreprécisément ce que l’on appelle la matière imposable, c'est-à-direce que l’on va taxer, ce que l’on appelle aussi la based’imposition.

Il a ensuite fallu connaître le montant maximum pouvant être prélevésans risquer de produire des effets négatifs sur le renouvellementdes richesses et sans risquer de provoquer des révoltes fiscales. Ila donc fallu déterminer ce que l’on appelle :- Des procédures d’assiette de l’impôt (asseoir l’impôt), c'est-à-dire des procédures permettant de calculer les bases d’imposition ducontribuable.

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- Des procédures de liquidation de l’impôt, c'est-à-dire desprocédures permettant de calculer ce qui est dû par le contribuable.Cela correspond le plus souvent à l’application d’un taux(d’imposition) à une base. - Des procédures de recouvrement de l’impôt, c'est-à-dire la manièrela plus efficace et la plus commode pour le contribuable pour luifaire payer sa dette fiscale.

La connaissance de la matière imposable est indispensable : il fautsavoir non seulement ce que l’on va imposer, mais aussi qui l’on vaimposer.

E.G : Sous l’Antiquité, les Egyptiens ont institué des dispositifssophistiqués qui leur permettaient de connaître avec précision nonseulement la matière imposable, mais également la capacitécontributive des contribuables (jusqu’où ils peuvent payer sans leurprendre le nécessaire à la survie et à la production). Ils ontinstitué pour cela d’une part des procédures de recensement de lapopulation, des familles, et d’autre part ce que l’on appelle uncadastre c'est-à-dire un plan des terrains qui indique leursuperficie, leur type de culture, leur rendement, et également leurpropriétaires ou celui qui en cultive la terre. Un corps de fonctionnaires spécialisés est alors créé pour réaliserces tâches. Ces fonctionnaires vont devoir déterminer la matièreimposable, liquider l’impôt et recouvrer l’impôt (le percevoir).Sur cette base une structure étatique va pouvoir se mettre en place,et l’on va pouvoir financer l’armée, l’administration fiscale etégalement une administration générale.

II – La création des premiers EtatsA – La naissance des Etats autoritaires

Au départ, l’Etat se présente comme une forme politique supérieureaux différents groupes qui composent la société. Cet Etat se donnepour objectif d’unifier sous son autorité les différentescommunautés qu’il a soumises. Il se présente alors comme lacommunauté supérieure qui est légitime pour prélever un tribut. Laforce ne peut demeurer longtemps la solution pour forcer l’impôt, ilfaut que cela devienne légitime, que la population consente àl’impôt.L’Etat va se présenter comme un pouvoir qui réalise l’intérêtgénéral.

Cet Etat va dire aux populations : - Qu’il est leur protecteur et leur assure sa sécurité grâce àl’armée,

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- Qu’il est le moteur du développement économique ; par exemple enorganisant l’irrigation des terres, - Qu’il organise des fêtes religieuses et organise donc les rapportsdes individus avec leurs dieux. Finalement, le pouvoir politique fournit des services auxcommunautés et aux individus qu’il domine. Cela marque les premierspas vers le consentement à l’impôt.

B – La création des Etats parlementaires

Sous l’Antiquité, des systèmes fiscaux organisés ont été institués.C'est-à-dire non seulement des impôts, mais également uneadministration fiscale. Par la suite, avec le Moyen-âge, cessystèmes fiscaux vont soit disparaître, soit éclater. Il ne resteraque quelques impôts qui continueront à être prélevés par desseigneurs féodaux.Par ailleurs, il n’existe pas au Moyen-âge de différence entre lepatrimoine public et le patrimoine privé (cf. Cours d’histoire dudroit). On ne fait pas de différence entre les finances publiques etles finances privées. Il y a confusion du patrimoine du souverainavec celui du royaume.

Les guerres vont aller en se multipliant et les moyens utilisés pourfaire la guerre vont coûter de plus en plus chers. Ainsi, un chevaléquipé d’une armure et d’un caparaçon coûtait aussi cher,comparativement, qu’un tank perfectionné aujourd’hui ! Lessouverains ont été obligés de demander une aide matérielle à leursvassaux, ce sont les aides féodales. Ces vassaux n’ont pas acceptéd’emblée de contribuer aux dépenses de guerre de leurs souverains etc’est ainsi que chaque fois que le souverain demande une aide, ilest obligé de négocier cette aide avec ses vassaux. Cettenégociation va progressivement prendre une forme habituelle et vamême s’institutionnaliser sous la forme d’assemblées.

C’est dans ce cadre là que vont se décider les aides féodales quel’on qualifiera d’aides extraordinaires. Progressivement, cesassemblées abandonnent leur caractère ponctuel pour devenirrégulière.

Dans un premier temps, ces assemblées n’étaient qu’épisodiques. Parla suite, la démultiplication des conflits aidant, les assembléesvont elles aussi être amenées à se démultiplier et vont devenirrégulières dans le temps et devenir de véritables institutionsparlementaires. On les appelle les cortes en Espagne, le Parlement enAngleterre, les Etats Généraux en France. Par ce biais va naître lapremière forme organisée du consentement de l’impôt.

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Il faut souligner que dans ce cadre, le souverain n’est plus le seulà détenir le pouvoir fiscal. Il partage ce pouvoir avec les membresde l’assemblée. L’impôt devient alors un enjeu majeur ; et c’est surla base de son consentement que va se construire le régimeparlementaire.

Chapitre 2   : Droit public financier et naissance de la démocratie politique

Section 1 : La Révolution de 1789 et la naissance du droit public financier

I – La révolution fiscale et la naissance du droit fiscal

La particularité de la Révolution française a été, d’une part,d’inventer des impôts, et, du reste, d’inventer des principesfiscaux, des règles fondamentales en matière fiscale. Parmi cesprincipes, l’un des plus importants est celui du consentement del’impôt. C’est sur la base des principes fiscaux inventés à laRévolution que va pouvoir se construire un droit fiscal comportantprogressivement des garanties pour le contribuable. En d’autrestermes, c’est une sortie de l’arbitraire fiscal qui se met en placeà travers cette sécurité juridique.

D’autre part, la lutte qui se joue autour du pouvoir budgétaire etfiscal entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, c'est-à-dire entre les constituants et le roi, se situe au cœur des enjeuxpolitiques. L’issue de ce combat va être déterminante pour lacréation d’un régime parlementaire démocratique. A – Les principes fiscaux fondateurs d’un pouvoir fiscal légitime

A la légitimité sociologique de l’impôt qui demeure, va venirs’ajouter une légitimité juridique de l’impôt. En effet, lalégitimité fiscale va être formalisée juridiquement par troisprincipes qui vont figurer dans la Déclaration des droits de l'Hommeet du citoyen du 26 août 1789 aux articles 13 et 14. Il s'agit du principe du consentement de l’impôt. Soulignons ici queles révolutionnaires, avant de s’intéresser aux dépenses publiques,se sont exclusivement intéressés à la fiscalité, aux impôts. Leurattention a été complètement focalisée sur le droit de leverl’impôt, sur la légitimité fiscale. Ils ont négligé le pouvoird’utiliser les ressources fiscales, c'est-à-dire le pouvoir dedépenser. Ils se sont attribués le pouvoir de décider de l’impôt etont abandonné au roi celui d’utiliser le produit de l’impôt.

On peut ajouter qu’après s’être déclaré Assemblée Nationale, leTiers-Etat a décidé que tous les impôts existants étaient illégauxet qu’aucun impôt ne pourrait être levé sans un consentement

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préalable de l’assemblée (décret du 13 juin 1789). Cette décision,qui a pour objectif de limiter le pouvoir royal en limitant sonpouvoir financier, a fait l’objet d’une inscription dans laDéclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 àl’article 14 :« Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes la nécessité de la contributionpublique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité(i.e. : taux d’imposition), l’assiette, le recouvrement et la durée ».

Ce principe est qualifié de principe de consentement de l’impôt ouencore de principe de légalité fiscale (cf. ConseilConstitutionnel). Ce principe est toujours en vigueur. C’estaujourd’hui un principe à portée constitutionnelle.

A partir du dégagement de ce principe par la Déclaration des droitsde l'Homme et du citoyen du 26 août 1789, la légitimité de l’impôtprend une forme juridique solide. L’impôt a même une légitimitépolitique puisqu’il est décidé par les citoyens ou par leursreprésentants. Toutefois, ce pouvoir financier attribué àl’Assemblée n’est pas complet car il est limité au droit de voterl’impôt et n’envisage pas celui de décider des dépenses. L’Assembléene détient finalement qu’une partie du pouvoir financier. Cependant,une logique politique nouvelle s’est amorcée. Il s'agit de lacréation du régime parlementaire démocratique.

Un second principe fiscal est inscrit dans la Déclaration des droitsde l'Homme et du citoyen du 26 août 1789. Il s'agit du principed’égalité devant l’impôt (article 13). Ce principe condamne toutprivilège en matière fiscale. Article 13 : « Pour l’entretien de la forcepublique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune estindispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leursfacultés ».

Un troisième principe inscrit dans la Déclaration des droits del'Homme et du citoyen du 26 août 1789 est celui de la nécessité del’impôt. Cela signifie que l’impôt est indispensable pour financerles dépenses publiques. Il figure aux articles 13 (« Une contributioncommune est indispensable ») et 14 (« La nécessité de la contribution publique »).

Ces trois principes confèrent une légitimité juridique à l’impôt. Leprincipe de légalité (article 14), du consentement de l’impôt,confère une légitimité politique à l’impôt. Le principe d’égalitédevant l’impôt (article 13) lui confère une légitimité sociale, etconcerne la justice fiscale. Enfin, le principe de la nécessité del’impôt (articles 13 et 14) lui confère une légitimité financière.

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Les révolutionnaires ont également inventé une fiscalité fondée surdes impôts directs en réaction à celle de l’Ancien Régime.

B – La création d’un système fiscal nouveau1 – L’influence des doctrines professées par les physiocrates

Les physiocrates ont développé leur théorie au cours de la secondemoitié du XVIIIème siècle. Leur leader était le médecin du roi LouisXV et s’appelait François Quesnay. Cette école comptait en son seindes hommes comme le Chapelier ou Turgot ; elle était à la fois trèsmoderne et archaïque. Elle était moderne en ce sens qu’elle expliquait que la richessed’un pays dépend de la liberté des échanges, de la liberté du marchééconomique, qu’il fallait par conséquent réduire au maximum lesréglementations et qu’il fallait laisser les hommes échangerlibrement leurs marchandises, qu’il fallait qu’il s’exerce un libre-échange.Sous l’Ancien Régime, les corporations de métier déterminaient lesprix des marchandises et les salaires. Il existait à l’entrée desvilles des péages où devaient être payés des droits sur lesmarchandises.

Les physiocrates étaient farouchement opposés à ces corporations età ce système fiscal. L’action de Turgot allait dans ce sens, maisface aux oppositions il fût contraint à partir. Cette école étaitavant-gardiste et préfaçait le libéralisme économique. Elledemeurait par ailleurs archaïque car elle considérait que la sourcede la richesse d’une nation résidait dans la propriété foncièrealors qu’allait se développer l’industrie et qu’avec cela la sourcede la richesse ne serait plus la propriété foncière mais la force detravail.

C’est ce qui explique que les physiocrates se soient montrésfavorables à l’institution d’un impôt unique sur le foncier. Ilsconsidéraient en effet qu’il fallait abolir tous les impôtsexistants et qu’il fallait les remplacer par un seul impôt taxant lapropriété foncière.

A l’époque révolutionnaire, les constituants étaient pénétrés desidées des physiocrates. Les révolutionnaires étaient dans leurmajorité favorables aux idées physiocrates et c’est pourquoi ils ontproposé de supprimer les impôts existants et de les remplacer par unimpôt foncier partant du principe que la propriété foncière étant,selon les physiocrates, la source de la richesse, l’impôt le plusrentable était bien entendu celui qui taxait la propriété foncière.

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2 – La création d’impôts directs sur la propriété foncière

Une fois les privilèges fiscaux abolis dans la nuit du 4 août 1789,la constituante pose le principe de la mise en place d’une fiscalitéégalitaire. Les révolutionnaires décident d’abolir tous les impôtsindirects existants et notamment les gabelles (impôts sur laconsommation) et notamment l’impôt sur le sel. Ils décident deremplacer ces impôts par des impôts directs taxant la propriétéfoncière.

Ils voulaient éviter toutes relations entre le contribuable etl’administration fiscale car l’on voulait éviter les conflits quis’étaient multipliés sous l’Ancien Régime. C’est la raison pourlaquelle on a voulu mettre en place des impôts qualifiés d’impôtsindiciaires. En effet, les impôts assis sur une base foncièrepermettaient d’éviter les relations entre le fisc et le contribuablecar il suffisait d’évaluer de l’extérieur la superficie del’immeuble ou du terrain pour déterminer la base d’imposition (pasbesoin de demander aux contribuables d’écrire quelque chose donc).

Par ailleurs, la constituante a créé dans un premier temps deuximpôts. L’un s’appelait la contribution foncière (contribuer àl’intérêt général), et l’autre la contribution mobilière.

La contribution foncière a été créée par les lois des 23 novembre et1er décembre 1790. Il s'agit du premier impôt créé par lesrévolutionnaires. Ils pensaient pouvoir tirer de cet impôt latotalité des ressources qui leur seraient nécessaires, mais cetimpôt n’était pas totalement recouvré. La contribution mobilière a été instituée par les lois des 13janvier et 18 février 1791. Elle était considérée comme un impôt surle revenu du contribuable et demeure un impôt indiciaire. L’indice de ce revenu était le loyer qui pouvait être demandé pourle logement occupé par le contribuable. Ce loyer était évalué sur labase d’indices appelés, et c’est toujours le cas aujourd’hui, valeurlocative (du logement). Mais ces deux impôts étaient difficiles àrecouvrer et l’on a décidé de taxer les activités industrielles etcommerciales et d’instituer un impôt appelé la contribution despatentes.

Sous le Directoire est créé un quatrième impôt appelé contributionsur les portes et fenêtres.

Ces quatre impôts ont été appelés avec émotion les « Quatrevieilles » (alors qu’il n’y en a en réalité que trois).

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N.B : Les impôts, les contributions, créés à la Révolution étaientdes impôts d’Etat. Ces contributions furent ensuite transférées auxcollectivités locales dans la première moitié du XXème siècle. Eneffet, l’Etat a considéré à juste titre que ces impôts n’étaient pasassez rentables pour couvrir ses dépenses et a créé à son profit ceque l’on appelle les impôts modernes, c'est-à-dire l’impôt sur lerevenu des personnes physiques (IRPP), l’impôt sur les sociétés, laTVA, et il a remis aux collectivités locales les trois contributionsfoncières, mobilières et patentes qui sont devenues des impôtslocaux.

Aujourd’hui, la contribution foncière correspond à la taxe foncièresur les propriétés bâties et à la taxe foncière sur les propriétésnon bâties. La contribution mobilière est devenue la taxed’habitation, et la contribution des patentes est devenue la taxeprofessionnelle.

Ces quatre taxes sont actuellement les principaux impôts directslocaux.

II – Les premiers pas vers le droit pour les élus de décider du choix des dépenses publiques

Les révolutionnaires étaient convaincus que le pouvoir de décider enmatière fiscale était essentiel et que par conséquent ce pouvoirdevait appartenir aux représentants des citoyens, comme indiqué àl’article 14 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyendu 26 août 1789. Mais le pouvoir de dépenser revenait encore àl’exécutif. En réalité, le pouvoir financier était assimilé aupouvoir fiscal et il faudra attendre 1791 pour qu’au moins enprincipe soit admis le fait que le pouvoir législatif étaitégalement compétent pour décider des dépenses, compétent pourdécider d’un budget (un budget consiste à prévoir des dépenses etdes recettes).

Selon la constitution de 1791, le corps législatif a pour fonction« de fixer les dépenses publiques, d’établir les contributions publiques » (article1er, 1ère section, chapitre III, Constitution de 1791). Ce texteconstitue un premier pas vers la présentation d’un budget, c'est-à-dire d’un acte parlementaire qui prévoit pour l’année à venir desdépenses et des recettes et qui autorise l’exécutif à réaliser cesopérations de dépenses et de recettes.

A cette époque, il n’y a pas encore de texte législatif qui prévoitdes dépenses et des recettes ; il n’existe pas encore de budget. Iln’existera en 1792 qu’une simple autorisation globale de dépensesqui sera d’ailleurs reconduite les années suivantes.

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Plus tard, les constitutions de l’an III et de l’an VIIIrappelleront la nécessité d’un budget. Cela sera néanmoins sanseffet. D’autre part, le terme de budget n’apparaîtra qu’en 1802,mais il n’y en aura pas. Napoléon 1er ira même jusqu’à établir lesimpôts lui-même par décret.

Section 2 : La naissance de l’Etat gendarme et du droit budgétaire au XIXème siècle

Le XIXème siècle est marqué par les théories économiques libéralesclassiques. Ces théories estimaient que l’Etat ne devait en aucun cas intervenirdans la vie économique, qu’il devait être absolument neutre vis-à-vis du marché économique. Par conséquent, ces libéraux estimaientque le budget de l’Etat ne devait pas peser sur le marché.

Autrement dit, ils estimaient que :- Les impôts ne devaient pas être trop lourds afin que les citoyenspuissent investir dans les entreprises ;- Les dépenses publiques devaient également être limitées car leuraccroissement risquait d’entrainer une augmentation des impôts ou unfinancement par l’emprunt.

C’est la raison pour laquelle les libéraux classiques feront ensorte que des normes soient instituées afin de réglementerl’activité financière de l’Etat, afin de l’empêcher d’avoir desactivités, notamment économiques, au-delà de certaines frontières.C’est pourquoi le droit budgétaire, c'est-à-dire le droit qui règlel’exercice du pouvoir financier en ce qui concerne l’évaluation desrecettes et des dépenses publiques, va être élaboré essentiellementdans le cadre de la construction de l’Etat libéral classique.

I – Les doctrines libérales classiques et les finances publiquesA – Adam Smith (1723-1790)

C’était un professeur de philosophie, d’économie et de droit del’université de Glasgow. Il a rencontré les physiocrates lors d’unvoyage en France. Il a retenu de leur vision le principe de laliberté du marché.Il va associer ce principe de la liberté du marché au développementindustriel et au rôle essentiel joué par le travail dans laproduction des richesses économiques. Il publie Recherches sur la nature etles causes de la richesse des nations en 1776, dans lequel il développe sathéorie.

Adam Smith développe les idées selon lesquelles :- La liberté doit être le principe de base du système économique et

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l’interventionnisme doit être rejeté ;- La source de la richesse n’est pas la propriété foncière, mais letravail ; - Les salaires et les prix ne doivent pas être réglementés(suppression des corporations de métiers) ;- Les frontières doivent être supprimées ;- L’activité économique de chaque individu est déterminée par sonintérêt personnel et la confrontation de ces intérêts est la sourcedu progrès économique ;- L’impôt doit être proportionnel aux revenus, et doit être payé partous les contribuables. B – Les libéraux classiques : des héritiers d’Adam Smith

Au XIXème siècle, des économistes ont poursuivi la pensée d’AdamSmith. On les appelle les libéraux classiques. Par la suite, à lafin du XIXème et au début du XXème siècle, d’autres économistes ontencore prolongé leurs théories. On les appelle les libérauxnéoclassiques.

Les libéraux classiques sont persuadés qu’Adam Smith est un génieayant déjà tout dit et tout écrit, qu’il suffit de prolonger sapensée. C’est pourquoi ils reprennent tous les thèmes essentielsprésents chez Smith. Dès lors, ils essaient de construire unescience de l’économie qui aurait ses lois comme les sciences de lanature et qui mettraient en évidence les moyens pour fairefonctionner scientifiquement la société.

Parmi ces économistes classiques, il faut citer David Ricardo, Jean-Baptiste Say, Frédéric Bastiat ou encore Robert Malthus. Tous ceséconomistes, excepté Malthus, étaient persuadés qu’ilsparviendraient à découvrir les lois de la richesse des nations.Malthus estimait quant à lui que les populations évoluaient plusrapidement que les biens alimentaires. Par conséquent, à un momentdonné, il n’y aurait plus de quoi nourrir ces populations(croissance exponentielle de la population et croissancearithmétique de la nourriture famines rééquilibrage).

Les néoclassiques sont persuadés que la production joue un rôleprimordial dans l’économie. Ils développent également l’idée que lesindividus ont un comportement rationnel sur le marché économique.Ils entendent par cela que les individus font le choix d’acheter oude vendre en fonction de leur intérêt personnel. Ils en déduisentque la confrontation des intérêts personnels engendre la réalisationde l’harmonie économique et de l’intérêt général.Parmi ces auteurs il faut citer Carl Menger, Stanley Jebons ou

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encore Frédéric Hayek (1899-1992). Hayek a participé à la créationde l’école autrichienne au début du XXème siècle.

II – L’Etat gendarme : première forme de l’Etat libéral classique

L’Etat gendarme qualifie la forme d’Etat conçue par les libérauxclassiques et néoclassiques. Il s'agit d’un Etat qui doit êtreindépendant du marché économique. Ses fonctions doivent êtreréduites à ce que l’on appelle les fonctions régaliennes. Onl’appelle ainsi car il doit se limiter à assurer la sécurité desbiens et des personnes. Il doit maintenir l’ordre à l’intérieur dupays et protéger les populations des agressions extérieures.

L’objectif est économique. Il est de permettre aux entreprises etaux individus de produire et d’échanger en paix. Par ailleurs, cetEtat doit également permettre la circulation la plus facile desmarchandises ; c’est la raison pour laquelle lui sont confiés laconstruction et l’entretien des routes.

En résumé, les fonctions régaliennes sont les suivantes :- Assurer la sécurité des biens et des personnes, ce qui signifiefinancer une police et une armée ;- Assurer le respect des lois, et financer une justice ;- Assurer la circulation des marchandises, et donc financer lavoirie.

Selon cette conception de l’Etat, c'est-à-dire une conceptionneutraliste par rapport au marché économique, le budget de l’Etat nedoit pas peser sur l’économie et doit être strictement équilibré.Cela signifie que les dépenses publiques doivent strictementéquivaloir aux recettes publiques. Selon cette doctrine, il ne doity avoir ni déficit budgétaire, ni excédent budgétaire. En ce quiconcerne la fiscalité, l’impôt ne doit pas peser sur le marché, surla conjoncture économique. Sa seule fonction est de couvrirexactement les dépenses régaliennes. S’il était supérieur auxdépenses régaliennes, l’argent prélevé serait alors de l’argent noninvesti dans le circuit économique.

Si l’on considère les réalités, les budgets du XIXème sièclen’étaient pas systématiquement équilibrés. Les principes libérauxclassiques ont été très difficilement applicables, et plusl’économie se développait, moins il était facile de les appliquer.Toutefois, des règles juridiques ont été posées, elles avaient pourobjectif d’encadrer, de limiter l’action de l’Etat dans la vieéconomique.

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III – La naissance du droit budgétaire et de la comptabilité publique

Le droit budgétaire, c'est-à-dire le droit qui organise l’exercicedu pouvoir financier, qui établit des règles relatives à la fixationdes prévisions concernant les recettes et les dépenses publiques, seconstruira dans le cadre de la construction de l’Etat gendarme.

En effet, selon les principes libéraux classiques, l’Etat doit êtretotalement indépendant dans la vie économique ; ce qui suppose, parconséquent, une limitation du pouvoir financier public. Enconséquence, des normes vont être créées afin de contrôler laprogression des dépenses publiques. On ne veut pas que ces dépensesaugmentent au-delà de ce qui est nécessaire, c'est-à-dire lescharges régaliennes. Ces règles vont donc interdire à l’Etat d’agirau-delà de certaines frontières clairement établies.

Il va falloir attendre la période de la Restauration pour que sebâtisse le droit budgétaire. Durant cette période va se construireun droit qui pose comme principe de base la prévision des dépenseset des recettes publiques pour l’année à venir. Cette fonctionbudgétaire va être confiée à l’exécutif pour la préparation dubudget, et au législatif pour sa discussion et son adoption.

Sous la Restauration, et par la suite sous la Monarchie de juillet,les assemblées parlementaires vont acquérir un véritable pouvoirfinancier, c'est-à-dire le pouvoir de décider de l’impôt et lepouvoir d’en dépenser les produits. C’est à cette époque, et enpremier lieu sous l’impulsion des ministres des finances de LouisXVIII et de Charles X, que vont être créées les principales règlesbudgétaires. On aurait pu penser qu’une telle évolution étaitimpossible car la charte constitutionnelle du 4 juin 1814 necomportait aucune règle relative au budget. Seul l’article 48 de lacharte faisait allusion à l’adoption des recettes fiscales. Seloncet article « aucun impôt ne peut être établi ni perçu s’il n’a été consenti par les deuxchambres ».

C’est en 1814 que pour la première fois un budget va faire l’objetd’une discussion concernant les dépenses. C’est le Baron Louis,ministre des finances de Louis XVIII, qui va donner le coup d’envoid’un processus accordant un véritable pouvoir financier aux élusnationaux. Il va déclarer le 22 juillet 1814 aux députés : « En vousoccupant du budget de l’Etat, votre fonction première sera de reconnaître la nature etl’étendue de ses besoins et d’en fixer la somme » (dépenses). Il ajoute :« Votre attention se portera ensuite sur la détermination et la fixation des moyens quidevraient être établis ou employés pour y faire face » (recettes). Il poursuitainsi : « Pour procéder suivant l’ordre de vos délibérations, nous [l’exécutif] allons

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vous présenter l’évaluation la plus exactes de nos dépenses, c'est-à-dire les sommes qu’il estnécessaire d’affecter à chacun des départements ministériels ». C’est doncl’exécutif qui propose les dépenses pour chaque ministère, quiprépare le budget.

Il termine comme cela : « Nous aurons ensuite l’honneur de vous offrir l’aperçu desmoyens proposés pour les balancer ». Le Baron Louis dit que l’exécutifpropose un projet de budget qui sera ensuite discuté et adopté parles députés. Le pouvoir reconnaît donc ce pouvoir aux députés.

Une fois ce principe de l’adoption des dépenses ayant été acquis,les élus vont ensuite faire en sorte de voter de plus en plus endétails les dépenses. Cette évolution vers une adoption détailléedes dépenses va progressivement donner naissance à un principebudgétaire que l’on appelle le principe de spécialité budgétaire.Tout au long du XIXème siècle, les dépenses publiques serontprogressivement compartimentées en diverses catégories à l’intérieurde chaque ministère. On va d’abord créer des parties à l’intérieurdu budget des ministères : les sections. Ces sections ont étéinstituées par une ordonnance du 2 septembre 1827. Lesparlementaires auront alors le droit d’adopter le budget parsections alors qu’ils ne l’adoptaient auparavant que par ministère.

Par la suite, une loi du 29 janvier 1831 va créer de nouvellescatégories qui vont s’appeler des chapitres ; les parlementairesvont alors adopter le budget par chapitres. On dit que les créditssont spécialisés par chapitres. Dès lors, le Parlement a acquis unpouvoir financier réel. Il contrôle dans le détail les crédits quisont mis à la disposition de l’exécutif.

Ensuite, des textes viendront améliorer la procédure, notamment undécret du 31 mai 1862 qui organise la comptabilité publique et quiest à l’origine d’un droit de la comptabilité publique et qui parailleurs précise, rationnalise, les procédures budgétaires. A partir de cette date, les procédures budgétaires ainsi quel’architecture du budget (chapitres, sections) ne seront remises enquestion qu’à partir des années 1950. En effet, le droit budgétaireet comptable public institué par le décret de 1862 avait été créésous l’influence et dans un contexte libéral classique au seinduquel la neutralité de l’Etat était essentielle. Or, à partir desannées 1950, on admet que l’intervention de l’Etat dans la vieéconomique et sociale est une nécessité. Par conséquent, il vafalloir reconsidérer le droit public financier et il sera réformépar une ordonnance du 2 janvier 1959.

Chapitre 3   : Les finances publiques   et la construction de l’Etat providence

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La fin des années 1950 se caractérise par le développement d’uneconception de l’Etat opposée à celle qu’avaient développée leslibéraux classiques. L’Etat est alors considéré comme un moyend’assurer par ses interventions le développement économique etsocial. Cet Etat interventionniste est appelé Etat providence.

Section 1 : La création de l’Etat providence et les modifications du droit budgétaire à la findes années 1950

I – La naissance des premières théories interventionnistes avant la seconde guerre mondiale

Ces théories ne sont pas nées au cours des années 1950, mais auXIXème siècle en réaction aux excès du développement industriel. Cesdoctrines expriment la nécessité de l’intervention de l’Etat dans lavie économique et sociale. Ces théories ne seront réellementacceptées et concrétisées qu’à partir de l’après Seconde guerremondiale.

A – Adolphe Wagner, un précurseur de l’interventionnisme

Wagner vivait à Berlin à la fin du XIXème siècle et était professeurd’économie, socialiste réformiste. Il est favorable à uneredistribution des richesses et à une égalisation des situationssociales en utilisant la fiscalité. Ce qui a rendu sa penséeoriginale est l’intérêt qu’il a porté à l’étude des dépensespubliques. En effet, la quasi-totalité des auteurs de l’Etat ne s’intéressaitqu’à l’impôt. Adolphe Wagner a établi ce qu’il a qualifié de « loi del’extension croissante de l’activité publique de l’Etat ». On appelle encore cette loila loi de Wagner. Cette loi a été exposée dans son ouvrage Fondementsde l’économie politique. Cette loi signifie que du fait du développement industriel, lesdépenses publiques augmenteront inéluctablement car le secteurpublic sera obligé d’intervenir pour rééquilibrer le systèmeéconomique et social. Wagner écrivait : « Des comparaisons dans l’histoire et dans l’espace montrent chezles peuples en voie de progrès un développement régulier de l’activité de l’Etat et de l’activitépublique exercée à côté de l’Etat par les diverses administrations autonomes(collectivités territoriales) ». Il ajoute : « L’Etat et les corps autonomesse chargent de plus en plus d’activités nouvelles. Ainsi, un nombre toujours croissant debesoins collectifs sont satisfaits par l’Etat, nous en avons la preuve manifeste etmathématique dans l’accroissement des besoins financiers de l’Etat et des communes ».

Selon Wagner, le secteur public doit aider le développement del’économie et doit également corriger les effets négatifs de ce

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développement.

B – John Maynard Keynes et la formalisation des doctrines interventionnistes

Keynes est né en 1883 et mort en 1946. Il était britannique et a eul’intelligence de présenter une théorie d’une grande cohérence del’interventionnisme public dans la vie économique et sociale. Il estlibéral interventionniste.

L’un des points clés de sa pensée consiste dans le fait qu’il a misen évidence la fonction essentielle que doit jouer le budget del’Etat dans la réalisation de l’équilibre économique, c'est-à-direde l’équilibre entre la production et la consommation, entre l’offreet la demande.Il a montré le rôle que devait jouer le budget pour compenser lesdéséquilibres économiques et sociaux et pour relancer l’économielorsque celle-ci s’essouffle et connaît malheureusement larécession.

Keynes estimait que ses collègues libéraux classiques n’avaient pasraison en prétendant que le marché économique pouvait fonctionnerparfaitement sans intervention de l’Etat. Il n’arrêtait pas de sedisputer avec Hayek. Pour Keynes, il faut que l’Etat intervienneafin de soutenir ou de relancer la demande, c'est-à-dire laconsommation, lorsque cela est nécessaire. On dit qu’il s'agit d’unepolitique économique de la demande et l’on qualifie le point de vuelibéral classique de politique économique de l’offre.

Il développe également l’idée qu’il faut une politique sociale, etque cette politique ait pour objectif la recherche du plein emploi.Un autre axe consiste en le soutien de l’éducation et à l’aide enmatière de santé. Pour atteindre cet objectif, l’Etat doitdévelopper d’une part une politique de soutien au salaire, d’autrepart une politique de redistribution de l’impôt et enfin unepolitique d’investissements publics. Afin de développer cespolitiques, l’Etat ne doit pas hésiter à présenter des budgets endéficit. Ce déficit budgétaire permet d’injecter dans le systèmeéconomique un supplément de pouvoir d’achat du fait des dépensespubliques. Autrement dit, il permet de relancer la demande et parconséquent de relancer l’économie.

Toutefois, Keynes estimait également que s’il le fallait, un budgetpouvait être voté en équilibre ou en excédent afin de réduire lademande et de rétablir l’équilibre avec la production. Ce n’est pasl’équilibre du budget qui compte en soi, mais son utilisation pourréaliser l’équilibre de l’économie. Il estimait que c’était là le

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seul moyen de sauver l’économie libérale.Ainsi, il écrivait : « L’élargissement des fonctions de l’Etat apparaît comme le seulmoyen d’éviter une complète destruction des institutions économiques actuelles, et comme lacondition d’un heureux exercice de l’initiative individuelle ».

Keynes a marqué la pensée économique des générations de l’aprèsseconde guerre mondiale. Cet auteur a permis la refonte de la pensée budgétaire.

II – La crise de l’Etat gendarme et la création de l’Etat providence

Les conceptions interventionnistes se sont imposées du fait descrises économiques et sociales. Elles sont apparues comme uneréponse à ces crises. Les problèmes sociaux engendrés par undéveloppement industriel sauvage ont conduit à admettre qu’il étaitindispensable de développer des politiques sociales.

L’effet déclencheur du succès interventionniste va être la grandecrise économique et financière qui va se développer à partir de1929. On va alors comprendre que le marché économique devait êtrerégulé, qu’il ne pouvait pas s’autoréguler, et qu’il fallait parconséquent des règles et des interventions du secteur public. C’estainsi que très pragmatiquement dans les années qui ont précédé laseconde guerre mondiale, le rôle de l’Etat en matière économique vase développer avec la politique du new deal lancée par Rooseveltcomme en Europe avec le front populaire en France par exemple. C’estla raison pour laquelle, après la seconde guerre mondiale, il serabien admis qu’il faut des règles et que l’Etat doit être amené àoccuper une fonction de stabilisateur de l’économie.

III – L’adaptation du droit public financier aux caractéristiques de l’Etat providence L’institution de l’Etat providence va à contre-courant de l’Etatgendarme. Leurs points de vue sont totalement opposés.

C’est la raison pour laquelle le droit public financier est alors endécalage par rapport aux réalités du moment. Il n’est plus adaptéaux pratiques interventionnistes et n’est pas non plus en phase avecles théories économiques du moment. Le contexte général est lui mêmetrès différent. On assiste à un renforcement du pouvoir politiquecentral et à la place primordiale qui est accordée au pouvoirexécutif, alors que dans les périodes précédentes, sous les IIIèmeet IVème républiques, le pouvoir législatif détenait une compétencequasi absolue en matière financière.

Cette inadaptation du droit public financier a conduit à commencer à

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le réformer. C’est alors qu’un large consensus s’est établi sur lefait que le budget de l’Etat était essentiel pour l’équilibre et ledéveloppement du marché économique. Dans un premier temps, cettefonction économique de l’Etat s’est exprimée dans un décret de 1956.Ensuite, la Constitution du 4 octobre 1958 a limité les pouvoirs duParement en matière financière et a augmenté ceux du gouvernement.Enfin, une ordonnance du 2 janvier 1959 est venue compléter ledispositif et l’harmoniser.

A – La reconnaissance juridique de la fonction économique du budget de l’Etat

Un décret du 19 juin 1956 reconnaît de manière explicite la fonctionéconomique du budget de l’Etat. Il développe deux grandes données :- Il est indispensable de situer le budget de l’Etat dans uncontexte économique et financier. - Il est indispensable de centrer les débats sur la loi de financequi est la traduction d’un point de vue budgétaire des objectifséconomiques et financiers du gouvernement.

Apparaît ici une notion nouvelle qui est celle de loi de finance.Cette notion sera ensuite normalisée par l’ordonnance du 2 janvier1959 et l’on distinguera le budget, traduction chiffrée dedispositions fixées par une loi particulière appelée loi de finance(alors que celle-ci ne sert qu’à fixer des objectifs).

Le décret de 1956 reconnaît officiellement le rôle actif que l’onveut faire jouer à l’Etat en matière économique. Il reconnaîtégalement les liens existants entre économie et budget ; autrementdit entre finances publiques et économie. Selon le décret, « Lesmoyens dont dispose l’Etat comme les ressources qu’il prélève ont désormais une influenceprofonde sur la vie de la Nation, son orientation économique, son devenir social. Le tempsn’est plus où les recettes prélevées par l’Etat pour couvrir les dépenses de fonctionnement deservices publics presque exclusivement régaliens demeuraient sans incidences sur l’économienationale et par l’accroissement de ses interventions, l’Etat est présent dans toutes lesbranches importantes de l’activité du pays ».

B – La limitation des pouvoirs du Parlement en matière financière

Dans le cadre du parlementarisme rationnalisé, les élus nationauxont vu leurs pouvoirs financiers très encadrés et considérablementlimités tandis que ceux du pouvoir exécutif étaient augmentés. Ledroit d’amendement financier des parlementaires a été réduit defaçon considérable par l’article 40 de la Constitution de 1958.

C – L’harmonisation de la législation financière

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L’harmonisation a été favorisée par une ordonnance du 2 janvier 1959portant loi organique relative aux lois de finance : « constitutionfinancière de la France ». Un décret du 29 décembre 1962 portantrèglement de la comptabilité publique a été important lui aussi.

L’ordonnance de 1959 a été abrogée par une loi organique relativeaux lois de finance (LOLF) du 1er août 2001.

Section 2 : La critique du système financier public et la crise de l’Etat providence Au cours de la seconde moitié des années 1970, une crise économiques’est développée et a eu de fortes répercussions sur le budget del’Etat. Il s’est déjà produit lors de la crise 1929, ce que l’onappelle un effet de ciseau. D’un côté, les dépenses publiquesaugmentent considérablement du fait de la crise, et d’un autre côtéles recettes publiques diminuent. A un moment donné, les recettes etles dépenses se croisent et l’écart entres les deux ne fait ques’accentuer. Par conséquent, le déficit s’accroit, il faut lefinancer et l’on fait alors appel à l’emprunt, ce qui ne faitqu’aggraver les choses.

L’Etat providence a tenté de réagir en jouant sur la demande maiscette politique a eu pour effet d’accroître le phénomène de crise.C’est alors que l’on a contesté l’Etat providence. L’idée s’estdéveloppée du côté des économistes libéraux classiques qu’il étaitindispensable de revenir aux principes posés par l’Etat gendarme. Ilfallait donc, comme l’expliquaient ces économistes, cesserl’interventionnisme et laisser le marché se développer librement.

I – La critique de l’impôt et de la dépense publique

Au milieu des années 1970, et surtout à la fin, on a constaté qu’ilétait de plus en plus difficile pour l’Etat d’assumer sa fonction destabilisateur de l’économie. C’est alors que les critiques se sontdéveloppées vis-à-vis de l’Etat providence. C’est alors égalementque s’est amorcée une transformation de la gestion des financespubliques et une transformation de l’Etat qui n’ont commencé àdevenir perceptibles que des années plus tard. On a comprisaujourd’hui que la crise des années 1970 nécessitait non seulementune réponse de type économique, mais aussi une réponse de caractèreinstitutionnel. A la fin des années 1970, une idée forte s’estimposée, selon laquelle l’Etat était beaucoup trop envahissant etqu’il pesait beaucoup trop sur le système économique.

Les dépenses sont alors considérées comme nuisibles pour l’économie.De cette critique de la dépense publique est née une critique de

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l’impôt. Certains économistes libéraux classiques ont estimé qu’ilfallait « affamer » l’Etat (Friedman, notamment). Il faut donc réduiresa fiscalité. On a l’idée que la réduction des impôts entraine laréduction des dépenses.Par ailleurs, l’impôt a fait l’objet d’autres critiques. Il lui aété reproché de gêner l’investissement des épargnants dans lesentreprises, du fait que l’Etat, par ces prélèvements obligatoires,ponctionnait une partie importante de l’épargne.

Toutes ces critiques ont conduit à l’idée qu’il serait plus efficacede substituer aux politiques keynésiennes (politiques quiencouragent la demande, la consommation) des politiques qui àl’inverse devraient soutenir la production (c'est-à-direl’entreprise). Par conséquent, le clivage s’est produit entre lespartisans d’une politique de soutien à la consommation et ceux d’unepolitique de soutien à la production. Ce clivage recoupe lespartisans d’un Etat interventionniste opposés aux partisans d’unEtat non interventionniste. Ces clivages se sont exprimés d’un point de vue théorique comme d’unpoint de vue pratique par un rejet des théories keynésiennes et parun retour aux théories libérales classiques.

II – Le retour aux théories libérales classiques

A partir de la seconde moitié des années 1970 s’est produit unregain d’intérêt pour les théories libérales classiques etnéoclassiques du XIXème et du début du XXème siècle. Cedéveloppement s’est tout d’abord produit aux Etats-Unis avant des’étendre à l’ensemble des pays développés, notamment en Europe.Certaines écoles libérales classiques en perte d’audience deviennentdes écoles prises sérieusement en considération. C’est par exemplele cas de l’école du « Public choice » qui est née au début desannées 1950 et s’est considérablement développée à partir de laseconde moitié des années 1970. D’autres écoles sont nées dans le courant des années 1970 ets’enracinent dans le courant du libéralisme économique classique.Elles se reconnaissent toutes un maitre à penser, prix Nobeld’économie 1974, Frédéric Hayek.

A – Frédéric Hayek

Hayek était à la fois un juriste, un politiste et un économiste,l’un des fondateurs de l’école de Vienne. Il est né à Vienne en 1899et est décédé en 1992. En 1924, il fonde le Cercle de Vienne ; ils'agit là d’un groupe de réflexion qui réunit des économistesautrichiens. Se développe ainsi une école libérale classique que

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l’on va appeler l’Ecole de Vienne. Hayek a par ailleurs créé, avec d’autres libéraux classiques, laSociété du Mont Pèlerin, dont l’objectif est de développer lesthèses favorables à l’économie de marché et de combattre lesconceptions interventionnistes. Il a enseigné à l’université deVienne puis à celle de Chicago, puis à celle de Fribourg etSalzbourg jusqu’en 1976.

En ce qui concerne ses idées, il s’inscrivait en droite ligne desthèses développées par Adam Smith et ses successeurs. Il estimaitque l’interventionnisme de l’Etat était particulièrement dangereuxnon seulement pour l’économie, mais également pour la libertéindividuelle et pour la démocratie. Il estimait quel’interventionnisme était la source des Etats totalitaires. Ilestimait en outre que les sociétés étaient beaucoup trop complexespour prétendre posséder toutes les informations les concernant etpour prétendre les maîtriser afin de les diriger. Par conséquent, ilestimait que les individus n’avaient aucune prise sur ledéveloppement de ces sociétés, qu’ils en ignoraient le mode defonctionnement (l’interventionnisme est donc source d’erreurs).Selon Hayek, il est inutile et dangereux de vouloir diriger lasociété car elle est le produit d’une multitude de relations, elleest très difficile à comprendre, d’autant plus qu’elle change enpermanence. Elle est donc insaisissable. Il est donc préférable delaisser s’auto organiser la société.

Droit, législation et liberté, Frédéric Hayek, T.3 : Selon Hayek, « L’inéluctable ignorance de la plupart des données qui entrent dansl’ordre de la grande société est la racine du problème de tout ordre social, des millionsd’hommes réagissent les uns sur les autres. Chacun ignore la plupart des faits sur lesquelsrepose le fonctionnement de la société ».

Hayek propose à partir de là une libéralisation totale de la sociétéet même une disparition de l’Etat et une appropriation du pouvoirpar la société civile, c'est-à-dire par les individus, et notammenten utilisant les structures associatives.

B – Les écoles néolibérales classiques1 – L’école libertarienne, ou école libérale-libertaire, ou école anarcho-capitaliste

Cette école est née à la fin des années 1960 par la création d’unparti politique, le parti libertarien. Il a été créé par desétudiants anarchistes libertaires et par des étudiants libérauxclassiques. Les uns et les autres étaient très opposés aux théorieskeynésiennes interventionnistes. Les étudiants libéraux classiquesavaient pour principe qu’il fallait appliquer à la lettre les thèses

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d’Adam Smith. Les étudiants anarchistes libertaires appartenaient àun courant anarchiste se situant dans la lignée d’un des fondateursdu courant anarchiste au XIXème, Pierre Joseph Proudhon. Il s'agitd’un courant de pensée radicalement anti étatiste mais néanmoinsfavorable à la petite entreprise.

Par conséquent, les deux groupes étaient méfiants vis-à-vis del’Etat, très individualistes, favorables à la petite entreprise etpar ailleurs décentralisateurs. Cette école va devenir unlaboratoire de pensée pour le monde libéral classique. Les pointsforts de ces théories sont l’anti étatisme et l’hyperindividualisme. Sur cette base, ils développent les pointssuivants :- Une organisation décentralisée de la société. Les associations etles collectivités locales doivent complètement remplacer l’Etat. - Les services publics doivent être privatisés et confiés à desentreprises ou à des associations.- La petite entreprise doit être aidée car elle est la source dudéveloppement économique. - Il est indispensable d’opérer une déréglementation radicale etsubstituer à cela des contrats entre individus. Autrement dit, ledroit doit être produit par les individus librement à travers leursconventions. - Il faut supprimer les impôts. Ils ont pour slogan : « L’impôt c’est levol ! ». Aujourd’hui, certains libertariens estiment que l’on peutadmettre un impôt sur la consommation comme la TVA, mais à un tauxrelativement faible. - Les frontières doivent être supprimées pour que les échangess’effectuent librement.

Pour les libertariens, c’est la liberté de l’individu qui estprimordiale. Ils estiment à la suite de Hayek que la libertéindividuelle engendre automatiquement un ordre idéal. Finalement, lesystème s’auto organise de manière harmonieuse lorsque la sociétéest fondée sur le marché économique d’une part, et sur la sociétécivile d’autre part.

2 – L’école du Public choice, ou école de Virginie

Elle est née dans les années 1950 aux Etats-Unis par deuxéconomistes, Gordon Tullock et James Buchanan. C’est une écolelibérale classique qui a la particularité d’étudier lefonctionnement des institutions politiques et administratives. Leurdémarche intellectuelle consiste à étudier l’administration et lavie politique à travers le prisme des conceptions libéralesclassiques dans l’économie.

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L’école du Public choice s’intéresse tout particulièrement auxdépenses publiques et plus précisément à l’utilité des dépensespubliques et à la manière dont sont prises les décisions lesconcernant. Cette école étudie les partis politiques, le systèmeélectoral et cela en prenant modèle sur le marché économique. Ilsassimilent la vie politique à un marché ; c’est pourquoi ilss’intéressent particulièrement au phénomène clientéliste (favoriserles électeurs pour qu’ils continuent à voter pour une personnedéterminée). L’école du Public choice montre que le clientélisme enpolitique aboutit à un gaspillage des fonds publics par des prisesde décision en matière de dépenses qui ne se justifient paséconomiquement. L’idée de base est que dans une démocratie, lescitoyens sont des consommateurs qui indiquent leurs choix pour cequi concernent les biens publics. Ils indiquent leur choix en votantpour leurs représentants. Or, ces représentants ont un seulobjectif qui est de se faire réélire.

Dès cet instant va se développer une logique de type économiqueselon laquelle les élus cherchent à élargir le nombre de leursélecteurs à l’image d’une entreprise qui cherche à accroitre lenombre de ses clients. Parallèlement à cela, un principe est posé selon lequel l’électeurse comporte comme un consommateur sur un marché économique, qu’ilagit rationnellement sur un marché politique et agirrationnellement, selon cette école, signifie agir selon sesintérêts. Par conséquent, l’électeur votera en fonction desavantages économiques qu’il pense pouvoir retirer des programmes despartis politiques. Il s'agit là d’une conception économiquegestionnaire de la vie politique et administrative. Cette écoleétudie la rationalité des choix qui concernent les dépensespubliques.

A partir de là, l’école fait un certain nombre de propositions :- Il faut assouplir l’Etat, le débureaucratiser. Il faut doncl’intégrer aux mécanismes économiques. Il faut que l’Etat joue lejeu de la concurrence, qu’il se gère sur le modèle de l’entreprise.De plus, tous les monopoles de service public doivent êtresupprimés. - L’Etat doit se décentraliser. Il faut appliquer un principe quel’on appelle le principe de subsidiarité, ce qui signifie que lescollectivités locales doivent assumer les fonctions que l’Etat neparvient plus à assurer (c’est ce qui a commencé à être fait enFrance par un partage des compétences entre l’Etat et lescollectivités locales par les lois de décentralisation de 1982 et1983. Ce partage des compétences s’est poursuivi par la révision

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constitutionnelle de mars 2003).- Le système électoral doit être réformé car, du fait qu’il estfondé sur un suffrage majoritaire, il ne permet de donnersatisfaction qu’à une partie des électeurs alors que la dépensepublique est supportée par tous les citoyens contribuables. - Le secteur privé est plus légitime que le secteur public pourgérer les services publics car, selon l’école du Public choice,lorsque c’est une entreprise privée qui les gère elle fonctionneavec des fonds qui sont la propriété des dirigeants de l’entrepriseet qui par conséquent sont responsables de leurs erreurs. Ilsajoutent qu’en revanche, les services publics gérés par l’Etat lesont par des fonctionnaires qui utilisent l’argent public et qui nepeuvent pas avoir un sentiment de responsabilité aussi fort qu’unchef d’entreprise.

3 – L’école de la croissance endogène

C’est une école libérale classique née au début des années 1990 auxEtats-Unis. Son originalité est qu’elle a réalisé une étudepragmatique et scientifique concernant l’utilité des dépensespubliques. Ces économistes, à la différence des autres économistes libérauxclassiques, estiment que certaines dépenses publiques sont légitimeset sont favorables au développement économique. Parmi ceséconomistes, il faut citer Robert Barro et Aschauer. Ils proposentd’une part une politique sélective en matière de dépensespubliques ; ils recherchent quelles pourraient être les conditionsfavorables à une croissance économique qui serait autoentretenue,c'est-à-dire une croissance qui ne nécessiterait pas l’action defacteurs extérieurs. Ils sont pour un impôt neutre.

Politique sélective en matière de dépenses publiques :Ces économistes cherchent quels sont les moyens pour qu’unecroissance économique soit autoentretenue. Par conséquent, unecroissance qui ne soit pas le fait de facteurs externes. Lesrecherches de ces économistes ont d’abord porté sur la manière destimuler la compétition et la croissance économique par les dépensespubliques.

A la suite des travaux de Barro, une étude des dépenses publiquessur le long terme, ils ont émis l’idée qu’il ne fallait passystématiquement condamner toutes les dépenses publiques. Ils ontmontré que certaines dépenses pouvaient être favorables audéveloppement économique et qu’il convient d’opérer une sélection.Ils estiment par exemple que certaines dépenses, qu’ils qualifientde dépenses d’avenir, sont indispensables au développement futur du

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système économique. Il s'agit par exemple des dépenses de rechercheet d’éducation. Ils estiment que les dépenses d’investissement commeles dépenses de fonctionnement (par exemple les salaires deschercheurs) constituent toutes des dépenses nécessaires pourl’avenir et profitables au développement économique.Barro a même démontré en étudiant 98 pays sur une période allant de1960 à 1985 qu’une relation positive existait entre la progressiondes dépenses d’éducation et la croissance du PIB !

L’année dernière marque la première fois que le ministre a utiliséce terme de « dépenses d’avenir ».

La réhabilitation de la dépense publique par ces économistes aouvert un nouveau champ de réflexion dans le secteur public et aouvert la voie à la création de nouveaux concepts en financespubliques. Ces économistes estiment nécessaire de ne pas dépasser unseuil d’imposition optimal. Les impôts ne doivent pas peser sur lemarché, doivent être proportionnels (qui s’oppose à progressif), neprenant pas en compte la capacité contributive des contribuables.

Section 3 : La réforme du système financier public comme source de réforme de l’Etat

Depuis une trentaine d’années, les Etats développés, puis les Etatsen développement, se sont engagés dans des réformes importantes dela manière de gérer le secteur public et plus particulièrement de lamanière de gérer les finances publiques. Tous les Etats qui se sontengagés dans cette évolution ont pris modèle sur les méthodes degestion utilisées par les entreprises. Par ailleurs, tous ces Etats sont amenés à libéraliser leuréconomie, ce qui donne lieu à des privatisations mais également audéveloppement de la décentralisation. Ces évolutions qui s’enracinent à l’origine dans la nécessité derépondre à la crise économique transforment progressivement l’Etat.Les administrations sont les premières concernées, mais ce sontégalement les pouvoirs politiques.

I – La réforme des finances des collectivités territoriales et la responsabilisation des acteurspublics locaux

La responsabilisation des acteurs publics en matière financière,c'est-à-dire le fait de leur attribuer une certaine autonomie dedécision et de gestion, constitue un élément clé des réformescontemporaines. Cette responsabilisation financière a d’abord étéattribuée en France aux collectivités territoriales. Ce sontmaintenant les gestionnaires de l’Etat, depuis 2006, qui sontconcernés. Les collectivités territoriales, dans les années 1960

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étaient considérées comme étant mineures dans le milieu financier(il leur fallait des autorisations pour emprunter et pour se servirde ces sommes etc.). Une autonomie financière des collectivitéslocales a commencé à se mettre en place dans la seconde moitié desannées 1970 par l’attribution d’une certaine autonomie de gestiondes fonds mis à leur disposition (subventions de l’Etat, ou encoreprêts qui leur sont accordés).

Par la suite, les collectivités territoriales acquièrent unecertaine autonomie fiscale. On considère aujourd’hui que l’autonomiefinancière des collectivités locales est réalisée pour certainslorsqu’elles détiennent au moins une autonomie de gestion. Pourd’autres, cela suppose non seulement qu’il y ait autonomie degestion, mais aussi que les collectivités locales soient égalementdotées d’une autonomie fiscale. L’autonomie fiscale s’entend d’unepart du fait que les collectivités locales soient dotées d’impôtspropres, et d’autre part de la possibilité pour ces collectivités devoter les taux de ces impôts (que ce ne soit pas le Parlement quivote le taux d’imposition des impôts locaux).

A – L’acte I de la réforme des finances locales1 – Les premiers pas vers l’autonomie financière

L’autonomie financière des collectivités locales, c'est-à-dire leurresponsabilisation financière, a été marquée par la globalisation demoyens de financement tels que les subventions et les emprunts. Aulieu d’attribuer aux collectivités locales des subventions ou desprêts spécifiques, utilisables que pour une dépense bien définie parl’Etat, on autorise la collectivité à utiliser librement les fondsmis à sa disposition. On appelle cela une subvention globale. C’estalors une révolution.

a – L’autonomie de gestion

Elle a commencé avec la globalisation des prêts accordés auxcollectivités locales. Cette globalisation des prêts a été initiéeen 1976. Trois institutions financières, la caisse des dépôts etconsignations, les caisses d’épargnes, et la caisse d’aide àl’équipement des collectivités locales (qui n’existe plusaujourd’hui, et est devenue Dexia crédit local), ont proposé, àtitre expérimental d’abord, aux collectivités locales de plus de 10000 habitants, des prêts globaux. Cette opération a ensuite étégénéralisée à partir de 1979 pour les communes plus petites. Une loi du 3 janvier 1979 crée une dotation globale pour lescollectivités locales appelée dotation globale de fonctionnement.

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Jusqu’en 1979 l’Etat allouait aux collectivités locales dessubventions qualifiées de spécifiques. Il s'agissait de subventionsaccordées sur la base d’un dossier fourni par la collectivitélocale. Il y était expliqué quel était l’objectif de cettesubvention et l’Etat décidait d’accorder ou non la subvention. S’ill’accordait, elle devait être impérativement affectée au financementde l’opération dans le dossier. En outre, il existait à l’époque unplan quinquennal qui prévoyait les équipements et les politiques quel’Etat entendait conduire dans les cinq ans à venir. Et si lescollectivités locales demandaient des subventions pour desopérations qui figuraient dans le plan, elles avaient plus de chancede les obtenir. On en a déduit qu’il fallait responsabiliser les collectivités englobalisant les subventions.Début d’une autonomie de gestion.

b – Vers l’autonomie fiscale

Dans un premier temps, les collectivités locales se sont vuesattribuer des impôts propres par des lois de 1973, 1974 et 1975. Onleur a attribué quatre impôts : la taxe d’habitation, la taxefoncière sur les propriétés bâties, la taxe foncière sur lespropriétés non bâties et enfin la taxe professionnelle. Il s'agitd’une base d’autonomie fiscale.

Par la suite, une loi du 10 janvier 1980 leur a accordé lapossibilité de voter librement les taux de ces quatre impôts. De lasorte, les collectivités locales bénéficient d’un pouvoir fiscal quileur est délégué par le Parlement. Les assemblées délibérantes (parexemple le conseil municipal) des collectivités locales nedétiennent pas pour autant le droit de supprimer un impôt, de créerun impôt ou de modifier les règles d’imposition de ces impôtslocaux. Il ne leur est délégué que le pouvoir d’en voter les taux.

Depuis la loi du 10 janvier 1980, les collectivités locales peuventfaire varier les taux d’imposition de la taxe professionnelle quiest un impôt à la charge des entreprises, de la taxe d’habitationqui est à la charge des personnes qui occupent un appartement, de lataxe foncière sur les propriétés bâties qui est un impôt à la chargedes propriétaires d’immeubles bâtis et de la taxe foncière sur lespropriétés non bâties qui est à la charge des propriétaires deterrains.

Deux possibilités sont offertes aux collectivités locales pour fairevarier ces taux :- La variation proportionnelle des taux. Elle consiste à faire

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évoluer les quatre taux de la même manière chaque année ;- La variation différenciée des taux. Cela consiste à augmenter oudiminuer les taux de façon différente pour chacune des taxes.

Cette seconde solution permet beaucoup plus que la première dedévelopper une politique fiscale. Le renforcement de l'autonomie financière des collectivitéslocales :

Des textes importants ont étés pris en 1982 et 1983. Il s'agit deslois de décentralisation. Ces lois ont pour objectif de développerle pouvoir financier des collectivités locales. Il faut remarquerque les collectivités locales détenaient déjà une certaine autonomiede gestion du fait de la globalisation des prêts et des subventions.Par ailleurs, une certaine autonomie fiscale des collectivitéslocales leur avaient été accordée puisqu'elle disposait d'impôts quileur étaient propres ainsi que de la possibilité de voter librementle taux de ces impôts. Il s’ensuivit qu’au début des années 1980,les collectivités territoriales disposaient déjà d'une certaineautonomie financière.

a – Les grandes caractéristiques de la réforme de la décentralisation de 1982/1983

Cette réforme de la décentralisation s'inscrit dans un vastemouvement de décentralisation qui s'est produit dans les paysdéveloppés à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Ladécentralisation est considérée partout comme un moyen de sortir dela crise financière de l'Etat qui s'était développé depuis la 2ndemoitié des années 1970. Autrement dit les Etats ont tentés de sedésengager d'un certain nombre de dépenses sur les collectivitéslocales. Ce désengagement s'est fait par un transfert de compétencede l'Etat vers les collectivités locales. Autrement dit, l'Etat neparvenant plus à assurer certaines fonctions, il les a confiés auxcollectivités locales.

Ce mouvement de décentralisation partait du principe que lescollectivités locales étant plus proche des citoyens, connaissaientmieux leurs besoins, cela permettait de minimiser les gaspillages.

Par ailleurs l'Etat a également transféré des moyens financiersnouveaux aux collectivités territoriales, via des impôts et desdotations. Les lois de décentralisation ont poursuivi le processusd'autonomie financière et ont notamment instituées une subvention(dotation) globale d'investissement.

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A également été institué un contrôle a posteriori des actes descollectivités locales. On contrôle leur régularité (à la différencedu contrôle a priori existant jusqu'alors).

b – La montée en puissance du pouvoir financier local

Les nouvelles fonctions accordées aux collectivités locales vont setraduire par une augmentation de leurs dépenses et de leurs recetteset les budgets locaux (on désigne les dépenses ici) représententmaintenant la moitié du budget de l'Etat. Les collectivités localesréalisent maintenant les ¾ des équipements publics civils (noninclus les dépenses de défense). En 1980 les collectivités localesne réalisaient que 10% de ces équipements.

Ces collectivités emploient près de 1 800 000 fonctionnaires. Ladette des collectivités locales représente environ 10% de la dettepublique locale. C'est à dire 1200 milliards d'euros.

Les transferts financiers de l'Etat vers les collectivités locales,c'est à dire les subventions et le transfert d'une part du produitd'impôt d'Etat représente actuellement plus de 90 milliards d'euros.Les impôts locaux représentent 5% du PIB (le taux de pression fiscalgénérale est à un peu plus de 43%). Ce pouvoir financier local estimportant.

c – Un pouvoir financier hétérogène

Le pouvoir financier local est constitué par les recettes et lesdépenses d'un très grand nombre de collectivités locales. Il y a unFrance 36700 communes, 100 départements, 26 régions. A cescollectivités territoriales, il faut ajouter ce que l'on appelle les« satellites des collectivités territoriales ». Il s'agitd'institutions auxquelles les collectivités territoriales ontdéléguées des pouvoirs, auxquels elles ont confiées la réalisationde certaines opérations. Par exemple il s'agit d'associations, ils'agit de sociétés d'économie mixte locale (sociétés dont lescapitaux sont à la fois privés et publics, les capitaux publicsétant détenus par les collectivités locales. On appelle maintenantces institutions des « entreprises publiques locales »), groupementd'intérêts publics ainsi que des groupements de communes...

Résultat : certaines collectivités locales peuvent êtreparticulièrement démembrées lorsqu'elles délèguent une grande partiede leurs compétences à d'autres institutions. Cette hétérogénéité engendre de très grandes inégalités entre lescollectivités locales.

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Par exemple, sur les 36700 communes, 3200 communes ont moins de 1000habitants, 1000 communes ont moins de 50 habitants. Cela pose desproblèmes de financement.

Pour les départements c'est un peu la même chose. La Lozère parexemple, 75 000 habitants, le département du Nord c'est 2 500 000habitants. Le phénomène concerne aussi les régions, ainsi la régionIle-de-France c'est 11, 5 millions d'habitants, la région Rhône-Alpes c'est plus de 6 millions et le Limousin c'est 700 000habitants.

Actuellement, on réfléchit à la réorganisation des structuresterritoriales. On pense à la réforme de la carte territoriale. Unecommission de réflexion est en place actuellement pour y réfléchir.

B – L'acte II de la réforme des financements1 – La révision constitutionnelle du 28 mars 2003

Il existe un principe constitutionnel important en ce qui concerneles collectivités territoriales. C'est le principe de libreadministration des collectivités territoriales. Ce principe quifigure à l'article 72 de la Constitution a fait l'objet d'unerévision en mars 2003.

Article 72 avant sa révision : « Les collectivités territorialess'administrent librement ».

Le gouvernement dépose un projet de révision en 2003 pour complétercet article. Des propositions de révision de cet article ont étéfaites à plusieurs reprises mais sans jamais aboutir. C'est legouvernement Raffarin, qui en 2003, propose un projet en révision del'article 72. Ce projet sera adopté.Les dispositions fondamentales de cette révision figurent àl'article 72-2 de la Constitution, elles inscrivent la libreadministration dans l'autonomie financière des collectivitéslocales.

Dispositions essentielles : « La libre administration des collectivités territorialesest garantie par des ressources dont celles ci [les collectivités] peuvent disposerlibrement. Elles peuvent recevoir toute ou partie des impositions de toute nature. La loi peutles autoriser à en fixer le taux [des impôts] et l'assiette dans les limites qu'elledétermine ».

En vertu de l'article 34 de la Constitution, c'est le parlement quidétient le pouvoir législatif et qui détient par conséquent le

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pouvoir de créer des impôts, d'en supprimer ou de modifier lesrègles d'imposition. Mais le parlement à la possibilité d'autoriserles collectivités territoriales à décider du taux d'imposition deleurs impôts mais également de décider de la base (l'assiette) deces impôts.

Les collectivités territoriales se sont déjà vu délégué le pouvoirde voter les taux et cela par la loi du 10 janvier 1980. En revancheaucune loi n'a encore autorisée les collectivités locales à fixerl'assiette de leurs impôts. Cette révision a ancré le principe delibre administration dans l'autonomie financière des collectivitésterritoriales.Par ailleurs, la loi de révision constitutionnelle indique égalementque les recettes fiscales et les autres ressources propres descollectivités territoriales doivent représenter pour chaquecatégorie de collectivités une part déterminante de leursressources.

On s'est longuement interrogé sur la notion de part déterminante.C'est une loi organique qui a permis de définir plus précisément lesmodalités d'application de cette révision constitutionnelle.

2 – La loi organique du 29 juillet 2004

La loi a notamment définie la notion de catégorie de collectivitésterritoriales ainsi que la notion de « ressources propres ».

a – Les catégories de collectivités territoriales

L'autonomie financière n'est pas reconnue à chaque collectivitéterritoriale. Cette autonomie est garantie à la catégorie à laquelleelles appartiennent. C'est-à-dire à l'ensemble des communes et àl'ensemble des départements et à l'ensemble des régions. Cette autonomie financière se définie par rapport à la notion deressources propres.

b – La notion de ressources propres

Les ressources propres comprennent le produit des impôts, le produitdes redevances pour services rendus, le produit des dons et deslegs, et également les produits financiers. Ne font pas partie des ressources propres, les emprunts et lessubventions.

Pour qu'il y ait autonomie financière, il faut que le montant desressources propres sur la totalité des ressources excepté l'emprunt.

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On divise les ressources propres sur les ressources totales saufl'emprunt. Il faut que ce rapport ne soit pas inférieur, pour chaquecatégorie de collectivités, au niveau constaté au moment de larévision constitutionnelle, soit en 2003. Un rapport est fourni chaque année au parlement. Ce rapport faitapparaître pour chaque catégorie de collectivités territoriales leratio des ressources propres sur l'ensemble des ressources horsemprunt. Si ce ratio est inférieur à celui de 2003, des dispositionsseront prises dans le cadre de la loi finances.

2 – La réforme des finances de l'Etat et la responsabilisation des acteurs publics nationaux

Cette réforme est instituée par une loi organique « Loi organiquerelative aux lois de finances » du 1er août 2001. Cette loi estentrée complètement en application depuis le 1er janvier 2006. Ilfaut insister sur le fait que de la même manière que pour lescollectivités territoriale, cette réforme financière ne procède(concerne) pas de simples ajustements technique. Il s'agit d'uneimportante réforme de l'Etat. C'est une réforme financière qui a desconséquences très importantes sur d'une part l'organisationadministrative et d'autre part d'une réforme de la répartition, dela distribution des pouvoirs politiques.

Il ne s'agit pas non plus d'un phénomène franco-français. Cephénomène concerne la majorité des Etats au niveau international. Ils'agit par conséquent d'un processus lourd, d'une tendance lourdedont la caractéristique est celle d'un rapprochement de la gestionpublique vers la gestion privée. Il s'agit d'adapter les méthodes de gestion utilisée par lesentreprises à la gestion publique. L'objectif est de rendre lesecteur public plus performant, de l'inscrire dans ce que l'onappelle « une culture de la performance ».

A – Les facteurs de la réforme1 – Un nouvel environnement théorique

Le droit budgétaire et comptable de l'Etat était défini jusqu'à laréforme de 2001 par une ordonnance qui était l'ordonnance organiquedu 2 janvier 1959. Ce texte avait été pris dans un contexte généralqui était dominé d'un point de vue théorique par les conceptionskeynésiennes. Ce texte s'est trouvé confronté à partir des années 1990 à uncontexte général qui s'était complètement transformé etparticulièrement du point de vue théorique. Des conceptionslibérales classiques avaient remplacées les thèses keynésiennes,autrement dit on substituait l'idée que le marché économique ne

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devait pas subir d'interventions de l'Etat à l'idée que ce marchédevait être régulé par l'Etat.

On est passé ainsi d'une sorte de mystique de l'Etat à une mystiquedu marché.

2 – La crise financière de l'Etat

Avec la crise économique de la fin des années 1970, les dépensespubliques ont augmenté et les recettes publiques ont stagné, et l'ons'est alors demandé de quelle manière on pouvait rééquilibrer lesdépenses et les recettes et éviter ainsi d'emprunter. Dans la mesureoù l'on ne pouvait plus augmenter les impôts, on s'est tourné versla maîtrise, vers la recherche de la maîtrise des dépensespubliques. On a cherché les moyens de mieux contrôler l'évolutiondes dépenses et par conséquent de mieux gérer le secteur public. Onessaye de développer au sein du secteur public, une culture degestion.

3 – Les facteurs politiques

Avec la crise des années 1970, l'opinion a changé, les mentalitésont changé et les contribuables citoyens ont commencé à s'intéresserplus précisément à l'utilisation qui était faite de l'impôt. Les parlementaires sensibles aux mouvements d'opinion ont pris lerelais et ont exprimés leur volonté de voir s'accroître leurspouvoirs financiers. Ils ont réclamés un pouvoir d'initiative plusimportant mais également un pouvoir de contrôle de l'exécution dubudget de l'Etat.

4 – Le prolongement du processus de modernisation de la gestion publique locale

Les collectivités locales depuis la fin des années 1970 étaientengagées dans un processus de responsabilisation en matièrefinancière. Le seul processus s'est notamment traduit par le faitque certaines collectivités locales ont expérimenté une adaptationdes méthodes de gestion de l'entreprise à leur propre gestion. Ellesont par exemple développé l'analyse financière, elles ont développédes méthodes de contrôle de gestion en vigueur dans les entreprises.A noter qu’à partir de 1997, la comptabilité des communes et ensuitecelle des autres collectivités territoriales a été totalementtransformée, réformée. Cette comptabilité a été calquée sur celledes entreprises.

5 – Le poids de l'environnement international

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Depuis les années 1980, certains Etats anglo-saxons s'étaient déjàengagés dans une réforme de leur gestion en prenant modèle surl'entreprise. Par ailleurs, des institutions internationales, comme le FMI oùencore l'OCDE ont, à partir de la seconde moitié des années 1980 etsurtout à partir des années 1990, proposées des pratiques de gestionfondées sur la transparence des finances publiques. Enfin, l'Union Européenne a également incité les Etats à gérer leursfinances de manière plus « rationnelle ».

B – La philosophie de la réforme

Celle de 2001 :Elle est caractérisée par le fait que, sont associées 2 logiques :une économique (logique de gestion) et une logique politique(consiste à accroître les pouvoirs du parlement). Par conséquent,sont présentes, dans cette réforme, 2 cultures : une de gestion etune démocratique. C'est l'association de ces 2 cultures qu'ilconvient de qualifier de « nouvelle gouvernance financièrepublique. »

Cette nouvelle gouvernance financière publique a aussi pour objectifde développer au sein de l'Etat les capacités d'expertise desgestionnaires et de développer des techniques d'évaluation de leurperformance.

1 – L'axe politique : accroissement des pouvoirs du parlement

La réforme (de 2001) a pour objectif d'imposer plus de transparencedans le système financier public ; il s'agit d'améliorer lalisibilité du budget de l'Etat et de ses comptes. On a simplifié laprésentation du budget.

Cet aspect de lisibilité concerne aussi bien les parlementaires queles citoyens.

Second aspect politique : Le pouvoir d'initiative parlementaire enmatière financière. Cet aspect a été augmenté par un accroissementde leur pouvoir d'amender le projet de loi de finance présenté parle gouvernement. Ce droit d'amendement des parlementaires en matièrefinancière a été considérablement limité par la Constitution de1958. La réforme de 2001 a accru ce pouvoir d'amendement.

Troisième aspect : La LOLF (loi organique relative aux lois definances de 2001) institue au profit du parlement la possibilité decontrôler l'exécution du budget.

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2 – L'axe économique

Il consiste à moderniser la gestion publique, la gestion de l'Etat.A partir du principe que 2 éléments sont essentiels pour bien gérer.D'une part, il est indispensable que les budgets et les comptespublics soient transparents. On ne peut pas gérer efficacement dansl'opacité. Cet objectif de transparence est aussi un objectifpolitique.

Egalement, il y a la performance. La LOLF institutionnalise lecontrôle de gestion et fait du critère de performance un critère debonne gestion. L'action des gestionnaires sera évaluée sur la based'indicateurs que l'on appelle des indicateurs de résultats ouencore indicateurs de performance.

Par conséquent, on généralise au sein du secteur public uneresponsabilisation des acteurs. Cette responsabilisation consiste àleur donner une large liberté pour atteindre les objectifs qui leuron été fixé. En contrepartie, un contrôle a posteriori est mis enplace. Il consiste à vérifier si les résultats, les objectifs ontbien été atteints.

C – Les acteurs à l'origine de la réforme

Cette réforme relève à l'origine d'une initiative parlementaire. Cesont les acteurs politiques qui sont les initiateurs de cetteréforme. Ce sont ensuite les administrations financières qui ont étéconcernées et qui ont eu en charge de construire très concrètementl'architecture de la réforme. Ces mécanismes dans un deuxième tempsconcernent toutes les administrations publiques.

A la différence de ce qui s'était passé autrefois, l'initiative dela réforme est venue du parlement ; autrefois les textes importantsen matière financière ont tous été le produit de l'exécutif. Ledéclenchement du processus de réforme s'est fait en 1998 àl'initiative du président de l'assemblée nationale (Laurent Fabius)qui a institué un groupe de travail chargé de réfléchir surl'efficacité de la dépense publique. Le rapporteur de ce groupe detravail était Didier Migaud (actuellement président de la commissionfinances de l'AN). Le 16 mars 2000, le 1er ministre, Lionel Jospin,dans une intervention à la TV explique qu'il faut réformerl'ordonnance du 2 janvier 1959.

Le 11 juillet 2000, Didier Migaud dépose une proposition de loivisant à réformer l'ordonnance de 1959. Une commission spéciale

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chargée d'examiner cette proposition est installée le 19 octobre2000 par le président de l’Assemblée Nationale. Le rapporteur decette commission est Didier Migaud.

De son coté, la commission des finances du Sénat alors présidée parle sénateur Alain Lambert (UMP) se place dans une positionconstructive. Le Sénat ne dépose pas de texte concurrent à celui del’Assemblée Nationale. Il se contente de proposer des modificationsqui sont discutées par les 2 commissions du Sénat et de l’AssembléeNationale. C'est cette attitude qui va permettre que la réforme soitadoptée.

Ensuite, viens la mise en œuvre de la réforme. Cette mise en œuvre aconduit à créer une administration spéciale au sein du ministère desfinances. Cette administration s'appelait la « direction de laréforme budgétaire ». Elle a été supprimée le 1er janvier 2006lorsqu'a été mise en place dans sa totalité la réforme budgétaire. La direction de la réforme budgétaire est remplacée par l'actuelledirection générale de la modernisation de l'Etat. Cette direction separtage maintenant le pilotage, la mise en œuvre, de la réformebudgétaire avec une autre administration qui est la direction dubudget.

D – La nouvelle présentation du budget ou la nouvelle architecture budgétaire

Elle est en vigueur depuis le budget pour 2006. La présentationactuelle se fait sous la forme d’objectifs. Il existe des objectifsmajeurs appelés des missions, comme par exemple la mission culture,la mission action extérieure de l’Etat. Ces missions représententles grandes politiques publiques décidées par l’Etat. Pour le projetde loi de finances pour 2009 (projet de budget en réalité),quarante-sept missions ont été prévues. Les missions sontgénéralement au nombre d’environ cinquante. Ces grands objectifs, les missions, sont ensuite déclinés en sous-objectifs qu’on appelle des programmes. Pour le budget 2009 il estprévu cent soixante-dix programmes. Ensuite, les programmes sonteux-mêmes divisés en sous-objectifs qu’on appelle des actions, il enest prévu cinq cent soixante-dix-neuf.

Cette nouvelle architecture procède de ce que l’on appelle unelogique de résultats. Elle consiste, d’une part, à présenter lebudget sous la forme de résultats à atteindre et, d’autre part,d’évaluer si ces résultats ont bien été atteints. Cette conception est différente à celle en vigueur antérieurement à2005 et qui consistait simplement à attribuer des moyens auxadministrations pour qu’elles puissent fonctionner. On qualifie ce

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dernier dispositif de logique de moyens. Par conséquent, alors quejusqu’en 2005 le Parlement adoptait un budget de moyens, il adoptemaintenant un budget de résultats.

Deuxième sous partie   : Les finances publiques et la prise de décision politique

Chapitre 1   : L’élaboration et l’adoption du budget de l’Etat, la prise de décision budgétaire

Le processus de prise de décision budgétaire est à la fois techniqueet politique et fait en outre intervenir de nombreux acteurs. Chacunde ces acteurs poursuit sa propre logique, ses propres objectifs.Par ailleurs, il faut remarquer que pendant ces trente dernièresannées, les procédures d’élaboration et d’adoption du budget del’Etat se sont considérablement transformées. On a notammentdécloisonné les rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoirlégislatif. Ces deux pouvoirs qui étaient autrefois totalementséparés au cours du processus de préparation du budget puis de sonadoption, ont été récemment associés et notamment en ce qui concernel’élaboration du budget. De plus, les budgets s’inscriventdorénavant dans une logique stratégique.

Section 1 : L’élaboration de la loi de finance La préparation du budget est un processus tout à fait pragmatiquequi évolue selon les circonstances. Les textes, et notamment laLOLF, sont peu prolixes en ce qui concerne la préparation du budget.L’article 38 de la LOLF (loi organique relative à la loi de financesd’août 2001) dispose que « sous l’autorité du Premier ministre, le ministre chargédes finances prépare les projets de loi qui sont délibérés en Conseil des ministres ». Parconséquent, c’est l’exécutif qui prépare le budget. On peutdistinguer, dans l’élaboration de la loi de finance, quatre phasesessentielles.

- Une phase de détermination d’une stratégie budgétaire cohérentedans un cadre pluriannuel (cela n’est valable que depuis 2009) ;- Une phase de définition d’une discipline budgétaire et deperspective par le dialogue et la collégialité, notamment entreministères ;- Une phase de règlement des conflits entre ministères par unarbitrage politique ;- La mise au point définitive du projet de budget (pas de budgettant que le projet n’est pas adopté par le Parlement), qui seracomme tout projet de loi soumis préalablement à l’examen du Conseild'Etat.

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I – Les institutions et les procédures d’aide à la décision

Il existe des procédures techniques, mais également des acteurspolitiques ou sociaux.

A – L’aide technique à la décision

Elle relève tout d’abord des administrations financières maiségalement d’un comité interministériel.

1 – Les administrations financières

N.B : Les administrations financières sont des administrations quiappartiennent au ministère des finances. Les administrations dont ilva être question appartiennent au ministère du budget, des comptespublics et de la fonction publique.

La préparation du budget fait l’objet d’une série de mises au pointsuccessives. Dans ce processus, une administration financière tientune place particulière ; il s'agit de la Direction du budget. LaDirection du budget n’est pas seule, et est aidée par d’autresadministrations financières.

a – La Direction du budget

Le ministère des finances fait un travail de prévision qui relève dela Direction du budget. Cette Direction comporte des effectifslimités (environ trois cent personnes). Cependant, il s'agit del’une des administrations les plus stratégiques de ce ministère. Safonction est d’autant plus importante qu’en dehors de la préparationdu budget de l’Etat, elle participe également à la préparation de laloi de financement de la sécurité sociale.

N.B : Rappelons qu’il existe trois catégories au sein des financespubliques. Les finances de l’Etat, les finances de la sécuritésociale et celles de collectivités territoriales.

Par ailleurs, la Direction du budget a également en charge la miseen application de la LOLF ainsi que de toutes les mesures qui s’ensont suivies. En ce qui concerne l’élaboration de la loi de finance,la Direction du budget doit d’abord faire des estimations dedépenses et de recettes et doit faire une projection qui s’inscritdans la programmation pluriannuelle qui doit être transmise chaqueannée à la Commission européenne dans le cadre de ce qu’on appellele Pacte de stabilité et de croissance. Par ailleurs, la Directiondu budget effectue également une analyse rétrospective, c'est-à-dire

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une analyse des résultats précédemment obtenus. Elle évalue si lesobjectifs qui avaient été fixés ont été ou non atteints. Elleprépare enfin un budget à moyen terme, c'est-à-dire sur trois ans,et cela depuis la préparation de la loi de finance pour 2009.

Toutes ces opérations sont délicates car au moment où elles sonteffectuées on ne connaît pas nécessairement de manière exacte lesdépenses et les recettes à venir. On ne peut faire que desestimations. Or, ces estimations sont susceptibles d’être remises enquestion par un changement de conjoncture économique. Pour établirces estimations, on s’appuie notamment sur une évaluation du taux decroissance pour l’année à venir. Or, et c’est le cas aujourd’hui, ilarrive que ce taux doive être réévalué à la baise.

Par exemple, le projet de loi de finance pour 2009 était bâti sur untaux de croissance de 1,5%. Cependant, il s’avère que ce tauxdevrait être de l’ordre de 0,1%.

D’une manière générale, si les estimations ne sont pas exactes,c’est tout le projet de budget ainsi que tout le raisonnementbudgétaire qui s’écroule dans un atroce fracas et se révèle inexact.On situe en effet le projet de budget dans un ensemble d’hypothèseséconomiques comme par exemple le taux de croissance mais aussi lestaux d’intérêts bancaires ou encore l’inflation. Toutes ces donnéeséconomiques sont fournies à la Direction du budget par une autreadministration financière qui s’appelle la Direction du Trésor et dela politique économique.

b – Les autres administrations financières

En dehors de la Direction du Trésor et de la politique économique,la Direction du budget se fait aider par d’autres administrationsfinancières. Elle reçoit par exemple des informations de laDirection générale des finances publiques qui lui fournit desdonnées sur la fiscalité. La DGFIP est une administration fiscalequi assoit et recouvre les impôts. Elle reçoit également une aide dela Direction générale de la modernisation de l’Etat ou encore de laDirection de l’institut national des statistiques et étudeséconomiques.

2 – Le Comité interministériel d’audit des programmes (CIAP)

Le CIAP a pour fonction de vérifier pour le compte du gouvernementsi les informations qui sont jointes au projet de loi de financesont pertinentes. Il analyse notamment la pertinence des programmeset des indicateurs de résultats qui leur sont associés et produit un

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rapport et donne un avis pour les programmes des différentsministères.

Le rapport et l’avis sont transmis au ministère concerné ainsiqu’aux commissions des finances de l’Assemblée Nationale et duSénat, ainsi qu’à la Cour des comptes. Par ailleurs le CIAP produitun rapport public d’activité tous les ans. Il contient desrecommandations ainsi que les remarques faites par le Comitéinterministériel d’audit des programmes sur les programmes qui ontété audités (évalués).

Le CIAP a été mis en place le 1er octobre 2002, il est composé dequinze membres qui appartiennent tous à des corps d’inspection et decontrôle des différents ministères. Enfin, le CIAP est présidé parun inspecteur général des finances.

B – L’aide politique et sociale à la décision1 – Le débat d’orientation budgétaire au Parlement

Le débat d’orientation budgétaire (DOB) est une procédure consistantpour le gouvernement à consulter (avis) le parlement sur lesorientations envisagées pour le budget. Cette idée n’est pasnouvelle. Une première expérience d’un tel débat avait été menée en1990 par le gouvernement Rocard. Toutefois, il a fallu attendre 1996pour que cette expérimentation soit reprise. C’est le gouvernementJuppé qui l’a utilisé pour la préparation du budget pour 1997. Iln’y eut pas de débat d’orientation budgétaire l’année suivante dufait des élections. Le dispositif fut repris en 1998 puis normalisépar la LOLF le 1er août 2001 et mis en application dès 2003.Les collectivités territoriales se livraient déjà à cet exercicedepuis une loi du 6 février 1992. En effet, les collectivitésterritoriales doivent organiser un débat sur les orientationsbudgétaires dans les deux mois qui précèdent l’examen du budget parle Conseil de la collectivité.

Le débat d’orientation budgétaire consiste à organiser uneconsultation du Parlement sur les choix envisagés par legouvernement. Cette procédure s’inscrit dans la volonté de mettre enplace un processus homogène ininterrompu de décision budgétaire,c'est-à-dire d’un processus qui intègre la préparation et l’adoptiondu budget et qui de la sorte atténue la séparation en matièrebudgétaire entre l’exécutif et le législatif.

Le débat d’orientation budgétaire n’est pas un débat général. Lesparlementaires disposent d’éléments techniques tels qu’un rapport dugouvernement, un rapport de la cour de comptes, des informations

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données par les rapporteurs généraux des commissions des finances dechaque assemblée. Cela permet au parlement d’avoir une positionconstructive, c'est-à-dire de faire des propositions augouvernement. Le parlement a la possibilité de débattre de laprésentation des programmes proposés par le gouvernement, ce quipermet au parlement de faire des propositions relatives auxpolitiques publiques envisagées. D’autre part, le débatd’orientation budgétaire a lieu au printemps, c'est-à-dire à unepériode de folle jovialité où les parlementaires ont la possibilitéde se faire une opinion sur l’architecture budgétaire présentée parle gouvernement, sur les objectifs mais aussi sur les indicateurs etle Parlement peut ainsi, en donnant son avis, proposer desmodifications qui pourront ou non être retenues par le gouvernement.

2 – La conférence nationale des finances publiques et le Conseil d’orientation des financespubliques

Il est essentiel d’avoir à l’esprit qu’il existe trois composantes,et par conséquent trois types d’acteurs, dans les financespubliques. Il s'agit des finances de l’Etat d’une part, des financesde la sécurité sociale d’autre part et enfin des finances descollectivités territoriales. La maîtrise des finances publiquessuppose de concevoir de manière intégrée ces trois catégories. Onessaie depuis ces dernières années d’instituer un réseau composé destrois catégories d’acteurs concernés. On a mis en place uneinstitution paritaire dont l’objectif est de réguler par laconcertation les dépenses publiques. En effet, a été lancé le 11janvier 2006, par le Premier ministre, ce que l’on appelle laConférence nationale des finances publiques. Cette institution estrégie par un décret du 5 mai 2006. Elle réunit chaque année lesreprésentants des trois grandes composantes des finances publiques.L’objectif est de proposer les moyens de maitriser les dépensespubliques et notamment la dette publique.

A cette institution s’ajoute le Conseil d’orientation des financespubliques. Il est placé auprès du Premier ministre et est composédes ministres chargés de l’économie et des finances, du budget, dela sécurité sociale, et des relations avec les collectivitésterritoriales. S’ajoutent à ces personnes des élus nationaux(députés, sénateurs), locaux, ainsi que des représentants desorganismes de sécurité sociale. La fonction de ce conseil consiste àanalyser la situation des finances publiques, de proposer dessolutions pour les maitriser, et de préparer les travaux de laConférence nationale des finances publiques. Ce Conseil remet ainsichaque année au Premier ministre, après l’adoption de la loi de

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finance de l’Etat, et après l’adoption de la loi de financement dela sécurité sociale, un rapport qui est rendu public.

Avec ces institutions on est en présence d’un embryon del’institution future de régulation des finances publiques, d’unemise en cohérence des décisions prises par chaque catégoried’acteurs

II – Les différentes étapes de la préparation du budget de l’Etat

Ce qui caractérise la préparation du budget de l’Etat c’est d’unepart une conception stratégique et d’autre part la volontéd’associer les différents acteurs.

A – La phase de détermination d’une stratégie budgétaire dans un cadre pluriannuel

Dès le mois de décembre de l’année N-1 (décembre 2009 pour 2011 parexemple) ont lieu des échanges entre la direction du budget et lesministères au sujet des orientations de l’année N+1. Ces orientations sont présentées à un collège des directeursfinanciers de l’Etat. Ensuite, le coup d’envoi est donné par lepouvoir politique. Le Premier ministre adresse à chaque ministre undocument appelé « lettre de cadrage » (pour la préparation du budget2009, cette lettre a été envoyée aux ministres le 11 février 2008).

Cette lettre de cadrage fixe le cadre de la mise en œuvre d’unbudget pluriannuel. Elle indique aux ministres à qui elle a étéenvoyée les normes qu’ils doivent respecter en matière de dépenses.Autrement dit, cette lettre donne des instructions à chaque ministrepour élaborer son budget. Par exemple, pour la préparation du budget2009 la lettre impose aux ministres une évolution de leurs dépensesqui ne doit pas dépasser le taux d’inflation. Le taux retenu pour2009 a été de 2%. De février à mai ont lieu des réunions qui ontpour objectif de déterminer ce que l’on appelle les perspectivesbudgétaires à moyen terme, c'est-à-dire les économies mais aussi lesréformes qui doivent être réalisées sur les trois années à venir.

1 – Le cadre général de la stratégie budgétaire

La stratégie budgétaire est organisée autour de deux dispositifs.D’une part la révision générale des politiques publiques, et d’autrepart la programmation budgétaire pluriannuelle.

a – La révision générale des politiques publiques (RGPP)

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Elle consiste à mettre à plat le fonctionnement de l’ensemble dusecteur public. C’est un dispositif qui a été présenté en Conseildes ministres par le Premier ministre le 20 juin 2007 et qui a étéofficiellement lancé le 10 juillet 2007. La RGPP consiste à faire untravail d’audit (évaluation) des politiques publiques et de leurmise en œuvre par les différents ministères. C’est un dispositif quiexiste depuis de nombreuses années dans certains pays. L’objectif est de rationaliser l’action administrative et de fairedes économies. Par exemple, en 1993, le Canada était confronté à undéficit d’environ 6% de son PIB, sa dette était de 70% du PIB. Ladécision a alors été prise de ramener ce déficit à 3% en trois ans.Le Canada a donc mis en œuvre, en 1994, une révision générale de sesdépenses publiques et tous les programmes budgétaires ont étéévalués, audités. Des mesures furent prises et la dette fut ramenéeen 1998 à 65% du PIB. Les dépenses ont diminué de 17.000.000.000 dedollars. Le Royaume-Uni s’est engagé dans une même pratique en 1998.

Le dispositif de pilotage de la RGPP se caractérise par une trèsforte implication des décideurs politiques. En effet, la RGPP estpilotée par un Conseil de modernisation des politiques publiques. Ceconseil est présidé par le président de la République et est composéde l’ensemble des ministres. Ce conseil décide des réformes quidoivent être mises en œuvre. Une autre caractéristique réside dansle fait que le travail d’expertise, d’audit, est réalisé par desétudes composées d’experts publics et d’experts privés. En ce quiconcerne ces experts publics, il s'agit de hauts fonctionnaires quiappartiennent à des corps d’inspection. Du côté du secteur privé, onfait appel à des consultants, c'est-à-dire à des cabinets privés.

On peut encore ajouter que les équipes présentent leurs résultats àun comité de suivi de la RGPP. La présence des décideurs politiquesest également très forte dans ce comité. En effet, le comité estcoprésidé par le secrétaire général de l’Elysée et par le directeurde cabinet du Premier ministre. Sont membres de ce comité, leministre du budget, le secrétaire d’Etat à la prospective et àl’évaluation des politiques publiques, sont également membres lesministres concernés par les comptes publics, les rapporteursgénéraux de la commission des finances de chacune des assemblées. Enfont également partie le receveur général des finances et leprésident du conseil d’administration de la banque BNP Paribas (caril a été l’auteur d’un rapport sensationnel sur la dette publique).

En plus de cela, les équipes qui auditent bénéficient du soutien dela Direction du budget, de la Direction générale de la modernisation

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de l’Etat et également du cabinet du ministre du budget, des comptespublics et de la fonction publique.

Une première réunion du Conseil de modernisation s’est tenue le 12décembre 2007. Elle a donné lieu à un examen des scenarii possiblespour transformer les politiques publiques. Une seconde réunion a eulieu le 4 avril 2008 au cours de laquelle ont été prises desdécisions de réorganisation des administrations à réaliser sur lapériode 2009-2111. Une troisième réunion de ce Conseil s’est tenuele 11 juin 2008. Au total, ce sont plus de 300 décisions deréorganisation qui ont été prises qui concernent les missionsécologiques, justice, agriculture, culture recherche et enseignementsupérieur, etc.

On prévoit de réorganiser cela sur trois années. On est donc déjàdans le cadre d’une organisation pluriannuelle. Il faut de plusrelier la RGPP qui a pour objectif de faire des économies avec laprogrammation pluriannuelle. La RGPP est en relation directe avec lamise en place, depuis le projet de budget pour 2009, d’uneprogrammation budgétaire pluriannuelle. b – La programmation budgétaire pluriannuelle

Cf. également Chapitre IV de la deuxième sous-partie de la deuxièmepartie. La programmation budgétaire pluriannuelle a été officiellementannoncée par le président de la République le 12 décembre 2007 lorsd’un Conseil de modernisation des politiques publiques. Cetteprogrammation a été mise en œuvre la première fois lors del’élaboration du budget pour 2009. C’est une programmation sur troisans. Cette programmation ne remet pas en cause un principe de basedu droit budgétaire de l’annualité budgétaire. Cela signifie que deslois de finance continueront à être adoptées chaque année.Simplement, ces lois de finance annuelles s’inscrivent maintenantdans une programmation pluriannuelle de trois ans.

2 – Les conférences performances

Les réunions qualifiées de conférences performances ont lieu à lafin du mois de mars. Elles regroupent les services de différentsministères. Y participe également la direction du budget. L’objectifde ces conférences est de déterminer des objectifs et desindicateurs de résultat (appelés également « indicateurs deperformance ») pour le prochain budget. Ces objectifs et indicateurs

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seront transmis aux parlementaires qui en disposeront au moment dudébat d’orientation budgétaire (juin).

3 – Les conférences de budgétisation Au mois d’avril ou de mai, après que des décisions aient été prisesdans le cadre de la révision générale des politiques publiques(RGPP), se tiennent des réunions appelées conférences debudgétisation. Y participent la direction du budget et lesreprésentants des différents ministères. Ces réunions ont pour objetd’examiner les demandes de crédits et les demandes d’effectifsfaites par les ministères.

B – Les arbitrages politiques1 – Les réunions de restitution

A la suite des différentes conférences, le ministre du budget, descomptes publics et de la fonction publique organise des réunionsappelées réunions de restitution qui ont lieu avec chaque ministre.L’objectif est d’étudier l’ensemble des propositions et d’arbitrerles différents pouvant exister entre les ministres et la directiondu budget. Les arbitrages sont ensuite rendus par le Premier ministre. Une fois ce travail d’élaboration du budget et de discussion autourdes problèmes, les ministres vont recevoir une « lettre-plafond ».

2 – Les lettres-plafonds

A la fin du mois de juin, dans la première quinzaine de juillet, lePremier ministre adresse à chaque ministre une lettre qui, d’unepart, les plafonds de crédit du ministère et, d’autre part, lesréformes structurelles qui doivent être effectuées par le ministèreen question.

C – La finalisation du projet de loi de finance

Le projet de loi de finance va être finalisé jusqu’à la fin du moisde septembre. Il va être soumis en septembre au Conseil desministres. Une fois le projet adopté par le Conseil des ministres,il est transmis à l’Assemblée Nationale. Cette transmission doit se faire au plus tard le 1er mardi d’octobre.

Section 2 : L’adoption de la loi de finances

C’est le parlement qui discute puis adopte le projet de loi definances.

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I – L’examen préalable du projet par les commissions des finances

Le projet de loi de finance est d’abord examiné par les commissionsde finances de chacune des assemblées. Le rapporteur général dechaque commission produit un rapport sur ce projet. Par ailleurs,des rapporteurs appelés « rapporteurs spéciaux » produisent desrapports détaillés sur les différentes catégories de dépenses. Les commissions des finances facilitent donc le travail desassemblées.

II – La discussion et l’adoption du budgetA – Les délais1 – La procédure de droit commun

Les délais sont fixés par l’article 47 de la Constitution de 1958 etpar les articles 40 et 45 de la LOLF du 1er août 2001. Le projet deloi de finance doit être déposé sur le bureau de l’AssembléeNationale au plus tard le 1er mardi d’octobre. A partir de là, leParlement dispose d’un délai de soixante-dix jours pour adopter lebudget. L’Assemblée Nationale dispose de quarante jours pourexaminer le projet en première lecture. Si elle ne respecte pas cedélai, le gouvernement à la possibilité de saisir le Sénat du texteinitial (avec éventuellement les amendements déjà votés). Dans cecas là, le Sénat devra statuer dans un délai de quinze jours. Incidemment, si les délais sont respectés par l’Assemblée Nationale,le Sénat dispose de vingt jours en première lecture. Ensuite, c’estla navette normale qui s’effectue.

2 – Les procédures particulières

Les procédures d’urgence.La procédure d’urgence de l’article 45 de la Constitution peut êtreutilisée. Cette procédure est de droit lorsque le texte n’a pas puêtre adopté après deux lectures par chaque assemblée. Le Premier ministre demande la réunion d’une commission mixteparitaire, etc. Lorsque le projet de loi de finance n’a pas été déposé en tempsutile, le gouvernement demande d’urgence au Parlement l’autorisationde percevoir les impôts (article 47 de la Constitution).

B – Le déroulement de la discussion

L’examen du projet de loi de finance en séance publique se fait dansun ordre précis.

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1 – L’ordre de priorité : l’examen des deux parties de la loi de finance

Le projet de loi de finance comprend deux parties. D’une part lesrecettes, et d’autre part les dépenses. L’article 42 de la LOLFprévoit que la deuxième partie de la loi de finance ne peut êtremise en discussion si la première partie n’a pas préalablement étéadoptée.

2 – L’exercice du droit d’amendement

Le droit d’amender le projet de loi de finance soumis au Parlementpar le gouvernement est excessivement réduit. Effectivement, selonl’article 40 de la Constitution, les amendements ne sont pasrecevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence unediminution des ressources ou une aggravation des charges.

Un compromis a alors été prévu dans le cadre de la LOLF. La loiorganique relative aux lois de finance du 1er août 2001 a permis uneextension du droit d’amendement des parlementaires. Elle a permisaux parlementaires de modifier le projet du gouvernement sans pourautant augmenter les crédits prévus dans ce projet.

La structure actuelle du budget de l’Etat se présente sous la formede missions qui sont des objectifs généraux et qui représentent lespolitiques publiques qu’entend mener l’Etat. Le projet de loi definance pour 2009 prévoit quarante-sept missions. Elles sont ensuitedéclinées en cent soixante-dix programmes, eux-mêmes divisés en six-cents soixante-dix-neuf sous-objectifs appelés actions.

Les parlementaires doivent appliquer strictement l’article 40 auniveau des missions, ce qui signifie que le plafond de crédit de lamission ne peut pas être augmenté. Néanmoins, les parlementaires ontdorénavant la possibilité de modifier les programmes à l’intérieurd’une mission. Ils ont la possibilité de supprimer un problème etd’en transférer les crédits sur les autres programmes à l’intérieurde la même mission ou de créer un nouveau programme. Ils ontégalement la possibilité de transférer les crédits d’un programmevers un ou plusieurs autres programmes.

Les parlementaires peuvent choisir de répartir autrement les créditsentre programmes, mais ils ne peuvent jamais dépasser le montant decrédit attribué à la mission. Une mission doit comporter au moinsdeux programmes, il faut donc que les parlementaires laissent deuxprogrammes.

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Le président de la commission des finances du Sénat et celui del’Assemblée Nationale ont publié au printemps, dans le journal LeMonde, un article dans lequel ils estiment que l’article 40 de laConstitution pourrait faire l’objet d’une révision allant dans lesens d’une plus grande liberté des parlementaires en matièred’amendement du projet de loi de finance.

Chapitre 2   : Le contrôle et l’évaluation de l’exécution des budgets publics

Section 1 : Les contrôles administratifs et juridictionnels de l’exécution des budgets publics

I – Le principe de la séparation ordonnateur comptable

La séparation entre l’ordonnateur et le comptable constitue unprincipe essentiel du droit public financier en France. On sépare eneffet la personne qui engage une dépense et qui donne l’ordre depayer la dépense de celle qui effectue matériellement le paiement dela dépense. La première personne s’appelle l’ordonnateur et laseconde le comptable. Ce principe a été mis en place pour mieuxcontrôler l’utilisation de l’argent public.

Il s’applique également en ce qui concerne les recettes. En effet,celui qui donne l’ordre de percevoir une recette n’est pas le mêmeque celui qui encaisse matériellement la recette. On sépare par conséquent celui qui ordonne et celui qui exécute.

Les ordonnateurs ne constituent pas un corps particuliers defonctionnaires. Il peut s’agir de fonctionnaires mais, dans lamajorité des cas, ce sont des décideurs politiques comme par exempleles ministres ou encore les présidents des assemblées. Il existe différentes catégories d’ordonnateurs.

1 – Les ordonnateurs principaux

Ils sont pour le budget de l’Etat. C’est le cas par exemple desministres pour leur ministère, le président du Conseil général pourson département ou encore le maire pour sa commune.

2 – Les ordonnateurs secondaires

Les ordonnateurs principaux n’ont pas la possibilité d’exécutertoutes les opérations qui figurent à leur budget. Ils se font aiderpar des ordonnateurs secondaires. C’est le cas par exemple dupréfet, qui est ordonnateur secondaire pour ce qui concerne lebudget de l’Etat au niveau du département pour les administrationsdéconcentrées.

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3 – Les ordonnateurs délégués

Ce sont des fonctionnaires auxquels les ordonnateurs principaux ousecondaires ont accordé une délégation de signature.

Les comptables publics ne sont pas des décideurs, ils exécutent desdécisions qui sont prises par les ordonnateurs. Ils ont une doublefonction. Une fonction de contrôle tout d’abord. En effet, l’ordredonné par l’ordonnateur fait l’objet d’un contrôle de régularitétrès minutieux de la part du comptable public et si le comptableconstate que l’ordre est irrégulier, il refusera de l’exécuter sinonil engagerait sa responsabilité propre.

Une fois effectué ce contrôle, le comptable public effectue lesopérations de paiement ou de recouvrement de la recette etenregistre ces opérations en comptabilité.

Le comptable public encourt un certain nombre de sanctions s’ilcommet des irrégularités. Ces sanctions peuvent être pénales en casde détournement de fonds, disciplinaires en cas de manquement auxobligations professionnelles, et pécuniaires en cas d’irrégularitéde sa gestion. Par exemple, le comptable peut être déclaréresponsable sur ses biens personnels des sommes manquant dans sacomptabilité.

N.B : Les comptables publics appartiennent, dans leur grandemajorité, à une administration financière qui fait partie duministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique,qui s’appelle la Direction générale des finances publiques. Ilsopèrent un contrôle administratif de base (premier type de contrôleadministratif effectué).

II – Les contrôles administratifsA – Le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel

Dans le but de rapprocher les comptables publics et lesgestionnaires des administrations des différents ministères, ont étécréés des départements comptables ministériels au sein desministères. Il s'agit de comptables publics qui exercent leursfonctions au sein du ministère. Ils ne se trouvent pas, commeautrefois, dans un bureau du ministère des finances. Ces comptables ont pour fonction de tenir la comptabilité duministère, ce qui n’était pas tout à fait le cas auparavant.

B – L’inspection générale des finances

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L’inspection générale des finances est un corps de hautsfonctionnaires, créé sous la Restauration. Leur fonction estd’effectuer des contrôles financiers des comptes de tous lescomptables publics. Ils contrôlent également les comptesd’institutions privées qui bénéficient de subventions publiques. Uneautre de leur fonction consiste dans la production de rapportsconcernant l’évaluation des politiques publiques.

C – Le contrôle général, économique et financier

Ce service a été créé pour réaliser trois fonctions. - Le contrôle de la régularité de l’exécution du budget de l’Etat etcontrôle des entreprises et des organismes liés à l’Etat. -La mesure de la performance des organismes publics liés au secteurindustriel et commercial. Ils effectuent par exemple des audits deschambres consulaires (chambres de commerce et d’industrie).- Le conseil. Ils produisent des études ou des expertises sur desquestions concernant l’industrie, l’artisanat, le commerce et lesprofessions libérales.

III – Les contrôles juridictionnels

Ce sont des contrôles opérés par des juridictions spécialisées.

A – La Cour des Comptes

C’est une institution spécialisée de contrôle (ISC), créée le 16septembre 1807 par Napoléon Ier. La Cour des Comptes est présidée parun Premier président choisi par le gouvernement. Elle est composéede chambres spécialisées avec à leur tête un président de chambre.Chaque chambre est ensuite composée, dans l’ordre hiérarchique,d’auditeurs, de conseillers référendaires et de conseillers maitres.La Cour a un parquet composé d’un procureur général et d’avocatsgénéraux.

Elle a pour fonctions :- Le contrôle des comptes publics. Comme l’inspection générale desfinances elle contrôle les comptes des comptables publics. Laprocédure de contrôle est collégiale et contradictoire. La comptabilité du comptable est d’abord examinée par un rapporteur.Il en vérifie la régularité et produit un rapport écrit. Ce rapportest ensuite transmis au procureur général mais également à unconseiller maitre. Ce dernier examine le rapport et présente uncontre-rapport afin de limiter les erreurs. Une fois ce travaileffectué, la Cour prononce un arrêt.

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- Le contrôle de gestion. Ce contrôle concerne les ordonnateurs. Ils’agit de vérifier le bon emploi des fonds publics qu’en font lesordonnateurs, mais il ne s’agit pas d’un contrôle juridictionnel. Iln’y a donc pas de jugement ; en revanche, les conclusions ducontrôle sont susceptibles de faire l’objet d’une publication dansle cadre d’un rapport présenté par la Cour.

- La certification de la sincérité des comptes de l’Etat.

La Cour des comptes, sur leur demande, à l’obligation de porterassistance au Parlement et au gouvernement.

B – La Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF)

La Cour de discipline budgétaire et financière a été créée par uneloi du 27 septembre 1948. Sa fonction consiste à sanctionner lesirrégularités commises par les ordonnateurs et à leur infliger desamendes. Elle est présidée par le Premier président de la Cour descomptes. Elle comprend par ailleurs un vice-président, qui est leplus souvent le président de la section finance du Conseil d'Etat,deux conseillers d’Etat et deux conseillers maitres de la Cour desComptes.

La fonction du ministère public devant la Cour de disciplinebudgétaire et financière est assurée par le Procureur général prèsla Cour des Comptes.Les recours en cassation se font devant le Conseil d'Etat. Cettejuridiction peut être saisie par les présidents du Sénat et del’Assemblée Nationale, le Premier ministre, le ministre desfinances, les ministres concernés et enfin la Cour des Comptes.

C – Les chambres régionales des comptes

Les chambres régionales des comptes contrôlent les opérationsfinancières des collectivités locales. Elles ont été créées par laloi du 2 mars 1982. Il existe une chambre régionale des comptes parrégion. Elles adoptent une procédure de contrôle largement similaireà celle de la Cour des Comptes.

Section 2 : Le contrôle de l’exécution du budget de l’Etat par le Parlement

A côté des contrôles de régularité effectués par les administrationset les institutions spécialisées, le Parlement peut lui aussicontrôler et évaluer les opérations financières de l’Etat. Il peutle faire de diverses manières.

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1 – Le contrôle sur pièce et sur place

Selon l’article 57 de la LOLF, les commissions des finances del’Assemblée Nationale et du Sénat ont la possibilité de suivre et decontrôler l’exécution des lois de finance. Par conséquent, ellespeuvent effectuer des contrôles sur pièce (contrôle des documents)et sur place (déplacement au sein de l’institution) de l’utilisationde l’argent public, et peuvent procéder à toutes les investigationsqu’elles jugent utiles. Tous les renseignements et les documentsdoivent leur être fournis. Elles peuvent se faire assister par laCour des Comptes.

2 – Les auditions

La commission des finances de chaque assemblée a la possibilitéd’auditionner les personnes qu’elles jugent nécessaire d’entendre.Ces personnes ont l’obligation de se soumettre à l’audition. Ellessont alors déliées du secret professionnel.

3 – Les questions au gouvernement

Les parlementaires ont la possibilité d’interroger le gouvernementen matière budgétaire dans le cadre des questions écrites ou orales.D’autre part, en vue de l’examen du projet de loi de finance, lescommissions parlementaires ont la possibilité d’adresser desquestionnaires au gouvernement avant le 10 juillet. Le gouvernementdoit y répondre par écrit au plus tard huit jours après la datelimite de dépôt du projet de loi de finance.

Deuxième partie   : Les finances publiques et la bonne gestion

Partout dans le monde, les Etats s’efforcent de moderniser leurgestion financière, on qualifie ce nouveau phénomène de nouvellegestion publique. On parle aussi de « bonne pratique en matière degestion ». L’objectif poursuivi est de maîtriser les dépensespubliques et pour ce faire, d’introduire dans la gestion budgétaireplus de transparence, plus d’efficacité, une meilleure programmationdes dépenses. D’autre part, on prend partout modèle sur les méthodesde gestion utilisées par les entreprises.Autrement dit, la gestion publique se rapproche de plus en plus dela gestion privée. C’est la raison pour laquelle ce que l’on appelleune culture de gestion se développe dans le secteur public.

Première sous-partie   : Les transformations de la gestion publique

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La gestion publique se transforme sur la base du principe de larecherche de la performance.

Chapitre 1   : La culture de la performance, principe de la nouvelle gestion publique

L’introduction d’une culture de la performance dans le secteurpublic est une idée ancienne qui a mis longtemps pour prendre uneforme concrète.

Section 1 : Les origines historiques

Cela a débuté aux Etats-Unis et s’est ensuite développé en France.

I – La recherche de la performance aux Etats-Unis

Dès le début du XXème siècle, on a cherché à trouver des moyens pourgérer plus efficacement le secteur public aux Etats-Unis. Plusieurscommissions se sont réunies et ont proposé des solutions.

1912 : La commission pour l’économie et l’efficacité. Cettecommission, également appelée « commission Taft », recommandait deschangements radicaux dans les méthodes de gestion utilisées par lesecteur public. Elle proposait ce que l’on appelle un budget deprogramme, c'est-à-dire un budget organisé en fonction de différentsobjectifs, de différentes fonctions appelées programmes. Cespropositions ne purent pas être appliquées.

1929 : La crise de 1929 s’est caractérisée par une augmentation desdépenses publiques et une diminution des recettes publiques, ce quia conduit à s’interroger là encore sur les moyens de maitriserl’évolution des dépenses et l’on a proposé de considérer le budgetde l’Etat comme un instrument de contrôle de la gestion.

1947 : La commission Hoover. Cette commission va travailler jusqu’en1949 et va proposer une refonte complète de la structure desadministrations des ministères afin d’en améliorer lefonctionnement. [Aujourd’hui, la RGPP, révision générale des politiques publiques,poursuit un objectif similaire] Cette commission a par ailleurs proposé demodifier la présentation du budget et d’adopter une présentationsous la forme de programmes. Enfin, la Commission Hoover qualifie ce type de budget de budget deperformance.

Années 1960 : Au cours des années 1960 on propose d’utiliser desméthodes pratiquées par les grandes entreprises depuis les années1920, c'est-à-dire des budgets de programme. Cela constitue

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également une conception stratégique de la gestion. En 1961 l’anciendirecteur général de l’usine Ford, Mac Namara, devient secrétaired’Etat à la défense aux Etats-Unis. Il décide d’appliquer à sonministère les méthodes de gestion utilisées par l’usine Ford. Ildemande alors à un groupe d’experts de l’aider à adapter cesméthodes à son ministère.

Ce groupe d’experts propose ce qu’il appelle le planning programingbudgeting system (PPBS). Il s'agit tout d’abord de fixer des objectifsstratégiques au ministère, c'est-à-dire de proposer une politique àlong terme (planning) ; il s'agit en second lieu de proposer lesmoyens pour atteindre ces objectifs (programing) ; et enfin ils'agit de présenter ces moyens sous la forme d’un budget, d’unprogramme chiffré des dépenses, d’un regroupement de ces dépensespar programme (budgeting). Selon cette méthode, chaque programme est doté d’un responsabledevant atteindre les objectifs qui lui sont fixés. Il estresponsable de ses résultats. Les responsables peuvent êtregratifiés ou pénalisés en fonction des résultats qu’ils ont obtenus.Par conséquent, un tel budget est qualifié de budget de résultats.

1973 : Une autre commission propose d’insister sur ce qu’on appellela reddition des comptes, ce qui signifie que tous les gestionnairesresponsables de programmes doivent rendre des comptes sur lesrésultats obtenus. On se trouve placé, dans ce cadre de gestion, dans une logique quel’on qualifie de logique de résultats ; ce qui signifie que l’on nese borne pas à attribuer des moyens (crédits) à une administration,mais que l’on demande à ce que des résultats soient atteints et quedes comptes soient rendus sur ces résultats. On n’est plus seulementdans une logique qualifiée de logique de moyen (attribuer des moyensà une administration, sans se soucier des résultats).

II – La recherche de la performance en France

En France, à la fin des années 1960, le gouvernement envoie unemission d’exploration aux Etats-Unis pour examiner et comprendre lePPBS. En 1968, le gouvernement décide d’appliquer ce PPBS à lagestion des administrations publiques en France. Une expérimentationest faite au ministère de la défense et au ministère del’équipement. Autrement dit, des budgets de programme sont mis enplace, on détermine des objectifs, on détermine également desindicateurs de résultat qui permettent de savoir si les objectifsont été ou non atteints.

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Cette nouvelle manière de considérer la gestion publique est alorsqualifiée en France de rationalisation des choix budgétaires (RCB).Les programmes du budget sont des programmes pluriannuels. La RCB sesoldera par un échec et sera abandonné à la fin des années 1970 carelle est restée cantonnée aux administrations. Les parlementaires nes’y sont pas intéressés, à la différence de la récente réformebudgétaire (LOLF), où ce sont les parlementaires qui ont prisl’initiative de mettre en place une nouvelle gestion publique pourl’Etat.

Section 2 : les normes internationales et la mondialisation

Depuis le développement de la globalisation de la mondialisation,s'est développé un phénomène d'harmonisation des normes, des règlesfinancières publiques au niveau international. Cette harmonisationest principalement due à des institutions internationales quiproposent des règles de bonne conduite budgétaire et comptable auxEtats.

I – La mondialisation et la proposition de code de bonne conduite par les institutionsinternationales

Ces institutions proposent des normes déjà depuis des années. En1998 par exemple le FMI a proposé des règles très construites.L'atmosphère des années 1990 a été marquée par le consensus deWashington.

A – Le consensus de Washington

Ce qu'on appelle le consensus de Washington est une formed'interprétation du développement économique international et de lamanière de lutter contre la pauvreté. Ce consensus de Washington futproduit dans un cadre théorique très marqué par les théorieséconomiques libéral classique (voir supra).

1 – Les caractéristiques du consensus de Washington

Le terme de consensus de Washington a été crée sur la base despropositions d'un économiste américain nommé John Williamson. Il avoulu qualifier, déterminer les moyens de réaliser le développementéconomique. Il a fait différentes propositions en 1989. Il estimaitque ces propositions faisaient l'unanimité chez les économistes. Ilestimait également qu'elles étaient en accord avec les conceptionsdu FMI et de la Banque mondiale. C'est pourquoi en 1989, àWashington, il a proposé une liste de dix recommandations destinéesaux pays dont l'économie était en difficulté. Il a essayé par cela

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de résumer la position de la plupart des experts des institutionsfinancières internationales concernant les moyens à utiliser pourfavoriser la croissance et réduire la pauvreté des pays endéveloppement.

Parmi ces dix prescriptions, plusieurs d'entre elles concernent ladiscipline budgétaire (maitrise pour les Etats de leur déficitpublic, nécessité de produire des budgets en équilibre : faire ensorte que le budget de l'Etat ne pèse pas sur le fonctionnement dumarché économique), il y a aussi la libéralisation des marchésfinanciers, commerciaux et une dérèglementation de ces marchés, uneabolition des barrières douanières. Développer les privatisations etprotéger la propriété privée.

2 – La remise en question du consensus de Washington

Les résultats de la mise en œuvre de ces principes n'ont pas étésparticulièrement convaincants. Si les budgets de certains Etats ontpu être relativement améliorés, l'inflation a dans certain casdiminué mais la pauvreté n'a pas été réduite.

Un rapport de la commission « croissance et développement » en datedu 22 mai 2008 exprime l'idée et se montre partisan d'une autrepolitique d'aide au développement. La commission « croissance etdéveloppement » est une commission internationale crée en 2006 etqui est financée par l'Australie, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, laSuède et la Banque Mondiale. Elle est présidée par un libéralclassique qui s'appelle Michael Spence. Cette commission estcomposée de vingt-et-une personnes : des économistes, desresponsables politiques (chefs d'Etat, ancien chefs d'Etat,ministres, ex ministres, représentants de l'ONU, représentants de laCommission européenne et représentants de gouverneur de la banquecentrale). Ce rapport conclu « la principale de nos conclusion est que lacroissance indispensable pour faire reculer la pauvreté et assurer un développement durableréclame un Etat fort ». La remise en cause du consensus de Washingtonporte sur les deux aspects suivants : les spécificités des paysn'ont pas été prises en compte (solutions beaucoup tropuniformisées), par ailleurs les aspects institutionnels ont éténégligés alors que les institutions juridiques, administratives,politiques sont indispensables au développement.

La suprématie du marché économique a trop souvent conduit à écarterl'intervention de l'Etat. Un post-consensus est en train de sedécider autour de plusieurs axes :

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Réhabilitation du rôle de l'Etat : On prend conscience qu'il doitinvestir dans les infrastructures d'éducation et de santé ;développer la démocratie ; mettre en place des administrationscompétentes ; considérer chaque pays en particulier et non pasuniformisé les solutions.

C'est à travers « la nouvelle gouvernance financière publique » quese mettent en place aujourd'hui les réformes budgétaires dans lespays en développement ou émergents. Cette nouvelle gouvernancefinancière publique associe une gouvernance démocratique et unegestion publique rationnelle et efficace.

B – La mondialisation et la définition de standards budgétaires par le Fonds monétaireinternational

Sur le plan international, on peut constater le développement d'uneculture de gestion au sein du secteur public. Cette culture degestion se caractérise par la recherche d'une plus grandetransparence, clarté des comptes publics. L'objectif généralpoursuivi par les Etats est de maitriser les dépenses publiques etle FMI propose des règles de bonnes conduites en matière budgétaire.

1 – Le Fonds monétaire et la diffusion d’une culture de gestion

Le FMI est une institution internationale qui a été crée à la fin dela Seconde guerre mondiale dans le cadre des accords de BrettonWoods. L'objectif qui lui était donné était de réguler le systèmemonétaire national, de surveiller le système avant de prévenir lesproblèmes. Cette régulation du système monétaire international parle FMI fait parti de ce qu'on appelle la « surveillancemultilatérale internationale ». Le FMI est rattaché à l'ONU en tantqu'institutions spécialisées. Son rôle est centré sur l'économiemilitaire et sur l'aide aux pays en développement. Cela s'est étendudepuis plusieurs années, aux politiques et aux procédures généralesbudgétaires. Cette nouvelle compétence s'inscrit dans ce que l'onqualifie de nouvelle régulation. C'est une nouvelle forme que prendla surveillance multilatérale internationale. Cela consiste à mettreen place au sein des Etats ; des dispositifs, des règlesstandardisées de manière à conduire ces Etats à se responsabiliseren matière législative. Le PMI incite les Etats à réorganiser leursprocédures de gestion des fonds publics et principalement à lesrendre plus transparente.

2 – Le code de transparence budgétaire du Fonds monétaire international

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Le FMI a publié en 1998, un code de transparence budgétaire. Ce codefut révisé en 2007 et il présente ce que le FMI considère comme lesmeilleurs pratiques en matières budgétaires. L'objectif est de faireen sorte que dans le monde les Etats se conforment à une disciplinebudgétaire commune. Autrement dit qu'ils utilisent des règles degestions et des principes budgétaires et comptables voisins voirmême identiques. Le FMI ne peut pas imposer ses règles aux Etats. Ilpeut seulement leur proposer de s'engager sur cette charte de bonneconduite en matière budgétaire et d'en transcrire les règles dansleurs législations financière.

Ce code est complété par un manuel sur la transparence des financespubliques. Ce code comprend quatre grands principes :

- Une définition claire des fonctions et des responsabilités desdifférents acteurs. Il doit y avoir une différence nette entresacteurs et activités du secteur public et acteur et activités du« secteur privé ». La gestion des finances publiques doit s'inscriredans un cadre juridique et institutionnel clairement définienotamment la répartition des fonctions entre les décideurs et lesgestionnaires doit être parfaitement claire.

- La transparence des procédures budgétaires : Les informationsbudgétaires doivent être présentées de la manière la plus claire etnotamment doivent être précisées les objectifs de la politiquebudgétaire.

- L'accès du public à l'information : Les informations concernantles finances publiques doivent être accessibles aux citoyens.

- La garantie d'intégrité : C'est un principe qui concerne laqualité des informations budgétaires qui sont fournies (c'est à direleur sincérité). Cela fut introduit par la LOLF du 1er août 2001.

C – Le « Public expenditure and Financial accountability » (PEFA)

Collaboration entre la commission Européenne, la banque mondiale, laFrance, le RU, la Norvège, la Suisse et le FMI. L'objectif de cePEFA est d'aider à l'harmonisation des normes budgétaires des Etatset d'aider à la réforme des finances publiques des Etats,particulièrement des Etats en développement. Le PEFA produit desindicateurs de performance concernant les situations budgétaires desEtats. Ces indicateurs commencent à être utilisés pour évaluerl'avancée des réformes budgétaires.

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D – Les normes comptables proposées par le comité secteur public de la fédérationinternationale des comptables (FIC)

Des normes comptables publiques sont proposées aux Etats par unorganisme international (le FIC) qui bénéficie du soutien de labanque mondiale et du FMI. Cette institution est composée dereprésentants de différents pays dont la France, le RU, l'Afrique duSud, la Nouvelle-Zélande, l'Argentine, le Canada, etc.). Cetteinstitution propose des normes comptables standard. Et l'idéeessentielle consiste dans la mise en place au sein des Etats d'unecomptabilité prenant modèle sur celle de l'entreprise. La France parexemple, pratique une comptabilité très proche de l'entreprisedepuis la mise en place de la LOLF. Il se généralise progressivementà travers le monde, une conception commune de la gestion publique.

II – Le poids des structures régionales internationales sur les transformations des systèmesfinanciers publics nationaux

La politique financière publique des Etats est nécessairementlimitée lorsque sont mises en place des zones d'intégrationéconomique et plus encore des zones d'intégration monétaire commepar exemple l’Union européenne ou encore l'Union économique etmonétaire des pays de l'Afrique de l'ouest (UEMOA).

La question qui se pose est de connaitre le degré d'autonomie dontdispose les politiques en matière financière.

A – Les normes de l’Union européenne1 – Une politique financière encadrée par le droit de l’Union économique et monétaire.

Critères de convergence et le pacte de stabilité.

a – Les critères de convergence

L'autonomie des Etats est réduite en matière financière parl'obligation de respecter des critères de convergence. Ces critèresont été initialement posés par le traité de Maastricht du 7 février1992. Ils ont été ensuite repris dans le traité instituant lacommunauté européenne, à l'article 104.

Selon cet article 104, « Les Etats membres évitent les déficit excessifs ». De plus« La commission surveille l'évolution de la situation budgétaire et du montant de la dettepublique dans les Etats membres ». Elle examine si la discipline budgétairea été respectée et cela sur la base de deux critères.

Les deux critères sont :

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La limitation des déficits publics. Le rapport entre le déficitpublic et le Produit intérieur brut ne doit pas dépasser 3%. Onentend par déficit public, les résultats cumulés de l'Etat, descollectivités locales et des organismes de sécurité sociale. Il nes'agit pas du seul déficit de l'Etat. Ce critère fut inséré dans l'article 1 du protocole annexé au traitéeuropéen. La limitation de la dette publique. Le rapport entre ladette publique et le PIB ne doit pas dépasser de 60% le PIB. Ladette publique consiste dans l'addition de la dette de l'Etat, pluscelle des collectivités territoriales et de la sécurité sociale. LePIB actuel est de l'ordre de 1900 milliards d'euros.

b – Le pacte de stabilité et de croissance

Les politiques économiques au sein de la zone euro doivent êtrecohérentes, coordonnées et les politiques budgétaires qui sontmenées par les différents pays doivent concourir à uneconsolidation, à un renforcement de la situation des financespubliques de chacun des Etats. Cela doit permettre à la banquecentrale européenne (BCE) de maintenir des conditions favorables àla vie économique et financière de la zone euro.

Par exemple, On veut éviter que l'augmentation des déficits publicsd'un Etat provoque des problèmes dans les autres Etats. Cettecoordination s'inscrit dans le cadre de ce qu'on appelle « le pactede stabilité et de croissance ».

C'est un dispositif qui a renforcé les critères de convergence et ladiscipline budgétaire. Le pacte à pour objectif de faire en sorteque les Etats se rapprochent de l'équilibre budgétaire, voir mêmedégage un surplus budgétaire. C'est une résolution du conseil del'Europe qui a institué ce pacte : résolution d'Amsterdam du 17 juin1997. Ce pacte fut précisé par 2 règlements du 7 juillet 1997.

Concernant les modalités de ce pacte : on a décidé l'obligation pourles Etats de produire chaque année un plan à moyen terme (3 ans) deleurs objectifs concernant leur solde budgétaire. Ces soldes doiventêtre proches de l'équilibre (0% du PIB) voit même excédentaires.

Le pacte comporte plusieurs volets.

Tout d'abord, un volet sur la surveillance des politiqueséconomique, ce volet prévoit que les Etats doivent produire,présenter chaque année une programmation budgétaire à moyen terme.

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Ces programmes doivent afficher un objectif qui est celui d'un soldebudgétaire équilibré ou excédentaire.

Le Conseil des ministres européens peut émettre des recommandationslors de l'examen de ces programmes, voir même lors du suivi del'exécution de ceux ci. Par ailleurs des amendes peuvent êtredécidées en cas de déficit excessif (une marge d'appréciation estprévue en cas de circonstances exceptionnelles), si l'Etat persistedans son inaction vis à vis de ses déficits

L'exécution de ce plan suppose non seulement que l'Etat mais aussiles collectivités locales et les organismes de sécurité socialeparviennent à maitriser leurs dépenses, à réduire leur déficit etpar conséquent à réduire leur endettement.

2 – Les points forts de la logique financière européennea – La globalisation des finances publiques

La globalisation des finances publiques : Les finances publiquessont conçues de manière globales (on prend en compte l'ensemble desfinances de l'Etat, des collectivités locales et de la sécuritésociale).

b – Le souci de la qualité de la gestion financière publique

Un principe de bonne gestion financière publique est évoqué àl'article 274 du TUE. L'objectif de finances publiques bien géréesest central.

c – La transparence budgétaire

Une obligation de transparence figure dans les textescommunautaires.

B – Les structures régionales en Afrique

Il existe plusieurs structures régionales en Afrique mais la plusélaborée et aussi la plus proche (dans sa structure) de l’UnionEuropéenne est l'UEMOA (union économique et monétaire de l'ouestafricain). Crée par un traité du 10 janvier 1994. En font partie, leBénin, le Burkina-Faso, la Côte d'Ivoire, Le Sénégal, le Niger, leTogo, le Mali et la Guinée Bissau. Tous ces Etats ont crée unecommunauté sur le modèle de l'UE. Cette institution insiste sur lanécessité d'harmoniser et de faire converger les politiquesbudgétaire est fiscales des Etats qui la composent. Ces Etatsdoivent parvenir à une réduction de leur déficit public, ils doivent

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parvenir à une réduction de la dette publique, il est égalementprévu une réduction de la masse salariale de ces Etats et uneaugmentation du taux de pression fiscale.

Chapitre 2   : Le management de l’entreprise, un modèle pour la nouvelle gestion publique

Section 1 : Le modèle du gouvernement de l’entreprise

I – La théorie de l’agence et la conception contractualiste de l’entreprise

Le modèle utilisé est le modèle anglo-saxon de l'Entreprise. Selonla conception Anglo-saxonne de la gouvernance de l'entreprise.L'entreprise est considérée comme un lieu où s'établissent desrapports contractuels. Dans cette conception, le contrat est la basedu fonctionnement de l'Entreprise. Tout ce passe comme si ledécideur (patron) et le gestionnaire (employé) s'engagent l'unenvers l'autre. On désigne le gestionnaire (employé) par lequalificatif d'agent. Dans ce contexte, l'agent est mandaté pourréaliser un objectif, un résultat et dispose d'une délégation depouvoir de la part du décideur pour réaliser cet objectif.

Par conséquent, l'agent est relativement autonome. Il estresponsabilisé. L'agent sera jugé sur ses résultats. En fonction decela il sera soit sanctionné, soit gratifié. L'agent fait l'objetd'un contrôle d'une évaluation de ses performances. Il doit produireun rapport de performance. Le décideur de son coté, à pourpréoccupation de s'assurer qu'une fois le contrat signé entre lui etl'agent, l'agent respecte bien ses engagements. On parle de risquede hasard ou encore d'aléa moral. Le décideur essaye de se prémunirde cet aléa moral par un dispositif de contrôle, de surveillancemais aussi d'incitation du gestionnaire.

II – L’adaptation de la gestion privée à la gestion publique

L'utilisation au sein du secteur public du modèle de l'agent atténuevoir même supprime les différences entre gestion publique et gestionprivée. Dans ce cadre, la gestion publique, en adoptant le modèle del'entreprise, est conduite à établir un rapport client fournisseurentre les citoyens et l'Etat.

Cette logique entraine des transformations fondamentales au sein desadministrations, ainsi que dans les rapports qu'entretiennent lesadministrations et leurs administrés. Les citoyens ou les usagers enviennent à se considérer comme des clients. C'est par exemple le casaux USA. Cette évolution se poursuit maintenant dans de nombreux

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pays. Du coté des administrations, les gestionnaires sont de plus enplus responsabilisés et autonomes pour réaliser les objectifs quileur sont fixés. Ce modèle fut mis en place depuis de nombreusesannées dans des pays comme l'Australie, la Nouvelle Zélande, le RU,les Pays-Bas, le Canada, l'Espagne, l'Italie et la France.

Section 2 : L’adaptation du modèle de l’entreprise à l’EtatI – Le pilotage de la gestion

Il s'effectue sur la base de ce que l'on appelle une « chaîne deresponsabilités ». La responsabilité dont il s'agit est uneresponsabilité gestionnaire.

A – La responsabilité des gestionnaires

Elle se fonde sur plusieurs dispositifs :

La fongibilité des crédits : des crédits sont attribués auxgestionnaires publics. Ces crédits sont utilisables par lesgestionnaires pour atteindre les résultats, les objectifs qui leuront été fixés. Ils sont classés d'une certaines manière à leurniveau dans la position d'un chef d'Entreprise. On dit que lescrédits qui leur sont accordés sont fongibles car les gestionnairesont la possibilité de décider par exemple que des crédits qui ontété désignés au départ comme destinés à financer des investissementspeuvent être utilisés à d'autres fins, par exemple pour financer desdépenses de fonctionnement.

Ce qui est important, ce n'est plus la différence entre créditd'investissement et crédit de fonctionnement. Si on veut transformerles crédits en fonctionnement on pourra le faire, ou vice versa.Autrement dit, on peut changer la destination des crédits.

Par contre, il est interdit d'utiliser des crédits d'investissementou de fonctionnement pour augmenter le montant des rémunérations despersonnels. Cependant on peut utiliser des crédits de personnelspour financer soit des dépenses d'investissement, soit d'autresdépenses de fonctionnement.

La fongibilité est asymétrique. Cette possibilité d'utiliser l'eau par les gestionnaires leurconfère une grande autonomie mais en contrepartie ils doivent rendredes comptes.

B – Les responsables de programmes

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Un responsable d'un ou plusieurs programme est désigné au sein dechaque ministère. Ce sont des hauts fonctionnaires. Ils sont aunombre de 80 pour 170 programmes prévus pour 2009. Ces responsablesde programmes produisent chaque année un projet annuel deperformance. Ce PAP est présente au parlement. Les responsables deprogrammes s'engagent sur des objectifs à atteindre. Ils ont lapossibilité d'utiliser librement les crédits mis à leur dispositionmais ils doivent ensuite rendre des comptes et seront jugés surleurs résultats.

C – Les responsables de budget opérationnel de programmes et unité opérationnelles deprogrammes

Le responsable d'un programme va diviser son programme en ce quel'on appelle des budgets opérationnels de programmes. Il va désignerun responsable pour chaque budget opérationnel de programme (BOP).Un responsable de BOP peut être responsable de plusieurs BOP. Ilexiste 2300 BOP et 1200 responsables de BOP. Le responsable d'un BOPgère librement les crédits mis à sa disposition. Ce responsable deBOP s'engage auprès du responsable à atteindre des objectifs. Cesobjectifs sont négociés entre le responsable de programme et leresponsable du BOP. Cette négociation se déroule dans le cadre de ceque l'on appelle, le dialogue de gestion. Le responsable du BOP alui même la possibilité de diviser son BOP en plusieurs unitésopérationnelles de programme. Et là encore il désignera unresponsable pour chaque « unité opérationnelles de responsabilité ».Là encore des objectifs entre le responsable du POP et lesresponsables des UOP.

Cette chaine de responsabilité qui va du responsable du programme auresponsable de l’UOP a été mise en place dans le cade de la mise enœuvre de la LOLF.

D – Le bilan des budgets opérationnels de programme (BOP)

En Janvier Février on effectue un bilan des BOP. On analyse lesrésultats obtenus et les écarts entre ces résultats et lesobjectifs. On réfléchit sur l'efficacité de la gestion ainsi que surla pertinence des objectifs fixés. On identifie également les bonnespratiques, c'est à dire les actions qui se sont montrées les plusefficaces.

La structure du budget est simple (revoir les missions, programmes,les actions). A chaque niveau on place un responsable.

E – La mise en cohérence du processus de gestion des finances de l'Etat

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1 – Le dialogue de gestion

C'est une procédure, un dispositif déjà utilisé par les entreprises.Avec la mise en place d'une chaine de responsabilité au sein del'Etat, le dialogue, la concertation se substitue le systèmehiérarchique habituel. Les décisions se prennent à travers ou àl'issue d'une discussion entre le responsable de programme et leresponsable de BOP puis entre le responsable de BOP et leresponsable de UOP.

« Le programme est divisé en BOP, le BOP est divisé en UOP ».

Avec le dialogue de gestion les responsables à tous les niveauxs'entendent sur la manière d'atteindre les objectifs, sur les moyensdisponibles pour les atteindre. Le dialogue de gestion consiste àdécider conjointement des objectifs à atteindre et des indicateursde résultats qui permettront de déterminer, d'être informé sur laréalisation de ces objectifs.

Ce système ne marcherait pas sans un organe de cohérence. Il y atellement de programmes, de BOP et de l’UOP. Il faut un organe decohérence.

2 – La surveillance de la cohérence par le préfet

Cette déconcentration et cette responsabilisation de la gestionnécessite que soit mis en cohérence les multiples actionsministérielles au niveau des territoires. C'est le préfet qui vas'assurer de cette cohérence. Le préfet donne d'abord un avispréalable sur les BOP, il donne cet avis au responsable duprogramme. Le préfet s'assure de la cohérence du BOP avec les autresactions territoriales. Le préfet veille également au respect de ladémarche de performance et de la cohérence de cette démarche avecles priorités qui ont été fixées pour le territoire (département,région) sur lequel il exerce son autorité.

II – L'évaluation de la performance par des indicateurs de résultat

L'un des enjeux les plus importants de la nouvelle gestion publiqueconsiste à faire passer l'Etat de ce que l'on appelle une culture demoyens à une culture de résultat. La culture de moyens consiste à allouer des crédits à desadministrations sans se préoccuper de fixer des objectifs.

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La culture de résultats consiste à attribuer des moyens, des créditsmais en fixant des objectifs à atteindre et en mesurant ensuite sices objectifs ont bien été atteints. Cette mesure se fait à l'aidedes indicateurs de résultat.

Selon cette nouvelle logique, à chaque programme sont associés desobjectifs et des indicateurs de performance (résultat). Cesobjectifs et ces indicateurs figurent dans un document annexé auprojet de loi de finance et remis aux parlementaires. Ce documents'appelle un projet annuel de performance.

A – L'engagement sur des objectifs et des indicateurs

La stratégie d'un programme est définie, décidée par le responsabledu programme en accord avec son ministre. Cette procédure conduit àsélectionner un nombre limité d'objectifs. A cet objectif sontassociés un ou plusieurs indicateurs de résultat. A chaqueindicateur est associée une cible à atteindre dans un délaidéterminé. Par exemple en ce qui concerne la mission sécurité. Ellea 2 programmes (police nationale et gendarmerie).

Le programme gendarmerie possède un certains nombre d'actions dontl'action sécurité routière. L'un des objectifs de l'action sécuritéroutière est de réduire le nombre de blessés et de tués sur lesroutes. La cible qui a été fixée à l'horizon 2009 est de limiter à27 834 le nombre de blessés. Ce chiffre est l'indicateur derésultat. La valeur prévue de cet indicateur pour 2008 est de 29611.

Un comité interministériel d'audit des programmes contrôle lapertinence, la fiabilité des indicateurs. Ces audits sont réaliséspar des fonctionnaires qui appartiennent à des corps d'inspection etde contrôle. Il s'agit par exemple d'inspecteurs des finances.

B – Le contrôle de la performance par le parlement

Le responsable de programme s'engage sur les objectifs et sur lesindicateurs qui figurent dans le cadre du projet annuel deperformance (PAP) de son programme. Il est responsable de ceprogramme, par conséquent, il doit rendre compte au parlement desrésultats qu'il a obtenu. Il le fait en produisant un rapport annuelde performance (RAP). Le responsable de programme rend des comptesaprès la réalisation du programme (à la fin de l'exercicebudgétaire). Le RAP est joint en annexe de la loi de règlement.

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Selon ce nouveau dispositif, les parlementaires ne se limitent pluscomme autre fois à débattre des crédits car ils ont également àdiscuter des objectifs, des indicateurs.

Cette logique d'entreprise nécessite des outils de gestions adaptésde l'entreprise. L'un de ces outils est essentiel, il s'agit de lacomptabilité.

III – Une comptabilité de l'Etat très proche de celles des entreprises

Depuis 2006, la comptabilité de l'Etat a été complètement réformée.Elle est conçue maintenant sur le modèle de celle de l'entreprise.On appelle ce type de comptabilité, une comptabilité d'exercice. Ils'agit d'un système comptable qui consiste à décrire, à retracer,non seulement les flux (les entrées et les sorties d'argent), maiségalement la valeur du patrimoine de l'Etat. C'est à dire ce qu'ilpossède mais également ce qu'il doit. Aujourd'hui l'Etat comme lesentreprises présente en fin d'exercice (en fin d'année civile) unbilan et un compte de résultat.

Deuxième sous partie : Les nouveaux enjeux de la gestion publique

L'enjeu majeur de la gestion publique consiste dans la maitrise deson endettement et également la maitrise du déficit budgétaire.Actuellement, le déficit budgétaire de l'Etat représente plus de 20%de l'ensemble du budget. Cela veut dire que l'Etat vit environ 25%au dessus de ses moyens. Par conséquent il est obligé en permanenced'emprunter de l'argent.

C'est au cours des années 1980 que l'on a particulièrement prisconscience qu'il fallait trouver les moyens de maitriser lesdépenses pour retrouver l'équilibre budgétaire. Jusqu'à cette date,on réfléchissait surtout essentiellement à la fiscalité, à l'impôt.

Chapitre 1 : L'équilibre des finances publiques

Le pouvoir financier, c'est le pouvoir de prévoir les dépenses etles recettes pour une période de temps limitée. Cette période estl'année civile. Cette prévision se fait dans le cadre de ce qu'onappelle un budget.

Section 1 : Les notions budgétaires de base

I – Les notions de budget et de loi de finance pour l'EtatA – Définition

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1 – La notion de budget

Le budget est un acte de bonne gestion par ce qu'il consiste àprévoir des dépenses et des recettes. Il s'agit d'un documentutilisé dans le cadre d'une gestion active des fonds publics. Le budget n'est pas seulement un acte de gestion. C'est également unacte politique. En effet, le budget est un acte démocratique, il estélaboré, conçu et n'est adopté, voté que par les décideurs et desélus politiques (gouvernement + parlement). D'autre part, le budget est la traduction financière de certainchoix de société. Le budget de l'Etat est adopté par le parlement etconstitue un acte législatif : une loi. C'est la raison pourlaquelle on parle de loi de finance.

Par conséquent, la liberté des gestionnaires est des décideurspolitiques est encadrée par le droit, c'est la raison pour laquellele budget est à la fois un acte juridique, politique, économique etde gestion.

Le budget est également à la fois un acte de prévision et un acted'autorisation.

Un acte de prévision :C'est un acte de prévision des dépenses et des recettes pour l'annéecivile à venir. Il doit être adopté par une assemblées délibérante,représentative des citoyens et démocratiquement élue, (c'est leparlement pour l'Etat), c'est le conseil de la collectivité pour lescollectivités territoriales.

Un acte d'autorisation :En adoptant le budget, l'assemblée délibérante, autorise laréalisation des opérations qui y figurent. Autrement dit, elleautorise, l'exécution des dépenses et le recouvrement des recettespar l'exécutif de l'institution. C'est à dire pour l'Etat, par legouvernement, par les ministres. Autrement dit, le budget exprime lepartage des compétences entre l'organe délibérant et l'organeexécutif. Cette autorisation doit être préalable. Elle doit enprincipe précéder les opérations d'exécution. Cette règle constitueune nécessité juridique. On dit que le budget est un acte-condition.La sanction de cette règle consiste que si le budget n'est pas voté(adopté) en temps voulu, dans l'impossibilité » pour l'exécutifd'assurer l'engagement des dépenses pour le recouvrement desrecettes.

2 – La distinction budget/Loi de finance

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Cette distinction concerne l'Etat. On distingue d'une part, la loide finance et d'autre part le budget depuis une ordonnance du 2janvier 1959. Ces 2 notions ont été reprises dans la loi organiquerelative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF).

Selon l'article 1er de la LOLF : Les lois de finances déterminentpour un exercice la nature, le montant et l'affectation desressources et des charges de l'Etat. Selon l'article 6 de la LOLF : Les ressources et les chargesbudgétaires de l'Etat sont retracées dans le budget...le budgetdécrit pour une année l'ensemble des recettes et des dépensesbudgétaire de l'Etat. Les lois de finances contiennent des dispositions qui sontprésentées comme pour toute loi sous la forme d'articles. Il s'agitpar exemple de dispositions fiscales, ou encore de dispositions quipeuvent concerner les finances des collectivités territoriales.

Le budget est un document comptable, chiffré, des dispositionsprisent dans le cadre de la loi de finance.

Les lois de finances : acte législatif.Le budget : document comptable.

B – Les 3 catégories de loi de finances

La loi de finance initiale : LFI. Il s'agit de la première loi definance de l'année. Elle doit être adoptée par le parlement d'ici le31 décembre pour l'année suivante.

Par exemple, la loi de finance pour 2009 doit être votée pour le 31décembre 2008.

Les lois de finances rectificatives : LFR. On les appelle aussi« collectifs budgétaires ». Ce sont des lois de finances quimodifient en cours d'année, lorsque cela est nécessaire desdispositions, des choix qui avaient été prévus par la loi de financeinitiale. Dans le courant de l'année 2008, 2 lois de financesrectificatives ont été prévues. L'une d'entre elle concerne desmesures pour répondre à la crise financière actuelle (celle-ci n'apas encore été adoptée). Il est également question qu'un projet deloi de finances rectificatives pour 2009 soit discuté par leparlement en début d'année prochaine pour adapter le budget 2009 auxnécessités liés à la crise. Il peut y avoir aucune LFR ou plusieursdans une même année.

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La loi de règlement : Les LFI et LFR prévoient des recettes et desdépenses. Mais la loi de règlement n'est pas un acte de prévision.Elle ne prévoit pas les recettes ou les dépenses. Elle constate lesrésultats de l'exercice de l'année civile écoulée. C'est égalementun texte voté par le parlement. En découle les réalisationseffectives et les résultats effectifs de l'année.

II – Les budgets des collectivités locales

Il n'y a pas de notion de loi de finance pour les collectivitésterritoriales car les elles ne sont pas législateurs (article 34 dela Constitution). On parle seulement de budget pour lescollectivités territoriales. Ces collectivités produisent 3catégories de budgets :

- Le budget prévisible : premier budget de l'année. Il correspond àla LFI pour l'Etat. - Le budget supplémentaire et les Décisions modificatives : budgetsadoptés en cours d'année pour modifier les choix du budgetprévisible. Ils correspondent aux LFR pour l'Etat. - Le compte administratif : Il décrit les opérations réellementeffectuées. Il correspond à la loi de règlement pour l'Etat.

III – Définition et évolution quantitative des dépenses publiquesA – Définition1 – La notion de dépense publique

Par dépense publique on veut dire les dépenses des charges de l'Etat+ celles des collectivités locales, plus celle des organismes desécurité sociale. Les dépenses publiques ne se limitent pas auxdépenses de l'Etat. Il s'agit là d'une qualification introduite parl'UE.

2 – Les notions de dépenses d'investissement et de dépenses de fonctionnement

Les dépenses d'investissement : On les appelle aussi les dépensesd'équipement ou encore dépenses en capital ». Il s'agit de dépensesqui concernent les bâtiments publics (FAC, etc.)

Les dépenses de fonctionnement : Dépenses courantes. Ellespermettent de faire fonctionner les équipements ou les employés quiutilisent le dit équipement ou encore les intérêts des emprunts.

Toute réalisation d'un équipement entraine des dépenses defonctionnement. Un équipement engendre une reconduction de dépensesde fonctionnement chaque année pendant toute la durée de cet

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équipement. Cela provoque ce que l'on appelle, une inertie dubudget.

Une nouvelle notion est apparue depuis quelques années. Il s'agit dela notion de « dépense d'avenir ». Ces dépenses concernent toutaussi bien, l'investissement que le fonctionnement. Par exemple, lesdépenses de recherche ou les dépenses de formation ou d'éducationsont considérées comme des dépenses d'avenir et par conséquent commedes investissements pour l'avenir, même s'il s'agit de dépense defonctionnement comme par exemple les salaires des chercheurs.

Les notions de dépenses d'investissement et de dépense defonctionnement sont remises en question par la pratique nouvelleissue de la LOLF, qui est celle de la fongibilité des crédits,c'est-à-dire la possibilité pour le gestionnaire, pour leresponsable d'un programme. On a la possibilité d'utiliser descrédits de fonctionnement pour financer les créditsd'investissement.

Rappel : Cette fongibilité est asymétrique.

3 – La notion de dépense au transfert

L'Etat et les collectivités territoriales redistribuent une partiede leurs ressources budgétaires à d'autres collectivités afin queces collectivités réalisent certaines dépenses. Ces dépensesapparaissent en dépenses dans le budget de l'Etat et en recettesdans le budget de la collectivité : dépenses de transferts. Ce sontsouvent des dépenses sociales ou liée au développement économique.

Le RMI fait l'objet d'un transfert du budget de l'Etat vers lesbudgets des départements. Ce sont les départements qui sont chargésde redistribuer le RMI.

4 – Les dépenses définitives et les dépenses temporaires

Les dépenses définitives : elles représentent la quasi-totalité desdépenses (par exemple les salaires). Les dépenses temporaires sont des prêts ou des avances consentiespar les collectivités publiques. On les qualifie de temporairecelles qui bénéficieront d'une aide de l'Etat.

5 – Les dépenses fonctionnelles et dépenses par nature

Les dépenses fonctionnelles : Organiser les dépenses de manièrefonctionnelle signifie qu'on les rassemble par objectifs, par

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programmes qu'on peut aussi appeler des fonctions. Il existe parexemple des fonctions cultures, sécurité, défenses, logement.

Les dépenses par nature : Les dépenses peuvent être classées parnature de la charge. Les salaires, les intérêts sur emprunts, lesfrais de déplacement, les loyers. Dans ce cas là, on aligne les postes de défenses par nature sans lesrattacher à tel ou tel objectif.

On peut combiner une présentation des dépenses par fonction et parnature. Cela signifie qu'à l'intérieur de chaque fonction, on varetrouver les dépenses par nature qui concerne cette fonction etuniquement celle-ci.

B – L'évolution chiffrée

Document sur le budget 2008 en « flyers ».

Les dépenses de l'Etat : 300 milliards d'euros.Les dépenses des collectivités locales : 180 milliards d'euros.Les dépenses de la sécurité sociale : 450 milliard d'euros minimum.

Les principales dépenses de l'Etat sont :

La mission enseignement scolaire : 60 milliard d'euros.La mission recherche et enseignement supérieur : 24 milliards.La mission défense : 48 milliards d'euros.La mission sécurité : 16 millions d'euros.La mission culture : 2,9 milliards d'euros. La mission justice 8 milliards d'euros

Les intérêts de la dette de l'Etat : 45/50 milliards d'euros.

Il faut observer que les dépenses de l'Etat sont essentiellement desdépenses de fonctionnement. Ce sont les collectivités publiques quieffectuent la plupart des travaux sur les routes. Les collectivitéslocales réalisent 73% des équipements civils (hors défense). En1980, avant les collectivités locales ne réalisaient que 10% desdépenses.

Section 2 : Les notions d'équilibre budgétaires

Il n'existe pas de règles juridiques qui imposent à l'Etat deprésenter son budget en équilibre. L'Etat doit seulement tenircompte d'un équilibre économique et financier général. Lescollectivités locales ont une obligation d'équilibre du budget. Il

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existe un débat ancien entre économistes sur le sujet de l'équilibrebudgétaire. Les uns estimant que cet équilibre des dépenses et desrecettes est indispensable. Les autres estimant que l'essentielétait l'équilibre général de l'économie.

I – Les conceptions théoriquesA – La conception libérale classique

Pour les économistes libéraux classiques, l'équilibre des dépenseset des recettes est indispensable car il constitue une garantie pourla neutralité de l'Etat par rapport au marché économique.L'équilibre entendu dans ce sens est un équilibre strict. Il ne peuty avoir ni déficit, ni excédent.

Pas de déficit : les déficits sont interdits car leur financementoblige soit de recourir à l'emprunt et par conséquent d'alourdir lesdépenses des futurs budgets avec les intérêts à payer notamment,soit à recourir à une augmentation des impôts, et l'on diminue alorsle pouvoir d'achat ou la capacité d'investissement descontribuables.

Pas d'excédent : S'il y a excédent, cela signifie que l'on a prélevéplus d'impôts que nécessaire. D'autre part, présenter le budget enexcédent c'est prendre le risque d'engager des dépenses qu'il faudrareconduire (que l'on risque de ne pas pouvoir supprimer dansl'avenir).

B – La conception keynésienne

Selon Keynes, l'équilibre qu'il faut réaliser c'est avant toutl'équilibre général de l'économie. Pour les keynésiens, le budgetpeut parfaitement être déficitaire ou excédentaire ou strictementéquilibré. L'essentiel c'est qu'il permette de réaliser l'équilibreentre la consommation et la production, autrement dit le soldebudgétaire est considéré comme un instrument, comme un moyend'intervention pour relancer l'économie, par une augmentation desdépenses publiques.

II – Les conceptions techniquesA – Les notions de solde budgétaire

Le solde c'est la différence entre les dépenses et les recettes. Lesolde budgétaire des lois de finances est appelé : le soldeprévisionnel. Lorsque le budget a été exécuté on parle alors desolde d'exécution.

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B – La notion de besoin de financement

Le besoin de financement est une notion plus large que celle dedéficit. Il faut ajouter au déficit le remboursement des empruntsdes années précédentes (l'amortissement de la dette). Il fautcouvrir le déficit mais il faut également rembourser chaque année lecapital emprunté. Le besoin de financement tel qu'il figure dans leprojet de loi de finance pour 2009 est de 165,3 milliards d'eurosdont 52 milliards de déficit budgétaire.

III – Les notions de l’équilibre juridique

La notion d’équilibre, d’un point de vue juridique, est différenteselon que l’on considère l’Etat ou les collectivités territoriales.

En ce qui concerne l’Etat, la notion d’équilibre figure à l’article1er de la LOLF. Il ne s’agit pas d’un équilibre comptable, mais d’unéquilibre au sens keynésien du terme. Ce qui est pris en compte estl’équilibre général économique et financier. Par conséquent, lesdéséquilibres comptables entre les dépenses et les recettes sontpossibles. Par exemple, un déficit est possible. Il n’existe doncpas de règles juridiques imposant un équilibre comptable au budgetde l’Etat. C’est le Parlement qui définit l’équilibre (qui vadéfinir quelle est la différence entre les dépenses et lesrecettes).

Les collectivités locales ont l’obligation de voter leur budget enéquilibre comptable.

Chapitre 2   : La transparence des finances publiques

Section 1 : Un budget lisible, un budget clair

Jusqu’en 2005, la présentation du budget de l’Etat était trèscompliquée. Les crédits qui y figuraient étaient dispersés au seindes ministères sous la forme de 850 comptes que l’on appelait deschapitres. Depuis 2006 (LOLF), les crédits sont répartis à traversun nombre d’objectifs limités que l’on appelle des missions, desprogrammes et des actions.

A – Les missions

Les missions sont des grands objectifs qui représentent lespolitiques publiques qu’entend mener l’Etat (culture, sécurité,etc.). Ces missions peuvent relever d’un ou plusieurs ministères.Elles sont composées de programmes.

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B – Les programmes

Les programmes sont ministériels. Il s'agit d’objectifs devantpermettre de réaliser l’objectif essentiel qui est la mission. Leprogramme constitue la clé de la réforme budgétaire car il pose enprincipe une budgétisation des crédits par objectifs. Cela signifieque les décideurs publics qu’ils soient gestionnaires ou qu’ilsappartiennent à la classe politique, sont conduits à raisonner entermes d’objectifs et pas seulement comme autrefois seulement entermes de moyens.

Par exemple, lors de la discussion budgétaire les parlementairessont obligés de raisonner en termes d’objectifs, de fixer desobjectifs, c'est-à-dire de raisonner à travers une culture de lastratégie. A l’ancien budget de moyens succède ce que l’on appelleun budget de résultats.Ces programmes sont ensuite divisés en sous-objectifs appelés lesactions, également susceptibles d’être divisées en sous-actions.

Section 2 : Les structures de pilotage du budget clairement identifiablesI – La Direction du budget

Elle joue un rôle essentiel dans la préparation des lois definances. Elle est chargée de proposer au ministre du budget lesgrands choix en matière de recettes et de dépenses. Une fois qu’ontété fixées les priorités gouvernementales, elle les traduits enmoyens budgétaires. Elle suit également l’exécution du budget etelle peut proposer des moyens pour améliorer la réalisation desobjectifs qui ont été fixés.

Par ailleurs, la Direction du budget assure depuis le 1er janvier2006 le pilotage de la mise en œuvre de la LOLF. Elle a également encharge l’élaboration d’une programmation pluriannuelle des dépensesde l’Etat. Au total, la Direction du budget doit remplir septmissions :- Proposer une stratégie globale des finances publiques sur le longterme ;- Elaborer une programmation pour mettre en œuvre cette stratégiesur le long terme ;- Veiller à ce que la budgétisation annuelle soit cohérente avec laprogrammation ;- S’assurer que la gestion publique réponde à une logique deperformance ;- Participer à l’élaboration du budget communautaire et à soncadrage pluriannuel ;

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- Définir les outils budgétaires à utiliser ;- Assurer la tutelle stratégique des organismes publics.

II – La Direction générale de la modernisation de l’Etat

Une administration avait été créée en mars 2002 pour mettre en placela LOLF. Cette administration s’appelait la Direction de la réformebudgétaire. Il avait été décidé que cette Direction disparaitraitlors de la mise en place de la LOLF (1er janvier 2006). Parconséquent, la Direction de la réforme budgétaire a été supprimée au1er janvier 2006 et lui a succédé une autre administration, appeléela Direction générale de la modernisation de l’Etat (DGRE). La DGREa pour fonction de mettre en application les grandes orientationsconcernant la modernisation de l’Etat au service des usagers. Parmises fonctions, on peut retenir qu’elle doit faire en sorte de rendrecompréhensible l’action de l’Etat, elle doit simplifier lesprocédures administratives, développer l’administration électroniqueet participer à la dématérialisation des démarches administratives.

III – Le comité interministériel d’audit des programmes (CIAP)

Il s'agit d’une institution composée de hauts fonctionnairesappartenant aux grands corps de contrôle de l’Etat. Elle estprésidée par un inspecteur général des finances. Sa fonction est degarantir la qualité des projets de programme, autrement dit degarantir la pertinence des objectifs et des indicateurs de résultatqui leurs sont associés et qui seront intégrés dans le projet de loide finance.

Section 3 : Des principes budgétaires garant de la transparence

Dans tout régime démocratique, la recherche de la transparencefinancière est un objectif central. Cette recherche est dominée parla mise en avant d’un principe qui est celui de la clarté desdocuments budgétaires, et cela pour que les décisions prises par lesparlementaires ne soient pas faussées par un manque d’information oupar des informations inexactes. Par ailleurs, la transparence estégalement recherchée pour pouvoir suivre l’exécution du budget etpour être en mesure de juger de la régularité et de la sincérité descomptes publics. Cela a nécessité la mise en place de nombreux principes depuis ledébut du XIXème siècle.

I – Le principe de spécialité budgétaire

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Ce principe est né sous la Restauration. Il signifie que l’ondétaille les crédits, qu’on spécialise les crédits par catégories dedépenses. Actuellement, les crédits sont ouverts par missions et parprogrammes, et l’ont dit que l’unité de spécialité est le programme.Les crédits sont spécialisés par programme.

II – Le principe de l’universalité budgétaire

Ce principe comporte deux règles :

- La règle de non-affectation : elle consiste à imputer l’ensembledes recettes sur l’ensemble des dépenses. Autrement dit, il n’estpas autorisé d’affecter une recette particulière à une dépenseparticulière. Cette règle est souvent transgressée car certainscrédits sont affectés à certaines dépenses. C’est par exemple le casdes budgets annexes.

- La règle de non-compensation : elle est aussi parfois qualifiée derègle du produit brut. Elle consiste à interdire la compensationd’une dépense par une recette. Les recettes et les dépenses doiventfigurer pour l’intégralité de leur montant au budget, elles nepeuvent être compensées.

Ainsi, dans le cas où un contribuable est un fournisseur de l’Etat,d’un côté ce contribuable est redevable de ses impôts envers l’Etat,d’un autre côté l’Etat lui doit le prix de la prestation qui lui aété rendu par ce contribuable. Pour simplifier les choses pour noscerveaux de larves atrophiées, il est possible de faire ladifférence entre les sommes dues d’un côté par le contribuable, d’unautre côté par l’Etat, et celui qui resterait redevable verserait ladifférence. En fait, cette possibilité est interdite, on ne peutcompenser. Il faut que d’un côté le contribuable règle sa dette, etque de l’autre côté l’Etat règle la sienne au contribuable.

III – Le principe de sincérité budgétaire

Ce principe a été introduit par la LOLF. Selon ce principe, les loisde finance doivent présenter de façon « sincère » les ressources etles charges de l’Etat. Les ressources ne doivent alors pas êtresurestimées et les dépenses ne doivent pas être sous-estimées.

Ce principe de sincérité s’applique également aux comptes de l’Etat.La comptabilité de l’Etat doit donner ce que l’on appelle une imagefidèle de son patrimoine et de sa situation financière.

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Ce principe est donc à la fois budgétaire et comptable. La Cour descomptes a pour fonction de certifier la sincérité des comptes del’Etat.

IV – Le principe d’unité budgétaireA – Définition

Selon la règle de l’unité budgétaire, l’ensemble des dépenses et desrecettes doit être présenté dans un seul document. Cela a pourobjectif de permettre aux élus d’avoir une vue globale exhaustivedes prévisions budgétaires. Cette règle pose deux problèmes.

1 – Le document budgétaire lui-même

Le budget de l’Etat est présenté en trois parties : - Budget général,- Budgets annexes,- Comptes spéciaux.

Si la quasi-totalité des recettes et des dépenses figurent bien aubudget général, d’autres recettes et d’autres dépenses sontcependant inscrites aux budgets annexes et aux comptes spéciaux. Parconséquent, le budget de l’Etat n’est pas réellement unifié (notonsque ces saloperies de budgets annexes et de comptes spéciaux sonttout de même fournis, le seul problème est en réalité qu’il n’y apas une colonne « recettes » et une colonne « dépenses »).

2 – Présentation d’ensemble de tous les comptes publics

(Etat, collectivités territoriales et organismes de sécuritésociale). Il n’existe aucun document centralisant toutes les opérationsréalisées par les collectivités territoriales, l’Etat et lesorganismes de sécurité sociale. On s’efforce actuellement de trouverles moyens de consolider les opérations financières de ces troiscatégories d’acteurs.

B – Les grandes catégories du budget de l’Etat1 – Le budget général

Il comprend environ 95% du budget de l’Etat. Les recettes sontinscrites globalement, aucune d’entre elles n’est affectée à unedépense particulière (non-affectation).

2 – Les budgets annexes

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Ils retracent des opérations effectuées par les services de l’Etatqui n’ont pas de personnalité morale et dont l’activité consiste àproduire des biens ou des services qui donnent lieu au paiementd’impôts. Par conséquent, les budgets annexes ont été créés pourtraiter à part des opérations commerciales de l’Etat. On isolecertains services publics et les dote d’un budget propre appelébudget annexe. Ce budget figure en annexe du budget général. Il enexiste actuellement deux : le budget annexe contrôle et exploitation aérienset le budget annexe publications officielles et informations administratives.

Ils doivent être votés en équilibre. Si un excédent est dégagé,l’excédent est reversé au budget général. S’il y a un déficit, ilsera comblé par une subvention d’équilibre du budget général.

3 – Les comptes spéciaux

Ils enregistrent les opérations que l’on a voulu individualiser enraison de leur caractère spécifique, généralement temporaire. A ladifférence des budgets annexes, leur solde peut être excédentaire oudéficitaire et ce solde est reporté d’une année sur l’autre.

Chapitre 3   : L’intégration des finances de l’Etat, des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale

Se pose aujourd’hui la question d’une vision d’ensemble des financespubliques afin d’en contrôler l’évolution et par cela de contrôlerl’évolution du déficit public. L’Etat s’est fixé pour ses dépensesune norme d’évolution de ses dépenses : le taux d’inflation. Ilsouhaiterait que cette norme de dépenses puisse s’appliquer auxautres catégories des finances publiques et notamment aux dépensesdes collectivités locales.

Section 1 : La maîtrise des dotations de l’Etat allouées aux collectivités localesI – Les subventions allouées par l’Etat aux collectivités locales

On appelle cela les concours de l’Etat. Ils sont de l’ordred’environ 75 milliards d’euros. L’Etat accorde aux collectivitéslocales deux catégories de subventions. D’une part les subventionsde fonctionnement, d’autre part les subventions d’investissements.

Les dotations de fonctionnement servent à financer les dépensescourantes des collectivités locales (dépenses…de fonctionnement !).Parmi ces subventions, la plus importante s’appelle la dotationglobale de fonctionnement. Elle représente environ 40 milliardsd’euros. Elle est accordée aux communes, aux départements et auxrégions.

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Les dotations d’investissement servent à financer les dépensesd’équipement (routes, etc.). Il en existe principalement deux : ladotation globale d’équipement, versée aux communes dont lapopulation est inférieure à 20 000 habitants, ainsi qu’auxdépartements. La seconde est le fonds de compensation de la TVA. Lescollectivités locales sont considérées comme des consommateurs etsupportent par conséquent, comme tout consommateur final, latotalité de la TVA. Elles ne peuvent pas récupérer la TVA qu’ellesont payée lors d’un achat sur la TVA qu’elles auraient encaissé lorsd’une vente comme c’est le cas pour les entreprises.

Cela est incohérent car la dotation est équivalente à environ 20% dubudget des collectivités pour l’achat d’équipement…soit le montantde la TVA. C’est pourquoi le fonds de compensation de la TVAconsiste à rembourser aux collectivités locales la TVA qu’elles ontpayé à leur fournisseur lorsqu’elles ont fait l’acquisition d’unbien d’équipement. Ce remboursement ne concerne que les dépensesd’investissement. Elle n’est pas remboursée lorsqu’elle concerne lesdépenses de fonctionnement.

II – Les dispositifs de régulationA – Le contrat de solidarité

L’Etat a mis en place un dispositif qui vise à encadrer l’évolutionde la plupart des dotations : le contrat de solidarité. Il consisteà placer dans ce qu’on appelle une enveloppe (un morceau de papierreplié sur lui même afin d’accueillir un bout de papier) la plupartdes dotations et à faire évoluer le montant de cette enveloppe enfonction de l’évolution prévue des prix à la consommation.Le contrat de solidarité s’inscrit dans une logique d’ensemble qui apour objectif de maitriser les dépenses publiques.

B – La Conférence nationale des finances publiques

Il s'agit d’une institution créée par un décret du 5 mai 2006. Elleréunit chaque année les représentants des trois grandes composantesdes finances publiques (Etat, collectivités locales et organismes desécurité sociale). Elle a pour fonction de proposer les moyens demaîtriser les dépenses publiques et la dette publique.

C – La Conférence nationale des exécutifs

Cette institution a été créée le 4 octobre 2007. Elle a pour missionde faire participer les collectivités territoriales à l’élaborationdes normes qui les concernent ainsi qu’à la réforme de la fiscalité

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locale. Il s'agit d’un lieu de concertation. Cette institutioncomprend les ministres concernés par les affaires locales (ministresdes finances, de l’intérieur, de l’écologie, et des affaireseuropéennes), ainsi que par les représentants des trois grandesassociations d’élus locaux (association des maires de France,assemblée des départements de France et association des régions deFrance).

On y trouve également le président du comité des finances locales etcelui du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Leprésident de cette Conférence est le Premier ministre. Sont donc créés récemment des institutions entre les différentsacteurs financiers publics.

Section 2 : La maitrise des finances sociales

Elles représentent plus de 450 milliards d’euro (plus que l’Etat oules collectivités locales). Elles ne font qu’augmenter depuis unetrentaine d’années.

I – Les contraintes liées aux évolutions de la démographieA – Les problèmes posés

Ces problèmes concernent essentiellement la question de ces enfoirésde retraités. L’allongement de la durée de la vie accroit lacharge des retraites. Par ailleurs, la diminution du nombre desactifs a des effets sur les cotisations de retraite (baisse descotisations), ce qui remet en question l’équilibre du régime desretraites. Des solutions sont proposées.

- Chaque individu constitue sa propre retraite. Par exemple, encotisant à ce que l’on appelle des fonds de pension. Ce sont desorganismes privés qui placent l’argent de leurs cotisants et leursservent une pension au moment de leur retraite. Ces fonds de pensionsont assez limités, ils dépendent en effet aux placements qu’ils ontopérés, et certains d’entre eux sont ainsi remis en question par lacrise financière actuelle. - Augmenter les cotisations qui pèsent à la fois sur les entrepriseset sur les salariés. Le poids des prélèvements obligatoires étantdéjà élevé (44% du PIB), cela pose problème en pratique.- Constituer des réserves pour plus tard. La Suède ou le Canada ontainsi institué un fond national de retraite (pour pouvoir financerles retraites). Le Canada, pour financer ce fond, a institué une« surcotisation ».- La solution qui va être adoptée en France consiste à augmenterl’âge de la retraite.

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B – La progression des dépenses

Le nombre de retraités va augmenter, ce qui est une sourceimportante d’augmentation des dépenses. Ceux nés juste après laseconde guerre mondiale peuvent faire valoir leur droit à laretraite (60 ans). Ce phénomène va s’ajouter au fait que laproportion des personnes âgées de plus 60 ans a déjà augmenté deplus de 4% depuis 1946 et progresse actuellement de près de 5%/an.On estime qu’à partir de 2010, les plus de 60 ans seront plusnombreux que les moins de 20 ans.

Le coût des prestations sociales va aller en s’accroissant pour deuxraisons :- Allongement de la durée de vie.- Baisse, proportionnellement à autrefois, des salaires servant debase au calcul des retraites.

C – L’évolution des recettes

Elle ne sera pas plus importante car elle dépend du nombre desactifs et également de la situation de l’emploi.

II – Les contraintes liées à la crise de l’emploi

Le nombre de demandeurs d’emploi a des conséquences sur le niveaudes dépenses sociales. Cela concerne autant l’Etat que lesorganismes de sécurité sociale.

Section 3 : Quelles normes pour les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale ?

Depuis 1983, l’Etat s’est efforcé de ne pas augmenter ses dépensesdans des proportions supérieures aux évolutions du PIB, mais cettenorme de dépenses a subi de très nombreuses exceptions. Ce n’est que depuis 2003 que cette norme qui consiste à faireévoluer les dépenses au rythme de l’inflation est respectée.Cependant, l’Etat souhaiterait que cette norme de dépenses soitétendue aux autres secteurs publics, et notamment aux collectivitésterritoriales.

La réponse à la crise financière actuelle va nécessiter uneintervention accrue de l’Etat et par conséquent une augmentation deses dépenses. On se pose actuellement la question de dissocier lesdépenses de l’Etat habituelles et ses dépenses exceptionnelles liéesà la lutte contre la crise.

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Il serait question d’isoler les dépenses liées à la crise au seind’une nouvelle mission du budget de l’Etat qui serait une missionspécifique dédiée à la lutte contre la crise.

Chapitre 4   : La programmation pluriannuelle des finances publiques

Une des innovations les plus importantes de ces dernières années enmatière de finances publiques consiste dans le souci de contrôler lagestion publique, de la piloter. La question de la programmation des dépenses publiques dans le tempsest centrale pour toutes les stratégies budgétaires contemporaines.La France vient d’instituer une programmation pluriannuelle pour lesannées 2009/2010/2011. Cette programmation concerne les dépenses del’Etat. Par ailleurs, une révision de la Constitution de juillet2008 a institué une nouvelle catégorie de lois, lesquelles sont leslois de programmation pluriannuelle des finances publiques. Unepremière loi de ce genre a été votée à l’automne dernier.

Section 1 : Les enjeux de la programmation pluriannuelle

Elle se heurte à une règle budgétaire importante qui est le principed’annualité budgétaire.

I – Le principe d’annualité budgétaire

L’origine de ce principe est d’abord politique. Il tire ses originesdu consentement de l’impôt. Lorsque les premiers impôtsrévolutionnaires ont été créés en 1790, il a été décidé qu’ilsseraient levés pour une année. Cela concernait par conséquent lesressources, et il a été ensuite été étendu aux dépenses.

A – Exposé du principe

Pour l’Etat, la loi de finance initiale est établie chaque annéeavant le 31 décembre pour l’année civile çà venir, c'est-à-dire du1er janvier au 31 décembre. L’exécution de ce budget se fait sur lamême période.

Les collectivités locales devraient normalement adopter leur budgetavant la fin de l’année pour l’année suivante, mais elles sontautorisées à le voter jusqu’au 31 mars car elles ne possèdent pastoutes les informations nécessaires concernant leurs finances, quileurs sont fournies par l’Etat, avant la fin de l’année.

B – Les origines et les inconvénients du principe

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Ce principe a été institué à la Révolution afin qu’existe unerégularité dans le temps qui n’existait pas sous l’Ancien Régime. Ona considéré que la période (un an) n’était ni trop longue ni tropcourte. Si elle était plus courte, les débats budgétaires seraienttrop nombreux et si elle était plus longue, le contrôle du Parlementserait trop espacé dans le temps.

Le problème qui s’est posé, par rapport à ce principe d’annualité,est que l’Etat est de plus en plus intervenu en réalisant deséquipements de plus en plus importants. Or, la réalisation de ceséquipements nécessitait parfois plusieurs années. En vertu duprincipe d’annualité, le budget n’autorise à dépenser que sur uneannée, ce qui voulait dire que pour réaliser de gros équipements ilfallait voter chaque année pour la tranche à réaliser l’annéesuivante. On ne pouvait pas adopter l’ensemble de l’opération. De cefait, les gros investissements étaient soumis aux fluctuationspolitiques, économiques ou financières.

Ainsi, si une nouvelle majorité hostile à la poursuite des travauxentrait en fonction, elle pouvait faire cesser ces opérations carl’Etat n’était juridiquement engagé que pour une année. Il a parconséquent fallu mettre en place un dispositif permettant depoursuivre des travaux sur plusieurs années et d’engager l’Etat surplusieurs années. Ce dispositif s’appelle les autorisationsd’engagement.

II – La pluriannualité travestie

Dans notre droit budgétaire, la pluriannualité est généralementprésentée de la manière suivante : l’annualité est la règle, lapluriannualité est l’exception. A y regarder de plus près, ons’aperçoit que des dépenses pluriannuelles existent sans qu’ellessoient qualifiées comme telles. - La création d’emplois nouveaux dans la fonction publique. Eneffet, lorsque l’Etat crée un emploi dans la fonction publique, etqu’il recrute un fonctionnaire, il prend de fait un engagementpluriannuel car il s’engage à payer le traitement de cefonctionnaire puis sa retraite et cela sur une longue durée. - La charge de la dette publique. En effet, lorsque l’Etat émet unemprunt, il s’engage à payer les intérêts pour toute la durée del’emprunt. Par conséquent il s’engage dans un processus pluriannuel.

Section 2 : Les outils classiques de la programmation pluriannuelle

Traditionnellement, il existe deux dispositifs : les autorisationsd’engagement d’une part, et les lois de programmation d’autre part.

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I – Les autorisations d’engagement

Elles étaient autrefois qualifiées, avant la mise en œuvre de laLOLF, d’autorisations de programme. Ces autorisations instaurent uneprogrammation des dépenses d’investissement et des dépenses defonctionnement sur plusieurs années (ce dispositif s’applique pourtoutes les dépenses de fonctionnement, excepté celles qui concernentles rémunérations des personnels). Si l’on était tenu de respecterle principe d’annualité budgétaire, il serait nécessaire dans le casoù l’on voudrait réaliser une dépense sur plusieurs années, de voterchaque année dans le cadre du budget la partie de la dépenseconcernant cette année, c’est-à-dire par exemple la partie de ladépense concernant les travaux devant être réalisés au cours decette année (ex : pour 2009, on ne peut pas voter desinvestissements pour après 2009). L’Etat ne s’engage pasjuridiquement au-delà d’une année, toujours en vertu de ceprincipe : ainsi, si par exemple un équipement ne peut être réaliséque sur plusieurs années, il pourrait être décidé de ne paspoursuivre les travaux, simplement parce que l’Etat s’engagejuridiquement sur une année. D’autre part, si l’on inscrivait letotal de la dépense sur 1 an cela augmenterait artificiellementpuisque une partie seulement de ces dépenses serait réalisée surl’année. Par conséquent, on a institué un dispositif qui permet àl’Etat de s’engager juridiquement sur plusieurs années. Ce sont lesautorisations d’engagement. Ces autorisations sont accompagnées dece que l’on appelle des crédits de paiement (CP). Ils correspondentau paiement de la dépense chaque année lorsque le travail a étéfait.

En résumé, les autorisations d’engagement (AE) sont pluriannuelles :elles engagent l’Etat sur la durée du programme. Cela signifie quel’équipement qui est prévu devra être réalisé et que les fonds pourle financer sont d’ors et déjà prévus. Ces fonds ne seront débloquésque par tranches au fur et à mesure de la réalisation des travaux.Ainsi, les sommes nécessaires sont inscrites au budget, votées(adoptées), ce qui est engage l’Etat et ce qui oblige chaque année àinscrire les crédits nécessaires au paiement du service fait parl’entreprise. Ces crédits qui sont inscrits chaque année et quicorrespondent à la tranche du programme d’équipement qui devra êtreréalisée sont qualifiés de crédits de paiement. Ces derniers sontannuels. Ce sont les seuls pris en compte dans les charges dubudget. Ils rentrent dans le calcul du solde budgétaire.

II – Les lois de programmation

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Les lois de programme (ou lois de programmation / d’orientation)sont des lois qui définissent certains objectifs de l’actionéconomique et sociale de l’Etat. Il ne faut pas les confondre avecles autorisations d’engagement. Ces lois n’ont aucun caractèreobligatoire, il s’agit seulement d’indications qui n’engagent pasl’Etat. Ce sont des déclarations d’intention, formalisées dans uncadre législatif. Les lois de programme sont des lois ordinaires.Cependant, sous les IIIe et IVe Républiques, les lois de programmeavaient la même valeur que le budget. C’est l’ordonnance du 2janvier 1959 qui leur a retiré leur valeur budgétaire et qui les alimitées à des lois ordinaires. Il y a des lois de programmationpour l’éducation, la dépense, et ainsi de suite. Ce sont des loisordinaires, et par conséquent elles sont le plus souvent nonappliquées en raison de leur faible force. NB : Les autorisationsd’engagement figurent dans le cadre des lois de finances, ce quin’est pas le cas des lois de programme.

Ces outils n’étaient pas suffisants pour développer une véritablestratégie budgétaire. Ces outils ne concernaient que quelqueséléments. Il fallait faire en sorte de dépasser l’annualité. Onpouvait recourir à la pluriannualité en Grande-Bretagne, mais pas enFrance avant 2008.

Section 3 : La nouvelle programmation pluriannuelle

Les dispositifs que l’on vient de voir existent toujours. A partirde 2008, on en a simplement ajouté de nouveaux. Cette nouvelleprogrammation est représentée par une programmation des dépenses del’Etat mais aussi une programmation de l’ensemble des finances.

I – La programmation pluriannuelle : une réforme gestionnaire

La stratégie budgétaire de l’Etat s’enracine (ou s’organise)aujourd’hui dans la révision générale des politiques publiques.Cette révision générale des politiques publiques (RGPP) sert defondement à l’élaboration d’une programmation sur trois ans(triennale) des dépenses de l’Etat. Ce dispositif ne fait pasl’objet d’une décision législative qui remettrait en question leprincipe d’annualité budgétaire. Il s’agit d’un dispositifgestionnaire qui vise à rationaliser la gestion budgétaire del’Etat. Cette programmation est élaborée par les services duministère du budget dans le cadre de la préparation du budget.Seules les prévisions concernant la 1ère année font l’objet d’un voteau Parlement dans le cadre de l’adoption de la loi de finances.Cette programmation a été préconisée par un rapport au gouvernementqui concernait la mise en œuvre de la LOLF. Ce rapport a été écrit

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par Alain Lambert (UMP) et Didier Migaud (PS) qui sont lesinitiateurs de la LOLF. Par ailleurs, la programmation budgétairepluriannuelle a officiellement été annoncée par le président de laRépublique le 12 décembre 2007 lors du premier conseil demodernisation des politiques publiques qui s’est tenu au moment dela présentation de la première tranche de la RGPP. Les propos duPrésident de la République étaient les suivants : « Nous mettrons enplace pour 2009 / 2011 un budget pluriannuel cohérent avec notretrajectoire de finances publiques. Il s’agit d’une révolution dansnotre fonctionnement administratif ». Cela faisait une quinzained’année que l’on parlait de cette réforme mais elle ne s’étaitjamais faite. Elle a été pour la première mise en œuvre lors del’élaboration du budget 2009 sur une période qui correspond à cellede la RGPP (3 ans).

Ce dispositif ne remet cependant pas en question le principed’annualité budgétaire car seules les lois de finances annuelles ontune valeur contraignante et continuent à être adoptées à l’automnepar le Parlement. La différence est que, bien que discutée etsoumise à l’adoption des parlementaires chaque année, les projets delois de finances s’inscrivent maintenant dans le cadre d’uneprogrammation triannuelle. D’autre part, alors que les lois definances concernent les dépenses et les recettes, la programmationpluriannuelle ne fixe quant à elle que des plafonds de dépenses.Cette programmation qui se limite aux dépenses de l’Etat concerneles missions qui figurent au budget (les politiques publiques,donc). Le périmètre de cette programmation comprend les crédits desmissions figurant au budget général.

On qualifie cette programmation de programmation semi-glissante carle dispositif fonctionne de la manière suivante : En premier lieu unplafond global de dépenses est fixé pour chacune des années. Ceplafond est déterminé en fonction de ce que l’on appelle une normede dépenses. Il s’agit actuellement du taux d’inflation prévu pourl’année en question. Ce plafond fait l’objet d’une programmationferme, fixe, immuable, sur trois ans (excepté la possibilité d’unemodification liée à une variation du taux d’inflation). En secondlieu des plafonds sont fixés par missions. Ces plafonds sont fermespour les deux premières années mais révisables la troisième année enfonction des contraintes de cette dernière. En troisième lieu sontenfin déterminés les crédits répartis par programme (plafonds parprogrammes) En ce qui concerne les programmes, les crédits sontfermes la première année mais modifiables les deux années suivantes.Cette programmation peut être qualifiée de semi-glissante puisqu’onpeut faire glisser des dépenses d’une année sur l’autre. La

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troisième année sert de fondement à la programmation pluriannuellesuivante (pour 2009/2011, la suivante sera 2011/2013).

II – La loi de programmation pluriannuelle des finances : une réforme politique

Une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques a étéinstituée par la loi de révision constitutionnelle du 23 juillet2008. Cette loi de programmation n’abroge cependant pas les loisdont on a parlé tout à l’heure. Selon l’article 34 révisé de laConstitution, les lois de programmation déterminent les objectifsdes actions de l’Etat. De plus, les orientations pluriannuelles desfinances publiques sont définies par des lois de programmation.Elles s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes desadministrations publiques. Autrement dit, la programmationpluriannuelle des finances publiques est associée à la réalisationde l’équilibre des dépenses et des recettes publiques. Par ailleurs,cette programmation concerne l’ensemble du secteur financier public,c’est-à-dire l’Etat, les collectivités locales et les organismes desécurité sociale. Autrement dit, cet article s’inscrit dans lalogique des critères de convergence et du pacte de stabilitéinstitué dans le cadre de l’UE. On a ainsi créé une catégorie delois qui va complètement dans le sens de l’UE. Il faut toutefoissouligner que cette loi de programmation pluriannuelle des financespubliques est comme toutes les lois de programmation dépourvue deforce obligatoire sur le plan financier. Ce ne sont pas des lois definances mais bien des lois ordinaires. Elles peuvent donc être ounon appliquées. Néanmoins, il était important de donner un caractèresolennel par un vote des parlementaires non seulement auxengagements pris dans le cadre du pacte de stabilité et decroissance mais également à une logique nouvelle de gestion desfinances publiques. Par ailleurs, il est aussi important que lamaîtrise des finances publiques soit conçue de manière consolidée /globale, ce qui signifie que soient prises en considération nonseulement les dépenses et les recettes mais les dépenses et lesrecettes de l’ensemble du secteur public (pas seulement l’Etat). Onne peut plus considérer aujourd’hui les finances de l’Etat demanière indépendante de celles des collectivités locales et desorganismes de sécurité sociale. C’est la raison pour laquelle letexte constitutionnel (l’article 34) fait référence aux financespubliques dans leur totalité. C’est la même chose pour l’équilibredes comptes publics qui doit être considéré de manière globale.

NB : il faut souligner que la conférence nationale des financespubliques, laquelle réunit les représentants des différentescomposantes du système financier public, va dans le sens d’uneglobalisation, c’est-à-dire d’une consolidation des comptes publics.

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Chapitre 5   : La mobilisation des ressources fiscales

Section 1 : Une grande variété de prélèvements obligatoires

I – Définition de l’impôt et des autres prélèvements obligatoires

La notion de prélèvement obligatoire est utilisée en France pourdésigner d’une part les impôts prélevés au profit de l’Etat, ou descollectivités locales, ou encore des organismes de sécurité sociale,et d’autre part les cotisations sociales prélevées au profit desorganismes de sécurité sociale, non considérées comme des impôts. Eneffet, on considère que les impôts sont sans contrepartie. Or lescotisations sociales ont une contrepartie (comme c’est le cas pourle remboursement des médicaments par exemple). L’ensemble desprélèvements obligatoires représente environ 44% du PIB et plus de20% sont représentés par les prélèvements sociaux. Il est trèsdifficile de comparer les prélèvements obligatoires d’un pays à unautre car les services publics rendus par le secteur public ne sontpas identiques. En effet, il y a des pays où la couverture socialeest nulle alors qu’en France elle est au contraire très importante.Les débats les plus nombreux concernant la fiscalité sont relatifs àla justice fiscale et à la simplification des systèmes fiscaux.

II – Caractéristiques et évolutions des impôts

L’impôt constitue l’essentiel des ressources de l’Etat avec environ300 milliards d’euros. Il représente 90% des ressources définitivesde l’Etat. Le reste des recettes est constitué par des revenusprovenant de l’exploitation des domaines publics et privés. Lesprincipaux impôts d’Etat sont la TVA (qui représente 45% du totaldes impôts d’Etat), l’impôt sur le revenu des personnes physiques,l’impôt sur les sociétés et la taxe intérieure sur les produitspétroliers. Ce sont les quatre principaux impôts d’Etat. Il y en abien d’autres (230 environ). L’impôt représente environ la moitiédes ressources des collectivités locales. Les principaux impôtslocaux sont la taxe professionnelle, la taxe d’habitation, la taxefoncière sur les propriétés bâties et non bâties. Il en existebeaucoup d’autres tel que la taxe sur la publicité, sur les eauxminérales, sur les permis de conduire, la taxe de séjour(généralement comprise dans le prix des chambres d’hôtels), la taxesur les remontées mécaniques. En résumé, il y a des taxes à peu prèssur tout (sauf l’air). Les organismes de sécurité sociale sontfinancés à la fois sur des impôts et par des cotisations sociales.Ces dernières sont dues à la fois par les salariés et par lesemployeurs. Les impôts sociaux sont maintenant une source de

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financement de plus en plus importante de la sécurité sociale. Parmices impôts, le plus important est celui sur le revenu des personnesphysiques qui s’appelle la contribution sociale généralisée.

Section 2 : Les résistances à l’impôtI – Les révoltes fiscales

C’est un phénomène universel.

A – Les révoltes fiscales en France

Dans la période contemporaine, deux grandes révoltes fiscales ont eulieu en France. Il s’agit du mouvement Poujade d’abord puis dumouvement Nicoud. Ce sont des mouvements qui ont profondément marquél’administration fiscale française. Ils ont été, notamment le secondmouvement, des mouvements très violents de révoltes contrel’administration fiscale.

S’agissant du mouvement Poujade, il s’agit d’un mouvement decontestation de l’impôt qui s’est développé dans les années 1950. Ila été créé par un commerçant du centre de la France qui s’appelaitPierre Poujade, qui a fondé l’Union de défense des commerçants etdes artisans (l’UDCA). Son objectif a été de s’opposer aux contrôlesfiscaux qui venaient d’être mis en place. En fait, si le prétexte aété fiscal, il s’agissait surtout d’une réaction aux premièrestransformations de l’économie et plus particulièrement à uneconcentration du commerce de distribution et par conséquent à unedisparition des petits commerces. L’une des actions les plusspectaculaires de l’UDCA a été d’empêcher les agents du Fiscd’effectuer leur contrôle. Poujade demandait à ce qu’on se placedevant les entreprises qui faisaient l’objet du contrôle. Lecommerçant imposé n’était pas sanctionné car il disait de pasrefuser l’impôt, ce qui était une ruse. D’où une grande adhésion àl’UDCA. Par ailleurs, le mouvement Poujadiste a bénéficié du mode descrutin de la IVème République, c’est-à-dire de la représentationproportionnelle. L’UDCA présenta des candidats aux élections, à lachambre des députés et obtint en 1956 une cinquantaine de sièges, cequi lui permettait de peser sur les décisions politiques. Ce n’étaitdonc pas seulement un syndicat mais aussi une force politique etsociale. Avec la Ve République et son nouveau mode de scrutin,l’UDCA n’obtint aucun siège à l’Assemblée nationale. Il disparut parconséquent en tant que force.

S’agissant du mouvement Nicoud, il a été semblable au mouvementPoujade (il réunissait donc des commerçants et des artisans) ets’est développé au cours des années 70. Il s’agit du comité inter-

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professionnel de défense des commerçants et artisans (CID). Le CIDfut créé en 1969 par un commerçant de la région Nord-Alpes, GérardNicoud. Ce mouvement s’est caractérisé par des actions parfois trèsviolentes et spectaculaires contre les agents des impôts. Ilkidnappait parfois des agents, les ligotait et les attachait toutela nuit à des arbres (sic !), plaçaient des bombes devant les portesde députés giscardiens (on raconte qu’une petite fille a failli unjour être blessée suite à une explosion d’une porte, et le mouvementNicoud a fait porter des fleurs pour s’excuser). A un moment, Nicouda été emprisonné et les militants, descendus dans la rue, défilaienten criant « pas de Nicoud, pas de sous » (il y avait donc une menaced’une grève de l’impôt). Nicoud a finalement été libéré suite à lapression populaire. Ce mouvement n’a jamais eu de représentationpolitique. Enfin, certains militants devinrent maoïstes, voiremarxistes-léninistes et le mouvement finit par disparaître de lui-même.

B – Les révoltes fiscales aux Etats-Unis

C’est sur le plan doctrinaire ou théorique que s’est développée larésistance à l’impôt. Des doctrines antifiscales sont nées et sesont développées à la fin des années 1970, et cela suite aumouvement du développement des théories néolibérales classiques(déjà étudiées, voir infra). On s’est alors focalisé sur le rejet del’impôt sur le revenu des personnes physiques, beaucoup plus que lesimpôts sur les dépenses (la TVA n’était pas mal considérée car ellen’avait pas d’impact réel sur les entreprises). Les critiques sesont concentrées sur la pression fiscale trop importante, sur laprogressivité de l’impôt, enfin sur la complexité des problèmesfiscaux. L’impôt était considéré comme un frein à l’investissementdans les entreprises.

Un vaste mouvement de refus s’est ainsi développé à la fin desannées 70 du côté des classes moyennes. Il était soutenu par desassociations qui étaient pour la plupart très marquées par lesthéories économiques libérales classiques. Ce mouvement antifiscal aconnu son apogée en Californie avec l’adoption le 6 juin 1978 parles deux tiers des électeurs d’un amendement à la Constitutionappelé la proposition 13. Cet amendement a réduit considérablementl’impôt foncier de l’Etat de Californie en instituant unplafonnement du taux de cet impôt à 1% de la valeur marchande dubien. Il s’agit là d’une première forme de constitutionnalisation dutaux de pression fiscale. Cet amendement avait été soutenu par unsénateur républicain (Jarvis) ainsi que par le futur président desUSA (Ronald Reagan). Ce dispositif a ensuite été institué dans 22autres Etats des USA.

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II – Les autres modes de résistance à l’impôtA – La fraude fiscale

Elle constitue un anti-fiscalisme individuel dont l’ampleur estévaluée à 15 ou 20% des recettes fiscales en France. On distingue lafraude de l’évasion fiscale.

La fraude est en effet un délit puni pénalement, et consiste à sesoustraire intentionnellement à l’impôt. Il faut donc prouverl’intention.L’évasion fiscale consiste quant à elle à utiliser au maximum lespossibilités d’atténuer la charge fiscale sans pour autantenfreindre la loi. On parle d’optimisation fiscale.

B – La grève de l’impôt

La grève de l’impôt a parfois été proposée par des partis politiquesou par des mouvements anti-fiscaux. On avait demandé par exemple àdes militants de s’opposer à la construction d’une centralenucléaire. Généralement, la grève de l’impôt n’a jamais fonctionné.

C – La fuite devant l’impôt

Cette délocalisation des contribuables concerne surtout les sportifsde haut niveau. Elle consiste à délocaliser leurs activités dans unautre pays à plus basse pression fiscale. Le siège de leursactivités se trouve alors dans des paradis fiscaux, Etats où lapression fiscale est parfois quasiment nulle. La fuite devantl’impôt est également une réduction des activités professionnelles :on a rencontré certains individus qui estimaient que, passé uncertain stade, ils paiyaient trop d’impôts, et qu’il valait doncmieux arrêter de travailler.

D – L’économie souterraine

L’économie souterraine est ce qu’on appelle le travail clandestin,c’est-à-dire des activités non déclarées ou encore des échanges deservices entre professionnels. Le travail clandestin est aujourd’huiconsidérablement développé dans tous les Etats du monde. C’est laterreur des Etats actuels car il est difficile à arrêter.

Section 3 : Les transformations de l’impôtI – Les transformations de la nature de l’impôt

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Aujourd’hui, la matière imposable et l’impôt lui-même setransforment sous la pression de différents facteurs : lamondialisation des échanges, la délocalisation des contribuables, ledéveloppement du commerce électronique, la prolifération desindustries de services, l’instabilité des systèmes fiscaux etfinanciers. 1ère conséquence : la mobilité de la matière imposableau-delà des frontières pose le problème de la fraude fiscale d’unepart et du poids de plus en plus lourd de l’impôt supporté par lescontribuables qui n’ont pas les moyens ni de se délocaliser nid’optimiser leur fiscalité. 2e conséquence : le développement ducommerce électronique pose de très grands problèmes en ce quiconcerne le paiement de la TVA. On note en effet une fraude à laTVA.

II – La réforme fiscale et la recherche du bonheur

A – Les utopies fiscales

Ce sont des doctrines qui proposent un impôt idéal : un impôt juste,simple et rentable. Par ailleurs, cet impôt remplacerait tous lesautres impôts. Il s’agirait donc d’un impôt unique. Quelles sont lespropositions d’impôts uniques qui ont été faites à l’époque etaujourd’hui ?

L’impôt unique sur la terre : Cette doctrine a été conçueinitialement par les physiocrates au XVIIIe siècle. La terre étaitperçue comme la source de la richesse économique. Ainsi, il étaitlogique de taxer la propriété foncière. Cette idée fut reprise auXIXe siècle, aux Etats-Unis, par Henri George (1839 – 1897). Georgevoulait instaurer un régime fiscal juste en instituant un impôtunique qui aurait pour vertu de lutter contre la pauvreté. Ilestimait qu’en taxant lourdement la propriété foncière, on allaitdécourager les investisseurs d’investir dans ce domaine et lesconduite à investir dans l’industrie, ce qui aurait pour effet decréer les emplois et par conséquent de lutter contre la pauvreté.Pour George, il s’agissait de supprimer tous les impôts et de lesremplacer par un seul impôt sur le foncier.

L’impôt unique sur le capital : Il a été proposé par un fabricant dechocolats (considéré à l’époque comme un médicament) qui s’appelaitMenier à la fin du XIXe siècle. C’était un libéral. Il estimaitqu’il fallait supprimer tous les impôts et les remplacer par unimpôt sur le capital. Cette idée a été reprise dans la périodecontemporaine, sous un angle lui aussi libéral.

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