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APOCRYPHA
Fondeeen 1990 oar Jean Claude PICARD
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APOCRYPHA
Revue internationale des itteratures apocryphes
International Journal of Apocryphal Literatures
Directeur de publication
J.-D. DUBOIS
Secretairede redaction
M.-J. PIERRE
Comite de redaction
F. AMSLER,P. GEOLTRAIN,
R. GOUNELLE,S.C. MIMOUNI, S.l. VOICU
Comite scientifique
I. BACKUS,B. BOUVIER, F. BOVON, Z. IZYDORCZYK,
S. JONES,A. LE BoULLUEc, J.-N. PERE:S, . STAROWIEYSKI
Revue publiee avec e concours scientifique
de I Association pour I etude de la litterature apocryphe chretienne
(A.E.LA.C.)
et
de la Societe pour I etude de la litterature apocryphe chretienne
(S.E.LA.C.)
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All rights reserved.
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SOMMAIRE
« Un groupe judeo-chretien meconnu : les Hebreux ))
par Gilles DORIVAL
7
«Une critique de la mythologie grecque d apres l Homelie pseudo-clementine V»
par Dominique COTE
37
«Untersuchungen im Zusammenhang mit der sogennantenEpistula Lentuli »
par Jacques-NoelPERES
59
« La pseudepigraphie comme procede litteraire autonome.
L exemple des Pastorales »
par Regis BURNET
77
« Fonctions et valeurs des noms dans es ecrits de Justin martyr»
par Philippe BOBICHON
93
« Le monde comme matrice.
Aspect sexuel de la nature et ascetismechez eg gnostiques »
par Takashi ONUKI ;
123
« Politics and Religion in late Antiquity: The Roman Imperial Adventus
Ceremony and the Christian Myth of the Harrowing of Hell»
par Kevin RODDY
147
«La collection dite du Pseudo-Abdias.
Un essaide definition a partir de l etude des manuscrits»
par GiseleBESSON
181
«La collection du Pseudo-Abdias. Approche narrative et coherence nterne »
par Michele BROSSARD-DANDRE
195
«Vision du monde et imaginaire dans quelques textes de la collection dite du
Pseudo-Abdias »
par DominiqueALmERT
207
« Sur les Actes de Pierre. A propos d un livre recent »
par Enrico .NORELLI
227
« Thematic Bibliography of the Acts of Pilate. Addenda and corrigenda »
par R6mi GOUNELLEet Zbigniew IZYDORCZYK
259
293
OMPTESRENDUS
LIVRES RE~US A LA REDACfION
321
« Index des tomes 1 a 10 de la revue Apocrypha »
par Sever . VOICU
325
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La Societepour l etude de la litterature apocryphe chre-
tienne, voulant assurer au Comite de redaction de la
Revue une pleine liberte scientifique, decline la responsa-
bilite des articles et la laisse aux auteurs.
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GillesDORWAL
Universitede Provence
MMSH -Centre Paul-Albert Fevrier
UN GROUPE JUDEO-CHRETIEN
MECONNU:LESHEBREUX
Clementd Alexandrie, Origeneet Didyme attestent existence un grou-
pe judeo-chretien vivant en Egypte au II siecle : les Hebreux. Is nous ont
connaitre des ragments de l Evangile de ce courant, Evangile selon es
Hebreux. Redige d abord en hebreu ou en arameen, raduit en greG, et
Evangile est regarde comme admissible, notamment quand il s agit de
resoudre des difficultes exegetiques. es Hebreux faisaient donc partie la
Grande Eglise.Origene ait connaitre a Bible de cesHebreux,dans un pas-
sagecelebreou l on voir a tort une description du Canon uif de la Bible.
Le meme Origenedonne des enseignementsrecieux sur cesHebreux,qui
connaissaient ien les raditions uives d interpretation etpratiquaient l exe-
geseallegorico-typologique. Faut-illes identifier avec d autres Hebreux
chretiensqu Origene a rencontresen Palestine? Celan estpas sur. Faut-il,
a causede Jerome et de quelques autres,voir en eux des Nazoreens? Is
forment un courantproche de ces demiers,mais qui doit en etre distingue.
Clement of Alexandria, Origen and Didymus testify o the existence f
a Jewish-Christian group living in Egypt during the IInd century.. the
Hebrews. They nform us about ragments of he Gospelof this group, the
Gospel of the Hebrews. First written in Hebrew or Aramaic, then trans-
lated into Greek, this Gospel was accepted,especiallywhen used to solve
exegetical ifficulties. The Hebrewswere hereforepart of the Main Church.
Origen tellsus about the Bible of heseHebrews, n a amous passage aken
wrongly as a description of the Jewish Canon of the Bible. Origen gives
again precious information on theseHebrews who khew well the Jewish
traditions of nterpretationand who practicedallegory and typology n their
exegesis.Should they be identified with other Hebrews met by Origen in
Palestine? It is not certain. Because of Jerome and a few others,should
theybe taken as Nazoreans ? Theyrepresent movementsimilar to theirs,
but also separate.
Les ouvragesclassiquessur Ie judeo-christianisme antique dis-
tinguent trois groupesde udeo-chretiens, es Nazoreens, es Ebio-
nites et les Elkesai:tes, et its les situent respectivement, les pre-
miers, en Judee-Palestine, es seconds,en Palestine et en Syrie, es
derniers, en Mesopotamie. Je voudrais montrer ici que la docu-
Apocrypha 11,2000,p. 7 -36
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8
G. DORIVAL
mentation a notre disposition permet d etablir I existence d un
quatrieme groupe, celui des Hebreux, dont la presence est attes-
tee a Alexandrie, entre Ie lIe et Ie lye siecles, par Clement
d Alexandrie, Origene et Didyme. Ces auteursDOUgont connaitre
plusieurs fragments de I evangile utilise par ce courant, I Evangi-
Ie selon esHebreux.A vrai dire, I hypothese selon aquelle eg rag-
ments de I Evangile selon esHebreux doivent etre mis en relation
avec un groupe de chretiens d ascendanceuive vivant en Egypte
n est pas nouvelle. Des 1934,W. Bauer s etait fonde sur leg pas-
sagesde Clement et d Origene oil il est question de cet Evangile
pour affirmer I existence d un christianisme judeo-chretien en
Egypte et il voyait dans I Evangile selon les Egyptiens dont parle
Clement I indice de I existence,ala meme epoque, d un autre cou-
rant chretien, de type encratite et probablement gnosticisantI. En
1992,A. F. J. Klijn a repris la question des Evangiles udeo-chre-
tiens: lui aussia mis en relation I Evangile selon es Hebreux avec
un groupe judeo-chretien d Egypte2. Ce qui est nouveau, en
revanche, c est la suggestionque je voudrais emettre ici et selon
laquelle, grace a Origene, DOUgonnaitrions Ie corpus vetero-tes-
tamentaire des Hebreux. Moyennant ces sourcesalexandrines, l
est possible de reconstituer en partie la theologie et I exegesede
ce courant. La prise en considerationd autres sources,notamment
Jerome, oblige a se demander quels rapports leg Hebreux entre-
tiennent avec eg Nazoreens. Mon idee est qu ils forment un cou-
rant proche des Nazoreens, historiquement et theologiquement,
mais qui ne doit pas etre confondu avec eux, meme si Jerome leg
identifie.
I -L Evangile selon leg H6breux
(TO Ka8 E~paLoUS Eua Y YEAloV)
A -Les temoignagesa ecarter
-Papias, Hegesippe, usebe e Cesaree
Les personnages es plus anciens qui sont associes I Evangile
seton les Hebreux figurent dans I Histoire ecclesiastique Eusebe
de Cesaree: ce sont Papias et Hegesippe.Nous voila bien loin de
l Egypte, puisque Papias,qui a vecudans a premiere moitie du lIe
1. W. BAUER,Rechtgliiubigkeit und Ketzerei im iiltesten Christentum,
Ttibingen, 1934.
2.. A. F. J. KLIJN, Jewish-Christian Gospel Tradition, Leyde, 1992.
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N GROUPE JUDEO-CHREllEN MECONNU: LES HEBREUX
siecle, est ie a la province d Asie et a la cite de Hierapolisen Phry-
gie (HE II 15,2; III 36, 2), tandis qu Hegesippe, celebre pour Ie
sejour qu il a fait a Rome vers 160, est un oriental, probablement
originaire de Syrie-Palestine.Eusebe raconte que, dans son Exe-
gesedesdits du Seigneur,Papias« exposeencore tine autre histoi-
re au sujet d une femme accusee une foule de pechesen presence
du Seigneur que contient l Evangile seton es Hebreux» (HE III
39, 17). A propos d Hegesippe, qui a laisse des Memoriaux
( Y1To~vJ j~aTa),usebe explique qu il« etablit certaineschosesa
partir de l Evangile seton es Hebreux, de l Evangile syriaque et,
d une maniere qui lui estpropre, de la langue hebralque » (HE IV
22,8). II est encore question de l Evangile seton es Hebreux dans
un passageoil Eusebe dresse a liste des ivres du Nouveau Testa-
ment (HE III 25). II distingue trois categoriesde livres: les livres
« reconnus» (b~OAOyou~Eva;insi les quatre Evangiles, es Actes
des Apotres, es Lettres de Paul, les premieres Lettres de Jean et
de Pierre); les ivres «contestes» (aVTl;\Ey6~Eva); nfin, les ivres
attribues aux Apotres dont se servent es heretiques, par exemple
l Evangile de Thomas ou les Actes d Andre. Eusebe qualifie les
livres contestesde« batards» (voea), ansdoute parce que a pater-
nite affirmee par leurs titres est rien moins que silre. II enumere
la Lettre de Jacques, a Lettre de J~de, a SecondeLettre de Pier-
re, les Deuxieme et TroisiemeLettresde Jean, es Actes de Paul, Ie
Pasteur d Hermas, l Apocalypse de Pierre, la Lettre de Bamabe,
les Enseignements esApotres, Apocalypse de Jean, qui fait par-
tie des livres reconnus aux yeux de certains. Eusebe ajoute que,
pour certains, «1 Evangile seton es Hebreux, qu aiment surtout
ceux des Hebreux qui ont re~u e Christ », fait partie de ces ivres
contestes et batards. Apparemment, ces rois passages Eusebe
constituent un argument fort pour dire que l Evangile seton les
Hebreux a circule en Palestine, en Syrie et en Asie et qu il n est
pas ie a l Egypte.
Qu en est-il en fait? Dans la notice qu il consacre aux deux
groupes d Ebionites (HE III 27), Eusebe raconte que Ie second
courant rejette l Apotre, qualifie d « apostat de la Loi », et qu il
se sert du «seul Evangile seton es Hebreux ». Ce texte est decisif
pour ma demonstration: il en ressort que, chez Eusebe, Evangi-
le seton es Hebreux n est rien d autre que l evangile de reference
desEbionites. II n a donc rien a voir avec Evangile en circulation
en Egypte, dont il va etre question dans un instant. C est donc a
cet Evangile ebionite que Papias et Hegesippese referent norma-
lement. Normalement, car il n est pas silr que l expression« Evan-
gile seton les Hebreux» ait toujours Ie meme sens chez Eusebe.
Comment concilier en effet Ie passageque nons venons de voir
avec e passageoil l Evangile seton esHebreux est ange parmi les
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G. DORIVAL
Iivres contestes,mais non heretiques? Eusebe confond peut-etre,
sous e meme nom d' Evangile selon es Hebreux, ' Evangile here-
tique des Ebionites et l' Evangile orthodoxe des Nazoreens. Si
toutefois on accepte d'identifier I' Evangile desHebreux avec ' E-
vangiledesEbionites, une consequencemportante doit etre tiree :
contrairement a ce que I'on affirme souvent, Epiphane n'est pas
Ie seul a nous faire connaitre l' Evangile ebionite. Papias, Hege-
sippeet Eusebe font reference a Iui. De plus, Papiasnous apprend
qu'il contenait une pericope 011l etait questiond'une femme accu-
see d'une foule de peches en presence de Jesus.Ce temoignage
devrait etre ajoute aux sept ragments que nous devonsa Epipha-
fie. Vne demiere precision doit etre apportee : comme tela a sou-
vent ete affirme et comme e I'ai montre ailleurs, la confrontation
entre Origene, Homelie 1 sur Luc 1, et Epiphane, Panarion 30, 13,
2-3, permet d'etablir que Ie veritable titre de I' Evangile desEbio-
nites etait sansdoute Evangile des Douze ou Evangile desDouze
Apotres3. L' Evangile selon esHebreuxd'Eusebe n'est rien d'autre
que cet Evangile-la.
2 -Epiphane de Salamine
Dans Ie Panarion, Epiphane mentionne I' Evangile selon les
Hebreux dans Ia notice 30 consacree aux Ebionites et dans Ia noti-
ce 46 dirigee contre Ies disciples de Tatien. D'apres Ia notice 30,
Ies Ebionites, comme Ies Cerinthiens et Ies Merinthiens, ne recon-
naissent que I' Evangile selon Matthieu, qu'ils appellent« selon Ies
Hebreux ». Epiphane lie cette designation au fait que Matthieu
aurait utilise Ia langue et I'alphabet hebralque (3, 7). Un peu plus
loin (13,1-2), il revient sur cet Evangile selon Matthieu des Ebio-
lites, qu'ils appellent« hebra ique ». II explique qu'il n'est pas com-
plet (OUX OAOV TATlPEaTaTov),ais abatardi et mutile au debut et
Ii. Ia fin (vEvo8EUIiEVOV at 1)KpWTTlPLaaIiEVOV).uivent alors plu-
sieurs citations de I'evangile ebionite (13, 3-8).
Ainsi, chez Epiphane comme chez Eusebe, I' EvanJ5ile selon les
Hebreux designe en fait I' Evangile en usage chez Ies Ebionites. Ce
qui est nouveau chez Epiphane, c'est qu'il met en relation I' Evan-
gile selon les Hebreux avec I' Evangile selon Matthieu. A. F. J. Klijn
a explique cette innovation en disant qu'Epiphane a voulu combi-
ner Ies informations qu illisait chez Irenee et chez Eusebe. En effet,
3. Voir G. DORIVAL, Le regard d'Origene sur les judeo-chretiens, a paraI tre
dans S. C. MIMOUNI, ed., Le Judeo-christianisme ancien dans taus ses etats.
Actes du colloque de Jerusalem, 6-10 juillet 1998.
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UN GROUPE JUDEO-CHREnEN MECONNU : LES HEBREUX
Ie premier explique que Ies Ebionites utilisent exclusivement ' E-
vangile selon Matthieu (Contre les heresies 26, 2), tandis que Ie
second parle de I'utilisation exclusive de l' Evangile selon les
Hebreux (11127,4).Ces deux affirmations sont contradictoires,sauf
si, comme Epiphane, on identifie Ies deux Evangiles.Un autre rai-
sonnement allant dans Ie meme sells a pu etre effectue par Epi-
phane. Dans Ia notice d'Eusebe sur Papias (Histoire ecclesiastique
11139),' Evangile selon esHebreux estmentionne immediatement
apres ' Evangileselon Matthieu,dansdes ermes qui pouvaient nci-
ter a Ies identifier, puisque, selon Eusebe, Papias expliquait ceci
« Donc Matthieu a mis en ordre Ies dits en angue hebralque, tan-
ills que chacun es a traduits comme il etait capable» (III 39, 16).
11 etait evidemment tentant de confondre Ies dits en langue
hebralque de Matthieu avec l' Evangile selon les Hebreux de III
39,17.
Dans Ia notice 46, Epiphane parle de Tatien:« il est dit etre I'au-
tenT du Diatessaron, que certains appellent l' Evangile selon les
Hebreux» (1,9). Cette remarque constitue une indication supple-
mentaire en faveur de Ia polysemie de I'expression Evangile selon
Ies Hebreux , qui designe tantot l' Evangile des Ebionites (Euse-
be, Epiphane), tantot I'Evangile des Nazoreens Eusebe), tantot
I'Evangile de Matthieu en hebreu ou en arameeil (Epiphane). Le
temoignage qui va etre maintenant presente foumit une quatrie-
me signification.
3 -Le Pseudo-CyriUede Jerusalem.
Un demier document qui parle de l' Evangile selon les Hebreux
doit lui aussietre ecarte. 11s'agit d'un passaged'un discours copte
en l'honneur de Marie mere de Dieu, attribue a Cyrille de Jeru-
salem4.Comme ce texte contient une reference a l'Ancoratos d'E-
piphane, ecrit veTS 74, l ne peut revenir a Cyrille, qui a compose
ses euvresveTS 50.T. Orlandi considereque notre texte a ete ecrit
originellement en copte, et non en grec, et qu'il ne peut etre ante-
rieur au Vile siecle. Dans Ie passagequi nous interesse,un moine
dit: «11est ecrit dans ' Evangile selon les Hebreux etc. ». La suite
du passageest en fait Ie resume d'un evangile 011e PeTeconfie Ie
4. Voir E. A. W. BUDGE,The Discourse on Mary Theotokos by Cyril,
Archbishop of Jerusalem,dans MiscellaneousCoptic Texts n the Dialect
of Upper Egypt, Londres, 1915,p. 60 et 637.Une bonne etude de ce texte
figure chez S. C. Mimouni, Le Judeo-christianismeancien. Essais histo-
riques, Paris, 1998,p. 218-219.
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G. DORIVAL
Christ a la grande puissanceceleste, appelee Michel. Cette puis-
sance descend dans Ie monde et est appelee Marie. Au bout de
sept mois, Ie Christ nail. Il grandit, puis il choisit les Apotres, qui
prechent partout a son sujet. Les Juifs se mettent a Ie haIr, par
jalousie et parce qu'il change a tradition de leur Loi.lls Ie livrent
au gouverneur, qui Ie leur remet pour etre crucifie. Finalement, Ie
PeTe 'enleve au ciel aupres de lui. Pour A. F.J. Klijn, cet evangi-
Ie manifeste des tendancesdocetes et peut etre rapproche de l' E-
vangile de Pierre. Il n' est sftrementpas udeo-chretien5.Cette der-
niere affirmation est certainement exacte. D'ou vient alors la
mention de l' Evangileselon esHebreux? Il estpossibleque Ie sou-
venir de cet evangile, dont nollSallons voir qu'il a circuit a Alexan-
drie dans es premiers siecles,se soil maintenu a travers es gene-
rations dans l'Eglise copte. Desireux d'attribuer tine paternite a
un evangile anonyme dont il voulait denoncer les tendances
docetes, e Pseudo-Cyrille aurait tout naturellement utilise ce titre.
Il n'est donc rien d'autre qu'une etiquette commode, qui ne donne
pas d'indication fiable sur Ie contenu reel de l' Evangile selon les
Hebreux.
B -Les auteurs alexandrins
1- Clement d' Alexandrie
L'interet du demier temoignagequi vient d'etre analyse,et ecar-
te, est qu'it fait apparaitre que Ie titre Evangile selon es Hebreux
etait connu en Egypte a date tardive. Ce lien entre l' Evangileselon
les Hebreux et l'Egypte est confirme par les temoignagesqui vont
etre maintenantpresentes.Clement d' Alexandrie cite un fragment
de cet Evangile dans e Deuxieme Stromate,ou, a l'appui de l'idee
que l'etonnement est Ie commencementde la gnose et de la veri-
te, il renvoie au Theetete e Platon. II s'agit d'une allusion a 155d
«<Cet affect appartient bien au philosophe, s'etonner»). Puis Cle-
ment cite un fragment des Traditionsde MaUhias « Etonne-toi des
chosespresentes». C'est alors que vient la citation de notre Evan-
gile: «il est ecrit encore dans ' Evangile selon esHebreux: celui
qui s'etonne sera roi et Ie roi se reposera » (Stromates I, IX 45,
5). Une sentenceproche de celle-ci igure dans e CinquiemeStro-
mate,mais sans ndication de provenance. Le contexte est Ie sui-
vant: Clement reflechit sur a ressemblance e l'homme avec Dieu
5.A. F.J. KLIJN,Op.cit.,p.134-137,ouI'extrait du Pseudo-CyriIIede Jeru-
salemconstitue Ie fragment XLV des evangiIesudeo-chretiens.
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N GROUPE JUDEO-CHREllEN MECONNU: LES HEBREUX
et sur l'assimilation aDieu. 11 ite des extraits du Phedre,du Lysis,
des Lois et du Timee. «A ces passages, it-il, equivalent leg mots
suivants: "11 e cessera as, celui qui cherche,jusqu'ace qu'il trou-
ve. Ayant trouve, il sera stupefait. Stupefait, il sera roi. Roi, il se
reposera"» (StromatesV; XIV 96, 3). Les commentateurs consi-
deTenten generalque Ie fragment du Deuxieme Stromate, u figu-
re l'indication de provenance, est un abrege du fragment anony-
me cite dans e Cinquieme Stromate. Is rapprochent ces extes du
papyrus d'Oxyrhynque 654, ignes 5-9 «<Que celui qui cherchene
cesse as de chercher usqu'a ce qu'il trouve et, lorsqu'il aura trou-
ve, il sera stupefait et stupefait, il sera roi et roi, il se reposera » ,
et du logion 2 de l' Evangile selon Thomas«<Que celui qui cherche
ne cessepas de chercher, usqu'a ce qu'il trouve. Et quand il aura
trouve, il serastupefait. Et, quand il aura ete stupefait, l seraemer-
veille. Et il regnera sur Ie Tout»). A. F. J. Klijn a analysece qu'il
appelle leg quatre versions d'un meme logion. 11a montre que ce
dernier reprenait des themes de la tradition sapientielle juive. 11
l'a rapproche de passages u Siracide,de la Sagesse e Salomon et
de Pillion. 11en a conclu que Ie logion avail ete ecrit en Egypte6.
De fait, Clement d' Alexandrie, Oxyrhynque, I' Evangile de Tho-
mas, a Sagesse, hilon, taus cesnoms inscrivent noire Iogion dans
un contexte alexandrin et egyptien. Cependant, un point Testea
examiner: faut-il parler d'un seullogion ? Les textes du Cinquie-
me Stromate et d'Oxyrhynque soot ires voisins. Celui de l' Evan-
gile de Thomasollie une fin differente ( « l regnera sur Ie Tout »
qui peut etre considereecomme une relecture gnostique du logion
originel. En fait, c'est Ie texte du Deuxieme Stromatequi fait pro-
bleme. 11 orrespondseulementa la fin du texte du CinquiemeStro-
mate,mais avec des differences mportantes : Ie verbe "etre eton-
ne" (eav~a(ElV)au lieu du verbe "etre stupefait" (ea~f3El(Jeal),a
presencede I'article devant Ies participes; Ia particule de liaison
Kat au lieu de BE Ie verbe compose avaTTavElv u lieu du verbe
surcomposeETTavaTTaVElV.n peut se demander si DOUg 'avons
pas affaire a deux logions paralleles, mais differents, appartenant
a deux passages differents de I' Evangile selon les Hebreux7.
6. A. F. J. KLUN, op. cit.,p. 47-51.
7. ChezA. F.J. KLUN, e logion cite par Stromate I constitue Ie fragment
I des 56 fragments de son edition des Evangiies udeo-chretiens. II consi-
dere les textes de Stromate V, d'Oxyrhynque et de l' Evangiie seton Tho-
mas comme des textes paralleles. En revanche, D. A. BERTRAND,ans
Ecrits apocryphes chretiens,Bibliotheque de la Pleiade, Paris, 1997, ra-
duit Ie fragment du Stromate I sous e numero III A et celui du Stroma-
te V ( dont il rapproche es emoignagesd Oxyrhynque et de Thomas)sous
Ie numero IIIB. Cette presentation para t preferable.
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G. DORIVAL
2 -Origene 8
Origene est e secondauteur a citer l' Evangile seton esHebreux.
La premiere de cescitations figure dans e Commentairesur Jean,
au ivre II, qui a ete composea Alexandrie, avant e depart d'Ori-
gene pour Cesareede Palestine.
«Si I'on admet I' Evangile seton es Hebreux, oil Ie Sauveur ui-
meme dit: Recemment, ma mere, Ie Saint Esprit, m'a pris par un
de mes cheveux et m'a emporte sur Ia grande montagne du Tha-
bor , on soulevera Ia question de savoir comment I'Esprit saint
qui est advenu par Ie Logos pent etre Ia mere du Christ. Mais il
n'est pas difficile d'interpreter cela de cette fa~on: si celui qui fait
Ia volonte du Pere dans es cieux est son rere, sa sreuret samere
(Matthieu 12, 50) et si Ie nom de frere du Christ s'applique non
seulementa Ia race humaine,mais encore aux etres plus divins que
cette derniere, Ie fait que I'Esprit saint soit mere ne sera en rien
plus etonnant que tout etre appele mere du Christ parce qu'il fait
Ia volonte du Pere dans es cieux » (II 12).
Souventon arrete l'extrait d'Origene a a fin de a premiere phra-
se, ainsi dans es Ecrits apocrypheschretiensde la Bibliotheque de
la Pleiade. On fait dire alors a Origene Ie contraire de ce qu'il affir-
me. En effet, a se limiter a la premiere phrase, on a Ie sentiment
qu'Origene ecarte 'idee selon aquelle l'Esprit Saint pourrait etre
la mere de Jesus.La lecture de la suite du texte oblige a voir les
chosesdifferemment. Dans la premiere phrase, Origene elimine
l'interpretation obvie du fragment de ' Evangile selon esHebreux,
selon aquelle l'Esprit Saint serait a mere de Jesus,parce que cette
interpretation contredit la saine doctrine, selon aquelle l'Esprit
Saint est advenu par Ie Logos, qui est Ie Christ. Dans la seconde
phrase, l montre qu'en vertu de Matthieu 12,50, peut etre appele
mere de Jesus out etre qui fait la volonte du PeTequi est dans es
cieux. En ce sellS,et en ce sells seulement, 'Esprit Saint est mere
de Jesus.On remarque que, ce faisant, par l'utilisation d'un verset
de Matthieu, Origene donne un sellSorthodoxe a un texte qui, pris
isolement, pourrait etre considerecomme heterodoxe.De la sorte,
Origene reconnait e caractereadmissibled'un Evangile qui ne fait
pourtant pas partie du Canon. Le fait que cet Evangile soit ainsi
reconnu comme acceptablene peut s'expliquer que si Ie courant
qui se reclamaitde lui etait accepteet admisdans 'eglise d' Alexan-
8. Sur es textes d'Origene ici examines,voir G. SGHERRI, hiesae Sina-
gaga nelle operedi Origene, Milan, 1982,p. 44-51.
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UN GROUPE JUDEO-CHRETIEN MECONNU: LES HEBREUX
15
drie. II faut noter encore qu Origene passesons silence a raison
linguistique pour laquelle Jesuspouvait appeler l Esprit Saint sa
mere: c est que l hebreu ou l arameen rftal.test e plus souvent du
genre feminin. Celie remarque est mportante, parce qu elle per-
met d affirmer que l Evangile selon les Hebreux a dft etre redige
en hebreu ou en arameen, au moins en partie. Cela implique que
son lieu de redaction soil la Palestine,d ou il est parvenu ensuite
en Egypte. Enfin, Ie contenD meme de noire verset appelle
quelques observations, sur esquelles l est permis de passer api-
dement, eu egard a l excellent commentaire d A. F.J. Klijn: l idee
qu un etre divin saisit un humain par sescheveuxet emporte dans
les airs figure dans la Septante d Ezechiel 8, 3, ou, comme dans
noire verset, Esprit Saint est celui qui saisit, ainsique dans un epi-
sode de Bel et Ie dragon 5, 36, ou c est ange qui prend. L affirma-
tion selon aquelle l Esprit Saint est Mere est requente dans a lit-
terature chretienne syriaque. Elle pent etre rapprochee de
considerations udeo-hellenistiques sur a Sagesse. a mention du
mont Thabor ne permet pas de sittler noire verset dans a vie de
Jesus.En effet, celie montagne ne figure pas dans es Evangilesdu
Nouveau Testament.Dans les ecrits patristiques, elle est e lieu de
la tentation de Jesus Epiphane,Panarion 51, 7) ou celui de sa rans-
figuration (Pseudo-Origene,Commentaire ur Ie psaume88,13) ou
encore celui de son apparition a sesdisciplesapressa resurrection
(glose marginale a Matthieu 28, 16 dans Ie manuscrit Maywood,
Theological Seminary,Gruber 152, aujourd hui a la Jesuit-Krauss-
McCormick Library de Chicago 9.
Le meme fragment de l Evangile selon es Hebreux figure dans
les Homelies sur JeremieXV, 4, mais sans ndication de provenan-
ce. Origene a prononce ces Homelies sans doute a Cesaree de
Palestine entre 239 et 2421°.11commente Jeremie 15, 10: «Mal-
heur a moi, mere, qui as-tu enfante en moi? ». Origene explique
que ce verset est une prophetie qu on doit appliquer au Sauveur:
9. A. F.J. KLIJN,op. cit., p. 52-55.Le fragment cite par Origene constitue
Ie fragment II de I edition d A. F.J. KLIJN.Ce dernier attribue a Origene
Ie commentaire du psaume88 imprime en PG 12. Mais ces ragments ne
figurent pas dans Ia premiere cha,inepaiestinienne sur Ies psaumes.PIu-
sieurs d entre eux reviennent a Evagre. Sur Ie manuscrit de Maywood,
dans I Illinois, voir J.-M. OLIVIER,Repertoire desbibliothequeset descata-
loguesde manuscrits grecs,Turnhout, 1995,p. 525.
10. Voir P. NAUTIN,Origene. Sa vie et son lEuvre,Paris, 1977,p. 403-405,
411.
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G. DORIVAL
« De quelle mere parle-t-il? Parmi les femmes, ne peut-il pas
parler et de son ame et de Marie? Mais si on re~oit Ie verset
Recemment, ma mere, Ie Saint Esprit, m'a pris et m'a emporte
vers la haute montagne du Thabor etc , on peut voir qui est sa
mere. »
Ainsi, pour Origene, la mere it laquelle s'adresseJesus,prefi-
gure par Jeremie,est soit 'ame de Jesus,qui a souffert au moment
de la Passion, soit Marie, qui a souffert au moment de la mort de
son Fils, soit encore Ie Saint Esprit. En quel sens e Saint Esprit
est-ilIa mere de Jesus? Origene ne Ie dit pas, pas plus qu'il n'in-
dique l'origine du verset qu'il cite. II faut noter que ce verset ne
jouit pas, aux yeuxd'Origene, d'une autorite ncontestable.Comme
dans l'extrait du Commentairesur Jean, l est simplement admis-
sible.
La troisieme, et derniere, reference origenienne a l' Evangile
seton esHebreux igure dans e Commentaire ur Matthieu XV, 14.
Ce Commentaire a ete compose veTS 49 a Cesareede Palestine.
Origene explique la pericope dujeune homme fiche (Matthieu 19,
16-24).11 emarque que Ie verset 19, qui est une citation du Levi-
rique 19, 18 «<Tu aimeras ton prochain comme toi-meme»), est
absentdesrecits paralleles de Marc et de Luc. La question sepose
donc de savoir s'il s'agit d'une parole authentique de Jesus.
«n est ecrit dans un Evangile qui est dit selon es Hebreux (si
cependant on convient de Ie recevoir non a titre d'autorite, mais
a titre d'eclaircissementde la question posee) Un autre parmi
les riches, est-il dit, lui dit: 'Maitre, quel bien dois-je faire pour
vivre?' nlui dit: 'Homme, fills la Loi et es Prophetes.' nlui repon-
dit: 'Je l'ai fait.' nlui dit: 'Va, vends tout ce que tu posse es et
partage-le parmi les pauvres, et viens, suis-moi.' Or Ie riche com-
men~aa se gratter la tete et cela ne lui plut pas. Et Ie Seigneur ui
dit: 'Pourquoi dis-tu : J'ai fait la Loi et les Prophetes? En effet il
est ecrit dans a Loi : tu aimeras on prochain comme oi-meme, et
voici que sont nombreux tes freres fils d' Abraham qui sont VelDS
d'excrements, mourant de faim, et ta maison est pleine de nom-
breux biens, et rien du tout ne sort d'elle veTS ux.' Et se tournant
veTSSimon son disciple assispres de lui, illui dit: 'Simon, fils de
Jonas, il est plus facile a un chameau d'entrer par Ie chas d'une
aiguille qu'a un riche dans e royaume des cieux'. Donc il estvrai
que Ie riche n'a pas accompli Ie commandement: tu aimeras ton
prochain comme oi-meme, lui qui a meprise beaucoupde pauvres
et ne leur a distribue aucune de ses si glandes richesses.En effet
il est mpossible de remplir Ie commandementqui dit : tu aimeras
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N GROUPE JUDEO-CHRE11ENMECONNU: LES HEBREUX
ton prochain comme toi-meme, et d etre fiche et surtout d avoir
de si grandespossessions.
Ce fragment de l Evangile selon es Hebreux «<Un autre parmi
les riches (...) dans e royaume des cieux » afire un theme carac-
teristique du udeo-christianisme, celui de l observancede la Loi,
la ou les trois synoptiques parlent seulement de celIe des com-
mandements EVTOAal.11 offre l originalite de nous aire connaitre
la pericope du eune homme fiche dans une redaction ou il y avait
au mains deux riches. ci, c est e deuxieme eune homme fiche qui
interroge Jesus.Nous ignorons les propos que tenait avant lui Ie
premier. Peut-etre n etaient-ils guere differents de ceux dujeune
homme fiche de Matthieu. Toutefois, la pericope devait s achever
avec e depart du premier riche, sans e commentaire de Jesusqui
suit (Matthieu 19,23-24).En effet, ce commentaire,ou figure l ima-
ge du chameau et du chas de l aiguille, rappelle Ie commentaire
que fait Jesusdans Evangileselon esHebreux.11est peu probable
que ce demier ait prete a Jesus es memes paroles a propos de
chaque fiche. Pour Origene, ce qui faitla fine pointe de l extrait
tire de l Evangile selon es Hebreux, c est qu il cite Ie commande-
ment de l amour du prochain. Certes, cet Evangile n est pas cano-
nique, mais, comme extrait corrobore Ie temoignagede Matthieu
sur la presence du commandement d amour, il petit etre utilise
pour affirmer que Jesusa bel et bien prononce Ie commandement
de Levitique 19, 18 et par voie de consequencepour preferer Ie
recit de Matthieu a ceux de Marc et de Luc.
A ce moment de l analyse, il faut indiquer que l ensemble du
passagequi vient d etre cite ne figure pas dans Ie texte grec du
Commentairesur Matthieu,mais seulementdanssa traduction ati-
ne. C est la raison pour laquelle on refuse souventde l attribuer a
Origene. On propose d y voir une interpolation du traducteur et
du reviseur atin. On parle d un Pseudo-Origenell. A. F.J. Klijn a
argumente en detail contre l authenticite du texte: selon ui, Ori-
gene est d avis que Ie commandementde l amour du prochain est
une addition dont la presence peut s expliquer par une faute de
copie. Origene rapproche alors e casde Matthieu des additions et
des omissionsde la Septante par rapport a l hebreu. Faisant sans
11. Voir W. SCHNEEMELCHER,ew Testament pocrypha I. Gospelsand
Related Writings, traduction anglaise de R. McL. WILSON,Cambridge,
1991,p. 137; A. F. J. KLUN, op.cit.,p. 8 n. 19,56-60 (l extrait constitue Ie
fragment III des Evangiles udeo-chretiens); Ecrits apocryphes chretiens,
p.442 (D. A. BERTRAND).
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G. DORIVAL
doute allusion aux Hexaples, il signale qu'il a mis des asterisques
devant leg unes et des obeles devant leg autres, de sorte que Ie lec-
tenT est libre d'accepter ou de rejeter leg versets pourvus de ces
signes. A. F. Klijn note que cette derniere precision ne figure pas
dans la traduction latine, qui offre leg mots suivants : «Mais dans
leg exemplaires du Nouveau Testament,je n'ai pas pense pouvoir
faire cela sans danger ».11 estime qu'ainsi la traduction fait dire a
Origene Ie contraire de sa pensee, qui est de faire appel ala liber-
te du lecteur. Or c'est a ce moment-la qu'est cite l'Evangile selon
les H~breux. Tout Ie passage doit donc etre attribue au traducteur
latin12. Je ne suis pas convaincu par ce proces en inauthenticite. La
maniere meme dont est introduit Ie fragment de l' Evangile selon
les H~breux, notamment la consideration sur Ie caractere non impe-
latif, mais seulement illustratif, de cet Evangile, rappelle leg pas-
sages du Commentaire sur Jean et de l' Homelie 15 sur J~r~mie affir-
mant Ie caractere simplement admissible des versets qui en
proviennent. Ensuite, Ie commentaire qui suit Ie fragment est bien
dans la maniere d'Origene. Enfin, l'argumentation d' A. F. J. Klijn
n'emporte pas l'adhesion. En realite, Origene n'est pas d'avis que
Ie verset de Matthieu soit une addition. 11donne d'abord la paro-
le a ceux qui sont de cet avis et il developpe leur argumentation.
11donne ensuite la parole a ceux qui sont de l'avis contraire et c'est
avec leur argumentation que se termine, dans Ie texte grec, l'ana-
lyse d'Origene. Cette maniere meme d'ordonner la matiere va plu-
tot a l'appui de l'idee qu'Origene est au fond favorable a l'au-
thenticite du verset mattheen. De plus, la phrase sur les
exemplaires du Nouveau Testament n'a pas la portee que lui attri-
hue A. F. J. Klijn. Origene affirme simplement qu'il n'a pas repro-
duit leg asterisques et leg obeles de l' Ancien Testament dans leg
exemplaires du Nouveau, ce qui est conforme a la verite histo-
rique: Origene n'a pas presente leg Synoptiques ala maniere des
Hexaples, sons forme de colonnes paralleles avec des signes cri-
tiques. De plus, il est utile de citer leg mots qui suivent la phrase
incriminee par A. F. J. Klijn et qui precedent immediatement l'ex-
trait oil figure Ie fragment de l' Evangile selon les H~breux : « Seu-
lement j'ai estime qu'il n'etait pas contraire a la raison de devoir
exposer leg soup~ons, ainsi que leg raisons et leg causes des soup-
~ons, attendu que dans ce passage il est dit: tu aimeras ton pro-
chain comme toi-meme , puisque cela ne se trouve pas chez Marc
et Luc. Mais que ceux qui Ie peuvent jugent si ce que nons traitons
est vrai ou faux ». Les soup~ons sont evidemment ceux des parti-
12. A. F. J. KLUN. OD.cit.. D. 24-25.
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UN GROUPE JUDEO-CHRETIEN MECONNU : LES HEBREUX
sansde l'inauthenticite du versetmattheen, a qui Origene vient de
ceder longuement la parole. Celie phrase, comme la precedente,
est bien dans a continuite du texte origenien. Quant a la chute de
la phrase, qui remet aUK ens competents e soin de decider a veri-
te ou la faussetede l'argumentation presentee,elle est bien dans
la maniere d'Origene.
Les partisans de I'inauthenticite du texte d'Origene sont genes
par la mention de I' Evangile selon les Hebreux.A.I;. J. Klijn fait
remarquer que ce dernier n'a pas circule hOTS 'Egypte. 11en
conclut qu'il s'agit d'un fragment de I' Evangile des Nazoreens13.
La remarque tombe d'elle-meme si, comme e Ie crois, Ie texte est
bien d'Origene. Un autre argument a ete utilise contre I'apparte-
nance de I'extrait a I' Evangile selon esHebreux: la mise en valeur
de Simonqualifie de « disciple » du Seigneur, e qui evoque e frag-
ment 15a de I' Evangile selon les Nazareens,0\1 Simon est egale-
ment appele «disciple » de Jesus14. n fait, ce fragment provient
du Contre les Pelagiens II 2 de Jerome, 0\1 l est explicitement
attribue a I' Evangile selon esHebreux.11estvrai que cet argument
est loin d'etre decisif, puisque Jerome attribue souvent a I' Evan-
gile selon es Hebreux des fragments qui se rattachent en realite a
I' Evangile desNazoreens.11existe toutefois un argument fort en
faveur de I'appartenance du fragment cite par Origene a I' Evan-
gile selon esHebreux: Simon y est« fils de Jonas », alors que dans
l'Evangile des Nazoreens, l est dit «fils de Jean »15.Des JOTS,
puisque Ie fragment donne par Origene fait de Simon a la fois Ie
fils de Jonas et Ie disciple de Jesus,on peut penserque tout frag-
ment qui contient une de res deux ndications provient de I' Evan-
gile selon esHebreux ce serait notamment e cas du fragment cite
par Jerome dont il a ete question a 'instant.11 ne faut plus Ie rat-
tacher a I' Evangile selon es Nazoreens.
13. A. F.J. KLIJN,op. cit.,p. 31. Meme opinion dans es Ecrits apocryphes
chretiens,oul'extrait constitue Ie fragment XVI de I' Evangile des Naza-
reens.
14. Ce fragment est e n° XXIV de l'edition d'A. F.J. KLIJN.
15. Voir fragment 14 Schneemelcher = fragm,ent XXXIV de l'edition
d'A. F.J. KLIJN. i estprecedede l'indication « 'Evangile uda ique». Cette
indication figure a treize reprises dans les marges de cinq manuscrits
des Evangiles ecrits entre Ie IX et Ie XIII siecles.Elle precede des rag-
ments qui appartiennent tous a I' Evangile des Nazoreens. Voir
A. F. J. KLIJN,op. cit., p. 25.
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G. DORIVAL
3 -Didyme
Le demier auteur qui nous fait connaitre un fragment de l E-
vangileselon esHebreux estDidyme d Alexandrie. Dans Ie Com-
mentaire sur les Psaumes etrouve a Toura, Didyme commente Ie
titre du Psaume33 (TM 34), oil il est question de David et du roi
de Geth, Abimelekh. Didyme note que, dans 2 Regnes,Abime-
lekh est appele Ankhous. C est l occasion pour lui de s interesser
aux noms doubles presents dans les Ecritures : Ie beau-peTede
MoIse s appelle Jothor et Ragouel; Thomas est appele aussiDidy-
me. Voici la suite du texte :
« I semble que, dans Evangile seton Luc, Matthieu soil appe-
Ie Levi. Mais ce n est pas ui, mais celui qui a ete etabli a la place
de Juda; Matthias et Levi sont un seul, un nom double. Cela appa-
rail clairement dans l Evangile seton les Hebreux »16.Didyme
revient alors a Abimelekh et Ankhous.
Didyme souleve Ie probleme suivant: Ie Matthieu doni il est
question en Matthieu 9, 9-12, doit-il etre identifie avec e Levi doni
parle Luc 5, 27-32? Tous deux sont assisa la perception et Jesus
leur dit: «Suis-moi ». En general, les auteurs patristiques les
confondent. Ce n est pas avis de Didyme, pour qui Ie Levi de Luc
n a rien a voir avec Ie Matthieu de Matthieu, mais est Matthias,
doni il est question en Actes 1, 23-26, et qui est tire au sort pour
remplacer Judas. Pour faire cette identification, Didyme s appuie
sur Evangile seton es Hebreux,sansmalheureusementproposer
une citation explicite. On peut peut-etre imaginer que, dans cet
Evangile,dans episode de l appel de Levi, il y avail une formule
du type «Levi alias Matthias ». On remarque que Didyme utilise
l Evangile seton les Hebreux comme Origene Ie faisait, pour
resoudreune difficulte de type exegetique.C est dire qu a sesyeux,
cet Evangile offre un caractere admissible.
Si on recapitule es renseignements ue l on peut tiTerdes rag-
ments cites par Clement, Origene et Didyme, on dira ceci:
l Evangile selon les Hebreux a d abord ete redige, au moins par-
tiellement, en hebreu ou en arameen,dans une region proche de
Jerusalem.11 ensuiteete traduit engrec. 11est alors en usagedans
un groupe qui vit en Egypte, sansdoute a Alexandrie. Ce groupe
16. Ce fragment est absent chezSchneemeicher. constitue Ie fragment
XIII de l edition d A. F.J. KwN et Ie fragment VII des Ecrits apocryphes
chretiens.
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N GROUPE JUDEO-CHREnEN MECONNU: LES HEBREUX
fait partie de la Grande Eglise, puisque l' Evangile en question,
sans etre considere comme appartenant au Canon du Nouveau
Testament, est regarde comme admissible, notamment quand il
s'agit de resoudredesdifficultes exegetiques. e courant dont nous
parlons considerait l'Esprit Saint comme la mere de Jesus,sans
que cela mplique forcement une pneumatologie deviante. l insis-
tait sur a pauvrete et se mefiait des riches.
II -L' Ancien Testament selon les Hebreux
(Ka8' 'E~palOU5')
C'est Origene qui nous e fait connaitre dans un passage elebre,
qui, selonmoi, n'a pas 6te nterprete correctement. On y voit gene-
ralementune description du Canonjuif de a Bible, alors qu'i s'agit
des livres de l' Ancien Testament en usage chez es H6breux. Le
passagenous est transmis par Eusebe, qui raconte qu'Origene,
dans son explication du psaume 1, «a fait l'expose du catalogue
desEcritures sacrees e l' Ancien Testament». SelonEusebe,Ori-
gene ecrit litteralement ceci
« 11 e faut pas gnorer que les ivres testamentaires ont, comme
leg H6breux Ie transmettent, vingt-deux, autant que Ie nombre des
lettres chezeux )). Eusebe signale alors qu'il omet quelques mots
ou quelques phrases d'Origene, puis Ie cite de nouveau: «Voici
les vingt-deux livres selon eg H6breux:
-Ie livre qui a pour titre cheznons Genese,mais chez eg H6breux
d'apres Ie commencementdu livre Bresith, c'est-a-dire "en com-
mencement",
-Exode, Ouellesmoth, c'est-a-dire "voila leg noms",
-Levitique, Ouikra, "et il appela",
-Nombres, Ammesphekodeim,
-Deuteronome, Elleaddebareim, "voici leg paroles",
-lesus fils de Naue, osouebennoun,
-luges, Ruth, chez eux en un, Sophteim,
-Regnes 1-2, chezeux un, Samouel,"I'appeI6 de Dieu",
-Regnes 3-4, en un, OuammelkhDavid, c'est-a-dire "regne de
David",
-Paralipomenes 1-2, en un, Dabreiamein, c'est-a-dire "paroles
des ours",
-Esdras 1-2, en un, Ezra, c'est-a-dire "secourable",
-Livre des Psaumes,Spharthelleim,
-Proverbes de Salomon,Meloth,
-Ecclesiaste,Koelth,
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G.DORIVAL
-Cantique des cantiques (et non, comme certains Ie pensent,
Cantiquesdes cantiques),Sirassireim,
-Esai e, essia,
-J eremieavec Lamentations et la Lettre en un, Ieremia,
-Daniel, Daniel,
-Ezechiel, Iezekiel,
-Job, lob,
-Esther, Esther.
Or, en dehors de ceux-ci, il y ales Maccabai ques,ui ont pour
titre Sarbethsabanaiel» (Histoire ecclesiastique VI 25, 1-2).
Ce passage ecessitequelqueseclaircissements.Origene donne
chaque ivre de l' Ancien Testamentd'abord selon son titre grec,
puis selon son titre hebralque, qui, Ie cas echeant, est traduit en
grec. Toutefois, ne sont pas traduits les titres hebralques des
Nombres,de lesus, de luges et Ruth, ainsi que de tous les livres a
partir des Psaumes.Les titres grecs sont conformes a ceux de la
Septante.On n'a pas de mal a reconnaitre dans a plupart des itres
hebralques des titres proches de ceux de la Bible massoretique,
souvent meme dentiques a eux :
-Bresith pour Ber6 ' shit.
-Ouellesmoth correspond a We' eleh shemoth, qui forment les
trois premiers mots de l' Exode. Le titre est souvent reduit au der-
nier de res mots, Shemoth.
-Ouikra pour Wayyiqra.
-Elleaddebareim transcrit ' 6leh hadebarim, qui sont les trois
premiers mots du Deuteronome.Le titre massoretiqueest souvent
reduit au troisieme de cesmots, Debarlm.
-Iosouebennoun pour Yehoshua' bin-nun, Josue ils de Nun ,
qui figure en Josue 1. Le titre massoretique est Yehoshua '.
-Sophteim est e mot hebreu qui signifie juges . II figure pour
la premiere fois en luges 2, 16, et il est effectivement Ie titre du
livre des uges.
-Samuel, en hebreu Shemu el, figure pour la premiere fois en
1 Regnes ,20 et donne effectivementson itre hebreual-2 Regnes.
-OuammelkhDauid est a transcription grecque du debut de 3
RegnesWehamelek Dauid. Contrairement a ce que dit Origene,
ces mots ne signifient pas Regne de David , mais Et Ie roi
David . Le titre massoretique est en realite Melaklm, qui signifie
Rois .
-Dabreiamein est a transcription du debut des Paralipomenes
Dibrey hayomim, paroles des ours , qui forment Ie titre masso-
retique de ce livre.
-Ezra, qui signifie bien secourable , est Ie titre massoretique
du livre d' Esdras.
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-Spharthelleim est a transcription de l'hebreu SeperTehillim,
"Livre des Psaumes",qui est Ie titre massoretique.
-Koelth transcrit l'hebreu Qoheleth, qui figure au v. 1 de l' Ec-
clesiasteet qui est effectivement Ie titre massoretique.
-Sirassireim est a transcription de l'h6breu Shir hashshirim.Ces
mots, qui figurent au debut du texte, signifient "cantique des can-
tiques" et sont Ie titre massoretique.
-leg titres suivants,d' essiaa Esther, sont a transcriptiongrecque
des titres hebreux. Toutefois, dans la Bible massoretique, leg
Lamentations ne sont pas jointes a Jeremie et portent Ie titre
d"eykiih ou de qinot.
Seules deux transcriptions font probleme :
-Ammesphekodeim pour Nombres. En fait, on n'a pas de mal
a reconnaitre ici la transcription de Homesh happiqqudim, litte-
ralement "Cinquieme des recensements",qui est un titre atteste
par la tradition rabbinique pour legNombres. Le mot "cinquieme"
estsynonymede "livre", puisque e Pentateuque, ait de cinq livres,
comprend cinq cinquiemes.
-Meloth pour Proverbes.Le titre massoretiqueestmisWey,plu-
riel construit de mashal,"proverbes". Le pluriel absolu estmesha-
lim, jamais meshaloth. Voila pourquoi corriger meloth en mesloth
ne s'impose pas. Faut-il songer au pluriel du substantif feminin
millah, mot, discours ? Mais ce pluriel a une forme masculine,mil-
lim ou millin. Faut-il proposer ma' aloth, qui figure dans quinze
titres de psaumes (Psaumes119-133): shir ma' aloth, psaume des
montees ou des degres. Mais ce titre est peu satisfaisantpour Ie
gens,meme si, en Ezechiel 11, 5, ce terme designe eg penseesqui
montent a l'esprit d'Israel.
Amsi, a I'exception de meloth, les itres hebreuxdonnespar Ori-
gene, ou bien sont connuspar la tradition rabbinique, ou bien sont
identiques a ceux de la Bible massoretique.
Les vingt-deux Iivres de l' Ancien Testamentdecrit par Origene
ne soot que vingt-et-un. Les manuscrits qui font connaitre Ie texte
d'Eusebe ont omis Ie Dodecapropheton. Mais Ie texte originel
contenait ce livre, comme Ie montre Ie fait que la traduction de
I' Histoire ecclesiastique ar Rutin offre ce livre entre Ie Cantique
descantiqueset Esai"e. e meme ivre, a la meme place, igure dans
la liste que propose Epiphane de Salamine, dans son Traite des
mesureset despoids, avec e titre hebreu en transcription grecque
dathariasara, oil il faut sansdoute reconnaitre Ie titre arameendu
Dodecapropheton : terey , ashsar.Le titre massoretique est she-
oem 'ashsar.C'est ce titre hebreu qui figurait sansdoute chez Ori-
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G.DORIVAL
gene, plutot que Ie titre arameen, puisque les autres titles de la
liste sonthebreux.
Pour Ie sujet que je traite, il est essentielde remarquer que Ie
cataloguedes Hebreux n est pas dentique a celui de la Bible mas-
soretique. On note d abord que Ruth ne fait qu un avec uges, alors
que, dans a Bible massoretique, uges fait partie desProphetes et
Ruth des Ecrits. De lameme fa~on, Ie livre des Lamentationsne
fait qu un avec1 eremie,alors que Ie premier appartient aux Ecrits
dans a Bible massoretique, et Ie second aux Prophetes. Chez es
Hebreux, la Lettre de Jeremie est ointe a leremie et aux Lamen-
tations,alorsqu elle estabsentedans e Canonmassoretique.Enfin,
il est question d Esdras1 et 2: il est difficile qu Esdras1 renvoie
a Esdras de la Bible massoretique, et Esdras2 a Nehemie, etant
donne que 2 Esdras de la Septante designe ensemble constitue
par Esdraset Nehemie.Sansque cela soit sur, l estpossiblequ Es-
dras1 et 2 correspondent a 1 Esdras et 2 Esdras de la Septante.
A partir de Paralipomenes, ordre des ivres selon es H6breux
differe de celui de a Bible massor6tique.Or, cet ordre ne seretrou-
ve dansaucuneautre iste donnant es ivres bibliques ni dans aucun
des manuscrits de la Septante. Celui qui s en rapproche Ie plus est
celui du Vaticanus: es deux ordres sont dentiques jusqu au Can-
rique des cantiques,mais different a partir du Dodecapropheton.
La liste des H6breux estdonc ordonn6e de maniere originale. Cela
signifie qu Origene n est pas l auteur de l ordre des livres de la
Bible des H6breux. II n a pas projet6 sur cet Ancien Testament
l ordre de la Septante a sa disposition. II reproduit probablement
l ordre meme de la Bible des H6breux. Or, par rapport a la Bible
massor6tique qui fait se succ6der es Prophetes et les Ecrits, cet
ordre offre l originalit6 de meler les livres des Prophetes avec es
Ecrits, comme Ie montre Ie tableau suivant, ou Ie titre de chaque
livre est suivi de la lettre P pour Prophetes et E pour Ecrits :
JesusP
JugesP, Ruth E
Regnes1-2 P
Regnes3-4 P
Paralipomenes1-2 E
Esdras1 absentde la Bible massor6tique,Esdras2 E
PsaumesE
Proverbes E
EcclesiasteE
CantiqueE,
DodecaprophetonP
Esaie P
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N GROUPE JUDEO-CHRETIEN MECONNU: LES HEBREUX
1 eremieP, LamentationsE, Lettre absente
Daniel E
Ezechiel P
lobE
Esther E.
Ce melangeentre Prophetes et Ecrits correspond probablement
a un Ancien Testament qui ne faisait pas la distinction entre les
Prophetes et les Ecrits. Par Ie prologue du Siracide,nons savons
que cette distinction est apparue dans Ie judaYsmeun pen avant
117 avant notre ere. Mais rien ne prouve qu elle se soit generali-
see rapidement a tout Ie udaYsme. a Bible des Hebreux pent etre
l heritiere d un courant juif qui n acceptait pas de faire cette dis-
tinction. Nous savons d ailleurs qu elle n allait pas sansposer des
difficultes : a Qumran, Daniel fait partie des Prophetes; la tradi-
tion rabbinique affinne que Samuelest auteur de uges et de Ruth,
Jeremie celli du livre qui porte son nom, des Rois et des Lamen-
tations (Talmud de Babylone, Baba Batra 14b-15a).
Une demiere remarque nous aidera a preciser en quoi la Bible
selon es Hebreux differe du Canon massoretique,Selon Origene
rapportant la tradition des Hebreux, «hors » des vingt-deux ivres
qu il vient d enumerer, figurent les Maccabai ques, ont Ie nom
hebralque est Sarbethsabanaiel.Ce titre a fait collier beaucoup
d encre. n faut probablement corriger sar en sphar,qui figure dans
Ie titre des Psaumes donne plus haut, sphartehilleim, et com-
prendre: Livre de la maisonde Sabanaiel,Sabanaiel,qui n estpas
connupar ailleurs, etant peut-etre Ie nom d un ancetre des Mac-
cabees.Si l on admet a correction de sar en sphar,on conclura que
Ie titre de Maccabai ques e s applique qu a un seullivre, tres pro-
bablement1 Maccabees e la Septante.Les specialistessont d ac-
cord pour dire que ce livre a ete ecrit en hebreu et admettent, en
revanche,que 2 Maccabees ete redige directement en grec. Aux
yeux des Hebreux, 1 Maccabees e fait pas partie des ivres « es-
tamentaires». Cela ne signifie pas qu ils l ecartent, puisqu ils pren-
Dent soin de Ie signaler.n a probablement un statut intermediaire
entre les livres testamentaireset les livres apocryphes.n fait par-
tie de ces ivres qu Athanase appellera au lye siecle «les autres
livres» (Judith, Tobit, Sagesse, iracide)et qui formeront plus tard
les deuterocanoniques.A la lecture du passage Origene, on a Ie
sentimentque 1 Maccabees , auxyeux desHebreux, un statut voi-
sin de celui de l Evangile seton es Hebreux aux yeux de l Alexan-
drin : ts forment deux extes non canoniques,mais acceptables.Ce
trait seulsuffit a distinguer es Hebreux des abbins Dullepart ceux-
ci ne considerent a litterature maccabeennecomme admissible.
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G.DORIVAL
Ainsi, ce n'est nullement la Bible des rabbins qu'Origene pre-
tend decrire dans son Commentairesur Ie psaume1. II vise en fait
I' Ancien Testament auquel se referent les Hebreux et qui offre
plusieursdifferencesavecce qui deviendra a Bible massoretique
les Ecrits ne sont pas encore distingues des Prophetes; Ruth et
luges ne font qu'un, de me-me ue Lamentationset leremie; ce der-
nier livre comprend aussi a Lettre de Jeremie, absentede la Bible
massoretique; Esdras n'est pas encore divise en Esdras et Nehe-
mie; 1 Esdrascorrespond probablement a 1 Esdrasde la Septan-
te, tandis que 2 Esdras regroupe Esdras et Nehemiede la Bible
massoretique; entin, 1 Maccabees, ans aire partie du Canon des
Hebreux, n'est pas rejete.
On voit ou je veux en veniT. Ames yeux, les He:breux qui ont
renseigne: Origene sur leurs livres intertestamentaires sont les
memes que ceux doni Origene cite I' Evangile. Evidemment, Ori-
gene ne Ie dit pas explicitement. Mais il faut remarquer qu'il
emploie des tours paralleles pour parler des He:breux de I' Ancien
Testament et des He:breux du Nouveau Testament. lis sont tou-
jours de:signe:s par Ie substantif de:pourvu de I'article: 'E~palOl. Les
vingt-deux livres de l' Ancien Testament sont Ka6 E~paLOVS'.Leur
Evangile est appele:: TO Ka6 E~paLOVS'EOOYYEAtOV. ien, au niveau
de la terminologie, n'indique que nous ayons affaire a deux cate:-
gories diffe:rentes d'He:breux. C'est Ie moment de citer I'adage
scholastique : entia non sunt multiplicanda praeter necessitatem.
Dans Ie fond, c'est a ceux qui sont partisans de distinguer des
He:breux de deux types d'en faire la de:monstration. Quant a I'ab-
sence d'article, elle signifie peut-etre qu'aux yeux des citateurs
patristiques, ces He:breux ne forment pas la totalite: des He:breux,
mais seulement un groupe parmi les He:breux : ce sont des He:breux
parmi d'autres, qui se distingueraient des autres He:breux par leur
Ancien et leur Nouveau Testaments.
III -Le groupe des Hebreux
En dehors des citations de I' Evangile seton es Hebreux et de Ia
description de leur Ancien Testament, Ies Peres parlent-ils des
Hebreux? II serait necessairede mener une enquete exhaustive
chez es ecrivains des trois premiers siecles et d'analyser tous Ies
passages 11igure Ie mot' Ef3palol au singulier ou au plurieI, en
ayantsanscesse resentea I'esprit I'idee que I'expressionpeut tan-
tot designerdes Juifs tantot des Juifs chretiens. Je me Iimiterai ici
a Origene, dont il est sur qu'il constitue,et de tres loin, notre prin-
cipale source d'information. Mon idee estque Ies Hebreux dont il
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N GROUPE JUDEO-CHREnEN MECONNU: LES HEBREUX
est question chez Iui doivent etre parfois identifies aux Hebreux
de l' Evangile selon es Hebreux et aux Hebreux dont Ie Canon de
l' Ancien Testament comporte vingt-deux Iivres, plus un livre en
dehors du Canon, 1 Maccabees.
Cependant,chez Origene, Ie teTllle d'Hebreu, au singulier ou au
pluriel, designeparfois des Juifs adeptesdu udaisme.Par exemple,
dans a Lettre Ii Africanus, qui date des demieres anneesde la vie
d'Origene, celui-ci raconte qu'il a rencontre plusieurs Hebreux
pour leur demander leur opinion sur l'histoire de Suzanne.L'un
d'eux estappelechez eg Hebreux« fils de sage »:«eleve pour suc-
ceder a son peTe», il est, semble-i-ii, un rabbin. Quant aux autres
Hebreux qu'Origene a consultesa ce moment-la pour leur connais-
sancede la langue hebraique et des raditions d'interpretation de
la Bible, il n'est pas impossible qu'ils soient chretiens, mais leur
appartenance au udaisme parmi plus probable et est admise par
leg specialistesd'Origene.
A l'inverse, les Hebreux d'Origene sont parfois des chretiens:
dans Ie fragment 3 sur les Lamentations, il explique que «les
Hebreux (sans article) disent que es ivres de l' Ancien Testament
sont en nombre egal aux ettres, de telle sorte qu'its sont une ntro-
duction a la connaissance omplete de Dieu, comme es lettres Ie
sont a la sagesse omplete pour ceux qui apprennent ». Ce frag-
ment doit etre rapproche du Commentairesur Ie psaume1 cite par
Eusebe, ou figure Ie meme theme des vingt-deux livres de l' An-
cien Testamentet desvingt-deux ettres de l'alphabet hebreu.L'ap-
port original du fragment sur les Lamentations est 'idee que, de
meme que l'apprentissage des ettres constitue un preliminaire a
la connaissance e la sophia,de meme ' Ancien Testamentestune
introduction a la connaissancede Dieu. La question qui se pose
est la suivante : cette idee est-elle celle des Hebreux? N'est-elle
pas plutot tine idee d'Origene exploitant tine tradition juive? En
ce cas, es Hebreux pourraient etre desJuifs adeptesdu udalsme :
ils auraient simplementrapproche Ie nombre des ivres de a Bible
du nombre des lettres hebraiques. L'expression d' Ancien Testa-
ment au lieu de Bible serait a attribuer a Origene, tout comme Ie
theme des ettres et de l' Ancien Testamentcon~us omme despre-
liminaires a la sagesse t a la connaissancede Dieu. En fait, tine
telle recriture d'une tradition juive par Origene parait peu pro-
bable et surtout difficile a demontrer. De plus, a l'epoque d'Ori-
Igene,a tradition juive sur Ie nombre de livres de la Bible parle de
vingt-quatre livres, ce qui interdit tout rapprochement avec Ie
nombre de lettres de l'alphabet hebraique.11semble donc que leg
Hebreux dont il est question ici soient bel et bien des chretiens.
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G.DORIVAL
Un texte d'Origene, de:cisifpour mon propos, montre qu'a ses
yeux, les He:breux sont tantot des Juifs adeptes du udaisme, tan-
tot des Juifs chretiens. Dans un fragment connu par les chaines,
Origene commente Ezechiel 9, 3-4: «Et la gloire du Dieu monta
depuis es Kheroubim, elle qui se trouvait sur eux, en direction de
la cour de la maison. Et il appela 'homme revetujusqu'aux pieds,
qui avait sur ses reins la ceinture. Et il dit: Passe au milieu de
Jerusalemet donne un signe sur es fronts deshommes qui gemis-
sent et souffrent a causedes niquites survenuesau milieu d'elles ».
Origene donne Ie texte de la Septante «<Donne un signe sur les
fronts »), puis la version d' Aquila et de Theodotion «<Signe du
Taw sur es fronts » . II ajoute ceci
«Nous nOllS ommes nforme aupres des Hebreux pour savoir
s'ils pouvaient dire quelque enseignementde leurs Peres au sujet
du Taw et nollSavons appris ceci l'un disait que Ie Taw, parmi leg
vingt-deux ettres qui existent chez eg Hebreux, est a derniere en
ce qui regarde 'ordre que eg ettres ont chezeux; donc a derniere
lettre a ete prise pour presenter a perfection de ceux qui, a cause
de la vertu en eux, gemissentet souffrent pour leg autes commises
parmi Ie peuple et qui compatissentavec eg transgresseurs e la
la Loi. Un deuxieme disait que Ie Taw etait Ie symbole de ceux qui
observent a Loi, etant donne que a Loi chez eg H6breux estappe-
lee Torah et que la premiere lettre de la Loi est Ie Taw, ainsi que
de ceuxqui vivent selon a Loi. Un troisieme, un de ceuxqui croient
au Christ, disait, en parlant des anciennes ettres, que Ie Taw res-
semblait au trace de la croix et etait prophetise a propos de ce qui
se produit chez eg chretiens pour Ie signe sur Ie front: signe que
font tollS ceux qui croient, lorsqu'ils commencentune activite quel-
conque, et surtout desprieres ou bien de saintes ectures » (PG 13,
800-801).
L'expression «un troisieme, un de ceux qui croient au Christ»
montre que, pour Origene, il existe deux categories d'Hebreux :
ceux qui croient au Christ et ceux qui ne croient pas en lui. En
d'autres termes, chez Origene, les Hebreux torment une popula-
tion qui lit ou parle la langue hebraique. Mais ce erme n'implique
pas obligatoirement la pratique du judaisme. En consequence,
chaque ois que l'on est en presenced'un texte d'Origene 011t est
question des Hebreux, il taut se demandera quelle categorie l'on
a affaire: desJuifs ou deschretiens? Une deuxieme emarque doit
etre faite : les Hebreux qui croient au Christ voient dans e passa-
ge d' Ezechiella prophetie de la pratique chretienne du signe de
croix. Ce sont des tenants de la methode allegorique. Un demier
cornmentaire doit encore etre apporte : Ie fragment sur Ezechiel
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N GROUPE JUDE-O-CHRETIENMECONNU: LES HEBREUX
provient soit des Homelies sur Ezechiel,soit du Commentairesur
Ezechiel. Cesdeux reuvresont ete composeespar Origene a Cesa-
Teede Palestine entre 239 et 245. Est-ce a cette epoque qu'il a ren-
contre les Hebreux dont il parle? Ou bien tient-il ses nformations
d'interlocuteurs consultesa Alexandrie, avant son depart pour la
Palestine? Ou bien encore a-t-il discute avec certains a Alexan-
drie, avec d'autres a Cesaree? Le fragment sur Ezechiel ne per-
met pas de repondre a ces questions, dont l'enjeu estde taille: les
Hebreux sont-ils un groupe de Juifs chretiens vivant exclusivement
en Egypte, comme tendent a Ie montrer les citations de l' Evangi-
Ie selon es Hebreux et Ie temoignagesur ' Ancien Testamentselon
les Hebreux? Ou bien a-t-il existe, a cote de ces Juifs chretiens
d'Egypte, des Hebreux vivant en Judee-Palestine? Et quel rap-
port entretiennent-ils les uns avec es autres? L'etude des textes
d'Origene oil il est question d'un Hebreu au singulier va nous per-
mettle d'apporter une reponse a ces nterrogations.
Les passagesoil Origene parle de I'Hebreu sont au nombre de
trois, a quoi il faut sansdoute ajouter deux textes oil figurent l'ad-
jectif hebralque . Commen~onspar les premiers. Dans Ie Com-
mentaire sur Ie Psaume1, compose a Alexandrie, Origene parle
d' «une tIes belle tradition qui nous a ete transmisepar I'Hebreu ».
Ce demier compare l'Ecriture a une maison unique, oil il y a de
nombreusespieces ermees a clef. Aupres de chaque porte, il y a
une clef, mais ce n'est pas a clef qui correspond a la piece. 11 aut
donc chercher a clef de la piece que l'on desire ouvrir aupres des
autres pieces de la maison. En d'autres termes, pour interpreter
correctement un passageou un livre de la Bible, il faut faire appel
a d'autres passages t a d'autres livres. La Bible explique la Bible.
On note qu'il n'y a rien de specifiquement chretien dans cette tra-
dition hebralque. Origene entreprend d'ailleurs de la christianiser
lorsqu'il fait remarquer que Paul «suggere un mode d'approche
similaire pour la comprehensiondes chosesdivines » en 1 Corin-
thiens2, 13 (il faut « rapprocher les chosesspirituelles des choses
spirituelles» ).
Dans Ie fragment sur Exode 10,27, egalement edige a Alexan-
drie, Origene se refere a un enseignement e~u de «I'Hebreu» a
propos de I'interpretation de 3 Regnes , oil David ordonne a Salo-
mon de tuer Joab a cause de ses autes contre Abner. Voici ce
qu'Origene dit a propos du v. 6 «<Et tu teras descendresesche-
veux blancs en pRix dans I'Hades ») : « n est evident que, comme
I'Hebreu lui Russinons l'a rapporte, Joab reposera en paix parce
qu'il a ete chatie, car il n'est plus redevabled'une epreuve et d'une
punition apres Ie depart d'ici-bas, puisqu'ici-bas illes a deja
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G. DORIVAL
re~ues». Dans ce texte, l'Hebreu transmet a Origene la doctrine
rabbinique selon aquelle, en vertu du principe de droit qui vent
que la mort eteigne l'action de la justice, par la mort, l'homme
expie son pecht, meme s'il ne s'est pas repenti au prealable.
Enfin, dans e Traite des Principes,qui date lui ausside la perio-
de alexandrine de la vie d'Origene, celui-ci rapporte l'interpreta-
tion d' Esafe6, 3, selon I'Hebreu:« Notre maitre hebreu disait que
leg deux seraphinsdecrits dans e livre d' Esafeavec eurs six ailes
en rain de crier l'un a l'autre et de dire: Saint, saint, saint, Ie Sei-
gneur sabaoth , devaient etre interpretes du Fils unique de Dieu
et de l'Esprit Saint» (13,4). Ici, legrealites de l' Ancien Testament
sont vues comme des figures des realites chretiennes. De cette
maniere, la methode allegorico-typique apparait comme etant au
creur de l'activite ex6getiquede I'Hebreu. Son nterpretation a un
aspect ubordinatianiste nd6niable : eg deux seraphinsne sontpas
sur un pied d'egalite avec Ie Seigneursabaoth.Mais on se garde-
ra de conclure trop vite, car Origene ne dit pas comment I'H6breu
interpretait Ie « saint, saint, saint », en qui il pouvait voir Ie PeTe,
Ie Fils et l'Esprit 17.
Le parallelisme des expressions nvite a voir dans I'Hebreu de
ces trois passages ine seule et meme personne. Cet Hebreu,
qu'Origene reconnait pour son maitre et qu'il n'a pu rencontrer
qu'a Alexandrie, lui a transmis deux so~es de traditions d'inter-
pretation de la Bible: d'une part des traditions qui n'ont rien de
chretien et dont l'une est meme typiquement rabbinique; d'autre
part, une tradition tout a fait chretienne. Cela ne pent s'expliquer
que si I'Hebreu appartient a un groupe de Juifs chretiens, Testes
en contact avec Ie milieu juif dont il est ssu, ou du moins se sou-
venant des nterpretations en circulation dans ce milieu. Le terme
hebreu utilise par Origene pour parler de ce Juif chretien ren-
17. Origene lui-meme met en relation Ie « saint, saint, saint» avec e mys-
teTede la Trinite dans es Homelies sur Isaie 1, 2 et 4, 1. II est tentant de
suspecter 'authenticite origenienne de cette interpretation, parce que les
Homelies sont connues seulement par une traduction de Jerome, que
Rufin critique pour avoir ajoute les mots «Nec putes trinitatis dissidere
naturam, si nominum servantur officia» (Apologie contre Jerome I 31,
17 sq), qui font precisementpartie de I' Homelie 1 2. En fait, Rufin ne dit
pas que tout Ie paragraphe2 est une addition de Jerome et on ne voit pas
au nom de quoi on suspecterait e paragraphe1 de I' Homelie 4. La mise
en relation du triple « saint» avec e chiffre de la Trinite semble bien etre
origenienne.
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UN GROUPE JUDEO-cHRETIEN MECONNU : LES HEBREUX
contre a Alexandrie invite a voir en Iui un desmembresde ce >T°u-
pe d'Hebreux, dont Ie meme Origene nous fait connaitre I'Evan-
giI~ et l' Ancien Testament.
Passons maintenant aux deux passages oil figure l'adjectif
"hebralque". Dans l' Homelie 13 sur les Nombres 5, qui a ete pro-
noncee durant la periode de Cesaree,Origene rapporte «l'expli-
cation d'un maitre d'origine hebraIque venu a la foi» relativement
a Nombres 22, 4 «<A presentcette communaute pourlechera tOllS
ceux qui sont autour de nous, comme Ie taurillon pourleche a ver-
dure de la plaine »). Le maitre doni Origene parle explique que,
si Ie roi Balak compare Israel a un taurillon qui pourleche la ver-
dure de la plaine, c'est parce que Ie taurillon se sertde sa langue
comme d'une faux pour couper toot ce qu'il trouve; tel Ie taurillon,
Israel combat de la bouche et des levres, ses armes sont sessup-
plications. On note que cette interpretation n'a rien de specifi-
quement chretien. Son origine juive est sure.
Enfin, dans I'Homelie 20 sur Jeremie 2, qui date de laperiode
cesareenne de la vie d'Origene, ce dernier cite «une tradition
hebraique qui est venue jusqu'a nous par un homme qui a fui a
causede sa foi au Christ et a causede sa progressiona partir de la
Loi et qui est venu a 011 ous residons ». Voici comment cette tra-
dition interprete Jeremie20, 7 «<1\1 m'as trompe, Seigneur, et j'ai
ete trompe ») : « Dieu n est pas un tyran, mais un roi. Et, etant roi,
il ne fait pas violence, mais il persuade, et il veut que sessujets se
livrent d'eux-memes de leur plein gre" a son ldministratiofl, pour
que Ie bien de quelqu'un ne se fassepas "selon la necessite",mais
"de son plein gre", ce que Paul savait quand, dans a Lettre a Phi-
lemon, l disait a Philemon au sujet d'Onesime : "Pour que ton bien
ne se fassepas selon a necessite,mais de ton plein gre" (v. 14) ».
Dans la suite du passage,Origene signale un autre aspect de la
meme tradition hebraique : selon elle, Dieu voulait confier a Jere-
mie une double mission, celle d'annoncer Ie chatiment des nations
et celle de prophetiser Ie malheur a Israel. Comme il savait que
Jeremie refuserait a secondemission, illui a simplement confie la
premiere, que Ie prophete a acceptee.Alors seulement, Dieu l'a
charge de la seconde mission. D'OI1 a protestation de Jeremie:
«1\1m'as trompe, Seigneur». Aux yeux de la meme radition, Dieu
a agi de la meme facrona l'egard d'Esaie. II a d'abord demande:
«Qui enverrai-je a ce peuple? » (Esafe 6, 8). Esaie s'est porte
volontaire. Alors seulementDieu lui a ordonne de prophetiser des
menaces.Dans tout Ie passagequi vient d'etre resume, Origene
rapporte une interpretation juive traditionnelle, selon laquelle
Dieu a dfi forcer la main de sesproph~tes chaque ois qu'il a voulu
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G.DORIVAL
leur faire prophetiser es malheursd Israel. Cette tradition n a subi
aucune retouche chretienne. II n en va pas de meme dans Ie pas-
sagequi a fait l objet d une citation. La comparaisonde Dieu avec
un roi qui veut que sessujets se livrent a son administration « de
leur plein gre » est mise en relation avec un versetde Paul. L exe-
gese est ici nettement chretienne. Mais a qui est due la christiani-
sation de la comparaison?Plutot qu a Origene, on doit songer a
celui qui a fui a cause de sa foi au Christ. En d autres termes, la
tradition hebralque dont il est question dans Homelie 20 surJere-
mie a fait l objet d une christianisation partielle. Cela s explique
bien si l informateur d Origene appartient a un groupe de Juifs
chretiens.On note encore qu il interprete Jeremiea aide desecrits
pauliniens : Ie groupe auquel il appartient est un groupe judeo-
chretien pro-paulinien.
Le parallelisme des expressions ait que l on petit identifier sans
risque d erreur Ie maitre d origine hebralque des Homelies sur les
Nombres avec l exegete de Jeremie. Maintenant, a-t-on Ie droit
d identifier ce personnageavec Hebreu des rois textes cites plus
haut? Dans un passe recent, j ai defendu, avec prudence, cette
identificatiow8. Aujourd hui, je sills plutot de l avis contraire.
L identification se heurte a des arguments serieux. D abord, elle
entraine des problemes chronologiques redoutables: a quel
moment l Hebreu qui a fui pour sa foi et qu Origene a rencontre
a Alexandrie a-t-il pu etre contraint de quitter la Palestine pour
l Egypte? On est ente de mettre ce depart force en relation avec
la Birkat ha-Minim et la deterioration des rapports entre Juifs et
chretiens dans es premieres annees du lie siecle. Mais comment
un homme vivant a celie epoque, au plus tard veTS 30, a-t-il pu
etre Ie maitre d Origene, au plus tot veTS 00? Ensuite, dans es
passages u it est question de l Hebreu, Origene ne precise amais
qu il s agit d un converti: Origene a pu avoir affaire a deux
Hebreux differents : seulle secondserait un converti recent. Entin,
lorsque, dans Homelie 20, Origene parle de l exegete qui a fui a
causede sa foi au Christ, it precise qu it est venti «la ou DOllSesi-
dons ». Cetteexpression, au present, renvoie obligatoirement a
Cesareede Palestine. Le maitre d origine hebralque venti a la foi
dont parle l Homelie 13 sur les Nombres se serait en fait refugie
aupres d Origene, a Cesaree.11 audrait absolument e distinguer
de l Hebreu d Alexandrie. 11 aut cependant econnaitre que celie
distinction complique les chases.Aussi a-t-on propose de carriger
18. Voir G. DORIVAL, rt. cit. ll. 3.
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N GROUPE JUDEO-CHRETIEN MECONNU: LES HEBREUX
Ie texte de l' Homelie 20 sur Jeremie et de remplacer I'expression
«Ia oil nous residons» (8laTpi(3o~EV)ar «Ia oil nous residions»
(8lETpi(3o~EV19.Cet imparfait renvoie forcement a Alexandrie.
Des Iors, plus rien ne s'opposerait a I'identification des person-
nages. Et, Iorsqu'Origene, dans l' Homelie 13 sur les Nombres et
dans l' Homelie 20 sur Jeremie, se refere a un maitre d'origine
hebralque, l parlerait en realite d'un enseignement u'il avait re~u
a Alexandrie, avant son depart pour Ia Palestine.
Mais, pour simplifier leg choses, a-t-on Ie droit de corriger leg
textes? Surement pas. De plus, il existe un argument pour dire
qu'Origene a rencontre des Hebreux en Palestine: Ie fragment sur
Ezechiel presente plus haut. Pour eclairer un passagedifficile de
ce prophete, Origene rencontre trois Hebreux. Les deux premiers
sont juifs, Ie troisieme est chretien. Or, Origene a explique Eze-
chiellorsqu'il vivait en Palestine.Peut-il ici faire allusion a desren-
contres d'autrefois, qui auraient eu lieu a Alexandrie? On pour-
fait Ie soutenir s'il n'y avait que Ie troisieme Hebreu. Mais legdeux
premiers informateurs hebreux de religion juive rappellent leg
interlocuteurs uifs qu'a rencontres Origene au moment oil il redi-
geait la Lettre a Africanus, en Palestine. Nulle part dans 'reuvre
d'Origene, il n'est question d'Hebreux juifs rencontres a Alexan-
drie.
Voici comment e propose aujourd'hui de voir les chases.Dans
sesecrits rediges a Alexandrie, Origene fait allusion a son maitre
hebreu. Ce dernier fait partie des Hebreux d' Alexandrie, dont DOllS
connaissonsquelques ragments de l' Evangile, ainsi que Ie corpus
de l' Ancien Testament. Nous sayans aussi que ces Hebreux
connaissaient bien les traditions juives d'interpretation et qu'ils
recouraienta l'exegeseallegorico-typique.Dans sesecrits de Pales-
tine, Origene serefere a des Hebreux dont les uns sont desadeptes
du judaisme et les autres chretiens. Un de ces chretiens est un
converti de fraiche date qui a dft se r6fugier aupresd'Origene pour
6viter la colere de ses anciens coreligionnaires. Un autre para t
appartenir a un groupe bien constitue, celui des H6breux qui
croient au Christ. Ces H6breux chr6tiens connaissentbien les tra-
ditions juives d'interpretation, manient l'al16gorie et utilisent
l'apotre Paul. Nous ne sayanspas s'ils avaient un Evangile parti-
culier et DOllS e connaissonspas Ie corpus de leur Bible.
19. Voir l'edition de P. HUSSONt P. NAUTIN,Origene.Homelies sur Jere-
mie, Sourceschretiennes no238,Paris, 1977,p. 256.
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G.DORIVAL
Ces deux groupes d'Hebreux ont-ils des rapports entre eux?
Le fait qu'Origene parle d'Hebreux dans les deux cas pourrait
etre utilise comme argument pour aller dans ce sens.Mais il ne
faut pas majorer la portee de cette remarque terminologique. En
realite Ie terme d'Hebreux chezOrigene a simplement Ie sensde
personnes qui paTIent,ou lisent, ou utilisent la langue hebraique.
n peut recouvrir desrealites sociologiques res differentes, comme
Ie montre Ie fait qu'Origene appelle Hebreux desJuifs et deschre-
tiens.
IV -Conclusion
Deux questions restent en suspenso
1. Qu'en est-il du temoignagede Jerome sur ' Evangile selon es
Hebreux? A l'epoque ou il ecrit, Ie titre d' Evangile selon les
Hebreux peut renvoyer non seulementaI' Evangile en circulation
chez eg Hebreux d'Egypte, mais encore aI' Evangile de Matthieu
ecrit en hebreu ou en arameen,aI' Evangile des Nazoreens, I' E-
vangile des Ebionites, au Diatessaronde Tatien, valle a des Evan-
giles apocryphes.11est donc impossible de prendre au pied de la
lettre leg indications de provenance que donne Jerome. Un pro-
res en authenticite doit etre mene a chaque ois. Pour ce faire, DOUg
sommesaides par leg resultats des recherchesd'A. F. Klijn, qui a
montre que Jerome n'a connu ' Evangile desNazoreensqu'en 392.
Avant celie date, il n'a aucuneconnaissance irecte des Evangiles
judeo-chretiens. Son nformation depend entierement d'Origene.
Cependant, Jerome connaissaitdes ouvragesd'Origene que DOUg
ne possedonsplus: il peut doDDeraccesa des fragments de l' E-
vangile selon es Hebreux qui ne figurent pas dans 'reuvre conser-
vee d'Origene. C'est Ie cas du fragment XIV d'A. F.J. Klijn (= IV
des Ecrits apocrypheschretiens),qui provient du Commentairesur
la Lettre nux Ephesiens,ecrit en 386-387 5,4: «Dans l' Evangile
hebrafque, DOUgisons que Ie Seigneur dit aux disciples: Et ne
soyez amais joyeux, sauf quand vous regardez votre frere avec
amour -ou: dans 'amour»).
A partir de 392,Jerome cite tantot l' Evangile selon es Hebreux,
via Origene, tantot l' Evangile desNazoreens. II semble que ces
deux textes n'en fassentqu'un a sesyeux: dans son Commentaire
sur Ezechiel 18, 5-9, 1 se refere a «1'Evangile selon les Hebreux
que 1esNazareensont l'habitude de lire ». Et l' Evangile desNazo-
reensse confond pour 1uiavec ' Evangile desEbionites et l' Evan-
gile hebreu selon Matthieu: dans son Commentairesur Matthieu
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N GROUPE JUDEO-CHRETIEN MECONNU: LES HEBREUX
12, 13, il parle de «l'Evangile qu'utilisent les Nazareniens et les
Ebionites, que j'ai recemment traduit en grec a partir de la langue
hebralque et qui est appele par bon nombre l'evangile authentique
de Matthieu ». Une telle confusion, dont Jerome n'est pas l'in-
venteur, puisqu'on la trouve deja chez Eusebe et chez Epiphane,
rend complexe la tache de l'editeur des Evangiles judeo-chretiens.
Cependant, lorsqu'un fragment evangelique cite par Jerome se lit
chez Origene, il est sur qu'il provient de l' Evangile selon les
Hebreux. C'est Ie cas de la pericope oil Jesus appelle l'Esprit saint
sa mere. Elle se trouve trois fois chez Jerome, dans Ie Commen-
taire sur Michee 7,5-7, ecrit veTS 94, dans Ie Commentaire sur Esai e
40,9-11, ecrit en 408-410, et dans Ie Commentaire sur Ezechiel 16,
13, ecrit en 410-414 (= fragment II Klijn et Pleiade). Mais les autres
extraits donnes par Jerome ne se lisent pas chez Origene. Toute-
fois, certains peuvent provenir d'reuvres origeniennes perdues.
Voila sans doute pourquoi A. F. J. Klijn propose de rattacher a l' E-
vangile selon les Hebreux trois extraits qui se lisent dans Les
Hommes illustres II, ecrit en 392 (= fragment XV), dans Ie Com-
mentaire sur Esai.e 11, 1-3, ecrit en 408-410 (= fragment XXI), et
dans Ie Commentaire sur Ezechiel 18, 5-9, ecrit en 410-414 (= frag-
ment XXII). 11a ete suivi par D. A. Bertrand (chez qui ils consti-
tuent les fragments VI, I et V). Les six autres extraits cites par Jero-
me sont attribues a l' Evangile des Nazoreens. En fait, il est difficile
de se prononcer, et cela d'autant plus que les editeurs ne donnent
pas leur argumentation en tavern du rattachement a l'un ou l'autre
evangile. En ce qui me conceme, je suggere de rattacher Ie frag-
ment qui se lit dans Les Hommes illustres II aI' Evangile selon les
Hebreux, parce que Jerome l'introduit en faisant une allusion a
Origene, ce qui peut signifier qu'ille lui emprunte. En revanche,
je Teste hesitant pour les autres fragments. La prudence metho-
dologique veut qu'on les attribue a l' Evangile des Nazoreens, sauf
si on a une raison de penser qu'ils proviennent d'une reuvre d'Ori-
gene perdue.
2. Les Hebreux ne sont-ilspas un autre nom pour les Nazoreens
C'est en tout cas ce que suggereJerome. Une remarque de voca-
bulaire va dans e meme sens: Ie terme de Nazoreens/Nazareens
disparait apres Tertullien et ne reapparait que chez Epiphane et
Jerome. Au lIIe siecle et dans a premiere moitie du lye siecle, l
est question d'Hebreux. Or ces Hebreux soot des Juifs chretiens
considerespar les pagano-chretienscomme orthodoxes, ainsi que
Ie soot a la fin du lye siecle es Nazoreens. I y a la un argument
pour identifier les Hebreux et les Nazoreens.Des lors, il faut se
demander si ' Evangile selon es Hebreux ne peut pas etre confon-
du avec l' Evangile des Nazoreens,comme Ie pensent un certain
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G. DORIVAL
nombre de specialistes20. n realite, il taut distinguer es Hebreux
d Alexandrie et les Hebreux de Palestine, ainsi qu Origene nons
invite it. e faire. II est en effet probable que les Hebreux qu Ori-
gene a rencontres en Palestine dans es annees240-250sont den-
tiques avec ceux qu on appellera plus tard Nazoreens. Mais les
Hebreux qu il a frequentes it.Alexandrie torment un groupe bien
particulier, qui, it. epoque d Origene, ne parait pas avoir de liens
avec a Palestine. Cela dit, il taut s interroger sur l origine de ce
groupe. De deux chases une: ou bien cesJuifs chretiens torment
un groupe issu de la communaute uive d Alexandrie, ou bien its
viennent de Palestine. On a vu que Ie fragment ou Jesusparle de
l Esprit comme de sa mere implique que l Evangile selon les
Hebreux ait ete redige it. origine en hebreu ou en arameen, au
moins pour certains de ces versets, avant d etre ecrit en grec. Ce
fait s explique mieux par une origine palestinienne des Hebreux
que par une origine alexandrine. Nous sommes ci dans e domai-
ne des vraisemblances.On pent se demander si, au moment ou,
dans les annees 100, a malediction contre les notsrim est intro-
duire dans a priere quotidienne, un groupe de Nazoreensn a pas
quitte la Palestineyour se rendre dans cette traditionnelle terre
de refuge qu est l Egypte. II serait parti avec son corpus de textes
bibliques et son Evangile. II aurait traduit en grec ce dernier et il
l aurait sansdoute en partie refondu. En d autres termes, Evan-
gile selon esHebreux et l Evangile desNazoreensauraient une ori-
gine commune, mais ils auraient diverge des es annees100. I ne
taut donc ni les confondre ni les distinguer absolument. De la
meme fa~on, il ne taut pas identifier les Hebreux d Alexandrie
avec es Nazoreens de Palestine, mais il ne taut pas non plus les
separer adicalement. Is appartiennentprobablement t.une meme
grande mouvance 21.
20. Voir par exemple,S. MIMOUNI, f. cit., Paris, 1998,p. 215-222.Sur es
Nazoreensvus par Epiphane, on se eportera a A. POURKIER, Heresio-
logie chez Epiphane de Salamine,Paris, 1992,p. 415-475.
2L Je remercie D. A. BERTRAND t A. Le BOULLUEC our leur lecture
critique de ce travail. J ai tenu compte de leurs suggestions, race aux-
quelles cet article sera un peu moins imparfait. Mais souventj ai mainte-
nu mes analyses,non sansavoir longuementpese e pour et Ie contre. Ma
seule excuse est que nons sommesdans un domaine oil il est particulie-
rement delicat d atteindre des certitudes.
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DominiqueC6TE
UniversiteLaval, Quebec
UNE CRITIQUE DE LA MYTHOLOGIE
..,
GRECQUE D' APRES L' HOMELIE PSEUDO-
CLEMENTINE IY*
La discussiondans aquelle s'engagentci le grammairien Appion et le
noble Clement, ecemment onverti aux doctrinesde Pierre, nouspropose
une critique remarquablement fficace et originate de la culture grecque,et
plus particulierement de a mythologie. L Homelie IV insere e debat et es
acteursde a controversedans e recit desaventures e Clement,entre dans
l'entouragede Pierre.
Appion, the grammarian, and the noble Clement, ecentlyconverted o
Peter's doctrines,are involved in a discussionwhich proposesa remarka-
bly efficient and original critique ofGreek culture,and especiallyof Greek
mythology. The ourth Homily includes the debateand the actors of the
controversy into the narration of Clement adventures,when he entered
Peter'sclose circle.
Les Homelies V a VI constituentune maniere de hoTS-d'oeuvre.
Bien qu'elles n'apportent rien a l'intrigue principale du roman,
elles presentent neanmoins certains elements parmi les plus inte-
ressantsdes Clementines. La discussiondans aquelle s'engagent
ici Ie grammairienAppion et Ie noble Clement, recemmentconver-
ti aux doctrinesde Pierre, nouspropose en effet une critique remar-
quablementefficace et originale de la culture grecqueet, plus par-
ticulierement, de la mythologie. Comme es thesesdefenduespar
Clement tiennent davantage du judaisme que du judeo-christia-
nisme si caracteristiquedespseudo-clementines, n a souventsup-
pose que cette section provenait d'une source uive du IIe siecle
.La traduction que l'on va lire a ete preparee pour Ie second ome des
Ecrits apocrypheschretiens, ans a collection La Pleiade . Les notes qui
l'accompagnentexcedaient argement es imites imposeespar les normes
de la collection. II a paru utile au Directeur de la revue Apocrypha,
M. Jean-Daniel Dubois, de les publier ici dans leur integralite. Je lui en
suis tIes reconnaissant.
Apocrypha 11, 2000,p. 37 -57
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38
COTE
ou, pour reprendre les termes d'Oscar Cullmann, d'une «apolo-
gie uive »1.Cette apologjie,qu'attesteraient egalement es Recon-
naissances, , 15-31, autait pris la forme d'une discussionentre
trois palens (Appion, Athenodore et Annubion) et un luif, avant
d'etre remaniee par les a~teurspseudo-clementins2. ' Home-lie V
insere Ie debat et les acteurs de la controverse dans Ie fecit des
aventuresde Clement, e,tre dans 'entourage de Pierre; elle com-
porte un premier expose olemique de Clement contre la my ho-
logie grecque et elle amorce a discussionavec Appion.
Homelie V
1,1 En sortant de Cesarde de Straton3, DOUgDOUg endimes, moi
Clement, ainsi que Nice~e et Aquila, a TYr4 en Phenicie. Selon la
recommandation de Piente, qui DOUg vait envoyes, DOUgrouvames
1. O. Cullmann, Le problerne litteraire et historique du roman pseudo-cle-
mentin, Paris, 1930,p. 116-j31.
2. Sur cette question, voir W. Heintze, Der Klemensromanund seinegrie-
chischen Quellen,Leipzig, 11914,. 14-23;42-51 et F. S. Jones,«The Pseu-
do-Clementines A History ,ofResearch.Part I », SecondCentury,2, 1982,
p. 27-29. Sur Ie caractere detachable des Homelies IV-VI, voir M. J.
Edwards, «The Clementina,:A Christian Response o the PaganNovel »,
Classical Quarterly, 42, 199~,p. 461-463; sur Ie niveau plus eleve de Par-
gumentation dans cette section des Homelies,voir B. R. Voss, Der Dia-
log in der fruhchristlichen 4iteratur, Munich, 1970,p. 74.
3. Cesaree e Straton: il s'a~it de la cite maritime, connue sous e nom de
Tour de Straton avant qu'fJerode Ie Grand reconstruise e site a grands
frais et Ie rebaptise cesare~, en l'honneur d' Auguste. La Tour de Straton
tenait son nom d un certain princede Sidon (Ive siecle avant J -C.), appe-
Ie evidemmentStraton. A ce sujet, voir Flavius Josephe,Guerre desJuifs,
1,3,5; 7,7; 20,3; 21,5; Philorl, Legatio ad Caium, 305; M. Hengel, Judaism
and Hellenism, Philadelphif, Vol.1, p.32; Idem, BetweenJesusand Paul,
Philadelphie, 1983,p.113-114;Y. Aharoni, The Land of the Bible, Phila-
delphie, p.416.
4. Sous Pempire, a ville de Tyr jouissait d'un statut particulier, en raison
sansdoute de son passeglorieux. Deja autonome a l'epoque des Seleu-
cides (llesiecle avantJ.-C.), elle portera notamment, sous e principal de
Trajan, Ie titre de «metrop~le de la Phenicie ». Elle finira tout de me-me
par devenir tine colonie romaine (circa 190 apres J.-C.), non sans avoir
exprime son independancel e maniere officielle, en frappant des mon-
naies demunies de toute reference a l'autorite romaine pendant pres de
quatre siecles lIe siecle av~t J -C. -lIe siecle apres J -C.). Voir, a ce pro-
pos,F. Millar, TheRoman Near East,Cambridge (Mass.),1993,p.287 295.
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UNE CRITIQUE DE LA MYTHOLOGIE GRECQUE
D' APRES L'HOMELIE PSEUDO-CLEMENTINE IV
39
l'hospitalite aupres de Berenices, a rille de Justa a Cananeenne6.
2Elle DOUge~ut avec empressementet temoigna a l'envi beau-
coup d'honneur a mOll egard et d'affection enversNicete et Aqui-
la. Dans sajoie7,elle DOUgraitait avecbienveillance, parlant libre-
ment, comme une intime, et DOUg ressait tIes aimablement de
prendre somde notre corps. 3Prenantalors conscience u'elle DOUg
incitait a faire une courte halte, e lui dig : « Tu fais bien de te hater
d'accomplir egdevoirs de l'amourB4mais, l taut preferer a l'amour
la crainte de notre Dieu. En effet, engagesdans a lutte pour de
nombreuses ames, DOUg 'oserions9 preferer notre repos a leur
salut.
2,1 « Car DOllS vonsappris que Simon e magicien, vaincu a Cesa-
fee dans a discussion'opposant a notre seigneurPierre, s'estenfui
aussitot et fait ici beaucoupde mapo.2 En effet, a l'encontre de la
verite, il outrage Pierre aupresde tOlls ceux qu'il rencontre et s'em-
pare des amesde la foule. 3De fait, alors qu'il est ui-meme magi-
cien, il traite Pierre de magicienll; il est ui-meme imposteur et il
Ie proclame imposteur; qui plus est,dans eurs discussions, l a eu
Ie dessousen tout point et prig la tuite, mais il pretend avoir ete
vainqueur et recommande constammentde ne pas ecouter Pier-
re, comme s'il s'inquietait que quelqu'un soit ensorcelepar ce ter-
rible magicien
5. Berenice: BEpvlKll. itteralement, «Bernice ». Le terme «Berenice »,
d'apres Ie latin Berenice,nous semble plus conforme a l'usage fran~ais.
6. Sur Justa,ct. Horn. 1119,1;11173,2;XIII 7 3. Rappelons que les preci-
sionsdonnees ci dans es Pseudo-Clementines ur un personnagebiblique,
la Syro-phenicienne des Evangiles (Mc 7,26), dont on ne sail rien par
ailleurs, s'accordent tout a fait avec a maniere apocryphe de completer
et amplifier les donnees du texte canonique.
7. Dans sa oie: ala xapav, plus litteralement, «a cause de sa joie ».
8. Les devoirsde 'amour: Ta Tf]S'Gya'TTllS'EPTl,itteralement:« les par-
ties de l'amour ». Nous Tendons par «amour» Ie grec Gya'TTll,resque
exclusivementd'usage biblique et chretien. A. Siouville, dans sa traduc-
tion (Les homeliesclementines, aris, 1933),prefere justement ci la notion
specifiquementchretienne de charite.
9. Nous n'oserions: OEOl~EV,itteralement: «nous avons peur ».
10. Simon agit en fait suivant sa destinee syzygique. Comme Pierre l'a
explique precedemmenta Clement (Horn. 1115-19), Ie magicien Simon
forme tine paire, tine syzygie (av(uyla), avec 'apotre Pierre. En vertu de
ce lien, Simon precede Pierre partout, comme l'ignorance, la maladie et
la nuit precedent a connaissance,a guerison et Ie our.
11. La calomnie (olaf30Al'])onstitue tine des actiquesprefereesde Simon
dans sa utte contre Pierre. ct. Horn. III 59,4.
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40
D. COTE
3,1 «Informe de l'affaire, notre seigneur Pierre DOUg envoyes
d'avance faire enquete SJjr eg propos tenus par Simon, afin que,
si ces propos sont tels que rapportes, ill'apprenne lui-meme par
ce que que DOUgui aurons ecrit et vienne convaincre Simonouver-
tement des calomnies qti'illui a lancees12. Donc, puisque notre
souci est Ie danger encouru par de nombreuses ames, peu DOUg
importe, pour cette raisCi>n,e repos de nos corps. Nous voulons
franchement savoir, de tpi qui vis ici, si, par hasard, ce que DOUg
avons entendu est vrai. peux-tu des maintenant DOUg n dire Ie
detail? »
4,1A cette demande, Bdrenice repondit : «La situation est telle
que vans l'avez entendu dire. Ecoutez maintenant les autres faits
qui concement Simon u -meme, ce que vans ignorez peut-etre. 2
C'est qu'il fait apparaitte, en plein jour, au milieu de la place
publique, desspectreset des antomes, frappant de stupeur a ville
entiere et, a sa suite, deSstatues se mettent en mouvement, une
multitude d'ombres e pr6cedent, es amesmemesdesdefunts,pre-
tend-W3.311 e rallia aussi es nombreusesgens qui tentaient de Ie
convaincre de sorcelleriel4.Mais, plus tard, sonspretexte d'offrir
un festin a cesgens, l sa4£ifiaun breuf et les re~ut a sa table pour
les trapper de diversesmaladies et les soumettre a des demonsl5.
En resume,parce qu'il en a malmene beaucoup, l s'est ait passer
12. La strategie de Pierre p()ur neutraliser Simon repose notamment sur
la prevoyance (lTp6vola). L'~potre emploie donc des eclaireurs (lTPOO80l),
tenus de lui faire rapport, et meme des espions, c'est-a-dire des disciples
qui se melent aux disciples ~e Simon pour connaitre a l'avance les inten-
tions de son adversaire. Cf. Horn. II 37,1; III 2,1 ; 58,3; 73,3.
13. Pour une liste des prodiges dont Simon serait capable, voir Horn. II 32,2.
14. Ceux qui tentaient de ie convaincre de sorceiierie : YOTlTaaUTov EAEY-
XElV lTElP<IJI1EVOU5',lus litt~ralement, «ceux qui tentaient de l'accuser
d'etre sorcier ». Le terme Y°tl5', que nous traduisons ici par sorcellerie, est
utilise, au debut de l'ere cijretienne, comme synonyme de l1ayOS',pour
designer un simple magicie*. Plus souvent, toutefois, on emploie Ie mot,
avec une nuance pejorative; pour parler d'un imposteur, d'un charlatan.
D'apres Origene, Ie philosophe Celse, veTS a fin du lIe siecle, qualifiait
Jesus de YOTl5' Contre Celse, VI, 41,16 et 42,15). Voir la-dessus, M. Smith,
Jesus the Magician, San Francisco, 1978, p.69 et J. Annequin, Recherches
sur i'action magique et ses representations, Paris, 1973, p.157.
IS. L'explication de cet episode survenu aux Tyriens se trouve un peu plus
loin dans les Homeiies (VII 3-4) ou Pierre fait comprendre a la popula-
tion qu'elle a participe, a son insu, a un sacrifice offert aux demons. Or,
leur rappelle-t-il, Ie chef d~s demons n'a de pouvoir que sur ceux qui
deviennent ses commensa~. a. la notion de «table des demons » dans
la 1ere pitre de Paul aux Cdrinthiens (10,21).
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UNE CRmQUE DE LA MYTHOLOGIE GRECQUE
D' APRES L'HOMELIE PSEUDO-CLEMENTINE IV
41
pour un dieu. Et il n'estpasseulementedoute, l est aussi ran-
dementhonore16.
5,1 « Voila pourquoi je ne crois pas que quelqu un puisseeteindre
un feu d'une telle ampleur, maintenant qu'il est allume. Car plus
personne ne met en doute leg declarations de Simon, mais, au
contraire, chacun en garantit la verite. 2 Aussi, pour que vous ne
soyez pas en danger, e vous prie de ne rien entreprendre contre
lui avant 'arrivee de Pierre. C'est lui seul qui pourra s'opposer a
un aussigrand pouvoir, parce qu'il est Ie disciple Ie plus eprouve
de notre seigneurJesus-Christ.3 En fait, je crains cet homme au
point que s'il n'avait eu Ie dessous 'autre fois dans a discussion
l'opposant a mon seigneurPierre, je vous aurais conseille de per-
suader Pierre lui-meme de ne pas tenter de s'opposer i Simon ».
6,1Je lui repondis alors : « Si noire seigneurPierre ignorait que lui
seull'emporte sur Ie pouvoir de cet homme, it ne nons aurait pas
ordonne, en nons envoyant a l'avance, de nons informer secrete-
ment de ce qui conceme Simon et de Ie lui ecrire ». Aussi, quand
Ie soir fut venn, nons partage~mes e repas1? t nons all~mesdor-
mir. 2 A l'aube, quelqu'un de l'entourage de Berenice vint nons
apprendre que Simon s'etait embarque pour Sidon et qu'it avail
laisse derriere lui, parmi ses disciples, Appion Ie Plistonice, un
Alexandrin, grammairien de profession, que je reconnus pour un
ami de mon peTe,Annubion Ie Diospolite, astrologue et Atheno-
doTe ' Athenien, tenant de la doctrine d'Epicure18.3 Quant a nollS,
Ie matin meme,nons consignames ar ecrit tout ce que nons avions
16. Sur a reconnaissance opulaire de la divinite de Simon, cf. Ie temoi-
gnage de Justin: «presque tOllS es Samaritains, et un petit nombre
d'hommes dans d'autres provinces, e reconnaissentet l'adorent comme
leur premier dieu» (Apologies, I, 26,3: traduction d'A. Wartelle).
17. Nouspartageamese repas: litteralement, « apres avoir partage e sel».
L'expression«partager e sel» apparm t quelques eprisesdans es Home-
lies (VI, 26,5; XI, 34,1; XIII, 8,4; 11,4; XIV, 8,4-5; XV; 11,2) et semble
signifier, comme ici, Ie simple fait de partager un repas. Cette fa~n de
parler se fonde manifestement sur l'importance du sel dans es cultures
antiquescomme agentd'assaisonnement t de preservation.a., d'ailleurs,
la locution biblique: conclure une « alliance de sel» (2 Ch 13,5 8lQel']KT]
<lAOs-n?o 11'1:;), 'est-a-dire,conclure une alliance perpetuelle.
18. Les compagnonsde Simon, a l'exception d' Athenodore sur Ie compte
duquel DOllS e savonsTieD, nt tousune certaine realite historique. Annu-
bion aurait exerce son art SOUlNeron et, grace a Hephaistion de Thebes,
six distiques de son oeuvre DOllS ont parvenus. A ce sujet, voir W. Adler,
«Apion's Encomium of Adultery : A .JewishSatire of Greek Paideia in
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42
D. COTE
appris au sujet de Simon et, apres l'avoir transmis a Pierre, DOllS
DOllS irigeames veTSa promenade.
7,1 Appion vint alors a ~otre rencontre, entoure non seulement
des deux compagnonsd4ja mentionnes, mais d'environ une tren-
faille d'autres19, Des q$'il me vit, il me salua et m'embrassa en
disant: «Voici Clement, dont je vans ai souvent mentionne la
noblessed'origine, les q~alites d'homme libre, et Ie fait que, tout
en etant descendantde Tibere Cesar20 t pourvu de toute la cul-
ture grecque21,l a ete seduit, par un Barbare denomme Pierre, a
the Pseudo-Clementine Homilies », Hebrew Union College Annuary, 64,
1993, p.28. Apion Ie grammairien nous est mieux connu, si du moins l'on
admet que Ie Pseudo-Clement fait reference au meme personnage contre
lequel Flavius Josephe a reqige son celebre traite, Ie Contre Apion (93-96
apres J.-C.). L' Alexandrin aurait ainsi enseigne a Rome, SOliSTibere et
Claude, et parcouru la Grece, SOliSCaligula. II serait l'auteur d'un dic-
tionnaire et de commentair~s sur les poemes homeriques. Polemiste, sou-
vent vainqueur, comme l'in4lique son sumom de llAELCJTOVLKTlS-,pion se
serait surtout distingue, si 1'<I>nn croit Flavius Josephe, par son hostilite a
l'endroit des Juifs. Dans un4 histoire de l'Egypte en cinq livres, les At YVTT-
TLaKa, Ie grammairien pres~nte contre les Juifs un « requisitoire formel
comme dans un proces» «;ontre Apion , II, 4: traduction de L. Blum).
Selon les Horn Ps-Clement, Apion aurait d'ailleurs ecrit de nombreux livres
(TTOAAa3Lf3Aia) ontre les Juifs et sa presence dans l'entourage du Sama-
ritain ne s'expliquerait qu'em raison de l'hostilite de Simon envers les Juifs
(Horn V; 2,4). Sur la pensee d' Apion, voir E. Schiller, The History of the
Jewish People in the Age of Jesus-Christ, nouv. ed. rev. par G. Vermes, F.
Millar et M. Goodman, Edimbourg, 1986, vol.lII, part.1, p.605-613.
19. Jean Ie Baptiste, dont Simon, Ie « maitre » d' Apion, etait Ie disciple -
selon les Clementines -est lui aussi entoure d'une trentaine de disciples
(Horn. II, 23,2).
20. Sur la confusion dans le$ Pseudo-Clementines entre Clement, troisie-
me eveque de Rome, selon Eusebe de C6saree (Histoire ecclesiastique,
111,15)et Ie consul Flavius Clemens, parent de l'empereur Domitien, exe-
cute pour crime d'atheisme- entendre par la, avoir adopte les coutumes
juives -, suivant Dion Cassius et Suetone, voir B. Pouderon, « Flavius
Clemens et Ie proto-Clem~nt Juif du roman pseudo-clementin », Apo-
crypha, 7,1996, p.63-79.
21. La culture grecque:,., 1ral8ELa EAATjVLKTl.e terme TTal8ELa ignifie
d'abord, bien entendu, l'education que l'on reyoit, mais aussi, dans un
deuxieme temps, Ie resultat de cette education, a savoir ce que nous appe-
Ions la culture. La TTal8ELa, ue Ciceron traduisait d'ailleurs par la notion
d'humanitas, constituait Ie fpndement de la civilisation greco-romaine, Ie
trait d'union entre les di~ers peuples politiquement TeliDis depuis
Alexandre. A elle seule, la irral8ELasuffisait a distinguer Ie Grec du Bar-
bare. Sur l'importance de la: TTal8ELa, oir l'etude classique de Henri-Ire-
nee Marrou, Histoire de I' education dans I' antiquite, 7eed., Paris, 1964, et
surtout Ie chapitre intitule {(La civilisation de la Paideia », p.151-160.
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UNE CRITIQUE Df- LA MYTHOLOGIE GRECQUE
D' APRES L' HOME)LIE PSEUDO-CLEMENTINE IV
43
pratiquer et professer e judalsme22.3 e vous demande donc de
m'aider dans ma lutte pour Ie ramener a l'ordre. Ie l'interrogerai
devantvous. Qu'it me reponde, ui qui estimes'etre ivre a la piete:
ne commet-il pas la plus grande impiete en delaissant eg usages
ancestrauxpour s'abaissera des coutumes barbares23?»
8,1Je repliquai: «J'accepte tes bonnes ntentions a man endroit,
mais e rejette ton ignorance. En effet, tes intentions sont bonnes
parce que tu desiresme voir adherer a ce qui te semblebien. Mais
ta connaissance st ncorrecte,voila pourquoi, sonspretexte d'ami-
tie, elle s'acharnea tendre despieges.2 -C'est faire preuve d'igno-
rance, selon toi, retorqua Appion, que d'observer les coutumes
ancestraleset de penser en Grec? 3 Je repondis : Celui qui choisit
de pratiquer la piete ne doit pas observer es usagesancestraux
dans tons les cas, mais les observer s'ils sont pieux et les rejeter
s'ils sont mpies. Ainsi, il est possible qu'un homme, dont Ie pere
22. II taut rappeler avec Marcel Simon que la sociologie mplicite de l'E-
tat romain «concevait l'humanite comme la juxtaposition officielle de
deuxgroupes» : les Grecs et es Barbares (Verus Israel,Paris, 1948, .137).
Parmi les Barbares, es Juifs representaient un cas puisqu'ils etaient les
seuls a ne pas reconnaitre la verite des autres dieux. Le caractere exclu-
sit du judalsme, el qu'il seman.ifeste ans e monotheisme strict et es exi-
gencesde purete prescrites par la loi mosalque,a souventexpose es Juifs
a des accusationsd'impiete. Ct. a ce propos,M. Hengel, Judaism and Hel-
lenism,Vol. 1, p.304. Notons bien ici que Pierre Ie Barbare pratique et
professe e udalsme : un indice supplementaire, selon certains,que cette
section des Horn provient d'une apologie du judalsme (cf. W. Adler,
«Apion's Encomium of Adultery : A JewishSatire of Greek Paideia in
the Pseudo-ClementineHomilies », p.29).
23. Pour Ie grammairien Apion, representant ci Ie point de vue de l'elite
cultivee du 1 er iecle de notre ere, la piete (EuaEf3Ela)onsisteprincipale-
ment a observer es usagesancestraux,T<l 1T<lTpla.es 1T<lTplaompren-
nent evidemment l'honneur dfi aux dieux de la Cite (la participation aux
sacrifices et aux ceremonies officielles) et Ie respectconfere aux parents.
La-dessus, oir l'ouvrage toujours eclairant d'A. J. Festugiere,L'ideal reli-
gieux des Grecset ' Evangile,2eed., Paris, 1981,p.21-27.De maniere plus
generale, es 1T<lTplaesignent aussi un ensemble de notions religieuses
et de preceptes moraux transmis notamment par les mythes. Sous 'in-
fluence de la philosophie, les intellectuels d'epoque romaine prenaient
souvent leurs distancesa l'egard des mythes, mais n'en concevaientpas
mains un certain respect pour ces recits traditionnels, dans a mesure oil
its appartenaient out de meme a la 1TalOEla.ur cette question,cf.le com-
mentaire de W. Jaeger, Early Christianity and Greek Paideia,Cambridge
(MA), 1961,p.42-43 et 71, qui cite les cas de Ciceron et Varron. Ct. ega-
lement M. Simon, « Christianisme antique et penseepalenne : rencontres
et conflits », Bulletin de a FacultedesLettresde Strasbourg, 8,1960,p.313.
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D.core
est impie, ne consente, dans sa volonte de pratiquer la piete, a
suivre es voies de sonpere24. Comment reprit Appion, tu viens
de dire que ton peTea mene une mauvaisevie? -Non, savie n'etait
pas mauvaise, dis-je, m~s ses opinions25 'etaient. 5 -Et quelles
etaient ses aussesopinipns26,'aimerais bien Ie savoir, dit-il. Je
repondis : II croyait aux mythes mensongerset mauvaisdes Grecs.
6 -Quels sont-ils, poursuivit Appion, ces mythes mensongerset
mauvaisdes Grecs? -II siagit, dis-je, de leur opinion incorrecte sur
les dieux et, si tu prend$ patience, tu l'entendras avec ceux qui
aiment s'instruire.
9,1 «Mais avant d'en pa~ler, retirons-nous a l'instant en quelque
lieu plus tranquille et je JIl'y entretiendrai avec vous. Si je desire
avoir une conversation a l'ecart c'est que ni la route ni meme l'en-
semble des philosophes ne s'occupent sincerement de discerner
les realites27. 2Nous en cannaissons beaucoup, en effet, parmi ceux
24. L'idee d'une piete qui s1autorise a trier, parmi les usages ancestraux,
Ie vrai du faux, Ie pieux de l'impie, se retrouve chez certains apologistes
du lie siecle, comme Justin:« A ceux qui soot pieux et amis de la sagesse
selon la verite, la raison or<llonne de n'estimer et de n'aimer que Ie seul
vrai en refusant d'adopter ~esopinions des Anciens, si elles soot mau-
vaises» (Apologies, 1,21, trlid. d' A. Wartelle) et Clement d' Alexandrie :
«Ne pourrons-nous pas ...~pres avoir abandonne une habitude mauvai-
se, malsaine et impie, mem~ si nos peres s'en indignent, detoumer notre
route du cOte de la verite ...Ainsi, nous aurons simplement rejete, comme
un poison pemicieux, la coutume etablie» (Protreptique, X, 89,2, trad. de
C. Mondesert). La questioQ du rapport entre verite et coutume et celIe
de l'obeissance aux parentsirepresentent par ailleurs Ie genre de themes
frequemment etudies dansiles ecoles de rhetorique de l'empire (cf. W.
Adler, «Apion's "Encomi$ of Adultery" », p.32).
25. Opinions: U1TOA1']$EWS',lus litteralement : suppositions.
26. Opinions: u1T6vola, lus llitteralement : supputations.
27. La necessite de tenir uni dialogue philosophique a l'ecart de la foule
ou des faux philosophes renvoie aux nombreux cercles philosophiques ou
religieux de l'antiquite qui s1employaient a garder leurs doctrines secretes
(voir sur ce point G. Fowd~n, «The Pagan Holy Man in Late Antique
Society», Journal of Hellenfc Studies, 102, 1982, p.56). G. Stroumsa rap-
pelle que la transmission dli savoir ou de la verite s'entourait dans l' An-
tiquite de nombreuses precautions: «la verite appartient a une elite; sa
revelation imprudente peut ;ivoir des consequences facheuses pour tous ».
n ajoute que «ces idees sont a la base de tout esoterisme, en particulier
de celui qui rut pratique dan~ Ie monde antique » ( « Traditions esoteriques
dans Ie christianisme des P
r emiers siecles », Apocrypha, 2, 1991, p.133-
134). Dans les Horn, Pierre ui-meme reserve a ses disciples un enseigne-
ment plus complet que celui prodigue aux routes (d. Horn. X, 26,2-3; XIX,
25,3)
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UNE CRmQUE DE LA MYTHOLOGIE GRECQUE
D' APRES L' HOMELIE PSEUDO-CLEMENTINE IV
45
qui s'enorgueillissentde leur philosophie, qui s'eprennentde vaine
gloire ou revetent Ie manteau28,motives par Ie gain et non par la
vertu seule, et qui, s'ils n'obtiennent pas ce pourquoi ils philoso-
phent, se transforment en railleurs. Par consequent, a cause de
pareillesgens,choisissons n endroit approprie pour etre a I'ecart ».
10,1 Or, l'un des compagnons d' Appion etait un homme fiche et
possedait line propriete pourvue d'une elegante vegetation.
«Puisque la chaleur frappe durement, dit-il, retirons-nous dans
roes jardins, tout pres de la ville ». 2 On se rendit donc s'y asseoir.
li y avait la de limpides ruisseaux coulant d'une source fraiche et
des arbres varies qui formaient un abri verdoyanf9. 3Je m'assis la
avec joie et leg autres firent de meme autour de moi. lis restaient
silencieux. Au lieu d'user de la voix pour m'interroger, its tenaient
leurs regards fixes sur moi. De toute evidence, its reclamaient ainsi
la realisation de ma promesse. Je commen~ai donc mOll discours
en ces termes.
28. Sous 'empire, Ie terme «philosophe» designe«beaucoupde monde »,
comme Ie note L. Jerphagnon (Vivre etphilosopher sous es Cesars,Paris,
1980,p.234).Quant au manteau, e TpL~WVpalladium, en latin), bien qu'il
appartienne, au depart, a l'accoutrement caracteristique du philosophe
cynique (voir M.O. Goulet-Caze, «Le cynisme a l'epoque imperiale »,
dans Aufstieg und Niedergang der romischen Welt, 2, 36,4, Berlin -New
York, 1990,p.2739), l finit cependant,a l'epoque imperiale, par devenir
un attribut du philosophe en general. Cf., la-dessus, e reproche d' Apu-
lee (auteur de la deuxieme moitie du IIesiecle apres J.-C.), dans sesFlo-
rida, a ceux qui ne sont philosophes que par Ie manteau (VII, 10-13) et
l'article de P. Courcelle, «La figure du philosophe d'apres leg ecrivains
latins de l'antiquite »,Journal des Savants,1980,p.85-101.
29. La recherche d'un endroit, non seulement sole, mais aussi agreable,
pour y tenir tine discussion,est l'un des themes propres a la forme litte-
raire du dialogue philosophique. Chez Platon, comme chez Ciceron plus
tard, Ie dialogue en tant que t~l se voit souvent precede d'une mise en
sceneplus ou mains 6laboree. Ace sujet, d. B. R. Voss,Der Dialog in der
frilhchristlichen Literatur, Munich, 1970, .74-75, qui fait remarquer qu'ici,
ala maniere de Platon, l'echange commencedans a rue et se developpe
en dialogue, et que, comme chez Ciceron, on prefere a l'agitation de la
place publique la tranquilite d'un ardin. Concernant a tradition du locus
amoenus comme cadre d'un dialogue philosophique, qui prendrait son
origine dans e Phedrede Platon, voir, entre autres,M. J. Edwards, «The
Clementina: A Christian Response to the Pagan Novel », p.472 et B.
Rehm, « Clemens Romanus II », dans Reallexikon ur Antike und Chris-
tentum,1957,vol, 3, col. 204.W. Adler, « Apion's Encomium of Adulte-
ry »,p.32 et W. Heintze, Der Klemensromanund seinegriechischenQuel-
len,p.43 etablissent un rapport avec e jardin d'Epicure.
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COTE
11,1« 6 Grecs, il y a, pour ainsi dire, une grande difference entre
la vente et l'habitude. Car c'est apres 'avoir cherche sincerement
que l'on decouvre a verite, tandis que l'usage dont on aura hen-
te, qu'il soil vrai ou faux, ne tire sa force que de lui-meme, sans
faire appel au discemement, et celli qui l'a re~u ne se rejouit pas
plus de sa vente qu'il ne s'irrite de sa faussete3O.Ce n'est donc
pas par discemementm~is par prejuge qu'un tel individu a acquis
sescroyances:a l'opinioIi de sesdevancierset au hasard, l a confie
sapropre esperance.Or, Un' estpas acile de se depouiller du vete-
ment ancestral, meme $'il s'averait tout a fait sot et ridicule.
12,1 « Oui, je dig, moi, qu~ toute la culture grecque est line propo-
sition tres facheuse d'un mauvais demon31. 2 Certains Grecs ont
en effet introduit des die$X nombreux et enseigne qu'ils sont mau-
vais et soumis a toutes le,spassions. De la sorte, celui qui vent se
livrer a des pratiques semblables n'eprouve aucune honte -ce qui
pourtant est Ie propre dt l'homme -puisqu'il a pour modele leg
vies mauvaises et ignobles des dieux de la mythologie32. 3 Or, l'ab-
30. Si l'equation tradition =rverite, que Clement combat dans celie dis-
cussion,ne s'impose pas d'ePtblee a nos esprits modemes, l en allait tout
autrement pour les Ancien$. On estime que, malgre ~a et la des reserves
et des critiques a son endroit, la notion de tradition constitue dans a pen-
seeantique tine «pierre de tpuche de a morale et de a verite » (M. Simon,
«Christianisme antique et penseepa"ienne ,p.312).Cette tendancea faire
de la tradition un « critere d~ a verite morale et ntellectuelle » etait meme
« largement diffuse a l'epQque parmi les intellectuels» (Ibid., p.311).
31. Une proposition tres aqheused'un mauvais demon: Le sens du mot
inr66EULS',ue nous traduisQnspar « proposition », n'est pas evident dans
ce passage.A. Siouville (~es homelies clementines,p.166), propose de
rendre inr66EULS'ar « sugg~stion» et Thomas Smith «( The Clementine
Homilies », dans TheAnte-f(.[icene athers,Edimbourg -Grand Rapids,
1989,vol.8, p.253), par « falilrication ». D'autre part, en assimilant a cul-
ture a l'action d'un demon, on ne saurait exprimer plus categoriquement
Ie refus de celie culture D.ns leur critique du polytheisme et de l'idola-
trie, les apologistes du lIesiecle, comme Justin (Apologies, , 5,2) et Cle-
ment d' Alexandrie (Protreptique, II, 40,1), n'hesitent pas a qualifier les
dieux grecsde demonsmalf&igants.Surcetle premisse mportante de 'apo-
logetique chretienne,voir P. F.Beatrice, «Hellenisme et christianisme aux
premiers siecles de noire ere. Pa cours methodologiques et bibliogra-
phiques », Kernos, 10,1997 jp.41.A la difference des apologistes, e Pseu-
do-Clement, dans ce passa~e, emble plutot se limiter a l'idee d'une pro-
position demoniaque comnie point de depart de la TTal&La.
32. La critique de la mytholqgie grecque,a laquelle se ivre Clement,passe
outre la multiplicite des didux: elle s'interesse avant tout a l'immoralite
de ces etres supposessupeqeurs et au facheux exemple qu'ils proposent
a ceux qui les contemplent.En fait, on retrouve ce theme de l'immorali-
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D' APRES L'HOMELIE PSEUpO-CLEMENTINE IV
47
sence de honte chez un tel homme n'annonce aucun espoir de
repentance. D'autres ont introduit Ie destin, ce qu'on appelle la
naissance, l'encontre duquel nul ne peut agir ou patir33, En fait,
cetle idee est semblable,voire identique a la premiere. Effective-
ment, celui qui admet que nul ne patit ou n'agit a l'encontre de sa
naissance, e dirige aisementvers Ie peche et, Ie peche commis, ne
regrette nullement son mpiete: il donne l'excuse que sa naissan-
ce l'a contraint d'agir ainsi et, comme il ne peut corriger sa nais-
sance, l ne peut avoir honte de sespeches.
13,1 « D'autres enseignent 'existence d'un mouvement mprovi-
se34,omme si 'univers etait emporte par sapropre impulsion, sans
te des dieux aussi bien dans l'apologetique juive, chez Flavius Josephe,
par exemple, qui reproche aUK Grecs d'avoir laisse leg poetes presenter
leg dieux « soumis a toutes leg passions » (Contre Apion, II, 251), que dans
l'apologetique chretienne, comme l'exprime Justin qui s'interroge sur Ie
bon gens d'une conception de la divinite qui presente «Ie maitre lui-meme
et createur de l'univers, Zeus, camille parricide et fils de parricide, sou-
mis aux desirs amoureux» (Apologies, I, 21,5). Cf. egalement, chez leg
apologistes chretiens, Tatien, Oratio, 8,1; Athenagoras, Legatio, 10,2; 21,4;
Theophile d' Antioche, Ad Autolycum, III, 3 et Clement d' Alexandrie,
Protreptique, II, 32,1; 35,1.
33. Le destin: Ie mot «destin» rend ici une notion philosophique assez
courante dans Ie monde greco-romain, l'El~ap~E\IIl, c'est-a-dire, comme
l'a definie Ie PeTe Festugiere (L'ideal religieux des Grecs et l'Evangile,
p.104, n.1),« la part fatale devalue a chacun ». L'ordre,« la dure realite des
lois universelles» (Ibid., p.105), s'exprime a merveille dans Ie COUTSegu-
lief des astres. Ce sont eux, leg astres, qui, par leur position au moment
de la naissance (rEvEalS ), determinent Ie sort de chaque individu. Peut-
etre devrions-nous traduire Ie mot rEVEalS par «horoscope », a la suite
d' A. Siouville, puisque Ie terme a dans ce passage Ie gens technique de la
«naissance marquee et fixee par leg astres» (Ibid., p.1ll, n.7). Dans un
contexte astrologique, leg termes rEVEalS t El~ap~E\IIl semblent d'ailleurs
jouir d'une relative equivalence. Cf., par exemple, Ie lexique de Suidas
(xe siecle apres J. -C.) qui donne cette precision au sujet de rEVEalS : AE-
rETal Kat 1'1El~ap~E\IIl. Quant a l'importance de l'astrologie dans toutes
leg couches de la population d'epoque imperiale, voir notamment G. Luck,
Arcana Mundi, Baltimore, 1985, p.309-321 et R. Turcan, «Litterature
astrologique et astrologie litteraire dans I' Antiquite classique », Latomus,
27, 1968, p.392-405, qui mentionne d'ailleurs l'existence de traites astro-
logiques attribues a des personnages hebraiques comme Abraham, David,
Salomon, Daniel et Esdras (p.397). Sur l'influence de l'astrologie sur des
milieux juifs Russi marginaux que leg communautes esseniennes, voir M.
Hengel, Judaism and Hellenism, vol. I, p.236-241.
34. Un mouvement improvise <1TTpov61lTOVj>opav. ' est vraisemblablement
l'epicurisme qui est vise par cette notion de «mouvement improvise ».
Notons d'abord que la <j>6pa esigne, chez Platon, Ie COUTs es astres, Ie
mouvement de l'univers et que l'adjectif <1TTpov61lTOSignifie litteralement
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D.COTE
qu'aucun maitre n'y verne. Pensercomme noDsvenons de Ie dire
represente la plus fiichtuse de toutes leg opinions. 2 En effet,
comme s'il n'y avait personned'etabli pour prevoir et rendre a cha-
CUllselon sonmerite, cesgens-la ont paisiblement tout ce qui leur
estpossiblede faire, par<)e u'ils ne craignent rien. C'est pourquoi
ceux qui ont de telles pelIseesne parviennent pas facilement -ou
peut-etre pas du tout -ala chastete,car ls ne voient pas a l'avan-
ce Ie danger qui pourrair leg convertir. 3 Quant a la doctrine des
luifs, de cesBarbares co~me vous dites, elle est a plus pieuse des
doctrines: elle enseigne ju'il y a un seulpeTeet createur de l'uni-
veTS, on et juste par na~ure, I est bon en ce qu'il pardonne leurs
pechesa ceux qui se rep~ntent et il est uste en ce qu'il sevit contre
ceux qui ne se repentent pas, selonce que meritent leurs actions35,
14,1 « Celie doctrine, m~me si elle tenait peut-etre du mythe, ne
serait pas nutile a l'exist~nce,puisqu'elle estpieuse.De fait, dans
l'attente d'etre juge par Ie Dieu qui voit tout, chacun est poussea
ce qui est depourvu de iTpOVOla,'est-a-dire de prevoyance. Or, Ie fetus
de a prevoyance,au, si l' ani prefere, de providence,caracteriseassez ien
1'epicurisme.Sur Ie fetus epicurien de la providence et la notion de mou-
vement spontane, t. P.Hadrt, Qu'est-ce ue a philosophie antique?,Paris,
1995, .186-189.Ce te nega~ion e la« plupart descroyancespopulaires »,
comme e rappelle E. Brehi~r ( Histoire de la philosophie,4" edition, Paris,
1987,vol. I, p.303), que les IStoiciens entaient au contraire de justifier, a
fait en sorte que, partout, fus croyants Guifs, chretiens, paiens) conside-
raient la doctrine epicurienrleblasphematoire.a., a ce propos,F. Cumont,
Lux perpetua, Paris, 1949,p.124 et D. Rokeah, Jews,Pagansand Chris-
tians n conflict,Jerusalem leiden, 1982, .18-19;34 et 213.Pour un expo-
segeneral sur 1'epicurisme,: oir C. Levy, Les philosophies hellenistiques,
Paris, 1997, }.25-99et J. Brunschwig, «La philosophie a l'epoque helle-
nistique. 2. Epicure », dans M. Canto-Sperber (direction), Philosophie
grecque,Paris, 1997,p.475-510.
35. Bien entendu, la« doct~e des JUllS»ne se imite pas a ces quelques
elements. Pour les besoins~e a discussion,Clement s'en tient a ce qui lui
sera utile. A l'impiete des raTpla grecques, l oppose a doctrine pieuse
des Juifs; a la multiplicite des dieux, 'unite du PeTeet createur. II insiste
sur es qualites morales du Oieu uif. II est bon et juste, alors que les dieux
de la mythologie sont mautais et soumis a toutes les passions.Les quali-
tes morales de son Dieu in~irent d'ailleurs aux adeptes du udaisme tine
crainte du peche, andis que 'immoralite desdieux grecs ncite au contrai-
re a pecher sans etenue. qn aura note, au passage, ue les trois aspects
de la iTal8Elaabordes par Clement dans cette discussion, es mythes, e
destin et 1'absence e provtdence, ant ete uges selon ce critere : la capa-
cite d'inspirer tine vie morlilement irreprochable. Ajoutons que Clement
ne defend pas ci Ie christialtisme ou a doctrine udeo-chretienne du Verus
propheta, qui domine Ie r~ste des Horn, mills tine version simplifiee du
judaisme.
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UNE CRITIQUE Dij LA MYTHOLOGIE GRECQUE
D' APRES L' HOMEtlE PSEUDO-CLEMENTINE IV
49
vivre plus chastement36. lEt si, au contraire, cette doctrine etait
vraie, elle aura libere du ch§,timenteternel celui qui a vecu chas-
tement; elle l'aura fait beneficier, en plus, des biens eternels et
ineffables venus de Dieu.
15,1« Je reviens cependant a la principale croyance des Grecs, celIe
qui propose, dans la mythdlogie, que leg dieux sont nombreux et
soumis a toutes leg passions37.2 J'eviterai de perdre trop de temps
avec leg evidences, en expliquant leg actes impies de chacun des
pretendus dieux. Je ne saurais d'ailleurs en raconter tous leg
amours, ceux de Zeus, de PoseIdon, de Pluton, d' ApolIon, de Dio-
nysos, d'Heracles et des autres, prig un a un38.Vous-memes, issus
de la culture grecque, vous b'ignorez pas leurs vies dans lesquelles
vous avez ete instruits afin C lu'en elateurs des dieux vous agissiez
semblablement.
16,1 «Je commencerai par le tres royal Zeus lui-meme. D'abord,
son peTe,Cronos, apres avoir avale sespropres enfants, comme
vous Ie dites, et coupe les parties genitales de son peTeOuranos,
a l'aide d'une faux en acier, a propose aux zelateurs des mysteres
divins un modele de pietea l'endroit des parents et d'amour a
l'egard des enfants. 2 Ensuite, Zeus lui-meme a enchaine son
~ropre peTe,'a enferme da~s e Tartare et reprime les autresdieux.
A l'intention de ceux qui veulent commettre des chases nnom-
mables, l a avale Metis, apr~s 'avoir engendree39Metis etait one
36. Le simple fait de croire a l~existenced'un Dieu qui voit tout, comme
l'enseigne Ie judaisme, oblige le croyant a mener une vie exemplaire. Ct.
Flavius Josephe, Contre Api(Jn, II, 160 et Justin, Apologies, I, 12, 3.
37. Des trois sujets enonces plus haut par Clement, seule a mythologie
sera abordee dans a discussiopqui l'oppose a Apion.
38. La liste des amours divins seradonnee de maniere plus complete dans
l' Homelie suivante (\1; 12,4 15,3). Sur Ie caractere vraisemblablement
scolaire de cette liste, voir M. R. James,«A Manual of Mythology in the
Clementines », Journal of Theological Studies, 33, 1932, p.262-265.
39.A. Le Boulluec me fait renjarquer que Ie verbe ciPPllTouPYElv,omme
Ie nom ciPPllTOupytQn Hom .VI, 18, 1, a ici un sensfortement pejoratif,
pour evoquer des actes nfame~ (commettredeschoses nnommables, lu-
tot que indicibles; son emploi,a une intention polemique, par allusion a
la celebration de rites secrets,propres aux cultes a mysteres,et pretant
aux soup~ons voir W. Burkert, Les cultes i mysteresdans ' Antiquite, tra-
duction fran~aise,Paris 1992,p. 68 et n. 44). Or Metis joue un role dans
les theogonies orphiques (voir M. Detienne, "La Metis orphique et la
seiche de Thetis", dans M. Detienne, J.-P.Vernant, Les rusesde l'intelli-
gence.La Metis des Grecs,Paris 1978,p.129-166, urtoutp.129-136). L'en-
gendrementde Metis par Zeu$,mentionne ici, et en Hom. VI, 2, 7 (cf. \1;
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D.c6TE
semencepuisqu'il est mpossible d'avaler un nourrisson. 3 Pour la
defense des pederastes, l ravit Ganymede40.Pour venir en aide
aux adulteres et en faveur de leur crime, il s'est ui-meme trouve
coupabled'adultere a plusieurs eprises.11ncite egalementa sedui-
re sessreurspar leg relations qu'il a entretenues avec eg siennes:
Hera, Demeter et l' Aphrodite celeste, que certains appellent
Dodone41.4 Et a ceux qui veulent s'unir avec eurs filles, il donne
dans leg mythes Ie mauvais exemple de ses rapports avec Perse-
phone. 11a commis bien d'autres impietes de sorte que, par son
extraordinaire intemperance, eg rreligieux ont cru a la divinite de
cet etre mythique42.
17,1 «On pourrait trouver raisonnable que des ignorants s'indi-
gnent assezpeu de telles opinions, mais que dire des gens culti-
ves? Certains parmi eux s'estiment grammairiens et sophistes. is
affirment que de pareilles actions sont dignes des dieux. 2 C'est
qu'eux-memes,dans eur intemperance,saisissente pretexte four-
ni par leg mythes et s'affichent alors comme imitateurs des etres
superieurs43 n commettant des actes degradants44.
12,4), est inconnu des autres versions du mythe. Ce1rait singulier est peut-
etre eclaire par la remarque presente sur la semence : d'apres une scholie
ala Theogonie d'Hesiode, v. 886, Zeus aurait persuade Metis de se trans-
former en quelques gouttes d'un liquide pour pouvoir I'absorber (voir J.-
P. VerDant, o. c., p. 107, n. 7); cette tradition a pu inspirer une interpreta-
tion maiveillante, presentant Zeus comme avalant sa propre semence. Que
tel soit Ie sens du passage, la paraphrase qu'en donne Epiphane en Pana-
rion XXVI, 16 (PG 41, col. 357 D), Ie confirme.
40. C'est a cause de sa grande beaute que Ganymede rut enleve par Zeus,
aupres duquel, sur l'Olympe, l'office d'echanson lui rut confie. Voir Ilia-
de, V, 265. Sur les representations de Ganymede, considere comme un
canon de la beaute masculine chez les Grecs, voir K. Dover, Greek H omo-
sexuality, Cambridge (MA), 1978, p.6.41.
Que certains appellent Dodone: l'assimilation d' Aphrodite a Dodone
n'a rien d'orthodoxe. C'est pourquoi il a ete propose de lire «Dione » a
la place de Dodone. La confusion Dione / Dodone semble en effet pos-
sible, puisque la deesse Dione, a l'epoque archaique, etait honoree a Dodo-
ne comme la compagne de Zeus. Plus tard, a l'epoque romaine, Dione
aurait ete assimilee a la deesse Aphrodite. Par ailleurs, Aphrodite passe
plus regulierement pour etre la fille de Dione. Voir, la-dessus, E. Simon,
« Dione », dans Lexicon Iconographicum Mythologiae Classicae, Zurich
-Munich, 1986, vol.III,I, p.41l.42.
Cet etre mythique: b l1ueLKOs,l s'agit d'une suggestion de F. Wieseler,
Exercitationum criticarum in Clementis Romani quae feruntur Homilias
P. I, Gottingen, 1857: Ie texte porte un b I1v80 , difficile a traduire.43.
Des etres superieurs : TWV KPEL TOVWV,ous pourrions aussi traduire,
comme A. Siouville (Les homilies clementines) par« des dieux ».
44. Cf., supra, note 31. Comme l'observe Justin,« tout Ie monde est d'avis
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UNE CRllIQUE DE LA MYI1IOLOGIE GRECQUE
D' APRES L' HOMELIE PSEUDO-CLEMENTINE IV
51
18,1 « Cela explique pourqlJoi les gens qui vivent a la campagne
pechent beaucoupmoins q'Je es gens cultives45: ts n'ont pas ete
inities au mal qui a mene ces demiers, parce qu'ils avaient appris
d'une culture malsaine la pratique de l'impiete, a commettre de
telles audaces.2 Car ceux qpi, des 'enfance, apprennent a lire au
moyende mythessemblablesassimilentdans eur esprit, aloTS u'ils
ont encore l'ame tendre, leg actes mpies des pretendus dieux46.3
En grandissant, ts portent Ie fruit des mauvaisessemencesetees
dans leur ame. Le plus facheux de tout c'est qu'il n'est pas facile
d'extraire les impietes qui se sont enracinees lorsque, devenu
homme, on leg considere camme pemicieuses.4 En effet, chacun
prend plaisir a conserver es habitudes acquisesdes 'enfance. Et
comme 'habitude n'est guere moins puissanteque la nature47, es
gens-la deviennent difficiles a orienter veTSe bien qui n'a pas ete
semedans leur §.medepuis Ie commencement.
qu'il est beau d'imiter les diem» (Apologies, , 21,4). Seulement,comp-
te tenDde l'immoralite notoire des Olympiens, 'imitation des diem appa-
rail moins louable, am yem deschretiens en tout cas. Voir Aristide, Apo-
logie,VIII et Clement d' Alexa$drie, qui reproche a sescontemporainsde
croire am idoles parce qu'ils elilvient eur incontinence (Protreptique, V;
61,4).
45. Selon 'auteur de ce passage~es gensqui vivent a la campagnepechent
beaucoup moins, a causede leur inculture, mais il faudrait ajouter que,
pour les memes raisons, ls re$istentdavantage a la christianisation Le
christianisme,phenomene urbain a ses debuts,mettra en eifel un certain
temps a convertir, tant bien que mal, es populations rurales de l'Empire.
A ce sujet, voir P. Brown, L' es.fordu christianisme occidental, raduit de
l'anglais par P.Chemla, Paris,1~97, .122 et P. Chuvin, Chronique desder-
niers pai"ens,Paris, 1991, .132.,133.
46. Pillion d'Alexandrie utilise les memes mots, «ame tendre », (UTfQAl')
/Juxl'j),pour parler de l'influen(1enefastedesmythes sur es eunes eleves.
II rappelle que MoYse ropose de «repousser a fiction des mythes que
des leur premier age, dans leurs ames encore tendres, ont graves eurs
parents, eurs nourrices, eurs precepteurs,provoquant ainsi une errance
sans in dans ce qui touche a l~ connaissancedu bien supreme» (De vir-
tutibus, 178, rad. de R. Arnaldez). Cf. Idem, De posteritate,165; Platon,
La Republique, 377a-c. Pour ~'educationdans l'antiquite classique, on
consultera avec profit l'ouvra~, deja cite a la note 16, de H. I. Marrou,
Histoire de l'education dans l'antiquite. L'expression« des l'enfance» (EK
TfQtO6s)orrespond sans doutt1a ce que nODS ppelons 'ecole primaire.
A ce stade, l'enfant pouvait d~ja apprendre a lire dans une anthologie
poetique allant d'Homere a Euripide, s'il faut en croire H. I. Marrou, op.
cit, p.233.
47. La question du rapport entre l'habitude et la nature etait devenue un
veritable TOTfOS'ans a philosQphie hellenistique depuis Aristote et son
Ethique a Nicomaque. Voir W. Adler, «Apion's "Encomium of Adulte-
ry" », p. 32-33.
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52
D. COTE
19,1«Pour cette raison, ~ ne taut pas que leg eunes s exercentaux
savoirs qui corrompent /8. I taut aussi eviter soigneusementque
leg hommes dans a forc~ de l age pretent l oreille ala mythologie
des Grecs. 2 Les savoirsiqui ont COuTShezeux sont en effet bien
pires que l ignorance: ~us avons deja montre que leg gensde la
campagnepechentmoiJisparce qu ils n ont pas re~u a culture des
Grecs49. En fait, il taut fuir leurs mythes, eurs theatres, leur lit-
terature, et si cela etait possible, eurs cites5°.C est que, remplis de
leurs savoirsmauvais, ls communiquent a leurs compagnons,par
leurhaleine, comme la, rage51,eg maux dont ils souffrent eux-
memes. 4 Et voila ce quill y a de plus facheux plus on a ete edu-
que par ces gens, plus o~ se detourne d une penseeconforme ala
nature.
20,1 «Mais, certains d eptre eux, qui s estiment des philosophes,
qualifient d indifferents~2de leis pecheset traitent d insenses eux
48. On comparera ette recommandationadicalea celles,plus accueillantes,
de Basile Ie Grand, dans son raite Ad adolescentes. yant rec;uune edu-
cation classique res pousseeet malgre une conversion au christianisme
marqueepar Ie choix d line vie de renoncement, e PeTedu IY siecle n he-
site pas a recommander a lecture des poetes (Homere et Hesiode, par
exemple) et des philosophes (surtout Platon). Cf., concernantcette ques-
tion, W. Jaeger,Early Christianity and Greek Paideia,p.75-77 et P.F. Bea-
trice, «Hellenisme et christianismeaux premierssiecles e notre ere »,p.50-
51, sur Ie bon usagede la civilisation antique par les chretiens.
49. Au-dela de cette arg~entation contre la culture et la mythologie,
caracteristiquede apolog6tique du udaisme et du christianismed epoque
imperiale, il faut voir que ~ public non instruit etait plutot enclin a croi-
re aux mythes, alors que I~s «doctes », comme les designe Paul Yeyne,
n etaient pas « disposesa s pn aisserconter» (Les Grecsont-ils cru a leurs
mythes ?, Paris, 1983,p.59-60). En realite, suivant Ie meme auteur, la
mythologie, chez es gensc~tives, loin d engager a foi, constitue unsavoir
de reference (Idem, L e1t?gieerotique romaine, Paris, 1983, p.138).
50. Le rejet de la rraiOELai etait pas I apanagedes Juifs et des chretiens.
Les epicuriens, dans une <1ertainemesure, et les cyniques, assurement,
affichaient une attitude a4ant de la critique severe au refus Ie plus net.
Sur e cynisme,plus precis~ment,voir l etude de M. O. Goulet-Caze,« Le
cynisme a l epoque mperi~le », cite supra,note 27.
5L Comme a rage: I imagf: de la rage apparait a quelques reprises dans
les Homelies pour decrire tantot Ie desir (Hom.lI, 2, 3), tantot I adulte-
re (Hom. 111,68,2; V, 21,4).
52. Indifferents: a8La</>opa.Fait-on eference a l indifference de Pyrrhon,
seIGnqui notre incapacite ~ savoir si es chasessont bonnes ou mauvaises
nous oblige a les declarer Itoutes indifferentes, ou bien a celle des stOl-
ciens, pour qui tout ce quilne depend pas de nous doit etre juge indiffe-
rent, ne laissantqu une seule chose qui ne soil pas ndifferente : l inten-
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UNE CRITIQUE DE LA MYTHOLOGIE GRECQUE
D' APRES L'HOMEUE PSEUDO-CLEMENTINE IV
53
qui s'irritent de pareilles actions. 2 En effet, disent-ils, tout ce qu'ont
interdit par des lois leg sages des premiers temps n'est pas peche
selon la nature53. On savait roOfSque leg hommes, avec leur humeur
emportee, s'irritent grandetnent de leis actes et se font mutuelle-
ment la guerre. C'est pourquoi leg sages ont etabli des lois qui inter-
disent res agissements comme des peches. Qu'il est ridicule de pen-
seTainsi 3 Car comment leg causes de tumultes, de meurtres et de
tout desordre ne seraient pas des peches? Et leg vies interrom-
pues, leg familIes ruinees, l~ magie, leg ruses, l'indigence et bien
d'autres maux encore, ne viennent-ils pas de l'adultere54?
lion morale, Ie desir de faire Ie bien? Ou bien faut-il penser a l'opposi-
lion etablie par les cyniques entre la nature et les conventions (V6[10l)?
Le Pseudo-Clement nous laisse ici dans l'indecision. Sur Ie concept d'in-
difference dans la pensee antique, voir P. Hadot, Qu'est-ce que la philo-
sophie antique? , p.206-208; 336-337.
53. Ces philosophes qui font de la nature Ie critere ultime pourraient bien
etre d'allegeance stolcienne, etant donne l'importance, pour les tenants
du Portique, de vivre en harmonic avec la nature. II pourrait tout aussi
bien s'agir d'adeptes du cynisrpe, puisque la egalement, et de facron plus
radicale, la conformite a la nature est au creur du systeme, au mepris meme
de toute convention et de toure loi. Sur la notion de nature dans les phi-
losophies anciennes, ct. P. Haqot, Etudes de philosophie ancienne, Paris,
1998, p.77-92. Quoi qu'il en s~it, Ie Pseudo-Clement n'a probablement
vise aucune philosophie particPIiere, se contentant de rapporter une opi-
nion largement repandue, issue de la philosophic populaire.
54. L'adultere et ses fficheuseslconsequences semble preoccuper l'auteur
de cette section des Homelies.Nous avons droit ici a une lisle eloquente
des maux engendres par l'adultere et, au chapitre suivant, Clement et Ie
grammairien Apion discutero*t des mefaits ou des merites de l'adultere.
La preoccupation des Homelies rejoint d'ailleurs celie de nombreux phi-
losophes d'epoque romaine, scion W. Adler, «Apion's "Encomium of
Adultery" », p.42-43, des Stolciens pour la plupart. L'un de res philosophes,
influence notamment par Ie stolcisme, l' Alexandrin d'origine juive, Phi-
Ion (Ier siecle de notre ere), considerait que commettre l'adultere etait la
pire de toutes les fautes (Tau I[1E"ylcrTOUWV <i8lKTJI1UTWV)De Josepho,
44). Bien que fortement hellenise, Philon n'avait pas renie ses origines
juives (cf. N. G. Cohen, « The Jewish Dimension of Philo's Judaism -An
Elucidation of de Spec. Leg. IV 132-150 », Journal of Jewish Studies, 38,
no 2,1987, p.165-186), et, co~pte tenu de l'importance du mariage dans
la pensee juive, it est permis d~ croire qu'it exprime ici une opinion tiree
de son fond hebralque. On not~ra, de toute facron,que Ie Pseudo-Clement
blfime moins les dieux et leurs imitateurs pour avoir commis l'acte sexuel
que pour l'avoir pratique de mliniere extra-conjugale. A la difference des
encratistes, plus ou moins contemporains, it ne prone pas en eifel la vir-
ginite et l'abstinence, mais Ie ~ariage et la chastete. A propos de la vir-
ginite dans Ie christianisme anQien,voir E. Pagels, Adam, Eve, and the Ser-
pent, New York, 1988, p.78-97. En ce qui touche Ie mariage chretien dans
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54
D.COTE
21,1«Cependant, dira-t-on, pour quelle raison l'epoux qui ignore
l'adultere de sa emme n'eprouve nijalousie ni colere et ne cree ni
trouble ni conflit? Ainsi, de telles chosesne sontpasmauvaises ar
nature: c'est 'opinion insenseedeshommes qui les rend horribles.
2 Quant a moi, je dis que meme si ces horreurs-la ne survenaient
pas, l seraitpossible,du fait de a liaison avec 'amant, que a femme
quitte son man ou bien, tout en vivant avec ui, conspire contre lui
ou procure a son affiant les biens accumulespar Ie labeur de son
maTi et que, en l'absence de son man, devenue enceinte de son
affiant, elle veuille, par crainte d'etre decouverte, detruire Ie fruit
de son sein et devienne une infanticide ou bien pensseelle-meme
apres avoir fait penT son enfant55.3 Mais si elle concevait de son
affiant et accouchait, alors que son man est a la maison, voila un
enfant qui, devenu grand, ignore son peTeet considere comme tel
celui qui ne l'est pas, de telle sorte qu'a sa mort, Ie man, qui n'est
pas Ie peTe, aisse sesbiens a un enfant qui lui est etranger. Com-
bien d'autres maux surgissentd'habitude tout naturellement del'adultere
Et nous ne savonsnen descauses ecretesde cesmaux
4Car, a la maniere d'un chien enrage qui fait mounTceux qu'il peut
mordre en leur communiquant sa rage tout a fait invisible, Ie mal
secret de l'adultere, meme s'il est ignore, met fin ala lignee56.
22,1«Mais laissonscela pour l'instant. Nous savons aus que d'or-
dinaire les hommes se mettent dans des coleres sans rein a cause
de l'adultere et que, pour la meme raison, des guerres sont susci-
tees,des amilles sont detruites, descites sont prises et mille autres
maux surviennent encore57. Voila pourquoi, moi, je me suis refu-
l'antiquite, voir J. Evans Grubbs, «"Pagan" and "Christian" Marriage:
The State of the Question », Journal of Early Christian Studies,2, 1994,
p.361-412.Sur Ie point de vue juif concernant 'adultere et Ie mariage,ct.
Flavius Josephe,Contre Apion, 11,199et 201. Au sujet des malheurs ssus
de l'adultere, d. Philon, De Decalogo, 131.55.
Sur l'infanticide et l'avortement, ct. Flavius Josephe, Contre Apion,
11,202.L'avortement et 'infanticide etaient assezepandusdans e monde
greco-Tomaino a condamnation de cespratiques par es Juifs, et plus tard
par les chretiens, fait donc figure d'exception. Ct. Didache, I, 2; Y;2; Cle-
ment d' Alexandrie, Pedagogue, I, x, 96,1. Sur 'ensemble de la question,
voir M. J. Gorman, Abortion & the Early Church, Downers Grove, 1982.56.
Le mal secretde l'adultere, memes'il est gnore, met in d la lignee: ct.
un commentaire semblable chezPhilon: «si Ie crime n'est pas decouvert,
les enfants adulterins usurpent Ie rang des enfants legitimes, abatardis-
sentune lignee qui leur est etrangere» (De Decalogo,128, rad. de v: Niki-
prowetzky).57.
On peut se demander si la mention de guerres et de cites conquisesa
causede l'adultere ne serait pas une allusion aUK mours de la belle Hele-
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UNE CRIllQUE DE LA MYTHOLOGIE GRECQUE
D' APRES L'HOMELIE PSEUDO-CLEMENTINE IV
55
gie aupres du saint Dieu et de la loi des Juifs58; 'ai pris la fernIe
decisionde croire que, sur a base du uste jugement divin, la loi a
ete definie et l'ame re<;oit nfailliblement Ie merite de ce qu'elle a
fait en toute circonstance».
23,1Quand 'eus dit cela, Aippion fit cette objection: « Quoi donc,
dit-il, leg ois grecquesn'interdisent-elles pas aussi eg actions hon-
teuses, e punissent-elles aS egadulteres?2 -Eh bien alors, epon-
dis-je, leg dieux des Grecs tneritent Ie chatiment pour avoir com-
mis des actescontraires aujr ois. Aussi, comment pourrai-je vivre
chastement en considerant que leg dieux eux-memes out ete leg
premiers, avec 'adultere, a commettre tout ce qu'il y a de pemi-
cieux et n'ont pas ete punis~alors qu'ils Ie meritaient d'autant plus
qu'ils ne soot pas esclaves :le eur convoitise? Et si, au contraire,
ils y etaient soumis, en quoi etaient-ils des dieux? 3-N'ayons plus
leg dieux pour gardiens, repondit Appion, mais leg uges: a leur
vue, nollScraindronsde pecher.4Je repliquai: Ce n'estpas a meme
chose,Appion, car celui qui a un homme pour gardienoserapecher
avec ' espoir de ne pas etre vu; mais celui qui a etabli sur son ame
un Dieu qui voit tout refusera meme de pecher en cachette,
conscientde ne pas pouvoir agir a son nsu »59.
24,1A cesmots, Appion retorqua: «Depuis que j'ai entendu dire
que tu frequentais des Juifis, e savaisque tu avais change d'avis.
fie, a l'origine de la guerre de Troie. Cf. Philon, De Iosepho, 56: «les
guerres es plus nombreuses ~t les plus importantes eurent pour origine
les amours, es adulteres et la tromperie des femmes, es guerres qui ont
aneanti la plus large et la meilleure part de la race des Hellenes et des
Barbares» (trad. de J. LapQrte). Quant a l'expression «mille autres
maux», on peut la comparer fl un autre passagedu De Iosepho (44), oil
l'adultere est qualifie« digne ~e mille morts ».
58.11 s'agit d'un judaisme simplifie, a des ins de propagande sansdoute.
La loi dont il est questionn'a den de rituel. Comme e dit M. Simon(Verus
Israel, p.71),« c'est une sages$e ue l'auteur propose aux patensdans un
langage et sous une forme qiji leur soient accessibles . II y avait appa-
remment, dans a societe greto-romaine, une soif de vertu et de purete
que ce udaisme proposait d'dtancher. La-dessus, oir a nouveauFlavius
Josephe, Contre Apion, II 14~ et 210; A. Causse,«La propagande uive
et l'hellenisme », Revue d'Hi.\jtoire et de Philosophie Religieuses, , 1923,
p.397-414;E. Schiirer,The HiStoryof theJewish People n theAge ofJesus-
Christ, vol.lII, part.l, p.567.Le caractere egaliste de ce judatsme, qui est
essentiellementune «orthoptaxie », selon M. Simon (Verus Israel,p.69-
70), explique la primaute qu'iJI onfere aux problemes moraux.
59. Meme objection chez es apologistesAthenagore (Legatio, 32,4) et
Justin: «car ce n'est pas a qause de vos lois et de vos peines que les
mechants cherchenta passermaper~us ils font Ie mal parce qu'ils savent
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56
D. COTE
En effet, comme on dit fort bien: «Les mauvaises ompagnies or-
rompent les bonnes m<lturs»60. Alors, les bonnes compagnies,
dis-je, redressent les m4iuvaisesmreurs. 2 -Aujourd'hui, reprit
Appion, j'ai ete pleinentent satisfait de comprendre ton opposi-
tion: c'est pourquoi no~ t'avons accorde a parole en premier. 3
Demain, par contre, si c4la te convient, e demontrerai, en ce lieu
et en presencedes meme$amis, que nos dieux ne sont ni adulteres
ni meurtriers ni corrupte4rs d'enfants ni amantsde leurs sreursou
de leurs illes, mais que ~s Anciens, en voulant reserver a connais-
salleedesmysteresa cem :qui aiment apprendre, ont voile cesmys-
teres des mythes doni tu as parle. 4 Ainsi, on explique en termes
de physique que Zeus est la substance en ebullition, Cronos, Ie
temps et Rhea, la natur~ fluide de l'eau61.5 Toutefois, demain,
lorsque vous serezTennisau malin, j'interpreterai allegoriquement,
comme promis, chaque igure et e mettrai en umiere la verite de
ces ealites62. -Tu feras demain comme tu l'as promis, repondis-
je, mais ecoute des a pr4sent quelques objections a ce que tu as
l'intention de dire.
que vous etes des hommesl et qu'ils peuvent echapper, tandis que s'ils
avaient appris et s'ils avaiebt la conviction que rien ne peut echapper a
Dieu, ni action, ni meme intention, cette imminence seule leg maintien-
drait de toute maniere dans l'honnetete» (Apologies, I, 12,3).
60. Les mauvaises compagnies corrompent les bonnes mlEurs : citation du
poete comique athenien Menandre (342-292 avant J .-C.), de la piece Thai:\"
(T. Kock, Comicorum atticorum fragmenta, 1880-1888, ragment 218). Cette
maxime, fort connue dans l'antiquite, se retrouve meme dans Ie Nouveau
Testament, dans une epitre Pe l'apotre Paul (1 Co 15,33). Cf. un echo de
cette idee (l'influence des ftequentations) chez Philon, De Josepho, 83.
6L L'explication allegoriqutl, annoncee ici par Apion, trouvera son deve-
loppement au chapitre VI d~s Horn. Bien qu'amorcee au yesiecle avant
J. -C. par leg sophistes, l'interpretation allegorique ne prendra de l'im-
portance qu'avec leg Stoici~s, a partir du lIIesiecle avant J. -C., en rai-
son du respect que vouaient leg tenants du Portique a la tradition et aux
mythes plus particulieremetit. C'est Homere qui profitera Ie plus de cette
entrepfise de recuperation. Le Pseudo- Heraclite (Ier siecle apres J.- C.) et
son ouvrage intitule Allegor.:es d'Homere, constitue un bel exemple d'une
lecture,allegorique, d'inspirjition stoicienne, de recits a saveur mytholo-
gique. Ace sujet, voir A. 4 Boulluec, «L'allegorie chez leg Stoiciens »,
Poetique, no 23, 1975, p.301.321; F. Buffiere, Les mythes d'Homere et la
pensee grecque, Paris,1956: J. Pepin, My the et allegorie. Les origines
grecques et les contestations jlfdeo-chretiennes, Paris, 1958; W. Jaeger, Early
Christianity and Greek Paidf ia, p.48.
62. La verite de ces realites :TI']V TWV OVTWVQA1']6ELQV.ous traduisons
assez litteralement ce que Siouville rend plus librement: «les realites
qu'elles recouvrent ».
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UNE CRITIQUE DIr: LA MYrnOLOGIE GRECQUE
D APRES L HOMEZ-IE PSEUDO-CLEMENTINE IV
57
25,1 « Si les actions des dieux ont ete voilees de mythes mauvais,
alors qu elles etaient bonnes, l auteur de cet enveloppement a
demontre une grande perversite : il a cache des faits venerables
sousdes recits honteux afin que nul n en soit Ie zelateur. 2Mais, si
les actions des dieux etaient vraiment impies, il fallait, au contrai-
re, les voiler de recits honnetes,de peur que es hommes, e regard
tourne veTS es etres superieurs, ne cherchent a commettre les
memes peches». 3 Apres mon intervention, il etait clair que les
genspresents commen~aielilt aimer a teneur de mes propos. En
effet, ils ne prirent conge qu apres m avoir demande nstamment
et avec empressementde revenir sans aute Ie lendemain.
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Jacques-NoelPERES
lnstitut protestantde theologie,Paris
UNTERSUCHUNGEN 1M
ZUSAMMENHANG MIT DER
SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
L Epitre de Lentulus, apocrypheguereanterieurauxw. s. dont estdon-
nee ci une traduction allemande,s'arretea l'aspectphysique de Jesus,qui
y estpresentecomme un tres bel homme, et s'essaie u-dela a un portrait
psychologique. Celapose toutefois un probleme theologique cettebeaute
convient-elleau serviteur souffrant, dont parle Esai e?Une enquetedans a
litterature patristique montre les enjeux des deux affirmations contradic-
faires,de la beauteou de a laideur du Christ,et comment outesdeux s'ins-
crivent dans une perspectivesoteriologique. Le Christ laid porte Ie peche
des hommes. Le Christ majestueux iege au divin tribunal. Cettederniere
image, vehiculeepar l'Epitre de Lentulus, s'accordeavec a predication et
la piete de l'epoque de sa mise en circulation.
Dating at the very ealiest rom the XWth century, he Epistle of Lentu-
Ius, offered here in a German translation, s an apocryphal work refering
to thephysical appearanceof Jesus,presentedas a very handsomeman;
but it also deals with thepsychologicalportrait of Jesus. t raises, owevel;
a theological question.. does this beautypertain to the Suffering Servant
referred to by Isaiah? An inquiry into patristic literature shows he impli-
cations of both of the contradictory positions about Christ's beauty and
ugliness.Both viewsarepart ofa soteriologicalperspective.The ugly Christ
bears he sin of men; Christ in majestysits at the divine tribunal. This mage
transmitted by the Epistle of Lentulus corresponds o homilies and pious
works of the time when it started o be transmitted.
Diel 1998Ausstellung des Grabtuches Christi in Turin stellt yon
Neuem in vielen Tageszeitungen nd Zeitschriften, sowie auch n
den Gedanken der Glaubigen, die diese Reliquie dort verehrt
L DiesenVortrag babe ch am 16. Juni 1998 n der Kirchlichen Hochschule
in Wuppertal gehalten. FUr die Hilfe bei seiner deutschenFassungmoch-
te ich mich rei Frau Iris Coqui, die sich soviel Mtihe gegeben hat, und
deren Rat mir immer Erleuchtung war, sehr herzlich bedanken.Alles was
richtig ist, stammt yon ihr; alles was falsch st, yon mir.
Apocrypha 11,2000,p. 59 -75
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60
PERES
haben, die Frage, wie Jesus wahl ausgesehenhaben mag. Diese
ylaubigen, die, meiner Meinung nach, entgegen aller Wahr,.
scheinlichkeif, davon tiberzeugt sind, daB dieses Thch den Kor-
per Jesu n seinem Grab eingehtillt hat, und daB der Abdruck, den
man sieht, uns seine Gesichtsztigeerscheinen aBt, sparennicht an
den Einzelheiten bei der Beschreibung seines Portraits. Urn die
Wahrheit zu sagenmuBten sich die Ktinstler, sobald sie Christus
unter den verschiedensten Formen darstellen wollten (Fresken,
Mosaike, Bildnisse auf Pokalboden, Sargskulpturen, u.s.w.) sich
selbstvorstellen, wie er wahl ausgesehen aben mag, da weder die
Evangelisten noch die Augenzeugen des Lebens Jesu ein genau-
es Portrat aufgezeichnethaben. Die Bibel hat mit der Beschrei-
bung Davids ein Leitbild gegeben, das sie tibemommen haben :
ein junger blonder Man mit schonenAugen und einem sympathi-
schen Aussehen3. Allerdings wurden am Anfang meistens die
Regeln der Malereikunst und der antiken Statuen benutzt. Der
Hirte Kriophoros, urn nur den einen zu erwahnen, war ein gelau-
figes Thema der antiken Kunst, und wurde ganz einfach yon den
Christen benutzt, urn den guten Hirten aus clemJohannesevange-
lium 10 darzustelIen, ohne daB man mit Sicherheit sagenkonnte,
daB es sich bei alIen Darstellungen in den Katakomben immer urn
Christus handelt; es st sehrwahrscheinlich,daB sich nachund nach
eine rein symbolische Darstellung einer Botschaft des Friedens
und desGlticks in eine christologischeAuslegung verwandelt hat4.
Bald hat man nicht nur den Kiinstlerichen ~inn oder ein die Neu-
gier der Glaubigen zufriedenstellendes Mfttel in der Dlirstellung
des korperlichen Aussehens Jesu Christi gesehen, sondern die
theologische Wichtigkeit festgesteIlt, vor alIen Dingen die einfa-
che Tatsache,daB man ihn, den verschiedenendoketischen Ten-
denzenentgegen, un in seiner reellen Korperform beschreibt.Auf
der anderenSeite,die ZeugnisseseinerTatenund seinerWorte van
einem Portrait Jesu olgen zu lassen,hieBe zu beweisen,daB man
2. Die dafiir- und dagegensprechende iteratur ist zu umfangreich,als daB
sie bier im Einzelnen erwahnt werden konnte. Urn zu versuchen, das
Ursprungsdatumdes Grabtuches von Thrin festzustellen,darf man,denke
ich, zusatzlichzu den angewandtenwissenschaftlichenMitteln, zwei gegen
seine Authentizitat sprechendeElemente nicht vemachlassigen, nd zwar
zum einen die Tatsache, aB die Evangelien nicht von einem Leichentuch,
sondem von schmalenThchstreifen sprechen,und zum anderen die, daB
das Leichentuch von Thrin geschichtlich erst spat erscheint.3.
Vgl.1. Sam 16, 12; 17,42.
4. Vgl. P. PRIGENT, Art despremiers chretiens,Paris: Desclee de Brou-
wer, 1995.S. 105-108.
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
MIT DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
61
sich gleichzeitig zu dem Kreis seiner JUngerzahlt. In diesem Sinn
nimmt del Autor del Epistula Apostolorum in den Jahrenurn 160
herurn den Prolog des 1. lohannesbriefeswieder auf und laBt die
Apostel, angeblicheVerfasserdes Briefes, genauangeben,daB sie
nicht nUTdiejenigen sind, die Christus angehort haben, sondern
auch beriihrt haben, womit sie beweisen, daB die nachfolgenden
Offenbarungendel Wahrheitentsprechen5. nd die Doctrina Addai
ging, etwa drei Jahrhunderte spater, van del Vorstellung aus,daB
del Archivbeamte Hannan nicht nUTdie Worte Jesu dem Konig
Abgar van Edessawiedergegeben at, sondern hm auchdas Bild
van Jesus iibergeben hat, das er wahrend diesel Sprach gemalt
hatte6.
Man muB allerdings his zum Mittelalter warten his die Texte,
die das korperliche Aussehen Jesu Christi recht genaubeschrei-
ben, die bildlichen DarsteUungen blosen.Unter diesenTexten st
der Brief des Lentulus, der mit einer graBen Anzahl yon zum Teil
hervorragenden Handschriften aus der Zeit yom XIV: his zum
XVII. Jahrhundert erhalten wurde, derjenige, der sicher am
bekanntesten st, und der wahl den tiefsten Eindruck gemachthat.
Bevor ich die Betrachtung ansteUe,ob der Text mit der Meinung
der Kirchenvater n Hinsicht auf das AussehenJesu ibereinstimmt,
urn dann die Beweggrtinde ftir sein Entstehen zu suchen, unter-
breite ich heute erne UbersetzungdiesesTextes ns Deutsche, Text
der meines Wissens nach higher noch nie ins Deutsche iibersetzt
worden ist. Auch glaube ich behaupten zu konnen, daB es sich bei
der Epistula Lentuli weder urn eine banale Beschreibungnoch urn
einen ungeschicktenVersuch,ein Bild des korperlichen Aussehens
Christi zu schildem handelt, Bild, das so sehr der frommen WiB-
begier der Glaubigen gefehlt batte, sondem daB die Epistula auf
ihre Weise Verkiindigung des Heils in Christo ist.
1. Die Epistula Lentuli
Die Epistula Lentuli dlirfte kaum viel frliher wie im XIV Jahr-
hundert entstanden ein,da sie zum erstenmal um 1330herum van
Ludalf dem Kartauser in seiner 1474 n Koln veroffentlichten Vita
JesuChristi erwahnt wurde, bevar sie in del Einteilung zu del 1491
in Nlirnberg gedruckten Ausgabe del Welke Anselm van Canter-
5. Vgl. Ep Ap 2 und 1. Job 1, 1-3; J.-N. PERES, Epitre des ap{jtres,
(Apocrypbes ),Thrnbout: Brepols,1994, .62.
6. Vgl. Doc Addai 6.
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62
PERES
burrs genannt wurde, urn schlieBlich zusammenmit den Magde-
burger Zenturien 1559 n Basel veroffentlicht zu werden. Es han-
delt sich urn einen n lateinischerSpracheverfaBtenBrief, von dem
man annimmt, daB er von einem gewissenLentulus, Prokurator
von Judaa, geschriebenund an den Senatvon Rom gerichtet wor-
den war. DaB einerseits weder dieses octeT onst rgendein ahnli-
chesAmt je von emandemdiesesNamens nnegehabtwordenwar,
noch daB es anderseitsmehr wie ungewohnlichscheiDt,daB ein sol-
chef Brief je an den Senatgeschicktworden seinsoIl, wahrend Syri-
en zu der Zeit ernekaiserliche Provinz war, und schlieBlichdie Tat-
sache,daB das Latein diesesBriefes nicht wirklich dem der in der
Zeit Tiberius tiblichen Lateins entsprach, konnte schongentigen,
die U nechtheit desBriefes nachzuweisen. Hierzu kommt noch die
Tatsache,daB er in seiner BeschreibungChristi, dem falschlicher-
weise Johannesvon Damaskuszugeschriebenen, n Kaiser Theo-
philos gerichteten8, Synodalbrief ahnelt, octeTder Beschreibung
des Ruchesder Maler vom Berg Athos, das zwei Jahrhunderte spa-
ter Ps-Johannes on Damaskus wieder aufnimmt, wie es auch drei
Jahrhunderte spater Nikephoros Kallistos in seiner Kirchenge-
schichte at9. Der Humanist Lorenzo Valla erklarte den Brief als
Erster urn 1440 herum als zu der apokryphischen Literatur
gehorend10. ie JenaerHandschrlft, eiDer der BeweisediesesBrie-
fes, enthalt am Ende erne Anmerkung, die erklart, daB ein gewis-
seT acopo Colonna ihn 1421 m Kapitol von Rom unter den Anna-
len der Stadt gefunden batte, zu defieD er als ein Geschenk des
Patriarchen von Konstantinopel gelangtwar, was ein Beweis dafur
ist, daB es rechtmiiBig ist zu denken, daB er nuTeine Bearbeitung
eines griechischenOriginals sei,welchesselbstnicht viel alter war11.
Ernst von Dobschtitz, der Herausgeberdes lateinischen Textes12,
und seine Nachfolger unterteilen die zahlreichen Handschriften
der Epistula Lentuli in vier Gruppen, a, b, cund d. Ich tibersetze
bier die Gruppe d, die den jtingsten Stand des Textes wiedergibt.
7. Diese drei Anmerkungen Willden von M, ERBETfA emacht,Gli Apocri-
fi del Nuovo Testamento, d, 3, CasaleMonferrato : Marietti, 19832, , 137,
8. V gl. Brief an Kaiser Theophilos 3, PG 95,349 BC; der Brief ist aus dem
Jahr 836,und Johannes starb 749,
9. VgI. Nikephoros Kallistos, Kirchengeschichte40,PG 145,788, der den
Pseudo-Johannes on Damaskus entwickelte,
10. Vgl. L. VALLA,De falso credita et ementitaConstantinidonationedecla-
mario, in seinen Opera, Basel, 1540,S. 786.
11.Vgl. F. VIGOUROUX,Lentulus », n Dictionnaire de a Bible, Bd. IV/I,
Paris: Letouzey, 1928,Sp.171.
12. E. von DOBSCHOTz, hristusbilder. Untersuchungenzur christlichen
Legende,Bd. 2, Leipzig : Hinrichs, 1899,S. 308 -330 ,
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
MIT DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
63
«Ein gewisserLentulus, ein Romer, del wahrend seinerBeam-
tenzeit fur die Romer in del Provinz Judaa zur Zeit Tiberius Cae-
sar, Christus gesehenhat, und schriftlich seine auBerordentlichen
Taten festgelegthat, seine Predigt, seine unzahligen Wunder und
andere erstaunlicheDinge fiber ihn, schriebwie folgt an den romi-
schenSenap3:
Es erschien n diesel Zeit ein Mann yon groBemWirkungsver-
mogen magnae virtutis), del auch noch lebt, namensJesusChri-
stus, yon clemdie Heiden sagen,daB er Prophet del Wahrheit ist,
und den seine Jtinger Gottes Sohn Dennen, del die Toten aufer-
stehen laBt und del aile moglichen Krankheiten heilt. Er ist ein
Mann yon mittlerer GroBe, abeTbemerkenswerter Erscheinung,
und yon ehrenhafter Haltung, und weT hn ansieht iebt ihn oder
rurchtet ihn. Seine Haare sind yon hellem HaselnuBbraun14, latt
fast his an die ahren, abeT on den Ohren ab n gewellten Locken,
die glanzend und leuchtend his unter die Schultern herabfallen
und die in del Mitte des Kopfes dUTCh inen Scheitel geteilt sind,
entsprechend clem Brauch des Nazaraer. Er hat eine gerade und
sehrausgeglichene tirn, und das Gesichtohne Falten oder Flecken
Wild nUTyon eiDer eichten Rote verschonert. Die Nase und del
Mund sind einwandfrei. Der volle Bart ist yon derselbenFarbe wie
die Haare, nicht sehr ang, abeTam Kinn geteilt. Sein Ausdruck
ist schlicht und reif. Seine ausdrucksvollen Augen sind meeres-
grtin und hell. In del Ablehnung ist er furchterregend; in del
Ermahnung ist er sanft und liebenswtirdig. Er ist frohsinnig,
bewahrt abeTseine Wtirde. Manchmal hat man ihn weinen sehn,
abeTniemals achew5.Die Korperform ist schlankund gerade. Er
hat angenehmanzusehendeHande und Arme. Er ist ernst n del
Unterhaltung, zuriickhaltend und bescheidend.Er hat es also ver-
13. Der Prolog zeigt yerschiedene Versionen, entsprechend del Text-
gruppen:
a: «In den Annalen del Romer kann man nachlesen, daB unser Herr
Jesus-Christus, el yon den Heiden Prophet del Wahrheit genanntwurde,
yon groBer Gestalt war ».
b: «Lentulus, del in Judaa regiert, S P R S [d.h. an den Senat und das
Volk del Romer, GrUBe]».
c : Zur Zeit Octavianus Caesar,zur Zeit also, n del aus alien Teilen del
Welt die die Proyinzen regierenden Beamten den romischen Senatoren
aile higher noch nicht bekannten Nachrichten del yerschiedenenRegio-
Den del Welt berichteten, schrieb ein gewisserMann namens Lentulus,
del die yon Konig Herodes regierten Teile Judaas nnehatte, wie folgt an
die Senatoren».
14. Wortlich: «Haare, die die Farbe yon unreifen Haselniissenhaben».
15. Val. c setzt hinzu « obwohl er es tut ». Das Eyangelium berichtet in del
Tat, daB Jesusam Grab Lazarus sowie auch fiber Jerusalemgeweint hat.
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I.-N. PERES
dient entsprechenddem Propheten der Schonsteunter den Men-
schensohnen 16 enannt zu werden ».
Wie ich vorher schon erwahnte, ahnelt die Beschreibung des
korperlichen Aussehens Jesu n der Epistula Lentuli der Darstel-
lung anderer Autoren. Man wird aber nicht verfehlen zu berner-
ken, daB der Autor der Epistula in seiner Beschreibung n daskor-
perliche Aussehen Christi rnoralische Werte oder besser gesagt
Thgenden gelegt hat. Dennoch unterscheidet sich seine Beschrei-
bung van anderen Beschreibungen. Der Brief van Ps-Johannes
van Darnaskus an Kaiser Theophilos lautet wie folgt : « Man stellt
ihn so dar, wie die antiken Geschichtsschreiber hn beschrieben
hatten: rnit sich in der Mitte fiber der Nase beriihrenden Augen-
brauen, schonenAugen, eiDer angenNase, gelockternHaar, einern
leicht gewolbten Korper, einern uDgeDGesicht, einern schwarzen
Bart, einern weizenfarbenen Hautton so wie es auch der seiner
Mutter gewesenwar, mit langen Fingem }}17.Man stellt fest, daB
der Ps-Johannes an Damaskus,wie irn iibrigen auchdas Buch der
Maler vorn Berg Athos und Nikephoros Kallistos, die Ahnlichkeit
Jesu mit seiner Mutter unterstreichen. Ob dieses rnit eiDer heo-
logischen Absicht geschah,zurn Beispiel urn zu bekraftigen, daB
er seineD rnenschlichen Korper nur van ihr, ja allein van ihr
bekarn? Dieses ist eine nicht auszuschlieBendeVerrnutung. Es
scheiDt rnir jedoch, daB dieses besondere Beispiel die Absicht
bestatigt, ein geschichtliches Bild van Jesus darzustellen. Diese
Autoren interessierten sich rnehr fiir das auBereErscheinungsbild
Jesu, als fur eine Theologie der Erlosung, die beriicksichtigen
wiirde, daB er ganz die rnenschlicheGestalt angenornrnen at, urn
die Menschheit zu retten. Es ist allerdings sehr schwierig festzu-
stellen, urn welche antiken Autoren es sich handelte, auf die Ps-
Johannes van Darnaskus sich bezog, sowie es auch noch Nike-
pharos Kallistos tat, der seine Beschreibungnoch erweiterte. Man
wird sich allerdings daran erinnem, daB Eusebius van Caesarea
an die Prinzessin Konstantia, Schwesterdes Kaisers Constantin,
schrieb, mit der Absicht, sie vor der VersuchungChristus darzu-
Ps 45 (LXX 44), 3. Die Textgruppen a, b und c haben einen anderenSchluB:
«Du bist del schonste aller Menschensohne, denn er selbst ist
del Konig del Herrlichkeit, dessen VoIlkommenheit die Engel betrach-
ten, den Sonne und Mond mit Bewunderung ansehen, del Erloser del
Welt, del Urheber des Lebens, ihm gehoren Ehre und Herrlichkeit his inaIle
Ewigkeit. Amen ».17.
H. LECLERCQ, «Jesus-Christ », in F. CABROL et H. LECLERCQ,Dic-
tionnaire d'archeologie chretienne et de liturgie, Bd. VII/2, Paris: Letou-
zey, 1927, Sp. 2395.
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
Mrr DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
65
stellen zu warnell. Die Argumente Eusebiussind yon Wichtigkeit,
da sie vollkommen christologisch sind. Bevor man das Gesicht
Christi beschreibenwill, stellt er diesesGesicht selbst n Frage : 1st
es seinwirkliches Gesicht,sind es wirklich seine eigenenGesichtzii-
ge? Oder handelt es sich urn die Gestalt des Sklaven, die er fur
uns angenommenhat? In der Fleischwerdung, trotz seinesMen-
schendaseins,st der bistorischeJesusauchGott. Sein Menschsein
ist mit seinem gottlichen Leben vollig verschlungen, sodaBeine
Beschreibung des bistorischen Jesusverboten ist. Uber alledem
abeT egiert er seither die Welt als der Herr, verklart in der himm-
lischen Herrlichkeit, und die Gestalt des Sklavenwurde in ihm in
jenes Licht verwandelt, das kein menschlichesWesen e beschrei-
hen konnte.18Eusebius gibt damit auch fiber die genaue Frage
eiDer bildlichen Beschreibung Christi hinaus an, daB es eine theo-
logische Unschicklichkeit ware, eine solche Darstellung mit clem
Pinsel des MaIers oder mit clemMeiBel desBildhauers sowie auch
mit der Feder des Schriftstellers schaffen zu wollen. Es muB her-
vorgehobenwerden, daBes sich bier bei Eusebiusnicht nUTdaTum
handelt, einfach rgendeine Bildanbetung, eine Idolatrie zu urch-
ten, Furcht die man bei vielen friihen Autoren des Christentums
vorfindet, und die sie an eine vorsichtige Zuruckhaltung vor jeg-
licher Darstellung Christi bindet. Es ist vielmehr so, daB Eusebi-
us eine theologischeAbhandlung halt, in der das Heil der Mensch-
heit, das fur ihn aus der Erlosung yon clemTode und der Vergebung
der Sundell besteht, den wichtigsten Platz einnimmt.
Dieser theologischen Begriindung setzt die Kirche der Kir-
chenvatererneandere Begriindungentgegen, nd zwar die padago-
gische. In seinem beriihmten Brief an den Bischof Serenus von
Marseille, etwa im VI. Jahrhundert geschrieben, esiimiert Papst
Gregor der GroBe in gewisserWeisedieseneue Gegenargumenp9.
Er erklart, daB es sichereine unschicklicheVerhaltensweiseware,
18. Der Brief yon Eusebius an Konstantia, del allgemein rur authentisch
gehalten wild, wenDauch nUTn Fragmenten tiberliefert, stammt aus den
Jahren 313-324. Er wurde in H. HENNEPHOF,extusbyzantinos ad ico-
nomachium pertinens,Leiden, 1969, erlegt und yon G. DUMEIGE,Nicee
II, (Histoire des conciles oecumeniques 4), Paris: Orante, 1978,S. 225-
227, ibersetzt; gleiche Ubersetzung in D. MENOZZI, es Images.L Egli-
se et esarts visuels, Textes en main), Paris: Cerf, 1991,S. 70-72.Vgl. H.G.
TH1JMMEL,Eusebios Brief an Kaiserin Konstantia », Klio 66, 1984,S.
210-222,und Ch. SCHONBORN,Icone du Christ. Fondements heologi-
ques,Paris: Cerf, 1986,S. 55-77.
19. Gregor del GroBe, Epistola Serenoepiscopo Massiliensi,MGH Ep.
II, X, Berlin, 1957,269-272;Ubersetzung n D. MENOZZI, p. cit. S. 75-77.
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J.-N.PERES
ein Gemiilde anzubeten,daBes abeT ine ganz andere Sacheware,
dUTCh eine Darstellung zu lemen, was man anbeten solI. Er prii-
zisiert : « das,was dasGeschriebenedenjenigengibt, die lesenkon-
Den, gibt das Bild den Analphabeten, die es betrachten, und die
dann darin dassehen,was sie nachahmen oIleD». Flir Gregor liegt
in der bildlichen Darstellung, und man kann dasselbe yon jeder
anderen schriftlichen Beschreibung ebenfalls behaupten, das
Erwecken eines Gefiihls in demjenigen, der diese empfiingt. Das
heiBt, daB das Wichtigste nicht so sehr in der historischen oder
begriindeten Wahrheit dessenoder desjenigeniegt, der dargestellt
ist, sondem n dem was die Darstellung, die sichgewissegeschicht-
liche Freiheiten nehmen kann, in der Lage ist, bei dem, der sie
sieht, hervorzurufen oder zu bewirken. Aus dem Zusammenhang
mit einem derart tiereD Gefiihl heraus erwiichst die Frommigkeit,
die das Betrachten desBildes oder desGesichtshervorruft, genau-
so wie die Ethik, die daraushervorgeht In diesemSinne wird das
piidagogischeArgument zum theologischenArgument. Mir scheint
nun, daB man yon diesem Gesichtspunkt aus die verschiedenen
Beschreibungen Christi betrachten muG,die uns yon der Kirche
der Spiitantike und des Mittelalters hinterlassenwurden, und unter
denen sich natiirlich auch der Inhalt der Epistula Lentuli befindet.
Nachdem WiTnun die Feststellunggemachthaben, daB man das
Bildnis Christi nicht wie ein wahres Zeugnis der Geschichte,son-
dem wie einen Antrieb eines Gefiihls -in diesem Fall eines reli-
giosen Geflihls- betrachten muB, bleibt jedoch noch die Tatsache,
daB sich zwischendem, was der Autor ausdriicken will und dem,
was der Leser empfindet -falls man nicht aufpaBt- eine Kluft auf-
tut. Der Erfolg der Epistula Lentuli besteht mit Sicherheit darin,
daB hre Leser in ihr die personlichen Gesichtszlige Christi haben
sehenwollen, wodurch sie erneberechtigte WiBbegier stillen konn-
ten, und wodurch sie dazu getriebenWillden, « den Schonsten nter
den Menscbensohnen» anzubeten, yon dem die Epistel spricht,
fidem sie Psalm 45 (LXX 44) zitiert, und was wiederum voraus-
setzt, daB er gleichzeitig ein machtiger und glorreicher Herr ist. Es
ist schlieBlich nicht wichtig, daB der Autor des Briefes ein Bildnis
zum Modell nahm, das er wahrscheinlichgerade vor Augen hatte.
Wichtig ist die Theologie, die seinen Worten zugrunde liegt, und
die der Frommigkeit und sogar dem Glauben seiner Leser eine
bestimmte Richtung gibt. WiT mlissen uns also die Frage stellen,
ob diese Theologie mit der Tradition der Kirche libereinstimmt
oder ob sie, falls nicht, yon Grund auf eine Neuheit ist.
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
MIT DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
67
2. Entsprichtdie Epistula Lentuli denAnsichtendel
Kirchenvater?
FUr unser Untersuchung konnen wiT yon Psalm 45 ausgehen, da
unsere Epistel sich eindeutig darauf bezieht. Man wird sich daran
erinnem, daB dieser Psalm in1 Hebraischen die Worte ni i ,,~ zum
Titel hat, was « Lied der Liebe » heiBt, und was die Septuaginta
mit c98T j nrEp TOUuyaTrllTOU ibersetzte und die Vulgata mit can-
ticum pro dilecto, Lied fUr -oder auf- den Geliebten. Marc UJds
hob in eiDer sehr interessanten Studie, die yor etwa fiinfzehn Jah-
fen yeroffentlicht wurde20, hervor, daB gewisse Rabiner in diesem
Psalm den Hochzeitsgesang fUr die zwischen dem Messias und Isra-
el geschlossene mystische Ehe sahen. Dies wiederum legten die
Kirchenyater so aus, daB der Ehegatte die menschliche Gestalt
Christi sei. Da nun abeT,erklarte Marc Lods, in dem Psalm auch
die Rede yon Majestat, Thron, Zepter, Olsalbung und Konig ist,
kann es sich bei dieser Beschreibung nUTurn das konigliche Dasein
des Herro und seiner Schonheit handeln, urn den also, der diese
Aufgabe auf sich nimmt. In diesem an Jesus Christus im Psalm aus-
gerichteten Sinn handelt es sich also nicht urn sein korperliches
Aussehen, seinen Fleischgewordenen Korper, so wie die Menschen
ihn haben sehen konnen, sondem urn die Schonheit des Sohnes
Gottes; Marc Lods schrieb, indem er sich auf Origenes, Basilius
yon Casarea, Gregor yon Nyssa, Johannes Chrysostomos, Theo-
doret yon Kyros, Cyrill yon Alexandrien, Hieronymus und Augu-
stinus bezog, daB er die menschliche Schonheit iibertraf, da nUTer
allein in seiner Person mit Leuchtkraft das gottliche Aussehen
dUTChseine Reinheit, Schonheit, Herrlichkeit, Ehre und Gnade
ausdriickte21. Es ist auf jeden Fall bemerkenswert, daB aIle diese
Autoren -ausgenomrnen Gregor yon Nyssa, dem das korperliche
Aussehen des Fleischgewordenen Christus nUT in seiner dUTch
seine gottliche Natur yerstandlichen Schonheit wichtig schien- bei
ihrer Auslegung des Psalm 45 hervorhoben, daB dieser nicht im
Gegensatz zu der Prophezeihung Jesajas stehe, in der dieser das
Leiden Christi beschreibt (Jesaja 52,14-53,3), da es sich bei dem,
was der Prophet sieht urn das Leiden handelt, urn den korperli-
chen Verfall, der Erbarmlichkeit und das yom Erloser angenom-
mene und gewollte Fehlen jeglicher Schonheit. Der Meinung der
Kirchenyater nach miissen unser Psalm und Jesaja so gelesen wer-
den, daB sie den Hintergrund dazu hilden, Jesus Christus in der~
20. V,gl. M. Loos, «Dieu est-it beau? De I Ancien Testament aux Peres
de l Eglise », Positions /utheriennes32/3, 1984,S. 187-210.
21. Ibid. S.197 und Noten S. 208-209.
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I.-No~ERES
Einheit seinerdoppeltenWesenart,der gottlichenund der mensch-
lichen, erscheinenzu assen.Diesist damit eine theologischwich-
tige SchluBfolgerung.Die Kirchenvater, auf die WiT ns ebenbezo-
gen haben, wamen uns n der Tat vor jeglicher Art und Weise der
Annaherung Jesu Christi, die niGhts mit dem Werk des Heils zu
tun hatte.
Man sollie also die Schriften del Kirchenvater, die sich tir das
korperliche Aussehen Christi zu interessieren cheinen, m Hin-
blick auf das ebengenannte esenl Ob nun genaudas hre Besorg-
nis war, oder ob sie ohne es auszudrticken oder indem sie es nUT
unvollstandig ausdrtickten, nicht auch das dUTCh esusbewirkte
Reil del Menscheit im Sinn hatten?
Ohne nun aIle Schrlften der Kirchenvater genauuntersuchenzu
mussell, wollen wiT uns mil den Schriften defer befassen,die sich
ohne ede direkte Information d~ch die Evangelien auf den Text
Jesajasgestiitzt haben, urn zu behaupten, daB Jesus nicht schon
war und daBseine Erscheinung eher miBfiel. In seinemDialog mil
Tryphon erwahnt Justin der Martyrer zweimal diesesFehlen der
Schonheit,wobei er beim erstenmaldasElend des eidendenChri-
slug seiner himlischen Herrlichk~it bei seinem Erscheinen fiber
den Engeln (Dial. 14) gegeniiberstellte und beim zweitenmal im
Zusammenhangmil der Taufe im Jordan zeigte, daB es zu Gun-
stell der Menschenso ist (Dial. 88). Clemensyon Alexandrien geht
noch weiler indem er behauptet, daBJesusnicht nUT eine Schon-
heit besaB,sonderndaB er sogarhaBlich (aiaxp6c;;) nzusehenwar,
was Clemens wiederum nicht davon abhielt, auf die wallie Schon-
heit hinzuweisen,und zwarauf dieiGiite der Seeleund die Unsterb-
lichkeit des Fleisches, Schonheit die entgegengesetzt er Schon-
heit ist, die nUTllusorisch, voriibergehend ist (Piidagoge II, 1,3).
Mir scheiDt abeT,daB es Irenau$ ist, der die Frage mil groBter
Genauigkeit stellt, und zwar n dem bewunderungswiirdigenKapi-
tel 19 des III. Buches des Adversus Haereses22. er Bischof yon
Lyon verteidigt den Standpunkt, daBJesuskein reiner Mensch st,
sondern auch der Sohn Gottes, der allein in der Lage ist, die
Menschheit zu befreien, der, urn dieses zu vollbringen, Fleisch
wurde aus dem Leib Marias, Idie yon menschlichen Wesen
abstammtund selbstmenschlichesGeschopf st. Das st, so schreibt
er, das, wovon die Schriften zeugen, die JesusChristus als einen
«schmucklosen Menschen », homo indecoratus, beschreiben.
AuBerdem hebt Irenaus die Abschnitte der Schriften hervor, die
22. Text in SC 211. S. 371-383
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
MIT DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
69
die Emiedrigung Christi unterstreichen er ist Opfer desLeidens,
er reitet auf einem Esel, er ist yon Bitterkeit durchtrankt, er Wild
yom Yolk verachtet, er stirbt sogar.Aber, fahrt Irenaus fort, als er
Mensch geworden st, urn del leidende Mensch zu sein, blieb er
-wahrend er del geschmahteMensch war- gleichzeitig das Wort
Gottes, allerdings wie Irenaus prazisiert «das Wort Gottes in
Ruhe », requiscentequidem Verbo,urn schlieBlichauf eine solche
Art verherrlicht zu werden, daB del Mensch m Siegmit ihm absor-
biert (absorto)wurde, und mit ihm gen Himmel fuhr. So haben WiT
auf den eben erlauterten Seiten die gesamte renaischeChristolo-
gie zusammengefaBt.Seiner Lehre nach gibt es nUTein und den-
selbenHerro, del Mensch st und wie ein Mensch eidet und stirbt,
in dessenSchwachsein as Wort Gottes bewuBt nicht in Erschei-
Dung tritt, dieses Wort Gottes, das doch die Sunde und den Tod
des elendenund hiiBlichen Menschenbesiegt, del yon seiner Kraft
verschlungenWild. Tertullian, del sich im selbenSinne in seinem
AdversusMarcionem iber das AussehenJesubefragt, tut denAus-
ruf: « WenD er auchohne Herrlichkeit, schandlich, entehrt war, er
wird immer mein Christus sein »23.Er priizisiert entgegenMarci-
on, daB es immer so sein Wild, da die heilige Schrift die Gestalt
und das Aussehen Christi genausovorausgesagt atte. Man erin-
neTtsich unter anderem,daB Tertullian in einem anderenTraktat,
De Patientia, n der BeschreibungChristi einen schwerwiederzu-
gebendenund viel diskutierten Ausdruck benutzt hat. Indem er
erklart, daBes Gott Leiden bereitete, geborenzu werden, und daB
er sich geduldig den menschlichenSchwachen nterwarf, schreibt
Tertullian in der Tat: sedcontumeliosusnsupersibi esf4Man kann
diesesals eine Bestatigung der Unterwurfigkeit Christi auffassen,
der akzeptiert, die Emiedrigung zu ertragen, urn, erklart Tertulli-
an weiter, dann sogar Sunder und Zollner zu seineDNachfolgem
zu machen; man kann diese aber auchwie eine Beschreibungdes
korperlichen AussehensdesLeidtragenden, Beleidigungenunter-
worfenen Jesus verstehen, das heiBt des Aussehenseines
geschmiihten, miBgestaltetenKorpers.
Ich babe es mit Geniigen unterstrichen, daB die Meinung der
Kirchenvater, die ein haBliches Aussehen Christi lehrten, ebenso
auf der alttestamentarischen Prophezeihung, besonders der des
leidenden Dieners Gottes Jesaja,wie auch auf einem soteriologi-
schell Postulatberuht. Dieses Postulatwurde spater van den Dok-
23. Tertullian, Adversus Marcionem III, 17, 1, SC 399,S. 151.
24. Tertullian, De Patientia 3, 2, SC 310,S. 64 und Kommentar S.133-134.
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70
J.-N. PERES
toTeD der Schule Antiochens wieder aufgenommen und weiter-
entwickelt, namlich das der Annahme, daB nUTer}ost wird, was
innerlich aufgenommen worden ist. Damit will also gesagtsein,
daB sich unsere eigenen Grenzen, unsere Unfahigkeiten, unsere
Gebrechen und Fehler im auBeren Aussehen Christi befanden.
Wie immer sie auch theologisch gut durchdacht worden seinmag,
stieB diese Meinung jedoch bald auf Opponenten. Dem heidni-
schell Philosophen Kelsos, der geltend machen wollte, daB Jesus
«wie man sagt, klein war, haBlich, vulgar », urn ihm abzusprechen,
daB er den heiligen Geist in sich ragt, denn der Korper, in clem er
sich befande, hatte sonst aIle anderen an GroBe, Schonheit und
Majestat ausstechenmussell, antwortet Origenes, daB man sicher
yon Jesusdenken kann, indem man sich auf Jesajabezieht, daB er
hiilllich war, daB man abeTnicht denken kann, daB er vulgar war,
und das nichts darauf bin weist, daB er klein war. Origenes beg-
nfigt sich abeTdamit nicht, sondern, indem er sich auf Psalm 45
beruft und auf die Begebenheit der Verklarung, entwickelt er die
interessante Idee, daB dUTCh ie Tatsache,daB die Materie « die
jegliche Eigenschaft nach clem Willen des Handwerkers -womit
WiTGott meinen- annehmen kann », Jesus alIen defieD, die ihn
beobachteten, unter der clem Zweck dienenden Gestalt XPllUL-
flOV) rschien. Der Logos ist ffir den haBlich, der sich am FuBe des
Berges befindet und sich nicht darauf vorbereitet, ihn zu erstei-
gen, fahrt Origenes fort, ffir den, der sich mit den Reden der Phi-
losophen zufrieden gibt. Dagegen hat er fUr denjenigen, der den
Logos als er auf den hohen Berg stieg begleitet eine gottlichere
Gestalt, er, der wie Petrus es fertiggebracht batte, die Kirche auf
ihm dUTch er Logos sich aufbauen zu lassenund den die Tore der
Holle nicht besiegeDkonnen25.Urn die Schonheit und Herrlich-
keit, die die Gestalt Christi aufwies, zu verteidigen, behalte ich im
Sinn, daB die Argumentation Origenesebenfalls,so wie es der Fall
der Kirchenvater war, die eher seine HaBlichkeit und MiBstaltung
sahen, m Zusammenhang mit eiDer soteriologischen Bedeutung
steht. Auf jeden Fall findet man diese dee eines zwiefaltigen Aus-
sehensJesu Christi bei Hieronymus, der in seinem Matthiiuskom-
mentar zur Perikope, in der Jesus die Handler aus clem Tempel
jagte, schreibt, daB derselbe Mann, so geringschatzt und wenig
beachtenswert, daB man ihn wenig spater kreuzigte, mehr gelei-
stet hat, wie eine ganzeArmee. Und Hieronymus erklart die Ursa-
che daffir, indem er das Aussehen Jesu in folgenden Worten
beschreibt: «Es ist, als ob seine Augen Flammen und Blitze war-
25. Vgi. Origenes, Contra Ce/sumVI, 75-77,SC147, S. 366-375.
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
MIT DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI 71
fen und die gottliche Herrlichkeit leuchtete auf seinemGesicht»26.
Eine Herrlichkeit die man yom IV: Jahrhundert ab keinesfalls
mehr anzweifelte wenn man JesusChristus bildlich octeT eistig
darstellte.
Vielleicht ist es Augustin del es uns ermoglicht diesen Punkt
zum AbschluB zu bringen. Wenn sich auch del Bischof van Hippo
in den erstensiebenBfichem seinerTraktat De Trinitatehauptsach-
lich daran gehalten hat das heologische Konzept zu formulieren
das die Grundkenntnisse del Beziehung del Personendel Dreiei-
nigkeit untereinander festsetzt so hat er sich ab dem VIII. Buch
ffir die Seele des Glaubigen interessiert nicht etwa weil er die
Theologie gegenfiber del Psychologie octeTnoch einfacher del
Philosophie gegenfiber vemachlassigtbatte sondem weil er zei-
genwill wie die menschlicheSeeledUTCheine Zugehorigkeit zur
Glaubenslehre erleuchtet Wild. Augustin will abeTvom Anfang
diesesVIII. Buches an beweisen daB del Glaube an das Mysteri-
urn der Dreifaltigkeit moglich ist. Aus diesem Grund -und mit
Sicherheit unter dem EinfluB del platonischen Philosophen27-
unterstreicht er daB es dem Menschenoft in seiner Vorstellungs-
kraft passiert sich sinnlich spfirbare Tatsachen orzustellen die er
nicht gesehenhat und daB es in diesem Fall nicht so wichtig ist
ob das so entstandeneBildgenau del Wirklichkeit entspricht octeT
nicht sondem daB es daTUm eht dUTch as Bild zu einer ande-
TenErkenntnis zu gelangen Erkenntnis die dUTChie Darstellung
ausgelostwurde. So stellen WiTuns jeder verschieden auf seine
Art das Gesicht octeT ie Gestalt Paulus octeTall defer VOl van
denen die heilige Schrift spricht. Was nun fiber diese Darstellun-
gen hinaus fur unseren Glauben wichtig ist sagter ist die Tatsa-
che daB sie ihr Leben mittels del Gnade Gottes fuhrten. Und so
fahrt Augustin fort genausoverhalt es sich mit dem Gesicht Chri-
sti das sichentsprechenddel vielen Vorstellungen die wiTuns van
ihm machen verandert trotzdem es ganzoffenbar einzigartigwar.
Er schlieBt dann: «Was uns abeT n unserem Glauben an Herm
Jesuszum Heil wild sind nicht etwa diese vielleicht von del Wirk-
lichkeit weit entfemten erdachten Vorstellungen sondem es ist
das was WiTvan dem Menschen halteD das was in ihm unserer
menschlichen Vorstellung entspricht »; und einige Zeilen weiter
kann Augustin die in folgendem liegende soteriologische Wich-
26. Hieronymus Commentariorum in Matheum libri W III fiber Mt 21
15-16 SC 259 S.116-117.27.
Vgl. A. UNA JUAREZ «San Agustin: idea y belleza » Religion y cuI.
tufa XLIV; 1998 S. 65-84.
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72
I.-N. P~RES
tigkeit erkliiren : « Das Wichtige rur uns ist es n der Tat zu glau-
ben fest und unerschiitterlich in unserern Herzen daran festzu-
hallen daBesdie tiefe Ergebenheitwar die Gott dazu gefuhrt hat
sich dUTCh ine Frau zur Welt briDgeDzu lassen und sich mitten
unleT schwersten Beleidigungen yon sterblichen Menschen zurn
Tode fuhren zu assen.Dies ist dashachsteHeilmittel urn uns yon
unsererngeschwollenenStolz zu heilen und das hachste Mysteri-
urn urn unsere Fesseln der Sunde zu laseD» urn so dann dUTch
dasselbezur vollen gattlichen Kraft zu gelangen yon der wir dUTCh
die yon Jesus Christus bewirkten Wunder Kenntnis haben28.
3. Gibt es n del Epistula Lentuli cine soteriologische
Perspektive?
Die soeben beschriebenenAnmerkungen die sich auf das in
clemvon den Kirchenvatern gezeichneteBild haBliche Aussehen
oder die Majestat Christi beziehen haben mich dazu gefiihrt zu
unterstreichen wie sehr diese Kirchenvater in clem einen oder
anderen Fall dieses Portrat Christi eiDer soteriologischen Per-
spektive geoffnet haben. So babe ich auch die Frage stellen kon-
nell ob die Epistula Lentuli ebenfalls mil diesen Ansichten iibe-
reinstimme und muss nun darauf aufmerksammachen daB nach
clem ersten Eindruck nichts darauf hinwies.Dieses vielleicht etwas
voreilige Urteil mochte ich nun dUTChie folgenden drei Anmer-
kungen revidieren.
Erstens batten die Spezialisten der christlichen Ikonographie
und besondersder Bilder Christi uns schonseit angem darauf hin-
gewiesen daBdie altestender yon ihm existierendenBildnisse fun
chef jung darstellen so etwa 15 oder 20 Jahre all und oft bartlos.
Die christlichen Klinstler folgten in der Tat den Vorbildem heid-
nischer Kunst deren Regeln sic genaubefolgten indem sie Jesus
sei es mil den Zligen eines ungen Hirten meist kriophoros oder
mil den Zligen Orpheus oder Apollos darstellten. In den folgen-
den Jahrhunderten halt man an diesemBild des ungen Jesus est
dessenGrazie gut mil der Beschreibung yon Wundem wie die
wunderbaren Heilungen oder Auferstehungen zusammenpaBte.
Auch wenn man gewaltigere Szenenwie die der Passionoder die
der Kreuzigung darstellenwollte bediente man sich dennochsei-
nes ugendlichen Aussehens.Noch im X. Jahrhundert laBt Hros-
vit yon Gandersheim n ihrem Theaterstlick Callimachw den Apo-
28. Augustinus De Trinitate VIII 7 BA 16 S. 40-43.
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
MlT DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
73
stel JohannesgegentiberAndronicus, dessenEhefrau Drusiana er
auferstehen assenhat, ausrufen Ecce, nvisibilis Deus nobis appa-
ref visibilis in pulcherrimi similitudine juvenis, «Seht bier, del
unsichtbare Gott Wild ftir uns unter den Ztigen eines sehr scho-
DenJtingiings sichtbar »29.Es ist jedoch zu jener Zeit, octeTeden-
falls kurz danach,daB sichdie Ztige Christi verhiirten. Sell Gesicht
drtickt ganzdie zu einem Richter passendeStrenge aus.
Zweitens denke ich, daB diese neue Art der Darstellung Chri-
sti der Entwicklung der Themen der christlichenPredigt olgt. Man
predigt weniger das Heil als die SOnde, o wie man auch weniger
den Erloser lobpreist, als daB man den hochsten Richter anfleht.
Es ist bemerkenswert, daB der Wunder vollbringende Christus,
genauwie der liebenswerte Gute Hirte aus den Kunstwerken ent-
schwindet.Man findet eher Gefallen daran, den am Kreuz die Stra-
fe der Stinden der Menschen erleidenden Christus darzustellen
und den Richter Christus, der yom Stinder vor seinem Gericht
Rechenschaft ordert. Ich bin nicht sicher,daB man darin die pani-
sche Angst des Jahres 1000 sehenwollte, wie es die romantischen
Autoren so gem beschrieben. Es handelt sich meiner Meinung
nach eher um die Folgen einer zweifachen Bewegung. Auf der
einen Seite handelt es sich um eine Art yon Kontextualisierung
der christlichenPredigt, in Worten wie in Bildem, und ihrer Anpas-
sung dUTChie Geistlichen an die verwirrten und schwierigenZei-
ten. Andererseits dagegenkann es sich ebenfalls um die Kritik an
der Feigheit und Pflichtvergessenheiteines gewissenKlerus han-
deln, der, wie die KOnstler n Erinnerung roten, auch Rechenschaft
vor dem Richter, den man nicht tiiuschenkann, wird ablegenmtis-
sen, was ibrigens auf der Linie der gregorianischenReform liegt.
Es versteht sich yon selbst, daB der Epos der Kreuzztige, als man
loszog,die Grabstiitte Christi zu befreien, noch weiter dazuantrieb,
fiber das Mysterium seinesTodes am Kreuz und die Undankbar-
keit der Stinder nachzudenken. Das Bildnis Christi, so wie es
besonders am Kruzifix sichtbar wird, «regt bei seinem Anblick
nicht nUT ie innere Gesinnungdes Menschenan », schreibt m XI.
Jahrhundert der Bischof Gerhard yon Cambrai, sondem es wird
sich auch, spricht Gerhard weiter, in Beziehung auf die Passion
Christi und seinenTod flir uns, so tief « auf dem Hiiutchen unse-
res Herzens eingravieren, daB eder in sich selbst die Schuld sei-
nero Erloser gegentiberanerkennt »30.Dies ist erne Art und Weise
29. Hrosvit, Callimach~ 8, PL 137,1007A.
30. Acta Synodi Atrebatensis14,PL 142,1306C; diese Synode yon Arras
fand 1025 statt. Vgl. I.-C. SCHMITT, L Occident, Nicee II et les images
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J.-N.
PERES
sich selbst n Christus zu sehen,und es gibt gieichzeitig dem Bild
eine Aufgabe. Es ist bemerkenswert, daB dies zu einer Zeit defi-
niert wurde, in der sich die Polemik der Christen gegenliber dem
Judentum entwickelt, das ohne Zweifel die Fleischwerdung des
Messias nicht gelten laBt, und auch der RechtmaBigkeit der Kir-
che und der christologischen Auslegung des Alten Testaments
widerspricht, mit der sich diesebefaBt.
Drittens ware es interessant parallel zur Studie del auBeren
Erscheinung Christi, auch die des Antichrist durchzufiihren. Wil-
helm Bousset am Ende des letzten Jahrhunderts und Hans PreuB
am Anfang des unseren, Jean-Marc RosenstiehlVOletwa dreiBig
Jahren und Bernard McGinn erst ktirzlich, urn our einige zu nen-
Den,haben tibeTdie Texte und Bilder, die den Antichrist darstel-
len, ein Verzeichnis aufgesetzt,daByon del Literatur des antiken
Judaismusbis zur Reformationszeit reichpl. Es ware also unsin-
DigdasThema bier nochmalsganzzu erforschen. ch merke jedoch
an, daB yon den Texten del Rabiner an, die fun dem erwarteten
Messiasentgegenstellen,bis zu den Beschreibungendel christli-
chenMystiker, das Darstellen del Bildnisse des Antichrist im Rah-
men del Soteriologie erfolgt. WenD auch aIle diese literarischen
oder bildlichen Darstellungenuntereinanderganz sichel nicht tibe-
reinstimmen, so gehoren sie doch im Wesentlichen zusammen,
indem sie im Zusammenhang n einem apokalyptischen Kontext
behaupten,daB del Antichrist das Monstrum st, dasdie Menschen
zum Verderb bringt. Es ist in diesemSinne, daB die dargestellten
Einzelheiten seinesAussehensyon symbolischemCharakter sind,
bzw. van esoterischem der astrologischem. uf del anderenSeite,
denke ch, sollte man versuchen n den Bildnissen Christi den sym-
bolischen und esoterischenSinn in jeder Einzelheit del Darstel-
lung zu suchen, Sinn del sich m Guten dem gegentiberstellt, was
du VlIIe au XIlIe siecle », n F. BOESPFLUG . N. LoSSKY Hrg, Nicee II 787-
1987. Douze siecles d images religieuses, Paris: Cerf, 1987, S. 271-301, bzw.
S.287.
31. V gl. W. BOUSSET,Der Antichrist in der Ueberlieferung des Judentums,
des Neuen Testaments und der alten Kirche, Gottingen, 1895; H. PREUB,
Die Vorstellungen vom Antichrist im spiiteren Mittelalter, theologische Dis-
sertation, Leipzig: Hartmann und Wolf, 1906; J.-M. ROSENSTlEHL, Le
Portrait de I Antichrist », in Pseudepigraphes de l Ancien Testament et
Manuscrits de la Mer Morte, (Cahiers de la Revue d histoire et de philo-
sophie religieuses 41), Paris: Presses wllversitaires de France, 1967, p. 45-
60; B. McGINN, «Portraying Antichrist in the Middle Ages », in W. VER-
BEKE,D. VERHELSTund A. WELKENHUYSENHrg, The Use and Abuse of
Eschatology in the Middle Ages, Leuven: Leuven University Press, 1988.
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UNTERSUCHUNGEN 1M ZUSAMMENHANG
MIT DER SOGENANNTEN EPISTULA LENTULI
75
bei dem Antichrist widerwartig erscheint. Ich nehme hier nur ein-
mal als Beispiel die Darstellung der Haare. Der Antichrist wurde
entwederohne Haare oder mit einem mehr oder wenigerscWech-
ten unregelmaBigenHaarwuchs der im allgemeinenyon rotlicher
oder sogar roter Farbe war und mit einem stark behaarten Kor-
per dargestellt. Man denkt dabei sofort an Esau weiter noch an
die Edomiter deren Vorfahre er ist und die sich mit den Moabi-
tern und den Ammonitern gegendas Yolk Gottes yereinten. Die
rote Farbe und gewisseTexte gebensie mit « golden » bzw. «wie
Gold» an32weist auf das Bose und den Tod hiD die beide so oft
aus der Gier nach diesem Metall heryorgehen. Die Gegensatz-
lichkeit wird durch die Beschreibungder Frisur Christi in der Epi-
stula Lentuli noch starker betont : schon ordentlich gekammt mit
locker herabfallenden Wellen und einem Mittelscheitel nach
NazaraerArt. Man konnte auf die gleiche Art zwischenden Augen
des Antichrist und defieD Christi oder den Handen der heiden
usw. ParalleleDziehen. Ich glaube sogar daBes diesegewollte und
yon den Autoren yoll yerantwortete Gegensatzlichkeit st die die
Autoren und christlichen Kfinstler dazu gebracht hat Christus
nicht mehr haBlich und miBgestaltetdarzustellen und sich mehr
und mehr yon der BeschreibungJesajaszu entfernen urn ihn jetzt
schonerund schoner darzustellen m Einklang mit Psalm 45 den
die Epistula Lentuli zitiert. Es ware weiterhin noch interessantzu
untersuchen -aber das ist ein Thema fiber das ch nun nicht mehr
schreibenmochte- wie man nachdemAntike und Mittelalter yor-
bei waren dazu neigt fiber diese fantastischenund sogar fantas-
matischenDarstellungen des Antichrist zu lachenund ihren theo-
logischenSinn oder genauer gesagtden soteriologischenSinn zu
Yergessen as heiBt in welchem Verhaltnis des Gegensatzes r zu
Christus stand. Indem man nun das Monstrum ablehnte lehnte
man auch den Mythos ab und ist dann dazu fibergegangen den
Antichrist nur nochwie einen Menschendarzustellen.Man hat ihn
yermenschlicht.Man hat ihn banalisiert. Hat man damit nicht etwa
auch gleichzeitig denjenigenbanalisiert dessenWidersacherer st
namlich Christus und hat man dadurch nicht den Antagonismus
beider yermindert? Der Christus also der wie er nur noch ein
Mensch ist wenD auch im besteDFalle bestimmt ein beispielhaf-
ter Mensch.
Heillt das nun damit daB es wenn es keinen Mythos mehr gibt
auch keinen Gott mehr gibt?
32. Apokalypse desZorobabel und GebetdesSimeonhen Yochai n J -M.
ROSENSllEHL p. cit. p. 46.
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Ijegis BURNET
Ecole pratique des hautes etudes,Paris
LA PSEUDEPIGRAPHIE, COMMEPROCEDE
LI1TERAIRE AUTONOME
L'EXEMPLE DES PASTORALES
On a souventpretendu que a pseudepigraphie ' etait qu un innocent eu
sur Ie nom d'auteul: 01; l'etude des epurespastoralesprouve qu'il s'agit
d'une veritable technique itteraire. On peut en eIfel y reperer desstrategies
enonciativesdilferentesqui conduisentd'une part Ii rapprocher1 Tm de Tt
et i poser l'autonomie de 2Tm, et d'autre part Ii distinguer deuxpratiques
pseudepigraphiques: 'actualisation I~t 'anachronisme.
It has beenclaimed that pseudepigraphy hould be an innocent play on
the author's name. Yet,a study of the Pastoral Epistles show that it is a
genuine iterary technique.Different enunciative trategies an be picked
out and used either to put 1 Tim and Tite together and to separate2Tim;
and to distinguish between wo pseudepigraphicafpractices actualization
and anachronism.
II etait un temps on l'on pouvait se debarrasser e l'epineux pro-
bleme de la pseudepigraphie-Ie fait d'ecrire sciemmentsons e
nom d'un autre -avec une parade elegante: on pretendait qu'au
contraire des modemes, qui out defini meticpieusement es droits
et les devoirs attaches a la propriete intellectuelle1, les Anciens
* Rep)s Burnet prepare un doctoral a la sectiondes sciences eligieuses
de l'Ecole pratique des bRutesetudes.
L Cette notion juridique existe en Angieterre d~puis Ie Statuteof Anne,
datant de 1709,qui reconnaissait aux auteurs d'ouvrages deja edites «Ie
droit exclusif de les imprimer a nouveau pendant une duree de vingt-et-
un ans »; en France,depuis 1777,une loi met fm aux droits du « libraire-
editeur» si angoissantspour Diderot ou Voltaire, au profit de l'auteur.
Actuellement prevaut en France la loi du 11 mars 1957 sur la propriete
intellectuelle, modifiee par la loi du 3 juillet 198 et integre dans Ie CPI
(Code de la propriete intellectuelle) du 1 er uillet 1992.Le principe fon-
damental du droit d'auteur est pose par les deux premiersalinea de l'ar-
ticle L. 111-1 du CPI: «L'auteur d'une reuvre de l'esprit jouit de cette
reuvre,du seul ait de sa creation, d'un droit de propriete exclusif et oppo-
Apocrypha 11, 2000,p. 77 -91
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BURNET
n auraient eu qu une idee fort vaguede la paternite litteraire. Cetteidee,
qui remonte a F. C. Baur, est devenue a doxa de toutes lesetudes
jusqu au milieu du xxe siecle.Des travaux recents3 nt remis
en causecette bonne conscience,et l on peut desormais assignerdes
intentionnalites a cette pratique. Sait-on pour autant commentIe
phenomene etait interprete dans Antiquite? Jusqu a present,les
reponsesse sont ocaliseessur a psychologied auteur, sanss at-
tacher a considerer a pseudepigraphie comme phenomene itte-TaiTe
a part entiere. On se borne en effet a la definir comme unsimple
transfert de nom entre un auteur reel et un auteur decla-re4,
sansconsequenceitteraire d aucune sorte. L etude precisedesPastorales,
dont tout Ie monde s accordea penserqu elles ne sontpas
de l apotre Pauls, montre que ce procede revele une certaine
sable a tous. Ce droit comporte des attributs d ordre intellectuel et oral,
ainsi que des attributs d ordre patrimonial. » L reuvre est dite « prote-
geable» des loTS u elle est empreinte de la personnalite de son createur
(notion juridiquement assez loue), ce qui supposequ elle ait pris forme:
seules a composition et l expression sont protegeespar Ie droit d auteur
(et non les dees). En ce qui conceme notre problematique, on notera une
disposition tIeS nteressante: « La qualite d auteur appartient, sauf preu-
ve contraire, a celui ou a ceux sous e nom de qui l reuvre est divulguee ».2.
Friedrich Christian BAUR,Die sogenanntenPastoralbriefe desApostels
Paulus aufs neuekritisch untersucht,Stuttgart, 1835.3.
Ils ont ete resumesavec pertinence dans e premier chapitre de David
G. MEADE,Pseudonymityand Canon,Thbingue, 1986,p.1-15.
4. Ainsi pour MEADE, op. cit., p. 1: « A text is pseudonymous when the
author is deliberately identified by a name other than his own ». BROX,
qui a realise une synthese amais encore depasseesur a pseudepigraphie
dans Fa/sche Verfasserangaben. ur Erkliirung der friihchristlichen Pseu-
depigraphie, KBW Verlag, Stuttgart, 1975, a definit ainsi p. 11 : « Chris-
ten den damaligen Zeit literarische Produkte [...] wissentlich mit irrefiih-
renden Daten im Umlauf gebracht haben, oder in anderen Fallen, daB
diese Schriften irrtiimlich unter falschen Namen geratensind und an sich
lange beziiglich ihrer Herkunft geirrt hat. Man spricht von Pseudepigra-
phie (falscher Zuschreibung)». SPEYER,ntin, qui fut Ie premier a demon-
tIer de maniere tIeSconvaincanteque a notion de propriete intellectuelle
existait chez es Anciens dans son article fondateur « Religiose Pseude-
pigraphie und literarische Falschung m Altertum », ahrbuch fUr Antike
und Christentum,Aschendorffsche Verlagsbuchhandlung,MUnster, 8/9,
1965/1966, ecrivait au debut de ce meme article (op. cit., p. 88): « Ais
Pseudepigraphen ind diejenigen Schriften des Altertums zu betrachten,
die nicht von den Verfassem Stammen,denensie duTchTitel, Inhalt oder
Uberlieferung zugewiesen ind ».5.
Depuis F. ScHLEIERMACHERUber die sogenanntenerstenBriefe des
Paulus an Timotheus,Berlin, 1807) et surtout F. BAUR Die sogenannten
Pastoralbriefe desApostels Paulus aufs neuekritisch untersucht,Stuttgart,
1835), a tendance generale a ete de considerer que Paul n etait pas leur
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LA PSEvPEPIGRAPHIE OMMEP,OCEDE
LITrERAIRE AUTONOME: L'EXEMPLE DIf:S PASTORALES
79
complexite, et que l'on ne sauraitcaracteriseres Pastorales omme
une simple imitation de l'reuvre paulinienne. Du coup, il s'avere
bien difficile de pretendre que la pseudepigraphie n'est qu'un
simple echangede nom.
Avant de commencer 'analyse, on definira rapidement ce que
l'on entend par« pseudepigraphie».
(1) La pseudepigraphien' estpas a tausseattribution due aI' exe-
gese rop hative des emps passes, ui fit identifier desauteursavec
des extes, soil que res textes fussenteux-memesanonymes, 'est-
a-dire depourvus de nom d'auteur (comme c'est Ie cas des evan-
giles6,de Hb, de Un); soil que ces extes ne fussent pas rattaches
clairement a un auteur (comme c'est e casde 2-3Jn dont l'auteur
se designe comme l'ancien). Ce n'est qu'une volonte de systeme
tardive qui fit organiser ces recits en corpus (l'Evangile tetra-
morphe) ou qui legrattacha un peu artificiellement aux corpuspre-
existants; Ie corpus ohannique pour 1-2-3Jn, e corpus paulinien
pour Hb.
auteur. La synthesedes argumentscontre l'authenticite a ete realisee par
HOLTZMANNDie Pastoralbriefe kritisch und exegetischbehandelt,Leip-
rig, 1880)qui resume es principales critiques: leg Pastorales epresente-
raient une recherche d'un moyen erme entre des endancesgnosticisantes
et des enseignementsudeo-chretiens assorti d'uI) encouragementa l'in-
stitutionnalisation de l'Eglise. Pour H. HOLTZMANN,n se trouve face a
un paulinisme affadi, « catholicise ». M. DIBELIU~,qui a ete revu par H.
CONZELMANNDie Pastoralbriefe,Tubingen, 3 ed., 1955) et qui presen-
te Ie sammetde l'exegeseallemandeparle me-me e «christianisme bour-
geois» (christliche Burgerlichkeit). Malgre l'ouvrage de C. SPICQ Les
Epitres pastorales, Paris, 4 ed., 1969), demiere synthese monumentale
defendant 'authenticite des Pastorales,aus s'accordentales penser nau-
thentiques. Ainsi pensentY. REDALIE Paul apres Paul, Geneve, 1994)et
Lorenz OBERLINNERDie Pastoralbriefe, Herders theologischer Kom-
mentar zum neuen Testament, t. IX: Erster Timotheusbrief, 2/1, 1994;
Zweiter Timotheusbrief, /2,1995; Titusbrief,XI, 2/3, 1996).Pour une vue
d'ensemble des Pastorales,on se reportera a l'ar1Iiclede C. SPICQ ans e
SDB, toujours d'actualite (Art. «Pastorales», Supplement u Dictionnaire
de la Bible, Paris, asc. 36,1961), pour un survol de la recherche des cin-
quante dernieres annees,a l'article de W. SCHENK<Die Briefe an Timo-
theus I und II und an Titus (Pastoralbriefe) in der neueren Forschung
(1945-1985) , Aufstieg und Niedergangder romischenWelt, I, 25.4,New-
York, 1987).
6. On retiendra Ie cas particulier du corpus Lc-Ac, puisque Ie texte est
anonyme, mais adressea un destinataire, Theophile. Pourrait-on parler
d'une pseudonymie du destinataire?
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80
R. BURNET
(2) La pseudepigraphie n'est pas non plus la pseudonymie,qui
consiste a attribuer des ecrits a un personnage tellement Iegen-
daire qu'il devie t evident qu'il s'agit d'un nom d'emprunt.
On reserveradoJIc e nom de pseudepigraphe un texte qui s'at-
tribue lui-meme explicitement a un auteur different de l'auteur
reel, mais qui pou~ait en etre I'auteur avecune certaine vraisem-
blance. La pratiquf;'; seudepigraphiques'affirme donc comme un
deDid'auctorialite1 et une tricherie sur 'autorite8 de l'auteur« puta-
tif ».
Examen de la recherche sur l'interpretation de la
pseudepigraphie
A
1. La pseudepigraphietait bienper~ue omme elle...
La premiere rewnse apportee a la pseudepigraphieconsistaita
dire -nons l'avons deja mentionne -que l'auteur n'etait pas res-
ponsable de son <tuvre et que l' Antiquite ne disposait pas de la
notion de propriet~ intellectuelle. Ainsi, la pseudepigraphien'etait
TieDd'autre qu'une innocente pratique d'attribution de textes;
celle-ci n'interven
~
it ni sur Ie contenu du texte, ni sur a figure de
l'auteu~. Tout au ~us. rofitait-on de l'aura d~unauteur e~ i~a~t-
on partl de la con lchon, repandue semble-t-ll dans ' Anhqulte9,
que l'anciennete 'un ouvrage prouvait sa qualite. Cette theorie
va de pair avecun~ vision optimiste du monde intellectuel antique,
pour lequelle contenu primerait la forme, ce qui est dit l'empor-
terait sur celli qui~edipo. D'ailleurs, leprobleme ne rentre-t-il pas
sons e chef du« m
~ nsonge egitime» defendupar Platonll et repris
par Philon et la p tristique sons Ie theme du medecin qui sauve
son malade par u mensonge12?
7. On nommera« au~torialite », en anglais autorship, e fait d'etre l'auteur
reel d'un ecrit.
8. On definira «autqrite» la force enonciative liee a un nom d'auteur. II
s'agit en quelque s04e de« l'aura» prestigieuseattacheea un auteur. Sur
cette question, voir ~'enquetede Gerard LECLERC, istoire de l'autorite,
Paris,1996.
9. Voir BROX,of. ci4, p. 52Yqq.
10. Ibid., p. 78.
11. Politique, II, 382~. ,
12. Voir Ie passageC
~ eux releve par Bremer (dansE. BREHlER, es Idees
philosophiques et rel.gieuses ePhilon d'Alexandrie, Paris, 1951,p.41) oil
Philon prend pret xte du mensonge d'Abraham a Abimelek pour
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LA PSEUDEPIGRAPHIE COMME PROCEDE
LrITERAlRE AUTO NOME: L'EXEMPLE DES PASTORALES
81
Pourtant, si cette innocence etait tellemel1lt arfaite, pourquoi
trouve-t-on des exemplesde faux destinesa discrediter un indivi-
dul3? Pourquoi Platon lui-meme est-il accuse de plagiap4? w.
Speyer,dans e debut de sonarticle de 196515, ontre bien que l'on
pent faire remonter la notion de propriete intellectuelle, geistige
Eigentum,jusqu'a Hesiode16 t que a fondation d'une sciencephi-
lologique par Callimaque autour de a bibliotheque d' Alexandrie17
defendre Ie mensonge : Illud ramen, omnia vere loquere, abhorrentis a
philosophia, et ignorantes mandatum est. Nam si hominum vita optime se
haberet nulla accepta falsitate, congruum foyer de omnibus apud omnes
verum loqui: sed quia fictio malignitatis velut in theatro acquisitam habet
et superbiam velatam una cum artificio, artis est opus saptienti multiplicis,
ut prosit, similitudinem pr{£ferens ironia utentium, qui aliud dicunt, et aliud
agunt, ut salvent quos possunt. «< Cependant, «dis toute la verite », c'est
un ordre qui n'a pas l'amour de la sagesse, et d'un ignorant. Car, Ii sup-
poser la vie des hommes bien dirigee, n'accueillant rien de mensonger, il
faudrait dire la verite sur tout et Ii tous. Mais, puisque Ie faux-semblant,
comme au theatre, est Ie maitre, et que Ie mensonge sert de rideau Ii la
verite, Ie sage a besoin d'un art multiple, grace auquel il rendra service, Ii
l'imitation des hypocrites, qui disent une chose et en font une autre afin
de sauver ceux qu'ils peuvent.» Qu{£stiones in Genesim, IV; 69, ed. Ch.
MERCIER et F. PETIT, (Euvres de Philon d' Alex~drie 34B, Paris, 1984.).
Voir egalement CLEMENT D' ALEXANDRIE (Stromate VII, 9, 53, 2) qui dit
que aATjefj TE yap <l>povEI alia Kai CLATj8EUEl, rAT')VEl 111') rOTE EV 8Epa-
TrElaC; IlEPEl, Ka8aTrEp laTpOC; TrpOC; voaOUVTac; tTri aWTTjplq TWV Kall-
V6VTWV, /JEOOETal 1\ /JEfi8OC EpEI KIlTa TOUC; ad<plaTaC; «< Car il pense
vrai et dit vrai tout a la fois; Ii une exception pres cependant: en cas de
going Ii donner, Ii l'instar du medecin, envers leg malades, pour Ie salut de
ses patients, peut-etre alors mentira-t-il, ou plutot, pour parler comme leg
sophistes, dira-t-il un mensonge », ed. et trad. d' A.LE BOULLUEC, Sources
Chretiennes n° 428, Paris, 1997).
13. BROX, op. cit., p. 98.
14. STEMPLENGER, Das Plagiat in del' griechischen Literatur, Heidelberg,
1912, p. 14-16. Le cas est etudie par Luc BRISSON dans Monique DIXSAUT
(ed.),« Les accusations de plagiat lancees contre Platon », Contre Platon
I, Paris, 1993.
15. Gp. cit., p. 91-95.
16. A'( vu Tro8' "Halo80v KaAT')v E8l8a~av aol81'), «< Ce sont elles qui Ii
Hesiode apprirent un jour un beau chant »), Theogonie, v. 22.
17. On connait l'importance de l'reuvre de Callim~que, qui rut l'inventeur
du catalogue de bibliotheque (les Tri.vaKEc;) et des signes diacritiques. II
rut egalement Ii l'origine d'une classification des reuvres, fondeesur des
termes comme V06EUElV, TrapaxapaTTElv, Klj38TjAEUElV, pq8loupYElv, qui
rut largement reprise, y compris par leg Peres de l'Eglise. Voir C. MEILLER,
Callimaque et son temps, Lille, 1989. II est piquant de remarquer que la
Bibliotheque rut a la fois Ie lieu de la chasse au faux et celui de la conser-
vation du faux; Ie Lagide payant bien, il etait tres interessant de lui vendre
une nouvelle lettre de Platon ou un nouveau dialogue d' Aristote.
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R. BURNET
prouve a l evideQce que la pseudepigraphie etait bien reperee
comme telle. D ailleurs, Ie concours d ingeniosite mis a realiser
des faux, doni certains ne seront detectes qu a l epoque contem-
poraine, n est-ellepas la meilleure preuve que la pseudepigraphie
etait bien considereecomme un faux?
2. ...mais Desemble pas affecter les textes
Or res decouvertes aites depuis es annees60 ne semblentpas
avoir affecte de nianiere profonde les etudes antiques. En effet,
au lieu de cherchet a evaluer a part de decalageentre la figure de
l auteur reel et cehe de l auteur putatif, on a pense a pseudepi-
graphie en termes de simple substitution de nom d auteur, reve-
nant en quelque sorte a la situation precedente. Au lieu de faire
de l analyse litter~ire, on a fait de la psychologie. En effet, toutes
les explications d~ phenomene ont evacue a part de creation spe-
cifique du faussair~et ont fait du pseudepigraphe ne sorte de sub-
stitut transparent pe l auteur avoue. Quoique etant conscientde
la notion de propI[iete intellectuelle, il cqntournerait la difficulte
en s estimant e reJais idele de la penseede l auteur. Le dispositif
enonciatif serait I}lors Ie suivant: l auteur reel serait tellement
proche de l auteu~ putatif que l on pourrait legitiment confondre
les deux nstances~t toute la recherche s estdonc consacreea us-
tifier cette transp~rence.Comme on va Ie voir, c est Ie modele de
l imitation qui a finalement servi a comprendre la pseudepigra-
phie.
(1) Premiere explication: justifier la transparencepar la longue
frequentation avef Ie maitre. L auteur reel exprimerait la pensee
de l auteur putatif car ill aurait recueillie de sespropres ensei-
gnementsoraux. «:ette theorie est nspiree de ce que l on sait de
la pratique deseco~es hilosophiquesgreco-romaines, il les eleves,
apres a mort du ~aitre, font paraitre sous son nom sesenseigne-
ments non encore publies. Dans Ie cas de Paul, par exemple, les
chercheurs ont l hyPothesed une «ecole paulinienne »18 ui aurait
fait paraitre les e~ns de l apotre disparu dansdes epitres comme
Ep ou Col.
(2) Secondeexplication: l enthousiasme.L auteur reel peut par-
ler sous e nom de . auteur putatif, car il a Ie sentiment d exprimer
la «verite » dont 11auteur utatif etait Ie depositaire, et dont il est
18. Voir les theories ~e Hans CONZELMANN<Paulus und die Weisheit »,
New TestamentStutties, 12, 1965-66,p. 6-7) et de G. BORNKAMMPaul,
Paris, 1974).
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LA PSEUDEPIGRAPHIE COMME P~cEDE
LnTERAIRE AUTONOME: L'I~XEMPLE DE~ PASTORALES
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a son tour Ie garant. Cette theorie va de pair avec une theologie
de I'inspiration et repose sur a maxime suivante que ce soit par
I'un ou I'autre auteur, c'est e meme esprit, a meme Muse, qui s'ex-
prime. L'auteur se considere comme un simple instrument de la
divinite19.
(3) L'auteur reel, entin, se considerecomme e depositaire de la
tradition de I'auteur putatif. C'est ce que pretend Meade2°,que
reprend, avec quelques modifica1:ions, .-D. Kaestli21.D. Meade,
qui consacreune grande partie de son ouvrage a la pseudepigra-
phie vetero- et intertestamentail:e, montre qu'il y a une grande
continuite entre les pratiques juives et les pratiques chretiennes.
Empruntant aux hermeneutesallemands,et en particulier a H.-G.
Gadamer21e concept de Vergegenwiirtigung«< ctualisation» au
gensde « rendre present », «presentifier»), il prouve la continui-
te de pratique entre un Deutero-Isaie ecrivant plusieurs siecles
apres la mort du prophete Isaie et I'auteur des Pastorales,redi-
19. C'est a thesedefenduedans a seconde artie de 'article de W. SPEYER
(op. cit.) qui prend en exemple Ie ca~; e l'inspiration des muses en s'ap-
puyant sur la Theogonied'Hesiode qui se lit EVE:IjIEuaavovaal 'EAlKW-
vla c; ainsi que sur es reflexions du :>hedre ur a @Ela avla (244a-245a)
et du Ion sur l'etat de Eveooolaa~oc ~719c). peyer it clairement ailleurs :
«Fahrt die Vorstellungder Ergriffenheit weiler zu einer Identifikation von
Schriftstellerund vorgestelltemnspirie~renden eist,derein Gott,ein Engel,
ein gottgebliebterWeiser der Vorzeit .I'einkann, so entstehtdie «echte eli-
giose Pseudepigraphie . In diesemFtlll versinkt der menschlichenVerfas-
serganz in der hn inspirierenden ersonalenMacht» in « Fiilschung,pseu-
depigraphischereie Erfindung und « echte eligiose Pseudepigraphie »
in K. v. FRITZ (ed.), Pseudepigrapha , Vandreuvre-Geneve,1972. Kurt
ALAND, dans son article fondateur 1[« he Problem of Anonymity and
Pseudonymity n Christian Literatur(~ of the First Tho Centuries », Jour-
nal of Theological Studies,12/1, 1961, epublie dans The Authorship and
Integrity of the New Testament, ondres, 1965)avait deja applique cela au
cas du Nouveau Testamentet de sa heologie de l'Esprit Saint. Saconclu-
sion est savoureuse: « In my opinion we do not have to explain or to jus-
tify the phenomena of anonymity or pseudonymity n early Christian ite-
rature. It is the other way round: we need an explanation when the reaJ
author gives his name », ibid., p. 8.
20. David MEADE,Pseudonymityami Canon,Thbingue, 1986.
21. Jean-Daniel KAESTLI, Memoire et pseudepigraphiedans e christia-
nisme de l'age post-apostolique », Rt~vue e Theologieet de Philosophie,
125,1993,p. 41-63. L'idee de memoire provient directement de J. ZMI-
JEWSKI, Apostolische Paradosisund Pseudepigraphie m neuen Testa-
ment », Biblische Zeitschrift, 23/2, 15179,.161-171.
22. Hans-Georg GADAMER,Verite et Methode (Wahrheit und Methode),
trad. Fruchon, Grondin et Merlio, ]:>aris, 996; voir essentiellement a
secondepartie.
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R. BURNET
geant apres Ie martyre de l'apotre Paul. Ainsi est-il capable de
decouvrir une «structure commune» au canon, qui s'appuie sur
un aspect de revelation (Ie message du grand homme) suivi par
une tradition. Cornme Ie fit D. Meade: «La reproduction de cette
structure de revelation-tradition, couplee avec la forte personna-
lisation des traditions kerygmatiques dans les ministeres de Pier-
re et Paul, permirent aux auteurs des Pastorales, de Ep et de 1-2P,
de repondre aux besoins pressants de leurs communautes grace a
une Vergegenwiirtigung, une nouvelle actualisation des traditions
prescriptives de Pierre et Paul »23.J.-D. Kaestli, quant a lui, plai-
de pour une actualisation du message des apotres par des redac-
leurs qui veulent repondre aux besoins de leurs communautes.
Aussi releve-t-ill'importance du champ semantique du souvenir
(repetition des verbes comme ~VT](J61lVaL)ans ces epitres.
Le point commun de ces theories est qu'elles cherchent avant
tout a doDDer une explication des motifs de la pseudepigraphie.
Autrement dit, toutes cherchent a expliciter la psychologie du faus-
saire, ses ntentions. Aucune n'envisage Ie phenomene comme un
procede litteraire, qui laisse a l'auteur du faux une importante
marge de manreuvre au lieu de Ie cantonner dans Ie role du pla-
giaire. Et pourtant, soil qu'il choisisse de disparaitre derriere la
figure dont il fait usage, soil qu'il cherche a l'utiliser a ses propres
fins, I' auteur reel dispose d 'un important champ d' action qu'it s' agit
d'etudier dans sa positivite.
La pseudepigraphie comme creation litteraire
l'exemple des Pastorales
B.
Pour verifier l'importance de
de ses choix, il faut analyser un
rales. En lisant le Pastoralesd'
on ne peut etre que frappe par
que l'on peut relever. De fait, J.
23. «The reproduction of this «pattern» of revelation and tradition, cou-
pled with the strong personalizationof the kerygmatics raditions in Peter's
and Paul's ministries made it possible for the authors of the Pastorals,
Ephesians,and 1 and 2 Peter to address he pressingneedsof their com-
munities by Vergegenwiirtigungor a new actualization of authoritative
Pauline and Petrine traditions. » D. MEADE,Pseudonymityand Canon,
Tubingue, 1986,p. 1192.
24. Jerome MuRPHYO'CONNOR, 2Timothy contrasted with 1 Timothy
and Titus », RevueBiblique, 98, 1991,p. 403-418.
exprimee dans a valeur
corpus; tentons celui des Pasto-
un simple point de vue litteraire,les
differences manifestesde ton
Murphy O'Connor24, e fondant
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LA PSEUDEPIGRAPHIE COMME PROCEDE
LITrERAIRE AUTONOME: L'JEXEMPLEDES PASTORALES
85
sur les travaux de M. PriOr25, montre que l'on pouvait trouver
une trentaine de differences entre 2Tm et les autres epitres. Ces
differences peuvent etre classees ousplusieurs chefs: differences
dans l'adresse, difference dans Ie langage christologique, diffe-
rences de conception du ministt~re de l'Evangile, difference de
caracterisationde l'Evangile, dift'erences,entin, dans 'apprehen-
sion des adversaires. Fort de ces elements, il conclut que 2Tm
semble se rapprocher des epitres pauliniennes, sansqu'il soit pos-
sible de decider de son authenticite. En tout etat de cause, l ne lui
semble pas possible de voir un auteur unique a l'reuvre dans es
Pastorales26.
Ces differences vont dans e setlsde la these d'une positivite de
la demarchepseudepigraphique,puisque 'on voit que la confron-
tation a un meme probleme -comment ecrire apres a mort de
Paul? -engendre des strategiesdifferentes. L'analyse du corpus
1Tm- Tt d'une part, et celui de 2TI1rl 'autre part, si elle s'avereposi-
tive, permettra donc de complexifier la vision que l'on peut avoir
de la pseudepigraphie. Pour proc:edera cette analysede maniere
rapide, on adoptera les techniqlli~sd'analyse itteraire, en exami-
nant tour a tour la situation d'in1erlocution, Ie temps, es acteurs
secondaires.
1. La situationd'interlocution
(1)« Paul» tout d'abord sepresente de maniere differente dans
les deux corpus. Dans 2Tm, comme dans es autres epitres (voir
en particulier lCo 1, 1 et 2Co 1, 1), it se definit a partir de son appel
a l'apostolat, resultat d'une ab~:traite «volonte de Dieu ». On
retrouve line presentation coutulniere de l'apotre. Dans 1Tm- Tt,
il en va autrement. La dignite apostolique est ondee sur un man-
dat divin quasiment administratiJ'. I est en effet provoque par un
veritable «ordre» (KaT' ETTlTayTJV,Tm 1, I;Tt 1,3). Le mot, qui
tend a exclure toute interpretation subjective de la mission, reduit
en quelque sorte la marge de manreuvrede Paul: si l'on pent resis-
M. PRIOR,Paul the Letter-writer and the Second Letter to Timothy,
Sheffield, 1989.
26. « It does not seempossible that 2 Tim should have beencomposedby
the author of 1 Tim ant Titus. There have been hints that 2 Tim is more
Pauline than either 1 Tim or Titus, but this does not imply that Paul was
in fact its author. What it does mean however, s that the authenticity of
2 Tim must be debated n isolation from that of 1 Tim and Titus. », op. cit.,
p.418.
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R. BURNET
ter a l'appel de Dieu, comment pourrait-Qn contrecarrer un de ses
ordres? Dans Tt, d'ailleurs, cet ordre estprecise: il s'agit d'ame-
neT es elus de Dieu a une sorte d'orthodoxie marquee par la foi,
la connaissance e Dieu et la piete27.
La question du mandai est en outre intimement liee a celIe de
la vocation -Ie « chemin de Damas » ~ or, dans 1Tm, la liaison
est aite de telle maniere qu'elle se chargede disculper 'apotre de
ses allies anterieures. « Paul » a cette phrase plutot etonnante : « l
m'a ete fait misericorde, parce que 'ai agi par ignorance, n'ayant
pas la foi »28.Non seulement a conduite fautive est causee par
l'ignorance, mais cette ignorance meme est la cause de la grace.
«Paul» poursuit l'operation de statufication puisqu'il s'erigeensui-
te en prototype et en parangonde la grac~:« C'est pourquoi il m'a
ete fait misericorde pour qu'en moi Ie premier, e Christ Jesusmon-
trat sa otale patience,comme exemple P()ur ceux qui allaient croi-
re en lui, en vue de la vie etemelle »29. 'impression generale qui
sedegagede cette auto-presentationde« Paul» estdonc qu'il s'agit
d'une figure idealisee, magnifiee, mais doni la profondeur psy-
chologique n est pas apparente. «Paul» est davantage un presti-
gieux porte-parole qu'un homme veritable.
La figure de Paul est bien differente dans 2Tm. Alors que la
souffrance et la tribulation soot parfaitement absentesde l'en-
semble ITm-Tt, en 2Tm, Paul est un apotre qui connait l'epreuve
(2Tm 1, 12), qui est en prison (2Tm 1, 16; 2, 9), qui envisage a
mort et Ie martyre (2Tm 4, 6). C'est un homme qui se dit aban-
donne de tOllS 2Tm 4, 16).11est un homme pieux (2Tm 1, 3). Bref,
c'est un homme qui possedeune certaine ndividualite, par ailleurs
conforme a ce que l'on sait du Paul des epitres authentiques.
(2) On peut observer Ie meme contraStedans a figure de l'in-
terlocuteur. Dans 1 Tm et Tt, les deux destinatairesconnaissentun
traitement rapide. L'un et l'autre soot qualifies d'enfant. Timothee
estgratifie de titres ires generaux disciple fidele (4, 6), homme de
Dieu (6, 11). De lui on apprend qu'il a ete intronise par un colle-
ge de presbytres (4, 14), qu'il est d'un age eune (4, 12) et qu'il est
de sante fragile puisque Paullui recommande de prendre du vin
27. naiJAoc 80iJAoC eEOiJ, a1TOUTOAOC E' I T]UOU XPlUTOiJ KaTa. 1TlUTlV EK-
AEKTWV Kat E1TlYVUXJlVaAT]eElaC Tfic KaT' EOOE~Elav. Remarquons au
passagequ'il n'est plus ici question de I'universalite paulinienne, puisque
l'on retrouve Ie concept des elus, es EKAEKTOl.
28.'HAE1']9 lV, OTl ayvoWv E1TOlT]Ua EV a1TluTlC; : 1Tm 1, 13).
29.' AAAa. 8la. TOiJTO liAE1']9 lV, lva EV EliOt 1TpWT(jJEv8El~Tal XPlUTOc;
'1 T]uoiJc; Tl'JV d1Tauav l1aKpoeUlilaV, 1TpOC intOTv1TwUlV TWV I1EAA6vTWV
1TlaTEVElV E1T' aiITtiJi ELc CW1']V aLwvlov (1TmI1, 16).
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LA PSEUDEPIGRAPHIE COMME PROCEDE
u1TERAIRE AUTONOME: L'EXEMPLE DES PASTORALES
87
(5,23)3°. Tite re~oit un traitement encore moins profond: il se
borne a incamer la liaison entre enfantement et foi puisqu'il est
caracterise de « chef enfant dans la foi commune» (Tt 1, 4).
Dans 2Tm, Timothee re~oit Ultl traitement different. Timothee
est Ie digne rejeton d'une famille de foi, doni les figures sont celles
de la grand-mere LoIs et de la mere Eunice (2Tm 1, 5). La presence
de ces noms, en particulier la mention de la grand-mere laisse a
penser que la foi doni il est question est bien une foi juive31.
D'ailleurs, on connait Timothee dlepuis es Actes des Apotres, doni
on dit bien qu'il est « fils d'une femme juive et d'un pete grec »,
(Ac 16, 1). Timothee serait donc Ila igure de la conversion et prou-
verait que l'on pent passer de l'excellence dans la foi juive a l'ex-
cellence dans la foi chretienne.
Car T1lllothee est presente COIrlDlea perfection chretienne. Dis-
ciple par excellence, Timothee l est car il a longuement suivi son
maitre et a recueilli son enseigltlement, Ie texte dit « ecouter »,
clKOUW« Ce que tu as entendu de: moi (TlKOUaaC;rap' E~OiJ) ar de
nombreux temoins » (2Tm 2, 2) et « Prends exemple des saintes
paroles que tu entendis de moi 61Kouaac;»> 2Tm 1, 13). Au COUTS
d'une narration oil il evoque une partie du trajet present dans Ac,
Paul rappelle sa fidelite inebranlable :
Toi, tu as suivi fidelement mon e:nseignement, a conduite,mon
projet, ma foi, ma patience, mon amour, ma perseverance,eg
persecutions, eg souffrances qllle 'ai subies a Antioche, a Ico-
nium, a Lystres. (2Tm 3,10-11).
Disciple privilegie de Paul, Timothee s'affirme egalement
comme un chretien accompli puisqu'il a re~ude l'Esprit une fonc-
tion particuliere dans la communaute (2Tm 1, 6) par l'interven-
tion de prophetes (2Tm 4, 5). P:aulet les anciens de l'endroit lui
imposerent alors les mains (2Tm 1, 6). Malgre cette excellence,
c'est une figure fragile, car it est eune. Jeune, l peut etre confron-
te aUKpassionsde la jeunesse 2Tm2, 22 : «fuis les passionsde la
jeunesse»); on est oin despreoc<:upationse 1Tm qui etaientd'au-
torite (1 Tm 4, 12: « que personne ne meprise ta jeunesse»). Mais
cette fragilite et celie jeunesse ont de Timothee Ie parfait repre-
30. On sait que Ie vin etait considere comme medicament par l' Antiqui-
te (voir l'article d' Andre TCHERNIA.,L'Archeologue et Ie viticulteur »,
L 'Histoire, n° 241,mars 2000,p. 78-83),ce qui n'exclut pas une allusion a
un ascetismegnostique.
31. N. BROX, «Zu den personlichen Notizen in der Pastoralbriefe »,
Biblische Zeitschrift, 13/1, 1969,p. ~r6-94.
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88
R. BURNET
sentant des nouvelles generations de chr~tiens, jeunes et un pen
chancelants dans leur foi.
A la dissemblance des emetteurs correspond celIe des destina-
taires. Timothee et Tite dans 1 Tm- Tt fonttionnent plutot comme
des relais faciles do lecteur: ils n'ont pas de caracteristiques ires
definies, si bien que chacun pent se reconnm tre, ils font figure de
simples destinataires. Le Timothee de 2Tm, au contraire, possede
un caractere propre, il a une existence en $oi. Aussi se trouve-t-on
face a deux situations de communication ires differentes. L'une est
une sorte de dialogue plat supporte par deux figures plutot pales,
l'autre est une veritable communication 011es contours de l'emet-
tenT et du destinataire sont precises avec force et meticulosite.
(3) La composition des lettres vient renforcer celie impression.
1 Tm et Tt sont composees comme une sorte de catalogue de
recommandations soudees par des «chevilles » metadiscursives
doni Ie role est de doDDer une evaluation precise de l'importance
des differents commandements. Aussi nefaut-il pas s'etonner de
rencontrer une serle de verbes a la premiere personne qui expri-
ment la volonte (2, 1 llapaKaAw; 2, 8 & 5, 14 ~ovAo~al; 2, 12 OUK
ETTlprnw), de verbes a l'imperatif (passim: 1 Tm 4, 6 TTapal OU 4,
7 yv~va(f 8£ ufavTov; 4,13 TTPOUfXf; , 14 ~l'] ci~EAfl), de la clau-
sule TTlUTOC) AOYOClTm 1,15; 1Tm 3,1; 1Tm 4,9; 2Tm 2,11; Tt
3,8) qui fonctionne quasiment comme une instruction technique,
tant elle est particuliere aux Pastorales, et d'autres formules de
rappel32. Les passages de tournure persohnelle sont donc relati-
yemeni rares33 et servent plus a entretenir une fiction de commu-
nication qu'a la fonder.
Au contraire, en ce qui concerne 2Tm, il est impossible de dis-
cerner avec precision les passages de recommandations. La lettre,
du coup, semble etre d'une seule venue, sans presenter de failles.
Tout est continuo
32.1 Tm 5, 7 Kat TaUTa 1Tap<l'Y'YEAAE; Tm 6, 2 TaiJTa 8t8aUKE Kat 1Tapa-
KaAEl ; Tt 2, 15 TaUTa AaAEl Kat 1TapaKaAEt Kat EAE'YXE ~ETa 1Ta<JT1t; 1Tl-
Taoyi'jt;; Tt 3, 81TEpt TOVTWV f30VAo~at UE 8laf3E:f3aloiJa8al.
33. ITm -1, 1-2: Adresse. -1, 3a demande de rester a Ephese. -1, 12-16: Paul,
temoin de la grace -1, 18-19: avertissement a TlInothee -1, 20: condamnation
d' Alexandre et d'Hymenee -2, 6 Paul se presente comme apotre -3, 14: pour Ie
long temps -4, 6: l'attitude demandee a TlInothee -4, 11-16: conseils a Timothee
5, 23 : nouveau conseil : prendre du vin -6, 11-12 : resume I : prendre soin de soi -
6, 20 : resume n : garder Ie depot
Tt -1,1-4: adresse -1, 5: rester en Crete -1,14: exhortation a la fennete -2,1 :
saine doctrine -2, 15: rappel de l'attitude -3,3: l'ancienne conduite -3,8:
demande de fennete -3, 12-13: projets -3, 15 : salutations
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LA PSEUDEPIGRAPHIE COMME PROCEDE
LI1TERAIRE AUTONOME: L'EXEMPLE DES PASTORALES
89
2. Le temps
Remarquons egalement e trai1:ementeserve au emps. 2Tm est
nettement inscrite dans la chronologie paulinienne. La situation
de Paul sembleclaire: it est en priisona Rome (1, 17) et esperevoir
Timothee avant l'hiver (4,21). A.uparavant, t donne des nstruc-
tions concretes a son disciple comme celIe d'aller chercher son
manteauet sesparcheminsa Troas 4,12).11se souvientd'un temps
oil il parcourait l' Asie Mineure, accompagnede son disciple (3,
11). Tout cela denote un temps reference,a echellehumaine, regie
par Ie rythme des saisons.Au co][ltraire,dans1 Tm et Tt, Ie temps
est passablementvague. « Paul ;.> it avoir « aisse » Timothee a
Ephese (1, 3) et Tite en Crete (Tt 1, 5), sansqu'aucune precision
ne soit apportee. En outre, l'imJninence du retour de Paul n'est
pas certaine, voire, tout conspir(~a donner l'impression que l'on
s'installe dans une absenceprolongee: « En t'ecrivant cela, 'es-
peTe e rejoindre bientot; si e tElfdais, t faut que tu sachescom-
ment te comporter dans la mai:sonde Dieu »34.« En t'ecrivant
cela » : la lettre est con<j:ue avantagecomme un moyen d'organi-
seT'attente que de la pallier.
3. Lesautrespersonnages
Pretons enfin attention aUKpersonnages. Pour les opposants, J.
Murphy O'Connor35 a deja rernarque que 2Tm critiquait des
erreurs concretes (comme Hyme:nee et Philete, qui maintenaient
que la Resurrection avait deja elLllieu, 2Tm 2, 18) et stigmatisait
Ie debat futile, Ie combat de mo1: (;x.oyollaXElv2, 14), les discours
profanes et vides ([3E~iI;x.ouc Evo<lxuvLac, 16). La consequence de
ces erreurs, toute pratique, n'est que la demoralisation (KaTau-
Tpo<t>iI,2, 4) de ceux qui ecouten1:.Au contraire, 1 Tm- Tt pourfend
une erreur beaucoup plus generalle et beaucoup plus complexe qui
s'apparente au judalsme, comme Ie prouve l'usage du mot vollO-
8l&luKa;x.ol, «docteur de la loi» (lTm 1, 7) et l'expression Ol EK
Tfjc 1TEPlOllllC (Tt 1, 10). Leur c;ommune preoccupation ce sont
les mythes et les « genealogies» 1(1 m 1,4; Tt 3, 9).
34. TaiJTcl CJOl Yp6<j><u,EATft«lJV EAEIElv TfpOc CJE TclXlOV. E<lV BE f3pa
8uv<IJ, (va EL81jc Tf(;)c &I EV OLK(J;JEOU avaCJTpE<pECJeallTm3,14a-15a).
35.MuRPHY 'CONNOR,p. cit.,p. ~~14-417.
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90
R. BURNET
c.
Conclusions rovisoires
Toutes ces remarques doivent nous conduire a une conclusion
tranchee sur Ie mecanismede la pseudepigraphie.Visiblement, Ie
mecanismemis en reuvre dans 2Tm est res different du mecanis-
me mis en reuvre dans ITm-Tt. 2Tm procede a l actualisation glo-
bale du processusde communication. Les acteurs, e couple emet-
teur-destinataire, Ie cadre, tout cela est actualiseglobalement. La
pseudepigraphie onctionne ici veritablelinentcomme une Verge-
genwiirtigung,un rendre-presentglobal. L autorite du discoursne
vient pas tant de la figure qui prononce esparoles que de a parou-
sie realisee par la communication.
Au contraire, dans1Tm- Tt, Ie processus essembledavantagea
un processusd anachronisme.Des enDuresactuels soot attribues
a des igures du passeafin de leur conferer une autorite d emprunt.
En ce sellS es figures jouent un role purement linguistique. Paul
est presente comme un super-apotre charge de conferer une cer-
taine autorite aux discours, alors que les destinataires, avec leur
absencede relief, peuvent etre des relais des auditeurs. La relati-
ve absencede relief permet de focaliser attention sur e role qu ils
soot reuses epresenter celui de heraut et de porte-parole du pau-
linisme, de transmissionpassive du message.Aussi faut-il remar-
quer qu ils sootdesmodelesa imiter ( alorsque dans2Tm, ce n etait
que Paul qui devait etre imite).
Aussi petit-on faire quelqueshypothesessur es conditions pro-
babIes de production de ces deux mecamismes.Manifestement,
2Tm est Ie temoignage de la secondegemeration,celle de Timo-
thee, qui a ete convertie au christianisme. Differentes conditions
ont demande ecriture d une nouvelle ettre. Les disciplesconnais-
sant encore l apotre, tine actualisation etait possible; la presence
de l apotre est encore vive et il est possible d evoquer sa presen-
ce. 1Tm- Tt, temoignage d une periode beaucoupplus tardive, 0\1
l Eglise s organise dans la longue duree et 0\1se developpe tine
certaine hierarchie comme Ie prouve la liste de fonctions et Ie fait
que Timothee n est pas consacrepar Paul. 11est alors illusoire de
faire «revivre» Paul. Celui-ci, qui s enfonce dans un passe oin-
tain, n est compris quecomme Ie pourvoyeur d autorite.
Le soutien textuel de ces hypothesesest foumi par Ie theme de
l imitation. Dans 2Tm, Paulsepresentecomme un modele enparo-
le (1, 13; 2, 2; 3, 14) et en action (3, 10), mais ne laissepas suppo-
seTque Timothee puisse Ie devenir. L autorite personnelle de
l apotre estencore assez regnante pour que sescollaborateurs se
comprennentencore comme eg simples elais de Paul. Au contrai-
re, 1 Tm et Tt demandentque Timothee et Tite soientdesexemples
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LA PSEUDEPIGRAPHIE COMME PROCEDE
LlTfERAlRE AUTONOME: L'EXEMPLE DES PASTORALES
91
(1 Tm 4, 12-15; Tt 2, 7) : « montre:-toi un modele pour les croyants,
par la parole, la conduite, la charite, la foi, la purete »36.Manifes-
tement, l'epoque est passeede l:a question du transfert de l'auto-
rite a celIe de la legitimite dessu<;cesseursui se posenta leur tour
comme des modeles a imiter.
Considerer a pseudepigraphiede maniere positive comme un
proce:deitteraire a part entiere s'averedonc tres fructueux. L'eva-
Illation plus fine des Pastorales,qui conduit a operer une distinc-
tion en leur sell, nons permet d'obtenir non pas un mais deux esul-
tats, touchant a la fois Ie cas particulier des Pastorales et la
pseudepigraphie en general. En 'effet, es differences de strategies
decelablesentre 2Tm et 1Tm- Tt revelent les differences au sein
du procede general de la pseude:pigraphie, ui, loin d'etre unifie,
presente des possibilites variees d'usage. On pent, pour l'instant,
faire une separationentre un procede d'actualisationglobale et un
procede d'anachronisme, un pr,[)cede oume veTSe passe et un
procede voue au present. L'anal:ysed'autres textes, en particulier
les Apocalypses, permettrait a coup sur d'affiner la connaissance
de ce procede, qui s'affirme des,ormais omme procede litteraire
a part entiere.
~laTWV EV ),6'Y4J. EV UVQmpo<l>1:\. EV u'Ya1TlJ, E1
6. Timoc YlVOU 1
TTlaTEL.EV aYVEl~
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PhilippeBOB/CHON
lnstitut de recherche et d'histoire des textes, Paris
FONCTIONS ET V ALEURS DES NOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
Justin estparticulierement sensibleau rapport qu'entretiennent es mots
et les choses,es etreset leurs noms. Cettepreoccupation,dejaperceptible
au plan lexical a travers l'importance accordeeau vocabulaire de l'ono-
mastique,se manifestedans plusieurs autres aspects e son oeuvre..allu-
sions frequentes a la signification premiere ou etymologique des mots
servanta designerdes ea ites culturelles ou liturgiques; utilisation herme-
neutique desanalogiesphonetiquesou semantiques; hoix desnoms (sans
doute fictifs, mais riches de significations)que portent lesprincipaux pro-
tagonistesdu Dialogue; evocation requente des ormules d'exorcisme;
insistancesur Ie rapport de filiation qu'entretiennent,avec celui dont ils
tirent leur nom, es membresd'une memecommunaute nationale, ntellec-
tuelle ou religieuse; eferences ombreusesaux hangements e noms men-
tionnes dans esEcritures;placecentraleaccordee ux titres christologiques,
et aux considerationssur les noms divins.
1. Pour les editions franc;;aises, oir en demier lieu G. ARCHAMBAULT ,Jus-
tin, Dialogue avec Tryphon. Texte grec, traduction franc;;aise, ntroduction,
notes et index (H. Hemmer et P. Lejay, Textes et Documents pour l'etude
historique du christianisme. Tomes I-II, Paris Librairie Alphonse Picard et
fils), 1909; A. WARTELLE, Saint Justin"Apologies. Introduction, texte cri-
tique, raduction, commentaire et index, (Etudes Augustinie,nnes, Paris 1987)
Ch. MUNIER, Saint Justin. Apologie pour les chretiens, Edition et traduc-
tion (Paradosis XXXIX, Fribourg 1995); A. W ARTELLE, « Saint Justin: De
la resurrection », Bulletin de l'Association Guillaume Bude, 1993/1, p. 66-
82 (traduction franc;;aise,commentaires); texte grec et traduction latine :
PG VI, 974-1024. Sur l'authenticite du De Resurrectione, voir B. POUDE-
RON, «Le contexte polemique du De Resurrectione attribue a Justin: des-
tinataires et adversaires », StudPatr. 31 (1997), p. 143-166 (avec bibliogra-
phie recente).
Sur l'utilisation de certains textes apocryphes dans l'oeuvre de Justin,
voir en particulier : A. HARNACK, « Bruchstucke des Evangeliums und der
Apokalypse des Petrus», TUX (18932), p. 37-40; v: H. STANTON, «The
'Gospel of Peter' : its early History and Character considered in relation to
the History of the Recognition in the Church of the Canonical Gospels »,
JTh.S oct. 1900, p. 1-25; E. NORELLI, «Due testimonia attribuiti a Esdra »,
Annali di storia dell'esegesi 1 (1984), p. 231-282; m., «II martirio di Isaia
come testimonium antigiudaico? », Henoch 2 (1980), p. 37-57; M. FEDOU -
Apocrypha 11, 2000,p. 93 -121
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94
PH. BOBICHON
Mais Justin presenteegalementune reflexion approfondie sur la nature
et es onctions de ce ien: selonsonorigine (humaineou divine),son ancien-
nete et son authenticite, l peut etre acteur de communion ou de division,
signed une atalite ou instrument de redemption.Dans cetteperspective,e
nom que portent les chretienset celui dont ils se reclament occupent evi-
demment uneplace particuliere.
Cette valeur accordeeaux noms sembleproceder d influencesdiverses
(theoriesplatoniciennes,methodes abbiniquesou philoniennes d exegese,
etc.)qui contribuent i l originalite de l oeuvre de Justin.
Justin is particularly sensitive o the relationship hat existsbetweenwords
and things, betweenbeeingsand their names. This preoccupation,which
was already perceptible rom the lexical viewpoint through the emphasis
given to the vocabulary of the onomastics, s apparent in several other
aspects of his work: the choice of names, ictitious, no doubt, but rich in
significance,borne by theprincipal actorsof the Dialogue,. requent allu-
sions to theprimitive or etymological meaning of words used o designate
cultural or liturgical realities,. he hermeneuticuseof phonetic or semantic
analogies,. he recurrent evocation of the ormula for exorcism,. n insis-
tenceon the relationshipof filiation betweenmembers ofa same national,
intellectual and religious community and the one rom whom they derive
their name,.he large number of references o changeof namesmentioned
in the Scriptures,.he ocal place given to the Christological titlesand to the
considerationsof the divine names.
But Justin also presentsus with a profound reflexion on the nature and
the unctions of this relationship: according o its origin (human or divine),
its seniority,and its authenticity, t can be a factor of communion or divi-
sion, the sign of a fatality or an instrument of redemption. n this perspec-
tive, the name born by the Christians and by Him from whom they draw
their inspiration, naturally takespride ofplace.
This value attributed to the namesseems o proceed rom diverse nflu-
ences Platonic theories, abbinical or Philonian methods of exegesis, tc.)
which contribute to the originality of the work of the Apologist.
J. PARAMELLE,Recaug19 (1984),p.107-108; P. PILHOFER,«Justin und
das Petrusevangelium ,ZNTW 81 (1990),p. 60-78;S.A. PANIMOLLE,« II
Vangelo dell Infanzia negli scritti di s. Giustino », n: Atti delLaXXXI Set-
timana Biblica; ll.,« Storiciffidell incarnazionedelVerbo e Vangelodell Jn-
fanzia nel Dialogo di san Giustino con Trifone », Marianum 52 (1990),p.
63-85.
Les extraitsdu DialogueavecTryphonqui figurent dans a presenteetude
renvoient a une edition critique de cette oeuvre, en cours d achevement.
Les passages n questiony sont generalement ommentes.Dans egextraits
ici reproduits, eg taliques correspondenta des empruntsau texte scriptu-
TaiTe.
J.-C. ATnAS, Directeur d Etudes a l E.P.H.E., et B. POUDERON, ro-
fesseura l Universite de Tours, ont bien voulu me faire part de leurs sug-
gestions pour la redaction definitive de cet article. Je leur exprime ici ma
gratitude.
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FONCfIONSETVALEURSDESNOMS
DANS LES ECRlTS DE JUSTIN MARTYR
95
Le gout de Justin pour les eux de angageest souventmentionne
par sescommentateurs2,et c'est ainsi, par exemple, qu'on a voulu
expliquer Ie nom de Tryphon3.Mais lapresence de purs divertis-
sements apparait pen vraisemblable dans une reuvre sansconces-
sions,etrangere aux seductionsdu style, oute entiere inscrite dans
l'attente de la Parousie et la perspective du martyre. Chez Justin,
res phenomenesne sont amais gratuits. Ils procedentde a convic-
tion que les mots et les choses, es etres et leurs noms, entretien-
Dentun rapport fiche de sellSet d'implications. Parole sur La Paro-
le, l'reuvre de Justin est aussiune interrogation sur a relation du
langage a la realite, et sur l'authenticite de ce lien. Ce question-
Dement,de nature a la fois historique, philosophique et theolo-
gique, semanifeste dans es aspectses plus litteraux et les plus spi-
rituels de cette reuvre, a situant au carrefour d'influences diverses
qui contribuent a son originalite.
*
L'etude lexicale fournit un premier indice de cette valeur parti-
culiere que Justin accorde au nom: dans Ie Dialogue et l'Apolo-
gie, es verbes et les substantifs qui traduisent ce rapport du lan-
gage aux etres et aux chases presentent de nombreuses
occurrences4. faut voir la Ie signe d'une preoccupation constan-
te que confirme l'analyse de detail.
2. Parmi eux, A. GOLDFAHN, «Justinus Martyr und die Aggada»,MGWl
22, BTeslau 1873, nouvelle sene 5, p. 53, qui donne les exemples suivants :
XPlaTlUVOl I XPTlO TOTUTOl I Apol. 4, 1); XplO TlUVOl I XPTlO TOVI Apol.
4,5); <l>lAOOo<jJos-<l>lACxJ;o<j>OS'<l>lAOlTOj1lTOS'II Apol. 3, 1-2); <l>lAOAO'YOS'
<l>lAEP'YOc;Dial. 3, 3).
3. Voir ci-dessous.
4. ' ElTlKUAElv : Dial. 25 OCC. dont 13 hOTS citation; Apol. : 3 occ. hoTs cit;
ElTlKATjo lS' Dial. 3 occ. hoTS cit.; ElTOVOj1Q{ElV Dial. 7 occ. hoTs cit.; Apol.
6 occ. hoTs cit.; ElTWVUj10S' Dial. 1 OCC.hoTs cit.; KuAElv : Dial. 106 OCC.dont
76 hors cit.; Apol. 28 occ. dont 27 hors cit.; KAfJo lS' Dial. 5 OCC.hoTs cit.;
Apol. 1 OCC.hOTScit.; j1ETOVOj1Q{ElV Dial. 8 occ. hOTScit.; 6j1wvu~oS' : Dial.
2 occ. hOTScit. ; QVOj1U Dial. 151 occ. dont 85 hoTs cit. ; Apol. 42 OCC. dont
35 hOTScit.; OVOj1a(Elv : Dial. 9 OCC.dont 8 hOTScit.; Apol. 1 OCC.hoTs cit.;
OVOj1UO lU:Dial. 1 occ. hoTs cit.; lTpOOVOj1Q{ElV Dial. 1 OCC.hoTs cit.; lTpo-
O OVOj1Q{ElV Dial. 1 occ.; Apol. 2 occ. hOTScrt. Certains emplois de AE'YElV
peuvent etTe ajoutes a cette liste, en particulieT dans Ie Dialogue (8 occ.).
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PH. BOBICHON
I -FICTION ET vERITE
Bien qu'elles soientparfois considerees ommeequivalentespar
les commentateurs, 'historicite du Dialogue et celIe de l' Apologie
ne sont pas comparables les deux reuvres correspondent en effet
a des preoccupations et a des projets forts differents. L'Apologie
trouve sa justification en une circonstance precise et s'adressea
un public relativement restreint; Ie Dialogue au contraire s'inscrit
dans une perspective plus large (attente de la secondeParousie),
et vise a l'universalite. Aussi Justin y parait-il moins soucieux
d'exactitude historique que dans l'ecrit adressea l'empereur des
Romains. Son temoignage raduit, dans Ie Dialogue, une percep-
tion theologique de la realite. D'ou les nombreux problemes que
pose cette reuvre lorsqu'il s'agit d'en confronter les donneesavec
ce que l'on sait de l'epoque ou elle fut ecrite5.
De cette disparite, les noms des personnages ntervenant dans
chacune des deux reuvres sont peut-etre Ie signe:
Dans Ie Dialogue, trois noms correspondent respectivementa
l'interlocuteur principal de Justin (Tryphon6: 1,3 etc.), a l'un de
ceux qui l'accompagnent (Mnaseas7:85, 6), et au dedicataire de
5. La date de redaction du Dialogue avec Tryphon estencore discutee.On
observe par ailleurs que la plupart des notations non confirmees par
d'autres i;ourcesque contient cette reuvre a propos des uifs et de leurs
relations avec es chretiens s'integrent parfaitement dans a symbolique
chretienne et dans 'economie de la Redemption qui caracterise a vision
justinienne de I'Histoire (questions etudiees dans l'edition annoncee).
Sansetre systematiquementmis en dollie, Ie temoignage de l'apologiste
doit donc, en ce domaine, etre accueilli avec prudence.
6. Participe present du verbe Tpu<j><iW= «vivre dans a mollesse,d une
maniere desordonnee»). Nom frequemment porte par des Juifs. Cf. Th.
ZAHN,« StudienzuJustinusMartyr »,ZKG 8 (1885),p. 61-63 references).
Le nom hebreu 1;eJ';I~Tarfon), plus rare, a ete parfois rapproche de la
racine 1i~ (= « dechirer », «mettre en pieces»). Mais il est plus vraisem-
blable qu'il s'agit d'une transcription hebraique du nom grec Tp~v. Cf.
N. HYLDAHL,« Tryphon und Tarphon », Studia Theologica10 (1956),p.
79-80.A. GOLDFAHN,art. cit., p. 54, evoque, pour sa part, un jeu de mot
sur Ie verbe grec 6P\JTrTELVbriser).
7. Sansdoute une forme de Manasse (JoSEPHE,C. Apion, I, 23; Act. 21,
16). Nombreuses occurrencesde ce nom dans a litterature rabbinique.
a. S. KRAuss, «The Jews n the Works of the Church Fathers », JQR 5
(1893),p. 126.
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FONCflONSETVALEURSDESNOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
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l reuvre (Marcus Pompeius8: 141,5). Aucun d entre eux n a pu
etre identifie. Cette caracteristique,qu its partagent avec d autres
personnagesmentionnesdans reuvre, plaide en faveur de la these
selon aquelle il s agirait la d une reuvre de fiction. Les protago-
nistes du Dialogue sont en effet tOllSanonymes vieillard interve-
nant dans leg premiers chapitres; compagnons de Tryphon), ou
designes par des noms tres courants, sans qu on puisse leg rap-
porter jamais, de fa~on incontestable, a un personnage connu.
Justin ui-meme n est amais nomme dans e texte de l reuvre... Le
cas de l auteur et du dedicataire est peut-etre un peu different,
mais il n est pas mpossible que l auteur du Dialogue, soucieuxde
mettre en evidence a portee universelle et etemelle du message
chretien, ait deliberement evite de donner a cette reuvre un carac-
teTe rop individualise. L Apologie, dont la fonction estmains pro-
blematique, est, de ce point de vue, fort differente : tous leg per-
sonnagesqui y sont mentionnes appartiennent sansequivoque a
la realite contemporaine.
Mais ces rois noms (Tryphon, Mnaseas,Marcus Pompeius)sont
aussiporteurs d indications precieuses.Au debut de l entretien,
Tryphon est nvite a decliner son dentite. Il repond alors en ndi-
quant sonnom, son origine, et sa situation9.Cesprecisionscontri-
buent a definir Ie r61e qui lui est attribue dans reuvre, et, peut-
etre, le(s) public(s) au(x)quel(s)cette reuvre estdestinee:Tryphon,
comme Mnaseas, sont des noms assez epandus pour pouvoir
s appliquer a un grand nombre de personnes1O,mais ils ne
8. Pour les differentes hypotheses concernant Marcus Pompeius, voir
ARCHAMBAULT,op. cit., t. II, n. 5 p. 309-310.
9. Tryphon manifeste ala fois son attachementa la loi et son nteret pour
la philosophie: «Je m appelle Tryphon, dit-il; je suis Hebreu de la cir-
concision: ayant fui la recente guerre, e passe en Hellade et surtout a
Corinthe Pessentiel e mOD emps» (Dial. 1,3); « J ai appris a Argos, dit-
il, de Corinthos Ie Socratique,que Pon doit se garder d afficher du mepris
ou de l indifference pour ceux qui portent cet habit; mais qu il taut au
contraire, en toute occasion, eur temoigner de la bienveillance,et recher-
chef leur frequentation: car il se pourrait bien que quelque benefice esul-
tat de ce commerce,pour eux ou pour soi. Et quand meme un seul en ire-
fait profit, cela demeurerait pour tons deux un grand bien. Aussi, orsque
je vois quelqu un dans ce costume, c est avec oie que je l aborde. C est
donc avec plaisir que je t ai a Pinstant adresse a parole, et si ceux-la se
joignent a moi, c est qu ils esperentaussientendre de ta part quelque pro-
pos utile» (ibid.). Les circonstanceshistoriques (defaites de Bar Kokh-
ba) evoqueesdans cette presentation introduisent toute Pargumentation
consacreea la caducite de la Loi (chap. 9-48).
10. L epigraphie confirme Ie remoignagede la litterature ancienne.Ct. P.
M. FRAZER E. MAlTHEWS, Lexicon of Greek Personal Names, ol. 2 :
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PH. BOBICHON
peuvent designer que des Juifs hellenises. Marcus Pompeius est
vraisemblablement un nom palen, mais beaucoupde Juifs deve-
nus citoyens romains portaient de tels noms. II y aurait donc au
moins un double public (juif et palen), represente par ces diffe-
rents personnages t eurs virtualites respectives. eurs nomspour-
raient avoir une fonction litteraire revelatrice des intentions de
Justin.
II -REALITES HISTORIQUES ET CULTURELLES
Lorsqu'i est mis en relief par un verbe tel que AE'YElV u KaAE1V,
Ie nom sert tout d'abord a designer ou caracteriser des realites
diverses: anatomiques (Ie «nez »11); geographiques: «<Bethpha-
ge »12,a« Syrophenicie13; Ie Mont de l'Olivaie14, Ie bourg de« Git-
thonlS » ); historiques (Herode 16); techniques (Ie « mat » du navi-
re17); juridiques «< 'acte de repudiation» )18; mythologiques
«< 'Erebe »19,«la deesse «Core »2°); magiques ou relatives aux
cultes paioens les «demons21, les « demoniaques » et les «posse-
des »22, es «envois de songes» et les demons «paredres »23, es
«Attica »,1987, pp. 351 et 435-436. Le nom et }'identite de« Tryphon»-
que plus personne aujourd'hui n'assimile a Rabbi Tarfon -ont donne lieu
a diverses tentatives d'explication. Sur ces questions, voir en particulier:
N. HYLDAHL,« Tryphon und Tarphon », Studia Theologica 10 (1956), p.
77-90; Demetrius C. TRAKATELLIS, «Justin Martyr's Trypho », HThR 79
(1986), p. 289-297; G. F. WILLEMS, «Le Juif Tryphon et rabbi Tarfon »,
Bijdragen 50 (1989), p. 278-292. J'ai essaye de montrer, dans l'Introduc-
tion a l'edition annoncee du Dialogue, que Ie personnage de Tryphon etait
une synthese des juda'ismes de son temps, et des publics vises.
11. I Apol. 55,4 (TOV AEY°IJ.EVOV J.~WTf)pa).
12. Dial. 53, 2 (~v TlVl El<J6&v B1l6<l>a'YflsAEYOIJ.EVllS).
13. Dial. 78, 10 (Tfl LUPO<J>olVlKlJ EY°IJ.EVlJ).
14. Dial. 99,2 (ElS TO opos- TO AEY°IJ.EVOVEAalWV).
15. I Apol. 26, 2 (a1TO KWlJ.llS AEY°IJ.EVI]S rlTewV).
16. Dial.: 103, 3 (TOV f3a<JlAEa TWV 'Ioooalwv TOTE oVTa, Kal avTov 'Hpwollv
AEYOIJ.EV(])V).
17. I Apol. 55, 3 (TO Tp61Talov, () KaAElTal t<JTlOV).
18. II Apol. 2, 6 (TO AEY°IJ.EVOV1Tap' UlJ.lV [>E1TOOOlOV).
19. I Apol. 59, 6 (TO KaAOUIJ.EVOVpEf30s 1Tapa TOlS 1TOlllTalS).
20. I Apol. 64, 1 (TO Et&UAOV Tf)S AEY°IJ.EVI]S KoPlls).
21. II Apol. 5,3 (Kal1Taloos ETEKVlOOav, 0'( El<JlV ot AEyOIJ.EVOl alIJ.OVES).
22. I Apol.18, 4 (ot lIJUXa'is a1To8avOVTWVAalJ.f3avOIJ.EVOl al Pl1TTOUIJ.EVOl
dv8pW1TOl OVS BallJ.°VloAyJ1TTOUS Kal lJ.alV°IJ.EVOUS KaAOU<Jl 1TaVTES).
23. I Apol.18, 3 (ot AEY°IJ.EVOl 1Tapa TOlS lJ.ayolS 6VElpO1T01J.1TOlal1TapE-
BOOl).
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FONCI'lONS ET VALEURS DES NOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
99
oracles24); liturgiques et scripturaires (l'assemblee des chretiens ou
«freres »25, eg «diacres »26,«I'Eucharistie »27,« l'Evangile »28, e
«Jour du solei »29).Le bapteme est appele « illumination »3°. Sont
egalement presentes de cette maniere leg noms du « diable »31, e
«Jesus »32,de « Christ »33.
Certaines de ces remarques apparaissent comme de simples pre-
cisions destinees a un public non familiarise avec ce qui est alors
mentionne. C'est Ie cas, en particulier, des explications d'ordre
geographique ou historique (Bethphage, Syrophenicie, Mont de
l'Olivaie, bourg de Gitthon, Herode). D'autres metlent l'accent
sur la composition du mot (OOlI10VlOATllTTOUS-,VElpolTOl1lTOl,TapE-
8pOl), ou son etymologie. L'allusion au sens premier demeure par-
fois sous-entendue (EVXUplO"TlU, EVU'Y'YEAlU, 8lal3oAos-, XPlO"TOV,'EI1I1UVOUTlA34),
mais elle est alors d'autant plus vraisemblable que
d'autres passages se referent explicitement a cetle signification ety-
mologique35.
24. I Apol. 18, 4 (KaL T<l 1Tap' UlJ.lV AE'Y°IJ.EVa lJ.aVTEla' AlJ.<I>lAOXOUKaL
~w8wVT]S KaL nueous).
25. I Apol. 65, 1 (TOV 1TE1TEl<JIJ.EVOVaL <JV'YKaTaTE8ElIJ.EVOV1TL OUS AE'YO-
[lEVOUS a8EA<j>oils- 'YOIJ.Ev).
26. I Apol. 65, 5 (oi KaAOUIJ.EVOl Tap' I']lJ.lV 8laKovol).
27. I Apol. 66,1 (I'] Tpo<\>i] aiJT1] KaAElTal 1Tap'l']lJ.lV Euxapl<JTla).
28. I Apol. 66, 3 (EV TOlS 'YEVOIJ.EVOlSU1T' auTwv a1T°IJ.V lIJ.°VEUlJ.a<Jlv, i
KaAElTal Eoo'Y'YEAla); Dial. 10, 2 (EV T<{I AE'YO[lEVcp ua'Y'YEAlcp).
29. I Apol. 67,3 (Tfl TOU I']AlOU AE'YOIJ.EVlJ']IJ.EPr,t).
30. I Apol. 61, 12 (KaAElTal 8E TOUTO TO AOUTpOV<l>wTl<JIJ.6s-).
31. Dial. 69, 1 (6 AE'YOIJ.EVOS'la~Aos).
32. I Apol. 22, 1 (6 ' l<Jous AE'YOIJ.EVOS).
33. I Apol. 30, 1 (TOV 1Tap' I']lJ.lV AE'Y°IJ.EVOV pl<JTOV).
34. I Apol. 33,1 (d. Is. 7, 14; Matth.l, 23).
35. Cf. Dial. 41, 1: «De meme, alDis, dis-je, l'offrande de farine prescrite
par la tradition pour ceux qui ont ete purifies de La lepre, etait type du pain
de l'action de graces (Timos ~v TOU apTou TflS EUxapl<JTlas). Jesus-Christ,
notre Seigneur, nous a confie La tradition de Ie faire en memorial de la souf-
france qu'il endura pour les hommes dont l'dlne se trouve purifiee de toute
tendance au mal, afin que simultanement nous rendions grace (Euxa-
pl<JTWIJ.EV) Dieu d' avoir cree Ie monde, avec tout ce qu'il renferme, pour
l'homme, de nous avoir liberes du mal oil nous etions, et d'avoir definiti-
vement detruit les principautes et les puissances par Celui qui est devenu
'souffrant' selon sa volonte .»; I Apol. 33, 7-8:« 'Jesus' est un nom hebreu,
qui signifie en grec hWTllP (Sauveur). C'est pourquoi l'ange a dit a la vier-
ge: Tu lui donneras Ie nom de Jesus, car c'est lui qui sauvera «Jc.JaEL)son
peuple deses peches» (trad. A. WARTELLE); II Apol. 6,4:« 'Jesus' est
un nom et une signification: a la fois homme et Sauveur «JwTflpos) » (trad.
A. W ARTELLE); Dial. 8,4, oil c'est Tryphon qui parle: «Le Christ (Xpl<J-
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PH. BOBICHON
Employe sans autre precision, Ie participe AE'YOI1EVOS'emble
exprimer une certaine distance entre Justin et ce qu'il evoque (TflS'
AE'YOI1EVTlS'oPTlS').Cette lecture trouve confirmation dans l'utili-
sation repetee de toumures telles que 1Tap'Ul1lv,1TapaTotS' 1TOlll-
TalS' ou 1TapaTOlS' 1Q'YOlS'our des realites paIennes (acte de repu-
diation, oracles, Erebe, songes et demons), et de la formule 1Tap'
TJl1lV our ce qui a trait aux realites chretiennes (diacres, Eucha-
ristie, Christ). Ces formules ont donc aussi pour fonction de dis-
socier les univers culturels ou religieux. Elles soot Ie signe d'une
appartenance. Il arrive aussi que Justin mette ainsi l'accent sur la
signification spirituelle de la realite mentionnee : figure de la Croix,
Ie mat est appele «trophee »36,et Ie bapteme «illumination »37.
Qu'elles reduisent ou entretiennent la distance, qu'elles s'ap-
puient sur des considerations lexicographiques ou symboliques,
ces mises en relief au moyen du participe ou du verbe conjugue
sontdonc toujours utiles ou signifiantes.Elles apparaissent omme
un premier signe de cette valeur que Justin accorde au nom.
III -COLLECTIVITES
Dans son acceptioncollective, Ie nom (mis en relief, 1ft. ncore,
par un verbe ou un participe) sert egalement t. esignerdesgroupes
humains, des fonctions, des courants de pensee,et divers peuples
de la terre : leg « Grecs »38 u eg «Barbares »; leg «Vivants en cha-
riots » et « Sans-maison 39;eg differentes heresieschretiennes40;
leg sectes uives41; eg «Israelites »42; eg «Stolciens »43;eg «Pla-
TOS), a supposer qu'il soit ne et se trouve en quelque lieu, il demeure igno-
re; il ne se ~nnait meme pas lui-meme et ne dispose d'aucune puissan-
ce tant qu'Elie n'est pas venu l'oindre (XPL<nJ auTov) et Ie manifester a
tous ».
36. I Apol. 55, 3 (TOUTO TO Tp61TalOV, () KaAElTal t<JTLOV).
37. I Apol. 61, 12 (KaAElTal BE: TOUTO TO AoVTp(>V<j><lJTl<J lOS).
38. Ct. Dial. 67, 2 ('Ev BE: TOlS T(J)V AEY°\l.EVWV 'E>J..llvwv lU90lS); Dial.
117.5 (ElTE f:lapf:lcipwv ElTE 'E>J..llvwv ELTE a1T)..(J)s \ITWlOVv 6VO laTl 1Tpo-
aaYOpEUO\l.EVWV).Voir encore Dial. 119, 4; I Apo/. 5, 4; 7, 3; 46, 3; 60, 11.
39. Ct. Dial. 117, 5 (...f] a\l.a~of:lLwv f] aoLKwv KaAOU\l.EVWV).
40. a. Dial. 35, 6 (KaL Elaw auT(J)v ot lEV TWES KaAOU\lEVOl MapKlavoL,
ot 8E OiJa).EVTwlavoL, at 8E BaalAEl8lavoL, ot 8E haTOpVlAlaVOL, Kat d>J..Ol
dAA<jJ6vO\l.aTl...).
4L Ct. Dial. 80, 4 (Toils ha880UKaLovs- f) T<lS o\loias atpE<JElS rEVlaT(J)V
Kat MEPlUTWV Kat raAl.AaLWV Kat 'EAATjVlaVWV Kat <l>aplaaLWVBa1TTlCJT(J)V).
42. Ct. Dial. 117, 2 (E1TtT(J)VEKEl TOTE OlKOUVTWV apaTjAlT(J)V KaAOU\l.EVWV).
43. Ct. I Apol. 20, 2 (ot AEoyO\l.EVOl E hTWlKOt <j>lAoao<f>ol).
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FONCl10NS ET VALEURS DES NOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
101
toniciens »44; es «Philosophes» qui, en depit des differences de
doctrines, portent un meme nom45; es « Prophetes » qui, anterieurs
aux philosophes, parlaient par l'Esprit Saint et predisaient l'ave-
nir46; les «Juifs »47; es «Gentils » ainsi appeles par l'Esprit pro-
phetique pour distinguer « toutes les autres races d'hommes» et
les «tribus de Judee et de Samarie, appelees Israel et Maison de
Jacob »48; es «Chretiens », qui comme les philosophes« se voient
attribuer, malgre leurs divergences, «une commune denomina-
tion »49, et, veritable Israel, ne sauraient etre confondus avec
« quelque tribu barbare »50.Ce nom de « Chretiens » est usurpe
par les heretiques51 comme I' est aussi, par certains charlatans, celui
de «Philosophe »52.Conformement a la prophetie de Jesus53, es
« faux prophetes » (tj>Eu8onpo<J>f)Tul),faux apotres» (tj>Eu80unoo-
TO)..Ol),faux didascales» (tj>Eu808looaKu)..ol)t« faux christs» (tj>EU-
8oXPlaTo[) se presentent « en son nom »54,mais « ne Ie confessent
que de nom »55. C'est «pour Ie nom» (8la TOU 6VOI1UTOS')u
44. a. Dial. 5, 1 (KaTa Tlvas- AEYO~EVOUS"lAaTwvlKoUS-).
45. a. I Apol. 7, 3 (T< J EVL 6v6~aTl <jJlAo<JO<j>las-TpooaYOpEooVTal); 4, 8
(T< J EVL 6v6~aTl 1Tpo<JaYOpEooVTal <jJlAo<JO<j>Ol);6, 6 (TO E1TlKaAOU~EVOV
ovo~a Tfls- <jJlAooO<j>las- OlVOVE<JTlV).
46. Ct. Dial. 7, 1 (1TpO<j>TlTas-E aUToVs- KaAooolv).
47. Ct. Dial. 72, 3; 77, 3; 80, 4; I Apol. 31, 1.2.5.6; 32, 2.3.4.6.14; etc.
48. a. I Apol. 53, 4 (Ta ~EV yap aXXa 1TaVTa YEVTj avep(.J1TEla V1TOTOU
1TpO<j>TjTlKOUTVEu~aTOS'KaAELTal E9vTj, TO 8E lOU&ilKOV KaL <Ja~apElTlKOV
<jJUAov I<Jpal'jA KaL OIKOS' IaKwfl KEKATjVTal).
49. Ct. I Apol. 7, 3 (...ov Tp61TOVot EV "EXXTj<Jl Ta avToLS- apEaTa 8oy~a-
Tl<JaVTES-EK 1TaVTos- T< JEVL 6v6~aTl <jJlAooO<j>las- TpooaYOpEUOVTal, Kal-
1TEP TWV 8oy~aTwv EvaVTlwv OVTWV, oi.iTws- KaL TWV EK flapflapolS- YEVO-
~EVWV KaL ~aVTwv <Jo<Ix1\vTO E1TlKaT1]yopoU~EVOV ovo~a KOlVOV E<JTl'
XplaTlaVOL yap 1TaVTES- TpooaYOpEOOVTal).
so. a. Dial. 119,4 (OUKOUVOUK EuKaTa<jJp6V1]TOS- fj~os- E<J~EV ou8E flap-
(3apov <jJUAov UBE o1ToLa KapWv 1\ <l>puywv EevTj).
51. a. Dial. 35, 1 (AEYO~EVWVXplaTlavwv), 2 (o~oAoyofJIJTas- EamoVs- Elval
Xpl<JTlavoVs-); 80, 4 (Tl<Jl AEYO~EVOlS-XplaTlavoLS-); I Apol. 16, 14 (AEYO-
~EVOUS" E ~ovov Xpl<JTlavoUs-); 26, 6 (Xpl<JTlavoL KaAouVTal). Sur les here-
sies chez Justin, voir A. LE BOULLUEC, La notion d'heresie dans la litte-
rature grecque (IIe-Ille siecles), t. I: De Justin a Irenee, Paris, «Etudes
augustiniennes »,1985 (en part.les p. 37-91).
52. Ct. I Apol. 4, 8 (KaL yap TOl <jJlAooO<j>las- vo~a KaL axfj~a E1Tl pa-
<j>oVTal TlVES ).
53. Ct. Matth. 24, 5 pll.
54. a. Dial. 35,2.3.4.; 51, 2; 82, 2.3 (E1TL T< J6vo~aTl (lUTOU; EV 6vo~aTl
auTou).
55. Ct. Dial. 35, 5 (6vo~aTl ~ovov O~OAoyELV).
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Christ56,au contraire, que leg chretiens authentiques acceptent e
martyre...
Le nom a donc ici une fonction sociale, historique, et religieu-
se. Les ensemblesqu il determine correspondenta des categories
essentiellesdans a conscienceque Justin a des enjeux nationaux,
intellectuels, et spirituels de son emps. Ces differents emplois, et
leg nuances qui leg accompagnent, emoignent par ailleurs d une
reflexion constante sur authenticite du lien que chacunentretient
avec Ie groupe dont il se reclame. Ici encore, Ie participe AE YOI1E-
vaS ntervient chaque ois qu il parait necessaire exprimer doutes
et reticences.Selon qu il est en harmonie ou en contradiction avec
leg paroles et leg actes, e titre que l on porte est, pour Justin, signe
de Verite ou d erreur. L ultime epreuve de cette affinite ne peut
etre que Ie don de savie : Socrateest, de ce point de vue, Ie mode-
le du « Philosophe » (cf. II Apol. 3, 6), mais «personnene s est ais-
se convaincre par [lui] jusqu a mourir pour cette doctrine» (ibid.,
10,8). La Passiondu Christ temoigne au contraire qu il est bien Ie
Verbe ncame et Ie Messieannoncepar legEcritures. C est a a fois
comme «philosophe »57 t «chretien »58 ue Justin se presente a
ses nterlocuteurs et se prepare a mourir.
IV-FILIATIONS
Le nom porte par chaque groupe fait souvent reference a un
eponyme. II existe, entre celui qui est a l origine d une doctrine,
sesdisciples et leurs descendants n rapport de filiation qui contri-
hue au sentiment d appartenance.
Les pqilosophies se sont developpeesgracea l exemple de leurslnitiateurs,
et on a prig l habitude de leg designer«par Ie nom du
56. La formule 8la TOU 6VOl1aToS TOU Xpl<JTOU fait Ie plus souvent refe-
rence aux persecutions «< confession du nom du Christ») et aux conver-
sions que leur spectacle entraine (Dial. 11, 4; 82, 2; 110, 4; 114,4; 121,2;
ct. 116,3; I Apol. 24, 1). Ct. Matth. 10,22, cite en 82, 2. Ene est utilisee
aussi a propos de l entr6e en Terre promise sous laconduite de Josue/Jesus
(Dial. 106, 3; 115,4), du sacrifice eucharistique (Dial. 117, 1.5; I Apol. 65,
3), ou -exceptionnenement -des exorcismes (II Apol. 8, 4). Ene a un
caractere liturgique.
57. Ct. Dial. 8, 2 (OlJTwS 81 ] Kat 8la TaUTa <l>lAOcrO<l>OSYW).
58. Ct. Act. Mart., 3, 4 (XPl<JTlavOS Ellll).
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FONCTIONSETVALEURSDESNOMS
DANS LES ECRrrs DE JUSTIN MARTYR
103
pere de leur enseignement»59; eg heresies chretiennes sont de
meme designees« 'apres e surnomde l'homme dont chaquedoc-
trine et chaque systeme ire son origine »60;comme leg philoso-
phies, chacune «prend un nom ou un autre d'apres Ie fondateur
de son systeme»61;«Juda est l'ancetre des Juifs, et c'est de lui
qu'ils tirent leur nom de Juifs »62.Ce rapport (exprime en termes
similaires) existe aussipour legchretiens dont Ie nom vient de celli
du Christ63,mais ce qui pour leg autres denote une simple tradi-
tion devient pour cesdemiers une participation: c'est « au nom du
Christ» qu'ils sontbaptises64; 'estparce qu'its« confessente nom
du Christ »65 u'ils se trouvent exposes aux persecutions66; 'est
par la foi qu'ils sont leg authentiques «Enfants d' Abraham »67,
«descendantsde Jacob» et «veritable Israel »68, ar Ie Christ est
59. a. Dial. 2, 2 (TOiJTO KAT]eflVaL TOUVOl1a, OTrEpEKaAELTO0 TraT1lP ToD
AOYOU).
60. a. Dial. 35, 4 (KaL KaAOUI1EVOlEluw iI<j>' 1ll1WV citro TflS' TrpouWVVl1laS'
TWV av8f)(JJv, E~ OlmEP EKclUTT] 8L8aXTJ KaL YVWI1T] jpi;aTo).
61. a. Dial. 35,6 (...ov TpOTrOVKaL EKaCJToS'TWV </>LAOOo< >ELVOI1L(OVTWV,
wS' EV apXlI TrpoELTrOV, itro ToD TraTpoS' ToD AOYOUTO QVOl1a~S' </>LAOOo< >EL
</>LAOOo< >laS'lYELTaL <PEpEw).
62. a. I Apol. 32, 3 (loUBaS' yap TrPOTTclTWPlou8alwv, a</>'ou KaL TO 'Iou-
8aLOL KaAELaeaL E<J){ftKaUL).
63. cr. I Apol. 12,9 ('IT]uoDS' XPLUT6s-, a<f>ou KaL TO XpLUTLaVOL ETTOVO-
I1cl(EaeaL E<J){ftKaI1Ev); Dial. 64, 1 (o'lTLVES' KaL ciTro ToD 6Vol1aToS' auToD
XpLuTLavoL KaAELa9aL TTclVTES' <J){ftKaTE).
64. a. Dial. 39, 2 (Ka9' 1ll1EpaV TWaS' l1a9ljTEUOI1EVOUS' LS TO QVOl1a TOU
XPLUTOD aiJToD).
65. cr. I Apol. 45, 5 (OI10AOYOUVTWV O QVOl1a ToD XpLUTOD); II Apol. 2, 16
(6VOl1aToS' 8E XpLuTLavoD TTpoawVul1laV Ol1oAoyoDVTa).
66. ORIGENE, Cels., 1,25, explique plus precisement que «les chretiens
combattent jusqu'a la mort pour eviter de donner a Dieu Ie nom de Zeus,
ou un nom d'un autre dialecte.» J. DANIELOU, Theologie duJudeo-chris-
tianisme, Paris, Cerf, 1991, p. 235-251, signale qu'en continuite avec la
theologie juive du Nom (Shem), on voit se developper chez les premiers
chretiens, et plus particulierement dans un contexte liturgique, une veri-
table christologie du« nom» (ovol1a) comme designation de la personne
divine du Christ. Le meme auteur n'exclut pas la constitution de Testi-
monia centres autour du mot ovol1a : hypothese que pourraient confirmer
l'abondance et l'importance de references scripturaires comportant ce
mot dans Ie Dialogue (Gen. 32,27.28.29.30; Exod. 6, 3; 23, 21; Is. 7, 14;
42,4.8; 52, 5; 54, 5.7; 55, 13; 63, 16.19;65, 1; 66, 5;Jer.11, 19; Ez. 20,22;
Am. 5, 27; Mich. 4, 5; Mal. 1, 11.12; Ps. 21, 23; 44,18; 71, 14.17.19; 95,
2.8).
67. cr. Dial. 11, 5; 25,1.
68. cr. Dial. 120,2; 123, s; 135, 5-6.
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104
PH. BOBICHON
lui-meme «Jacob» et « Israel »69;c'est enfin parce que Ie Christ
est «Fils de Dieu »70 ue leg chretiens peuvent devenir «Enfants
de Dieu » et« fils du tres-Haut »71. a filiation n'est alors plus seu-
lement historique ou intellectuelle, mais spirituelle: elle engage
tout l'etre dans un processusde divinisation.
C'est 'origine humaine de certaines doctrines qui determine et
explique leur multiplicite72, et leur «commune designation » ne
traduit qu'une apparencepour les philosophes73,ne illusion pour
certaines sectes uives74,et une imposture pour les heretiques75.
Seule a doctrine chretienne veritable, d'origine divine, echappea
cette fragmentation: a la multiplicite des doctrines humaines (et
de leurs denominations) s'oppose 'unite de celIe du Christ: pour
ceux qui croient en lui la distinction entre « peuple » et « nation »
devient caduque76; 'est par une foi authentiquement partagee et
69. Ct. Dial. 123, 9 (Os ow aTTOTOU Evos' IaKw{3 EKELVOU,TOU Kat' Iapai]),.
ETTlKA~vrrOS', TO TTaVYEVOS'VI1WVTTPOO1lY6PEUTOaK~ Kat ' apallA, OUTWS-
Kat l'I11E1S1 TTO TOU YEwrjaaVTOS" l'Il1aS ElS 9Eov XplaTou, WS Kat' aKwf3
Kat ' apanA Kat ' ovoo Kat ' wai'l< > Kat ~aut8, Kat BEou T~KVa aAT]8lva
KaAOVl1E8iI Kat EaI1EV, ot Tas EVTOAas TOU XplaTOU < >uAaaaovTES).
70. Contrairement aux heros et aux dieux qui ne soot que de « pretendus
fils de Zeus» : ct. I Apol. 21, 4 et 55, 1 (TWV AEYOI1EVWV twv TOU ~lOS).
71. Ct. Dial. 123, 9-124, 4.
72. Ct. Dial. 2, 2 : « Pour quelle raison a phi osophie a pris plusieurs tetes,
je veux vous l'expliquer. II arriva que ceux qui, les premiers, s'y etaient
appliques devinrent ainsi celebres; leurs successeurs marcherent sur leurs
traces, mais sans plus rechercher ce qui a trait a la verite: uniquement
frappes qu'ils etaient de la force d'ame des premiers, de leur constance,
et de la nouveaute de leurs discours, ils en vinrent a considerer comme
vrai ce que chacun apprenait aupres de son maitre; a leur tour ils trans-
mirent a leurs successeurs des doctrines semblables et d'autres similaires :
et Ie nom par lequel its furent designes, etait celui du pere de leur ensei-
gnement. »
73. Ct. Dial. 7, 1 (TTpO TTOAAOU povou TTaVTwv TOVTWV TWV VOl1l(,°I1EVWV
< >lAoa6< >WV);Apol. 4, 8 (YlV({)aKETE 8' OTl Kat ot Ta EvaVTLa 8of;aaaVTES
Kat OOYI1QTLaaVTES TWV TTaAalWV TI:II Evt 6v6l1aTl TTpoaaYOpEUoVTal < >lAO-
aO<j>ol); 7,3 (EK TTaVTOs- I:II Evl 6v6l1aTl < >lAoaO<j>LasTpoaaYOpEUoVTal, KaL-
TfEp TWV 8<Yrl1aTwv EvaVTLwv OVTWV).
74. Ct. Dial. 80, 4 (AEYOI1EVOUS I1EV' ou8aLous Kat TEKVa' Af3paal1).
75. a. Dial. 80, 4 (Ei yap KaL auvEf3ciAETE vilas Tlal AEYOI1EVOlSXpla-
TlavolS...).
76. Ct. Dial. 123, 1: ~ Le proselyte qui s'est fait circoncire pour s'adjoindre
au peuple (TI:II Aal:ll) est considere comme un autochtone, tandis que nous,
qui avons ete juges dignes d'etre appeles peuple (Aaos KEKAf)a8al 1'j';lW-
I1EVOl), nous sommes egalement une nation (E8vos), du fait de notre incir-
concision». voir encore Dial. 19,5; 119,2.5 et 130, 4.
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FONCflONSETVALEURSDESNOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
105
une meme «vocation» que les chretiens sont les veri tables
«enfants d' Abraham »77;pluralite d'hommes par Ie nombre, Ie
peuple et l'Ecclesia «formant une meme realite sont appeles et
designes 'une unique denomination»78. e nom perd ainsisa onc-
lion dissociatrice premiere pour devenir l'agent et l'expression
d'un processusd'unification qui engage oute l'humanite.
V-CHANGEMENTSDENOM
Pour un individu comme pour une collectivite, l'attribution d'un
nom (ou son changement) sont charges de signification. Ainsi, cer-
tains lieux re<;oivent, a l'issue des theophanies, une autre denomi-
nation: Ie lieu oil Jacob lutte avec l'ange et devient «Israel» est
appele «Forme visible de dieu» (El80s- 8EOV)79;elui qui sert de
cadre a la theophanie survenue pendant que Ie meme Jacob fuyait
son frere Esaii devient «maison de dieu » (BUl81lA)80;OUAU[l[lclOUS-,
de meme, est change en OIKOS-8EOV81;'endroit oil est enterree
Rebecca prend Ie nom de «chene d'affliction» (BaAuvov 1TEV-
eouS-)82;e refuge de Lot est appele « Segor »83.Si Justin rapproche
ces textes en un meme developpement consacre aux manifesta-
tions du Verbe anterieures a son Incarnation, c'est parce qu'ils evo-
quent des evenements fondateurs, mais aussi parce que les chan-
gements toponymiques en gardent la memoire.
Les personneset eg groupes,comme eg ieux, peuvent changer
de nom, et c'est presque toujours Ie signe d'une vocation, d'une
consecration,ou d'une revelation: Af3pal1 evient Af3paal184;apa
77. Ct. Dial. 119. 5 (8la TiiS' Oj10laS' KAl1fJE(J)S' <lxuvT:1 EKaAEfJEv aiJT6v [...]
T£KlJa ToD 'Af3paajl &a TiJv Oj10LaV 1TiO TLII OVTES').
78. a. Dial. 42, 3 (OTrolov KaL Em TOU fJWj1aTOS E<JTlV t8Elv. 1TO'uWII apl-
(Jj10Uj1EVWV jlEAWII Ta crUj1TTaVTa Ell KaXE1Tal KaL ~O TL awJ.La. KaL yap 811j10S
KaL EKKATjfJla, TTO}..}..OL OV apl9j1ov OVTES' civepwTTOl, wS' EV OVTES' TTpcrYj1a
Tfj j1l(;i KAl1fJEl KaAotIVTal KaL TTpooaYOpEOOVTal).
79. Dial. 58, 7; 126,3.
so. Dial. 58, 8.
81. Dial. 58, 13.
82. Dial. 58, 8.
83. Dial. 56,21.
84. Dial. 113,2.
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106
PH. BOBICHON
devient Lappa85; acob devient Israe186; t Auses, Josue/Jesus87;
Simonse voit attribuer Ie nom de Pierre88;eg ils de zebedee rel;oi-
vent celli de Boanerges89.ustinsemblepenserque de telles modi-
fications ne soot pas toutes egalementsignifiantes, et plus preci-
sement que l'ajout ou Ie retrait d'une seule ettre n'est pas aussi
charge de gensque l'attribution d'un nom entierement nouveau.
II reproche90aux exegetesuifs de s'attarder sur eg premiers phe-
nomenes,considerescomme negligeables,en oubliant legseconds,
investis d'une eminente signification spirituelle91.Le changement
integral d'un nom de personne (operation enouveleepar Ie Christ)
est au contraire pour lui un signede la divinite92.A travers a diver-
85. Ibid. Sur a signification de ce redoublement,et a puissance e a lettre
rau dans 'iconographie chretienne ancienne,voir B. BAGA1T ,L' Eglise
de la circoncision,p. 133-134.Critique de cet ouvrage par S. C. MIMOU-
NI, Le ludeo-Christianisme ancien.Essai historique,colI. «Patrimoines »,
Paris, Cerf, 1998 (en particulier les p. 340-342).
86. Cf. Dial. 58, 7.
87. Cf Dial. 75,2.
88. Cf. Dial. 100,4 et 106,3.
89. Cf. Dial. 106,3.
90. Ct. Dial. 113,2. Reproche peut-etre injustifie, car la litterature rabbi-
nique comporte de nombreusesallusionsau changement e nom de Josue.
Certains ~extesmidrashiques rapportent que Ie yod enleve au nom de
Sara(y) s'en etait plaint aupres de Dieu. Celui-ci l'en consola en lui fai-
sant remarquer qu'il avait ete ote a la fin d'un nom de femme pour etre
place, ulterieurement, au debut du nom de (ye )-hoshua, anterieurement
Hoshua (Gen. R., 47,1; Lev. R., 19,2; Cant. R., 5, 11,4 etc.). Le Talmud
de Jerusalem (Sanh. 2, 8) rapporte Ie meme fecit, mais precise aupara-
vant qu'e~ enlevant a lettre yod a notre mere Sarah,Dieu en repartit Ie
montant (=10) entre Sarah et Abraham, en ajoutant a chaque nom un he
(5 x 2 = 10).
9L Avantd'en expliquer a signification spirituelle, PHILON,De mut. nom.,
61, s. rapporte que l'ajout ou Ie retrait d'une lettre a un nom etait consi-
deres par certains avec ronie: «Tout recemment, 'ai entendu un homme
athee et mpie qui, se moquant et repandant ses njures, osait dire : consi-
derables,vraiment, et depassant out, sont eg dons que, d'apres es dires
de MoIse, Ie Souverain de l'univers accorde en ajoutant line lettre, un
seul alpha, et line autre fois encore, en mettant un rho supplementaire, l
estime avoir procure un bienfait admirable et de quelle taille » (trad. R.
ARNALDEZ, (Euvresde Philon d'Alexandrie, 18,p. 61).
92. Ct. Dial. 106,3: «Quand il est dit qu'il changea Ie nom de l'un des
Apotres en celui de Pierre (cf. Mc. 3, 16-17; Ev. de Pierre?) -evenement
qui lui aussise trouve consignedans sesMemoires -outre qu'il a change
encore e nom des deuxfreres, ils de Zebedee, n celui de Boanerges, 'est-
a-dire «fils du tonnerre », c'etait la Ie signe qu'il etait bien celui par qui Ie
surnom d'Israel flit egalementdonne a celui qui s' appelait Jacob ct. Gen.
32,28; 35,10), et par qui Auses re~ut e surnom de Jesus cf. Nombr.13,
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FONCflONS ET VALEURS DES NOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
107
site apparentedes episodes apportant de telles substitutions, c'est
toujours la puissancedivine qui s'exprime et se manifeste.
Parmi ces changementsde noms, deux retiennent plus particu
lierement i'attention de Justin: celui de Jacob en Israel et d' Au
sesen Josue/ esus:
Jesus est un nom de Dieu, qui ne fut revele qu'au moment de
l'Exode93. C'est par ce nom que Ie peuple sorti d'Egypte fut intro-
duit dans la Terre Promise, figure du Salut94; c'est par sa «puis-
sance» (8WaJ.1LS",UXuS") ecrete, agissante95,associee au mystere
de la Croix96, qu' Amalek, figure du diable, fut vaincu, et que les
demons se trouvent exorcises97. Aussi ce nom entre-t-il dans la
16), nom par lequel tot introduit dans la terre ,Promise aux patriarches Ie
people survivant de ceux qui etaient sortis d'Egypte ».
93. a. Dial. 75, 1 (Ev 8E T<\I ~L~Altp TftS- 'EF;ooou, OTl aUTOU TO OVOJIa TOU
~OU KaL'IT)uof s- i;v, () AE'YEL T<\I 'A,BpaclJII1T'1 &81]A(;)(JOaL 11T)8E T<\I'[aKW,B,
8L<l MW<JEWS- EV I1UUTT)pltp 6~OlWS- EF;T)'Y'YEA8T) KaL ~I1EtS- vEvoIlKa~Ev).
94. Cf. Dial. 106, 3 (8L' ou OVOl1aTOS- KaL ElmlX8T) ElS- TT'lV E1TT]'Y'YEAI1EVT)V
TOtS- lTaTpLapxaLS- 'Yftv 6 lTEpLAEL<jJ6ELS-alTO TWV alT' Al 'YUlTTOU EF;EA8oVTWV
Aaos- ).
95. Plusieurs passages du Dialogue sont consacres a la « puissance » des
noms de Jesus et Israel: 30, 3; 121, 3; 111, 1-2; 128, 1; 125,1.3-5; voir aussi
49,8.
96. C'est Ie nom meme de Jesus, place en tete du combat et associe au signe
de la Croix (MoIse en priere), qui donne la victoire (cf. Dial. 90, 4.5; 91,
3; 111, 1). Pour souligner Ie caractere agissant de cette denomination, Jus-
tin utilise a trois reprises, dans des expressions similaires, Ie mot ElTlKAT)-
ULS- Dial. 91, 3 (8la TE TOU TU1TOU TflS- EKTaUEWS- TWV XElpWV TOU MW<JEWS-
KaL TflS- TOU Nauft uiou E1TLKAljaEws- TOU OVOl1aTOS- 'IT)uou); 111,2 (TOV ru-
lTOV TOU UTaupou KaL TOV TU1TOV Tfls- TOU ov6l1aTos- E1TLKAljaEws-); 128, 3
(lTEpl TE Tfls- OlTTaUlas- Tfls- ElTL Tfls- 3<lTou KaL TflS- E1TLKAf]aEWS- TOU 'IT)uou).
Pour la puissance du nom de Josue/ Jesus, voir encore l'episode de l'arche
emportee par les Philistins (Dial. 132,3).
97. Cf. Dial. 30, 3: « Car nous I'appelons Secours et Redempteur, lui dont
la force du nom (TT'lV TOU OVOl1aTOS' l<J)(W) fait trembler meme les demons.
Et aujourd'hui,lorsqu'ils sont conjures au nom de Jesus-Christ, crucifie
sous Ponce-Pilate (EF;opKl(OI1EVa KaT<l TOU OVOl1aTOS- 'IT)UOU XPlUTOU, TOU
UTaupweEVTOS' ElTL llOVTlOU lllAaTOU), lequel tot procurateur de Judee, its
sont soumis. De sorte que par la il devient evident pour tous que son Pere
lui a donne one puissance telle que meme les demons sont soumis par son
nom (KaL Tcl 8aLJIOVLa V1ToTaaaEa6aL TcIJ OllOJIaTL avToD), et par I'econo-
mie de sa Passion ».
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PH. BOBICHON
composition de formules utilisees en res circonstances98. ontre
Ies demons, I'invocation du nom des rois d' sraeI, justes ou pro-
phetes uifs, demeure nefficace: Ia formule« Ie Dieu d' Abraham,
d' saac et de Jacob» pourrait a Ia rigueur convenir,car eIIe designe
Ie Dieu des theophanies99.Dans l' Apologie, Justin explique que
ce nom de« Jesus»designeen hebreu e Sauveur1OO,e meme que
I'EmmanueI signifie « Dieu avecnous »101. esdeux noms ont ete
re~us au moment precis de I' ncamation102.Is ont une significa-
tion et une fonction soterioIogique.
Le nom d']srael fait egalement 'objet de plusieurs developpe-
ments1O3j) Justin ndique qu'il signifie« homme vainqueur d'une
puissance». Comme Jesus1O4,e nom est associe a une victoire
contre leg forces du maPO5. travers ces deux noms, et la manie-
re dont ils sont expliques, s'expriment a la fois la Preexistencedu
Verbe et la permanence de son action dans I'Histoire: theopha-
Dies,sortie d'Egypte, naissancedu Christ, vie terrestre et mort sur
98. Formules similaires, et plus ou mains complexes, qui se presentent
comme un resume de la vie du Christ tel qu'i apparait dans Ie Symbole
(Dial. 30, 3; 76, 6; 85, 2; 132, 1;1 Apol. 21, 1; 31, 7;42,4;46, 5; 63, 16;II
Apol. 6, 6). Cpo ORIGENE, Cels., I, 6 (Oil yap l<J)(~LV OOKOOOLV,AAa T<{I
DVOl1aTLITJaou I1ETa TflS' ETTaYYE),laS' TWV TTEPl auTov LcrTopLwv); III, 24
(TLvES' BE <1TJI1ElaTOU El),TJ< >EvaLL 8La T1']V TTlaTLv TaVTTjV TTapa~oTE-
pov ETTL8ElKV\JVTaL V o1S' ~paTTEOOOOLV,oU8Ev aAAo Ka),ouVTES' ETTl TOUS'
8EOI1EVOUS' EpaTTElaS' i TOV ETTl TTQ.aL Eov Kal TO TOU 'ITJaou QVOl1a I1ETa
TflS' TTEPl aUTOU LaToplaS'). Dans certains cas, res formules sont mises en
rapport avec les exorcismes. Ailleurs, elles apparaissent plutot comme
une regIe de foi qui etait vraisemblablement utilisee dans un con exte bap-
tismal. cr. J. DANIELOU, Bible et Liturgie, Paris 1950, p. 30-38. Etude sys-
tematique in: W. BORNEMANN,« Das Taufsymbol Justins des Martyrers »,
ZKG 3 (1879), p.1-27 (en particulier les p. 5-6); A. L. FEDER, Justins des
Miirtyrers Lehre van Jesus Christus, dem Messias und dem Menschgevor-
denen Sohn Goffes, Freiburg i Br., Herdersche Verlagshandlung, 1906, p.
264-283.
99. cr. Dial. 85, 3.
100. cr. I Apol. 33, 5, 7-8; II Apol. 6, 3-5.
101. I Apol. 33, 1; cr. Dial. 43, 5; 66, 2.
102. cr. I Apol. 46, 5.
103. Le changement de Jacob en Israel est annonce par Ie motif theo-
phanique (Dial. 58, 7-8), rappele Ii. plusieurs reprises (75, 2; 78,8; 123,8-
9), et explique ulterieurement (125, 3-5; 134, 6). Applique Ii. un type du
Christ, ce nom d'Israel devient un titre christologique, puis une designa-
tion de ceux que Ie Christ a engendres Ii. Dieu (123, 9).
104. Voir ci-dessous.
105. Les deux noms sont reunis en Dial. 75. 2: 1 On. 3 et 134- n-
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FONCflONS ET VALEURS DES NOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
109
la Croix. En eux se recapituleet s'opere oute l'economiede la
Redemption.
VI -nTRES CHRISTOLOGIQUES
C'est dans cette economie qu'il faut sittler aussi a longue liste
des titres christologiques que presentent Ie Dialogue et l' Apolo-
gie1O6.omme Ie precise Justin, ces titres correspondent aux dif-
ferents attributs du Verbe, a une partie de sa mission ou une moda-
lite de son action1O7; l se referent a sa Preexistence, aux
theophanies, a l' ncamation ou a la Passion; ts traduisent l'hu-
manite du Christ, ou sa divinite. Differents aspectsqu'il est sou-
vent impossible de dissocier,puisqu'il s'agit d'une meme person-
fie, et d'une meme economie: les listes de titres que l'on trouve
dans Ie Dialogue108melent volontairement ce qui resiste a toute
classification.
C'est du PeTeque Ie Verbe a re~u res titres1O9: ette Puissance
verbale, dit Justin, «peut recevoir ous es noms parce que du PeTe
elle sert Ie dessein, et que par volonte, du PeTeelle rut engen-
dree »11°. e Dieu-tout-puissant, au contraire, n'a pas de nom:
«Mais Ie PeTede l'univers, qui est nengendre,n'a pas de nom qui
lui soil impose, car recevoir un nom suppose quelqu'un de plus
ancien qui donne ce nom. Ces mots, PeTe,Dieu, Createur, Sei-
gneur, Maitre, ne sont pas des noms, mais des qualifications tirees
de sesbienfaits et de ses euvres. Quant it.son Fils, Ie seul appele
proprement Fils, Ie Verbe, it. a fois existant avec lui et engendre
par lui avant les creatures, quand, au commencement, l crea et
ordonna par lui l'univers, il est appele Christ, parce qu'il a re~u
106. Liste exhaustive, avec references, dans l'appendice a l'edition annon-
cee. Sur les titres christologiques et les noms divins dans l'Ascension
d'Isai"e, voir A. ACERBI, L 'Ascensione di Isaia. Cristologia e profetismo
in Siria nei primi decenni del II secolo (Studia Patristica Mediolanensia,
17), Milan 1989Z, p. 99-137.
107. Ct. Dial. 61, 1.
108. a. Dial. 32, 6 (Ps.109); 34,2; 36, 1.2; 43, 1; 58,3.9.10; 59, 1; 60, 3.5;
61,1.3; 75, 2; 76,1-3; 86, 3; 96,1; 100, 1.4; 106,4; 113, 5; 114,2; 115, 4;
118,2; 123, 8; 126, 1; 127,4; 128, 1.2.4; 135,3.
109. Ct. Dial. 86,3 (cirro TOU rraTpO'; EAaj:IE TO (JaUL,J..~VS-al XpLaTOS- Kal
i~pt"vs- Kal ayy~,J..OS-,Kal ooa Q)J.a TolafITa EX~l i\ EO"X~).
110. Ct. Dial. 61, 1 (EX~l yap rraVTa rrpoooVOl1a(~a9al EK T~ TOU urrT]pE:"-
T~lV T<jJ raTpLK<jJ 30vAT1l1aTl Kal EK TOU ciTro TOU rraTpOs ~AT1O"~l y~y~vvf)<J-
8al).
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BOBICHON
l'onction et que Dieu a mis l'ordre dans 'univers par lui, et ce nom
lui-meme comporte un sells nconnaissable,de la meme fa~onque
l'appellation« Dieu» n'est pas un nom, mais une maniere de dire
appropriee a la nature de l'homme, pour designerune realite dif-
ficile a expliquer »111trad. A. WARTELLE).
Justin distingue ainsi Ie Dieu-tout-puissant qui n'a pas de nom,
et Ie Verbe doni Ie titre de Christ (et, vraisemblablement, certains
autres, ou tons leg autres) «comporte un gens nconnaissable »
(ovo~a Kat aUTO lTEPlEXOVyvwaTov aT]~aa(av).Le Dieu-tout-
puissantdemeure transcendantet au-dela de toute denomination,
tandis que Ie Verbe est progressivement revele. Justin laisse
entendre qu'une partie du gensde ces itres demeure voilee, pre-
servant ainsi la divinite du Verbe. Mais de telles distinctions ont
sans doute contribue a susciter eg accusations de subordinatia-
nisme doni il a fait l'objet.
L'absence de nom, ou sa connaissancepartielle sont reservees
au Dieu veritable, qui echappe a l'emprise humaine. Les «dieux
des nations », au contraire, ant taus un nom. Mais ces noms pre-
sentent rois caracteristiquesessentiellesqui en soulignent a la fois
leg limites et leg dangers: ils sont taus d'origine demoniaque,et
attribues par les hommes a des idoles perissables112.Is signifient
et consacrent simultanement l'illusion du pouvoir humain sur la
divinite, et a realite de l'emprise demoniaque sur eg hommes.Les
titres christologiques sont l'instrument d'une liberation, leg noms
attribues aux divinites celui d'un asservissement.
111. II Apol. 6, 1-3 ('Ovol1a BE T {J rrclVTWV rraTpt 9ETov, aYEvvllT(j> OVTl,
aUK EaTlV. Ii> yap av Kat OVOl1clTl rrpoaaYOpEu"Tal, rrpEaj3UTEpov EXEl TOV
GEI1EVOVTO ovol1a. To BE llaTl'jp Kat 8Eos Kat K Tl<mjS Kat KUplOS Kat
.1EarrOTT]S aUK OVOl1aTcl EOTlV, <l)J..' EK TWV EurrOlLWV Kat TWV EPYWV rrpoo-
P1l<1ElS. 0 BE rios EKElVOU, 6 110VOSAEYOI1EVOSKUplWS ri6s-, 6 AoyoS rrpo
TWV rrOllll1clTWV Kat auvwv Kat YEVVWI1EVOS, TE Tl'jv apx1']v 8l' aUTOU rrclV-
Ta EKTlaE Kat EKOOl1llaE, XplaTOS I1EV KaTa TO KEXPla9al Kat Kool1flaal
Ta rrclVTa 8l' aUTOU TOV eEov AEYETal, OVOl1a Kat aUTO rrEplEXOV <1Yvwa-
TOV <J1]l1aalav, OV Tporrov Kat TO eEos rrpooayopEUl1a aUK OVOl1cl EaTlV,
aAAa rrpclYl1aTOS 8U(JE~1l'Y1lTOU I1<j>UTOS fI <j>uaEl TWV av9pwrrwv 86~a.).
Voir encore I Apol. 10,1 (T {J 111l&Vt OVOl1aTl 9ET {J KaAOUI1Ev(j». Sur la
theologie des noms divins chez les Peres de l'Eglise, voir L. VANY6, art.
«Nom », DECA II, p.1760-1761.
112. a. I Apol. 5, 2 (...aAAa BEEl auVllprraal1EVOl Kat 111'] rrlOTcll1EVOl 8al-
l1ovas ElVal <j>avAous 9EOUSrrpoowvol1a(OV, Kat OVOl1aTl EKaaTOV rrpo<J1]-
YOpEUOV,arrEp EKaaTOS EaUT {J TWV 8all10VWV ETl9ETo); II Apol. 5, 6 (' Ovo-
l1aTl yap EKaaTov, arrEp EKaaTos EauT {J TWV aYYEAWV Kat TolS TEKVOlS
E9ETo, rrpoollyopEuaav). Voir encore I Apol. 9, 1-3; I Apol. 55,7.
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FONCI10NS ET VALEURS DES NOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
111
VII-HERMENEUTIQUE
De meme que es titres christologiques sont voulus par Dieu, sa
Parole manifestee dans es Ecritures, ne petit etre comprise que si
l'on prend en compte la signification cacheedu texte, et la valeur
intrinseque de chaque mot, au-dela de sa signification immediate.
Justin reconnal tau texte grec desEcritures Ie meme statut de texte
revele que la tradition rabbinique au texte hebreu. D'ou l'appli-
cation de techniques exegetiquessimilaires : rapprochements de
passages omportant un meme mof13, analogiesphonetiques ou
semantiques. De cette methode, Ie Dialogue offre plusieurs
exemples, dont nous restituons ici les plus significatifs :
1) AuTpoua8al / AOUTpOV.
Dial. 19.6. [...] C'est pour la meme raison, donc, qu'il vans a
ordonne Ie sabbat pour que vans gardiez a memoire de Dieu.
Et c'est bien la ce que son Verbe signifie lorsqu'il dit: (Ez.20,
12.20)fin que vous sachiezque e suis e Dieu qui vousa rache-
tes «() AUTp<uauIlEvor:;Vllar:; )114.
2) XpLOTOU XPLoVTaL.
Dial. 40. 1. Donc, Ie mystere de l'agneau que Dieu a ordon-
ne (ct.Exod12, 1.27; euL 6. ; I Cor. . 7)d'immoler comme Paque etait
type du« Christ» (TiJTros ~v TOUXpLCJTOU). 'est avec son sang,
qu'en raison de leur foi en lui, ceux qui croient en lui (ct. Exod
12,7.13.22)oignent XPLoVTaL) leurs propres maisons, c'est-a-dire
eux-memes. Car la forme en laquelle (ct.Gen. ,7)Dieu a modele
Adam devint la (ct. Cor.3,16.17; , 19)maison du (ct. Gen. , 7)souftle
qui provenait de Dieu, comme vous pouvez tons Ie com-
prendre.
113. Les aspects litteraux de l'exegese de Justin -generalement negliges-
font l'objet d'une etude particuliere dans l'Introduction a l'edition annon-
cee du Dialogue.
114. Le participe () AUTpIl)(Ja~Evo<:;< delivrer en payant ran~on») est ici
substitue a () <l'Yla(wv «< sanctifier» : LXX). La Passion est en effet con~ue
comme une «ran~on» payee par Ie Christ pour libeler l'humanite de l'es-
clavage du peche (ct. Mc 10, 45: 8laKOvfJ<JalKaL80uval Ti']v tjJUX1'1VuTou
AUTPOV lVTL 1TOAAWV).'association entre Ie bapteme et la Passion, fre-
quente dans Ie Dialogue (cf.13, 1.9; 30, 3; 86, 1.6; 131, 3) est sans doute
suggeree ici par l'homophonie AUTpofueal I AOUTpOV.
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BOBICHON
3) 'AYUYElV I hVVUYWYflS' aauYllS' I UTTOOUYllS'UTTO(VYlOV.
Dial. 53. 4. Si l'Esprit prophetique, avec Ie Patriarche Jacob,
mentionne des lors qu'il aura en sa possession une (cf. Gen. 9,11;
Zach. , 9; Matth. 1, )aneSSeportant Ie joug (OVOV UTTO(VYLOV)vec
son anon, et en outre, comme je viens de Ie dire, (cf. Matth. 1,
2)qu'il a ordonne a ses disciples de lui amener (ayaYELv) les
deux animaux, c'etait une prediction de ceux de votre Syna-
gogue (LuvaYWYf)S'), avec ceux des nations qui devaient croi-
re en lui. De meme, en effet, que de ceux des nations l'anon
sans bat (aaaYf)S') etait un symbole, de ceux de votre peuple
l'anesse (cf. Zach. ,9)batee (UTToaayl'IS') l'etait pareillement: car
vous avez la loi imposee par les prophetes.
A'Y'YEAOS- a1TOaTOAO';.
Dial. 75. 3. Que les prophetes (cf.Exod. 3, 0)envoyes aiTo<JTEA-
AOI1EVOL)our annoncer (a'Y'YEAAELV)e qui vient de lui sont
dits (ibid')anges a'Y'YEAoL)t envoyes (aiTo<JToAOL)e Dieu, cela
parait aussi en Isale. Isale dit en effet quelque part: (Is.6,
8)Envoie-moi ('A 1TOoTEL),OV1E).Que par a.illeurs celui qui reCtut
Ie nom de Jesus (Josue) rut un prophete puissant et grand, c'est
pour ousevident.
I Apol. 63,5.11 est egalement appele Ange (a'Y'YEAOS-)tApotre
(aTTOaToAOS-),ar it se fait Ie messager (aTTa'Y'YE)..)..El)e
tout ce qu'it faut connaitre, et il est envoye (aTTouTEAAETal)
pour reveler tout Ie message (Qua a'Y'YE)..)..ETal),omme lui, IeSeigneur,
nous I'a dit (Matth. 10,40 pll.) : «Celui qui m'ecou-te
ecoute celui qui m'a envoye (TOU aTTooTElAaVTos-J.E) 115.
5) ~uva~lV / 8a(~wv / ~a~aO"K6S'; O"KUAa / EO"K1JAEU~EVOl /O"K1JAEOOaO"
/1TpOO"K1Jv1lO"aVTES' ~a~aO"K6S' = 8a[(~wv] + ~a['Yol]
+ O"KU[Aa ?
Dial. 78. 9. Car la parole d' sa'ie (Is. S,4)Il prendra la puissance
(8uva~lv) de Damas (~a~aO"KOV) et les depouilles (O"KUAa) de
Samarie, signifiait que la puissance (8uva~lv) du mauvais
demon (8a(~ovoS') qui habitait a Damas (EV ~a~aO"Kt\J) serait
vaincue par Ie Christ au moment me-me de sa naissance, ce
qui, c'est prouve, s'est effectivement produit. Les mages (~a-
115. Trad. A. WARTELLE.
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FONCllONS ET VALEURS DES NOMS
DANS LES ECRITS DE JUSTIN MARTYR
113
rOt) en effet, livres comme des depouilles (EcrKUAEV[1EVOL)
toutes sortes de mauvaises actions, auxquelles leg avait pous-
ses ce demon (OOL[10VlOV), ct.Malth. , l)vinrent, adore-rent (TTpoo-
KUv-rlcraVTE';) e Christ, et apparurent affranchis de la puissan-
ce (8Wcl[1EW';) qui avait fait d'eux des depouilles
(crKUAEOOclm,,;), et dont Ie Verbe signifie pour nous, en mys-
teTe, qu'elle habitait a Damas (EV ~a[1acrK<\J)'
6) 'AVE1TauaaTO / E1TaooaTO / &Sl1aTa /8(8waLv.
Dial. 87. 5. (l'Esprit prophetique) s'est donc (cf.Is.U,2)repose
(QVETTUUUUTO),'est -a-dire qu'il a cesse (ETTUUUUTO),uand fut
venu celui apres qui, une fois revolus Ies temps de cette eco-
nomie que parmi Ies hommes il a realisee, ces chases
(devaient) disparaftre (TTuuuuu8ul) de chez VallS, et en Iui a
nouveau trouver a reposer (QVclTTUVUWAU[36VTU),conforme-
ment ala prophetie, pour devenir des (cf.Ps.67,19;F.phes.,8)dons
(OOflUTU)que par Ia grace de Ia puissance de cet Esprit il accor-
de (8(&Juw) a ceux qui croient en Iui, seion qu'il en sait cha-
CUD igne.
7) 'HpW8T]v l >POOI1EVOs-?
Dial. 103.3. Et I'expression (Ps. 1, 4)ilsont ouvert contre moi
leur gueule, ainsi que Ie lion qui dechire et rugit (l >PUOI1EVOs-),
designe celui qui etait alors Ie roi des lulls, et qui portait aussi
Ie nom d'Herode (' Hpw8T]v) ..
8) haTQVaS = aQTa (cliTOOTclT1)S)vas (O<j>lS); QTa /
cliTOOTclT1)$".
Dial. 103.5. au bien alors Ie (Ps. 1, 4; Petr.,,8)lion qui rugissait
contre lui designait ce diable que MoIse appelle (ct.Gen. ,1 s.)ser-
pent, qui en (cf. ob.1,6s.)Job et (ct.Zach. ,1-2)Zacharie est appele
diable, et A qui (cf.Matth.,10)Jesus 'adresse en Ie nommant Sata-
nas (2:QTQVaS),ndiquant par IA qu'il a rec;u un nom compose
d'apres l'action qu'il a accomplie. Car Sata (aQTa), dans la
langue des Juifs et des Syriens signifie « apostat » (cliTOOTclT1)S),
etnas (vas) est Ie mot d'oul'on traduit« serpent ». De cesdeux
expressions un seul nom est forme: Satanas (2:QTQVaS116.
ll6. L'etymologie de Justin s'appuie sur a transcription grecisee cruTUV.
as-)de l'hebreu 1t;J4'Satan).Le mot sermt ainsicomposede deux elements
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114
PH. BOBICHON
8) KaTT1'Ya'YES' KUVES' auva'Yw'Yll / KUVTJ'YOVS'KUVTl'YllaaVTES'
/ awtlX9TJaav / (a'YWVL(OflEVOL).
Dial. 104. 1. Et ces paroles: (Ps.21.16)...etu m'as etendu (KaTll-
yaYES- [lE) en poussiere de mort. (17)Car des chiens (KlIVES-)
nombreux font cercle autour de moi, synagogue (uuvaywyl'j)
de mechants, iIs m' ont enveloppe. lIs m' ont perce mains et pieds,
(18)ils ont compte tous mes os; ils m'ont considere et observe.
(19)/ls se sont partage mes habits, et sur mon vetement ils ont
jete Ie sort: cornme j'ai deja lit, elles annon~aient a quelle sorte
de mort la synagogue (uuvaywyl'j) des mechants devait Ie
condamner; illes appelle chiens (KlIvas-), en montrant egale-
ment qu'il y a des chasseurs (KUVllYous-), car ceux qui avaient
conduit la meute (KUVllYlluavTES-) s'etaient eux-aussi rassem-
bles (uuvTlX811uav (ct.Malth. 6, 7.59;Mc.14,53.55)en ettant tollS leurs
going (aywvl(O[lEVOl) a Ie faire condamner17. Cela aussi est
ecrit dans leg Memoires de ses Apotres.
aaTo., rapporte a l'hebreu ~ (satah =« s'ecarter »,« etre infidele» = arroo-
TaTT]S'), et -vaS', correspondant a ~I;T) (na'hash = «serpent»). Le veritable
gens de l'hebreu 1~~ (satan) est «l'adversaire» ou «l'accusateur» (satan
= «hair~, «detester », «accuser»): il est restitue, entre autres, par
ORIGENf-, C. Cels., 6, 44. En Adv. Raer., V, 21, 2, et Dem., 16, IRENEE
reprend t4n partie I'etymologie proposee par Justin: 'ErrEl8Tj KaT<1yvw~T]V
arrEaTT] 11°V 8Eov, ~aTavo.S' EKATj8T]KaT<1 TiJv Ej3pa"CKi]v AaAlav, () EaTlV
arrooTaT1)S' Dans la Demonstration de fa predication apostolique, 16, il
restitue l'etymologie veritable «< 'adversaire»).
117. Justin s'appuie sur la structure du verset (EKuK)..waav ...KVVES"
...avvay(JJy"iJ ...TTEPLEaxOV)dont il reprend chaque terme dans son com-
mentaire : KWaS' = KWES'; awTjX8T]aav = O"Vvaywyr); rrOVT]pEOO~EVWV TTOV1)-
pEOOJiEVWll= a'Ywvl(,o~EVOl Errl Tt{ KaTa8lKaaaa6al aiJTov). Dans ce ver-
set, leg chasseurs (KUVT]'YOUS'..KUVTTYT\aavTES') ne sont pas, camille les
chiens, explicitement mentionnes (ouS' KlwaS" KaAEl). Mais leur presence
est suggeree (~T]vVwv) par la synonymie EKVK)..UKTall..TTEPLEaxOV ui lais-
se entendre (comme au verset 13: TTEPLEKVK)..UKTav..TTEpLEaxov) que les
persecuteurs du Christ forment deux groupes distincts, bien qu'associes
(dans Ie ~as contraire, la moitie du verset suffirait) : la «synagogue»
(avlIaywyi]) des mechants est donc constituee ala fois de ceux qui ant
encercle Ie Christ et de ceux qui I'ont enveloppe, leg uns et les autres s'etant
«reunis» (auvTjx8T]aav) pour realiser ce dessein (KVVES" = ceux qui ant
arrete Ie Christ), ou pour Ie concevoir (KVV1Jy jaaVTES" = leg didascales qui
leg avaient « ameutes »). Justin souligne ainsi, comme a travers la meta-
phore des veaux et des taureaux (Dial. 103, 1.2), la responsabilite com-
mune de, ceux qui mettent en reuvre la condamnation (KaTa8lKa(,Elv
...KaTa8lKaaaalJal) et de ceux qui I'inspirent. La le~on proposee tend a
restituer un raisonnement dont la methode et I' esprit sont tout a fait carac-
teristiques de l'exegese pratiquee par l'auteur du Dialogue.
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FONCflONSETVALEURSDESNOMS
DANS LES ECRITS DE JUS11N MARTYR 115
9) llup(y:; / pU1TapU;a<j>Eulv / aiTTll1<1>lEUI1EVOlll1UTla
, ,
al1apTla.
Dial. 116. 3. De meme que ce (cf.Zach. , J]esus, appele (ibid.)pretre
par Ie prophete, est apparu poTtant des (ibid., )vetements souilles
(pulTapa lflaTla) pour avail epouse, est-il dit, une prostitute,
et qu'il fut designe comme (ibid.,2)tison aTTache au feu (BaA-oc:;
E~EfJlTafJflEvoc:; EK lTUpoc:;)pour avoir obtenu (ibid.,4)remission
des peches (Ci<j>EfJlV flapTlwv) -alors que (ibid., )le diable, son
adversaire, se trouvait (ibid.,2)reprouve -, de meme nODS qui,
par Ie nom de Jesus-Christ, avons (cf. Gal.3,28)comme un seul
homme cru en Dieu createur de toute chose, qui par Ie nom
de son Fils premier-ne avons (cf.Zach.3,4)depouille les vetements
souilles (Ta pUlTapa llJ.aTla) -c'est-a-dire les peches (TOUTEfJ-
Tl Tac:; aflapTlac:; a1T11IJ.<I>lEfJIJ.EVOl)enflammes (lTUPW8EVTEC:;)
par Ie Verbe de sa vocation, nODS sommes la veritable race
archipretresse de Dieu.
10) Euxal Kal EUxapLaTlal EUxapLUTlaL EUapEUTOl
EUxapLaTlaL= EUapEUTOLvulaL?
Dial. 117. 2. Aujourd'hui encore, par goOt de la querelle, vans
clites que ce sont leg (ct.Mal1, 0)sacrifices 8oolas-) offerts a Jeru-
salem, parmi ceux qui y vivaient alors, appeles Israelites, que
Dieu n'accepte pas. En revanche, leg prieres (EUX<lS-)manant
des hommes de cette race qui se trouvaient alors dans la Dias-
para, il aurait dit leg agreer, appelant ces prieres (EUX<lS-)ct.
Mal1,11)sacrifices 800las-). Or que leg prieres comme leg actions
de grace (Kal EUxal Kal EuxapLuTlaL)118, i elles sont presen-
tees par ceux qui en sont dignes, soient leg seuls sacrifices
(800laL) parfaits et agreables (EuapEUToL) Dieu, je l'affirme
moi aussi.
118. Assonance (Euxat Kat EiI)(apL(JTLal) reprise en Dial. 117, 5. Elle doit
etre opposee a EiI)(aS ...Kat 9ooLas (117,4). L'expression Euxat Kat Euxa-
pLO TLaL e trouve deja chez PHlLON, De Spec. leg., 1, 97 (' 0 BE TWV 'Iou-
8aLwv ciPXLEPE1JSu 110VOVmEp Q'lTaVTOSciv9pW'lTWV EVOUS...TaS TE EiI)(aS
Kat TaS EuxapLO TLas 'lTOLElTaL). Passage cite par I. JUSTER, Les Juifs dans
l'empire romain, Paris 1914, p. 334, a propos des prieres chretiennes pour
les Iuifs, progressivement reduites et remplacees par des epithetes pole-
miques dont la vehemence se trouvait renforcee par Ie cadre liturgique
011 elles etaient prononcees.
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PH. BOBICHON
11) KA1l0EWt; / EK<lAEOEV
EKKATlUta.
Dial. 42, 3. Quand il dit, comme au nom de plusieurs (Is.53,
2)Nous avons annonce, en sa presence, et ajoute (ibid)commeun
petit enfant, c'est a l'evidence une allusion a la multitude de
ceux qui, soumis a lui, ont obei a son commandement (TlJ
KEAEUUELuTou), et soot devenus tOllS comme un seul enfant.
C'est ce qu'on peut voir aussi pour Ie corps: (cf./Co/: 2, 2)des
multiples parties qu'on y compte, l'ensemble est appele
(KaAElTal) et ne fait qu'un seul corps. C'est ainsi que Ie peuple
et Ekklesia (EKKATlu(a), luralite d'hommes par Ie nombre,
mais formant une seule realite, soot appeles(KaAouVTaL) et
designes d'une unique denomination (TlJ I1.Li KAllUEL).
Dial. 119. 5. Qu'est-ce done que Ie Christ a accorde la de plus
a Abraham? C'est que par une me-me vocation (8La TflS-OflOl-
as- KAllUEWS-),e sa voix, ill'a appele (EKc1AEUEVuTov), lui
disant (ct.Gen. 2,)de sortir de La erre ou il habitait, et noDSaussi,
par cette voix il nODS appeles (Kallifla.s- ...EKc1AEUE),t nODS
sommes sortis, desormais, de la maniere de vivre qui etait la
notre, quand, partageant la conduite des autres nations qui
habitent la terre, nODS ivions dans Ie mal. Et avec Abraham,
noDs heriterons de la Terre sainte, heritage que nODS ece-
vrons pour une etemite sans fin, (ct.Gal. ,7)etantfiLs d'Abraham
par une me-me oi.
12) IapallA = Lapa (clv8p<UlTO'3)l1A BvVal1l'3).
Dial. 125, 3. Voici donc ce que signifie Ie nom d'[srael (Iapary.):
« homme vainqueurd'une Puissance (~C'f; VlKGlJ ool1lv). Car
« Isra» (TO Yap Iapa) veut dire « homme vainqueur» (avepwlTC'f;
VlKW), et «el» (TO&: ~),« Puissance» BOOl1l'3119.C'est encore
119. L'explication de Justin correspond a l'hebreu.,~ i11~ ~'I:\ (ish sarah
E/), d'apres Gen. 32, 29: «Jacob ne sera plus desormais ton nom, mais
bien Israel, car tu as oute contre des puissances celestes (o :t.,~-c'-l 1I;1 ;1~-'#
= ki sarta 'im elohim) et humaines, et tu es Teste fort. » (Traduction du
Rabbinat, Tel Aviv, 1994); d. Os. 12,4. LesLXX ont: 'lapaTjA EaTaL TO
ovo~a aou, OTLEVlaxuaas- ~ETa 8Eou, Kat ~ET' civ9p(.J1TWVwaTos- EcrlJ.
La tradition ecclesiastique a prefere comprendre, en s'inspirant de Pm-
LON .,~ ~l ~'I:\ = ish raah el = litt. « un homme a vu Dieu ». Analyse des
references philoniennes, rabbiniques et patristiques, in : Yo'hanan COHEN-
YASHAR,« Israel- roeh EI », Tarbiz 41 (1971), p. 286-292 (hebr.).
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FONCflONS ET VALEURS DES NOMS
DANS LES ECRn'S DE JUSTIN MARTYR
117
cela qu'il fut prophetise qu'une fois devenuhomme (livepWTTOS'
'YEVOI1EVOS')e Christ devait faire, a travers Ie mystere du com-
bat que Jacob livra contre celui qui, apparu ange parce qu'il
servait la volante du PeTe, etait neanmoins (ct.Gen. 2, 8.30)ieu
en tant qu'enfant (ct.Col. ,15;Provo,22)premier-ne de l'ensemble
des creatures.
L'analogie porte tantot sur l'ensemble du mot, tantot sur l'une de
sessyllabes, ou sur Ie detail decompose. L'explication s'appuie sur es
sonorites (15, 5; 53, 4, etc) et/ou sur Ie signifie (77,4; 75, 3), et prend
parfois une forme etymologique (103,5: aaTavusl20; 125,3: ' ap<lTj).).
Elle justifie des interpretations de nature psychologique et morale (53,
4; 103, 3; 104, 1), symbolique ou spirituelle (15, 5; 78, 9; 116, 3 etc.).
Certaines de res lectures sont explicites, d'autres a peine decelables
par une lecture silencieuse... n y a a cela une explication pratique: jus-
qu'au Moyen-age, la lecture se faisait Ie plus souvent a haute VOix121,
et il est vraisemblable qu une reuvre comme Ie Dialogue etait desti-
nee a une lecture en publicl22. Mais l'explication tient aussi a la natu-
re propre du texte revele : c'est egaiement par la voix que se commu-
nique Ie genscache de la Parole divine. La plupart des passages en
question demeurent obscurs et leur contenu apparemment arbitraire
si l'on ne fait pas intervenir res similitudes phonetiques qui constituent
Ie fil directeur du raisonnement exegetique (d'ou l'absence de com-
mentaires dans leg editions)l23. Tout se passecomme si Justin s'adres-
gait a un public familier de cetle technique interpretative, et convain-
cu de sa valeur: leg conclusions auxquelles elle donne lieu ne
provoquent jamais ni interrogation ni scepticisme de la part de Try-
phon.
Ces explications appellentparfois es developpements u Cratyle
(en particulier la decompositionde mots en syllabes,et les homo-
phonies), reuvre que Justin connaissait vraisemblablement.
120. Pour les differents noms du diable, voir aussi Apol. 28, 1.
12L Ct. Histoire de La ecture dans e monde occidental,sous a direction
de G. CAVALLO et R. CHARnER, Paris, Seuil, 1997,passim; A. MAN-
GUEL, Une histoire de a lecture,coli. Actes Sud, 1998,p. 59 s.
122. Ce qui correspond it. 'activite de Justin, et contribue it. ustifier les
tonguescitations scripturaires que comporte l'reuvre.
123. Lecture qui trouve confIrmation dans les notations marginates du
manuscrit (Parisinus Graecus450). La plupart des passages ignalespar
l'abreviation de aT]~E(JXJalorrespondent t.des istes de titres, des consi-
derations etymologiques, ou des changementsde noms.
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PH. BOBICHON
Mais il est egalementpossible que soil appliquee ci, au texte grec
des Ecritures, une methode observeedans es ecoles abbiniques,
ou dans les synagogues:ces nterpretations qui reposent sur les
signifiants des racines ou des phonemes sont en effet courantes
dans exegese midrashique. D. BANON n resume a methode et
l espnt dans un passage ui mente ici d etre cite, tant ce qu il decrit
convient a certaines exegeses e Justin :
«La sollicitation petit donc se focaliser sur un mot, et la
recherche etymologique -qui joue sur les signifiants des
racines hebralques riches en harmoniques,signifiants qui
sont proches,mais dont les signifies ont des connotations
differentes -sert alors de pretexte. L etymologie est tine
hermeneutique.Par la forme de son recours aUx essources
de la langue,par la remotivation et l isolation des elements
lexicaUxdans es tours phraseologiques ...), par la remoti-
vation et l isolation des elements (prefixes, suffixes, radi-
caux) dans Ie mot lui-meme, pris seul, refaisant jouer
ensemble es piecesuniques selon tine organisation qu el-
Ie preetablifl24. Elle atomise es mots, es fragmente, afin,
sinon de remonter a l origine de leur sens, du moins de
reveiller les echos de toute leur histoire anterieure l25.
Cette tentative ne pouvant ogiquements arreternulle part,
puisque tout ce a quoi on remonte utilise toujours-deja des
mots. Cette attention au mot (qui n est pas itteralisme vii
et meprisable 126)ert a donner du eu ou du mouvement
ou de la marge,pour que Ie processus interpretation puis-
se advenir. Elle permet de faire decoller minimalement Ie
sensde la lettre. Elle eleve etymologie a la dignite philo-
sophique en demineralisant a lettre »127.
Ce rapport originel du langage au choses, determinant pour
l hermeneutique, est egalement exprime par M. FOUCAULT:
« SODSa forme premiere, quand il rut donne aUK omInes
par Dieu lui-meme, Ie langage etait un signe des choses
absolumentcertain et transparent,parce qu illeur ressem-
blait. Les noms etaient deposes sur ce qu ils designaient,
comme la force est ecrite dans Ie corps du lion, la royaute
dans Ie regard de l aigle, comme l influence des planetes
124. Henri MESCHONNIC,Le Signe et le Poeme, Paris 1975, p. 379.
125. G. SfrEINER,Apres Babel, une poetique du dire et de la traduction,
Paris 1978,p. 34.
126. a. QRIGENE,Traitedes Principes, V, 1,7.
127. La Lecture infinie. Les voies de l interpretation midrashique, Paris,
Seuil, 1987,p.143-144.
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FONCflONSETVALEURSDESNOMS
DANS LES ECRffS DE JUSTIN MARTYR
119
est marquee sur Ie front des hommes: par Ia forme de la
similitude. Cette transparence lit detruite a Babel pour la
punition des hommes. Les langues ne furent separees es
unes des autres et ne devinrent incompatibles que dans a
mesure oil flit effacee d abord cette ressemblance aux
choses qui avait ete la premiere raison d etre du Iangage.
Toutes les languesque nous connaissons, ous ne les par-
Ions maintenant que sur ond de cette similitude perdue, et
dans l espace qu elle a laisse vide. II n y a qu une langue
qui en garde a memoire, parce qu elle derive tout droit de
ce premier vocabulaire maintenant oublie; parce que Dieu
n a pas voulu que Ie chatiment de Babel echappe au sou-
venir des hommes; parce que cette langue a dfi servir a
raconter a vieille Alliance de Dieu avec sonpeuple ; parce
qu enfin c est dans cette langue que Dieu s est adressea
ceux qui l ecoutaient. L hebreu porte donc, comme des
debris, es marquesde la nomination premiere. Et res mots
qu Adam avait prononces en es imposant aux animaux, ts
sont demeures, au moins en partie, emportant avec eux
dans leur epaisseur,comme un fragment de savoir silen-
cieux, es proprietes immobiles desetres... »128.
L hermeneutique de Justin ne pent donc etre comprise que si
l on prend aussien compte celie dimension inguistique. Justin ne
neglige pas, a l occasion, d avoir recours a la lettre du texte. Celie
sorte d exegese,qu il reproche a ses nterlocuteurs (Dial. 113,2),
lui semble moins meprisable orsqu elle sert sesdesseins...11 est
pas, sur ce point, exempt de contradictiow29.L usage d une telle
methode est, a vrai dire, chez lui sporadique, et souvent discret.
Caracteristiques qui s expliquent sans doute par la conscience
d une telle contradiction, l hesitation a faire reposer son nterpre-
tation du texte surone methode mal maltrisee, et es resultatsdece-
vants de celie methode dans a perspective chretienne.
VII -NOM ET PREDISPOSITION
Le rapport que Ie nom entretient avec a realite, Ie groupe ou la
personne designee,varie selon qu il est d origine divine, demo-
niaquel30 u humaine. 11 emble bien en effet que l apologiste dis-
128. Les Mots et les Choses, aris 1966,p. 51.
129. Comme arigene, parfois.
130.La formule utilisee pour expliquer Ie nom des divinites paiennessou-
ligne bien l ambigllite du lien qui unit ces demieres a leurs adorateurs:
«Ces hommes eg appelerent des dieux, et donne-renta chacund eux Ie
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PH. BOBICHON
tingue les noms qui ressortissentau(x) langage(x)des hommes, et
ceuxqui emanentde Dieu: ainsi, precise-t-ildans ' Apologie,«l'im-
position d'un nom n'implique aucun ugement favorable ou defa-
voTable,si l'on fait abstraction des actions qui tombent SOliS'ac-
ception de ce nom »131;« e nom que l'on porte ne saurait en effet,
raisonnablement, etre objet d'eloge ou de blame si l'on ne petit, a
travers les actes, aire la preuve de quoi que ce soil d'honnete ou
de malhonnete »132.11'y a donc pas un determinisme du nom:
quand celui-ci estd'origine humaine, il doit etre considerecomme
purement contingent, etles analogies qu'il evoque (p. ex. XplU-
TlUVOl / XPT)UTOTUTOlI33),omme fortuites: ce sont les actes
(npaCElC;, P'YU) ui donnent son sens au nom que l'on porte, et
non l'inversel34.11y a la tine nouvelle affirmation du libre arbitre,
sur lequel Justin insiste a plusieurs reprises dans Ie Dialogue et
l'ApologieI35. Celui-ci ayant ete donne aux anges comme aux
hommes,le nom de ~UTUVa.C;'assignepas une fatalite, mais resul-
te de la faute commise: «ce diable... a qui Jesuss'adresse en Ie
nommant 'Satanas', ndiquant par la qu'il a re~u un nom compo-
nom que chacun s'etait attribue» (I Apol. 5, 2; voir aussi I Apol. 9, 1-3).
On ne sait plus tres bien qui attribue Ie nom, et qui Ie re~it...
131. I Apol. 4, 1 (OvOl1aTOS' I1EV ouv lTpoawvul1£a OUTEa'Ya8ov OUTE KaKov
Kp[ VETal aveu TWV lmOlTllTTOOOWVT{\) 6v6l1aTl lTpciEEWV).
132. Ibid.t 3 (' E~ 6v6l1aTOS' I1EV Yap ii ElTalVOS ii KoAaalS aUK av EUAO'YWS
'YEVOl O, ftv I1TJTl EVapETOV i <j>aUAOV l' EP'YWValTo&£KVUa8al 8VV1jTaL).
133. Ibid. I
134. J. DANIELOU, Message evangelique et culture hellenistique, Paris 1960,
p. 305, oppose Ie Dieu qui n'a pas de nom it« une theorie du langage selon
laquelle les noms sont etablis (8ETQs) par les hommes, mais en relation
avec la nature « >valS) des objets». «C'est pourquoi», ajoute-t-il, «il
n'existe liIas de nom propre (K\iPlOS) de Dieu, parce que sa nature est
cachee (I Apol. 10, 1 ; 61, 2; II Apol. 6, 1). Or ceci retlete la theorie du lan-
gage d' Albinos (Epit., 6, 10-11), elle-meme dependante du Cratyle ». nest
indeniable que Justin insiste it plusieurs reprises sur Ie caractere ineffable
de Dieu, mais beaucoup plus douteux qu'il etablisse un lien entre Ie nom
des objets et leur nature: aucun texte ne vient etayer cette supposition,
et les propos qui viennent d'etre cites laissent entendre, au contraire, que
Justin considere avec mefiance les associations que peuvent suggerer cer-
taines homophonies. Dans Ie Cratyle, lorsque de tels liens sont admis, its
sont plutot attribues aux dieux. Sur la nature des noms «efficaces », leur
«signification mysterieuse », et leur emploi dans les exorcismes ou la
magie, voir ORIGENE, Cels., I, 24-25; sur Ie pouvoir naturel et incanta-
toire des noms bibliques selon Ie meme auteur, voir M. HARL, in:
ORIGENE, Philocalie 1-20 sur les Ecritures (S. C. 302), pp. 387-397 et 447-
457.
135. Cf. Dial. 45, 4; 47, 5; 88, 4.5; 93, 3; 102, 3.4, etc.
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FONCfIONSETVALEURSDESNOMS
DANS LES ECRrrs DE JUSTIN MARTYR
121
se d apres action qu ii a accompiie»136. ews es noms donnespar
Ie PeTe,par Ie Christ, ou partes par Ie Verbe137 ntretiennent un
lien symbolique ou agissantavec un ieu, une fonction, ou une mis-
sion, mais celui-ci est oujourspresentecomme posterieurou simul-
lane a ce qu il traduit, et amais comme l expression d une fatali-
te ou d un quelconque determinisme.
*
VIII -CONCLUSION
Le nom a donc, chezJustin, une dimension cognitive, litteraire,
identitaire, ethique, hermeneutique, et theologique. La concep-
tion que l Apologiste a de son role presente d indeniables simili-
tudes avec onomastique platonicienne, exegesemidrashique ou
philonienne, ou encore certaines conceptions iees a la magie. La
part d influence qu il convient d accordera chacunede cessources
est toutefois difficile a determiner: certaines de ces conceptions
etaient communesa des courants de penseeque Justin a, au COUTS
de savie, rencontres,cotoyes,ou adoptes.Mais l usage qu il en fait
s ecarte de chacune d entre elles par sespresupposes,son appli-
cation, et sesconclusions: Ie rapport du langage a la realite n est
pas, pour Justin, e signed une fatalite que seulespourraient conju-
rer des pratiques irrationnelles. 11 esulte au contraire des actes,
humains ou divins, et se decouvre par la raison, manifestant ainsi
cette liberte que l homme partage avec Dieu.
136. Dial. 103, 5 (ovo~a alTO TflS lTpci~EWS S ElTpa~E JUv9ETOV T1lfJci~E-
vov atITov ~T]vUwv) ct. I Apol. 28, 1.
137. Voir ci-dessus.
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Takashi ONUKI
Universite de Tokyo
LE MONDE COMME MATRICE.
ASPECT SEXUEL DE LA NATURE ET
ASCETISME CHEZ LES GNOSTIQUES*
La symboliquesexuelle es mythesgnostiquesutilise image de a matri-
ce au sens hysique et neutre de ieu de ormation de l embryon ainsi qu au
senspositif de « matrice de routeschoses pleroma) »,.mais aussi resnega-
tivement, our representer ensemble u monde visible en rant que domai-
ne du mal, puisqu il nese maintient quepar les relations sexuellesdu male
et de la femelle. Dans ce demier cas, a mort physique n est,pour le vrai
moi des gnostiques, ien d autre que le moment de son exode hors de la
«matrice »,de memeque e cadavre estantsur a terre n est rien qu un pla-
centa (chorion), et que la naissance hysique n est qu une chute dans la
«matrice ». Ce point de vue n est evidemmentpas sans analogiesdans e
mondeantique,hellenistique t oriental (Origene,Porphyre,Seneque, arc-
Aurele, etc...). Mais ses epresentants e le rattachentpas toujours Ii une
structurecosmologique lairementdeveloppee. eule, a ParaphrasedeSem
clarifie pour la premiere ois cettestructure. Elle decrit en effet l ensemble
du monde visible comme un grand organegenital eminin dont l ascetisme
gnostique vise i la destruction.
The sexual symbolism of the gnostic myths uses he image of womb in
the physical and neutral sense s theplace where an embryo grows or in a
very positive sense s the « matrix of the all (ple-rama)». But on the other
hand, he same mage s used n a verynegative ense o represent he whole
visible world as the domain of evil maintaining itself by meansof sexual
intercourse betweenmale and female. In this last case, he physical death,
* Cet article, qui est a traduction d une partie de mon ouvrage Etude sur
Ie gnosticisme ed. Iwanami, Tokyo 2000),a ete prononce a l occasion de
l une des quatre conferencesque ai donnees en mai 2000 a l Ecole pra-
tique des halites etudes, section des Sciences eligieuses. I s agit du pre-
mier chapitre de la premiere partie: Genealogie de l ascetismedans Ie
christianismeancien -gnosticisme,actesapocrypheset systememonastique
primitif. La traduction franc;ajseen a ete assureegrace aux bons soins de
C. Nakano et des Prof. M.-J. Pierre et J.-D. Dubois. Les notes ne sont pas
exactementceIles paTties ans ouvrage japonais; eIles ont ete adaptees
pour les ecteurs occidentauxd Apocrypha. Je dois m excusera l avance
de ce que, faute de temps, roes referencesbibliographiques ne sont pas
exhaustives.
Apocrypha 11, 2000,p. 123 -145
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124
T. ONUKI
for the true self of the gnostics, s but the very moment of the exodus rom
the « womb» and likewise the corpse remaining on the earth is but after-
birth (chorion), while thephysical birth is only a fall into the « womb ». Of
course n the ancient hellenistic and oriental worlds this view of the matter
did not stand alone without analogies (Origen, Porphyry, Seneca,Marc
Aurel, and so on). But they werenot always related o a clearly developed
cosmological ramework. It is theParaphrase ofShem hat or the irst time
made this framework clear. It describes he whole visible world as huge
female genitalsand declares ts destructionas the aim ofgnosticasceticism.
I. L'image de la matrice chez eggnostiques
On sait depuis longtemps que les textes gnostiques en general,
et en particulier les mythes du salut, sont colores d'images ou de
symboles sexuels. En principe, il en va de meme dans les ecrits
gnostiques en copte, decouvertsa Nag Hammadi en Haute Egyp-
te en 1945.Apres avoir explore res textes pour les raduire en apo-
nais1,'ai pu noter que I'image de la matrice constituait une carac-
teristique remarquableparmi les symbolessexuelsutilises dans es
textes. En resume, e theme de la «matrice » est mis en reuvre de
trois manieres differentes :
1) Au sensphysique et neutre, la matrice est e lieu de concep-
tion et de sejour du trellis.
2) La matrice serf a designer e domaine rempli de dieux, Ie Ple-
Tome (JtAtlPffi A.a),u bien ce meme domaine ainsi que Ie cosmos
visible entier; c'est Ie Dieu supreme qui est «Ie corps de la mere
de toutes choses».
3) La matrice designe 'ensemble du monde reel, qui subsisteet
se multiplie par la procreation humaine.
Pour illustrer I'usage du premier sens,on peut citer I' Apocalypse
d'Adam (NHC V /578 :18-26).Dans ce texte, Ie revelateur venant
du domaine lumineux est appele «Ie luminaire» ou «I'illumina-
teur» «j>ffi<J'ttlP).ans Ie demier tiers de ce texte (76 :8-85 32), es
1. Bibliotheque de Nag Hammadi I-Iv; ed. SasaguArai et Takashi Onuki,
Tokyo, 1997-1998 t.I = Les mythes du salut; t.II = Les evangiles; .1II =
Les homelies et les epftres; t.IV = Les apocalypses). 'anthologie editee
(T. Onuki, Les mythesgnostiques, okyo 1999)estbaseesur cesouvrages
pour grand public. Dans Ie present article, eg citations des extes de Nag
Hammadi sont generalement irees de la version ranc;aise uand elle exis-
te, et leg sourcesutilisees sont mentionnees en note. Quand il n'y a pas
encore de traduction franc;aiseou lorsque cette derniere differe sensible-
ment de la mienne relativement a mOD ujet, eg extes sont traduits litte-
ralement du japonais en franc;ais.Les differences qui ne concernentpas
directement mon sujet ne sont pas mentionnees.
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125E MONDE COMME MATRICE
treize royaumes terrestres font part de leurs hypothesesa propos
de a naissance u« luminaire ». Toutes es hypotheses ont ausses,
et il faudra attendre Ie demier, Ie quatorzieme royaume, celli de
la « race sans roi », celui des gnostiques,pour obtenir une repon-
se correcte. La matrice apparait lors de l hypothese du troisieme
royaume:
«Le troisieme royaume dit a son propos: «II est issu d une
matrice vierge. II fut rejete hoTS e sa ville, lui, avecsa mere, et
il fut emmene en un lieu desert. II se nourrit la-bas, l vint, il
rec;utgloire et puissanceet de cette maniere il vint sur reaD ,,2.
Si la demiere phrase de ce passage: « de cette maniere il vint
sur eau» designe e baptemede Jesusdans e Jourdain, a « matri-
ce vierge » designesurement a Vierge Marie. Mais une telle inter-
pretation fait encore l objet de discussions parmi les savants3.
On trouve un autre exemple du premier sens dans Ie Temoi-
gnageveritable NHC IX/3, 45 :6-23).Partageant ne certainecom-
munaute de doctrine avec les Valentiniens, la plus grande secte
gnostique chretienne, cet ouvrage les critique tres severement.
Comme on Ie vena par la suite, cet ecrit preche une ethique d un
2. Apocalypsed Adam (NH. V;5),Texte etabli et presente par F. Morard,
Quebec 1985,p. 47.
3. L expression «de cette maniere il Villi sur l eau» est repetee comme
une formule conventionnelle au erme de chacunedes hypotheses, u pre-
mier jusqu au treizieme royaume. Comme on Ie sait,A. Bohlig (Koptisch-
gnostischeApokalypsen aus CodexV von Nag Hammadi im Koptischen
Museum zu Alt-Kairo, Halle-Wittenberg 1963,p. 92) pense gIobalement
que cette expressionestmotivee par influence de la soteriologie zoroas-
trienne. Les etudes posterieures s opposentpresque outes it cette inter-
pretation. La majorite des chercheursnterprete l expressioncomme desi-
gnant Ie bapteme gnostique, ou l avenement du Messie sur l eau,
c est-a-dire Ie monde terrestre compare a «l eau tenebreuse» -et j ap-
prouve moi-meme cette derniere position. a. H.M. Schenke,Orientalis-
tische Literaturzeitung 61 (1966),p. 23-34 (en particulier p. 33); W. Beltz,
Die Adam Apokalypse aus Codex V von Nag Hammadi, Jiidische Bau-
steine in gnostischenSystemen,Berlin 1970 (Habilitationsschrift), p.l44;
G.W. MacRae, The Apocalypse of Adam, in: D.M. Parrott (ed.), Nag
Hammadi CodicesV2-5 and VI with Papyrus Berolinesis 8502,1 and 4,
Leiden 1979 NHS XI), p. 151-195 en particulier p.178); id., Apocalyp-
se of Adam, A New Translation and Introduction, in: J.H. Charlesworth
(ed.), The Old TestamentPseudepigrapha, ol. 1, New York 1983,p. 709-
719 (en particulier p. 716 n.b.). Plusieurs auteurs mettent en relation la
tradition concernant la naissancede Jesus et l hypothese du troisieme
royaume que nous traitons ici: W. Beltz, op.cit., p. 149-150;F. Morard,
op.cit., p. 107; B. Layton, The Revelation of Adam, in: id., The Gnostic
Scrivtures.New York 1987.o. 52-64 (en oarticulier 0.60).
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126
T. ONUKI
ascetisme xtreme. Et les expressionsdu passage ui suit montrent
sans aucun doute que la «matrice vierge» signifie la «Vierge
Marie » :
«Jean (Ie baptiste) fut engendrepar la parole au moyen d'une
femme nommee Elisabeth; et Christ fut engendre par la paro-
le au moyen d'une vierge nommee Marie. Qu'est-ce (donc) que
ce mystere,que Jean ut enfante au moyen d'une matrice usee
par Page,alors que Ie Christ traversa tine matrice vierge ?4...
Selonle deuxiemesens, a «matrice »prend un significationposi-
tive ou active. On peut imaginer que Ie Dieu supreme,ou une divi-
nile de cet ordre, est con~ucomme «matrice de toutes chases»
c'est un etre hermaphrodite et non pas eminin. Ap.Jn (11/1, 4 :29-
5 :11; III/I 7 :15-8:5; BG 27 :8-28 4), l'un des mythes gnostiques
les plus systematiques, ecrit Barbelo, comme 'emanation du Dieu
supreme, «l'ombre de l'esprit parfait et vierge»:
EIle est devenue Matrice du tout car eIle preexiste a toutes
choses,Mere-Pere, Homme primordial, Esprit saint, trois fois
male, aux trois puissances,aux trois noms, androgyne, Aion
etemel, (invisible) entre les invisibles-(images) qui est a pre-
miere a avoir surgi (11/15 :5-11)5.
Dans a Protennoia rimorphe XIII/ , 45 2-7), a revelatrice
Protennoia e eveleainsi:
Ie suis (andr)ogyne.(Ie suisune mere et) un pere. (Ie suis)avec
moi seule, puisque e suis Iie:e) vec moi seule (et run qui) m'ai-
me, andis que Ie Tout (de:bute)par moi seule;je suis a matri-
ce (qui donne Ia figure au) Tout6.
La Priere d'action de graces (VI/7) est plus a classerparmi leg
ouvrages hermetiques que gnostiques au gensstrict. Cependant,
citons uniquement saderniere partie dans aquelle ce qui estappe-
Ie «toi» represente e Dieu supreme:
«L'action de gracesde l'homme qui parvient jusqu'a toi est a
seule (chose) qui fasseque nous te connaissions.Nous t'avons
connue, () lumiere spirituelle, () vie de la vie, nous t'avons
4. Le Temoignageveritable (NH IX,3), Gnose et martyre, exte etabli et
presente par A. et J.-P. Mahe, Quebec-Louvain 1996,p. 109.
5. M. Tardieu, Livre des secretsde Jean, n: Ecrits gnostiques,Codex de
Berlin, Paris 1984,p. 93.
6. Y. Janssens, aProtennoia trimorphe (NHXIII, 1), Quebec 1978,p.39.
J'ai surajoute leg glosesentre parenthese.
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LE MONDE COMME MATRICE
connue; () sein maternel (renfermant) toute semence,nous
t'avons connu, () seinmatemel qui con~is par la nature du Pere,
nous t'avons connu. () permanenceetemelle du Pere geniteur,
voici commentnous avonsvenere a bonte : nous te demandons
(d'acceder a) un seul desir. Nous voulons etre gardes dans l.a
gnose,et l'unique sauvegardeest ce que nous voulons : ne pas
dechoir de ce genre de vie» (VI, 7,64,20-65,2)7.
De meme que dans es passageseleves precedemment, c'est Ie
Dieu supreme ou une divinite de cet ordre qui est appele « matri-
ce ».8
Voici une autre illustration du deuxieme sellSdu mot matrice :
dans a derniere generationengendreepar Ie Dieu supreme,consti-
tuee de dieux de rang inferieur"..Ja ubstancedivine devient pri-
soulliere de Ia chair en tombantdu Plerome vers Ie monde infe-
rieur. Cette substance se nomme 1'« ame» (\jIUXtl) et sa partie
feminine I'exprime comme «matrice ». L' Exegese e ['ame (NHC
11/6)commence ainsi:
Les sagesavant nous denomme-rent 'ame d'un nom feminin.
Par sa nature aussi,elle est reellement femme: elle a m~me sa
matrice (127 19-22)9.
Au debut cette ame etait vierge et androgyne aupres du PeTe.
Mais elle tomba dans un corps humain. Alors elle tomba aux mains
de nombreux brigands, et des nsolents se a passerentde main en
main. Elle rut souillee et perdit savirginite. Elk seprostitua. Quel
salut peut-il y avoir pour cette ame? Sur ce politi I' Exegese e 'ame
dit encore:
Aussi longtemps donc que I'ame court ~a et la, s'unissanta qui
elle rencontre, se souillant, elle est soumise a la souffrance de
ce qu'elle merite de subir; mais si elle per~oit leg souffrances
dans esquelleselle est,qu'elle pleure (tournee) veTSe PeTeet
qu'elle se repente, alors Ie PeTe ui fera misericorde; it detour-
nera sa matrice des realites exterieures et de nouveau a tour-
nera a I'interieur; I'ame recouvrera sa disposition propre. Car
il n'en va pas (de I'ame) comme des femmes; leg matrices cor-
J.-P. Mahe, Hermes en Haute-Egypte, Les texteshermetiquesde Nag
Hammadi et leurs paralleles grecs et latins, . I, Quebec 1978,p. 164-166.8.
Le mot «matrice », restitue par la conjecture, se trouve dans I' Evangi-
Ie des Egyptiens (IV, 79,22). Mais il Teste ncertain. Voir A. Bohling -
F. Wisse,Nag Hammadi Codices III, 2 and IV, 2: The Gospel of he Egyp-
tians,Leiden 1975 NHS IV), p. 159.9.
J.-M. Sevrin, L'Exegese de l'Ame (~ II, 6), Quebec 1983, p. 63.
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T. ONUKI
porelles en effet sont a l interieur du corps comme les autres
entrailles tandis que la matrice de l ame est tournee vcrs l ex-
terieur tout comme es organesvirus sont a l exterieur (131 :13-
27)1°.
Ici la matrice est symbole de feminite. La conversion interieure
de l ame s exprime a l aide d une metaphore difficile a imaginer
lorsque la matrice se tourne veTS exterieur.
A ma connaissance, Ie reperage que nous venons de faire a reper-
torie tous leg passages oula matrice est utilisee dans son premier
gens, physique et neutre, ainsi que dans Ie second gens, positif et
actif. Mais c est Ie troisieme gens de matrice qui est Ie plus fre-
quemment utilise, celui qui sert a exprimer metaphoriquement Ie
renoncement au desir charnel ainsi qu a la totalite du monde reel.
Comme on Ie verra ulterieurement, cette metaphore traversant
differents mythes et textes est consideree comme un element
mythique ayant survecu au COUTSe l histoire des differentes sectes.
Mon propos est de reconstituer cette tradition d apres leg temoins,
d analyser l opposition entre ascetisme et concept sexuel de la natu-
re, presents simultanement dans cette tradition.
II. Le monde commematrice
1. La mort charneUeon I evasion de la matrice
Nous retrouvons Ie casde la « matrice » ayant desrapports avec
Ie desir charneldans e Temoignage eritablementionne plus haut :
Mais Ie Fils d Hom(me est sor)ti de l Incorruptibilite(etant)
etranger a la souillure. Il est venu (vers Ie) monde, (au -dessus
du (fleu)ve Jourdain: et (a)ussitot Ie Jour(da)in (retourna) en
arriere. (Or) J(ea)n rendit temoignage a la (des)cen(t)e de
Jesus.Car c est ui (seu)l qui (v i( t) la pu(issance)qui etait des-
cendue sur Ie fleuve Jourd( a)in ; it reconnut, en effet, qu it etait
accompli, Ie regne de l engendrement de chair. Or Ie fleuve
Jourdain, c est a puissancedu corps,c est-a-dire es sensations
des plaisirs, et l eau du Jourdain, c est Ie desir du colt et Jean,
c est l Archonte de la Matrice (30 18-31 5)11.
Le Temoignage eritable efuse fermement e baptemepar I eau,
Ie considerant comme une souillure (69:8-70:30). Ceia s enonce
10. J.-M. Sevrin, op.cit., p. 71.
11.A. et J.-P.Mahe, Le Temoignageveritable,op. cit.,p. 79-81
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E MONDE COMME MATRICE
par la phrase «l'eau du Jourdain, c'est Ie desir sexuel». L'appari-
tion du vrai revelateur, Ie fils d'homme (Jesus) ait remonter cette
eau en arriere et donc constitue un evenement permettant de
depasser e desir sexuel. En revanche, Jean-Baptiste qui baptisa
Jesus (voir Mc 1.9) est denature, transforme en «Archonte de la
matrice » et dedaigne.
Examinons maintenant Ie cas 0\:1a matrice est comparee au
corps en train de pourrir. La mort charnelle est e moment de libe-
ration definitive de la substancedivine dans 'homme, hors de la
force charnelle -desir sexuel nclus; cette liberation est appelee
allegoriquement Ie moment de la vraie naissance.
Le Traitesur fa Resurrection NHC 1/4), est 'epitre d'un maitre
a Rheginos qui cherche a verite. La redaction de ce texte date de
la secondemoitie du lIe s. Sans aire de distinction entre « ortho-
doxie» et« heresie », 'auteur anonyme y exprime les opinions des
chretiens gnostiques sur a resurrection, sujet de polemique parmi
les chretienset non-chretiens.Apres avoir discutede la nature divi-
ne et humaine de Jesus christologie), et egalementde la fin et de
la resurrection spirituelle (soteriologie, eschatologie), l parle du
monde comme illusion, et du destin charnel des croyants comme
suit:
Aussi ne doute pas de la resurrection, moo fils Rheginos. En
eifel, si tu n'as pas (pre)existedans a chair, u a pris chair,quand
tu es venu en ce monde, pourquoi ne prendras-tu pas chair,
quand tu monteras dans cet Eon (= divin transcendant ? Ce
qui est destine a la chair est pour elle causede la Vie. Ce qui
vient a l'etre pour toi n'est-il pas tien? Ce qui est ien n'existe-
t-il pas avec oi? Mais etant ici-bas,de quoi es-tuprive? (= c'est
la resurrection au vrai sens).Mais c'est ce que tu as cherche a
apprendre: l'arriere-faix «<XWpLOV»)u corps,c'est a vieilles-
se et tu escorruption Tu en as 'obsolescencepour profit. En
eifel, tu n'abandonneras pas Ie meilleur (= la sagesse), uand
tu partiras. Le pire (= la chair) subit la diminution, mills c'est
grace pour lui (47 :1-24)12.
Le passagede ce texte est ires difficile a traduire et a com-
prendre. Cependant l apparait assez lairement que l'auteur com-
prenait la resurrection de la meme fa~on que les gnostiques «la
meilleure part » de l'humain, a savoir a partie essentielle la sages-
se) re~oit a chair pour la premiere fois a a naissanceen ce monde.
Le fait d'etre parvenu a la vieillesse et enfin a la mort -Ie retour
12. J.-E. Menard, Le Traite sur La Resurrection (NH 1,4), Quebec 1983,
p. 51. J'ai surajoute les glosesentre parentheses.
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a l Eon etemel, en laissant la chair sur la terre -constitue «la vraie
resurrection ». Dans ce passage, l auteur essaie egalement de
resoudre un autre probleme, celui du destin de la chair reelle apres
la resurrection. La reponse de l auteur peut s interpreter de deux
fa~ons:
1) Ceux qui atteignent la vraie resurrection re~oivent une nou-
velle chair, differente de la chair materielle et terrestre. Ce qui est
exprime par: «yourquoi ne prendras-tu pas chair, quand tu mon-
teras dans cet Eon? »
2) Parvenue a la vieillesse, la chair epuisee qui Teste apres la
mort n est qu un« arriere-faix» «<XWPLOV» une petite place) et
son destin final est la destruction.
Ce deuxieme point est particulierement important pour Ie sujet
de noire etude. Pourquoi Ie corps parvenu a la vieillesse, epuise et
maintenant Teste sur la terre est-it appele« l arriere-faix»?« Arrie-
re-faix », en effet, traduit Ie mot grec« XWpLOV. C est au gens strict
la membrane amniotique mince et resistante qui selon leg gyne-
cologues, sort souvent du corps matemel avec enfant.1l taut qu el -
Ie se dechire pour que Ie fretus commence a respirer, sinon il est
necessaire de la dechirer artificiellement. C est cette membrane et
Ie placenta que l on appelle la delivre. L auteur du Traite sur la
Resurrection utilise l arriere-faix comme metaphore du cadavre.
Bien que cela semble paradoxal au premier abord, c est coherent
du point de vue gnostique comme on l a deja vu, pour lequella
mort chamelle est Ie moment de «la resurrection », donc de «la
vraie naissance » pour la partie essentielle de I homme.
Si l on considere Ie corps ayant vecu dans Ie monde reel sur terre
comme un arriere-faix, Ie monde reel sera logiquement la matri-
ce, la place oula mere con~oit l enfant et Ie nourrit. La vie ter-
restre de l humain equivaut ala periode du fretus dans la matrice.
Bien que Ie Traite sur la Resurrection ne l affirme pas, il ne fait
aucun doute que l auteur Ie sous-entend.
2. La naissancehamelle,ou a chutede a matrice
Ce que Ie Traite sur la Resurrectionsous-entendait omme pre-
misse, a Paraphrasede Sem (NHC VII/1) l affirme. C est un des
textes dont la teneur est a plus difficile a saisir. II est tout entier
consacrea l interpretation allegorique de Gn 1 :1 du point de vue
des gnostiques,qui ont leurs propres conceptions du cosmoset de
la nature. « La grande umiere » est situee en haut, en bas estsitue
«Ie chaos» (appele aussi« eg tenebres », «l eau terrible»), et au
milieu 1 «esprit inengendre» (ou en abrege «l esprit», 1 :18-32).
Le noUs «< intellect », ou «la lumiere souillee »), de meme natu-
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re que «l'esprit inengendre» du milieu, Testemele au «chaos»
(4 :27-5 21; 2210-23 8). Pourquoi et comment cette disposition en
trois niveaux? Et en particulier pourquoi Ie «nous» vient -il se
meler au « chaos» d'en bas? Le texte ne l'explique pas. Le mythe
debute en comportant comme premissemajeure cette structure en
trois niveaux; quant au terme «nature » (Ie nom feminin cjYtJa~),
il connote toujours un sensnegatif; il est meme souvent (85 fois)
mis au meme rang que «chaos» dans certains passages, u pire,
comme la partie inferieure au chaos dans un autre passage.
Plus tard, «Moi », a savoir Derdekeas qui est «Ie fils» de «la
lumiere sans in ni souillure » apparait pour liberer et recuperer e
«noUs» ou la« lumiere », melee au chaos et a l'esprit inengendfe.
Celie apparition est relatee par Derdekeas dans ce passage:
Moi, je me manifestai. C'est (moi), Ie Fils de la Lumiere
immaculee, nfinie. Je me manifestai sous l'aspect de l'Esprit.
Je sills, en effet, Ie rayon de la Lumiere universelle et sa mani-
festation. Cela (arriva) afin que l'Intellect (noils = la sagesse)
de l'Obscur ne demeuratpas dans 'Hades. Car l'Obscur s'etait
assimile a son Intellect (noils) dans une partie des membres.
Moi, <> em, orsque <j'>apparus sous l'aspectde l'Esprit) afin
que l'Obscur n'obscurcit que lui seul, selon la volonte de la
Grandeur, (et) pour que l'Obscur devint inoperant a partir de
toute forme de la Puissancequ'il possedait, 'Intellect (noils)
tira d'entre l'Obscur et l'Eau Ie Feu agite -celui-ci etait recou-
vert d'eau. Puis, hoTS e l'Obscur, l'Eau devint un nuage, et a
partir du nuage a Matrice prit forme. Le Feu agite s'y rendit:
il etait errance (3tMvT]).
Or, lorsque l'Obscur vit la (Matrice), il devint impur. Et une
fois qu'il eut agite (-capaooELv)'eau, il frotta la Matrice ( tl-
-cpa). Son intellect (noils) s'ecoula dans eg profondeurs de la
nature «jnJov;); l semelangeaa la Puissance e l'amertume de
l'Obscur, et l'reil de la (Puissance) reva dans a perversite, en
sorte que (celle-ci) ne put plus engendrer 'Intellect (noils), car
lui, il etait semencedonnee de la nature «jnJov;), ssude la raci-
ne obscure.
Quand donc la Nature eut re~u en elle l'Intellect (noils) issu
de la puissance obscure, outes leg formes apparurent en son
sein. Cependant,une fois que l'Obscur eut engendre 'image de
l'Intellect (noils), ce dernier s'assimila a l'Esprit. De fait, la
Nature «jnJov;)entreprit de Ie pousser elle n' en put trouver Ie
moyen, parce qu'elle n'avait pas de forme issue de l'Obscur.
Elle Ie con~ut donc dans Ie nuage. Alors Ie nuage s'illumina:
un Intellect (noils) s'y manifestaa la maniere d'un feu terrifiant,
nuisible ( 3AWtocELV),t il s'entrechoqua avec l'Esprit inengen-
dre, puisqu'il avait une similitude issuede lui. Afin que a N atu-
re «jnJov;) e trouvat videe du Feu agite, alors a Nature sedivi-
sa aussit<>ten quatre parties; elles devinrent des nuages
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d aspectsdifferents. on Ies appeia Hymen, Chorion (= arriere-
faix), Puissance,Eau. Or rHymen et Ie Chorion ainsi que Ia
Puissanceetaient des feux agites (4 :1-5 :30)13.
Cette description est difficile a comprendre selon la logique. On
peut accepter l explication du mythe gnostique comme la traduc-
tion en langage psychanalytique d une experience psychologique.
Mais si l on n examine pas trap leg connexions dans Ie detail, il est
alors clair que ce mythe compare leg mondes inferieurs jusqu au
chaos ainsi que Ie domaine de la nature (IjYIJOLc;)on pas seulement
ala matrice, mills a l ensemble des organes sexuels feminins comme
Ie montre la demiere partie du passage cite~ A part Ie monde de
la grande lumiere ou Ie domaine divin trans~endant, Ie monde au-
dessous du monde intermediaire et l ensemble de la nature visible
soot consideres comme l image d un enormeappareil genital femi-
Din. C est la raison pour laquelle on discute du« concept sexuel de
la nature » chez leg gnostiques14.
Par l apparition de «Moi Derdekeas », une partie de «l esprit
inengendre » remonte du monde intermediaire veTS e haut, veTS
Ie monde lumineux. Mais afin que leg Testesde la « umiere » entra-
ves dans Ie «chaos» et leg «tenebres» d en bas soient recuperes,
« Ie fils » Derdekeas appelle d abord la « matrice » qui est plongee
dans «l eau terrible ».
Voici pourquoi je me suis manifeste afin de saisir ine occasion
de descendreau ond du Tartare, usqu a la lumiere de l Esprit,
qui etait alourdie, pour la preserver de la malice du fardeau.
13. M. Roberge, La Paraphrase de Sem (NH VII, 1), Quebec-Louvain
2000, p. 125-127. J ai surajoute les mots grecs. L ouvrage de M. Roberge
est sorti pendant mes conferences a l Ecole pratique des hautes etudes.
Je n ai donc pas encore examine ses travaux dans cet article. Je me pro-
mets de Ie discuter un jour d une maniere concrete.
14. L hymen et l arriere-faix laissent perplexe K. M. Fischer:« Bei diesen
beiden Begriffen hat der Ubersetzer seine besondere Not. Entweder man
laBt sie uniibersetzt stehen, abeT weT versteht sie dann, oder man iiber-
setzt sie ganz korrekt und das wirkt dann ganz komisch. Von einer Wolke
des Jungfrauhautchens zu sprechen, wirkt lacherlich. Fiir XWptOVgibt es
nicht einmal ganz genau passendes Wort, denn in diesem Falle muB es die
den Fotus umhiillende Fruchtblase sein, einige iibersetzen es darum mil
Nachgeburt, weil sie ja nach der Geburt ausgestoBen wird, abeT das ware
gerade bier fehl am Platz. Es ist iiberhaupt sehr schwierig, diese Begriffe
in Beziehung mil Wolkenspharen zu bringen, andrerseits mochte man die
gewollte sexuel1e Metaphorik nicht zerstoren. » (Die Paraphrase des Seem,
in: M. Krause (ed.), Essays on the Nag Hammadi texts in honour of Paphor
Labib, Leiden 1975, p. 255-267 (en particulier p. 262 n. 1) Notre inter-
pretation dissipe cette perplexite.
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133E MONDE COMME MATRICE
Grace, donc, au regard (de l Esprit) veTSa position obscure, a
Lumiere de nouveau remonta, afin que la Matrice derechef
remontat de I eau.Elle remonta par mavolante ; sournoisement
l reil s ouvrit. Alors se eposa a lumiere qui s etait revelee dans
Ie Milieu, qui s etait separeede l Etonnement. Elle irradia (la
MatTice)et a MatTice vit ceux qu elle n avait pas vus. Aussi, se
rejouit-elle, jubilant dans a Lumiere, bien que ne rot pas a elle
ce qui etait apparu dans Ie Milieu, dans sa malice, orsque (la
Lumiere) l avait irradiee. La MatTice, donc, vit ceux qu elle
n avait pas YUS. uis elle fut entrainee dans eau. Elle pensait
qu elle avail obtenu a puissance umineuse.Mais elle ne savait
pas que sa racine etait inoperante par l effet de l image de la
Lumiere etqu elle (etait) celie veTS ui (la Lumiere) etait accou-
rue (15 :28-16 23)15.
Entin «Moi Derdekeas » descend vers a matrice et revet « a
bete ».
AlOTS,moi, par la volonte de la Grandeur, e me depouillai de
mon vetement, lumineux. Je revetis un autre vetement, igne
( et) sans orme, issude 1 Intellect de la Puissance, ui avait ete
separe et prepare pour moi, selon ma volonte, dans Ie Milieu,
car Ie Milieu l enveloppait d une puissanceobscure. Pour aller
Ie revetir, e descendisdans e chaos,afin d en delivrer toute la
Lurniere. C est que, sans a Puissanceobscure, e n aurais pu
combattre la Nature. Une fois que je ius entre dans a Nature,
elle ne put supporter ma puissance.Mais je me reposai sur son
reil qui regardait fixement. C etait une urniere emaneede l Es-
prit. En effet, elle avait ete preparee pour moi comme vetement
et comme repos par l Esprit. A cause de moi, elle ouvrit ses
yeux en bas veTSHades et elle accordaa a Nature sa voix pour
un temps. Or mon vetement igne, selon a volonte de la Gran-
deur, descenditveTS elui qui est puissantet veTSa partie impu-
re de la Nature, celIe que a Puissance bscureenveloppait.Puis
mon vetement frotta la Nature de son etoffe, et sa feminite
impure devint puissante.Et la Matrice, ardente,monta. Elle fit
que l Intellect, a la maniere d une forme de poisson,devint sec,
ayant en lui une goutte ignee et une puissance gnee. Mais une
fois que a Nature eut expulse Intellect hOTS elle, elle se rou-
bla et pleura. Quand ellefut dans a douleur et dans es larmes,
elle expulsa hors d elle la puissancede l Esprit, puis elle se tint
silencieuse,pareillement a moi. Je revetis a lumiere de l Esprit
et me reposai avec mon vetement a la vue du poisson. Et afin
que fussentcondamnees Onuki: brisees) es reuvresde a Natu-
re, car elle est aveugle,de nombreuses ormes de betes sorti-
rent d elle, conformement au nombre desvents en mouvement.
15. Trad. M. Roberge, op.cit.,p.147-149.
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T. ONUKI
Elles vinrent toutes a l existence dans I Hades, cherchant la
lumiere de l Intellect qui procure la forme. EIles furent inca-
pables de se dressercantle eIle. Ie me rejouis de leur ignoran-
ce. EIles me trouverent , moi, Fils de la Grandeur, face a la
Matrice polymorphe. Ie revetis la Bete et adressai 8 la Matri-
ce) une grande demande: qu eIle fit veniTa l existence un ciel
et une terre, afin que s elevat toute la lumiere. Car la puissan-
ce de l Esprit n aurait pu d une autre maniere etre delivree du
lien si e ne m etais manifeste a eIle dans une figure de bete
(18 :1-19 35)16.
Ce passage rappelle Ie mythe manicheen de la Genese, puisque
la Creation de toutes choses est un moyen ultime de recuperer les
Testes de la lumiere, prisonniers du chaos. En outre, il se passe la
meme chose qu au moment ou, la recuperation de la lumiere etant
accomplie, Ie chaos (la nature, (jYl)(JI,t;;)entre dans la « masse tene-
breuse ». Cependant ce qui est interessant ici, c est l expression
«je revets la bete» ou «la forme de bete ». Qu est-ce que cette
bete? Bien qu en surface, Ie texte cite denote les animaux Des de
la nature, on pent inclure aussi les hommes. Cette meme expres-
sion «la bete» est en effet l une des metaphores de la «chair
humaine ». On la rencontre a plusieurs reprises dans les textes de
Nag Hammadi, notamment dans Ie Livre de Thomas l Athlete
(NHC 11/7). Examinons-en seulement un passage a titre
d exemple:
«Le Sauveur dit : Tous Ies corps (...) des betes,puisqu engen-
dres (...)...(139 :6) car Ie corps est bestial; de meme,donc que
chez esbetes e corps perit, de meme cesmodelesperiront. Est-
ce qu il ne provient pas d un accouplement comme celui des
betes? S il en provient aussi,comment engendrerait-il queIque
chose de different d elIes? C est pourquoi donc VallSetes des
petitsjusqu ace que vous deveniezparfaits» (138 39-139 12)17.
«Moi Derdekeas» descendveTSa matrice,« revet la bete », ou
la chair, « devant a matrice ». D apres son role dans Ie my he, ce
Derdekeas est evidemmentqualifie de« pro-revelateur ». Dans es
mythes gnostiques en general, orsque Ie pro-revelateur est uste-
ment un prototype humain qui va bientot naitre et se dispersersur
la terre, cela pent designeraussi a naissance hamelle deshommes
ordinaires. Le fretus sort de la matrice de samere et nail au monde
exterieur. Selon e concept sexueldela nature chez es gnostiques,
16.Trad.M. Roberge, p.cit., .153-155.
17. R. Kuntzrnann, Le Livre de Thomas l Athlete (NH 11,7), Quebec 1986,
p.29.
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LE MONDE COMME MATRICE
cela
revient a dire qu il« revet la bete» en chutant dans e mondeappele
« matrice ». Cette idee concorde parfaitement avec a pre-cedente
qui considere a mort physique de la chair comme une eva-
sion de la «matrice », comme Ie moment de la vraie naissance.
La Paraphrasede Semne se contente pas d utiliser la metapho-re
de l appareil genital feminin, mais elle introduit aussicelIe dumale
et developpe longuement la Genese.
Or les vents, qui sont de nature demoniaque, ssusde l Eau, du
Feu, de l Obscur etde la Lumiere, s unirent en vue de leur per-dition.
Et par cette union, les vents re~urent dans leur matriceune
ecume sortie de la verge des demons et ils con~urent dans
leur matrice une puissance par l inspiration. Les matrices desvents
se serrerent es unes contre les autres usqu a ce qu arri-
vent les temps de l enfantement. Les vents descendirent dans
l eau (23 :9-21)18.
Dans Ia Paraphrasede Sem, e processusentier de Ia creation dumonde
terrestre est symbolise d un point de vue macroscopique
par I image du rapport sexuel.
3.
Conseqnenceratiqne:
I ascetisme visant a provoqoer la mine do monde
Du point de vue psychopathologique ou psychanalytique, Ie
concept sexuelde la nature chez eg gnostiquesa ete l occasion de
nombreux debats. Cependantce qui importe pour notre sujet,c estla
realite historique qu un tel concept sexuela entrainee tres pra-
tiquement a l interieur et a l exterieur de l Eglise ancienne: elle amotive
l abstinence sexuelle, Ie celibat durant la vie entiere.
Apres avoir acheve explication theorique sur la resurrection,
l auteurdu Traitesur la Resurrectiondonne des nstructions au des-tinataire
Rheginos et lui demande de mener une vie disciplinee
par l entrainement convenable:
« Aussi, ne va pas penser partiellement, () Rheginos, ni teconduire
selon cette chair au nom de l unite, mais degage-toides
divisions et des liens (de la chair), et deja tu possedes aResurrection.
Car, si celui qui mourra sait a son sujet qu il mour-ra
-me-me s il passe beaucoup d annees en cette vie, elles l y
conduisent -pourquoi toi, ne vois-tu pas a ton sujet que tu es
ressuscite,et elles t y conduisent,puisque tu possedesa Resur-
L8.Trad. M. Roberge, op.cit., p. 163.
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ONUKI
rection? Mais tu es la, comme si tu devais mourir, alors que
celui-la, il sait qu'il est mort. Pourquoi done negligerais-je ton
manque d'education? II convient a chacunde pratiq'ller l'asce-
se de plusieurs a~ns et elles e delivreront de cet element,pour
qu'il ne soit pas dans l'erreur, mills qu'il se re<;oivede nouveau
tel qu'il etait d'abord (49 :9-36)19.
Le contenu de ces exercices ascetiqueset pratiques est affirme
explicitement comme ascese ans e Temoignage eritablecite plus
haut. Comme on l'a deja mentionne, la relation de ce texte avec
leg Valentiniens est ambigue. Une hypotheseconvaincantea mon-
tre que l'auteur de ce texte etait originalement un Valentinien qui
aurait quitte Ie groupe suite a un desaccorda propos de leur mora-
le ascetique20. la suite de sa defection, il aurait refute d'une part
toutes leg sectes gnostiques, et il aurait d'autre part critique de
fa~on incisive l'Eglise orthodoxe. Ce texte representerait sa cri-
tique.
Pour lui, me-meJean-Baptiste, decrit comme ascete dans leg
Synoptiques du Nouveau Testament, n'est pas autre chose qu'« un
archonte de la matrice ». Et plus encore l'Eglise orthodoxe qui
accepte e mariage, eg rapports sexuelset a procreation, engendre
de nombreux martyrs qui se contentent de «paroles », mais dont
Ie renoncement aux valeurs de ce monde est ndecis. D'apres cet
auteur, ceux qui evitent leg bavardageset leg discussions nutiles,
qui vivent toute une vie d'abstinence sexuelle et donc de celibat,
soot leg vrais « martyrs », eg vrais renon~ants au monde.
C(ert)ains, quand ils entrent dans a foi, (re~oivent u)n bapte-
me comme s'ils avai(e)nt la une esperancede salu(t, ce) qu'ils
appellent (e sceau), ...Mais autre chose est e bapte(me) de la
Verite: c'est parrenonce(m)ent (aumo)nde qu'onle trouve, (et
ceux qui) disent de langue s(eulement qu'ils) y renoncent (sont
des menteurs), et ils sont voues a d(e)scendre (au lieu) d'epou-
vante; plus encore,a y etre couverts de honte. Comme ceux qui
leu( r) ont donne (ce bapteme) pour leur propre condamnation,
pu(issent-ils) recevoir (la meme)chose (69 :7-31)21.
...luttant contre d(es p)enseesdes Archontes, d(es A)utorites
et des Demons,sans eur avoir aisse e lieu oil se eposer; (mai)s
il (a) combattu leurs passions .. .), il (a) condamne eur erreur,
19. Trad. I.-E. Menard, op.cit., p. 57.
20. Voir: B.A. Pearson S. Giversen, The Testimony f Truth, n : B. Pear-
son (ed.), Nag Hammadi Codices IX and X, Leiden 1981 (NHS XV), p.
116-120;A. et I.-P. Mahe, Le Temoignageveritable,op. cit., p. 23-26,73.
21. Trad. A. et I.-P. Mahe, id., p. 139-141.
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E MONDE COMME MATRICE
il a purifie son Arnedesmanquementsqu il a commisd une main
etrangere, l s est emis debout, redresseen ui-meme...11 com-
men~a a garder Ie silence en lui-meme jusqu au jour oil il
deviendraitdigne d etre ravi la-haut,rejetant oin de lui Ie bavar-
dage et disputes, endurant tout Ie lieu, supportant et prenant
en patience tollS es maux (42 :23-44 13)22.
Or celui qui (a) Ia capacite (de re)noncer a res choses (= I ar-
gent et Ies rapports sexuels),se reveI(e iss)u de la generation
du F(ils de l Hom)me, car it a la (force de) Ie(s a)ccuser. ..et,
s etant r)etire (...), it s est (u), ayantabandonne e ba(var)dage
et Ies disputes.Mais celui (qui a) trouve Ie (Verbe qui fait vivre
et q)ui a connu (Ie PeTede Ia Verite a obtenu Ie re)pos; il a
cessede cher(cher), puisqu il a (trouve) (68 8-69 4)23.
Au premier abord, cette ascese exuelle ressemble au quietis-
me, mais parmi les sectesdites ascetiques,c est a plus extremiste.
Cette ascese ise a detruire visiblement « e monde comme matri-
ce» en empechant a procreation chamelle. En ce sens, l n y a pas
d acte plus extreme que cette ascese exuelle,poursuivie toute la
vie, par la renonciation au bavardageet a a discussionnutile; c est
Ie martyre meme.
La Bibliotheque de Nag Hammadi ne contient pas exclusive-
ment ce type de textes provenant de sectesagressivesqui consi-
deTent ascesecomme devant entrainer a destruction du« monde
comme matrice ». 11 a certainessectesqui ne sont pas agressives
et qui comportent cependant ce caractere d abstinence sexuelle,
manifeste par un celibat permanent. Le Livre de Thomas Athle-
te, par exemple, appelle la chair «la bete », comme nous l avons
vu plus haut, mais il est etranger a l idee d une ascese is ant ala
destruction du monde24. e mouvementmonastique de Pachome,
collectionneur supposeainsi que fabriquant de la bibliotheque de
Nag Hammadi, ne preche pas non plus un ascetismedestructeur
du monde, mais au contraire un ascetismequi a l intention de Ie
sauver.Plus avant, essaierai de classer es ascetismes e la fin de
I Antiquite en plusieurs types, conformement aux documents
contemporainset geographiquement rochesde la bibliotheque de
Nag Hammadi; les ypes d ascese erontmis au clair par res memes
documents.Mais cherchonsmaintenant s il existe ou comment se
22. Ibid., p.103-107.
23. Ibid., p.137-139.
24. Selon e commentaire de SasaguArai sur Ie Livre de Thomas Athle-
te (en particulier p. 380-381, n: Bibliotheque de Nag Hammadi /II -les
homelieset es epitres (en japonais), a majorite des auteurs releve, parmi
les differents ascetismes,a similitude avec l Acte de Thomas.
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138
ONUKI
presente un cas deologiquementsemblablea celie representation
du monde comme matrice dans a culture orientale et dans An-
tiquite mediterraneenne.
III. Autres exemplesde la representationdu monde
commematrice dans histoire de la philosophie
Commen~onspar enoncer a conclusionde cette section: la des-
cription de l ensemble du cosmosvisible par la matrice ou par les
organes sexuels eminins n est pas attestee dans a culture orien-
tale ou mediterraneenne ancienne.Cette litterature fournit nean-
moins deux expressionsproches de cette representation:
1) La comparaisonde la relation entre la chair et l ame humai-
ne avec celle du fretus et de l arriere-faix.
2) La comparaisonde la vie avec a periode fretale, et de la mort
charnelle avec evasion du fretus,c est-a-dire de l ame, qui quitte
la matrice c est-a-dire a chair.
Comme exemplede a premiere representation,prenonsd abord
Ie Contre Celsed Origene. Celse etait un medio-platonicien de la
secondemoitie du lIe s., connu comme l auteur de l Enseignement
veritable (178-180), a premiere reuvre a fournir une critique glO-
bale et philosophique du christianisme. Origene (t 253/54), s ap-
puyant sur a foi chretienne, a refute dans son ivre. Selon e livre
IV, 74, Celse critique la foi chretienne en la Genese biblique,
denon~ant son caractere humaniste. II essaiede montrer que la
« production de toutes chosesconcerne es humains ainsi que les
animaux defines de raison ». Pour refuter cela, Origene prouve
l absenced humanismechezCelse,mais presentchezsesamisstol-
ciens, fort utiles pour sa critique. De plus Origene conclut que
Celse est njuste, puisque Ie dogme stolcien ainsi que la foi en la
Genesebiblique considerent que l economie divine s exerce us-
qu aux animauxdefinesde raison, depassant insi a limite de hu-
main et donc des etres raisonnables.Dans ce passage, l mention-
ne l opinion stolcienne
Car ceux-ci placent a bon droit l homme et en general, a natu-
re raisonnable, au-dessusde tous les etres sans raison, disant
que la Providence a fait toutes chosesprincipalement pour Ie
bien de la nature raisonnable qui sont es creaturesprincipales
jouent Ie role des enfants mis au monde, es etres sans aison et
inanimes, celui du placenta cree avec l embryon (IV,74, )25.
25. Trad. M. Borret, Contre Celse,Paris 1982. .lI. D. 369.
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139E MONDE COMME MATRICE
Le secondexemple se rouve au ivre VII, 32de la meme reuvre.
Origene y expose sa propre theorie sur a chair et la resurrection
contre la critique de Celse pour qui la foi chretienne en la resur-
rection provient d'une meprise au sujet du systeme grec de la
metempsychose-transmigration e l'ame.
Ce n'est pas,comme Ie croit Celse,pour avoir compris de tra-
vers a doctrine de a metensomatose ue nousparlons de resur-
rection; c'estparce que noussayansque l'fune, qui par sapropre
nature est ncorporelle et invisible, a besoin, orsqu'elle se rou-
ve dans un lieu corporel quelconque d'un corps approprie par
sa nature a ce lieu. Ce corps, elle Ie porte d'abord apres avoir
quitte Ie vetement autrefois necessairemais superflu pour un
secondetat,ensuiteapres Pavoir revetu au-dessus e celui qu'el-
Ie avait d'abord, parce qu'elle a besoin d'un vetement meilleur
pour parvenir aux regions plus pures,etherees et celestes.Elle
a quitte, en naissant au monde, Ie placenta qui etait utile a sa
formation dans e sell de sa mere tant qu'elle y etait; elle a reve-
tu sous lui ce qui etait necessairea un etre qui allait vivre sur
terre (VII,32,Y6.
D'apres ce dit d'Origene, l'arriere-faix n'est pas, a strictement
parler, une parabole de la chair humaine. C'est un lieu oil l'ame,
Ie fretus revet la chair, Ie necessairea la vie terrestre27.Mais dans
Ie meme temps, Origene ne considere negativement ni la chair ni
la matrice qui la nourrit; it ne leg nie pas non plus. Pour lui, l'ame
de chaque homme est une existencedivine alteree (par la refrige-
ration); elle doit donc recouvrer son etat originel. En outre, la chair
n'est pas purement et simplement mauvaise.Elle fait partie inte-
grante du grand cycle. En revanche, l est bien entendu que ni la
chair, ni ses desirs ne sont admissiblescomme tels. La chair doit
etre transformee ( E'taf'JoAtl). ette necessaire ransformation est
mentionnee au milieu du passageque nons venons de citer : « Sur
ce qui couvre Ie corps usqu'a maintenant, it mettra un meilleur
vetement, necessairepour habiter a la place celeste doni l'air est
pur et limpide.» C'est« la resurrection charnelle» dit Origene. Le
point de vue adopte concernant a doctrine de a resurrection selon
la foi orthodoxe, comme dit Celse,pent etre qualifie de« rechauf-
fe chretien» de la doctrine grecque sur la metempsychose-trans-
26. Id., Paris 1969, . IV; p. 87.
27. Le mot grec XWpLOV,ui designe «l'arriere-faix» comme on l'a deja
mentionne, signifie d'abord «petite place ». II est donc utilise ici au sellS
litteral.
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140
T. ONUKI
migration. Pourtant Origene maintient sa propre position et refu-
se de ceder a Celse.
Le troisieme exemple se trouve dans a Lettre a Marcella (vers
300) de Porphyre (cs. 232-305), un neoplatonicien issu du meme
lignagephilosophique que Celse.La destinataire,Marcella, estune
femme avec qui Porphyre s est marie veTS 0 aDs.On ne connait
pas age de Marcella a son mariage. Mais cette femme, qui avait
deja sept enfants, etait malade et sans ortune particuliere. Mal-
gre toutes egobjectionset egcalomnies,Porphyre parvient a epou-
seTMarcella, la veuve de son ami, pour l aider a elever sesenfants,
pour la proteger de la famille despotique de son mari dece:de, t
aussipour lui enseigner a philosophie. Apres dix mois de maria-
ge, etant paTti pour affaires et l ayant laisseeseule, illui envoya
une lettre oil illui conseille de continuer a se familiariser avec a
philosophie pendant son absence.Tel est e contenu de la Lettre a
Marcella. Apres la description des peripeties qui ant precede eur
mariage, de la raison pour laquelle il ne lui a pas permis de l ac-
compagner, et de la promessedu retour au pays (chap. 1-4), illui
rappelle que sa condition de femme actuellementsepareeest une
belle occasion d apprendre la vie philosophique (chap. 5-11) a
l exemple des sagesqui incament cet ideal de la vie philosophique
et a la difference des sots (chap. 12-24). Illui explique enfin la
necessitepour l ame d apprendre la relation juste avec a chair, a
partir de la loi de la nature et de sa relation avec e domaine ntel-
lectuel superieur de la loi diVine (chap. 25-34). Dans la derniere
partie, Porphyre evoque la raison de leur mariage :
« Que tu sois de sexe masculin ou feminin, ne te preoccupepas
du corps, ne te regarde pas comme une femme, puisque moi
non plus e ne t ai pas remarquee comme telle; fuis, dans ton
arne, e qui est effemin6,comme si tu avais revetu un corpsviril.
Car c est d une arne virginale et d un intellect vierge que les
produits sont es mieux venus» (chap. 33)28.
Dans un tel contexted amourplatonique, e passage uivant
concernea relationentre a chair et ame:
La Ioi divine, elle clame dans e livre immacule de Ia conscien-
ce : si tu ne prends que Ie corps qui t estattachecomme a mem-
brane a I embryon dans Ie sein matemel et Ia tige au ble qui
germe, tu ne te connaitras pas toi-m~me. De m~me donc que
Ia membrane se forme (avec l embryon) et Ia tige avec Ie hie,
maisqu a Ia maturite elles sont ejetees une et I autre, de m~me
28. Trad. E. des Places,La Lettre i Marcella,Paris 1982, . 125-126.
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LE MONDE COMME MATRICE
aussi e corps attache a I ame qui Iui a ete inseminee n est pas
partie integrante de I homme; mais pour queceIui-ci se ormat
dans Ie sell, tine membrane Iui a ete tissee,et pour qu il vint
sur Ia terre, Ie corps Iui a ete attele (chap. 32)29.
Telle est a relation entre la chair et l ame. Mais Porphyre n en
tire pas la conclusion qu il faudrait abolir Ie regime matrimonial
non plus que Ie rapport sexuel,ce qui ressort du fait qu il a epou-
se Marcella. La vie familiale, qui repose sur Ie mariage, peut etre
caracteriseecomme «un conflit avec ascesesexuelle». Pourtant
cela ne signifie pas l exclusion absoluedes rapports sexuels,mais
cela induit leur stricte maitrise. «Plus lard, Ie temps passant, on
arrive a y renoncer». La saintete du monde reel oil se pratique une
telle vie familiale n est amais mise en doute3°.
Nous allons maintenant doDDerquatre exemplesde la seconde
expression.Chronologiquement, e premier est un rapport sur ac-
tivite educative et leghomelies du Brahmane en ode dans a Geo-
graphie XV; 59 du grec Strabon(-64-21 ap. J -C.) :
Le sujet habituel de leurs entretiens est a mort. lis croient que
la vie d ici-bas est quelque chose comme Petal du fretus dans
leg premiers moments qui suivent a conception, et que la mort
au contraire est pour leg pUTS sprits nities it la philosophie, a
naissancea la vie reelle, t la vie heureuse.Aussi s exercent-ils,
seprepaTent-jigde toute maniere it la mort31.
Le deuxieme exemple se trouve dans les Epztres morales de
Seneque av. et ap. 65), Ie philosophe stolcien, maitre de l empe-
reur Neron. Bien que la plupart des lettres de ce grand recueil
soient destineesen apparencea sonami Lucius, il y discute en rea-
lite desdifferents problemesethiques ou philosophiqueset s adres-
se a toutes les categories de lecteurs. 11 raite de la relation entre
la chair et l ame, Ie theme qui nous nteresse ci, dans a Lettre 102,
23 et 27, montrant que toutes chosessont SOilSarret de la « natu-
re» (natura) y compris la vie et la mort de la chair. La mort de la
chair n est pas Ie moment de la disparition de l ame, mais plutot
celui de sa naissance, e sa transmigration de la prison veTs eter-
mte. Voici les deux passages n question:
29. [d., p. 124-125.
30. Voir P. Brown, Body and Society. Men, Women,and Sexual Renun
ciation in Early Christianity, New York 1988,p. 181,183.
31. Trad. A. Tardieu, Geographie, . 3, Paris 1880,p. 250-251.
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T. ONUKI
Ces ours de la vie mortelle sont des temps d arret, preludes
d une autre existence,meilleure, plus durable. Oui, comme Ie
sein matemel, qui nous porte dix mois, nous ferme non pour
lui, mais pour Ie lieu dans lequel il taut qu il nous produise
lorsque nous sommesdesormais en etat de respirer et de sup-
porter l air libre, ainsi a periode qui s etend du premier age a
la vieillessenous mUrit pour un nouvel enfantement chap.23)32.
On ne manque pas de d6truire les membranes qui enveloppent
les nouveau-n6s.Pourquoi tant ch6rir res lambeauxcomme s ils
tenaient a ta personne ? Is n ant fait que couvrir. Voici veniT e
jour qui t arrachera au compagnonnage d un ventre infect et
puant (chap. 27)33.
Ou va l ame enfin ibelee de a chair? Seneque reponddans
un passage dentique :
«Eleve-toi des ci-basa de plus altieres et de plus sublimesmedi-
tations. Un jour la nature te decouvrira seseclatantes umieres.
Le brouillard qui t entoure se dissipera; de toutes parts une
eclatante umiere te criblera de ses ayons. magine-toi eblouis-
sant eclat de tant d astres confondant leurs feux. Nulle tache
d ombre n alterera cette serenite.Toutes es paToisdu ciel pro-
jetteront une egale splendeur34..».
II estclair que, bien que a vie terrestre soil compareea la matri-
ce infecte, la serenite du ciel oil brillent leg etoiles n est pas mise
en doute. Surce point, il en va de meme pour Ie troisieme exemple
il se rouve dans une sectiondes Pensees u philosophe-empereur
Marc Aurele (161-180)qui se comporte en stolcien:
Et de meme que tu t attends au jour oil I enfant qu elle porte
sortira du ventre de ta femme, de meme il faut bien accueillir
I heure oil ton ame doit s echapperde son enveloppe (AUTpOV
= Ie corps) (IX,3)35.
Enfin, Ie quatrieme exemple se trouve dans a Theophanieou
Sur [ apparition de Dieu de l historien ecclesiastiqueEusebe de
Cesaree 263-339). Cet ouvrage ne DOllS st aujourd hui transmis
qu en version syriaque.L identite de son auteur est ongtempsres-
tee sujette a polemique, mais il est main enant communement
32. Seneque,ract.H. Noblot, texte etabli par F. Prechacet revu par
P.Verne, Paris1993, . 995.
33. [d.,p. 996.
34. Ibid.,p. 996.
35.Trad.A.-I. Trannoy,Pensees,aris1925.
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E MONDE COMME MATRICE
admisqu Eusebe en est bien auteur, car 1 s y trouve de nombreux
passagesdentiques a ceux des textes sur la Vie de Constantin,et
de la Demonstration evangelique, e la Preparation evangelique,
etc., doni la paternite eusebiennen est pasmise en doute. La Theo-
phanie aurait ete ecrite apres a Demonstration evangelique, uis-
qu Eusebe reutilise un passage e cet ouvrage. D apres une autre
hypotheseconvaincante H. Gressmann36),a date de sa redaction
serait anterieure a Constantin.
La partie qui nous interesse se trouve au vol. 1, chap. 69-72.
Comme elle est ongue, nous en resumeronsd abord l idee prin-
cipale:
Par rapport a la gloire et a la benediction qui soot donneesdans
Ie ciel aux gens qui ont vecu comme 1 taut sur a terre, la vie ter-
restre de l homme en general est comparable au fretus dans la
matrice tenebreuse e samere. Quand Ie fretus sort du corpsmater-
Del au bon moment, dans a bonne position et dans des conditions
normales, il s echappedes tenebres veTSa lumiere, commencea
respirer et devient adulte en recevant aide de la sage-femme, a
nourriture et l education. Mais si cela ne sepassepas ainsi, e fretus
est enterre, et i1 passedes tenebres aux tenebres. La maniere de
vivre celie vie terrestre estmise paralIele avec a chair du fretus et
sa nalssance.
Lisons maintenant les passages uivants qui semblent es plus
importants au regard de celie idee essentielle
De meme en eifel que celui qui est con~udans a chair est vetu
du vetement propre a son ieu (= l arriere-faix) et que, orsque
vient Ie moment, au terme des mois, celui qui nail Ie depouille
pour alors sortir a la lumiere, respirer un souffle pur, et etre
finalement compte comme de la nature humaine, il en est de
meme ausside la raceparfaite qui estapparue chez es humains
cet excellent petit enfant (dans Ie ciel), re~u dans un corps sur
la terre est vetu d une peau ncorruptible (chap. 69).
De meme aussi, celui qui mene un genre de vie purement
humain sur terre -ou tel qui demeure encore dans a chair -
n est en rien different d un fcetussans raison et ignorant, et on
ne peut Ie comparer aux corpsexterieursdesangeset des esprits
divins, c est un petit enfant ignorant (chap. 72)37.
36. Voir: Eusebius, Die Theophanie Die griechischenBruchstiicke und
iibersetzung der syrischen iiberlieferungen,hrsg. v. H. Gressmann,Leip-
zig 1904 GCS 111/2), -xxix.
37. Trad. M.-J. Pierre.
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T. ONUKI
Les exemplesque nous venonsde citer temoignent de deux opi-
nions : d une part, celIe qui compare la relation entre la chair et
l ame a celIe du fretus avec l arriere-faix; d autre part, celIe qui
compare la vie entiere a la periode fretale dans a matTice,et la
mort a l evasion du fretus (l ame) hOTS e la matrice (du corps).
Peut-on en induire que l ensemble du cosmosvisible et reel doit
etre qualifie de «matrice»? Les auteurs hellenistiques que DOllS
avons releves plus haut ne vont pas usqu a cette conclusion. Car
leurs interets se portent veTS anthropologie, qui focalise sur la
relation entre la chair et l arne. Sur ce point, il est interessantde
relever la conception du Brahmane indien telle que la rapporte
Strabon. Ayant examine opinion sur a mort telle que DOllSenons
de la decrire, Strabon expose mmediatement apres a conception
du brahmane concernant e monde de la nature:
En matiere de physique, ls ont certaines dees qui au dire de
Megasthene,attestent une grande simplicite d esprit, a simpli-
cite d hommes dont les actions valent mieux que les paroles et
qui expliquent tout par des fables; mais il reconnait aussique,
sur beaucoupde points, leurs dees s accordentavec celles des
Grecs; que pour eux par exemple comme pour les Grecs, Ie
monde a eu un commencement,et qu il aura une fin; qu il ala
forme d une sphere et que Ie Dieu qui l a cree et qui Ie gou-
verne Ie penetre et circule dans outes sesparties; qu il y a plu-
sieurs principes ou elements constitutifs de l Univers, mais
qu un seul, eau, a servi a la formation de notre monde; qu in-
dependamment des quatre elements, il existe une cinquieme
substanceavec aquelle ont ete faits Ie ciel et les Astres; que la
Terre enfin occupe e centre de l Univers38.
Strabon (ou son Brahmane) declare donc que Ie cosmos -Ie
monde de la nature, considere comme exterieur pour les brah-
manes ainsi que pour les Grecs -est essentiellementbon. Comme
nons avons deja vu -chez Ie neoplatonicienPorphyre, Ie stolcien
Senequeet Marc-Aurele, ou encore Origene a partir de la Gene-
sechretienne, ainsi que sondisciple ntellectuel Eusebe la notion
de cosmos, e monde de la nature considerecomme exterieur doit
etre tenu essentiellement comme sacre ou du moins hypotheti-
quement accepte; l ne doit pasetre identifie ala « matrice »,enco-
38. Trad. A. Tardieu, Geographie,Paris 1880,p. 250. n va sansdire que
parmi Ies Grecs, seuies certaines ecoies philosophiques enseignaient a
croissance et l extinction du cosmos. Pour Ies Neoplatoniciens, par
exempIe, e cosmos est immortel et sansage. Yoir Etude sur Ie gnosticis-
me, IY. partie, Structure et tradition de la theologie negative,Moyen pla-
tonisme et Bibliotheque de Nag Hammadi (en particulier p. 302-329).
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E MONDE COMME MATRICE
re moins au «sexe feminin ». Dans tons les casrencontres ci, les
termes de «matrice », « arriere-faix », « fretus» ne soot utilises que
comme des metaphores dans Ie cadre de l anthropologie et il ne
soot amais etendus a la cosmologie.
Ce point s applique au cas du Traite sur La resurrection de la
bibliotheque de Nag Hammadi comme on l a vu plus haut. Ce der-
DieT exte mentionne 1 « arriere-faix» au deuxieme sellS,mais il
n entraine pas clairement de developpementcosmologique.Seule
la Paraphrase de Sem Ie fait ires explicitement. L auteur de cet
ouvrage a pris l ensemble des deux opinions repandues dans les
milieux intellectuelsdu monde oriental et hellenistique,et il a pour-
suivi radicalement usqu au bout la logique incluse danscelie ideo-
logie. En decrivant Ie cosmoscomme un sexe eminin, il proclame
la nature de l anti-monde, il manifeste son etus foncier du monde
reel; ou plutot il preche l ascetisme qui, chez es gnostiques,vise
a detruire Ie monde.
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Kevin RODDY;
University of California at Davis
Davis, California
POLITICS AND RELIGION IN LATEANTIQUITY:
THE ROMAN IMPERIAL
ADVENTUSCEREMONY
AND THE CHRISTIAN MYTH
OF THE HARROWING OF HELL
Though it has been known intuitively for many decades, ecent
studies on the Evangelium Nicodemi have proven that this liter-
ary achievementhas been one of the most influential and endur-
ing of all the vast body of Christian apocrypha} Explanations for
this appeal and longevity, however couched in the metaphors of
Jungian analysis,as with Alan Watts,2or establishedas universal
mythology as n JosephCampbell,3or as popular religion and the-
ology as recently studied by Remi Gounelle,4 all of these expla-
nations agree that the apocryphal gospelexerts a powerful attrac-
tion on the human spirit. The following discussionwill argue that
this attraction can be explained in part because of a resonance
between significant features in this work and the most profound
aspects of Late Antiquity; put simply, the Evangelium drew its
symbolic structure from the most significantcomponentsof its cul-
tural environment, and in turn it contributed a new imaginative
universe. Specifically, I propose that an obsessive ocus on civic
liberty, justice, clemency, and vindication, all articulated in the
energetic displays of Roman Imperial oratory and iconography
from the second o the fourth centuries, so captured the popular
1. See especially Zbigniew Izydorczyk, ed., The Medieval Gospel of
Nicodemus: texts, ntertexts, nd contextsn WesternEurope (Tempe,Ari-
zona: Medieval & RenaissanceTexts & Studies,1997).
2. In particular Myth and Ritual in Christianity (New York: Vanguard
Press,1953),pp. 166-69.
3. Beginning, naturally, with The Hero with a Thousand Faces, Bollingen
series, 17 (New York: Pantheon Books, 1949).
4. R6mi Gounelle, La descente du Christ aux enters. Institutionnalisa-
lion d'une croyance (Paris: Institut d'6tudes augustiennes, 2000).
Apocrypha 11,2000, .I47 -179
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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148
K. RODDY
imagination that they becamehabits of exegesis; n time, popular
Christianity adopted this perspective, and the resultant assump-
tion of the secular ed, in consequence,o a new, ransfigured,salvif-
ic vision.
In many ways he central and defining episodeof the Evangeli-
um Nicodemi as t was received in the Middle Ages is the account
of Christ's descent nto hell, in fact a cycle of descentand return,
of kata- and anabasis: following his death, Christ approacheshell,
defeatsSatan, iberates he JewishPatriarchsand Prophetswrong-
ly imprisoned here, and returns to paradisewith the retinue, "lead-
ing captivity captive" (Ephesians 4 :8, quoting Psalm 68 18). As
Gounelle and others have demonstrated, his heroic conceptionof
the descentwas only one of manyelaborated hroughout he patris-
tic period: it should be noted that "descent" is a more generalized
concept, and might involve a large number of other, collateral
themes.5 Luckily, the English language retains a more precise
phrase for the specific embodiment of the descentunder discus-
sion here: the Harrowing of Hell. The word "harrow" arises out
of the Old English infinitive hergian, Middle English herian, har-
ian, harwen, meaning o raid; it signifies, more exactly, a predato-
ry attack, etymologically related to the modem verb "to harry," as
in "harrying the coastline."6Moreover, though the word does not
necessarily enote a purposeof rescue, he concept s closelyallied.
Thus the fifteenth-century English translation of the Speculum
Humanae Salvationishas, for the Latin couplet "Ad istum infer-
num Christus descendit et intravit/ Et omnes, qui in ipso erant,
potenter inde liberavit" this close rendering: "This helle entered
Jhu / oure Saueoure descendingdoune right/ / And of aIle salves
there inne/ he heryde it be his grete myght."7
Although the Harrowing of Hell legend s bestknown to us today
through its presence in the Evangelium Nicodemi, it may have
derived separately. The first and major part of the Evangelium,
usually termed the Acta or Gesta Pilati, survives in a Latin
5. See Gounelle, "La descentedu Christ auxenfers," especially Chapitre
II : La descente du Christ aux enters, partie integrante du kerygme de
l'Eglise," pp. 107-139.
6. Hans Kurath, ShermanKuhn, and John Reidy, Middle English Diction-
ary (Ann Arbor: Univ. of Michigan Press,1956- , H, 689-90.
7. Speculum, d. J. Lutz and P. Perdrizet (Leipzig: Ernest Meininger, 1907-
09), I, 58; The Mirroure of Mans Saluacionne privately printed for the
Roxburghe Club, 1888),p. 100.
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palimpsest of the fifth century, with no hint of a Harrowing nar-
rative; and indeed all of the surviving Middle Eastern and the old-
est Greek version of the Acta do not contain a descentsection. By
the ninth century, the time of the next surviving Latin manuscript,
however, the Harrowing is firmly attached, and it remained
attached henceforward.sThe resulting hybrid version of the pas-
sion and resurrection of Christ became one of the most popular
works in the Middle Ages, as Zbigniew Izydorczyk's censusof 424
surviving (and twelve lost) Latin manuscripts proves.9The Har-
rowing narrative attached to these Evangelium Nicodemi manu-
scripts s therefore, in the manuscript radition, relatively late; but,
in spite of its ninth-century attestation, there is a very strong ten-
dency o place it earlier, perhaps in the mid-sixth century}OFortu-
nately, there are other sources for the Harrowing, mostly in ser-
mon collections, which indicate a full development of the myth in
Late Antiquity, and indeed five of these sermons contain sections
nearly identical to the narrative found in the Evangelium Nicode-
mi. For a typical indication of an early date for these sermons,one
uses,with a positive connotation, the Roman technical term exac-
tor- tax collector for Christ. Peter Brown has described this
office as resultant specifically from fourth- and fifth-century offi-
cial fiscal policy; it would not be comprehensible outside of that
context.11Before we examine he evidenceof correlation between
8. See Izydorczyk, The Medieval Gospel of Nicodemus,pp. 43-54, or a
summary of the possible interrelationship between hese narratives. The
text of the apocryphon s available in H.C. Kim's edition of the tenth-cen-
tury Codex Einsidlensis 326 (The Gospel of Nicodemus [Toronto: Pon-
tifical Institute, 1973]).
9. For a discussionof the manuscript tradition, seeZbigniew Izydorczyk,
The Unfamiliar EvangeliumNicodemi, Manuscripta 33 (1989), 172-8,
and Manuscripts of he Evangelium Nicodemi : A Census Toronto: Pon-
tifical Institute of Medieval Studies), 1993.This large number of manu-
scripts can be increased significantly by adding vernacular translations,a
fascinatingEnglishexample of which s Huntington Manuscript 144, rude-
ly written, perhaps by a middle-class owner. See Consuelo Wager
Dutschke's Guide to the Medieval and RenaissanceManuscripts in the
Huntington Library (SanMarino: The Huntington Library, 1989),p. 198.
10. For a summary of some of the most compelling arguments,see Remi
Gounelle and Zbigniew Izydorczyk's Introduction in L'Evangile de
Nicodeme,ou Les Actes fais sousPonce Pilate (recension atine A), suive
de La Lettre de Pilate it l'empereur Claude (Turnhout: Brepols, 1997),
pp.114-7.
11. The term exactorappears n the collection of homilies associatedwith
a certain Eusebius Gallicanus, for which seebelow, in SermoXII 2.15.
Brown defines exactor as the person responsible for the collection of
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Romanculture and the Harrowing n detail, however, here are
somebackgroundssueso consider.
The Christian Context by the Second Century
The apocalyptic ocusof early Christianity on the imminent return
of Christ s obvious n evena superficial readingof Scripture; almost
simultaneously,Christ's nativity began o be describedas a prefig-
uration of that return, establishing n time what was o end time. As
early as the secondcentury, Christian culture had begun to visual-
ize a third coming of Christ, occurring betweenhis appearanceon
earth at his nativity, and his return from heavenat the end of time:
after his deathand before his resurrection, he newly-glorified Christ
manifestedhis power first in the abodeof the dead, overcoming he
allegorized igure of Death itself, and, after this, n heaven, hrough
the Ascension.This development, already anticipated in Philippi-
ans 2 :9-11,served as a cosmic analog, encompassingdepths and
heights, to the established emporal sequence,which had already
subsumeda universal beginning and end.
Bishop Melito of Sardis,who died around the year 190,preached
a Pascalhomily that illustrates the cosmic heme in its early stages
of development; while it is in part a historical accident that this
testimony, like other testimonies of the harrowing myth, should
find expression n sermon orm, it can fairly be said that the genre
is more indicative of popular attitudes n this period toward Christ's
descent nto hell. After describing he crucifixion, Melito depicts
the resurrection in these heroic terms:
He rose up from the dead,and cried aloud with this voice: Who
is he that contends with me ? Let him stand n opposition to me.
I set he condemnedman free; I gave he dead man ife; I raised
up the one who had been entombed. Who is my opponent? I,
says he, am the Christ. I am the one who destroyed death, and
triumphed over the enemy,and trampled Hades under foot, and
bound the strong one, and carried off man to the heights of
heaven, , he says,am the Christ.12
arrears,usually. ..a senior member of the town council (Power and Per-
suasion in Late Antiquity: Towardsa Christian Empire [Madison: The
Univ. of Wisconsin Press,1992],p. 28).
12. Translated by Gerald Hawthorne, in A New English Translation of
Melito's PascalHomily, in Current Issues n Biblical and Patristic Inter-
pretation (Grand Rapids,Michigan: William B. Eerdmans, 1975),p. 173.
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POLmcs AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
The vivid image s that of the classicalmonarch, isting his accom-
plishments and hurling challenges at the enemy. In this context,
moreover, he term triumph is to be taken literally. As Otto Per-
ler writes, Melito compares his Christ with a triumphant king.
(This was a favorite subject of triumphal art [triumphal archesand
diptychs].) The term is a technical expressionsignifying the con-
ducting of a captive in a triumphal procession. 13Melito, more-
over, represents one of the first Christian preachers o adopt the
ornate oratorical techniques of Greek Rhetoricians, and George
Kennedy proposes that this homily is characterized by a flam-
boyant literary style reminiscent of the sophist Gorgias. 14n con-
trast to earlier, more constrained oratorical approaches,Melito
exploits the thematic implications of his subject with theatrical
exaggeration.One of the most mportant usesof this dramatic style
would be the epideitic, the praise of great public figures.
This third coming of Christ, then, sharescharacteristicswith
the other two comings, but has an explicit imaginative dimension
in terms of conquest.To choose wo illustrative details, the bind-
ing of the strong one seemsclearly based on an anticipation of
Revelation 20 2, so that the Satanbound in the future already expe-
riences a foretaste of it in time; on the other hand, trampling of
Hades underfoot is just as much a reference o the symbolic calca-
tio colli, the dramatic pose of a conqueror placing his foot on the
neck of his enemy, as it may be a biblical allusion}5 It is easy to
imagine that this presentationwas givenbefore a congregationwho
anticipated the depiction of Christ as conqueringhero with excite-
ment; certainly they were fully convinced of the combative nature
of the descent,and were eager o hear the theme exploited fully.
This is not to say that literary treatments of the other two com-
ings of Christ had not been extensively nfluenced by prevalent
political custom. Historians of religion have for some ime recog-
13. Meliton compare son Christ a un roi triomphateur. (C'etait un sujet
favori de rart triomphal (arcs de triomphe, diptyques).) Le terme estune
expression echnique signifiant conduire un captif dans e cortege triom-
phal. In O. Perler's edition of Melito, Sur la Plique et Fragments,Sources
Chretiennes 123 (Paris: Editions du Cerf, 1966),p. 201.
14. ClassicalRhetoric and Its Christian and Secular Tradition rom Ancient
to Modem Times,2nd. ed. (Chapel Hill: Univ. of North Carolina Press,
1999),p. 156.
15. SeeMichael McCormick, Eternal Victory: Triumphal Rulership n Late
Antiquity, Byzantium,and the Early Medieval West Cambridge: The Uni-
versity Press,1986),pp. 57-58 and note 76.
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nized that Hellenistic conceptsof divine and royal immanence, he
epiphaneia and parousia, profoundly affected early Christian
thought, specifically in depicting Christ's work as redeemer.16
Briefly, the ritualized apparition of the god brought health to the
polis; in a transference which must precede Greece by millennia
the ruler, himself a realization of the god, ceremonially enters the
city in his own manifestation, and is greeted with acclamations
naming him soter: he who saves.The Gospel of Matthew in par-
ticular defines Christ's two appearances, n time and beyond it, as
epiphanies, manifestations of mercy to the just and judgment to
the rebellious. And, as has been demonstrated for the last seven-
ty years, he inter-relationship of Hellenistic ideas of kingship and
Christian soteriology continued for many centuries in the writings
of Eastern theologians.17 he West ollowed a similar path, deter-
mined in large measure by the gradual adaptation of the Roman
ceremonies of adventusand adoratio, an adaptation that extend-
ed from the Principate through to the Dominate and into the early
Middle Ages.1sAristotle states at the 'outset of the Posterior Ana-
lytics that all learning proceeds from the known to the unknown;
it may well be that the ineffable notion of deific manifestationcould
only be understood n terms of manifestations hat were both famil-
iar and, in their literary embodiment, divine.
The Adventus Ceremony in the Principate and Interregnum
From the time of Augustus, Roman imperial policy had been
gradually transforming the Hellenistic concept of royal epiphany
according o its own nterests, nterests that were both uridical and
territorial. The resultant adventusbecameone of the chief means
of effecting that best of all Roman ideals, the stability of the com-
monwealth.19The earliest embodiment might be said to reach ts
16. See G. W.H. Lampe, A Patristic Greek Lexicon (Oxford: The Claren-
don Press,1961),pp. 538-9 and 1043-4.
17. E.R. Goodenough, The Political Philosophyof Hellenistic Kingship,
Yale ClassicalStudies1 (1928),55-102.
18. For the broad, parallel use of adventusamong Christian authors, see
Albert Blaise,Dictionnaire latin-frant;aisdesauteurschretiens Strasbourg
Le latin chretien, 1954),61-2.
19. For a succinct discussionof the adventus, eeBrown's Power and Per-
suasion,pp. 13-14. A longer description may be found in Sabine Mac-
Cormack, Art and Ceremony n Late Antiquity (Berkeley: Univ. of Cali-
fornia Press, 1981),pp. 17-89. The full definition appears n Thesaurus
linguae latinae (Leipzig: Teubner, 1900), 1, 837-40.
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OLmcs AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
fullest development under Hadrian, when Roman propagandists
completed their transformation of the royal entry in two basic,
complementary aspects: the entry itself, the adventus, ymboliz-
ing the emperor's universal authority; and, symbolizinghis benev-
olence and clemency, he restoration of the city or province to its
previous grandeur. The iconography for these can be seen on a
number of coins in various series struck well into the fourth cen-
tury. In the first, the emperor demonstrateshis piety, performing
a sacrifice as a personification of the province watches; in the sec-
ond, the emperor approacheson foot, hand extended in a gesture
of concern toward the personification, who, reclining, raises an
arm in supplication.20t is important to note that both issuesdepict
the emperor motivated by his majesty, rather than by the specific
rights (or merits) of the unfortunate people.
The language appropriate to this encounter can be discovered
in the prosphonetikoi, the set speechesmade on occasionsof wel-
come. An illustrative example s Pliny the Younger's Panegyricus,
written as an address o the Emperor Trajan depicting his entry
into Rome in 99
Now first of all, think of the day when you entered your city, so
long awaited and so much desired [expectatus esideratusque]
The very method of your entry won delight and surprise, for
your predecessors hose o be borne, or carried in, not satisfied
even o be drawn by four white horses n a triumphal carriage,
but lifted up on human shoulders in their overbearing pride.
You towered above us only because of your own splendid
physique; your triumph did not rest on humiliation, won as it
was over mperial arrogance. ..Even the sick disregarded heir
doctors' orders and dragged themselves out for a glimpse of
you, as f this could restore their health. All felt the same oy at
your coming [adventu], when you were coming [venisti] o be
the same for all, joy which could still grow as you moved for-
ward, and (one might say) swell with every step?1
20. See especially he adventus eriesof Hadrian in H. Mattingly and E.A.
Sydenham, Roman Imperial Coinage (London: Spink, 1923-81), 2.
21.22,1-5, trans. Betty Radice, Loeb series London: Heinemann, 1969),
2, 371; "Ac primum qui dies ille, quo expectatus desideratusqueurbem
tuam ingressuses lam hoc ipsum, quod ingressuses,quam mirum lae-
tumque Nam priores inuehi et importari solebant, non dico quadriiugo
curru et albentibus equis sed umeris hominum, quod adrogantius erat. 1\1
sola corporis proceritate elatior aliis et excelsior,non de patientia nostra
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According to George Kennedy,Pliny's panegyriccontinues both
the practice and perspective of earlier set speeches; t is, howev-
er, remarkable in its seriousness f purpose, and it was unusually
influential becauseof Pliny's high reputation and ts masterful an-
guage.22 egarding ts purpose, Pliny wrote that the virtues of the
emperor be reinforced by sincerepraise of them and secondly hat
future emperors be admonished, not as by a teacher, but in the
form of example, by what road they best might attain the same
glory (Ep. 3.18.1-2).23 he dual objective of praising the Emper-
or's virtues and correcting uture rulers s fully realized n the entire,
lengthy text of the Panegyricus,but a senseof it can be recovered
here. The Emperor's republican, civic piety is clear in the circum-
stancesof the ceremony: the adventus tself is closely uxtaposed
to the root verb, as if to emphasize he Emperor's gracious (and,
by implication, personal) participation in the event; the expecta-
tus desideratusquenternal rhyme certainly emphasizes he gen-
erally hopeful condition of the populace. Trajan's humility is fully
characterized in contrast to the usual custom of entry: in his
unadorned physical presence he overcomes the pretensions of
namelesspredecessors.As to admonishing any future emperors,
the second aspect to his purpose, Pliny in this way raises the
spectersof inadequate rulers, if only obliquely, as testimonies to
Trajan's superiority. According to SabineMacCormack, such$ub-
dued criticism of predecessorsits precisely n Menander Rhetor's
advice on panegyrics, n which the speaker s specifically enjoi~ed
not to disparage the past: If [the subjects] have fared ill under
the preceding ruler, you give examples and elaborate their mis-
fortunes,while not, however,speakingany ll of the preceding 1IIler,
but you simply speak about the misfortunes of thesubjects. 24As
we will see,panegyrists will begin to ignore this rule later in the
history of the empire, when misrule takes on the coloring of pub-
lic betrayal.
quendam triumphum, sed de superbia principum egisti. ...aegri quoque
neglecto medentium imperio ad conspectum till quasi ad salutem ~ani-
tatemque prorepere. ...Tam aequalis ab omnibus ex aduentu uo laeti-
tia percepta est,quam omnibus uenisti quae tamen psa cum ngressu uo
creuit, ac prope in singulos gradusaucta est, in XII panegyrici Latini, ed.
R.A.B. Mynors (Oxford: The Clarendon Press,1964),17-8.
22. The Art of Rhetoric in the Roman World. 300 B.C.-300A.D. (Prince-
ton: Princeton Univ. Press,1972),pp. 543-46.
23. Translation quoted in Kennedy,p. 544.
24. Peri epideiktikon, 378, 16-23. Translated in MacCormack, p. 20.
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Pliny takes his purpose further, however. In using "venisti" and
"expectatus," he is relying on his audience's amiliarity with line
687of the sixth book of the Aeneid, addressed o Aeneas upon his
entry into the underworld: "Venisti tandem, uaque expectatapar-
enti/Vicit iter durum pietas."25Just as Aeneas' coming to Hades
was salutary o his honored father, Trajan's entry was presumed o
restore health simply in the glimpsing of it, an assertion Pliny is
happy to report without crediting it. The notion that an imperial
adventuswould bring-or more accurately restore-health is not
entirely hyperbolic: on their entries, emperorsoften returned priv-
ileges o cities and provinces,and abolishedburdensome ax levies.
It was not a great step from suchpublic salus-the basis of salva-
tor-to bodily health; the appropriately expectant condition and
turbulent excitement of the crowds s, under these circumstances,
entirely natural. In this highly charged series of allusions, then,
Pliny presents the emperor in majesty and glory, while stressing
his native humility through his own characteristic protestations of
unworthiness.The Roman salva or has not migrated very far from
the Hellenistic soter,but it has been complemented with a contin-
ued emphasis on pietas and the other Roman virtues. Kennedy
suggests hat the oration may have actually affected Trajan for the
good, contributing to his benign and rational rule; even f this were
not so, he Panegyricus uccessfully efined he genreand ts under-
lying code of virtuous behavior for many centuries.
As MacCormack indicates, this dual emphasis n the imperial
adventusboth remains constant and, on occasion, requires rein-
vention with a broader, more universalistic scope.This scope, n
turn, begins o blur the arriving emperor'scomplementary roles as
ruler and restorer. For example, Emperor Gallienus (253-268)
25. The associationbetweenAnchises' greeting and savior emperorshad
a long life; for one unfortunately poorly documented study, see Pierre
Dufraigne, Adventus Augusti, adventusChristi: recherchesur I' exploita-
tion ideologiqueet itteraire d'un ceremonialdans ' antiquite tardive Paris:
lnstitut d'etudes augustiniennes,1994); Dufraigne defines the "Expec-
tate veni" as a "formule qui annonce l'epiphanie d'un dieu, et qui sup-
pose une divinisation ou tout au moins une surhumanisationplus carac-
terisee du souverain" (pp. 53-4). And sometimes there is a surprising
association: in 288 Carausius,a usurper in Britain, issued coins with a
reverse depicting a grateful genius Britanniae welcoming him, and con-
taining the optimistic inscription, "EXPECfATE YEN " (R.I.C. 5.2.510,
nos. 554ff). For a discussionand photograph of the issue,see Peter Sal-
way, The Oxford History of Roman Britain (Oxford: Oxford Univ. Press,
1993),pp. 205-6.
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issued coins naming him Restitutor orbis, in a direct contrast to
Hadrian's ssuesof the previous century that celebrate him asResti-
tutor Africae and Restitutor Achaiae in honor of that emperor's
adventus hrough the provinces. According to the Scriptores his-
toriae Augustae,Probus (276-282)s greeted by the senatewith this
scarcelybounded enthusiasm:
Probus Augustus, may the gods keep you Long since worthy,
brave and just, a good leader, a good commander, an example
in warfare, an example in command. May the gods keep you
Deliverer of the commonwealth,may you be happy n your rule,
master in warfare, may you be happy in rule May the gods
guard you and yours Even before this the Senate chose you.
In years inferior to Tacitus, in all else superior. For having
accepted the imperial power we give you our thanks. Protect
us, protect the commonwealth. Rightly do we entrust to your
keeping those whom you formerly served. You are Francicus,
you are Gothicus, you are Sarmaticus,you are Parthicus, you
are everything. In former years, too, you were ever worthy of
command, worth of triumphs. Happily may you live, happily
may you rule}6
This fomlalized greeting s fascinating n its practical unconcern
for fact; the senate politely ignores the unfortunate circumstances
of the death of Tacitus in order to make the most of Probus' legit-
imacy.The senatorsespeciallycelebratehis ability to save he com-
monwealth, to protect it, and to conquer not only the Franks, the
Goths, the Sarmaticans, and the Parthians, but apparently the
remainder of the world.
Michael McCormick's study of Roman and post-Roman mili-
tary attitudes, Eternal Victory,charts he further expansionof such
acclamations rom the Principate on. Not only were heroic emper-
ors praised in more exaggeratedways, but putative enemieswere
26. Probus, XI, 6-12. Trans. David Magie, Loeb series (London: Heine-
mann, 1921),358; "Probe August, di te servent. Olim dignus et fortis et
iustus, bonus ductor, bonus imperator, exemplum militiae, exemplum
imperii. Di te servent. Adsertor rei publicae felix imperes magister mili-
tiae felix imperes, te cum tills di custodiant. Et senatus antea te delegit.
Aetate Tacito posterior, ceteris prior, quod imperium suscepistigratias
agimus.There nos, uere rem publicam. Bene tibi committimus quos ante
servasti. Th Francicus, u Gothicus, tu Sarmaticus, u Parthicus, u omnia.
Et prius fuisti semperdignus imperio, dignis riumphis. Felix agas, eliciter
imperes," in Scriptoreshistoriae Augustae, d. Ernst Hohl, (Leipzig: Teub-
ner, 1965), I.
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OLmcs AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
attacked more savagely. he third century, McCormick shows,gen-
erated broader and broader titles of invective regarding Rome's
enemies,and on occasion heseenemiesencompassedivals-seat-
ed emperors included-to the throne.27According to the Scrip-
tores,when in 238 Gordian I and Gordian II were proclaimed in
Africa against he Emperor Maximinus (235-238), he consul at
Rome simultaneously orestalled Maximinus' party and prepared
the senate or its welcomingacclamationswith the following words :
"Conscript Fathers, he two Gordians ...have freed us from
that savagemonster, rom that wild beast.Why do you hear me
with quaking? Why do you look around? Why do you delay?
This is what you have always hoped for. Maximinus is our
enemy; the gods shall bring it to pass hat he may nowcease o
be "
The consul has cleverly reminded the senate of its new respon-
sibilities, now that it has been iberated from a manifest yrant, and
he encourages hem to declare themselves oyal to the Gordians.
He was sufficiently persuasive,according o the narrative, for the
Senate o oblige with an acclamation, apparently spontaneously:
"We thank you, 0 gods. We are freed from our enemies; so may
we be wholly freed We adjudge Maximinus an enemy. We con-
sign Maximinus and his son to the gods below. We call the Gor-
dians Augusti. ..."28 The concept of vindication from a despotic
enemycontinues hemes ound in Menander and Pliny; the astute
advice not to make too much of a previous ruler's failings seems,
however, o be quite forgotten.
Naturally, if the enemywere barbarians, no delicacyof feelings
need be expressed: n the official descriptions of victories over the
Parthians or the Germans, for example, he emphasiscentered on
the prostrate figures of their leaders, he vast numbers of captives
taken, the even greater numbers of slain, the Romans and Roman
cities rescued, and the Roman spoils returned, in addition to the
accumulated enemy spoils. The impression to be conveyed was
27. McCormick, Eternal Victory,pp. 21-24.
28. In Scriptores historiae Augustae,The Three Gordians. XI, 4, 6-7, 9.
Magie trans., 2, 401. "'Patres conscripti, Gordiani duo. ..ab inmani nos
belua, ab lIa fera vindicaverent. Quid tirnide auditis? Quid circumspici-
tis? Quid cunctamini ? Hoc est quod semperoptastis. Hostis est Maximi-
nus; di facient ut esse am desinat. ...'" "'Di vobis gratias. Liberati ab
hostibus sumus, sic reDitus liberemur. Maximinus cum filio dis inferis
devovemus.Gordianos Augustos appellamus'" (Hohl ed., I).
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that Roman arms were irresistible, and that the enemy had been
completely annihilated: throughout, there is an exijlicit notion of
absolute victory, for which the godswere to be thanked. For exam-
ple, this is Scriptoresversion of the dispatch of Probus to the Sen-
ate following his Rhine campaign:
Conscript Fathers, to the immortal gods that they have con-
firmed your judgment of me. For all of Germany, throughout
its whole extent, has now been subdued,and nine kings of dif-
ferent tribes have lain suppliant and prostrate at my feet, or
should I say at yours. Now all the barbarians plow for you, plant
for you, and serve against he more distant tribes. Therefore do
you, in accord with your custom,decree hanksgivings.For four
hundred thousand of our foes have been slain, sixteen housand
armed men are at our disposal,seventymost amous cities have
been rescued, and all the Gallic provinces have been made
entirely free [liberatae]. The crowns of gold which all the com-
munesof Gaul have bestowed upon me I have dedicated o your
clemency,ConscriptFathers.Do you, with your hands,now con-
secrate them to Jupiter Best and Greatest and to the other
immortal gods and goddesses.All booty has been regained,
other booty too has been captured, greater, ndeed, than that
which was previously taken. 29
What is most striking about passages uchas hese s the victor's
adherence to formulas of devotion to the gods and loyalty to the
senate,while leaving no doubt as o the true source of the empire's
success: n this case,none other than Probus. The prostrate Ger-
man kings, n an official attitude ofadoratio/proskynesis, all before
Probus, who then transfers the gesture o the honor of the senate.
And the reference to coronas aureas, for example, almost cer-
tainly relates to mural crowns (though Vegetius dentifies a num-
29. In Scriptoreshistoriae Augustae,Probus XV, 1-5. Magie trans., 3,367.
' Ago ills inmortalibus gratias, patres conscripti, quia vestra in me iudi-
cia comprobarunt. Subacta est omnis qua tenditur late Germania, Govern
leges gentium diversarum ad meos pedes, mmo ad vestros,supplicessta-
tique iacuerunt. Omnes am barbari vobis arant, vobis iam serunt et con-
tra interiores gentesmilitant. Supplicationes gitur vestro more decemite.
Nam et quadrigenta milia hostium caesa sunt, et sedecimmilia armato-
rum nobis oblata, et septuaginta urbes nobilissimae a captivitate hostium
vindicatae, et omnes penitus Galliae liberatae. Coronas, quas mihi
obtulerunt omnes Galliae civitates aureas, vestrae, patres conscripti
clementiae dedicavi. Eas Iovi Optimo Maximo ceterisque dis deabusque
immortalibus vestris manibus consecrate.Praeda omnis recepta est,capta
etiam alia, et quidem maior quam fuerat ante direpta , (Hohl ed., II).
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OLillCS AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
ber of others) :30hese were awarded to the first soldier who suc-
cessfullyscaleda city wall. Even with the measureof hyperbole in
this address, here is a fairly consistent continuity of almost three
hundred years n attitudes regarding he salvationof the state, and
even as attitudes begin to change radically under the Tetrarchs,
many of the elements of imperial piety and legitimate rule on one
side, and his clemency on the other, remain and still inform the
cultural imagination.
The Dominateand Beyond
It is with a deliberate purpose that the Tetrarchy (and their ene-
mies) begins to define the adventus n a more transcendentcon-
text.31While there is no room here to elaborate fully on the trans-
formation of the Empire that reached a culmination with the
Tetrarchs and subsequently, t is sufficient to say that the concept
of imperial salvation took on explicitly sacred dimensions,while
consciouslyattempting to retain Republican virtues.32 he adven-
tus of the individual Tetrarch is presented as a divine reconcilia-
tion of his proper pietas,and it is without embarrassment hat each
is called a deuspraesens.The union of the four rulers' indepen-
dent wills was depicted as an almost mystical symbol of the unity
of the empire, an empire no longer founded on simple devotion to
the gods, but on their emperors' divine calling. There is a witness
in this celebratory description of Constantius' entry into the city
of London, formerly held by the rebel Allectus, in297:
As soon as you approached that shore as the long-desired
avengerand liberator, a triumphal crowd poured forth to meet
Your Majesty,and Britons exultant with joy came orward with
30. On the various types of military crowns, see Flavius Vegetius Rena-
tus, De re militari, III, 5.
31. The following is heavily dependent on MacCormack, Art and Cere-
many, 22-33.
32. See, inter alia, Robert Etienne, Le culte imperial dans la peninsule
iberique d'Auguste ii Diocletien, Bibliotheque des Ecoles fran aises
d'Athenes et de Rome, 191 (Paris: E. De Boccard, 1958); Duncan Fish-
wick, The Imperial Numen n Roman Britain, Journal of Roman Stud-
ies 59 (1969), 76-91; Hans Peter L'Orange, Art Forms and Civic Life in
the Late Roman Empire, rans.Dr. andMrs. Knut Berg (Princeton: Prince-
ton Univ. Press,1965),pp.126-129; and Fritz Taeger, Zur Geschichteder
spatkaiserzeitlichen Herrscherauffassung, Saeculum7 (1956), 182-95;
Robin Lane Fox, Pagansand Christians SanFrancisco: Harper and Row,
1986),p. 141.
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K. RODDY
their wives and children, venerating not you alone, whom they
gazed at as one who had descended rom heaven,but even he
sailsand oars of that ship which had conveyedyour divinity and
prepared to feel your weight upon their prostrate bodies as you
disembarked.Noris it any wonder if they were carried away by
such oy after so many years of miserable captivity; after the
violation of their wives, after the shamefulenslavement f their
children, they were free at last, at last Romans, at last restored
to life by the true light of empire. Certainly indeed,quite apart
from that reputation of yours for clemencyand piety which is
celebrated by the commonvoice of nations, hey saw he stamp
of every virtue on your face, 0 Caesar; on your brow, dignity;
in your eyes,gentleness; n your blush,modesty; n your speech,
justice."33
Some elements are familiar enough: the combined notion of
authority and generosity, the triumphal procession, the adora-
tio / proskynesis; but others are noticeably different: the emphasis
on a cosmic origin, the aspectof veneration, the conceptof re-cre-
ation vera /uce mperii. The Arras medallion, commemorating he
event, contains the telling inscription, "REDDITOR LUCIS
AETERNAE."34 And, while due acknowledgement s made to
Constantius' time-honored virtues of clemencyand loyalty, he has
surpassedeven that noble tradition by shining forth in his features
all of the virtues.35 t is difficult to imagine suchsentiments arising
in Pliny.
33. "Merito igitur statim atque ad litus illud exoptatus olim uindex et lib-
erator appuleras,obuius sesemaiestati tuae triumphus effundit, exultan-
tesquegaudio Britanni cum coniugibusac iberis obtulerunt, non te ipsum
modo, quem ut caelo delapsum ntuebantur, sed etiam nauis illius quae
tuum numen aduexerat,uela remigiaque uenerantes,paratique te ingre-
dientem stratis sentire corporibus. Nec mirum si anto gaudio ferebantur
post tot annorum miserrimam captiuitatem, post uiolatas coniuges,post
liberorum turpe seruitium tandem iberi tandemque Romani, tandemuera
imperii lure recreati. Siquidempraeter llam clementiaeuestraepietatisque
farnam,quae communi gentium uoce celebratur, n ipso, Caesar,uo uultu
uidebant omnium signa uirtutum : in fronte grauitatis, in oculis lenitatis,
in rubore uerecundiae, n sermone ustitiae" (Panegyrici Latini, VIII. 19.
1-3). Quoted and translated in In Praise of Later Roman Emperors,The
Transformation of the Classical Heritage, 21, by C.E. V; Nixon and Bar-
bara Saylor Rodgers Berkeley: University of California Press,1994),pp.
140,552.
34. R.I.C. 5.2,no. 34. Discussed n Nixon and Rodgers, n Praiseof Later
Roman Emperors,p. 140,n. 71. Seealso MacCormack, Art and Ceremo-
ny, p. 29, and plate 9.
35. For extensive examples of the terrifying splendor of a late emperor's
visage, see Ammianus Marcellinus. Rerum $ estarum ibri. ed. Victor
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POLffiCS AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
Constantius'clemency oward the not altogetherguiltless nhab-
itants of London could certainly be cause or rejoicing; aswe have
seen, even in the earlier empire political rivals could be ritually
proscribed, so that they might suffer the double indignity of con-
demnation to Hades and assassinationat the hands of their own
troops. Under the Dominate, attitudes toward enemies-foreign
and domestic-become exacerbated; the tone increases n moral
and one might say metaphysicalpitch over that which was mplic-
it in the dispatchesof Probus, above; this heightening of pitch is
evident n the following remarksby Ammianus Marcellinus egard-
ing the hapless king of the Alamanni, Chonodomar. It is note-
worthy, though, that Ammianus reservesno suchcontempt for the
king's companions, who, in an interesting echo of Tacitus, prefer
not to outlive their leader:
On seeing [the pursuing cohort, the king] was driven to the
utmost fear and surrendered of his own accord, coming out
alone; and his attendants, wo hundred in number, with three
of his closest riends, hinking it a disgrace o survive their king,
or not to die for their king if an emergency required it, gave
themselvesup to be made prisoners. And as he savages re by
nature humble in adversity and overbearing in success, ub-
servient as he now was to another's will he was dragged along
pale and abashed, tongue-tied by the consciousnessof his
crimes-how vastly different from the man who, after savage
and woeful outrages, trampled upon the ashes of Gaul and
threatened many dire deeds.36
These considerationsare not unique to fourth-century Roman
ideology: the instigator of a rebellion often receivesa dispropor-
tionate share of odium; and that odium may be crouched, as here,
in terms of ironic comparison with his high ambitions and former
Gardthausen Stuttgart: Teubner, 1967) 18. 2, 17; 21. 13,15; 27. 2, 6; 27.
5, 3; 28. 5, 3; 29. 5, 15; and 31. 10, 9. Also, Ramsay MacMullen, Some
Pictures in Ammianus Marcellinus, Art Bulletin 46 (1964), 435-55.
36. Constantiusand Julian, 16.12,60-61.Trans. JohnC. Rolfe, Loeb series
(London: Heinemann, 1952), , 297-99. Quibus uisis,conpulsusad ulti-
mos metus ultro se dedit solusegressus ornitesqueeius ducenti numero
et tres amici iunctissirni, lagitium arbitrati post legem uiuere, tiel pro lege
non fiOri, si ta tulerit casus, radidere seuinciendos. Utque natiuo more
Stint barbari humiles in aduersis disparesque n secundis,seruus alienae
uoluntatis trahebatur pallore confususclaudentenoxarum conscientia in-
guam, mmensumquantum ab eo differens qui post eros ugubresque er-
rOles cineribus Galliarum insultans multa minabatur et saeua, ed.
Gardthausen, 2, 109.
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K. RODDY
power. And indeed, it does seemas f Ammianus has deliberately
singled out the king for censure; in a symmetrical guarantee of
transcendence o an ideal imperator,who in his majestyembodies
all virtue, the leaderwho opposeshim must necessarily ontain all
vice. Chonodomar'sattendantsand friends, on the other hand, are
presented as loyal and courageous, n contrast to their king; they
seemnot to be implicated in treachery,but were rather merely mis-
led by a once charismatic and now pathetic figure.
By specifically identifying the enemy leader as the sole culpa-
ble criminal, the conquering emperor may in his clemencyexcuse
the misguidedcitizens of this or that city defeated n its revolt. The
city, in gratitude, may n turn both accept he emperor's mercy and
direct all its guilty fury against ts former leader. In this circum-
stance t is even possible for the emperor (or, as the century pro-
gresses, is representative) o assumea more judiciously objective
role as investigative magistrate. Ammianus gives the following
account of Emperor Julian sendinghis general Agilo to Aquileia
in 361 ; the city had been rebelling under a certain Nigrinus and
others in support of Constantius II. After Agilo had given the
rebels a solemn oath that Constantius was dead and that Julian
was now the true emperor, the city surrendered:
When this was heard, the gates were opened, and after their
long torment all poured forth and gladly met the peace-mak-
ing general. Trying to excuse hemselves, hey presented Nigri-
nus as the author of the whole outrage, along with a few oth-
ers, asking that by the execution of these men the crime of
treason and the woes of their city might be expiated. Finally, a
few days ater, after the affair had beenmore thoroughly inves-
tigated before Mamertinus, the praetorian prefect, then sitting
in judgement, Nigrinus as the chief instigator of the war was
burned alive. But after him Romulus and Sabostius,senators
of Aquileia, being convicted as having sown the seedsof dis-
cord without regard to its dangerousconsequences, ied by the
executioner's word. All the rest, whom compulsion, ather than
inclination, had driven to this mad strife, escapedunpunished.
For so the emperor, naturally mild and merciful, had decided
on grounds of justice.3?
37. Rerum, 21. 12,19. Trans. Rolf, I. His auditis ex diuturno angore por-
tis reclusisomnes effusi suscepereaeti pacificum ducem,sequepurgantes
Nigrinum totius furoris auctorempaucosquealios obtulerunt, eorum sup-
plicio laesaecrimina maiestatis et urbis aerumnasexpiari poscentes.Pau-
cis denique post diebus exploratius spectatonegotio,Mamertino turn iudi-
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OLITICS AND RELIGION IN LATE ANTIQUrrY
Particularly noteworthy is the citizens' prayer for expiation from
treason, both the greatestof all crimes and the self-acknowledged
sourceof the city's misery. n consequence, ut only after the obser-
vation of due process, Nigrinus received the most horrifying of
punishments;his confederates,however, f that is indeed what they
were, are almost excused for not having considered the conse-
quences of their actions. They are given a comparatively honor-
able and less painful death as befitting Roman citizens. Ammi-
anus' last statement, a summation almost having the quality of a
legal dictum in itself, reconciles he irreconcilable: it would be far
more logical to judge first, and then choose o be merciful. Julian,
in a deific way, has demonstrated his natural clemencyprecisely,
and purely, within the strict bounds of absolute equity.
In similar ways, the notion that the emperor's adventuscould
restore health to a languishingpeople takes on a spiritual dimen-
sion, as f the ruler's powers might exceed even hose of the gods.
In one illustrative incident, occurring at Vienne in 355,Ammianus
recounts what musthave beena commonplaceevent: the dramatic
proclamation of Julian as he great hope of civic redemption, cul-
minating in his dedication to restore the customary Roman reli-
gion:
When he reachedVienne and entered he city,all agesand ranks
flocked together to receive him with honor, as a man both
longed for and efficient; and when they saw him afar off, the
whole populace with the immediate neighborhood saluted him
as a commandergracious and fortunate, and marched aheadof
him with a chorus of praise, he more eagerly beholding royal
pomp in a legitimate prince. And in his coming they placed the
redress of their common disasters, hinking that some helpful
spirit had shone upon their desperatecondition. Then an old
woman, who had lost her sight, on inquiring who had entered
and learning that it was the Caesar Julian, cried out that he
would repair the temples of the gods.38
cante praefecto praetorio, Nigrinus ut acerrimus belli instinctor exustus
est uiuus. Romulus nero post eum et Sabostius curiales conuicti sine
respectupericuli in studia saeuiissediscordiarum, poenali consumpti sunt
ferro. Residui omnes abierunt innoxii, quos ad certaminum rabiem neces-
sitas egerat, non uoluntas. Id enim aequitate pensata statuerat placabilis
imperator et clemens, ed. Gardthausen, 2, 252.
38.15.8,21-22, rans. Rolfe, I, 174-75; Cumque Viennam uenisset, ngre-
dientem optatum quidem et impetrabilem honorifice suscepturaomnis
aetasconcurrebat et dignitas,proculque uisumplebs uniuersa cum uicini-
tate finitima, imperatorem clementemappellans et faustum,praeuia con-
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Somedetails are familiar: there is the same onging for deliver-
ance; here is he sameexpectationof justice; and there is the same
acquiescenceo the legitimate powers of the emperor in deciding
clemency; the emphasison restoring health hasshifted somewhat,
in that the blind woman, rather than expecting to be cured per-
sonally, predicts that, at the nod of the emperor, the gods them-
selveswould return.
The Imperial adventus
To sum up the foregoing discussion, he Roman imperial adven-
tus ceremony retains a number of defining characteristicsover the
three centuriesof our study: the arriving emperorexemplifies egit-
imate authority; he is, by an act of his majestyalone, generousand
clement; becausehis enemieshave threatened Roman freedoms,
he has come to restore them, and thus liberate those held in slav-
ery; and finally, those enemieswill suffer appropriate punishment.
By the fourth century, each of these qualities has, at some sacri-
fice of integrity, becomeexaggerated: egitimate authority risesas
much from the emperor's discretion as from the dictates of law;
clemencyhasbecome almost heatrical in its broad gestures; ree-
dom and health have become the exerciseof transcendentwill, a
will to return to the sacred ule of Rome; and the state'senemies
have become fewer but more culpable.
The Harrowing of Hell in Late Antiquity
Given the evidenceof figures ike Melito of Sardisquoted above, t can
be detennined that there was a belief circulating among Christians rom
the end of the secondcentury that Christ had harrowed hell, in the sense
of conquering it and freeing its nhabitants. Other referencesoccur in the
Acts of17UJmos,he Epistle of he Apostles, nd the Gospelof Peter among
the apocrypha.As was ndicatedearlier, he HaITOwing ectionof the E van-
gelium Nicodemi may date from the sixth century.Moreover, if we move
from the apocrypha o homiletic material for examples, there are testi-
sonis laudibus celebrabat, auidius pompam regiam in principe legitimo
cemens: communiumque remedium aerumnarum in eius locabat aduen-
tu, salutarem quendam genium adfulsisseconclamatisnegotiis arbitrata.
Tunc anusquaedamorba luminibus cum percontandoquinam essetngres-
sus, Iulianum Caesarum conperisset, exclamauit hunc deorum templa
renaraturum. ed. Gardthausen_1- 67-R-
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165OLmcs AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
monies that, if not actually fourth century, are still within the cul-
tural influence of the Dominate, and it is to these estimonies that
we now turn.
EusebiusAlexandrinus
There is considerable evidence that the Harrowing myth excit-
ed the popular imagination throughout the Middle East. What may
be its earliest surviving depiction can be found on a Cappadocian
wall-painting dating from the late sixth or early seventhcenturies.39
Another early exemplar s a seventh-centurySyrian icon.40 here
is indeed evidence that Syrian bishops played an influential role
at synods hat discussed he Harrowing, and this has ed a number
of scholars o postulate a Syrian connection.41Unfortunately, nei-
ther a Syrian-nor Egyptian-origin canbe determined for a cer-
tain Eusebius Alexandrinus, about whom little is known except
that he flourished in the fourth or fifth century. Eusebius' total
work, some twenty-one sermons, survives intact; individual ser-
mons can be found in collections under the names of Cyril of
Alexandria, John Chrysostom, and John Damascene. Like the
works of John Chrysostom and many other Greek homilists, the
sermonsof Eusebius Alexandrinus were known and translated in
the West, certainly in the time of Caesariusof ArIes, and proba-
bly before. A sermon of his can be found in the Visigothic liturgy
39. In the monastic church of Saint John the Baptist, <;:avus§in. ee he
compelling seriesof studiesby Nicole Thierry: (with Michel Thierry) Nou-
velles eglises upestresde Cappadoce.Region du Hasan Vagi (Paris: C.
Klincksieck, 1963),pp. 150,168-69; Haut moyen-ageen Cappadoce.Les
eglises e la region de {:avu§in (Paris: P. Geuthner, 1983), , 83-4, ig. 32,
pl. 24; L'illustration des apocryphes dans les eglises de Cappadoce,
Apocrypha 2 (1991),224-28,llust.11; Le theme de la descentedu Christ
aux Enfers en Cappadoce, Veltion resChristianikesArchaiologikes Het-
aireias 4 :17 1993-94),59-66. am grateful to Dr. Remi Gounelle for this
information.
40. Elisabetta Lucchesi-Palli, Der syrish-palastinensische Darstel-
lungstypus der Hollenfahrt Christi, Romische Quartalschrift57 (1962),
250-67.
4L On the whole issueof a possibleSyrian associationo the descentmyth,
seeA. F.J. Klijn's notes to TheActs of Thomas Leiden: E.J. Brill, 1962),
pp. 181-3 and especially 189-90,and Remi Gounelle, Le fremissement
des portiers de rEnfer a la vue du Christ: Jb 38, 17b et trois symbolesde
foi des annees359-360 n Le Livre deJob chez les Peres,Cahiers de Bi-
blia Patristica (Strasbourg: Centre d'analyse et de documentationpatris-
tiques, 1996),pp.179-80.
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of the seventhcentury,42 nd an Easter sennon s included in the
homiliary of Agimund, from the early ninth century.43
There are two Eusebian Easter sermons, he ninth, De diabolo
et orca, and the tenth, In sanctaet magna Parasceve, t sanctapas-
sione Domini, that evinceseveralkey conceptsconcerning he Har-
rowing.44These two sermons in particular demonstrate a strong
influence of the adventusceremony on the myth of the Harrowing
of Hell, already mplicit in Melito of Sardis,aswe have seen.Both
sermonsappear n Latin from the fifth or sixth century, and it is to
these Latin versions that we turn. One fairly close analogue o the
two Alexandrian sermonscombined exists, under the title Sermo
de confusione Diaboli; it was first edited by E.K. Rand in 1904
from what he thought was a unique version of the tenth century ;45
Dr. Izydorczyk has since dentified two further copies, one of the
eleventh and the other of the eleventh/twelfth centuries,suggest-
ing wider popularity.46Using this Sermo asa point of departure,
I would like to examine three passages ound in Alexandrinus
which will aid in our investigation. These and other segments om-
pare with similar passagesn the Latin work of a mysterious fig-
ure identified as Eusebius, a Westernhomilist who seems o have
been broadly influenced by Eusebius Alexandrinus. The purpose
is twofold: to define more coherently some of the main attributes
of the Harrowing tradition, and to establish elevant texts that can
be dated with more certainty to Late Antiquity.
The WesternEusebiusevincesseveralGaulic traits, and his mod-
~rneditor has for that reason retained a traditional appellation,
42. G. Morin, Sermo de dominicae observatione: Une ancienne adap-
tation latine d'un sermon attribue a Eusebe d' Alexandrie, Revue bene-
dictine 24 (1907),530-4.
43. J. Leroy and Fr. Glorie, Eusebe d' Alexandrie, source d'Eusebe de
Gaule, Sacris Erudiri 19 (1969), 33-70,esp. 49-50,67-70.
44. PG 86,cols. 383-406;seealso Oralia de adventuet annuntiationeJoan-
nis (Baptistae) pud inferos,ools. 509-526, ttributed to Eusebiusof Emesa.
Difficulties in attribution have beendescribedby F. Nau, Notes surdiver-
ses home ies pseudepigraphiques, sur les reuvres attribuees a Eusebe
d' Alexandrie et sur un nouveau manuscrit de la chaine Contra Severi-
anos, Revuede l'Orient chretien13 (1908),406-435.
45. Sermo de Confusione Diaboli, Modern Philology 2 (1904),261-78.
Reprinted, with further notes, by O. Hey, Eine Predigt tiber Christi H61-
lenfahrt, Archiv fUr lateinischeLexicographie und Grammatik 14 (1906),
253-68.
46. Zbigniew Izydorczyk, Two Newly Identified Manuscriptsof the Sermo
de ConfusioneDiaboli, Scriptorium 43 (1989),253-55.
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167OLITICS AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
Gallicanus, so as o distinguishhim from either EusebiusAlexan-
drinus or Eusebius of Emesa.47 e may have written as early as
the fifth century.48 here are three interrelated Easter sermons
attributed to Gallicanus, the earliest manuscripts of which date
from the seventhcentury. Of the three, the most important is ser-
mon number eight, Exsulta coelum,et aetare erra.49 hough ound
in only two of the nearly five hundred manuscriptscontainingGal-
lican material, Sermo 8 contains passageshat will later appear n
one of the most influential Harrowing sermons of the entire
medievalperiod, De Pascha I (inc. Passionem el resu ectionem),
attributed to Augustine and numbered 160 n the appendix o his
works.5O he Pseudo-Augustinian sermon appears o be closely
connected with Pseudo-EusebiusGallicanus Sermon8, and some
passagesmost resemble the Harrowing text in the Evangelium
Nicodemi tself.51By all accounts, he Passionemwas enormously
popular; it is found in the homiliaries of Alan of Farfa and Egin
of Verona, in those of Ottobeuren and Toledo, in Troyes MS 853,
and almost certainly n Biblioteca capitolarec. 105.52t is the source
47. Eusebius Gallicanus,' Collectio Homiliarum, ed.J. Leroy and F. Glo-
rie, CCSL 101 (Turnhout : Brepols, 1970).
48. For arguments on this score,seeElie Griffe, Les sermonsde Fauste
de Riez. La 'Collectio Gallicana' du Pseudo-Eusebe, Bulletin de littera-
ture ecclesiastiqueToulouse]61 (1960),27-38; and A. Souter, Observa-
tions on the Pseudo-Eusebiancollection of Gallican sermons, TheJour-
nal of Theological Studies41 (1940),47-57.
49. Eusebius [Ps-Caesariensis],Sermo 8. De Resurrectione Domini, in
Eusebius Gallicanus,' SermonesExtravagantes, d. F. Glorie, CCSL 101B
(Turnhout : Brepols, 1971),pp. 881-6.
50. Ps-Augustinus, Sermo CLX. De Pascha, I, in PL 19, cols. 2059-
2061.
51. This sermon may justly be called the stumbling-block of Harrowing
studies; as will be made clear, t was placed in the sermoncollections of a
large number of patristic writers, and all of the manuscripts may never be
identified. It is the subject of one recent dissertation, D. Ozimic, Der
PseudoaustinischeSermo CLX. Hieronymus als sein vermutlicher Ver-
fassel; seine dogmen\geschichtliche inordnung und seine Bedeutung Ur
das osterliche Canticum triumphale Cum rex gloriae (Graz: Verlag fur
die Technische Universitat Graz [Dissertationen der Universitat Graz,
47],1979). For a brief discussion,seeJackson . Campbell, To Hell and
Back: Latin Tradition and Literary Use of the Descensus d Inferos in
Old English, Viator, 13 (1982), 107-58,especially131-3.
52. For a general discussionof homiliaries in the early medieval period,
see Giuseppe LOw, 11pill antico sermonario di SanPietro in Vaticano,
Rivista di archeologia cristiana 19 (1942), 143-83; Jean Leclerq, Tables
pour l'inventaire des homiliaires manuscrits, Scriptorium 2 (1948), 195-
214; Reginald Gregoire, L'Homiliaire de Farfa, in Les homiliaires du
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for Blickling Homily number seven, he Old English Easter ser-
mon in Junius 121, and-directly or indirectly-the eighth-centu-
ry Book of Ceme.53 sectionof it, the EasterCanticum triumphale,
appears n a large number of rites beginning in the ninth century.
The sermon has never been dated with any confidence, though
Alan of Farfa's collection belongs o the eighth century.
The two other Easter sermons n the Eusebian canon, XII and
XII-A, both beginning with the incipit Exsulta ca~lum et in laeti-
tia, contain, with somedifferences between hem, material similar
to, and in some cases dentical to that in sermon eight.54Both XII
and XII-A achieved a great deal of popularity in their own right.
Ninety-four manuscripts contain one or the other, and most of
these contain both; the earliest of these dates from the seventh
century. They also appear in the homiliaries of Agimund, and of
Egin of Verona, as well as in Troyes 853. And, predictably, both
sermons can be found bearing suchnamesas Augustine, Jerome,
Faustus of Riez, Caesarius of ArIes, Fulgentius, and Martin of
Leon, though most often they are ascribed o Eusebius.All of these
sermonsexhibit a vigorous, dramatic style with extensivedialogue,
suggesting hat the distinction in genre between narrative litera-
ture on one side and homilies on the other might be an arbitrary
and perhaps artificial one.
Adventus Christi: Three Aspects
The three passages hosen rom Alexandrinus and Gallicanus
reflect themes developed in the earlier sections on Roman politi-
moyen age. nventaire et analysedes manuscrits,Rerum ecclesiasticarum
documenta,seriesmaior. Fontes, VI (Rome: Herder, 1966),pp. 1-21; R.
Etaix, Un homiliaire ancien dans Ie MS. LII de la bibliotheque capitu-
laire de Verone, Revue benedictine 73 (1963), 289-306; and Edoardo
Hosp, C.SS.R., 11 ermonario di Alano di Faria, Ephemerides iturgicae
N.S. 10 and 11,vols. 50 and 51 (1936/37),375-83; 210-41.
53. See The Blickling Homilies,ed. and trans. R. Morris, EETS 58, 63,73
(1874-80),pp. 82-97; Anna Maria Luisella Fadda, De descensuChristi
ad nferos: Una inedita omelia anglosassone, Studia Medievali 13 (1972),
989-1011; The Prayer Book of Aedeluald the Bishop, Commonly Called
the Book of Cerne, d.A. B. Kuypers (Cambridge: CambridgeUniv. Press,
1902),pp. 196-98;and David Dumville, Liturgical Drama and Panegyric
Responsory rom the Eighth Century, Journal of TheologicalStudiesn.s.
23 (1972),374-406.
54. Homilia XII. De Pascha, , and Homilia XII A. De Pascha, A,
in Collectio Homiliarum, 141-43and 145-50.
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POLmcs AND RELIGION IN LATE ANllQUITY
cal ceremony: the majesty of the emperor at his entry, the abject
misery of the emperor's enemies,and the grateful salvation of the
oppressed captives. In a dramatic stroke that has precedents in
Roman rhetoric, the first two themes are expressedby the emper-
or's enemies hemselves, n this case he Devil and Hell, the famil-
iar figure of a personified city. All of these passages re charac-
terized by an extensive nterchange of challengeand reply, a comic
confusion on the part of the Devil and Hell, and a buoyant sense
among the just of celebration and release. At various junctures,
too, there are close parallels with incidents and dialogue in both
the Pseudo-Augustinian sermon and the Evangelium Nicodemi;
when this occurs, each will be noted.
Christ'sMajesty
In Alexandrinus, Christ's entry is conveyed,as t will be in prac-
tically every other Harrowing version, through the instrumentali-
ty of Vulgate Psalm23: 7-9,a theatrical dialogue of royal welcome
into the sacredcity: Levate portae capita vestra/et elevamini por-
tae aeternales et introibit rex gloriae. The next verse, of course,
is the Devil's : Ollis est rex gloriae, to which the retinue accom-
panying Christ responds, Dominus fortis et potens, Dominus
potens in proelio. Adtollite portas principes vestras et elevamini
portas aeternales,et introibit rex gloriae. Alexandrinus now has
the Devil depart from his script, in order to ask, quasi ignorans,
Who is it that you're talking about? And if he's he one,what's
he want here? Why does he want to leave heavenand descend
to us ? 55
This set of questions,designedrhetorically to elicit the retinue's
scriptural response, s straightforward enough, underscoring the
glory of Christ the conqueror, whom even he Devil now easily ec-
ognizes. n the Evangelium Nicodemi, t is Hell who, having eject-
ed Satan from his throne, pretends obtuseness,quasi ignorans, n
reaction to this challenge and the damning estimoniesof the Jew-
ish Prophets.
55. 'Quis esthic de quo dixisti? Et si pse est, quem querit hic? Cur voluit
derelinquere caelum et discenderead nos ?' (Rand, 16).
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K. RODDY
The Eusebian corollary provides considerablecontrast. Christ's
arrival before the gates of hell is heralded by great light, causing
the "impia officina" to tremble, and to cry out,
Who then is this one terrifying and shining with snowy splen-
dor? Our tartarus has never caught one like this; never has he
earth vomited one like this into our caves.He's an attacker, not
a tributary; a collector, not a criminal. We see a judge, not a
supplicant: he comes o rule, not to obey; to snatch away,not
to remain. Why do our gate-keepers sleep, when this warrior
harries our defenses? If he is indeed an accused,he won't be
over us if any crime darkens him, then he would never destroy
our blacknesswith his splendor. f he is god, why doeshe come?
if man, what does he pretend to? If god, what was he doing in
the tomb? if man, how can he release captives? Is it that he's
fought with our leader? or might it be that, entering and con-
quering him, he bursts into our kingdom? He was really dead,
he was really defeated. Our champion had no idea how he has
brought about carnage in hell. That cross,deceiving our joy,
causing our ruin; becauseof wood we were wealthy,becauseof
wood we are ruined Our power, always overwhelming to
humankind, dies.56
Gallicanus has the ministers of Hell (unlike Alexandrinus, who
has Hell do so) articulate, in a long line of interrogative antithe-
ses,a whole mythos,one based o a large extent on Roman polit-
ical propaganda: Christ is a mighty warrior, a udge, a victor; and,
following vocabulary that emerges with the Dominate, he is act-
ing as f he were a god, but a god willing to descend rom his place
to effect a rescueof sinful men. His splendor in and of itself estab-
lisheshis divinity, yet the minions of Hell were fooled by the decep-
tion of the cross nto believing that he was merely human. This ver-
56. "'Quisnam' inquiunt 'est iste terribilis et niueo splendore coruscus?
Numquam Doster talem excepit tartarus; numquam in nostra cauerna
talem euomuit mundus. Inuasor est iste, non debitor; exactor, non pec-
cator. Iudicem uidemus, non supplicem: uenit iubere, non succumbere;
eripere, non manere. Vbi iam antores dorrnierunt, cum ste bellator claus-
tra uexabat? Hic, si reus esset,super nos non esset; si eum aliqua delicta
fuscarent, numquam nostra regna suo dissiparet ulgore. Si deus, ut quid
uenit? si homo, quid praesumit? Si deus,quid in sepulcro facit? si homo,
quare captiuos soluit? Numquidnam iste cum autore nostro pugnauit?
aut forte aggressus t ipsum uicit, et sic ad nostra regna ranscendit? Certe
mortuus erat,certe illususerat. Proeliator Dosternesciuitquam roc stragem
procuraret in inferno. Crux ilIa fallens gaudia nostra, parturiens damna
nostra; per lignum ditati sumus,per lignum euertimur Perit potestas lIa
semperpopuilis forrnidata'" (Sermon 8, 882-883).
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POLmcs AND REUGION IN LATE ANTIQUITY
sion s explicit to an extreme in its use of military allusions: inva-
sor, bellator, claustra uexabat, nostra regna suo dissiparet
fulgore, autore nostro pugnauit, aggressus, uicit, ad nos-
tra regna transcendit, proeliator noster, and stragem. While
there is very little of this language n Alexandrinus, a similar out-
cry can be found in the Evangelium Nicodemi : there Hell's minis-
ters describe Christ specifically as miles et imperator, in forma
serui admirabilis praeliator, almost certainly an imperial humili-
ty topos going back to Pliny and before. The demons admit, Vici
sumus a te, and subsequentlycatalogue his triumphs: legiones
nostras perturbas, absolvis captivos, in liberatem pristinam
revocas, sic intrepidus nostros fines ingressuses, all character-
istics and ndeed hallmarks of imperial authority. In balance,how-
ever, he Evangeliumalsoemphasizeshe humanity of Christ: tam
fortis homo et splendidus n majestate (Ev.Nic.22.1).
Recriminations
The Alexandrinus version of the Harrowing had begun with a
boasting harangue on Satan's part, exulting that he has finally
brought about the death of Christ; he awaits this, his next prize,
the man's captured soul, with joy. He found no danger n attempt-
ing to win so great a trophy, and in fact he had recalled the loss of
Lazarus, not with dread, but with emotions both vengeful and
expectant, since he will now enslavea victim commensurate o his
own greatness.When Christ finally arrives, however,accompanied
by virtutes as heralds and honor-guards, the personified Hell
berates Satan or his pride:
Three-headed and Beelzebub, mockery of the saints, coward,
full of envy,didn't I tell you not to fight with him? Now every-
thing I predicted is coming your way, and what are you going
to do, you wretch? Why didn't you obey me? And now he
comes ooking for you, and becauseof you I'm to be enslaved.
If you can, you wretch, fight him; I can't help yoU.57
The congregationwould certainly appreciate he sniveling cow-
ardice that Hell himself exhibits, his ridiculous exhortations to the
57. 'Tricapite et Beelzebub,derisio sanctorum, nfortis, inuide, non tibi
dixi ne pugnescum eo? Ecce nunc quae praedixi aduenerunt tibi, et quid
facies miser? Quare non oboedisti uerbis meis? Et nunc uenit et querit
te, et propter te captiuus fio. Et si potes, miser,pugna cum eo. Ego enim
te adiuuare non possum' (Rand, 16).
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Devil to fight, and the chaotic state of the Underworld. Moreover,
there is this underlying satisfaction: the enemy fully-and not
reluctantly-proclaims the superior authority of the victorious
Christ.58 he short, breathlessseriesof rhetorical questions equires
eloquence n its delivery. Indeed, even hough such emotional out-
bursts were preserved and disseminated n written form, there is
every indication that in both the East and West these homilies
obtained their appeal as powerful public addresses; he occasion
of their copying may have simply been o make them available for
recitation at special easts,and often for insertion into the liturgy.
A similar passagecontaining recriminations occurs n Eusebius
Gallicanus, in a considerably expanded form, anticipating all of
the implications of the defeat the diabolic powers are about to
experience:
"0 our prince, isn't this the one, about whosecoming death you
have always applauded? he's the one, in whose cross you've
believed all the world will be subjected o you? he's he one, n
whose ruin, you assured us so many spoils? What have you
done?
"Look how he has lit all the darkness with his splendor, and
your prisons smashed, reed the captives, untied the bound:
turned their sorrow to joy. Those who groaned under our tor-
tures insult us as they sense heir freedom; and not only have
they ceased o fear us any more, they even threaten us. Never
before have the dead had so much pride, never have captives
been so happy
"What did you want to bring in here: at whose arrival all are
restored to happiness,who before were miserable? No usual
groan is heard, no moan sounds.
"0 our prince: all that wealth that you first acquired through
the loss of paradise,now you've lost through the cross.All your
happiness s gone: your happiness has changed to sorrow. In
58. This rhetorical device appears nfrequently in the panegyrics, argely
because he usual practice was to slaughter enemiesand have their lead-
ers die ignominiously. In Pacatus' "Panegyric of Theodosius," however,
the orator has Maximus' defeated,dying soldiers seekingsecludedwoods
and streams, o speak out final compliments and maledictions: ". ..there
they poured out their last breath in admiration for your [Theodosius]name
and denunciation of their own leader [Maximus]" (". ..illic postremum
spiritum in admiratione nominis tui et sui ducis detestatione fundebant")
36.2, n Nixon and Rodgers, n Praiseof Later Roman Emperors,pp. 502,
667.
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OLmcs AND RELIGION IN LATE ANTIQUffY
hanging Christ from the cross, you have not known what loss
you've prepared for hell. Couldn't you foresee that you were
killing the one who would destroy your reign? Here's the rea-
son: you wanted him to be guilty. In whom you knew there was
no evil; why did you bring him to our fatherland? You have
captured this free man and you have lost all the slaves "59
In comparison with material found in Alexandrinus, Gallicanus
elaborates the theme in a number of extremely specific ways, as
signaledby the words "spolia" and "captiuos ejecit." In the Alexan-
drinus, the word "captivus" occurs only once, in the quoted pas-
sage, n which Hell hasbecome mprisoned; in Gallicanus, t occurs
six times, in every case referring to the enslaved Patriarchs and
Prophets.To be sure, Alexandrinus haspreceded he passage uot-
ed above with a deliberately martial allusion: the virtues accom-
panying Christ explain to Hell, "Wishing to pursue the enemy,he
descended o bind and to subject that enemy o you, to scatter his
soldiers, and to assemble he others."60 n contrast, Gallicanus'
Christ is depicted more concretely and specifically as a conquer-
ing liberator, manifesting himself in terms of a legitimate imperi-
um and of the recovery of lost subjects.Hence the ironically sym-
metrical references o the Devil as a "princeps," to the depths of
59.
"'0 princeps Doster hicne est ille, de cuius tibi semper utura morte
plaudebas? ipse est, in cuius cruce omnem mundum tibi subiugandum
essecredebas? ipse est, in cuius exitu nobis tanta spolia promittebas?
Quid est, quod egisti? quid est, quod facere uoluisti? "Ecce iam totas
tenebras suo ipse splendore fugauit, et omnes tuos carceres fregit, cap-
tiuos eiecit, ligatos soluit : luctus eorum in gaudia commutauit. Ecce ipsi,
qui sub nostris solebant suspirare tormentis, insultant nobis de percep-
tione salutis; et non solum iam nihil uerentur, insuper et minantur.
Numquam hic ita superbierant mortui, neque aliquando sic poterant laeti
essecaptiui "Vt quid hic istum adducere uoluisti: quo ueniente omnes
laetitiae restituti sunt qui ante fuerant desperati? Nullus hic iam solitus
eorum mugitus auditur, nullus resonat gemitus. "0 princeps Doster illas
tuas diuitias, quas primo acquisieras per paradisi amissionem,nunc per-
didisti per crucem. Perit omnis laetitia tua : in luctum conuersa sunt gau-
dia tua. Dum tu Christum suspendis in ligno, ignoras quanta damna
sustineas n inferno. Praeuidere non poteras, quia euersorem regni till in
mortem sine reatu aliquo perducebas? Attenderes causam: requireres
culpam. In quo nihil mati cognoueras: quare ad nostram patriam per-
ducebas? stum liberum adduxisti et totos obnoxios perdidisti '" (Sermon
8,883-884).
60. "'Uolens inimicum persequere descendit igaTeet tradere eum tibi, et
milites suos excutere et conuocare eos'" (Rand, 16). I am grateful to my
colleague Ms. Charlayne Allan of the University of California, Davis, for
help with this passage.
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hell as a patria, and to the treasonous crime of attempting to
enslave a free man. In the Evangelium Nicodemi, captivus and
spolia do appear, but the former only twice and the latter just
once; obviously, while the theme of conquest igures in the Evan-
gelium, it is but one of many.
Acclamations
The third aspect its in well with the other two. In it the souls of
the just welcome Christ, often mixing biblical statementsof praise
with classical ormulations. First, the corresponding passage n
Alexandrinus :
First David struck his cythar and said, Come, let us exult in
the Lord; becauseour king, ighting for us,wasvictorious. And
everyone answered: Everyone clap your hands,becauseour
king, fighting for us,wasvictorious. And another prophet said,
Let heavenbe glad,and let the earth rejoice,becauseour king,
fighting for us,was victorioUs. 61
E.K. Rand suggests n impromptu liturgy for this passage, nd
cites Judith 5 :16 as a possible antecedent: deus eorum pugnavit
pro eis et vicit. Clearly David's acclamation elates generically as
well, though, with the popular outbursts found in the panegyrics.
The passageshows the ease with which a commonplace Latin
rhetorical figure, the conversio or antistrophe, in which the last
element is repeated, combines neatly with the biblical litany.
The Gallicanuscounterpart s, as might be expected,more exten-
sive, and also more concretely egal, militaristic, and ceremonial:
this sermon utilizes, in fact, the customary phase ound in many
imperial adventusceremonies, Advenisti :
Immediately the vast numbers of the saintswho had been held
prisoners in death, throwing themselves at the knees of their
liberator, begged with tearful supplications, saying, You have
arrived, ransomer of the world; you have arrived, for whom we
in desire daily hoped; you have arrived, whose coming the law
61. Primus Dauid percutiebat cytharam et dicebat: 'uenite exultemus
Domino et reliqua; quia rex Doster pugnans pro nobis uicit. Et ornnes
responderunt Omnesgentes laudite manibus et reliqua; quia rex Doster
pugnanspro nobis uicit.' Et alius propheta dicebat 'Letentur caeli et exul-
tet terra,quia rex Dosterpugnanspro nobis uicit' (Rand, 17).
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OLmcs AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
and the prophets announced; you have arrived, pardoning sin-
ners in the world, still living in flesh: rescue he dead and cap-
tive in hell. 62
The scene has all the characteristics of the ritual ado ratio /
proskynesis,whereby,aswe have seen, he supplicants hrow them-
selves at the feet of their liberator and beg for forgiveness. Given
the specific circumstancesof an arrival to the nether world, it is
quite possible that these words consciouslyecho Anchises' greet-
ing, Venisti,welcoming their savior.The deep cultural consequence
of this acclamation s supported by the fact that it is found almost
word-for-word in the Pseudo-Augustinian sermon, with this fur-
ther extension:
You come after long tears, deliver us, you who alone suffered
for us. Founder of the heavens,you deigned to enter into the
depths; our sighs called for you, our great laments begged for
you, hope in despair and consolation n,torment. In your com-
ing [adventu]our chains ell, night fled. Life arriving deathdied;
torturers and assailantsno longer threaten. The damned take
up supplications [vota]; the Creator rules [imperiat], not an
invader [invasor]. Chains bind the tyrant; our torturer is tor-tured.
Rescue,Ransomer of the world, the dead and captive in
hell. 63
The EvangeliumNicodemi, oo, containsa similar passage
You have come [Advenisti], Ransomerof the world; that which
you foretold through the law and your prophets, you have
accomplished.You have ransomed he living through your cross,
and through your death on the cross you have descended o us,
62. Ecce subito innumerabiles sanctorumpopuli qui tenebantur n morte
captiui, saluatoris sui genibus abuoluti, lacrimabili cum obsecratione
deposcunt, dicentes: 'Aduenisti, redemptor mundi; aduenisti, quem
desiderantes quotidie sperabamus; aduenisti, quem nobis uenturum lex
nuntiauerat et prophetae; aduenisti, donans in carne uiuis indulgentiam
peccatoribusmundi: solue defunctos et captiuos nferni' (Sermon8, 884).63.
'Venisti post longas lacrymas, eripe salus qui passuses pro nobis.
Caeli conditor, ad inferos intrare deignatus es; te enim nostra vocabant
suspiria, e larga requirebant lamenta ; unclespesdesperatis,uncleconso-
latio in tormentis. In adventu tuo catena nostra cecidit, nox effugit. Vita
veniente mars moritur, nec tartar instat, nec percussor.Damnati vota capi-
unt; Creator imperiat, non invasor. In tyranno catena nnectitur; et tor-
tor noster poena torquetur. Solve, Redemptor mundi, defunctos et cap-
tivos inferni' (Sermo CLX. De Pascha, I, 3 [PL 19,col. 2061]).
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K. RODDY
that you might rescue us from the depths and from death
through your majesty."64
As remarkable as are the similarities, the subtle differences
among the three accounts are particularly notable: the straight-
forward repetition in the Gallicanus has become an opportunity
for the author of the Pseudo-Augustiniansermon both to empha-
size he reversed ortunes in store for the damned,and to celebrate
the opposite fate awaiting the powers of darkness. The sermon,
too, seemsdeliberately o createechoesof classical hythmic prose:
"te enim nostra vocabant suspiria, te larga requirebant lamenta;
unde spes desperatis, unde consolatio in tormentis." The Evan-
gelium, on the other hand, ocuseson mercy and equity; the cross,
as the symbol of both shame and triumph, is acknowledged the
instrument by which redemption occurs.While this is to a degree
a departure from the usually glorious terminology associatedwith
the adventus, nevertheless salvation occurs through Christ's
majesty. Moreover, the phrase "Redemptor mundi," common to
all three passages,may be compared fruitfully to the appellation
"Restitutor orbis" so typical of imperial ambitions; some manu-
scripts of pseudo-Augustine, n fact, use restitui for solue n the last
line.65
In the last hree works, the acclamationconcludeswith a request
on the part of the saints, a request that illustrates the various
themes that each version of the Harrowing might emphasize. n
both Gallicanus and Pseudo-Augustine, the saints ask Christ to
plant his military standard,called a signum, n the newly conquered
territory:
"You have descended or us to the depths,do not abandonus
when you return to the heights. You have placed he inscription
of glory in the ages, plant the standard of victory in hell."66
This is not a vague symbolic allusion, but a reference rather to
a specific act of conquestand victory; in Roman campaigning, he
64. '" Aduenist redemptormundi; sicut per legemet prophetas uos predix-
isti, factis adimplesti. Redemisti uiuos per crucem tuam et per mortem
crucis ad nos descendisti,ut eriperes nos ab inferis et morte per maies-
tatem tuam'" (XXiv; 1, n Kim ed., p. 45).
65. In the textual note to line 106 n Glorie ed., Sermon 8, p. 884.
66. "'Descendisti pro nobis ad inferos, noli nobis deessecum ueris reuer-
gurus ad superos. Posuisti titulum gloriae in saeculo,pone signum uicto-
riae in inferno '" (Sermon 8, 884; SermoCLX. De Pascha, I, 3,col. 2061).
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OLffiCS AND RELIGION IN LATE ANTIQUITY
successful eduction of a city was signaled by planting a standard
on its walls. Josephus describes a conquest as communicated in
this way, and Vegetius calls the standard the necessarymeans by
which the army is led.67According to these versions of the Har-
rowing, the titulum, a public inscription whereby the emperor offi-
cially commemorated major events,has been appropriately placed
in the ages the Pseudo-Augustinian sermon usually has in heav-
en ). But, in contrast, a more dramatic indication of victory was
needed for hell: the physical display of a battle-standard. In this
context, it is almost certainly Christ's cross, though interestingly,
the fact is not noted. Instead, the purpose seems o treat the act as
no surer ndication of the eternal, military subjugation of Hell; fur-
ther, that the inhabitants of that city have specifically and volun-
tarily requested that they be rescued will now supply a compelling
legitimacy.
Again, the Evangelium Nicodemi tends to emphasize both the
mythic act of cosmic balance that the Harrowing represents,and
the very human sacrifice of Christ, through the stark reality of the
cross:
Lord, as you placed the inscription of your glory in heavenand
as you erected the inscription of redemption, your cross, on
earth, place, Lord, the standard of the victory of your cross n
hell, that death may have no more dorninion. 68
Here titu/um and signum have been conflated and perhaps even
confused: the stress has shifted from a purely military action to
just one element in a tripartite commemoration of Christ's entire
accomplishment: glory in heaven, redemption on earth, and vic-
tory in hell. The author is clear, as he has been before, that events
in hell are a continuation and completion of what has occurred on
earth, and perfected in heaven; and it is on earth and in hell that
the cross s both the true titu/um and the true signum.
67.
Josephus,De bello Judaico,VI, 403. Vegetius,De re militari, III, 5. See
Charles Renel, Cultes militaires de Rome.. Les enseignesLyon: A. Rey,
1903), especiallypp. 20-29.
68. 'Domine, sicut posuisti titulum gloriae tuae in caelo et erexisti titu-
lum redemptionis crucem uam in terris, pone, Domine, in inferno signum
uictoriae crucis tuae, ne mors dominetur amplius' (XXIV, 1, n Kim ed.,
p.45).
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Conclusion
This studyhas sought o define a particular instanceof metaphor-
ical transference, and beyond that to contribute to the broader
issuesof sacred vocabulary in its creation, and the meansby which
transcendence is captured in the imagination: in this case, the
appropriation of Roman imperial political language and gesture
to a mythically religious context. Specifically, t shows he means
by which the ever-present ealities of power, slavery,and freedom
in the Late Antique world, as embodied in the physical act of the
emperor's entry into a city, could be transferred to a narrative that
was both comprehensible and compelling. Roman propagandists,
and beyond them, Roman culture itself, generated motifs, partic-
ularly during the Dominate, defining the emperor as iberator, as
descending rom heaven, as redeemer of captives, as restorer to
the light of life, as one for whom the gates of rebellious cities
opened. Christian scripture, already imbued with soterilogical
notions of the imminent adventus Christi, could easily be accom-
modated to verify this transformation. Once the myth of the Har-
rowing had been established, moreover, the transference might
evenbe reversed: a sixth-century Egyptian papyrus describessub-jects
as awaiting their governor with the same anticipation with
which the damned souls in hell waited for Christ.69And later
emperors certainly felt no qualms about presenting hemselvesas
new Christs, yet again defeating the powers of darkness O
As to proposing a chronology for theseworks, it might be imag-
ined that the cessation of Roman rule in the West might form a
reasonable erminusad quem; but the conservativenature of polit-
ical and religious language and the deliberate continuation of
Roman ceremony by Germanic rulers71both make this problem-
atic. Nevertheless,a fifth-century date for the Gallicanus and cor-
responding passages n the Pseudo-Augustinian sermon s quite
probable; there, Roman military themesare so marked and so spe-
cific as to evince a living, rather than nostalgic, symbolic context.
69. For example, see Ulrich Wilcken, "Papyrus-Urkunden (XVII. P.
Aphrod. Cairo)," Archiv flir Papyrusforschung und verwante Gebiete,5
(1913), 83ft.
70. See P.J. Nordhagen, "The 'Harrowing of Hell' as imperial iconogra-
phy. A note on its earliest use," Byzantinische Zeitschrijt 75 (1982),345ft.
7L See McCormick, Eternal Victory, on Theoderic, pp. 270-75; and Sido-
mus Apollinarius on Prince Sigismer,Epist. W, in MGH, A. A. VIII, pp.
70-1.
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179
OLmcs AND RELIGION IN LATE ANnQUITY
So ittle is known about Alexandrinus that even he suggestionof
an earlier date as might befit a less elaborate putative Greek
source for a Latin adaptation cannotbe made. On the other hand
the Evangelium Nicodemi with its emphasis on theology and its
broad reference to a whole spectrum of developed belief is cer-
tainly later than the Gallicanus which may indeed place it in the
sixth century.
Through the dramatic and powerful fictions of the apocrypha
and through the immediacy of popular preaching hemes amiliar
to audiencesof Late Antiquity were exploited and elaborated to
their edification and obviousgratification. For centuries hen nar-
ration of the Harrowing provided a real and culturally vibrant alle-
gory by which a people vindicated themselves and allowed them-
selvesaccess o transcendenthope.
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GiseleBESSON
Ecole Normale Superieure de Fontenay -Saint Cloud
LA COLLECTION DITE DU PSEUDO-
ABDIAS: UN ESSAI DE DEFINITION A
PARTIR DE L ETUDE DES MANUSCRITS
Le but de cet article est de presenter quelques reflexions methodologiques
de base qui doivent permettre d expliquer et de ustifier la demarche suivie
dans [ edition et [ etude de la collection dite du Pseudo-Abdias. Constatant
d abord que ce texte est en fait beaucoup plus difficile a cerner que ne Ie
laisse entendre [ usage, courant depuis Ie XVI siecle, de ce titre, [ article
souligne dans un premier temps la necessite du recours aux manuscrits et
propose un bilan de ce que peut apporter leur examen. Il s agit ensuite de
formuler clairement les choix qui ont ete effectues pour permettre [ etude -
actuellement en cours -de cette collection. Une derniere partie pose Ie pro-
bleme de [ ordre des notices consacrees aux douze apotres dans Ie groupe
de manuscrits retenus, et en signale les difficultes.
This paper presents some basic methodological issues at stake when
explaining and supporting the process of studying and publishing the so
called «collection du Pseudo-Abdias ». Where its common name since the
16thcentury makes it sound easy to maste1; he collection is indeed waymuch
more difficult to handle. This paper first emphasizes how crucial it is to
start from the original manuscripts, and offers the results of their study.
Then decisions and choices have to be defined as clearly as possible, with
in perspective, the process of studying the collection. The last part of the
research points at difficulties specific to the « notices », and raises the issues
of the order in which the « notices » dedicated to the twelve apostles appear
in the selected manuscripts.
Parmi les res nombreux apocrypheschretiens du NouveauTes-
tament, il existe une serle de textes qui relatent en latin des epi-
sodesde la vie et de la passiondes apotreset ont connu une gran-
de diffusion en Occident au moyenagel.Une collection regroupant
1.11 suffit de penser par exemple au succesqu a connu a LegendeDoree
de Jacques e Voragine or Ie Dominicain a largementpuise dans es extes
dont il va etre question ici et qui se retrouvent parfois mot pour mot dans
son reuvre, souvent sans ndication de source, eventuellement avec une
reference aux« apocryphes».
Apocrypha 11, 2000,p.181-194
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182
G. BESSON
certains de ces extes concernant eg douze apotres a ete mise sons
Ie nom d Abdias depuis e XVIe siecle2et est actuellementconnue
comme « collection du Pseudo-Abdias».
A lire leg referencesque leg savantsmodernes ont faites a cette
reuvre, on a d abord l impression de se trouver en face d un texte
bien identifie, meme si Ie titre n est pas medieval et n apparait pas
non plus dans l editionprinceps, celIe de Nauseaen 15313. e choix
de ce titre revient en fait au deuxieme editeur, Wolfgang Lazius,
en 15524, ans des conditions et avec des consequences ui seront
preciseesdans a suite de cet article. Ce texte a ete tres diffuse, en
particulier par leg nombreuses eeditions qui ont fait suite a l edi-
tion de I.A. Fabricius en 171.95 t par plusieurs traductions dans
differentes langues. Le texte latin n a cependant pas ete reedite
depuis; l on pent certes trouver dans eg Acta Apostolorum Apo-
cryphade Lipsius et Bonnet6un certainnombre de ces extes,mais
toutes leg notices ne sont pas donneesen atin, ce ne sont pas tou-
jours exactement eg memesversions que celles qui sont attestees
dans a collection dite du Pseudo-Abdias, et elles sont de surcroit
melees a des textes d autres origines, si bien qu il est mpossible
de se faire une idee precise du contenDde la collection. On trou-
ve ausside nombreux fragments traduits en fran~ais dans Ie Dic-
tionnaire des Apocryphes de l abbe Migne7 ou en italien8,mais la
encore on ne pent facilement isoler du Testedes raductions ce qui
vient de la collection dite du Pseudo-Abdias.
Le titre utilise depuis l edition de Lazius est une fa~on appa-
remment commode de designerce texte qui etait Testeanonyme
dans eg manuscrits medievaux, si bien que leg savantsmodernes9
2. Voir ci-dessouspour l apparition exacte de ce nom.
3. F. NAUSEA,Anonymi Philalethi Eusebiani in uitas, miracula passio-
nesqueapostolorum rhapsodiae,Cologne, 1531.
4. W. LAZIUS,Abdiae Babyloniae episcopiet apostolorum discipuli de his-
toria certaminisapostolici libri decem,Bale, 1552.
5. I.A. FABRICIUS, odex apocryphus Noui Testamenti,. II, Hambourg,
1719, erris par L. DE LA BARRE,Historia christiana ueterum patrum,
PARIS, 582(p. 16-44).
6. R. A.LIPSIUS t M. BONNET, cta Apostolorum Apocrypha, Leipzig, 1
1891, I 11898, II 21903, Pierre et Paul (I, p.1-44 et 118-177),Andre (II
1, p. 1-37), Barthelemy (II p.128-150).
7. I.-P. MIGNE,Dictionnaire des Apocryphes, Paris, 1856, reimpression
Thmhout 1989,Brepols.
8. M. ERBETTA,Gli apocrifi del Nuovo Testamento, asale Monferrato,
1975.
9. Par exempleF. Steegmuller,Repertorium Biblicum Medii Aevi, Madrid,
1940,cite sous e nom de Pseudo-Abdias un ouvrage qu il intitule Histo-
riae apostolicae,mais auquel il renvoie ensuite sous des itres varies, Vir-
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LA COLLECI10N DlTE DU PSEUDO-ABDIAS
usent volontiers de cette designation, mais sans que Ie contenu
exact du texte soit toujours bien clairement designe.
La realite est en effet plus compliquee qu il n y parait au pre-
mier abord et leg anciens editeurs du texte sont pour tiDe part a
l origine de cette confusion. Nul ne doute bien evidemm~nt du
caractere fictif de l attribution a Abdias, d ou Ie nom de collection
du Pseudo-Abdias,mais Ie simple fait de se referer a ce nom d au-
teur resulte de la trop grande confiance accordee a l edition de
Lazius : cet editeur a en effet compose pour la collection, a partir
de fragments authentiques du texte, tine faussepreface, qu il place
sous a plume d Abdias, afin d asseoir fermement la reference a
ce pseudo-auteur; son edition est egalement eorganisee (l ordre
et la composition des notices se trouvent bouleverses) et propose
leg differents textes sur eg apotr~sdans un ordre qui n est pas celui
de tous leg manuscrits. La lecture de Lazius a ensuite incite ceux
qui, apres ui, ont parle du texte a considerer Abdias comme l au-
teur donne explicitement par Ie texte latin dans eg manuscrits et
l ordre de cesnotices comme l ordre ancien et authentique. C est
ainsique a Clauisapocryphorumsignaleque chezNausea«l ordre
est perturbe» et qu il «manque la preface et l epilogue ».
Dans la perspective du travail envisage1°, l devenait des loTs
indispensable de recourir aux manuscrits pour tenter de clarifier
la situation medievale, et ce en remontant aussihaut que possible.
lutes,Miracula ou Passiones postolorum. De melIle F. Bovon, qui donne
une serie precieuse de fiches signaletiques sur sikapotres dans I, recueil
d articles F. BOVON,M. VANESBROECKt al. (ed.), Les Actes apocryphes
desApotres, Geneve, 1981, ignale e texte de cette collection sous e nom
de Pseudo-Abdias, mais ne donne Ie titre de Virtutes que pout Jean et
ajoute une fois un numero de volume (vol. III pour Andre). Dans M. GEE-
RARD,Clovis Apocryphorum Novi Testamenti, umhout, 1992,on trouve
un bon exemple des difficultes de reference a ce texte : la Clavis a une
rubrique Virtutes Apostolorum, sous e numero 256,mais cite par ailleurs
des Passiones u Pseudo-Abdias (pour Pierre, Paul, Jacques e majeur et
Jacques e mineur, Simon et Jude), des Virtutes pour Jeansans e nom de
Pseudo-Abdias mais avec reference a son numero 256,des Virtutes pour
Andre sous e nom de Pseudo-Abdias (p.430),mais Ie meme texte est ns-
crit une autre fois sanscette indication (texte dit de Gregoire de Tours,
p.137), et indique pour Matthieu: II Pseudo-Abdias, . VII, Passio atina,
mais ne parle pas d Abdias pour Thomas (en citant une Passio et un De
miraculis), pour Philippe (tout en parlant de textes nommes Virtutes),ou
pour Barthelemy (dont il mentionne une Passio).
10. La communication presentee a Dole en juin 1999,dont cet article est
la mise au point, est ssue du projet de publication d une traduction de la
collection dite du Pseudo-Abdias par une equipe de quatre chercheurs,
Dominique Alibert, Michele Brossard-Dandre, Simon Mimouni et moi-
meme.
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G.BESSON
I. Les enseignements esmanuscrits
L examen des manuscrits, imite d abord aux plus anciens11,
fait apparaitre rapidement tine situation beaucoup plus confuse
que ce que l on pouvait attendre: l apparente simplicite de la defi-
nition du texte n etait qu une illusion, «Ie» texte presentant en
fait un si grand nombre de variantes qu il faudrait plutot parler
«des» textes de la collection dite du Pseudo-Abdias.
Un premier travail de reperageet d examendesmanuscritsavait
ete accompli par Eric Junod et Jean-Daniel Kaestli au COUTSe
leur etude des Actes deJeaw2 si bien que nons avons pu profiter
de cette liste d une dizaine de manuscrits, echelonnes du Ixe au
XIIe siecles.A cela nons avons oint l exploitation desdonneesque
fournit Guy Philliparp3 sons la rubrique « passionnaires
d apotres ». Enfin des sondagescomplementaires sur differents
cataloguesde bibliotheques, en particulier ceux de la Bibliotheque
nationale de France, ont permis d elargir notre documentation14.
Parmi Ie stock de manuscrits ainsi retenus pour l examen, un
petit nombre ne comportent que la collection dite du Pseudo-
Abdias, par exemple e manuscrit de Paris BnF Latin 556315mais
la majorite d entre eux contiennent, en meme emps que es textes
concernant les douze apotres qui composent la collection, des
11. Etant donne e succes e res textes au moyen age, e nombre de manus-
crits donnant ensemblede reuvre ou une partie de celle-ci est res impor-
tant, ce qui nousa interdit pour Ie moment de pretendre travailler sur ous
les manuscrits connus qui transmettent Ie texte latin.
12. E. JUNODETJ.-D. KAESTLI,Acta Iohannis, Corpus Christianorum
Series Apocryphorum 1, Turnhout 1983; v.les p.750a 834 qui offrent une
edition du texte des Virtutes Iohannis, Ie texte qui figure dans a collec-
tion dite du Pseudo-Abdias, et en particulier les p.755 a 759 pour la lisle
des manuscrits.
13. G. PHILLIPART,es Legendiers atins et autres manuscrits hagiogra-
phiques,Turnhout 1977,mise a jour 1985,Collection Typologie dessources
du Moyen Age occidental, fasc. 24-25, p. 16-18 et mise a jour p. 21.
14. Malheureusement, utilisation des cataloguesne donne souvent que
des renseignements ragmentaires, on Ie sail, surtout si leur redaction est
un peu ancienne,mais c est particulierement Ie cas ci. Les textes apo-
cryphes etant Testesongtemps dans l ombre, Ie discredit qui pesait sur
eux a souventempeche un reperageprecis; or faute d incipit et d explicit
detailles (et meme d ailleurs parfois avec es renseignements),I esta peu
pres impossible, en lisant Ia mention faite dans es catalogues,de savoir
avec precision l etat du texte contenu dans e manuscrit.
15. G. PHILLIPART,p. cit. p.17, e date du XIe siecle,mais il taut plutot
l assi~ner au Ixe ou au xe siecle.
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LA COLLECfION DITE DU PSEUDO-ABDIAS
textes varies: certains font preceder ou suivre la collection sur les
apotres de vies de saints ou autres textes hagiographiques16, ainsi
Ie manuscrit de Wolfenbiittel, Wissembourg 48, du Ixe siecle, ou
Ie manuscrit de Paris BnF Latin 18298, du Ixe ou du xe siecle.
D autres adjoignent des sermons, des homelies ou diverses lec-
tures, comme Ie manuscrit d Angers 281, du Ixe siecle, ou celui de
la Bibliotheque Sainte Genevieve 557 (fin XIe-debut XIIe siecle).
Enfin la grande majorite des manuscrits offrent pele-mele les
textes ou certains des textes qui composent la collection dite du
Pseudo-Abdias (sans forcement proposer la totalite des notices et
trailer des douze apotres) et divers fragments hagiographiques,
homiletiquesous avons d emblee elimine, pour noire etude, tOllS les manus-
crits qui n offrent pas l ensemble des notices consacrees aux apotres
comme un bloc indissociable, copie a la suite et sans interruption
aucune: a l evidence, des manuscrits qui proposent un grand
nombre de textes de type hagiographique en melant apotres, mar-
tyrs et saints dans des ordres divers ne peuvent en aucun cas ser-
vir de base a un essai de definition d une collection. lIs peuvent
cependant etre de precieux temoins de la circulation independan-
te de textes figurant par ailleurs dans la collection et a ce titre ne
peuvent etre totalement negliges: ils ont au moins pour merite de
poser Ie probleme meme de l existence d une vraie collection et
de montrer que certaines notices d apotres, peut-etre d ailleurs
anterieures a la redaction de la collection, ont toujours continue a
etre copiees en dehors de la collection.
Un deuxieme aspectde la question est de verifier Ie contenu
exact des manuscrits. En effet les listes des douze apotres sont en
fait mouvantes: l ordre est loin d en etre fixel1, mais surtout les
noms ne sontpas toujours les memes.Tous es manuscrits oignent
Paul a Pierre pour completer Ie chiffre de douze (Judas etant evi-
demment absent), sans aucunement s inquieter du fait que Paul
ne figure pas comme apotre dans es listes canoniques,mais bien
rares sont ceux<)uiproposentMatthias; une petite serie ajoute aux
Douze Marc l Evangeliste et quelques-uns continuent avec Bar-
nabe.
Plus grave encore, e contenu desnotices de chaqueapotre pent
differer d un manuscrit a l autre : plusieurs parmi les nombreux
textes repertories dans a B.H.L. sont susceptiblesd etre utilises.
A titre d exemple, on pent trouver au moins trois formes diffe-
16.Parexemple lnventionde a Croix...
17.Meme es extescanoniques nt surce point quelques ivergences.
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G. BESSON
rentes du recit consacrea Andre, les numeros 428, 429 et 430 de
la B.H.L., Ie no428se trouvant nomlalement sew, es n° 430 et 429
se succ6dantsouventdans cet ordre sansaucune mention de rup-
ture entre les deux, mais Ie n° 429se trouvant aussi solement. De
meme pour Ie dossierconcernantPierre et Paul, Ie plus complexe
de cet ensemble,pas moins de six recits differents peuvent appa-
rattre, auxquels il faut ajouter un certain nombre de variantes de
detail portant sur quelquesmots ou quelquesphrases parfois ires
significatifs) de ces extes.
Enfin les manuscrits ne s accordent pas sur la designation de
l reuvre. Aucun ne propose un auteur pour l ensemble de la col-
lection, tfit-il pseudepigraphe18,meme si parfois on trouve une
mention limitee a tel ou tel texte, connue par ailleurs comme par
exemple l attribution a Lin pour une passionde Pierre.
Certains manuscrits ne donnent aucun titre a la collectiow9,
comme celui d Angers 281 (non integral selon E. Junod et J.-D.
Kaestli). D autres proposent, en incipit ou explicit, divers titres qui
ne sont pas, semble-t-il, lies a tel ou tel etat de la collection: Pas-
siones(meme si les recits presentes couvrent beaucoup plus que
la passiondes apotres), comme dans e manuscrit 558 de la Biblio-
theque Sainte-Genevieve, Virtutes apostolorum, comme dans Ie
manuscrit de Wissembourg48, De miraculis apostolorum dans Ie
manuscrit de Paris BnF 12604 du XlIe siecle, Gesta et Passiones
dans e manuscrit de Vienne 497, du XIlIe siecle.
II. Les choix effectues
Devant la complexite de la tradition manuscrite, l a paru impos-
sible -et d ailleurs peu nteressant de travailler vraiment sur outes
les configurations reperees; puisqu il fallait faire un choix, nous
avons cherche a isoler un type de configuration aussi ancienne-
ment atteste que possible et qui ne soit pas present dans un seul
18. La remarque s entend pour la partie originale des manuscrits,car un
bon nombre d entre eux portent des mentions tardives attribuables a des
bibliothecaires de differentes epoques,mills toujours posterieursa Lazius,
qui ont « reconnu » la collection comme celIe d Abdias et lui ont parfois
attribue Ie titre de Historia certaminisapostolici que l on doit a l editeur
de 1552.
19. II n est evidemmentpas question ci des manuscrits ncomplets, oil les
lacunes materielles au debut ou a la fin de la collection interdisent de
savoirce que Ie copiste avail retenu pour designercet ensemblede textes.
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A COLLECflON DrrE DU PSEUDO-ABDIAS
manuscrit, out en gardant en arriere-plan a possibilite de confron-
tation avec d autres versions de ces extes.
Dans cette perspective, un element a pam revetir une impor-
tance particuliere : la post-face a la notice de Simon et Jude. C est
de ce fragment que Lazius s est servi pour batir sa faussepreface
mais son interpretation est batie sur un contresensa propos de la
phrase qui introduit Ie nom de l auteur (fictif) du texte2o.L ab-
sence,normale en atin, de precision explicite sur es apotres dont
Abdias aurait ecrit les Actes ouvre en theorie Ie choix a deux nter-
pretations ( ou traductions) egalementacceptablespour la syntaxe
latine : quand Ie texte figure dansune collection qui se ermine par
la notice de Simon et Jude, Ie lecteur peut comprendre, comme
Lazius a choisi de Ie faire, qu Abdias a ecrit les gestades douze
apotres, soit l ensemblede l reuvre qu il vient de lire. Mais a regar-
der Ie texte de plus pres, il apparait avec evidence,comme l avait
deja remarque LipsiuS21, u il ne s agit que des Actes de Simon et
Jude, dont Abdias a ete temoin, puisque Ie texte souligne qu Ab-
dias a connu ces deux apotres qui l ont personnellementordonne;
Ie meme Abdias n a par contre aucune qualite pour rapporter les
Actes d autres apotres qu il n a pas frequentes22.
Cependant, quoique jamais un manuscrit n en fasse ouverte-
ment mention, il est vraisemblable que la lecture fautive de cette
postface remonte au moyen age, et ce de fa~on d autant plus jus-
tifiee qu elle faisait double emploi avec une autre indication du
meme type figurant elle aussidans la notice sur Simon et Jude.
L avant-demier chapitre, en effet, se termine par la mention d un
disciple de Simon et Jude, un certain Grathon (ou Craton), qui
aurait ecrit en dix livres Ie fecit de leur vie, fecit plus tard traduit
en latin par Africanus23.Du coup a remarque finale pouvait etre
20. La notice consacreeconjointement aux deux apotres Simon et Jude
seclot sur quelquesphrasesconstituantune breve postfaceque lien n iso-
Ie de I ensemble du texte dans es manuscrits. En voici Ie debut: Scripsit
autemgestasanctorumapostolorumAbdias episcopusBabyloniae,qui ab
ipsis apostolisordinatus est, ermonehebraeo,quaeomnia a discipulo eius-
dem Abdiae, Eutropio nomine, n greco translatasunt. Quae uniuersanihi-
lominus ab Africano in X. libris descriptasunt.
21. R.A LIPSIUS,Die Apocryphen Apostelgeschichtenund Apostellege-
genden,Braunschweig 1883-1887.
22. On peut noter en outre que I emploi insistantde omnia puis de uniuer-
sane pouvait que renforcer I impression qu il s agissaitbien de I ensemble
des notices.
23. Voici Ie texte: In quibus (=prouinciis Persidis et ciuitatibus earum)
quae egerint et quae passi sunt per annos XIII Zanganarratione scripsit
Grathon apostolorum ipsorum discipulus n decem ibrorum uoluminibus
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G. BESSON
plus facilement admise si 'on y voyait une postfacegeneralea l'en-
semble de l'reuvre. D'autre part, la mention (recurrente) des dix
livres d' Africanus a dfi jouer un role dans a tendancede nombreux
manuscrits a trailer ensemble les deux premiers apotres, alors
meme que les textes presentesne les associaientpas necessaire-
ment24, t ce afin de resserrer a collection de douze notices atten-
dues en dix« livres» .Un autre indice de l'anciennete de cette ec-
ture est a constanceavec aquelle es manuscritsde toutes epoques
placent volontiers la notice sur Simon et Jude en fin de collection,
quel que soil par ailleurs l'ordre adopte25,
Cette lecture de la derniere postfacea la notice de Simon et Jude
permet en outre de trouver en fin de collection un echo a la pre-
face qui se trouvait parfois au debut de la notice consacreea Pier-
re (et Paul). Le statut de ce texte pent preter a confusion; il est en
effet repertorie comme faisantpartie de cette notice26,mais il joue
Ie role de preface generate: les remarques qui y sont faites sur la
volante du redacteur d'offrir aux fideles de quai contenter leur
curiosite sur a vie desapotres,d'une part, et d'autre part son choix
de la brievete quand il avail a recrire un texte dont il critiquait la
uniuersacomprehendens.Que Africanus historiographus n latinam trans-
tulit linguam. La contradiction que semblent contenir ces deux postfaces
successives ourrait etre levee si l'on admet, avec Lipsius, qu'il y a eu au
debut deux collections, une de vies et une de passions, ans esquelleson
a puise pour rediger sur chaque ap6tre un fecit contenant ses principaux
miracles et sa passion.Le disciple Grathon aurait ecrit une Vie de Simon
et Jude, 'eveque Abdias une Passion,et toutes deux se seraient rouvees
traduites et sansdoute jointes chezAfricanus, c'est-a-dire Jules Africain,
l'auteur du III" siecle, dont il faudrait supposer une traduction latine
puisque cet auteur, pour autant que nous Ie sachions,ecrivait en grec
24. Ainsi en va-t-il dans Ie manuscrit Wissembourg 48, qui porte succes-
sivement ces mentions: au f. 9vO, ncipiunt capitula de uirtutibus sancti
Petri et Pauli principum apostolorum, mais ensuite au f. 2Or°, ncipit de
sancto Paulo, puis au . 22vo, ncipit passio sanctorum apostolorum Petri
et Pauli. De meme on trouve souvent e titre Passio (passiones)Petri et
Pauli, par exemple dans leg manuscrits Angers 281, Paris BnF 9737 ou
Sainte Genevieve 558 (deux fois au . 2, et une fois au f. 3). Je crois qu'il
y a la plus que la simple habitude de voir souventPierre et Paul associes.
25. Ce n'est cependant pas absolu et certains des manuscrits consultes,
dont ceux de Montpellier 55 et 135,du IX" siecle,ne terminent pas a serle
de textes consacreeaux ap6tres par la notice sur Simon et Jude.
26. Ii s'agitdu prologue commen~t par Licetplurima de apostolicissignis,
que la B.H.L. classe,sous e n° 6663,dans eg Passionsde Pierre, tout en
signalantsapresenceen ete de 'ensemblequ'elle nomme Passiones pos-
tolorum.
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LA COLLEcrlON DffE DU PSEUDO-ABDIAS
uerbositas s'appliquent sans peine it toute l'reuvre, Ie nom de
l'apotre Pierre n'etant pas explicitement cite27.
En tout cas, ce type de lecture des preface et postface pouvait
renforcer l'impression d'avoir it faire it une veritable collection
murement composee et non pas seulement,comme pour tant de
recueils de textes hagiographiques, it la juxtaposition de textes
d'origines diverses28, t sansdoute Ie redacteur de la collection en
a-t-il joue volontairement.
Voici donc sur quels criteres DOUg vons decide de retenir un
certain nombre de manuscrits
-des manuscrits anciens, ceux du Ixe tout d'abord, et de toute
fa~onpas de manuscrit posterieur au XIIe siecle,parce que nous
voulions DOUgapprocher autant que possible de l'origine de
cette collection,
-pour legraisonsci-dessus, esmanuscrits commen~ant ar Pier-
re et Paul pour terminer par la notice de Simon et Jude,
-des manuscrits contenant leg memes douze apotres, a l'exclu-
sion d'autres personnages possibles et attestes dans certains
groupementsde textes comparables Marc par exemple), et sans
interference de quelque autre texte,
-des manuscrits adoptant Ie meme ordre (Pierre et Paul, Jacques
frere du Seigneur,Philippe, Andre, Jacques rere de Jean,Jean,
Thomas, Barthelemy, Matthieu, Simon et Jude) et contenant
globalement leg memes textes29 pour chacun des apotres.
Avec ces exigences DOUg vons pu definir un petit groupe de
manuscrits3Oui donneront en quelque sorte Ie « cliche )) d'un etat
27. C'est peut-etre la meme volonte de proposer une preface gener~lede
l'reuvre qui explique, avec a prudence qu'imposait l'attitude de l'Eglise
vis-a.-visde ces textes, a constitution du manuscrit Wissembourg48. En
eifel, dans une page qui, semble-t-il d'apres eg ndications du catalogue,
etait restee libre, on a ajoute la lettre du Pseudo-Meliton sur eg dangers
de la lecture des apocryphes.
28. Quelles que soient eg ncertitudes sur a chronologie de la collection
elle-meme et des seselements, l est certain que plusieursdes extes de la
collection ont pu et dfi exister avant celle-ci, et se trouver des lors a. a
disposition du responsablede la collection, qui n'a pas toujours fait reuvre
originale.
29. Des variantes de detail sur quelques mots ne sont cependant pas
exclues.
30. II etait evidemment important de ne pas se limiter a.un manuscrit
unique, Russi ancien et fiable que l'on puisse idealement l'imaginer,
puisque nous souhaitions pouvoir donner une image d'une des formes
sous esquellesces extes ont ete diffusesavec e sucresqu' on leur connal t.
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G. BESSON
de ce texte, ce qui presente 'enorme avantage,a nos yeux, de ne
pas en proposer une recomposition artificielle, nons dispensant
ainsi d'ecrire un nouvel apocryphe:
-deux manuscrits du lXe siecle,Wolfenbiittel, Wissembourg48 et
Dublin, Trinity College 73731,
-deux manuscrits du lXe ou du xe siecles,Paris BnF lat. 5563 et
18298,
-un manuscrit du XIe siecle,Wolfenbtittel, Helmstedt 536 qui est
copie sur Ie premier,
-un manuscrit du XIIe siecle,Paris, BnF lat. 1260432.
II faut Doter que tons ces manuscrits, bien qu'evidemment
proches par leg elements memes qui nons ont amenesales selec-
tionner parmi la ires grande quantile de manuscrits contenant eg
vies et passionsdes apotres, ne presentent pas pour autant une
absolue similitude: ils permettent de decouvrir un etat de la col-
lection qui a ete assez onnu pour etre copie en plusieurs endroits,
et ne sauraient etre leg temoins disperses d'un ancetre unique
proche, pen representatif par consequentde l'histoire de l'reuvre.
Nous n'avons pas, dans l'etat de noire travail, cherche a eclaircir
l'histoire de la transmissionde res textes, d'autant que la propen-
sion de chaque notice d'apotre a circuler isolement ne pent que
creer d'infinies possibilites de contamination, mais leg quelques
variantes significatives que nollSavonsreleveesdans e detail des
notices conduisenta penserque chacundesmanuscrits du groupe
retenu est Ie resultat de diverges nterventions sur l'etat premier
du texte et qu'ils appartiennent donc a des familIes differentes33.
31. En raison de son anciennete et de ses essemblances vec es autres
manuscrits etenus,nous iendrons egalement ompte du manuscritd' An-
gers281 du IX siecle,quoique l'ordre desnotices ne soit pas e meme que
dans es autres manuscrits selectionnes.
32. Voir une notice sur chacunde ces manuscrits dansE. JUNOD t J.-D.
KAES11.I, cta Iohannis,p.755-759.
33. Les exemplespourraient etre nombreux. On peut citer entre autres e
dossierdes textes consacresa Pierre et Paul, dossiercomplexe et qui ne
peut etre etudie serieusementdans Ie cadre de cette note, mais oil l'on
signalera a presenceou l'absenced'une hymne a saint Paul (elle manque
dans es manuscritsde Wolfenbuttel). De meme e manuscritde Paris BnF
18298se signale par un texte plus court que les autres sur Andre, un texte
different pour Thomas, a presence d'un prologue et d'un epilogue pour
Matthieu. Le manuscritde Paris BnF 12604presentedessingularitesdans
Ie texte de la notice consacreea Simon et Jude,etc.
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191
A COLLECflON DITE DU PSEUDO-ABDIAS
III. La questionde I ordre desnotices
II est difficile de terminer cette presentation sans evoquer un
des problemes que pose l etat que nous avons retenu pour l etude
de la collection dite du Peudo-Abdias, c est a dire la question de
l ordre des notices.
Les savantsqui se sont pose cette question n ont pu apporter de
reponse satisfaisante: G. Philip art reconnait n y trouver aucune
explication34 t les auteursdes Acta Iohannis dans e Corpus Chris-
tianorum trouvent eux aussi ordre incomprehensible35.
II est vrai que plusieurs ordres faciles a imaginer etaient pos-
sibles, a commencer par l ordre des istes d apotres fournies dans
les textes canoniques36. lles different par quelquesdetails, certes,
mais se recoupent pour une bonne part. Cependant orce est de
constaterque, curieusementcomme Ie souligne G. Philippart, res
ordres n ont ete retenus par aucunmanuscrit.
On pouvait d autre part songera l ordre du calendrier, puisque
plusieursdesmanuscritscontenantdespassionnaires apotres ant
ete utilises dans a liturgie ou comme ectures conventuelles.Selon
G. Philippart37, un tiers des passionnaires d apotres sur la cin-
quantaine qu il a examinee presente cet ordre per circulum anni,
soit Jacques e mineur, Philippe, Pierre et Paul, Jacques e majeur,
Barthelemy, Matthieu, Simon et Jude, Andre, Thomas, Jean; en
fait ce groupe a priori important (un peu mains d une vingtaine de
manuscrits, sans doute) se scinde en plusieurs sous-groupes,
puisque, dit-il,« la majorite» commenceavecPierre et Paul au 29
juin, mais parfois avec Jean au 27 decembre, parfois avec Philip-
pe et Jacquesau Ie mai, ou« mains clair» avec Jacques e majeur,
avec «parfois» des insertions maladroites, «parfois» des inser-
tions methodiques. En outre, un sandage effectue sur quelques
exemples des passionnaires eferences dans ouvrage de G. Phi-
lippart demontre que la plupart contiennent, meles aux textes qui
nous occupent ci, d autres textes que ceux concernant es apotres,
que beaucoupde res manuscritsne contiennentpasde toute fa~on
les douze apotres, mais seulement quelques-uns d entre eux, et
34. G. PlnLIPPART, p. cit., mise a jour p.21.
35. E. JUNOD t J.-D. KAESll-I, op. cit., par exemple n.1 p.757. On peut
noter que la remarque liminaire de ces auteurs au moment de la presen-
tation des Virtutes Apostolorum «<orne sections qui se suivent dans un
ordre generalement nvariable », p.751) est bien souvent contredite par
les notes qui sont apportees avec soin a chaque description de manuscrit.
36. Voir Matt, 10,2-4; Mc, 3, 16-18; Lc, 6, 13-16; Ac, 1, 13.
37. G. PlnLIPPART,p. cit, p.37.
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192
G. BESSON
enfin que parmi leg manuscritsanciens un bon nombre ne suivent
pas cet ordre. Une enquete ulterieure pourrait peut-etre demon-
trer que cet ordre s est generalise plus tardivement mais ne cor-
respond pas a l etat Ie plus ancien.
Un autre classementqui pouvait naturellement veniTa l esprit
d un homme du moyen-age etait celui dit du Communicantes,
emprunte a ce texte du canon de la messe38, est-a-dire Pierre et
Paul, Andre, Jacques (Ie majeur, affirme G. Philippart, mais Ie
texte latin porte seulementJacobus, e qui pouvait etre source de
quelque confusion), Jean, Thomas, Jacques Ie mineur?), Philip-
pe, Barthelemy,Matthieu, Simon et Jude (pour se imiter aux noms
des apotres). Selon G. Philippart39,c est l ordre adopte par tine
dizaine de manuscrits, c est aussi ordre du Breuiarium apostolo-
rum et de la Notitia de locis sanctorum apostolorum, ainsi que de
beaucoup de litanies anciennes4o. outefois, il signale que ces
manuscrits prennent « quelques ares libertes » avec cet ordre, en
inversant par exemple Jacqueset Philippe, tOllSdeux fetes au leT
mai, ou en inversant Jacques e majeur et Jean, tOllSdeux fils de
Zebedee, ou en inversant Jacques e majeur et Jacques e mineur
(cf. ma remarque precedente sur Ie texte latin), et meme tine fois
en omettant Jean. On voit que sur la dizaine de manuscrits cites
par G. Philipp art, leg cas particuliers sont nombretix41.
G. Philippart signaleensuite Ie petit groupe de cinq manuscrits,
to us anterieurs au XIIe siecle, dit-il, qui correspondent a notre
selection, dont Ie caractere apparemmentminoritaire n estpas dis-
qualifiant eu egard a l analyse qu on vient de lire.
Entin G. Philippart termine en signalantque «beaucoupde pas-
sionnaires» sont «sans ordre apparent », ce qui doit sans doute
etre compris comme «presentant tOllSdes ordres differents »42.
38. Cf. edition B. Bon E, Le Canon de ta messe omaine, Louvain, 1935,
Textes et Etudes liturgiques 2, p. 436-438.
39. G. PHILIPPRT,op. cit, p.92 qui ne precise pas davantage.
40. Aucune reference precise chezG. PHILIPPART.
41. Notons au passage ue Nausea s estcallie a cet ordre, non sans ntro-
duire lui-meme quelque fantaisie, puisqu il insere Barthelemy entre Tho-
mas et Jacques rere du Seigneur.
42. W. Lazius a adopte quant a lui un ordre encore different qui ne me
semble pas,a ce point de mes recherches, orrespondrea quelque manus-
crit que ce soit: I Pierre, II Paul, III Andre, IV Jacques rere de Jean, V
Jean, VI Jacques rere du Seigneur,avec Simon et Jude, VII Matthieu,
VIII Barthelemy, IX Thomas, X Philippe. Les cinq premieres sections
sont bien dans Pordre du Communicantes, t Pon oomprend bien que Ie
regroupementde trois apOtresdans e numero VI est mpose a Lazius par
Ie deooupageen dix livres; mais e ne m explique pas e choix de res trois
ap6tres ni Ie classementdes dernieres notices.
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193
A COLLECllON DITE DU PSEUDO-ABDIAS
Cette diversite n'est pas facile a comprendre. Je voudrais seu-
lement faire une remarque: si 'ordre anciende la collection etait
bien celli que nousavons etenu, on comprend sanspeine que des
copistes soucieuxde revenir a un texte aussi mportant que celui
du canon de la messe ou prevoyant l'utilisation de leur livre en
fonction du deroulement des etes aient voulu bouleverser 'ordre
des sections pour revenir a l'ordre calendaire ou a celui du Com-
municantes. On voit beaucoup moins, me semble-t-il, la raison
qu'aurait un copiste de bouleverser un ordre aisement compre-
hensible pour en creer un autre, qui demeure enigmatique
Quant it l'ordre des manuscrits sur esquels DOUgravaillons, je
ne peux donc pas pour Ie moment proposer d'explication d'en-
semble.Seulsquelquespoints peuvent peut-etre recevoir un essai
de justification.
La place de Pierre et Paul en tete s'imposait pour toutes sortes
de raisons: Pierre est oujours nomme en ete dans eg istes cano-
Diques.Pierre et Paul apparaissentdans cet ordre comme egper-
sonDagesmportants du debut des Actescanoniques. Is sont regu-
lierement associes ommeprincipes apostolorum,meme si Paul ne
fait pas partie des Douze, en raison notamment de leur lieu com-
mUDde martyre, Rome. Enfin la preface Licet plurima liee it un
fecit concernantPierre jouait Ie role de preface generale.
A l'oppose, Simon et Jude sontgroupesen in de collectionparce
qu'ils sont toujours cites en fin de liste dans eg textes canoniques
(en negligeant a presencedans eg Evangilessynoptiquesde Judas
Iscariote, qui ne sera evidemmentplus present t partir des Actes
desApotres). En outre la postface qui termine cette notice a, DOUg
l'avons vu, joue un role par rapport it l'ensemble des textes.
Dans la perspective, que DOUg efendons mais qui aura besoin
d'etre demontree, d'une reelle volante de composition de la col-
lection, la notice consacree t Matthieu ne pouvait que se situer
juste avant celIe de Simon et Jude, puisque ces deux recits s'en-
chainent narrativement43.
Peut-etre cet enchainement a-t-il influe sur la place de la noti-
ce consacreet Barthelemy,puisque a succession arthelemy,Mat-
thieu, Simon et Jude se trouve it la fois dansl'ordre du calendrier
et dans celui du Communicantes.
En retournant veTSe debut, on peut se demander si Jacques e
mineur ne doit pas sa place, uste apresPierre et Paul, au role emi-
43. a. l'analyse de Michele Brossard-Dandre, La collection du Pseudo-
Abdias. AIJIJrochenarrative et coherence nterne,dans ce me-me umero.
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G. BESSON
nent qu il a jaDe dans la premiere communaute chretienne, en
devenant e premier eveque de Jerusalem.
Jacques e mineur pouvait entrainer a sa suite Philippe, pour
deux raisons.La plus evidente est qu ils sont tons deux etes Ie 1 er
mill, qu on est donc habitue ales associerdans es celebrations qui
suivent l ordre du calendrier, comme cela se trouve aussi dans
l ordre du Communicantes.One autre raison est peut-etre Ie sta-
tut tres particulier de ces deux notices dont la redaction semble
tres differente des autres notices, comme cela sera demontre
ailleurs44,et qui ant ete composeespeut-etre pour la collection.
Quant au groupe qui Testeau milieu, soit Andre, Jacques rere
de Jean, Jean et Thomas, on les trouve cites dans ordre emprun-
te au canon de la messe,sans que je puisse apporter plus ample
explication a ce fait.
A partir desbasesde travail ainsi definies, il reste donc mainte-
nant a s occuperplus precisement du detail de chaque exte dans
l etat de la Collection que nous avons etenu. nest apparu en effet
que leg petites divergencesde detail que nousavons epereespou-
vaient apporter des ndications nteressantes. autre part on pour-
fait imaginer aussique la recherchede cesmenuesvariantes dans
des manuscrits plus tardifs ou dans des manuscrits qui n ont rete-
nu que quelquesnotices en dehorsde toute idee de collection serait
susceptiblede fournir des ndications sur a diffusion de ces extes,
mais ce serait un travail de longue haleine. Plusurgente nous parait
actuellement etude de la construction et de la coherence nterne
de la Collection, que nous souhaitons mettre assez apidement a
la disposition du public.
44.. Ct. l analvse de Michele Brossard-Dandr6
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Michele BROSSARD DANDRE
Ecole Normale Superieure Fontenay -Saint-Cloud
LA COLLECTION DU PSEUDO-ABDIAS.
APPROCHE NARRATIVE
ET COHF.RENCE INTERNE
Dans un projet d'etudede fa collectiondire du Pseudo-Abdias t au terme
d'un bilan provisoire, 'article propose une analysedeselements arratifs:
longueur desdiversesnotices, ormes de la mort, relationsaux textescano-
niques, elations i des extessources,motifs narratifs, denouements, onte-
nus doctrinauxoCesdivers elements ont susceptibles 'apporter une repon-
se aux questions que pose cette collection: y a-t-il reellement une
«Collection du Pseudo-Abdias» ou cet ensemblede textesn'est-il que Ie
fruit d'un hasardde copie? Si a collection existe, ommenta-t-elleereconsti-
tuee? Realise-t-elleun programme? A ces questions, es elementsetudies
permettent,nous semble-t-il,de repondrepar I' affirmative, et l nous appa-
raft que ' ensemblede a collection estune composition organisee,memesi
beaucoup e questions estentencore en suspenso
In a preliminary study of the socalled Pseudo-Abdiascollection , this
researchpresents he analysisof narrative elements: ength of the various
notices , death's orms, relations to the canonical texts, elations to the
source exts,narrative patterns,endings,doctrinal messages. hese arious
elementscould help answersomeof the questions aised by the collection
itself: Is there reallysuch a thing as a Collection du Pseudo-Abdias or
does his set of textsresult rom the uck of a copy? Since here s one col-
lection, how did it start? Which goals does t achieve? To all theseques-
tions, the narrative elementsseem o bring affirmative answers,and the
whole collectionappearswell organized,even f lots ofquestions till remain
unanswered.
Si l'on veut tenter de definir la collection du Pseudo-Abdias,on
peut aborder eg questionsposeespar Gisele Bessonsousun autre
angle, celui du contenu des notices presentesdans eg manuscrits
que nous avons retenus. Cela peut nous eclairer sur deux points:
.y a t il une coherence nterne a la collection?
.la collection est-elle un simple collage de textes preexistants,ou
reunit-elle des notices reecrites ou composeesdans un dessein
determine (qu'il nous faudra essayerde deceler)?
Apocrypha 11, 2000, . 195 -205
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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M. BROSSARD-DANDRE
Je propose ici Ie resultat d une lecture aussinaIve que possible
qui s est donnee pour but la realisation d une sorte d inventaire,
autour de quelques rubriques : longueur de la notice et forme de
la mort, relations aux textes canoniques, relations a des textes
sources, motifs narratifs, denouements, contenus doctrinaux.
La remarque la plus elementaire concerne l importance res-
pective des diversesnotices1.L eventail est arge, cela va de deux
pages et demie pour Philippe, a quarante pour Pierre et Paul
confondus, en passantpar cinq a six pages pour Jacques rere du
Seigneur, dix a onze pour Jacques rere de Jean, et Barthelemy,
dix-sept a dix-huit pour Matthieu ainsi que pour Simon et Jude,
vingt-deux plus cinq pour Andre2, vingt-huit pour Jean evange-
liste.
Toutes es notices se terminent bien sur par la mort de l ap6tre,
moos vecune certaine diversite : Philippe et Jeanmeurent de mort
naturelle, precedee d une revelation, implicite pour Philippe qui
convoque des religieux pour leur delivrer sesderniers enseigne-
ments et leur annoncerque Ie Seigneur ui a fait savoir qu il mour-
rait dans sept ours, explicite pour Jean a qui Ie Christ apparait
pour lui annoncer qu il mourrait dans cinq jours; tous les autres
connaissent e martyre: decollation pour Paul et Jacques rere de
Jean, mort par l epee pour Thomas et Matthieu, bastonnadepour
Barthelemy, qui de surcroit est ecorche vif, crucifixion pour Pier-
re et Andre, « ynchage » pour Jacques rere du Seigneuret Simon
et Jude.
Cet inventaire, un peu macabre, donne un echantillon presque
complet desdiverses ormes de martyre (il n y manqueque es eux
du cirque et Ie bucher).
Pour les relations avec es textes canoniques du Nouveau Tes-
tament, en particulier les actescanoniqueset les evangilessynop-
tiques, comme on peut s y attendre, il existe des iens tres etroits.
D abord, les noms sont ceux que l on trouve dans Matthieu 10, 2;
Marc 16, 19; Luc 5,13 -16; Actes 1, 133,avec cette variante, qui
n a rien de surprenant, que Judasne figure pas plus dans es actes
apocryphes que dans es canoniques,que c est avec Paul, et non
avec Matthias qu est complete Ie nombre des Douze, et qu il y a
confusion entre Jacques rere du Seigneur et Jacquesd Alphee.
1. Le calcul est fait sur Ie manuscrit de Wissembourg48.
2. Les 5 pagessupplementaires correspondenta «I appendice» Conuer-
santedocenteBHL n° 429.
3. II n en va pas de meme pour Ies diverses collections que nous avons
examinees,voir Ia communication de Gisele Besson.
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LA COLLECTION DITE DU PSEUDO-ABDIAS
APPROCHE NARRA11VE ET COHERENCE INTERNE
197
Pour Ie contenu, on pent trouver line reprise itterale des extes
canoniques; par exemple, dans a premiere notice donnee dans e
manuscrit de Wissembourg48,celIe de Pierre, Ie paragraphe VIII
sur a simonie est a reprise litterale de Actes 8,14 -25. La plupart
du temps, es actesapocryphes emplissent es « blancs » aisses ar
les recits canoniques4Ie voyagede Paul a Rome decrit dansActes
27 -28, est paraphrase et etoffe, l'arrivee a Rome et la rencontre
avec Pierre sont longuement decrites.
Le plus souvent es apotres accomplissent es missions qui leur
sont assignees ans es textes canoniques d line part une mission
generale «Jesus leur donna autorite sur les esprits impurs, pour
qu'ils les chassentet qu'ils guerissent oute maladie et toute infir-
mite5 », d'autre part des consignesplus precises: «Ne prenez pas
les chemins des patens et n'entrez pas dans line ville de Samari-
tains, allez plutot veTSes brebis perdues de la maisond' srael. En
chemin, proclamezque Ie royaume des cieux s'estapproche.Gue-
rissez es malades, essuscitezes marts, purifiez les epreux, chas-
sez es demons. Vans avez re<;ugratuitement, donnez gratuite-
ment6... »Le champde leur missionest ixe d'une fa<;on xtensive:
« Vans allez recevoir ine puissance, elIe du Saint Esprit qui vien-
dra sur vous; vous serezalorsmes emoins a Jerusalem,dans oute
la Judee et la Samarie et jusqu'aux extremites de la terre7.»
Celie definition du champ laissait dans Ie fecit des actes de
chaque apotre line grande atitude qui n'exclut pas ine rigoureu-
se mise en application de la parole de Jesus.
Lorsque les apotres se reunissenta Jerusalem,sept ans apres a
mort du Christ et rendent compte a Jacques rere du Seigneurde
leur activite apostolique8, ls precisent qu'ils ne sont pas entres
dans line ville des Samaritains. Quant a la repartition geogra-
phique, elle represente un veritable quadrillage du monde connu
Pierre et Paul vont a Rome et il y a tout Ie periple correspondant
a leur navigation; Jean est a Ephese, metonymie de l' Asie, puis-
qu'il s'agit de la metropole de celie province; Andre parcourt
l' Achate, la Thrace, on Ie trouve a Thessalonique, il sillonne la
mediterranee; Philippe evangelise a Scythie et meurt a Hierapo-
4. Comme ront fait ausside nombreux autres textes. par exemple Les
Reconnaissanceslementines.
5.Mt 10.1:Mc3.15 et6. 7:Lc9.1:Ac 1.7.
6. Mt 10.5-8.
7. Ac 1. 7.
8. Passionde saint Jacques rere du Seigneur.Les renvois aux notices de
la collection empruntent les titres que nous avons retenus pour les six
notices qui figureront dans Ie deuxieme volume des Ecrits apocryphes
chretiens.et dans line publication a veniT pour les autres.
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M. BROSSARD-DANDRE
lis 011 e trouve son tombeau (proche de l'actuelle ville de Pamuk-
kale sur Ie littoral occidental de la Turquie) ; Thomas evangelise
l'lnde «citerieure» ou« ulterieure », Barthelemy l'lnde extreme,
«celle qui constitue a limite du pays9»;Matthieu l'Ethiopie, Simon
et Jude la Perse. Jerusalem, la Judee, la Samarie, la Grece
(I' Acha ie),Rome veTS'ouest, et leg pays des confins: la Scythie
au nord-est, l'lnde ou leg ndes pour l'est, l'Ethiopie pour Ie sud,
la Persepour Ie sud-est, a collection presenteune realisation scru-
puleusede a mission,une repartition geographique omplete,sans
redondance,et methodique puisque eg notices de Thomas et Bar-
thelemy evangelisateursde l'lnde se succedent; par ailleurs, on
pent penserque leg ncertitudes desconnaissances eographiques
contemporainesde la collection rapprochent 'Ethiopie et a Perse,
champsde mission de Matthieu et Simon et Jude.
Pour la mise en reuvre des missions,nons proposons de distin-
guer deux niveaux, anecdotique et narratif. Le premier embrasse
ce que l'on pourrait appeler Ie quotidien ou la routine d'une vie
d'apotre: leg predications, guerisons miraculeuses et expulsions
de demons, resurrections, qui debouchent generalement sur des
conversionsordinaires, Ie fetus de toute remuneration materielle
et de tout bien. Au niveau narratif, leg memes episodes devien-
nent eg ressortsde la narration, preparant Ie denouement: la pre-
dication trop efficace provoque la colere despretres et la mort de
l'apotre comme pour Jacques frere du Seigneur, ou encore la
conversiond'une femme et son desir de chastete suscitent a cole-
re du mari ou du pretendant qui provoquent la mort de l'apotre:
c'est Ie cas de Matthieu, victime d'Hyrtacus Ie pretendant econ-
duit d'Ephygenie, et de Thomas, ue sur 'ordre du roi Mesdee qui
se venge ainsi de l'eloignement de son epouse. Tel episode pent
aussi ntroduire une nouvelle peripetie : en guerissantune femme
demoniaque,Thomasexpulsedesdemonsqui elisentdomicile dans
la femme et la fille de Saphor, un noble de la cour du roi Mesdee,
ce qui justifie l'arrivee de Thomas a cette COuTo
Nous pouvons conclure cet nventaire en soulignant e souci du
narrateur-compilateur de ne pas aire de cesactes un simple cata-
logue d'evenements,mais de leur donner un tour romanesque rai-
semblable ce qui nons amene a nons interroger sur Ie probleme~
Ie meme passage recise que I'Inde
. Passion e 'apotre Barthelemy
secompose e rois parties.
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LA COLLECfION DITE DU PSEUDO-ABDIAS
APPROCHE NARRATIVE ET COHERENCE INTERNE
199
des sources et a comparer es notices presentesdans cette collec-
tion avec les sources que nous avons pu et pourrons trouvero.
On pent distinguer deuxcasde figure: les notices pour lesquelles
il existe un texte grec anterieur qui pent etre considere comme
source, celles qui ne reprennent aucun exte grec connu -que la
notice soit inexistante ou inconnue en occident, mais dans ce cas,
nons trouvons dans Ie Pseudo-Abdias soit les notices les plus
breves, soit les plus developpees.
Pour Andre, Jean et Thomas, il existe des actes grecs doni les
notices du Pseudo-Abdias presentent des versions plus ou moins
expurgeesen fonction des« heresies»qu ellesvehiculaient.11 au-
dra donc comparer nos textes avec es actes grecs: pour Jean, Ie
travail a ete fait par Eric Junod et Jean-Daniel Kaestlill; pour
Andre, la situation est embrouillee par l attribution de la notice a
Gregoire de Tours12pour laquelle l argument de la date d anni-
versaire citee en fin de notice semble assezspecieuxpuisque la
date de naissance upposeede Gregoire de Tours n est connueque
par ce passage... Quant a l argumentation stylistique, elle inspire
Ie respect par sa science,mais elle nons semble moins peremptoi-
re qu il n y parait car elle ne prend pas en compte a pratique d imj-
tation assez onstante chez es auteurs du moyen age. La passion
de l apotre Thomas offre pour l instant un champ vierge, et c est
sansdoute par la que nons commencerons,nons avons seulement
constate pour l instant que Ie narrateur -qui intervient a la pre-
miere personne -se donne comme lecteur « d un petit livre dans
lequel etaient exposessow3periple et les miracles qu il accomplit
en lnde »; livre « qui n est pas accepte par certains » mais doni il
s est nspire en « laissantde cote Ie verbiage14»;s agit-il desActes
10. Cette partie de notre etude est seulement ebauchee,en particulier,
nousne parlons pas de la notice de Pierre et Paul sur aquelle nous n avons
pas encore travaille.
lL E. JUNODJ.-D. KAEs1U,Acta Iohannis,Thrnhout 1983,CorpusChris-
tianorum Series Apocryphorum 1.
12. M. BONNET,Gregorii Turonensis iber de miraculis Andreae apostoli
( « Monumenta Germaniae historica. Scriptorum rerum merovingicarum,
1 », Hanovre 1885; et synthesede J.-M. PRIEUR, cta Andreae, Tumhout
1989,Corpus Christianorum; Series Apocrypharum, 5 et 6.
13. .Passionde I ap6tre Thomas, II; Ie referent de ce possessifest Tho-
mas.
14. Verbositas, e terme est courammentemploye pour designer es deve-
loppements « heretiques » nous compareronsce texte avec a preface de
Lin.
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200
M. BROSSARD-DANDRE
grecs15? a notice du Pseudo-Abdias es suit effectivement, DOllS
analyseronses differences,et DOllShercheronss il existe, en atin,
d autres versions des actes de Thomas que celles qui se trouvent
danscette collection, et s il estpossiblede «dater» l apparition de
relIes que DOllS vons.
La notice de Jacques rere du Seigneur, sans doute confondu
avec apotre Jacquesd Alphee, offre une configuration tout a fait
differente et exceptionnelle: aucune source connue (la notice
grecque16 a aucun point commun aveccelIe du Pseudo-Abdias),
un texte court, habile patchwork des emoignagesdonnes par Fla-
vius Josephe, Clement d Alexandrie et Hegesippe, autour des
themes de la predication efficace, du portrait du uste, avec deux
elementsanecdotiques: a premiere attaque meneepar Saul-Paul,
et a boiterie qui s ensuit (inspiree par Ie souvenir de la boiterie de
Jacoba la suite de son combat avec ange17) t en conclusion, bien
sur, e martyre. Donc une notice dans aquelle on voit se construi-
re un texte apocryphe qui se declare comme une compilation en
se referant a sessources18.
Pour Philippe19, e cas de la notice qui lui est consacreedans
cette collection est assez articulier. Des textes grecs existent20, ui
auraient pu servir de source a la redaction d une notice latine,
comme c est Ie cas pour d autres textes consacres ux apotres, par
exemple Pierre et Paul, Thomas ou Jean, du moins, dans un temps
et un lieu oil l acces aux textes grecs etait possible pour quelqu un
qui redigeait en latin. Cependant, il apparait clairement que Ie
redacteur du texte latin n a pas eu connaissance es Actes (grecs)
de Philippe: en effet, s il est possible d imaginer Ie redacteur atin
effarouche par certainselements du texte grec (par exemple e role
joue par Ie tigre et l agneau, ainsi que leur bapteme) et donc reso-
lu a doDDerun tour plus banal a son fecit, on s expliquerait diffi-
15. P. H. POIRIER Y. TISSOT,« Actes de Thomas » in F. BOYON Po GEOL-
TRAIN, Ecrits apocryphes chretiens, Paris, 1997, tome 1, p. 1323-1470.
16. J. EBERSOLT, es Actes de saint Jacques et les Actes d Aquilas, publies
d apres deux manuscrits grecs de ia Bibliotheque Nationaie, Paris, 1902.
17. Est-il utile de rappeler que Iacobus designe aussi bien Jacob que
Jacques?
18. Passion de rapotre Jacques frere du Seigneur: «De fait, bien que Cle-
ment et d autres aient expose la maniere dont Jacques est mort, Hege-
sippe (qui vint aussitot apres les premiers successeursdes apOtres) Ie racon-
te lui plus en detail dans Ie cinquieme livre de ses commentaires.),
19. L etude sur Philippe a ete ecrite par Gisele Besson qui a analyse ce
texte.
20. F. AMSLER. F. BOYON. B. BOL~ IER. Actes de rapotre Philippe. Turn-
hout.1996. et maintenant Ie double volume Acta Philippi. Turnhout.1999
(Corpus christianorum, Series apoc~ Phorum 11-12).
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LA COLLEcnON DITE DU PSEUDO-ABDIAS
APPROCHE NARRA'llVE ET COHERENCE INTERNE
201
cilement qu'il ait remplace e martyre de l'apotre -moment cle du
fecit de la vie des apotres dont la passionconstitue Ie couronne-
ment -par une mort paisible et qu'il ait depouille son exte de tout
caractere un peu original. La distinction qui peut etre faite entre
deux raditions, Ie martyre de l'apotre Philippe d'une part, la mort
paisible du diacre Philippe d'autre part, ne me parait pas consti-
tuer ici une objection valable; les deux personnagessont facile-
ment confondus dans la tradition latine, en particulier Ie texte
consacrea Philippe par la collection du Pseudo-Abdias,qui appel-
Ie toujours Ie personnageapotre, situe sa fete au 1 ermaio
Si l'on admet au contraire que Ie redacteur de la notice latine,
livre a lui-meme, a ete amene a composer son fecit sans pouvoir
se referer a un modele ou a une tradition precise, on comprend
mieux la nature de ce texte, en pensant a la fa~on dont Ie redac-
teur a travaille. La notice consacreea Philippe est en effet la plus
breve de la collection, et la moins originale. Elle ne contient que
trois elements: les deux premiers sont ceux qui illustrent la mis-
sion confiee aux apotres (precher l'Evangile) et font partie des
occupations constantes, quotidiennes -dans ces recits -des
apotres. Philippe passedonc vingt ans a evangeliser es patens: ne
connaissantpas de legende sur l'apotre (ou Ie diacre avec lequel
la confusion est requente), Ie redacteur se contente de l'envoyer
veTS n peuple dont Ie nom meme atteste, dans 'imaginaire latin,
Ie statut de barbare : celui des Scythes,en contradiction avec des
traditions orientales qui assignent Philippe I' Armenie ou a Gaule
comme territoire de mission. II y triomphe d'un dragon, gigan-
tesque comme il se doit, qui sort de la based'une statue de « aux
dieu », Mars en l'occurrence, et tue Ie fils du pretre qui officiait,
sans compter deux officiers qui gardaient Philippe. L'apotre
s'adressea la foule, la convainc en une phrase d'abattre la statue
de Mars pour dresser et adorer une croix, chasse e dragon, res-
suscite es morts, guerit la foule du malaiseprovoque par Ie souffle
empoisonne du dragon. Suit, en quelques ignes, e condensede la
predication de Philippe, sans ien d'originalla encore; la foule est
convertie. baptisee, on ordonne des pretres, on construit des
eglises.
Deuxieme episode: en une phrase,Philippe re~oit une revela-
tion divine, retoume en Asie, sejoume a Hierapolis et y combat -
victorieusement -une heresie,celie desEbionites. Restaita racon-
ter la mort de l'apotre : ignorant toute tradition de martyre. Ie
redacteur a donc sans doute copie son fecit sur la mort du seul
autre desDouze a ne pas avoir connu e mart)Te, c.est-a-direJean;
beaucoup d.elements sont en effet communs a ces deux notices:
dans les deux cas .apotre est prevenu de sa mort prochaine par
une revelation divine. Philippe apprend qu'il mourra (, avant sept
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202
M. BROSSARD-DANDRE
jours », Jean« apres cinqjours ». Philippe a alors quatre-vingt-sept
ans, Jean soixante-sept seloncertains manuscrits,mais Ie manus-
crit de Wissembourgpouvait porter soixante-dix-septou quatre-
vingt-sept avant correction). Tous deux prechent devant e peuple
avant de mourir, Philippe brievement, alors que Jean ient un tIes
long discours.
Donc, la encore, et plus encore que pour celIe de Jacques rere
du Seigneur,une notice «pauvre », composeeavec un amalgame
de «topoi », qui secontente de proposerune histoire pour un nom.
Si nous nous referons a l'inventaire sur a longueur respectivedes
notices, nous constatons que ce sont les deux plus breves...
Dans la categorie des notices richement romancees pour les-
quelles il ne semble pas y avoir de source,nous trouvons Barthe-
lemy, Matthieu, Simon et Jude. Le resume en serait fastidieux, il
me semble plus interessant d'en examiner ce que 'appellerais les
«motifs », ou les «traits » recurrents qui en sont es ngredients, et
de chercher si l'on peut en tiTer des conclusions.
11 a d'abord les situations romanesques, eja rencontreesdans
les notices de Jean et de Thomas: un marl ou un pretendantamou-
reux, une femme convertie qui se voue a la chastete frustration
et depit du protagoniste qui declenche des persecutions contre
l'apOtre (Barthelemy et Matthieu). 11 a les episodesqui relevent
du merveilleux, meme si on y trouve des souvenirs de l' Ancien
Testament et une explication toujours divine: les tigressesappri-
voiseesde Simon et Jude21, t, dans a meme notice, Ie diacre nno-
cente par un nouveau-nemiraculeusement oue de parole.
La lutte contre les magiciens est une fiche veine qui se trouve
deja dans a notice de Pierre et Paul et en particulier dans eur com-
bat contre Simon e magicien Matthieu affronte Zaroes et Arfexar
qui fuient chez Ie roi des Perses oil les retrouvent pour de nou-
veauxcombatsSimon et Jude.Cette utte s'accompagne 'une mise
en scene-deja presente dans e combat de Pierre et Paul contre
Simon Ie magicien : l'echange d'invectives qui precede habituel-
lement les combats dans 'epopee (Iliade, Ene-ide) t les chansons
de geste, et qui nous semble absentdes notices inspirees par des
sourcesgrecques.
J'ai deja signale a lutte contre 1esdemons comme un « opos »
oblige desvies d'apotre. Mais la forme qu'elle prend dans es der-
nieres notices attire l'attention: il s'agit la des demons nstalles
dans es doles (d' Astaroth et Beireth pour Barthelemy, de la lune
21. Souvenir d'Esa ie
6-9.
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LA COLLECfION DITE DU PSEUDO-ABDIAS
APPROCHE NARRATIVE ET COHERENCE INTERNE 203
et du soleil pour Simon et Jude). Non seulement ces demons-
comme d ailleurs les magiciens ont un nom, mais ls sont decrits :
ceux de Simon et Jude sont « deux Ethiopiens tout noirs, avec des
visageseffrayants [qui s envont] en hurlant et en poussantdeshur-
lements terribles », celui de Barthelemy est «un gigantesque
Ethiopien, plus noir que la suie, qui avail un visage pointu avec
une longue barbe, etait couvert de roils jusqu aux pieds, avail des
yeux de feu comme un fer rougi au feu, et desetincelles qui aillis-
saient de sa bouche; de sesnarines sortait une flamme de soufre,
il avail des ailes de plumes, herisseesde piquants comme un porc-
epic. »22
Le bapteme et a conversiondu roi entrainant celIe de sessujets,
autre «topos» hagiographique, tel qu il se trouve dans la vie de
Sylvestre,a propos de Constantin -ou dans Ie bapteme de Clo-
vis -, est Ie mode de conversion majoritaire dans ces notices et
celles-laseulement,ce qw noDSnciterait a y voir un modele occi-
dental, independant de toute source grecque.
Au terme de celie lecture, nous decouvrons rois notices telle-
ment differentes des autres que noDS ommes enteesde voir dans
tous es elementsqui viennent d etre presentesa preuve qu il s agit
de notices ecrites par un «redacteur »23,mpregne d une autre cul-
ture que les «auteurs» des actes grecs et qui semble avoir eu Ie
souci d etablir la coherencenarrative qui preside a celie fin de la
collection et de la souligner, en particulier a propos des magiciens
Zaroes et Arfexar affrontes successivement Matthieu et Simon
et Jude: «C est ainsi que Simon Ie Cananeenet Jude... se rendi-
rent en Perse... et y trouverent les deux magiciens Zaroes et
Arfaxar qui avaient fui l Ethiopie pour echapper au regard de
l apotre Matthieu.24»
11 este une approche, un peu simplette s agissant e notices sur
les apotres qui se terminent toujours par la mort de l interesse,
c est l examen des denouements.
22. Passionde l apotre Barthelemy. On peut aussi remarquer que cette
notice est a seule a doDDerun portrait physique de l apotre : «Sur la tete
il a des cheveuxnoirs et frises, l a la peau blanche,de grands yeux, e nez
regulier et droit, les oreillescachees par la chevelure,une longue barbe
melee de quelques ils blancs,une taille moyenneque l on ne pourrait dire
ni grande ni petite. II est vetu d une courte tunique blanche bordee de
pourpre et porte un manteau blanc, orne a chaque coin de pierres pre-
cieusescouleur de pourpre. »
23. Je reprends ici, avec autant de precautions qu elle, un terme employe
par Gisele Besson.
24. Passiondes apotres Simon et Jude.
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204
M. BROSSARD-DANDRE
En fait, pour Jacques rere du Seigneur,Andre, Jacques rere
de Jean, Simon et Jude, la notice s'arrete a la mort du personna-
ge; pour Thomas a fin de la notice est differente : conformement
a la tradition romanesque,elle nous nforme sur Ie sort de tOllSes
personnages (dont la conversion du roi), bien apres la mort de
l'apotre.
Pour Barthelemy et Matthieu, la mort de l'apotre est suivie du
chatiment des mechants,responsablesdu martyre25,en outre, la
notice de Matthieu s'acheve sur la recompensedes bons: Ephy-
genie et son frere Behor qui regne soixante-trois ans et « voit les
fils de ses ils jusqu'a quatre generations.»
Cette demiere forme de denouement nous parait plus proche
de la tradition des contes populaires que de celIe des textes evan-
geliques et, plus soucieused'informer les fideles ou les religieux
de a vie desapotresen tant que heroshumains,plaiderait en faveur
d'une ecriture posterieure au temps des grands debats autour des
heresiesdes premiers siecles.
Demier aspectque nous abordons a peine, celui de l'enseigne-
ment ou des contenus doctrinaux: s'il s'agit d'une collection, on
peut supposerque les diversesnotices ne sont pas redondantes. I
y a partout des predications, des conversions,des baptemes,donc
une impression de repetition, mais ce sont routines d'apotres; a
cote de cela, on peut reconnaitre des hemes specifiquesa chaque
notice: Ie Saint Esprit, l'efficacite du repentir, l'examen de
conscience,qui nous inviteraient a considererque cesnotices ont
une fonction d'instruction religieuse au-dela du divertissement et
constituent une mise en situation des sacrements Ie bapteme, a
confirmation, la communion, Ie mariage, 'ordination, la peniten-
ce26;elles recommandent aussi a pauvrete, les aumones,propo-
sent une refutation de certainesheresies, enseignentsur es pou-
voirs et les ruses des demons, et les moyens de s'en premunir,
soulignent a liberte des hommes par rapport a la grace.
Quelles conclusions pouvons-nous tirer au terme de cette lec-
ture qui n'a pris en compte que les elements narratifs et ne s'est
pas attachee a l'ecriture (nous avons 'intention de faire Ie releve
systematiquede formules recurrentes et d etudier leur repartition,
par exemple cette tournure frequente dans es epopeesgrecques
2.' I en allait de meme pour la mort d'Herode apres a mort de Jean,dans
la version presente seulement dans Ie manuscrit de Wissembourg.
2 I n'est pas reellement question de penitence,mais Ie repentir de Jean
prelude a a penitence.. omme peut-etre sa mort a extreme-onction. On
peut dire la meme chosede la mort de Philippe.
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LA COLLECflON DrrE DU PSEUDO-ABDIAS
APPROCHE NARRATIVE ET COHERENCE INTERNE
205
et latines: «quand il / elle eut dit ces paroles et d'autres sem-
blables » ?
11DOUgemble econnaitre un projet de redaction: doDDer aille
que vaille une notice (plus ou moins riche) sur chaque apotre;
ancrer scrupuleusement eg recits sur leg textes canoniques; pre-
senter avec leg passions subies par leg apotres un eventail des
diverges ormes de martyre ou de « bonne mort » (la realisation a
plus accessible au commun des mortels ); inserer des elements
d'instruction religieuse -en un programme que DOUgsperonspre-
ciser.
Par ailleurs, DOUgemarquons -sans pouvoir encore 'interpre-
ter -1 influence de genres itteraires romanesquesou merveilleux.
Le souci de produire une composition coherente DOUg emble
constamment resent: par leursechos Ie combatde Simon et Jude
contre leg magiciens, dans la derniere notice, repond a celui de
Pierre et Paul dans la premiere), leur enchainement souligne
(Simon et Jude poursuivent Ie combat commence par Matthieu),
leur complementarite (en ce qui conceme eg diversenseignements
qu'elles transmettent), eg notices DOUgaraissentavoir ete reunies
dans un desseind'ensemble et non au hasard.
S'agit-il d'un «collage» ou d'une creation? L'hypothese de la
creation ex nihilo n'est meme pas a envisager.Au terme de colla-
ge nollS preferons celui de «reemploi» au gens architectural du
terme, comme une basilique chretienne a repris et integre dans
une constructionnouvelle egstructures d'un temple palen, a redis-
tribue l'espace, a eleve des murs en utilisant, si besoin et si pos-
sible, despierres disposees arfois sans enir compte de leur ome-
mentation ni de leur fonction anterieure, et Ie resultat est un nouvel
edifice VOllea une nouvelle fonction.
11DOUgegie a confronter noire hypothese a l'etude de l'en-
semble des notices et a essayerde definir quel etait Ie projet de
noire architecte, a quelle epoque, dans quelle fire geographique
et dans quel contexte spirituel il a construit son edifice: un pro-
gramme ambitieux et quelque peu irrealiste
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DominiqueALIBERT
Institut Catholique de Paris
VISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
DANS QUELQUESTEXTES DE LA
COLLECTION DITE DU PSEUDO-ABDIAS
On voudrait tenter quelques emarquessur l'echo que 'on peut trouver
aux textesde la collection dire Pseudo-Abdiasdans a culture medievale.
On abordera quelquesdossiers: a representationdu monde et de la natu-
re, de l'ordre social dans lesquelssont incluses es pratiques religieuses.
L 'hypothesea verifier consistea savoir si ces extesnous proposent une
vision du monde,de la societe,qui soutient le discours qui sera celui de
l'Eglise des xe-xe siecles.
We would like to suggest few remarks on the echowhich can be ound
in medieval culture of he texts of he collection called Pseudo-Abdias.We
shall deal with the representations of he world, nature and social order
which include religiouspractices.These agesexplorewhether he textpro-
posesa vision of world and society which agreeswith the Church view in
the IXth-Xth centuries.
Introduction
On voudrait tenter, dans les pages qui suivent, quelques
remarques sur l'echo que l'on peut trouver aux textes de la col-
lection dite du Pseudo-Abdias dans a culture medievale. Par ce
biais, c'est leur insertion dans a culture medievale qu'il convien-
dra d'examiner. Nous n'aborderons ici que quelquesdossiers: a
L Les textes seront cites ci-apres SOliSe nom. Voir l'edition et la traduc-
tion a paraitre pour les ndications sur ce texte. En l'absencede cette edi-
tion, il est evident que les referencesprecisesa tel ou tel passagepeuvent
etre quelque peu aleatoires. Nous prions Ie lecteur de nous en excuser.
En attendant,danscette meme publication, voir les articles de Gisele Bes-
son, de Michele Brossard.
2. Nous ne cherchonspas ci a etudier leur presencedans es bibliotheques
medievales.Ce que nous voudrions mettre en evidence sont de simples
parentes.
11,2000, p. 207 -226
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208
D. ALIBERT
representation du monde et de la nature, de l ordre socialdans es-
quels sont ncluses es pratiques religieuses.L hypothese que nons
voudrions verifier consiste a savoir si ces textes nons proposent
une vision du monde, de a societe,qui soutient e discoursqui sera
celui de l Eglise des IXe-XIe siecles.Les questions dogmatiques
seront aisseesde cote, pour d evidentes raisons3.
Le choix de la periode chronologique a d abord ete guide par
des questions de competence. Ces quelques trois cents ans nons
sont relativement familiers. Ensuite, parce que dans Ie domaine
des representations mentales, de l imaginaire, its sont probable-
ment determinantsdans a constitution dessensibilitesmedievales,
celles des siecles du Moyen Age central, et, au-dela, des siecles
modernes.
Nous nons interesserons essentiellementa la culture clericale,
la seule que nons puissions cerner avec un minimum de verite, car
les clercs sont es seulsa savoir ire, a comprendre Ie latin, et avoir
recueilli es heritages,multiples, de Antiquite. Cesheritagesorien-
tent, de maniere determinante, la lecture qu ont pu faire de ces
textes les clercs medievaux. Il y a tout d abord, c est une eviden-
ce, heritage biblique, meme s il ne taut pas croire, comme on l a
si souventecrit, que Ie Moyen Age ail copie a Bible4.Cette optique
nous a fait faire fausse oute dans bien desdomaines5. n revanche,
il est evident que Ie Moyen Age s est appuye sur a Bible, et qu il
a cherchedespoints de comparaisondans cette derniere, pour ses
institutions, qu elles soient economiquesou politiques.
Il y a par ailleurs l incapacite, ou pour etre plus precis, Ie fetus
desclercs de recourir a une connaissance u monde qui ne soit pas
livresque. La description du monde doit toujours obeir aux canons
de l heritage biblique, mais ausside heritage antique. Un exemple,
volontairement choisi aux margeschronologiques du Moyen Age,
a un moment dont des generations d erudits nous ant affirme qu il
marquait la fin des tenebres medievales. Il s agit de 1492. Cette
annee-la, e 26 juin tres precisement,une montagne du Dauphine
est gravie pour lapremiere fois. Cette annee-la, egalement, Ie 5
octobre, Christophe Colomb debarque sur une terre dont il pense
qu il s agit de l Inde, ce qui n est d ailleurs pas sans nteret pour
notre propos. Dans un cas comme dans l autre, on va comparer~
3 Nous n avons tout simplement pas les competences pour en traiter.
4. Pour une introduction a la question de 1a Bible au Moyen Age, voir
RICHE (Pierre), LoBRICHON (Guy). Le Moyen Age et la Bible. Paris, Beau-
chesne, 1984,639 p. + pl.
5. Nous pensons ici bien evidemment au sacre royal.
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209
ISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
ces nouveaux espacesau Paradis Terrestre6. On redige des des-
criptions qui semblent tout droit issuesde textes comme ceux de
la collection du Pseudo-Abdias.
Cesquelquescommentairesvont etre conduitsdans rois grandes
directions: Ie monde connu et Ie bestiaire, es structurespolitiques
et religieuses ainsi que les objets de devotion, definis par les auto-
rites precedemmentcitees, es representations du monde.
Le monde connu et Ie bestiaire
Cette premiere partie aurait pu s intituler Ie monde reel, car
l Occident medieval n a pas vu certaines erres avant e XIe siecle,
voire Ie XIIIe siecle. II ne leg a confines qu a travers leg livres, et
c est a l un des nterets des extes de cette collection, aux yeux de
l historien medieviste: ils participent a l elaboration de la geogra-
phie que pratiquait l Occident medieval. C est ce que nollS allons
voir dans un premier temps, en dressantune rapide carte desnoms
de lieux cites dans ces recits.
Geographies
On peut aisementsaisir a maniere dont les auteursde cette col-
lection, et apres eux les clercs medievaux qui les ont Ius et copies,
constituent leur discours, leur savoir geographique. Il s agit des
geographesde l Antiquite. Dans La vie et a passionde Barthele-
my on apprend ainsi comment on definissait es Indes, Ie fait est
connu, qui constituent Ie vivier legendaire de l Occident medie-
val?, ndes qui renferment ces richessesexceptionnellesque sont
les epiceset es voires, et Indes pour lesquellesColomb et quelques
autres ont tente les grands voyages que l on saitoCertains com-
6. Sur l ascension du Mont-Aiguille, et ses liens avec la litterature para-
disiaque, on verra BRIFFAUD (Serge). « Visions de la montagne et imagi-
naire politique. L ascension de 1492 au Mont-Aiguille et ses traces dans
la memoire collective (1492-1834) » dans La haute montagne. Vision et repre-
sentations. Le Monde alpin et rhodanien, 1 er-2emerimestres 1988. pp. 39-60.
7. Voir l article celebre de Jacques Le Goff, «L Occident medieval et
l ocean indien: un horizon onirique» dans Mediterraneo e Oceano indiano.
Atti del VI Collequio Interoazionale di Storia Maritima. Florence, Olsch-
ki, 1970, 243-263 repris dans Pour un autre Moyen Age, Paris, Gallimard,
1977,280-298.
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210
D. ALIBERT
mentaires sur Ie Paradis Terrestre de Colomb, auquel on a deja
fait allusion, font echo a cette citation.
«Les historiographesaffirment qu'i y a trois lndes: la premiere
lode est celIe qui va usqu' t l'Ethiopie ; la seconde, elIe qui va
jusqu'au pays des Medes; la troisieme, celIe qui constitue la
limite du pays; en eifel, d'un cote, elle atteint la region des
tenebres,de l'autre, l'Oceans ».
Vne Inde, donc qui s'apparente a l' Arabie, a la porte de l'En-
fer, aussi. Dans Ie registre mythique, la figure d' Alexandre Ie
Grand, qui y sejourna,Alexandre qui est 'une desgrandessources
du roman medieval9.
La Perse estcitee dansdeux textes qui se font echo,puisque des
magiciens s'enfuient chez eg Persesdans e fecit consacrea Mat-
thieu1°, out comme on la rencontre a plusieurs reprises a propos
de Simon et Judell. A propos desmemesap6tres, on trouve la ville
de Babylone12.Tout comme est citee l'Ethiopie, que l'on evoque
a propos de Matthieu13et de Simon Jude14,ansque l'on sache res
precisementou ene se situe, comme l'extrait de La vie etde la pas-
sion de Barthelemydeja cite tendrait a Ie prouver5.
Mais l'essentiel se deroule en Terre Sainte, au Moyen-Orient, si
l'on ne tient pas compte de Rome, dont it sera question plus loin.
Les grandesarticulationsregionalessont espectees la Judeecitee
a trois reprises16,a Judee et la Samarie17,a seule Samarie18, ais
aussi a Palestine19.Sont aussi citees leg vines d' AntiocheW, de
Damas21.Deux autres noms de vine apparaissentsouvent d'une
8. La vie et Lapassion de Barthelemy, I.
9. Pour une premiere introduction a la litterature medievale, et particu-
lierement au Roman d' Alexandre, on yeTTa es pages d' Anita Guerrau-
Jalabert dans BOUDET (Jean-Patrice), GUERRAU-JALABERT Anita), SOT
(Michel). Histoire culturelle de La France. T. I. Paris, Seuil, 1997. Voir p.155
et 192.
10. La vie et Lapassion de Matthieu v:
11. La vie et Lapassion de Simon et Jude I, II, III, V; VII.
12. La vie et Lapassion de Simon et Jude II, III, VI, VII.
13. La vie et Lapassion de Matthieu, I, III, IV; IX.
14. La vie et Lapassion de Simon et Jude I.
tS. La vie et Lapassion de Barthelemy I. Cf supra note 8.
16. La vie et Lapassion de Pierre XVIII. La vie et Lapassion de Pierre et Paul.
17. La vie et Lapassion de Jacques,jrere de l'apotre Jean I.
18. La vie et Lapassion de Pierre VII, XI.
19. La vie et Lapassion de Pierre et Paul.
20. La vie et Lapassion de Pierre XV:
21. La vie et Lapassion de Paul.
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211
ISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
part Cesaree,ou plus exactement eg differentes Cesaree,qui sont
nommeesdans eg recits concernantPierre et Paul22.On pent nons
preciser qu il s agit soit de Cesareede Philippe23,Cesareede Stra-
ton24.Jerusalemest e nom qui revient Ie plus souvent, puisqu on
Ie rencontre trois lois, a propos, mais c est ogique, de Jacques e
Mineur, de Pierre et de PauFs.Pour completer ce tableau medio-
oriental, il taut rappeler egvilles de Tripoli26et de Nazareth27,ien
de bien extraordinaire donc.
La description de la ville de Rome est a plus detaillee. Rome
est tout d abord citee neuf lois, tant pour Pierre et Paul que pour
leg notices individuelles de l un et l autre apotre28.Mais l auteur
va plus loin et evoque differents sites de la ville aux sept colliDes,
qu il s agissedu Capitole, du Champ de Mars, de la voie ostienne,
de la voie appienne, a voie sacree, a voie triomphale, qu il s agis-
se de Catacombe ou du Vatican29.On pent souligner que l auteur
est relativement precis, qu il souhaite voir son lecteur s orienter
dans a topographie romaine, quand il ecrit « au Vatican a la Nau-
machie3°», ou «la voie Ostienne31, la deuxieme borne milliaire
en partant de Rome ».
Certains oponymessont moins courants,mais on eg rouve cites
une seule fois; nons ne nons attarderons pas sur leur cas. En
revanche, l convientde voir, rapidement, eggrandsensembles, ui
sont assezevelateurs.n y a Asie, citee a propos de Paul. On oppo-
seensuitea l Italie l Orient et outre-mer; c est a un point qui pent,
nons semble-t-il,etre verse au dossierde a localisationdesauteurs.
n pourrait s agir la d un comportement proprement occidental.
Entin, la globalite geographiquedu monde romain estpresente, out
comme l universalite du messageevangelique qu il convient de
repandre. «A travers outes egparties de l univers 32 , oU« tout Ie
monde romain33 . Mais Ie monde connu, ce sont aussiegpaysages.
22. La vie et la passiondePierre et Paul.
23. La vie et la passionde Pierre II.
24. La vie et a passiondePierre XI.
25. La vie et la passionde Jacquesrere du Seigneur: a vie et la passionde
Pierre et de Paul.La vie et la passionde PierreVII.
26. La vie et la passionde Pierre XIV, XV:
27. La vie et la passionde saint Jacques,frere u Seigneur.
28. La vie et a passionde Pierre,XIII, XVII, XVIII. On pourrait multiplier
leg exemples.
29. La vie et la passionde Pierre et de Paul.
30. La vie et la passionde Pierre et de Paul.
31. La vie et a passionde Pierre et dePaul.
32. La vie et la passionde Barthelemy, V:
33. La vie et la passion e Pierre et de Paul,28, d.
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212
ALlBERT
Paysages
Face aux paysages que l on trouve evoques dans Ie Pseudo-
Abdias, Ie medieviste ne petit qu etre frappe. La structure domi-
nante que l on petit deduire des fares indications que nous four-
nissent es textes ne ressemblentpas beaucoupa ce qu il connait
des realites des paysagesde l Occident medieval. Tout d abord,
c est a ville qui domine. Elle est citee dansMatthieu, dans Simon
et Jude.Dans ce meme ecit, on evoque es deplacements« de ville
enville34», ou a grande cite, tandis que Matthieu invite a serendre
a la ville35.
Le monde rural qui compose e cadrede vie de l ecrasantemajo-
rite de la population, n est present que dans un cas, ine longue
citation que l on petit emprunter a la vie de Pierre: «Entin, dit-il,
un jour que ma mere Rachel m avait ordonne de me rendre dans
un champ pour moissonner, e vis tine faux qui etait posee a et lui
ordonnai d aller moissonner elle moissonnadix fois plus vite que
les autres.J ai deja fait sortir de terre beaucoupde eunesbuissons
et e les ai fait se couvrir de verdure en un brei instant36 .
La description du desert est aussi res interessante, quand on
sait qu il s agit a, dans imaginaire medieval, d un lieu tout a fait
particulier. 11est defini avec ine extreme precisiondans es notices
consacrees Philippe et Barthelemy.Le desertc est e « ieu desert
ou les hommesne peuvent accederet qui n offre rien qui soit utile
a leurs besoins37 , ou «il n y a point d oiseau qui vole, d homme
qui laboure et ou jamais n a resonne la voix d un homme38 . 11
s agit la d une definition qui est beaucoupplus orientale qu occi-
dentale. Une etude qui fait autorite, a montre que Ie desert, dans
l Occident medieval, c est a foret39. a foret qui n est presente,ce
qui pourrait ici aussi ndiquer une origine occidentale -romaine?-
dansce dossier,que dans a notice de Pierre et Paul: «il errait dans
les forets, il etait mort de froid et de faim et avait ete devoTepar
les loups40 .
34. La vie et la passion de Simon et Jude, IV.
35. La vie et la passion de Matthieu, IV.
36. La vie et la passion de Pierre,VI.
37. La vie et la passion de Philippe,
38. La vie et la passion de Barthelemy, IV.
39. LE GOFF (Jacques). « Le desert-facet dans l Occident medieval », dans
Traverses 19,1980, p. 22-33 ferris dans Idem, L imaginaire medieval, Paris,
1985, p. 59-75.
40. La vie et la passion de Pierre et Paul, 32 c.
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ISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
Quant a la mer, outre l expression « outre-mer» que l on a evo-
quee plus haut, elle n apparait qu incidemment en deux citations
« Mer de Galilee41» et la Mer Rouge « Pharaon et sonarmee dans
l erreur jusqu a les faire engloutir dans a mer42 . Dans res pay-
sagesevoluent quelques animaux.
Le mondeanimal
11y a tout d abord des animaux typiquement orientaux, les dro-
madaires que l on rencontre chez Simon et Jude43,es chameaux
de Barthelemy44.Ces animaux n etaient pas totalement inconnus
de l Occident medieval. 11y avait, dans certains recits concernant
des ondations d eglises, evocation de chameauxqui avaient servi
de montures aUKevangelisateurs.11s agit bien evidemment ci du
celebre chameaude saint Aphrodise de Beziers45,qui d ailleurs
n etait autre qu un dromadaire... 11y aurait beaucoup a dire sur
Ie plan ethnologique de cet animal, dont Ie souvenir survit usqu a
aujourd hui dans es pratiques populaires de la cite, mais d autres
chameaux soot attestes dans histoire de l Occident medieval. 11
y a tout d abord la presence de chameauxa la cour franque, au
Vllle siecle46. 1 a, et c est episode Ie plus celebre, a procession
parodique dont fut victime Brunehaut, avantsamise a mort, devant
les armees ranques, montee sur un chameau47. our un occiden-
tal, les « deux tigresses res feroces48 font partie d un bestiaire
exotique et feroce.
41. La vie et la passionde Pierre,v:
42. La vie et la passionde Pierre et Paul,28 a.
43. La vie et la passionde Simonet Jude,VIII.
44. La vie et la passionde Barthelemy,I.
45. Meme si l animal a toujours ete designecomme un chameau, l s agit
en realite d un dromadaire. Voir sur cet episode SOULAIROLJean). «La
legende du chameau» dans Bulletin de la Societearcheologique, cienti-
fique et litteraire de Beziers, 3emeerie, T. XI, 1919-1920,pp. 149-164.
46. Sur tOllS es episodesELZE Reinhard). « Insigne del potere sovrano
e delegato n Occidente » dans Simbolie simbologia ell alto Medioevo. et-
timane di Studio del Centro Italiano di studi sull alto medioevo. Spolete,
1987,pp. 569-593. Voir pp. 585-586.Avec les references des differents
textes cites.
47. Voir Ie passagedu pseudo-Fredegaire ite a ce sujet par Stephane LE
BECQ.Les origines ranquesdans Nouvellehistoire de a Francemedievale.
Paris, Seuil, 1990,p. 118.
48. La vie et la passionde Simonet Jude,v:
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D. ALIBERT
Viennent ensuite les agneaux et brebis qui sont entendus sous
leur sellSallegorique. On les rencontre dans es notices consacrees
a Simon et Jude49.Restent enfin es serpents,qualifies de monstres.
Si on les trouve cites dans Simon et Jude5O,a description qui les
assimilea descreatures nfemales,ce qui est courantdans e monde
chretien51, e trouve dans e fecit de la vie de Matthieu. « ls com-
mandaient aux serpentsde trapper ...un serpentmonstrueux; ces
serpentsetaient casques,eur souffle repandaitune chaleurembra-
see, ls crachaientpar les narinesdesvapeursde soufre dont I odeur
faisait mourir les gens52}.
Ce monde qui est, tant au niveau des structures geographiques
que des ormes paysageresou du bestiaire, relativement habituel
pour un medieviste, revele des structures politiques et religieuses
auxquelles es clercs DOllS nt accoutumes.
Les structurespolitiques et religieuses
Les structures de gouveruement
On trouve de multiples allusions,dansces extes, aux structures
du gouvemement et meme, mais en for~ant un pen Ie document,
une ebauchede miroir des princes, ou en tout cas, un portrait du
bon gouvemant53.
Plusieurs notations evoquent les divisions administratives qui
sont relIes de la romanite finissante. On parle ainsi de proVinces54,
d une « autre province55 . Les proVinces peuvent etre regies par
un roi, comme c est Ie cas dans a Vie et la passion de Barthelemy
49. La vie et la passionde Simonet JudeV.
50. La vie et la passionde Simonet Jude II.
5L Voir BODSONLiliane). « L evolution du statut culturel du serpentdans
Ie monde occidental de l Antiquite a nos jours» dans Histoire et animal,
Toulouse,Presses e l Institut d etudes politiques, 1989, p. 523-548.Pour
notre periode, e travail de JacquesVoisenetcontient toutes es references
necessaires.VOISENETJacques).Bestiairechretien.L imagerieanimaledes
auteursdu haul MoyenAge (Ve-XIe iecle).Toulouse,PressesUniversitaires
du Mirail, 1994,386p. + pl.
52. La vie et la passionde Matthieu, , III.
53. Pour une bonne entree en matiere sur es miroirs desprinces: ANTON
(Hans-Hubert). Fiirstenspiegelund Herrscherethosn der Karolingerzeit.
Bonn: L. Rohrscheid, 1968,462p.
54.La vie et la passionde Philippe.
55. La vie et la lJassion e Barthelemy.V.
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ISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
«Le roi de cette province56 . Un pays est ainsidivise en provinces,
a l interieur desquelleson trouve des cites, comme c est Ie cas en
Perse: «les douze provinces de Perse et leurs cites57 . Ces cites
peuvent etre au nombre de donze, comme c est Ie cas dans Bar-
thelemy, ce qui n appelle pas de commentaire sonspeine d enon-
cer des banalites58. our en finir avec cesdivisions, evoquons ex-
pression« beaucoupde cites» que l on trouve dans Pau159.
Voyons maintenant es nstitutions politiques proprement dites.
11 a tout d abord l empereur, qui pent etre nOmIne, omme dans
Ie cas de Neron, cite dans es vies de Pierre et de Pau160,t pour-
vu de differents qualificatifs: Neron61,«bon empereur» se ren-
contre a trois reprises dans a notice sur Pierre et Pau162; excel-
lent empereur63» ne fois, tout comme «empereur ires sacre64 .
On pent egalement e qualifier de Cesar «Neron Cesar». On Ie
trouve ainsi deux fois dans Pierre, deux fois dans Pierre et Pau165,
une fois dans Jacques Ie Mineur66. 11est pourvu d une femme
«Livie epousede Neron67 .
On a evidemmentplethore de rois. De certains, es auteursnons
donnent les noms. Ainsi Polymius cite dans Barthelemf8, Hero-
de cite dans Pierre. On a egalementdes mentions de reines, telle
la reine des Ethiopiens que l on rencontre dansMatthieu69.Avant
d etudier quelques cas particuliers, voyons les autres institutions
doni on repere la trace.
11 a tout d abord les prefets, tel Ie Prefet Agrippa et son epou-
se Agrippine qui est cite dans Pierre et Pau17°. emarquons qu il
s agit la d une institution qui marque empire romain finissant. On
rencontre aussides« officiers de ustice71», deux satrapes72deux
56. La vie et Lapassionde Barthelemy,I.
57. La vie et Lapassionde Simonet Jude,VI.
58. La vie et Lapassionde Barthelemy,V.
59. La vie et Lapassionde Paul.
60. La vie et Lapassionde Pierre et Paul,24b.
61. Ibidem.
62. La vie et Lapassionde Pierre et Paul24 d, 25 d, 25 d
63. La vie et Lapassionde Pierre et Paul 27 b.
64. La vie et Lapassionde Pierre et Paul29 b.
65. La vie et Lapassionde Pierre et Paul 24c,30 b.
66. La vie et Lapassionde Jacques,rere du Seigneur.
67. La vie et Lapassionde Pierre et Paul 24, b.
68. La vie et Lapassionde Barthelemy,I.
69. La vie et Lapassionde Matthieu, V.
70. La vie et Lapassionde Pierre et Paul.
71. La vie et Lapassionde Philippe.
72. La vie et Lapassionde Simonet Jude, I.
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ALmERT
tribuns chez Philippe et Simon-Jude73.Un autre personnage est
cite, dont Ie statut, ici comme ailleurs, meriterait d etre analyse: il
est «l ami du roi» qui est cite dans Simon Jude74.
Un peu pele-mele, quelques autres notions qui ont a voir avec
la chosepolitique: «Ie prince de l ile75», es herauts76,a Nobles-
se et l Etat qu evoque Pierre decidement res romain, mais a chose
n a lien d etonnant.
Les institutions militaires sont egalementaper~ues.Sans raiter
des deux centurions qui commandaienta Jerusalem 7,l taut s at-
tarder sur Varadach, un des personnages les de La vie et a pas-
sion de Simon et ude78.Ce personnage est qualifie de Dux79.Le
Dux, des a romanite finissante,est celui qui estcharge d un impor-
tant commandementmilitaire. A partir du xe siecle, dans Occi-
dent medieval, c est celui qui detient un important commande-
ment, militaire, civil, c est un membre de a haute fonction publique
carolingienne, c est surtout, avec Ie processus d atomisation de
l autorite que connait la periode, celui autour de qui s edifient les
principautes erritorialesso, our ne prendre qu un exemple,celebre
entre tous, un certain Hugues portait, dans e royaume de Lothai-
re puis de Louis, Ie titre de Dux. Il s appelait Hugues Capet, et la
suite de son histoire est connue81 Nous avons la l un de ces
exemples de detournement de l institution citee par la Bible, ou
ici les Apocryphes, au profit des realites medievales,phenomenes
bien connus par ailleurs. Le titre de Dux semble d ailleurs appe-
ler ce genre de mutations. Il y a un cas extremement habile de
manipulation de cet ordre. Il s agit d Holopherne. Qualifie de prin-
cepspar la Vulgate, il se trouve transforme en Dux dans un texte
73. Ibidem.
74.La vie et fapassionde Simonet Jude, : Sur ce titre, qui vient de la Bible
I Maccabees, 0, 16,on nous pardonnera de renvoyer a notre these de doc-
torat, inedite, Les Carolingiens et eurs mages. conographie et deologie.
Paris IV, 1994. Voir p. 366.
75. La vie et Lapassionde Paul.
76. La vie et Lapassionde Matthieu, V
77. La vie et Lapassionde Jacquesrere de apotreJean.
78. La vie et Lapassionde Simonet Jude, I.
79. C est a desseinque nous ne traduisons pas,a la difference de ce que
nous avons dft faire pour la publication.
so. Sur ces questions on verra GUILLOT Olivier). «Formes, fondements
et imites de l organisation politique en France au Xc siecle »dans Il seco-
10diferro: reaLta elsecoLo , Settimanedi studio del Centro italiano sull al-
to medioevo, Spolete, 1990,pp. 57-124.
8L SASSIERYves). HuguesCapel.Naissance une dynastie.Paris, Fayard,
1987,357 p. + fig.
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VISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
carolingien82. La nuance n est pas mince, qui s appuie sur leg
grandes mutations subies par leg pastes d autorite entre Ie lye et
Ie Ixe siecle. Un extrait, enfin, est particulierement eclairant, pour
qui connait Ie poids et de l armee, et de l administration de l An-
tiquite tardive. 11provient de La vie et a passionde Pierre etPaul:
« [ceux qui avaient] l etat de soldat s attachaient a Dieu, au point
que quittant meme Ie service du roi, its venaient a lui, et devenus
chretiens ne voulaient revenir ni dans armee, ni au palais ».11est
possible qu il y ait la Ie probleme qui a ete celui de la militia de
l Empire finissant, qui voyait toute une partie de la noblesse, y
compris celIe qui servait sous eg armes, ou dans la haute admi-
nistration, la militia qui cherchait a retenir sesmembres qui quit-
taient Ie service de l Empereur pour celui de Dieu83.
Reste maintenant a analyser,et c est e plus interessant, eg qua-
lites qui doivent etre cellesde res gouvemants.Trois passages eu-
vent etre tout a fait eclairants et ne depareraient pas a litterature
parenetique medievale. Un premier extrait n appelle pas de com-
mentaire particulier. 11vient de Matthieu: «Ie roi se mantra bon
chretien, et son epouse pleine de gloire, comme son armee etait
animee d un pieux zele84 . En revanche, eg consequences e cette
bonne conduite sont decrites et ressemblenta s y meprendre au
programme desrecompensesdu bon roi : « [de] son vivant il fit l un
de ses ils general de toute l armee et l autre roi: il vit leg fils de
ses ils jusqu a la quatrieme generation, il conserva une paix tres
solide avec eg Romains et egPerses85. La paix est, selon eg clercs
medievaux, la t~che premiere du roi. Et ce n est pas un hasard si
ce sont leg hommes d Eglise qui ant mis en route, au toumant des
xe siecle et Xle siecles, e mouvement de la paix de Dieu, pour
remplacer une royaute defaillante86. autre point estmains connuhabituellement.11
s agit de la question de la descendance.Sansen
revenir a la question du miracle capetien, e fait pour un souverain
82.
II s agit d un titulus de la Bible de Saint-Paul-hors-les-Murs.oir folio
234 verso. Holopheme est qualifi6 de princeps en Judith 10,1383.
Sur res questions, voir Particle fondamental de Karl-Ferdinand WER-
NER.«Du nouveau sur un vieux theme. Aux origines de la « Noblesse»
et de la « Chevalerie » » dans Academiedes nscriptions et Belles-Lettres.
Compte endusdesseances e 1985,pp. 186-208.
84. La vie et passionde Matthieu,v:85.
La vie et passionde Matthieu,X.
86. La question de la paix de Dieu fait actuellementPobjet d une vive que-
relle entre historiens m6di6vistes.Ce n est pas ci Ie lieu d en rendre comp-
te. C est pour cette raison que nous ne donnerons pas de bibliographie.
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D. ALffiERT
d avoir une descendance, t surtout une descendance pte a regner,
est essentiel.Outre Ie souvenir, oujours present, de la dynastie de
Juda, il faut avoir en memoire que Ie sacre royal n a, a l origine,
d autre but que de pouvoir assurer une descendance oyale au
monarque87.En echo, on peut citer Ie discoursprete par un clerc
charentais ecrivant vers 826, au pape Etienne IV venu a Reims
sacrer Louis Ie Pieux: «Que Ie Tout-Puissant, qui fit croitre la
race88 Abraham, t accorde de voir tes petits-enfants et de t en-
tendre appeler du nom d aieul; qu il te donne une suite de des-
cendants deux et trois fois plus nombreux89 . A l inverse, Ie mau-
vais roi est puni: «Quant a Hirtacus, l elephantiasis avait envahi
de la tete aux pieds, et comme les medecins ne pouvaient pas Ie
soigner, l posa a pointe de songlaive contre sa poitrine et se ais-
sa tomber dessus: parce qu il ouvrit Ie corps de l apotre du Sei-
gneur par derriere, il se transper~a lui-meme Ie ventre par
devant90 . La maladie du roi, des travaux recents ont bien mon-
tre, est un chatiment du roi pecheur. Quant au suicide, un article,
entre autre, de Jean-Claude Schmitt91a montre que la societe
medievale Ie tenait pour un peche des plus graves. Et dans e cas
present, il est evident que Ie souvenir du suicide de Saill92, stpre-
sent: « Saill prit son epee et se eta dessus .
Reste un demier cas,particulierement delicat, et tout aussipas-
sionnant. 11s agit d un extrait de Barthelemy: «Puis, par revela-
tion, Ie roi Polirnius rut ordonne evequepar l apotre93».11est evi-
dent qu il s agit a d une figure de roi pretre; il s agit a de l un des
seulscas oil celie figure peut, a bon droit, etre evoquee,dans Oc-
cident medieval. En effet, meme si Ie souvenir de Melchisedech
hanta la royaute medievale94,e roi pretre n y existe pas et l epis-
copat a veille, avec un soin aloux, a la dissociation de ces deux
87. Sur ce point, on consultera notre article «Sacralite royale et onction
royale a l epoque carolingienne» dans Anthropologiesjuridiques. Melanges
Pierre Braun. Limoges: PuLIM, 1998, pp. 19-44.
88. Le texte latin emploi Ie mot semen.
89. Ermold Ie Noir. Poemeen l honneurde Louis Ie Pieux. Epitres au roi Pepin.
Ed. FARAL (Edmond). Paris, Les Belles Lettres, 20m.ed., 1964. v: 1094-
1095. p. 84.
90. La vie et la passion de Matthieu, IX.
91. SCHMI1T (Jean-Claude). «Le suicide au Moyen Age» dans Annales
E.S.C., 1976, 1, pp. 3-28.
92. I Samuel 31, 4.
93. La vie et la passion de Barthelemy, VI.
94. Voir oar exemole Ie revers de la facade de la cathedrale de Reims.
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ISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
figures95.I est evident que Ie modele que nous presente e Pseu-
do-Abdias nuance fortement cette image, puisqu il s agit d un roi
qui devienteveque,et non d un roi qui cumule,commenousdirions
aujourd hui, leg deux fonctions.
Car leg textes du Pseudo-Abdias connaissentegalement a hie-
rarchie et leg fonctions ecclesiastiques.
L Eglise
La hierarchie ecclesiastique est presentee en bon ordre dans
Matthieu : « l etablit des pretres et des diacres et, dans es cites et
bourgades, ordonna des eveques et fit edifier beaucoup
d eglises96 . On aurait pu citer un texte similaire, pris dans Phi-
lippe. On retrouve l eveque a plusieurs eprises: c est visiblement
la figure centrale de l Eglise, telle qu elle se dessinedans e Pseu-
do-Abdias, ce qui n a rien de surprenant, puisque, comme on l a
vu, Ie monde du Pseudo-Abdias est essentiellement un monde
urbain. C est egalementdans ce cadre que doivent se comprendre
les basiliques, evoqueesdans Matthieu et Simon-Jude97. a fonc-
tion des ediles, notamment des eveques,est evoquee a plusieurs
reprises. On peut ainsi citer cet extrait de Simon-Jude: « Les
apotres ordonnerent dans cette cite un eveque du nom d Abdias,
qui etait venD avec eux de Judee et qui, lui aussi, avait vu Ie Sei-
gneur de sesyeux; et la cite se remplit d eglises98»,
Un dernier point qui montre la survivance, au profit de l Egli-
se, de l une des plus vieilles, et des plus solides aussi, nstitutions
romaines : Ie fisc. Des travaux recents99 nt tente de montrer, sans
toujours convaincre, il est vrai, que Ie fisc avait survecu usqu au
Ixe siecle. Toujours est-il que l on peut aussivoir dans cet extrait,
qui nODSlacerait dans optique d une Eglise mperiale, une reven-
95. Exception faile, mais il s agit la d une figure litteraire tardive, de la
legende du pretre Jean. Voir, sur ce demier MELVILLE (Gert). « Le pretre
Jean. Figure imaginaire du roi sacre », dans BOUREAU (Alain), INGER-
FLOM (Claudio-Sergio) (Ed) .La royaute sacreedans e monde chretien. Paris,
EHESS, 1992, p. 81-90.
96. La vie et Lapassion de Matthieu, IV.
97. La vie et Lapassion de Matthieu, VII. La vie et Lapassion de Simon et Jude,
VII.
98. La vie et la passion de Simon et Jude, VI.
99. II s agit bien evidemment des travaux de Jean Durliat et Elisabeth
Magnou-Nortier.
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220 ALIBERT
dication clericale: «un pretre re~oit du fisc vingt livres d'or par
moisl00 . Quoi qu'il en soit, c'est une somme respectable.
11est nteressant,aussi,de voir autour de quels objets de devo-
tion s'estconstitute l'Eglise que nous decrivent es textes du Pseu-
do-Abdias, ou en reaction a quels objets et a quelles pratiques.
Objets de devotion
li Y a tout d'abord l'opposition auK doles paiennes. Celles-ci
sont nommees « doles » dans es recits concernantPhilippe. Chez
Barthelemy, l'idole d' AstarothlOl est clairement identifiee, tout
comme on parle du culte des doles dans Simon et Jude1O2,doles
auxquelleson peut me-me acrifier,comme on Ie voit dansce me-me
recit. Des idoles, on passeaUK tatues: « Chaque our ils disaient
a un morceau de metal: Tu es mOll dieu partout oil it y avail
des statuesplaceespour decorer e temple1o3. « Vos doles et vos
statues sculptees1O4. On peut egalement adorer ces statues,
comme cela est explicitement dit dans Simon-Jude,et Ie materiau
ne change rien a l'affaire. « is ne comprennentpas que les mages
qu'ils fabriquent a leur gre en faisant ondre de l'or ou de l'argent,
ou en sculptant de la pierre ou du bois, ne sont pas des dieux1O5.
Cette attaque contre les images, et surtout contre les images en
trois dimensions ecouvertesd'or, evoque chez e medieviste, oute
une serle d'echos.
li y a, tout d'abord, a crise conoclaste,qui mil aUK rises 'Orient
byzantin et l'Occident carolingien. L'autre echo concerne a devo-
tion aUK eliques, orsqu'elle prit la forme, combien contestee,des
statues eliquaires. Le plus celebre exemple est, bien sur, celui de
la majeste de sainte Foy. Le lien, d'ailleurs, entre ces idoles
paiennes et ladite statue avail ete fait, des e XIe siecle,par l'un de
ses detracteurs qui allait, post conversionem,devenir l'auteur de
son ivre des miracles106.
Face aUKmages,des e IXe siecle, 'Occident choisit es reliques.
Les textes du Pseudo-Abdias eur font une large place. Et l'un de
100.La vie et la passiondeSimonet Jude, I.
101.La vie et la passionde Barthelemy,.
102.La vie et la passionde Simonet Jude, II.
103.La vie et la passionde Barthelemy,II.
104. La vie et la passionde Pierre et de Paul.
105.La vie et la passionde Simonet Jude,VI.
106.11s'agit bien sur de Bernard d' Angers, auteur du celebre Liber Mira.
rulnrnm.
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221
ISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
ces extes rappelle que leg Grecs ne sont pas toujours bien inspi-
res. II s'agit d'un extrait de Pierre et Paul, dont bien des elements
tendraient a prouver que ce texte a ete ecrit en contexte occiden-
tal, pour ne pas dire carolingien et TomainoEt il n'y aurait rien de
surprenant a ce que cette redaction se situe entre 730 et 811.«Les
Grecs leg emportaient pour leg ramener en Orient, il se produisit
un violent tremblement de terre et Ie peuple romain s'en empara,
a un endroit que l'on nomme Catacombe,sur a voie Appienne, a
la troisieme borne milliaire. (...) its inTent deposessaint Pierre au
Vatican a la Naumachie, et saint Paul, sur la voie Ostienne, a la
deuxiemeborne milliaire en partant de Rome107. D'autres textes
evoquent eg eliques et leur pouvoir miraculeux. «Si bien que I'on
posait sur leg malades eg mouchoirs et leg linges qu'il avait por-
tes108. Jacques e Majeur en offre un bien bel exemple: «Her-
mogene (...) paralysasi bien Philetus qu'il ne pouvait faire un mou-
vement et illui dit: "Nous verrons bien si ton Jacques e delivrera
de ces iens " Philetus envoya alors en toute hate son esclave
aupresde Jacques;une fois arrive, I'esclave ui raconta tout et aus-
sitot Jacquesenvoya son mouchoir a Philetus en disant: "Qu'il
prenne cet objet et dise : 'Mon SeigneurJesusChrist redresseceux
qui sont brises et delivre ceux qui sont enchaines". Des que l'es-
clave qui avait ete envoye eut touche Philetus de ce mouchoir, son
maitre se trouva delivre du lien impose par Ie magicien et il cou-
rut trouver Jacques, plein d'insultes pour leg sortileges de son
maitre1W . Les confessionssuscitentelles aussibien des miracles:
« II se produit de grands miracles pres du tombeaullo du bienheu-
reux apotre Matthieull1 ».
Pour conclure cette partie, il convient d'evoquer deux autres
objets de devotion, particulierement chefSaux yeux de l'Occident
medieval. II y a tout d'abord la croix. La croix dont on gait qu'el-
Ie ne rut pas acceptee acilement, et qu'il fallut, comme I'a bien
montre Jean-ClaudeBonne, une revolution ornementale pour lui
pemlettre de s'imposer. Et meme Bernard de Clairvaux lui tela
une place de choix au chreurdeseglises isterciennes ui sontpour-
tant autant de modeles de depouillement. C'est dans Barthelemy
qu'il y est fait allusion: «il sculpta de son doigt Ie signe de la croix
107. La vie et la passionde Pierre et dePaul.
108. La vie et la passionde Paul.
109.La vie et Lapassionde Jacquesrere de ' apotreJean.
110. Litteralement : la confession,erme qui designe e lieu ou reposent e
corps des martyrs et des saints.
11L La vie et la passionde Matthieu,X.
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222
D. ALffiERT
sur eg pierres de taillel12». Le demier objet est a chaire de saint
Pierre. Elle est nommement designeedans a notice consacreea
Pierre, lors de la transmissiona Clement: «il imposa leg mains a
Clement, l'amena a s'asseoir sur sa chairel13 . Or cet objet est
venere depuis l'epoque carolingienne, puisqu'on en trouve une
mention dans Ie Martyrologe de Raban Maur, pour Ie 15 des
calendesde fevrier : « Dedicatio cathedrae ancti Petri apostol4quo
primo Romae sedit». Cet objet existe,puisquedepuis e XIIe siecle,
Ie trane que Charles Ie Chauve avait apporte a Rome lors de son
sacre mperial en 875 etait considere comme 'authentique chaire
de saint Pierrel14.
Des objets de devotion aux grands principes qui regissent a
representationdu monde que se font l'auteur ou eg auteursde nos
textes, il n'y a qu'un pas.
Representationsdu monde
Il y a tout d'abord Ie precieux
Le precieux
Meme si les apotres les refusent, ils enumerent un certain
nombre de materiaux que l'on pent qualifier, dans l'Occident
medieval,de precieux. n y a ainsi« l'or, de 'argent, despierres pre-
cieuses et des vetementsl15 . n y a egalement a pourpre. Cette
derniere, qui a survecu au mains jusqu'au Ixe siecle dans les
insignesdu pouvoirl16,estcitee a propos du roi dansBarthelemy1l7.
Elle est associeea d'autres materiaux precieux a propos du luxe
des pretres idolatres dans Simon-Jude1l8.
112.La vie et la passionde Barthelemy,V.
113. La vie et la passionde Pie e.
114. Sur tout ce dossier,voir ALIBERT.Les Carolingiens, p. cit. p. 270 et
sq.
115. La vie et la passionde Barthelemy,I.
116. Sur l'emploi de la pourpre au X. siecle. ALIBERT Dominique). «La
matiere antique dans 'imagerie politique carolingienne» dansLa memoi-
re de 'Antiquite dans 'Antiquite tardiveetle hautMoyenAge.Paris,Univer-
site de Paris-X-Nanterre et Picard diffusion, 2000,pp. 81-93. Voir p. 83.
117. La vie et la passionde Barthelemy,, IV, V.
118. «Pourpre constellee d'or et de pierreries, dans eurs vetements tis-
ses d'or, au milieu des coupes,des tissus de tin et de soie et de toute la
gloire du royaume de Babylone », La vie et la passionde Simonet Jude I.
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ISION DU MONDE ET IMAGINAIRE
Les batiments peuvent egalement susciter admiration comme
ces « colonnesde cristal d une taille etonnante » citeesdans a noti-
ce de Pierre. Toujours dans Ie registre de l architecture, on Teste
impuissant des loTS u il s agit de tenter d etablir une representa-
tion graphique de la basilique qui est decrite dans Simon-Jude,
« [une] basilique qui comportait quatre-vingts cercles, avec huit
angles de quatre-vingts pieds, si bien que l on comptait huit fois
quatre-vingts pieds de perimetre. Sur une hauteur de cent vingt
pieds, il fit tout construire en blocs de marbre sur lesquels furent
sculptes des signes. I fit recouvrir Ie plafond de lames d or. Au
centre de l octogone il fit placer un sarcophaged argent pur. Pen-
dant trois ans il fit travailler sans relache a cette construction,
l achevant e jour de l anniversaire desapotresl19».Certes, es des-
criptions medievales, on pent penser ci a la vision de Robert de
Mozac -sont rarement raduisibles en rois dimensionsl20. n pent
relever l importance de l octogone, dont on sait usage qu en ont
fait les architectesbyzantins et carolingiens121. n pent aussievo-
quer Ie marbre, dont la circulation a irrigue les routes commer-
ciales du haut Moyen Agel22,avec ces marbres d Aquitaine, dont
on a tire tant de chapiteauxet de sarcophages,l y a enfin la « valeur
travail », si l on vent bien nons pardonner un tel neologisme.
L immonde
A l oppose du precieux, il y a l immonde. Ce dernier est bien
decrit a propos de deux Ethiopiens, une fois dansBarthelemy, une
fois dansSimon-Jude: « Alors illeur montra un gigantesqueEthio-
pieD, plus noir que la suie, qui avait un visage pointu avec une
longue barbe, etait couvert de poils jusqu aux pieds, avait des yeux
de feu comme un fer rougi au feu et des etincelles qui jaillissaient
de sa bouche ; de sesnarines sortait une flamme de soufre, il avait
des ailes de plume, herissees de piquants comme une strige; il
avait eg mains attacheesderriere Ie dog et etait entoure de chaines
de feul23». « [On vit] deux Ethiopiens noirs, tout nus, avec des
119. La vie et la passionde Simonet Jude,VII.
120. Voir SCHMrrr Jean-Claude).« La culture de l imago », dansAnnales
HSS, anvier-fevrier 1996,no1,pp. 3-36. Voir p. 14.
m. Nous pensons ci a la chapelle palatine d Aix la Chapelle.
122. Voir HUBERT Jean). Art et vie socialede lafin du mondeantiqueau
MoyenAge.Etudes archeologieetd histoire.Geneve Droz, 1977,XXXI-
584p.
123.La vie et la passion e Barthelemy,V:
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224
D. ALIBERT
visageseffrayants, s'en aller en hurlant et en poussantdes clameurs
terribles11A. La premiere descriptionpent rappelercelIeque donne
du diable, qui lui apparaitune nuit, Ie chroniqueur clunisiende ' An
Mille, Ie tres celebre Raoul Glaber25.
Le paradis
Tous es textes aboutissenta la vision du paradis que decrit Mat-
thieu: «Le paradis des delices est plus haut que toutes leg mon-
tagnes et est proche du ciel; il n'a rien en lui qui puisseetre enne-
mi du salutdeshommes; egoiseauxne s'effraientpas en entendant
ou en voyant 'homme, il ne pousseni epine ni chardow26,eg oses
ne se fanent pas, ni leg is; aucune fleur ne passe; eg brises qu'on
y sent caressentplus qu'elles ne soufflent, et font respirer l'eter-
nite. En effet, tout comme eg umeesde l'encens chassenta puan-
teur, leg narines aspirent ci la vie eternelle qui ne laisse endurer a
l'homme ni fatigue, ni douleur, mills Ie fait demeurer oujours dans
Ie meme age, oujours jeune, toujours joyeux, toujours pareil a ui-
meme. Ni Ie scorpion, ni la tarentule, ni aucune mouche nuisible
a la santen'a saplace en ce ieu. La les ions, es igres et eg pards127
sont au service des hommes et, quoique l'homme ordonne aux
oiseaux ou aux betes sauvages, es derniers obeissent espectueu-
sement a son ordre comme a celui du plus chef ami de Dieu. De
la coulent quatre fleuves: l'un s'appelle Ie Geon, Ie second e Phi-
son, e troisieme, Ie Tigre, Ie quatrieme 'Euphratel28. ls sont rem-
124. La vie et la passionde Simonet JudeVII.
US. Raoul Glaber. Histoires.Ed et trad. ARNoux (M.). Turnhout, Bre-
pols, 19 ,323p. Voir p. 275. La hantise du diable chez eg moines,notam-
ment chez eg moines clunisiens, se retrouve plus d'un siecle plus lard.
Voir sur ce point BOunnLLIER (D .), TORRELLJ.-P.).«Une spiritualite
de combat. Pierre Ie Venerable et la lutte contre Satan» dans RevueTho-
miste,84, 1984 pp. 47-81.
126. Il ne pousseni epineni chardon.GeneseII, 18 : « II fera germer pour
toi l'epine et Ie chardon ».
U7. Dans leg bestiaires du Moyen Age, Ie leopard est un hybride de lion
et de «pard » it Ya tine distinction entre ces rois especes.
128. De III coulentquatrefleuves: 'un s'appelle e Geon, e seconde Phison,
Ie troisieme,e ngre, la quatrieme' Euphrate.Genese 2, 10-14 « Un fleuve
sortait d'Eden pour irriguer Ie jardin; de la il se partageait pour former
quatre bras. L'un d'eux s'appelaitPishon; c'est ui qui entoure tout Ie pays
de Hawila oil se trouve l'or -et l'or de ce pays est bon -ainsi que Ie bdel-
lium et la pierre d'onyx. Le deuxieme fleuve s'appelait Guihon; c'est lui
qui entoure tout Ie pays de Koush. Le troisieme fleuve s'appelait Tigre;
il collie a l'Orient d' Assour. Le quatrieme fleuve, c'etait l'Euphrate ».
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ISION DO MONDE ET IMAGINAlRE
plis de toutes sortes de poissons.La, nul aboiement de chien, nul
rugissement e lion, tout estagreable, out estdoux, tout estserein.
La, jamais a face du ciel n estobscurciede nuages,amais a foudre
ne fait brliler seseclairs, amais Ie tonnerre ne gronde, (...) qu il
n y a pas Ie moindre serpent129.11est evident qu au-dela du sub-
strat biblique, ce texte evoque toute une serle de representations
medievales.11 a tout d abord Ie fait qu il soil sur une montagne.
Certains exegetesmedievaux ont d ailleurs voulu Ie situer sur une
montagne de l Azerbaldjanl30. En tout cas, comme on Ie remar-
quail en ouvrant celie etude, es premiers alpinistes du xve siecle
ont cherche a Ie retrouver sur les sommets qu ils gravissaient.
L autre point conceme Ie regne animal. Outre que tons les ani-
maux nocifs, comme les scorpions et autres serpents, sont exclus,
Ie texte insiste sur a bonne entente entre 1homme et les animaux.
C est sur des textes de cet ordre que les eveques ont souvent
condamne la chasse oyale, qui mettait en evidence es exces de
bestialite du pouvoir royal131.
Conclusion
On pourrait s arreter sur ce tableau idyllique. Mais il convient
de tenter quelques conclusions, notamment sur l origine de cer-
tains motifs. Autant Ie dire, les notices qui concernent Pierre et
Paul no us semblent ires opposees aUKGrecs. Certains textes
auraient pu etre utilises dans desquerelles concernant es reliques,
voire les representationsen rois dimensions.Nous pourrions peut-
etre nons appuyer sur cespoints pour evaluer es questionsde data-
lion.
Par ailleurs, les medievistes auraient tout interet a frequenter
plus souvent ce genre de sources.Elles nous montrent comment
les phenomenes eligieux qui leur sont familiers s enracinentdans
la longue duree des images et des textes. Apres tout, les Ethio-
piens de Simon Jude, ou leurs semblables,ont peut-etre fait faire
quelques cauchemarsa Raoul Glaber; ou Antoine de Ville, qui
dirigea l Ascension du Mont-Aiguille, avail peut-etre ete berce,
danssesTeves enfants, par desvisions paradisiaquesdu Pseudo-
129. La vie et la passion de Matthieu, III.
130. Voir sur ce point LE GoFF (Jacques). La civilisation de I Occident medie-
val. Paris, Arthaud, 1965. Voir p.m.
13L On consultera sur ce point les travaux de Philippe Buc. On verra entre
autre « Pouvoir royal et commentaire de la Bible (1150-1350») dans
Annales E.S.C.. 1988,3, pp. 691-713, et en particulier les pages 693 a 699.
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226
D.
ALffiERT
A i .
Et les reves,ou les cauchemars, ont probablement, e
moteurde histoire.
A partir d un corpus de textes nettement delimite, leg vies etpassions
d apotres, connuessous e nom de collection du Pseudo-Abdias,
on a tente de voir comment ces textes participent it la
construction de la culture medievale. Ces vies et passionspresen-
tent en effet un certain nombre de traits qui sont pregnants dansla
culture medievale, mais ausside notables differences. Ainsi, Iebestiaire,
ou leg paysages,ne sont pas ceux que connaissaient egcampagnes
de l Occident medieval. En revanche, leg structurespolitiques
et ecclesialessont tres proches de celles du Moyen Ageoccidental.
De meme, eg objets de devotion, leg grandes caracte-ristiques
des representations du monde sont celles que l on trou-ve
chez nombre de clercs medievaux. On peut donc pencher,comme
d autres indices l indiquent, pour une origine medievale
et latine de ces extes, et remarquer qu ils participent it l elabora-
tion de la culture medievale.
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Enrico NORELL
Universite e Geneve
SUR LES ACTES DE PIERRE :
A PROPOSD'UN LIVRE RECENT
Cet article discute de maniere critique les contributions de plusieurs
savants,surtout hongrois et neerlandais,contenusdans e volume sur les
Actes de Pierre, editepar Ie professeurJ. N. Bremmer en 1998. La plu-
part de ces etudes contiennent des elements nteressants,mais assezdis-
perses. Des recherchesulterieures semblent necessaires our parvenir iJ.
eclairer lesproblemes cruciaux que pose cet apocryphe .lieu, date,histoi-
re de la composition et deologie.
This reviewarticle is a critical discussion of he essays n theapocryphal
Acts of Peter written by several scholars,mainly rom Hungary and the
Netherlands, and gathered in a volume edited by Professor fan N.
Bremmer in 1998. Most of these studiescontain valuable,but still rather
scatterednsight.\". urther research eems ecessaryn order to throw more
light on the crucial problems of this apocryphalbook: dateand place of t.\"
redaction,history of t.\" ompositionand it.\"deological eatures.
L'objet des remarques qui suivent est Ie troisieme tome d'une
serle prevue initialement en cinq volumes et consacreeaux grands
Actes apocryphesanciensdes apotres (Jean,Paul, Pierre, Andre,
Thomas) . A l'instar desdeux qui I' ont precede, l contient es expo-
sespresentes ors d'un colloque s'inscrivantdans un projet conjoint
de recherchemene par la Rijksuniversiteit de Groningen et l'Uni-
versite Lorand-Eotvos de Budapest1. Le sous-titre du present
volume ne rend pas tout a fait justice a son contenu il est question
.BREMMER, an N. (ed.), TheApocryphal Acts of Peter.Magic, Miracles
and Gnosticism (Studies on the Apocryphal Acts of the Apostles, 3),
Leuven, Peeters, 1998,VIII+213 pages. SBN 90-429-0019-9.
1. La contribution de Christine M. Thomas fait apparemment excep-
tion, car elle a ete presentee a « he Annual Meeting» de la SBL, Ie 23
novembre 1996 a New Orleans (d. p. 83, n. 34). Le quatrieme volume
de la serie, publie egalement en 1998,est une monographie de Pieter J.
Lalleman sur les Actes de Jean; on peut penser que Ie cinquieme
contiendra les actes du colloque sur les Actes de Thomas qui a eu lieu a
Groningen en novembre 1998.
Apocrypha 11, 2000, . 227 -258
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228
E. NORELLI
de magie notamment dans 'expose de J. N. Bremmer, et, defa~n
plus imitee, dansd'autres; plusieurscontributions s'interessent ux
miracleset it leur fonction dans es ActesdePierre (dorenavantAPt,
comme dans Ie volume); la question du gnosticisme,quant it ene,
Teste Ies marginale. En revanche, d'autres themes apparaissent.
J'ai choisi de discuter plus it fond trois contributions, pour traiter
ensuite beaucoupplus brievement des autres.
I. Le volume s'ouvre par tiDe contribution de Ian N. Bremmer
intitulee Aspects of the Acts of Peter: Women, Magic, Place and
Date . L'auteur, historien de l' Antiquite et desreligions, examine
d'abord les figures feminines, puis tout ce qui conceme a demo-
nologie et les prodiges, soulignant combien es miraclesoperes par
Pierre se rapprochent des pratiques magiques de l' Antiquite.
Apres ces remarques, iches et interessantesbien qu'un peu frag-
mentaires, Bremmer signale quelques elements qui pourraient
contribuer a resoudre a vexataquaestiode la localisation des APt
dans 'espace et dans Ie temps. Quant au ieu, il tend a confirmer
la these, deja ancienne et reprise plus recemment par Peter
Lampe2, de l'origine asiate. Quelques-uns de ses arguments
conviennent en general aux provinces par opposition a Rome, plu-
tot que specialementa l' Asie mineure3. En faveur de la Bithynie,
Bremmer reprend les arguments deja avances par J. Ficker4, et
ajoute que la Tithe variete sociale des APt orienterait vers tine
grande ville comme Nicomedie. Quant a la date, Bremmer est
sceptique au sujet de la fiabilite des recherches recentes desti-
nees a etablir la priorite respective entre Actes de Jean,Actes de
Paul et APt (nous y reviendrons). PlusieursRomains des classes
superieures apparaissentcomme chretiens dans les APt; or, les
premiers temoignages sur des senateurs chretiens remontent a
l'epoque de Commode. Ces senateursne pouvaient d'ailleurs pas
encore manifesterpubliquement eur foi sansperdre leur position;
cette situation se refleterait dans Ie fait que, dans es APt, Mar-
cellusn'a aucune onction ecclesiastique.C'estce qui alDeneBrem-
mer a dater les APt des deux demieres decennies du lie siecle5.
2. Die stadtromischen Christen in den ersten beiden lahrhunderten,
Tubingen 21989, . 99.
3. Ainsi Ia designation d 'ami de rEmpereur pour Aibinus (ch. 34); Ia
dedicace de Ia statue a Simon comme a un VEO£ £0£ ch.10); rage tres
jeune de Nicostratus (28).
4. Die Petrusakten.Beitriige zu ihrem Verstiindnis, eipzig 1903,p. 30-44.
5. Et plutot veTSe debut de cette periode, a cause du caractere conser-
vateur de sa regula idei; voir ci-dessous,au sujet de Ia contribution de
L.WESTRA.
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229
UR LES AcrES DE PIERRE
Quant a la traduction latine, Ie fait que les curiosi, es agentesn
rebus mperiaux, pourraient redire a l'empereur que sa statue a
ete brisee (ch. 11), n'est possible qu'apres 359, date a partir de
laquelle ces espions rapportent directement a l'empereur; cela
fixerait un terminus post quem pour cette traduction. Je trouve
moins convaincante 'idee (p. 9) que la martyre Perpetue connai-
trait les APt car Ie reve ou elle doit se battre avec un affreux Egyp-
tieD dependrait du reve de Marcellus ou il s'agit de decapiter une
laide Ethiopienne (ch.22)6.
Un probleme plus general concernant a contribution de Brem-
mer est qu'il ne tient aucun compte des propositions qui voient
plusieurs couches de composition dans les APt. Or, les femmes
riches et nobles qui accompagnentPaul au port (p. 5) figurent au
ch. 3, qui appartient a l'elaboration redactionnelle selon a these
de Harnack, reprise par Leon Vouaux7 et plus recemment par
Gerard Poupon8,avec de solides arguments; c'est au meme ch. 3
qu'apparait Balbus, que Bremmer propose de mettre en rapport
avec un proconsuld' Asie nomme Q.(Iulius Balbus (p.15). De nom-
breux senateurs, cavaliers et femmes riches de l'aristocratie,
comme Ie note Bremmer (p. 6), sont mentionnes au ch. 30; mais
ce chapitre, selon Poupon, appartiendrait lui aussia la redaction
posteriel:lre. Certes, des femmes riches apparaissent egalement
dans des chapitres appartenant sansdoute a la couche primitive,
mais il est clair que si l'on admet une composition en plusieurs
etapes, t faut sittler chacune d'elles selon es indices qui s'y trou-
vent. Pour la localisation, Bremmer (p. 15) e~ Testesubstantielle-
ment aux argumentsde Ficker; or, dans 'introduction a sa recente
6.
En fait, dans es AP; il s'agit d'une Ethiopienne et il est explicitement
exclu que ce soit une Egyptienne; la danse et les chaines n'apparaissent
pas dans la Passio Perpetuae; e contexte des Ac Pt n'est pas celui d'un
martyre cornine dans a Passio; l s'agitd'une femme et non d'un homme;
elie n'est pas vaincue par la personne qui reve, mills par Ie Christ sous a
forme de Pierre. Ce qui est commun, c'est a representation onirique de
la puissancediabolique comme d'un etre humain nair, contre lequel on
doit se battre; mais cela est oin d'exiger une dependance itteraire.
7. Les Actes de Pierre. Introduction, textes, raduction et commentaires
(Les apocryphes du Nouveau Testament),Paris 1922,p. 27-33.
8. Les .Actes de Pierre' et leur remaniement , in ANRW 25/6, Berlin-
New York 1988, p. 4363-4383. Mais W. SCHNEEMELCHER,Petrus-
akten , in W. SCHNEEMELCHERed.), Neutestamentliche Apokryphen.
II.. Apostolisches, Apokalypsen und Verwandtes, Ttibingen 51989,
p. 252-253,oppose a la these d'un texte primitif et d'un redacteur celie
d'un ouvrage compose a partir de sources differentes, qui n'auraient
pas toujours ete bien harmoniseesentre elies.
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E. NORELLI
traduction, G. Poupon affirme, sans malheureusement preciser
davantage, que les arguments de Ficker lui semble.nts'appliquer
plutot au remaniement qu'au texte primitif, qu'il situerait "dans
un milieu grec de Syrie"9. En tout cas, Bremmer restreint peut-
etre un peu trop rapidement l'alternative : si des elements par-
lent contre Rome et pour l'Orient grec, i considerequ'i s appuient
la these de l' Asie mineure.
Encore une remarque sur un point precis: Bremmer mentionne
(p. 12 et note 38) des ecturessymboliquespossiblespour Ie miracle
de la resurrection du hareng (ch. 13). Je trouve etrange qu'il ne
pense pas a la resurrection du Christ symbolise par Ie poisson. Si
c'etait la Ie sensdu prodige, on comprendrait mieux ce qui semble
surprenant a Bremmer, c'est-a-dire que precisement ce miracle
amene les gens a croire. Pierre affirme deux fois que Ie hareng
(sarda) va nager "comme un poisson", ce qui est etrange, s'agis-
sant en fait d'un poisson, mais qui s'expliquerait comme une sorte
de signal que Ie hareng doit redeveni vivant comme Ie IXeYI =
Christ. A cela s'ajoute Ie fait que Pierre fait nager e poissonpen-
dant longtemps ne diceretur fantasma esse;cela est sans doute
coherent avec un trait qui reviendra dans l'episode de la resur-
rection du eune homme au ch. 28, c'est-a-dire que Ie vrai miracle
se distingue de la magie aussiparce qu'il produit un effet durable;
mais on est frappe par la ressemblanceavec certains recits d'ap-
parition du Christ ressuscite,deja courants au debut du lIe siecle,
qui se preoccupent de souligner qu'il ne s'agit pas d'une simple
apparition 1°. I est d'ailleurs bien connu qu'une histoire analogue
se trouve, sous a forme d'un miracle de l'enfant Jesus,dans un
petit cycle de prodiges qui a ete ajoute au debut de certaines ver-
sions recentes des Faits de l'enfance du Seigneur (couramment
9. G. POUPON,Actes de Pierre", in F. BOYaN -P. GEOLTRAIN, d.,
Ecrits apocryphes chretiens (Bibliotheque de la Pleiade), 2e ed., Paris
1998,p. 1039-1114,ci 1043.
10. Lc 24,37-39; a Doctrina Petri ( ) citee par Origene, Princ. 1, praef.,
8, et sans doute deja par Ignace d' Antioche, 8m 3,2 (repris par Eusebe,
Hist. eccl. 3,36,11, dont depend Jerome, Comm. in Es. 1,18, prol.; Vir.
ill. 16); on petit aussi rappeler que Tertullien utilise Ie mot phantasma
en discutant l'interpretation marcionite de Lc 24,37-39 en Adv. Marc.
4,43,6-8.On pourrait encore ajouter que leg personnespresentes offrent
du pain au poisson (cf. Ie repas de pain et poisson prig par Ie Ressuscite
avec leg disciples en Jn 21,13); et que ceux qui ont cru a cause de ce
miracle se reunissent our et nuit dans a maison du presbytre Narcisse,
oil Pierre leur explique leg Ecritures prophetiques et leg paroles et leg
faits de Jesus; Ie miracle debouche donc directement sur tine catechese
christologique, ce qui pourrait confirmer sa signification christologique.
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UR LES AcrES DE PIERRE
appelesEvangile de 'enfance de Thomas) ; il doit y avoir un rap-
port entre les deux episodes,et, comme 'essaiede Ie montrer dans
un travail sous presse, celui dont Jesus est Ie protagoniste fait
vraisemblablement allusion a sa resurrection. Lorsque Bremmer
mentionne ce miracle de Pierre danssa section sur a magie (p. 12)
il n'y repere visiblementpas d'elementsmagiques;comme e viens
de Ie rappeler, cet episode s'apparente a celui du ch. 28 par sa
volonte de souligner que Pierre n' estpas un magicien. Ce miracle
est opere parce que la foule demande un signe qui contrebalan-
cerait es signesde Simon (ch. 12, in) ; dansune situation analogue
de demandede signes,Jesusavail repondu que sa generationn'au-
fait que Ie signe de Jonas (Mt 12,39-41 par; 16,4); Pierre, lui,
accorde un signe: mills ne s'agirait-il pas, d'une certaine maniere,
d'un "signe du signe de Jonas"?
II. Je passeala quatrieme contribution, intitulee "Simon Magus
as a Narrative Figure in the Acts of Peter" (p. 39-51), oil Gerard
Luttikhuizen accepte la these de Harnack et de Vouaux sur Ie
caractere secondaire des ch. 1-3 et 41, mais se declare sceptique
sur la proposition ulterieure de Poupon, d'apres lequelle ch. 30
serait aussi un ajout, et les ch. 4, 6, 10 contiendraient des rema-
niements concernant surtout la figure de Marcellus et destines
essentiellement a affirmer qu'il y a indulgence pour ceux qui se
repentent. La severite de Paul a l'egard de Rufina au ch. 2, appar-
tenant aux ajouts, ne contredirait pas vraiment cette intention,
affirmait Poupon12, ui, dans sa traduction, a intitule Ie discours
de Paul apres a paralyse de la femme "Le pardon des fautes"13;
maisW. Rordorf communiquedansune note du volume ci recense
(p. 182 note 13) un passaged'une lettre personnelle de Poupon
soulignantque la rigueur de Paul "detonne" et poussea se deman-
der s'il n'y aurait la la reprise eventuel1ed'un episode perdu des
Actes de Paul. En tout cas, selonLuttikhuizen, les parties des APt
consacreesau conflit entre Pierre et Simon ne revelent pas une
11. On peut Ie lire en latin dans K. VONTISCHENDORF,vangelia apo-
crypha, Lipsiae 21876, eimpr. Hildesheim [etc.] 1987,p. 164-165; en
grec, dans A. DELAlTE, Anecdota Atheniensia. Tome I,' Textesgrecs
inedits relatifs a l'histoire des religions (Bibliotheque de la Faculte de
philosophie et lettres de l'Universite de Liege 36), Liege / Paris 1927,
264-271 "Evangile de l'Enfance, de Jacques"),p. 264, ignes 9-14. Voir
S. J. VOICU,"Verso il testo primitivo dei naLbLK<l tou K'UpLou'IT]<Jou
'Racconti dell'infanzia del Signore Gesu"', in Apocrypha 9 (1998) 7-95
(traduction de ce texte, avec es variantes,p. 63).
U. "Les 'Actes de Pierre' et leur remaniement", p. 4379.
13. Ecrits apocrypheschretiens, . 1056.
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E. NORELL]
tendance encratite; leur theme est 'apostasie de la communaute
chretienne de Rome suite a l'activite de Simon, et son retour a la
foi grace a Pierre. Ce fecit se fonderait donc precisement sur Ie
presupposeque Ie pardon des autes, meme gravescomme 'apo-
stasie, est possible. Le caractere clairement encratite des recits
concernant a fille de Pierre14et la fille du ardinier5 arneneLut-
tikhuizen a douter que ces deux episodes aient appartenu a l'ori-
gine a la meme narration que Ie conflit entre Pierre et Simon.
En outre, Luttikhuizen souligne que la dispute dans Ie Forum
n'arnene pas ala defaite de Simon; quelques ours plus lard, celui-
ci se presente de nouveau, et un deuxieme conflit avec Pierre a
lieu, aboutissant ette fois a l'elimination definitive de Simon.D'ou
l'hypothese (voir p. 51) que Ie texte actuel resulterait de la com-
binaison de deux recits independants a l'origine: 1. un fecit des
affrontements entre Pierre et Simon, qui se serait ermine par leur
dispute finale dans Ie Forum; 2. un fecit du martyre de Pierre,
introduit par d'autres episodesavec Simon, et destine a opposer
la mort insignifiante et miserable de Simon au martyre heroique
de Pierre. La reunion, secondaire,des deux recits aurait provoque
l'elimination de la defaite de Simon au Forum. Meme si Luttik-
huizen ne Ie dit pas explicitement, sesallusions au caractereencra-
tile du Martyre (p. 40 et p. 41 n. 7) semblent mpliquer que, pour
lui, les deux episodesconserves part auraient pu, a l'origine, aller
avec ce dernier.
Cette theseseprete, a mon avis,a plusieurs emarques.D'abord,
l'argument de Luttikhuizen contre Poupon neglige un element
fondamental de la these de ce dernier: Ie theme de l'apostasie,
du repentir et du pardon est lie surtout au personnage de Mar-
cellus; or, des incoherencesdans Ie texte arnenent a penser que,
dans Ie fecit primitif, Marcellus n'etait pas chretien lorsqu'il a
accueilli Simon, et qu'il ne Ie devenaitque gracea Pierre; d'autres
14. Conserve dans Ie codex de Berlin BG 8502,p. 128-141: on peut en lire Ie
texte corte dans D. M. PARRO'IT,Nag Hammadi Codices V 2-5 and VI with
Papyrus BeroL 8502,1 and 4 (Nag Harnrnadi studies 11), Leiden 1979,p. 478-
493; trad. franc;:aiseavec commentaire par M. TARDIEU, Ecrits gnostiques.
Codex de Berlin (Sources gnostiques et manicheennes 1), Paris 1984,p. 217-
222.403-410; trad. froaussi dans Ecrits apocryphes chretiens,p.l049-1052.
15. De cet episode qui, comme Ie precedent, devait appartenir a la premie-
re partie des APt, perdue pour nous, un resume a ete conserve par la Lettre
du Pseudo-Tire, un apocryphe latin d'origine probablement priscillianiste;
texte dans D. De BRUYNE, Epistula Titi, discipuli Pauli, de dispositione
sanctimonii , Rev Ben 37 (1925) 47-72; aussi VOUAUX, Les Actes de Pierre,
p. 38-40, avec traduction; trad. aussi dans Ecrits apocryphes chretiens,
p. 1053. Augustin, Contre Adimantus 17,5, fait allusion aux deux episodes.
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...
SURLESAcrES DE PIERRE 233
traits semblent attester que Ie redacteur a voulu aussi souligner
la gravite de la crise de la communaute16. L'apostasie de la com-
munaute et son pardon n'auraient donc pas ete vraiment Ie theme
principal du conflit entre Pierre et Simon sous sa forme premiere.
En outre, rien ne me semble indiquer que l'intention primitive
du Martyre etait d'opposer la mort de Simon et celIe de Pierre17.
Surtout, une these de ce genre demanderait a etre fondee sur des
analyses litteraires, qui devraient largement porter sur leg ch. 31-
32, oil de nombreux elements se rattachent a la narration prece-
dente; il faudrait y trouver leg traces de la combinaison des deux
recits, ce que Luttikhuizen ne fait pas18.
Quelques autres considerations pourraient amener, de fa~on
plus positive, a trouver une coh~rence dans l'ensemble du fecit
(conflit avec Simon et martyre de Pierre).
Je pars d'un difficile probleme textuel au ch. 4, que Luttikhui-
zen mentionne a la p. 42. Les chretiens de Rome, ayant entendu
parler de Simon qui est a Ariccia, se demandent s'il est Ie Christ,
evoquent ses prodiges (qui, dans Ie texte actuel, sont attribues a
Paul; mills leg savants admettent en general que la mention de Paul
est interpolee), et remarquent: haec autem quaerit dimicationes,'
scimus.. non enim minima motio nobis facta est. Tout en gardant
Ie texte du manuscrit (p. 48, lignes 25-27 de son edition), Lipsius
mentionne dans l'apparat la proposition de correction de Bonnet:
haec autem quae sit dimicatio nescimus,' non enim minima notio
nobis facta est. Vouaux (p. 246.248) prefere la seule correction de
haec en hic et traduit: Pour celui-ci (Simon~'il cherche des que-
relIes; nous Ie savons; car ce n'est pas un trou~le peu profoIid qu'il
a souleve en nous (p. 247.249). Cependant, une telle attitude cri-
tique des chretiens de Rome a l'egard de Simon ne s'acco1'de pas
bien avec Ie fait que la plupart d'entre eux vont bientot Ie suivre.
Comme Ie rappelle Luttikhuizen, Poupow9 a propose haec autem
quae sit dei uocatio nescimus ..non enim minima monilia nobis facta
..
16. POUPON,Les 'Actes de Pierre' et leur remaniement , surtout p.
4373-4377.
17. II n'y a aucune allusion a cela; les deux genres de mort ne pr6sen-
tent aucun paral16lismeantith6tique; Ie discours de Pierre sur la croix
developpe de tout autres themes.
18. Le seul argumentque Pon attendrait a defaite de Simon a la fin de la
dispute dans e Forum est nsuffisant,et il se onde sur tiDe mpressionsub-
jective, sur une pre comprehension de ce que Ie fecit aurait dfi etre.
Apres tout, dans les Actes de Luc, sans doute connus de notre auteur,
P6pisodede Simon n'aboutit pas non plus a sa iquidation.
19. Les 'Actes de Pierre' et leur remaniement , p. 4373 et n. 52.
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E. NORELLI
est, qu'il ne traduit pas, mais doni la premiere partie devrait signi-
fier nous ne savons pas de quel genre est cet appel a Dieu2O .
Dans sa traduction pour leg Ecrits apocryphes chretiens (que Lut-
tikhuizen n'a vraisemblablement pas pu voir a temps), Poupon
adopte encore une autre correction pour la premiere partie: haec
autem quae sit imitatio nescimus, et traduit: Et celui-ci est une
imitation de Dieu que nons ne connaissons pas, car nons n' en avons
pas ete du tout avertis 21. Ce que Luttikhuizen retient de celie
phrase, c'est que leg chretiens de Rome affirment n'avoir jamais
entendu auparavant cette designation de dei virtus.
Je me demande s'il n'y a pas une possibilite de revenir a la cor-
rection de Bonnet, qui est ires economique et explique bien l'ori-
gine du texte actuel. En effet, cette declaration des chretiens de
Rome me rappelle Es 7,13, que leg premiers chretiens citaient
volontiers avec Ie celebre 7,14 voici que la vierge concevra... . Es
7,13b dans la Septante a la forme suivante : ~i1 ~LKpOvV~LVayo>va
napEXELv v8pronoL£;Kat nw~ Kupi~ napEXE'tEaywva; Les auteurs
chretiens anciens ant volontiers vu dans ce verset une prophetie
des debats entre leg humains que la naissance virginale allait pro-
voquer; et si, dans la Septante, ce soot clairement leg humains
qui veulent mettre Dieu a l'epreuve, dans leg recritures et leg relec-
tures chretiennes, ce testimonium fut souvent modifie dans Ie gens
que c'etait Dieu qui mettait a l'epreuve leg humains, en suscitant
parmi eux des disputes suite a ce prodige22. Or, en APt 24, ce tes-
timonium d'Es 7,13-14 est cite explicitement parmi leg testimonia
sur la naissance virgin ale, sons la forme non minimum praestare
vobis agonem; ecce n utero concipiet virgo23.Comme je l'ai remar-
que ailleurs24, l est possible que l'auteur ait vu la realisation de Es
20. au: cette appellation divine que s'attribue Simon (la Grande
Puissance) ? Elle est mentionnee uste avant.
21. Ecrits apocryphes chreliens,p. 1059avec a note I; pour la deuxieme
partie il a evidemment garde monilio.
22. C'est ce que montrent les citations du verset dans 'ancienne version
latine d'lrenee (Adv. haer. 3,21,4: non pusillum vobis agonempraebere
hominibus, et quemadmodum Dominus praestat agonem?) et dans
I' Afra de Es 7,13 non pusillum vobis certamen cum hominibus, quo-
niam Deus praestat agonem. D'ailleurs, Cyprien, Epist. 10,4, montre
qu'Es 7,13 pouvait s'appliquer plus generalement a des conflits soute-
nus par des chretiens au sujet de leur foi.
23. Que LIPSIUSp. 72), n'ayant pas reconnu Es 7,13, avait eu tort de
deplacer a premiere partie a la fin du chapitre 24, a ete deja remarque
par VOUAUX,Les Actes de Pierre,p. 368.
24. E. NORELLI, Avant Ie canonique et I'apocryphe: aUKorigines des
recits sur la naissance de Jesus , RThPh 126 (1994) 305-324, sur ce
oDint 31R.
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UR LES AcrES DE PIERRE
7,13 precisement dans Ie conflit entre Pierre et Simon dans Ie
Forum. En APt 4, les mots dimicatio et non... minima semblent
bien rappeler ce testimonium25. n somme,c'estcomme si l'auteur
utilisait Es 7,13 une fois (au ch. 24) avec 7,14, a l'interieur d'un
petit recueil de testimonia qu'il a sans doute trouve deja consti-
tue26,a propos de la naissancevirginale de Jesus; et une autre
fois (au ch. 4), seulement par allusion, sans rapport avec Es 7,14,
peut-etre sousune forme un peu differente, en tout cas sans ap-
port a la naissance,mais (implicitement) comme prophetie du
conflit que Simon provoque entre les chretiens de Rome au sujet
de son identite: est-ille Christ? Nous avons constate que cette
application plus generate a un combat relatif a la foi est attestee
par Cyprien, et l'utilisation implicite du verset par arigene, Hom.
2 in /saiam 1 va dans Ie meme sens. Si on accepte cette lecture,
on adoptera la correction de Bonnet dimicatio nescimus,mais on
gardera motio, au sensdu "trouble" que represente e debat pro-
voque dans a communaute de Rome par la pretention de Simon,
veritable "mise a l'epreuve", donc avec un sens tout proche de
ayclrv el qu'il etait compris dans es citations chretiennesque nous
avons evoquees.
Ce motif de la motio reprend alors Ie turbatio magna facta est
in media acclesia [sic] du debut du ch. 4; c'est donc ici qu'il faut
25. Certes, on a dimicatio au ch. 4, aEon au ch. 24; mais les occurrences
d'Es 7,13 en Irenee et dans la Vetus latina (texte cite ci-dessus : Cyprien,
Epist. 10,4; Test. 2,9; Tertullien, Adv. Iud. 9,1) montrent qu'Es 7,13 cir-
culait en latin avec aEon (la Vulgate rejoint en revanche Ie la'ah de l'he-
breu: numquid vobis parum est molestos esse hominibus, quia molesti
estis et Deo meo), alors que Ie traducteur latin a bien pu traduire uyrl>v
par dimicatio au ch. 4. Le ch. 24 montre aussi que Ie texte latin d'Es 7,13
connu du traducteur des APt rendait A.TJA.LICpOVar non minimum,
meme formulation qu'au ch. 4, differente de non pusillum d'Irenee et
des Africains. Si Ie A.TJe la Septante est interrogatif, toutes les versions
latines citees ci-dessus en font une negation, comme Ie non... minima
d'APt 4. En outre, Ie non minimum d'APt 24 est compris par VOUAUX
et par POUPON omme neutre, en sous-entendant est,comme c'est Ie cas
dans la Septante; cependant, il pourrait egalement avoir ete compris
par l'auteur comme adjectif accorde avec agonem, me me s'il faut
admettre que dans ce cas l'infinitif praestare reste suspendu ; c'est ce
qui s'est passe dans la forme africaine du testimonium, citee ci-dessus,
ainsi que dans Ie Protevangile de Jacques 20,1, ou Es 7,13 est applique
au debat entre les femmes sur l'accouchement de la Vierge: ou yap
A.LICpO~yOYV tEpLICEL1:aLtEpl GOO ct. VOUAUX, Les Actes de Pierre, p.
369; NORELLI, "Avant Ie canonique", p. 321) ; cette formulation rappel-
Ie singulierement Ie non enim minima motio nobis facta est d' APt 4.
26. Voir" Avant Ie canoniaue". passim.
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E. NORELL]
identifier Ie leitmotiv de ce chapitre. Et qu'il y ait une continuite
entre ce conflit interne a la communautede Rome et Ie conflit que
Pierre menera avecSimon, c'estce qui ressortdu discoursdu chien
au ch. 12,adressea Pierre: Petre,agonemmagnum habebiscontra
Simonem inimicum Christi et servientibus illi,' multos autem
convertesn fidem seductos b eo. Propter quod accipiesmercedem
a deo operis tUl 27.l est clair ici que Ie motif de l'agon est fonda-
mental, et qu'il concerne precisement Ie conflit entre Pierre et
Simon. Bien que Ie retour deschretiens ourvoyes ala foi soit men-
tionne, I'accent n'est pas sur Ie theme du repentir et du pardon,
mais sur la lutte pour gagner es gens aDieu ou a Satan, et sur Ie
fait que celie lutte menera Pierre jusqu'au martyre. En effet, celie
lutte est precisement e theme evoquepar Ie Christ lorsqu'il envoie
Pierre a Rome au ch. 5, en l'informant sur 'activite de Simondans
la ville en ces ermes : omnesenim qui in me crediderunt dissoluit
astutia sua et inergia sua satanas,cuius uirtute se adprobat esse.
Influence sansdoute par Ie fait que Simon est e sujet de la phrase
precedente,et que la mine de la communaute omaine est e resul-
tat de son activite, Luttikhuizen traduit cette phrase de la fa<;on
suivante (p. 45) : all who believed in me he has perverted by the
cunning and the power of Satan,whose agenthe proves to be . Il
n'a donc pasgarde Satan en fonction de sujet, commedans e latin.
Cela a-t-il de l'importance, au-dela de la precision philologique?
Je crois que Qui Ie texte veut souligner que l'activite de Simon est
l'activite de Satan.Mais alors nous sommes ci tres prochesde l'at-
tente de l'avolJ.o£: n 2 Thess2,9-10. Autrement dit, Simon, venu
fourvoyer les croyants par sesprodiges, est 'adversaire eschato-
logique dans equel s'incarne Satan, l estune sorte d' Antechrist.
Ceci explique parfaitement 'importance du debut de APt 4, oil les
chretiens de Rome soulignent es guerisonsque Simon a accom-
plies28et se demandent: Numquid ipse est Christus? Du coup,
1'« agon» entre Pierre et Simon acquiert es caracteresdu conflit
des derniers temps entre Ia force antechristique , incarnation
de la puissance du mal, et Ie prophete eschatologique envoye
27. Comme e Ie dirai plus loin, Christine THoMAS stime que ce discours
du chien est l'reuvre de la personne responsablede la reunion des epi-
sodes separes qui ont precede la composition des APt. En tout cas, l
appartiendrait a la premiere forme de I'ouvrage entier, et l'hypothese de
THoMASne ferait que confirmer combien ce theme tenait a creur a cet
auteur.
28. Pour les guerisonsde I' Antechrist, cf. p. ex. Apocalypse d'Elie 3,9.
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UR LES AcrES DE PIERRE
par Dieu29. La perspective que j'ai proposee ici explique pourquoi
l'affrontement dans Ie Forum n'aboutit pas a l'elimination de
Simon, mais a la confrontation, toute au detriment de Simon,
autour de la resurrection du jeune senateur3°.
J'ai souligne autrefois que les traditions liees au nom de Pierre
au lIe siecle semblent avoir accorde beaucoup d'importance au
theme de l' Antechrist, et avoir encadre Ie martyre de Pierre dans
un schema eschatologique ou sa mort SallSNeron represente l'ou-
verture de la crise eschatologique31. Les APt pourraient etre
influences par cette tradition, d'ailleurs combinee ici avec les tra-
ditions sur Ie conflit entre Pierre et Simon; cela aurait contribue
au transfert sur Simon des traits antechristiques attribues ailleurs
a Neron32. En ce cas, on comprendrait mieux pourquoi, defiant,
comme on l'a toujours remarque, toute vraisemblance chronolo-
gique, les APt font entrer en scene Neron immediatement apres
Ie martyre de Pierre (ch. 41). En effet, d'apres notre texte, ce der-
nier evenement dechaine la persecution de Neron contre les chre-
tiens, persecution qui est arretee par des coups et un avertissement
celeste qu'il re~oit une nuit. Cette voix lui dit entre autres: tu n'as
pas Ie pouvoir maintenant (vUv) de persecuter ou de faire mourir
les serviteurs du Christ 33. Neron, effraye, s'abstient de toucher
aux disciples a l'epoque ou (EKELVq>t<9K<XLP<9<x8' ov) Pierre
quitta cette vie . Poupon pense que res deux precisions chrono-
29. Comme Ie declare Ie chien au ch. 12, Pierre ramenera a la foi de nom-
breuses personnes seduites par Simon, mais pour cette raison (propter
quod) il subira Ie martyre. Certes, Pierre l'emportera d'abord sur Simon,
qui sera definitivement elimine avant lui, et lors de la mort de Pierre l'apo-
stasie ne sera pas a son comble ; en cela, il aura eu apparemment plus de
succes que les deux prophetes eschatologiques envoyes affronter la bete
en Ap 11 (dont Ie sort s'explique par la situation de souffrance et de mar-
lyre des chretiens envisagee par Jean).
30. En effet, si certains admettaient que parmi les prodiges de l' Antechrist
il y aurait la resurrection des morts (ainsi 01: Sib. 3,66), d'autres voyaient
la precisement la seule limite a ses miracles, et donc Ie critere qui per-
mettrait de Ie distinguer du Christ: 11 ela les choses que l'Oint a faites,
excepte la resurrection des morts. C'est a cela que vous connaitrez qu'il
est Ie Fils de l'Iniquite, car il n'a pas de pouvoir sur l'arne (Apocalypse
d'Elie 3,10-11, trad. J.-M. ROSENSnEHL n A. DUPONT-SOMMERM. Pm-
LONENKO,ed., La Bible. Ecrits intertestamentaires (Bibliotheque de la
Pleiade], Paris 1987, p. 1814). En somme, l'affrontement dans Ie Forum
aboutit a la demonstration que Simon n'est pas Ie Christ, mais l' Antechrist.
3L E. NORELLI, Situation des apocryphes petriniens , in Apocrypha 2
(1991) 31-83, sur ce point surtout 39-41.
32. cr. Ascension d'Esai e 4,2-4; Apocalypse de Pierre, fragment Rainer.
33. Trad. POUPON,Ecrits apocryphes chretiens, p. 1114.
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NORELLI
logiques signifient que, pour cet auteur, e martyre de Pierre serait
anterieur a la persecution neronienne et separe d'elle34.Cela est
tout a fait possible; mais il s'agirait a ma connaissanced'un uni-
cum et ceci ne s'accorderait pas avec Ie fait que, d'apres Ie lexie,
Neron a deja commence a exterminer leg chretiens et qu'il s'ar-
rete suite a la vision. Pourrait-on suggererune autre explication?
Ce maintenant ne s'opposerait pas a la persecution neronienne
de 64 (a laquelle ce ch. 41 ferait alors allusion, soulignant qu'elle
n'a pas pu deraciner la communaute romaine), mais a celIe que
dechaineraitNeron lors de son retour commeAntechrist, un theme
explicite dans ' Ascensiond' Esaie ch. 4) en rapport justement avec
la mort de Pierre35.
11 audrait etudier comment leg thematiques christologiques,
notamment la resurrection, sont rises en rapport avec celie pers-
pective eschatologico-apocalyptique36.En tout cas, sans vouloir
nullement DieTdes ajouts et des remaniements (les propositions
de Poupon me semblent tout a fait defendables), une coherence
entre leg affrontements de Pierre et Simon, la mort de Simon et
34. Ibid., note F.
35. Certes,notre texte ne contient aucun element explicite allant dans ce
sens,mills on petit admettre qu'it a herite des elements de traditions liees
au nom de Pierre. Sur ce point, it taut cependantBtre prudent, parce qu'en
general, on decele dans ce ch. 41 des elements qui viendraient des Actes
de Paul, et on 'attribue au remaniementdes APt; c'estce qu'admet mBme
W. RORDORFvoir ci-dessous) n faisant exceptiona sonscepticismequant
a la dependancedes APt par rapport aux Actes dePaul. 11Testedonc pos-
sible que cette insertion de Neron soit due a un redacteur ulterieur. 11me
semble en tout cas que les considerations ci developpees llustrent l'op-
portunite de tenir compte de l'importance de certains complexesde tradi-
tions, qui ont pu influencer differents ecrits. Quoi qu'il en soit, it semble
qu'it y fit quelques aisons pouressayerde comprendre esAPt sous 'angle
du conflit eschatologique, ont I' enjeu est e salut ou a perdition de la com-
munaute chretienne, et dont les acteurs sont, sur la terre, les envoyes de
Dieu et de son adversaire,ces demiers etant les antagonistes eels. 11ne
seraitd'ailleurs pas rop difficile de repererd'autres hemeseschatologiques,
par exemple Ie motif de la tentation generalisee au ch. 6, a mention de
celui qui temptat orbem terrarum per angelosSUDScf. Ap 12,9), au ch. 8
l'invective de Pierre contre Satanavec a prediction de sadefaite mminente
(extinguerisa servisdomini nostri Iesu Christi; et: lupe rapax, mBmedesi-
gnation que pour les faux prophetes des derniers emps en Mt 7,15).36.
D'ou l'importance de la resurrection du hareng et des trois resurrec-
tions des ch. 25-28; LUTfIKHUIZEN,p. 50, pense qu'une ou deux resur-
rections ont ete ajoutees au courant de la transmissiondu texte, mais cette
idee ne semble pas tenir compte de l'importance du theme de la resur-
rection dans cet ecrit.
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239UR LES AcrES DE PIERRE
Ie martyre de Pierre pourrait apparaitre (contre l'avis de Lutti-
khuizen) sur Ie plan de la caracterisationde Simon comme Ante-
christ (son ascension,en tant qu'imitation de l'ascensiondu Christ,
rentre bien dans ce tableau) et de la contextualisation de la lutte
entre Pierre et Simon dans un schemaeschatologiqueparticulie-
rement present dans des traditions de type petrinien .
m. j'en viens a la contribution de Christine M. Thomas, Revi-
vifying Resurrection Accounts: techniques of composition and
rewriting in the Acts of Peter cc. 25-28 (p. 65-83)37.Elle avait
publie dans Apocrypha 3 (1992) 125-164une etude originale et
interessante ntitulee Word and Deed: the Acts of Peterand Ora-
lity , oil elle essayait de sortir de l'impasse dans laquelle on se
retrouve lorsqu'on essaie d'expliquer la genesedes Actes apo-
cryphes et leur relations reciproques a partir d'un modele fonde
exclusivement ur 'ecriture (Quellenforschung lassique)ou exclu-
sivement sur 'oralite38.Cette approchese poursuit dansune autre
contribution de Christine Thomas sur les APt qui vient de
paraitre39.En bref, Christine Thomas y reconstitue Ie processus
suivant : une premiere etape aurait vu l'existencede plusieursuni-
tes narratives autour de la personnede Pierre et de quelquesautres
personnages du premier siecle (Simon Ie Magicien, Neron,
Agrippa, Marcellus) ; elles auraient ete transmises en partie ora-
lement, en partie sous orme ecrite. Caracteristiquede cette phase
creative et expansive serait la coexistence de versions mul-
tiples d'un meme recit de base, des multiforms selon a termi-
37. MIne THoMASannonce a publication d'un livre sur les APt (p. v) :
The Beginnings of Christian Romance: The Acts of Peter, he Ancient
Novel,and Early Christian History (1998). Cet ouvragene semblepas etre
paru au moment ou je corrige les epreuves.
38. Elle avait argumente en faveur d'un modele mixte, qui presuppose ine
coexistencede culture orale et de culture ecrite dans ' Antiquite. Par des
analysesd'ordre litteraire, fondees sur les recherches de POUPON,lle
essayaitde montrer qu'au niveau de l'ecriture, un auteur avait compose
tine premiere forme des APt en reunissant es histoires de Marcellus,de la
lutte entre Pierre et Simon et du martyre de Pierre; un redacteurulterieur
auraitmodifie ce texte en developpante themede 'apostasieet de a repen-
tance et ajoutant es referencesa Paul. Mais l'reuvre ressortirait ausside la
tradition orale,dans a mesureou elle contientdes ormes differentesd'une
meme structure narrative, comme es deux histoires de la fille de Pierre et
de la fille du jardinier, ou les trois recits de resurrectiondes ch. 25-28.
39. The 'Prehistory' of the Acts of Peter , in TheApocryphal Acts of he
Apostles. Harvard Divinity School Studies, d. by F. BOYON, . GRAHAM
BROCK, . R. MATTHEWS, ambridge, Mass., 1999,p. 39-62.
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E. NORELLI
nologie d' Albert Lord, adoptee par Thomas4°.Une deuxieme
etape aurait ete celIe de la reunion de cessegmentsen une narra-
tion ecrite suivie, on les multiforms sont raites comme des eve-
nementssepares41.roisiemeetape la redactionpostuleepar Pou-
pOll, consistant essentiellementdans l'ajout des ch. 1-3 actuels et
dansdes remaniements notamment en 4, 6, 10,41) destinesa faire
de l'adhesion a Simon une apostasiede la communautechretienne
de Rome, alors que, dans a forme precedente, c'etaient les poly-
theistes omains qui suivaient e Magicien et qui seulementensuite
devenaient chretiens grace a Pierre42.Enfin, l'elimination de la
premiere partie du fecit, pour Ie faire commencerpar Ie depart de
Paul en Espagne, aurait eu lieu sur a version atine, plus precise-
ment par Ie scribe meme du manuscritde Verceil (VIe-VIle siecle),
qui aurait voulu l'harmoniser avec les Reconnaissances seudo-
40. On en retrouverait encore leg traces en ce qui nous Testedes APt:
deux maris a qui leurs emmes se refusent suite a la predication de Pierre
sont a l'origine du martyre de celui-ci (ch. 33-34); Simon vole deux fois
sur Rome (ch. 4 et 32); trois resurrections de jeunes hommes (ch. 25-
28); deux vierges paralyseespour en preserver a virginite (BG 8502 et
lettre du Pseudo-Tite).
4L On peut encore deceler,selon THoMAs, eg souduresdes episodes,par
ex. dans Ie discours direct du chien au ch. 9, qui vient s'ajouter a un dis-
COUTSndirect et qui ette un pont veTSa future lutte entre Pierre et Simon
et Ie martyre de l'apotre. Cette operation aurait ete realisee vraisembla-
blement en Asie mineure (THoMAs accepte es arguments de FICKER),
veTSe milieu du lIe siecle.
42. II taut cependant remarquer que THOMAS e rend pas exactement
compte de la penseede POllaN lorsqu'elle lui attribue (p. 44-45) 'idee
que c'est seulement ce redacteur qui a introduit l'existence d'une com-
munaute chretienne a Rome avant a venue de Pierre; POUPONdmet bel
et bien qu'il y avait une communaute a peine organisee dans es Actes
primitifs, avant a venue de Pierre et meme avant celIe de Paul; Ie redac-
teur en aurait transforme la chute en une veritable apostasie ; c'est seu-
lement Marcellus qu'il a transforme de polytheiste en chretien (cf. Pou-
paN, Les 'Actes de Pierre' et leur remaniement , p. 4374-4380).THOMAS
se demarque d'ailleurs de POUPON ur leg points suivants: on ne peut
pas demontrer que Ie ch. 30 est un ajout de cette redaction; ce redacteur
n'a pas elimine tout ce qui, a l'origine, precedait Ie ch. 4 actuel (c'est-a-
dire les recits sur Pierre et Simon a Jerusalem),mais il a ajoute les ch. 1-
3 au milieu de la narration, pour introduire la figure de Paul. Cette phase
peut se situer elle aussien Asie mineure,peut-etre avant a fin du lIe siecle
(POUPON:premieres decennies du IIIeme): une lettre de Denys de
Corinthe ecrite veTS170 (Eusebe, Hist. eccl. 4,23,6), encourageant a
accueillir leg apostats et les heretiques repentants, revelerait des preoc-
cupations analogues a celles du redacteur. D'ailleurs, ce theme theolo-
gique etait deja present dans a forme primitive des APt, notamment par
l'evocation des anciennes autes de Pierre.
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clementinesqui Ie precedent mmediatementdans e codex (c'etait
deja une proposition de Schmidt)43.Si une partie de l'argumenta-
tion de Thomas est sujette a caution44, ans 'ensemble, sarecons-
titution de la prehistoire des APt, avec son effort original d'arti-
culation entre l'oralite et l'ecriture, represente desormais une
position avec aquelle toute recherchesur es APt devra se confron-
ter.
L'article de Thomas contenu dans e presentvolume vise a illus-
trer Ie modele de l'interaction entre tradition orale et ecriture par
l'exemple de l'un des multiforms qu'elle avait deja indiques : les
trois recits de resurrection des ch. 25-28. Ene pose d'abord avec
clarte les questions de methode: faut-il entendre l'intertextualite
seulement en termes de reproduction/transformation de textes
ecrits? Lorsqu'on etudie des textes apparentes,mais ecrits a des
dates differentes, ne faudrait illes liberer from the tyranny of the
earliest source , de sorte que the later texts appear not as mere
different later versions of the tale (...), but as different later ver-
43. THOMAS oit un argument en ce sensdans a maniere dont est ntro-
duite, au ch. 17, 'histoire d'Eubule, un episode du contlit entre Pierre et
Simon que Pierre evoque comme ayant eu lieu a Jerusalem: l'apotre
raconte avoir fait fuir de Judee Simon morantem n Iudaea ad quandam
mulier Eubola, honesto nimis in saeculohoc. Ce nominatif, fautif dans
Ie contexte actuel, ndiquerait que quelqu'un a insere ici cet episode (qui
se trouvait a l'origine, comme on l'a reconnu depuis longtemps,dans a
premiere partie du fecit se deroulant a Jerusalem), conservant outefois
a la mention d'Eubule Ie casnominatif qu'elle aurait eu dans sa position
primitive, ou l'episode etait raconte par un narrateur impersonnel et
n'etait pas presentecomme un souvenirde Pierre; evidemment, ette ope-
ration a dfi etre faite a partir d'un texte latin, parce que si Ie redacteur
avait en meme temps traduit du grec, il aurait sans doute compose a
phrase avec Ie cas correct.
44. Les elements rappeles dans la note precedente ne permettent pas
d'aboutir a des conclusions de la portee de celles auxquelles arrive
THOMAS. e lier du mot mulier a ete ajoute dans Ie manuscrit par un
deuxieme scribe (voir l'apparat de LIPSIUS,. 63); iln'a donc pas ete ecrit
au nominatif par Ie scribe principal, qui serait, selon THoMAs, e respon-
sable du transfert du nominatif de sa position primitive; cette desinence
de nominatif a dfi etre influencee par Eubola qui suit (compris comme un
nominatif) et on ne peut donc pas l'utiliser comme argument. Quant aux
mots Eubola honesta a ou il faudrait Eubolam honestam,LIPSIUS vertit
dans son ntroduction que saepissimem sub inem uocabuli eicitur , avec
exemples (p. XLII); et que ablatiui et accusatiui requentissima confusio
nullis feTecarceribus cohibetur (p. XLVII-XLVIII), 'autant plus que tres
souvent Ie m final est oris la ou il aurait fallu l'ecrire et il est ajoute la
ou il ne Ie faudrait pas (de nombreux exemplesa la p. XLVIII,en particu-
lief de mots en a/am).
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sions of the tale ? 45Pour repondre a la question, elle examine
deux versions d'un fecit de resurrection appartenanta un contexte
de conflit entre Pierre et Simon, plus tardives que les APt, mais
clairement en rapport avec les episodesdes ch. 25-28 de ce der-
nier texte: Ie Pseudo-Hegesippe,De bello iudaico 3,2 de la 2emoi-
tie du lye siecle (dorenavant PsH), et les Actes de NereeetAchil-
lee, du ye (dorenavant: ANA)46. Ces deux textes ne contiennent
pas trois resurrections, mais une, qui reunit des motifs apparte-
nant aux trois recits des APt, sans cependant es elements claire-
ment redactionnelsdesAPt. Donc, meme s'ils ont connu es Actes
de Verceil a possibility that is quite likely , p. 68), leur utilisation
de cette source n'a pas ete textuelle: ce texte n'a pas ete privile-
gie, mais a ete utilise avecd'autres textes chretiens; il ne s'agit pas
que d'une imitation (ibid.).
Thomas propose d'operer avec a distinction, elaboree par les
formalistes fusses,entre fabula47 et sjuzhefS. Appliquee au cas
en question, cette distinction amene a constater que la tabula est
commune aux trois textes: l'insertion de l'episode dans Ie fecit
d'un conflit entre Pierre et Simon, et les elements cruciaux de
Simon qui fait bouger la tete de l'homme et de Pierre qui en
denonce a ruse. Il s'avere ainsi que les deux temoins les plus tar-
difs sont plus proches de ce que Thomas appelle, en anglais, base
narrative , tandis que Ie temoin Ie plus ancien est plus complexe
et elabore; il est aussi emarquableque es deux autresne contien-
nent pas d'elements qui doivent correspondre aux interets du
redacteur des Actes de Verceil,comme Ie personnagede la mere
du senateuret sa promessed'un don a la communautechretienne,
ainsi que l'engagement a confirmer la liberation des esclavesdu
fils. En somme,Thomas propose de comprendre es processusde
composition dans es APt a l'aide d'un modele de relations inter-
textuelles oil an elastic 'base narrative' would represent a com-
bination of fixed and fluid elements (p. 82) qui seraient reutili-
sesdans Ie sellSd'une expansion ou d'une contraction, selon es
exigencesnarratives de chaque auteur.
45. Revivifying , p. 68; c'est THOMAS ui souligne
46. J'utilise, comme THOMAS,'edition d'H. ACHELIS,Acta SS. Nerei et
Achillei. Texteund Untersuchungen (TV 11, 2), Leipzig 1893. Le texte
latin se lit dans es Acta Sanctoruma la date du 12 maio
47. C'est-a-dire la suite chronologique et Iogique des elements d'un fecit.
48. Ce terme, que THOMASend par storyline,designe I'organisation de
Ia tabula dans un texte concret, qui implique une restructuration et une
redistribution de Ia sequencechronoIogique et Iogique.
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Cet essaise prete a quelques remarques.11y a tout d'abord un
certain flou dans a description des relations entre les trois textes
en question, et l'avis de Thomas au sujet desrelations reciproques
des rois documents n'apparait pas res clairemenr9. La notion de
base narrative est aussi rompeuse.Thomas reconnait qu'il s'agit
d'une abstraction que nons construisonsa posteriori, a partir des
trois textes en question (p. 80-81), et elle la definit comme the
narrative elements, details, and motifs that were available to the
individual authors (p. 82). Logiquement, donc, cet ensemble,
certes assezluide, estenvisagecomme anterieur aux auteurs ndi-
viduels. Mais alors il est difficile de comprendre comment, une
demi-page plus loin, Thomas pent affirmer que the 'base narra-
tive' that describes he family resemblancebetweenvarious mul-
tiforms of a story, although by definition the simplestpossiblever-
sion, may be neither the earliest nor the most original (ibid.).
Ici, the basenarrative , quoi qu'en dise Thomas, est devenu 'une
desversions attestees u recit (dans e cas en question,celIe du PsH
ou des ANA par opposition a celIe des APt, qui ne serait pas the
base narrative ).
D'autre part, Ie modele de tradition orale adopte par Thomas
seronde, entre autres, sur es multiforms , les versionsdifferentes
d une meme narration de base : les trois resurrections des Actes
de Verceil en representeraient un exemple. Or, pour localiser ces
multiforms la 0\1 ls doivent l'etre, c'est-a-dire dans a tradition
orale, Thomas doit admettre que l'auteur des Actes de Verceil a
deja CODOnrois versions,orales ou ecrites, d'un seul recit de resur-
rection; il (ou elle) les aurait gardeesdistinctes et les aurait com-
pie ees par des elements redactionnels (p. 80). A la p. 81, Tho-
49. THOMAS,e l'ai rappele, ecrit d'abord qu'il est tres probable que Ie
PsH et es ANA aient connu es Actesde Verceil,et, immediatementapres,
qu'il faut explorer la possibilite qu'ils aient connu un texte des APt (c'est-
a-dire autre chose que les Actes de Verceil?,p. 68). Plus loin (p. 74), elle
ecrit que Ie PsH et les ANA sont des adaptations des Actes de Verceil,
apres avoir defini une adaptation comme a rewriting of the text of one
document by another : elle admetdonc ci clairement qu'il y a une depen-
dance itteraire de ces deux textes par rapport au recit ecrit des Actes de
Verceil.Mais quatre pagesplus loin (p. 78) elle affirme que Ie PsH et les
ANA sont en meme temps later reworkings of the APt (APt = Actes
de Verceilou non ?) et evidence of a simpler base orm of the story com-
mon to all three texts , de sorte que their knowledge of the Actus Ver-
cellenses an neither be asserted nor denied ; en somme, the issue of
dependenceamong hese hree documents s a non liquet situation. If not
dependent on the Actus Vercellenses,he later versions might just as well
know its sources, or the earliest version did have these as well (ibid.).
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E. NORELLI
mas parle me-me e "trois sources" desrecits de resurrection dans
les APt. Mais ala p. 82,elle affirme que "les Actesde Verceilcreent
trois unites narratives completes sur la base de cet unique com-
plexe de structures et de motifs" (correspondanta "the base nar-
rative")50.
Dans l'ensemble, cesaspectsproblematiques de la contribution
de Thomas resultent des insuffisances de son approche. II n'est
possible de mentionner ici que quelquespoints51.L'identification
d'une "narration de base" presentedeja desdifficultes. Retrouve-
t-on vraiment dans es recits du PsH et des ANA deselementscor-
respondant aux trois recits desAPt?
En ce qui conceme e PsH, il me sembledifficile de rapprocher
l'adolescens nobilis, propinquus Caesarisdu PsH, de l'alumnus
d' Agrippa (ch. 25), sansdoute un esclave52;l correspondde toute
evidence au eune (puer ) senateurde la troisieme resurrection53.
Pour Ie Teste,aucun element du PsH n' oblige a sortir du troisieme
fecit de resurrection des APt; la restitution du fils a sa mere, mise
en valeur par Thomas, appartient elle aussia ce fecit (Lipsius, p.
75 igne 21). En somme, e fecit du PsH ne peut pas servir comme
temoin de la presence,dans un me-me omplexe narratif de base,
d'elementsque es APt auraientdistribue dans rois recits de resur-
rection. Par ailleurs, Ie PsH montre clairement, a moo avis, une
connaissance e l'ensembledes APt (pas necessairement esActes
50. Je ne m'arreterai pas sur des nexactitudes mineures concernantdes
points qui devraient souligner 'unite de fond du complexe narratif: par
exemple,ala p. 70 il est dit que, dans e PsH,Pierre lui-meme reprend Ie
role qu'assumeAgrippa dans es Actes de Verceil : demasquer a ruse de
Simon. Or, les mots de Pierre cites a cet egard n'ont rien a voir avec
Agrippa, mais correspondent a ceux du meme Pierre dans Actes de Ver-
ceil,28.
5L II est nutile d'insister (parce qu'il s'agit d'une hypothese) sur a cohe-
rence, llustree ci-dessus, ntre Pelementnarratif Ie plus caracteristique
commun aux trois textes (Ie resultat ephemere et trompeur de l'effort de
Simon pour ressusciter e jeune homme) et l'ensemble des APt, a partir
de la presentation mplicite de Simon comme Antechrist, ce qui amene-
fait a penserque cet element est a sa place dans es Actes et que les deux
autres Pont repris de la, et non d'une tradition plus ou moins flottante.
52. Ainsi traduisent, avec raison, VOUAUXet POUPON;e prefet aurait-il
fait tiler un parent de Cesar?
53. Le fait que l'esclave d'Agrippa etait chef aussia l'empereur (ch. 26)
n'est pas equivalent a la condition de parent de l'empereur; cette carac-
terisation par Ie PsH semble plutot un Teste e ce que Ponconsidered'ha-
bitude comme un element chef au redacteurdes APt, la mise en evidence
des relations entre Pierre et des personnages omains de haut rang.
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UR LES AcrES DE PIERRE
de Verceil)54. ertes, e rapport entre Neron et Simon qui apparait
ici ne se retrouve pas dans les Actes de Verceil; mais il doit
dependre de l'influence des etapesde la legendede Pierre et Paul
posterieures a ces Actes,comme Ie montre, entre autres, l'union
des deux saints dans e martyre.
Dans les ANA apparait Marcellus, absent du PsH: c'est lui qui
ecrit la lettre contenant ce fecit. Celie presence, ainsi que l'his-
toire du chien parlant, montrent a mon avis la dependance des
ANA par rapport aux APt. D'ailleurs, l'auteur des ANA rap-
proche, lui aussi, Simon de Neron et reunit Pierre et Paul dans e
martyre, suggerantun rapprochementavec es deux emoins d' Ap
1155.D'autre part, la connaissancedes anciens APt par l'auteur
des ANA estconfumee par la presence,dans cet ecrit, de l'histoire
de la fille de Pierre, qui noDSest rendue en partie par Ie fragment
copte du BG 8502. Vouaux (p. 156-158)a bien analyse es trans-
formations que les ANA ont fait subir a ce fecit, et les a compa-
fees a celles que Ie fecit de la resurrection du fils de la veuve pre-
sente par rapport aUK esurrections des Actes de Verceil; il en a
conclu que des procedesanaloguessont visibles dans es deux cas.
II aurait ete necessaire ue C. Thomas refassece travail, pour veri-
fier si a resurrectiondes ANA doit remonter a une "structure nar-
rative de base" ou si elle peut bien s'expliquer par les techniques
d'elaboration que cet ecrit applique aux APt. La resurrection des
ANA resulte en effet d'une combinaison de la deuxieme et de la
troisieme resurrection des APt, avec un important recours au fecit
54. Voir I'allusion a des conflits anterieurs entre Pierre et Simon en Orient,
au detriment de Simon; I'arrivee de Simon a Rome avant Pierre (prae-
veniens Romam d. Actes de Verceil5 : praeoccupavit vas Romae) ; la pour-
suite des activites magiques de Simon apres I'episode de la resurrection,
puis I'envol, la chute et la mort.
55. Ed. ACHELIS, p. 13, lignes 27-30 : noA£J ov J E"t<1"taU iJ OJV~ t'§E"tE,
J E"t<1 "to vlKtiaal uJ a; amov Kat EL;"tOv abllv Ka"tEvEYKaL J ou np6;
J E .A£UaEa6E Ot &)0 VLKll"tat "tti; 3tAaVll;. Mais, tandis que dans I' Apo-
calypse les deux temoins succombent (du moins apparemment) a la bete,
ici ils obtiennent un succes visible, eliminant Ie protege de la bete (avant
d'etre mis a mort par la bete elle-meme, Neron), de sorte que leur vic-
toire reelle devient visible. Du Teste, cet auteur connait aussi d'autres
legendes sur Simon: ce dernier, apres I'echec, se transforme en prenant
tine tete de chien (p.12lignes21-22); VOUAUX (p.159) renvoie auxRecon-
naissances pseudoclementines 2,9, ou il est question de la capacite de
Simon de se tranformer en animal, mais on ne mentionne pas de chien;
y aurait-il eu tine histoire de transformation du visage de Simon dont tine
reminiscence pourrait etre conservee dans la derniere partie des Recon-
naissances (10,53 ss), ou Faustinianus, Ie peTe de Clement, apparait avec
Ie visage de Simon pour Ie demasquer face ala fowe?
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evangelique de la resurrection du fils de la veuve de N am (Lc 7,11-
17)56. En outre, il est difficile de voir dans les ANA des details
qui devraient provenir sllrement de la premiere resurrection des
APt, de sorte qu'ici non plus, nons n'avons pas un fecit contenant
des traits des trois recits de resurrection des APt, contrairement a
ce que pense Thomas.
En fait, il semble difficile de reperer un base narrative sons
les trois resurrections des APt. La seule chose qu'ils ont en com-
mUD est la resurrection d'un jeune homme, ce qui est franchement
trop pen pour les appeler trois versions d'un meme fecit de resur-
rection (Thomas, p. 80). Et comment faudrait-il se representer la
demarche du PsH et des ANA? D'apres Thomas, ils ont eu a dis-
position au moins autant de materiel narratif que l'auteur des Actus
Vercellenses, car its presentent sons line forme unitaire et concise
tous les details disperses de la narration plus longue (p. 81); mais
nons avons vu que celie derniere affirmation est sans doute exces-
sive. En tout cas, est-ce que cela signifie qu'ils ont connu les trois
recits par une tradition, orale ou ecrite, par allele aux Actes? Mais
s'ils ont connu les Actes (nollS avons vu que tel doit etre Ie cas),
quel besoin a-t-on encore d'une tradition parallele? II faudrait
reperer des elements communs aux deux recits posterieurs, mais
absents des APt (et encore, cela ne suffirait meme pas si l'on admet
la connaissance non pas des Actes de Verceil, mais, comme cela
parait etre Ie cas, des APt anciens); or, Ie seul exemple que Tho-
mas pent mentionner dans ce sens soot les paroles de Pierre: si
vivit defunctus, loquatur.. si resuscitatus est, surgat, ambulet, fabu-
letur (PsH); faV ~1;1, aAfloa't(J), 1tEpL3ta'tfloa't(J),lE'taMl31J tpolj>f)~
KaL <1..1too'tpalj>r]'t(J)k 'tOY OLKOV v'tov (ANA). Dans tout cela,
les seuls mots communs aux deux textes et etrangers aux APt soot
s'il est vivant et qu'il marche , ce qui est evidemment tIeS peu;
its ont pu se glisser tout naturellement dans les deux textes de fa~on
independante, si la citation est faite de memoire. Ou bien faut-il
postuler (nous avons vu les oscillations de Thomas a ce sujet) que
les deux textes posterieurs ont connu un seul recit de base de
resurrection? Mais nollS avons vu que Ie PsH ne contient pas de
points de contact avec les deux premieres resurrections, et les ANA
avec la premiere; or cela serait etrange s'ils avaient connu un com-~
56.11estclair que ce recours au modele biblique n'a pas besoinde remon-
tel a un base narrative ; l'auteur des ANA a bien vu que ce modele
inspirait deja les APt, et ill'a ulterieurement developpe, selon une
demarche frequente dans es reecritures de textes apocryphes (on peut
vensel, pour ne donner qu'un exemple,ala Legended'Esaie par rapport
a l'Ascension d'Esaze).
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UR LES ACIES DE PIERRE
plexe unique d'elements narratifs. En outre, d'un cote, ce com-
plexe aurait contenu des details tres precis, de l'autre il n'aurait
meme pas dit si Ie mort etait Ie fils unique d'une pauvre veuve ou
bien un riche senateur.En somme, l n'est pas sur que C. Thomas
ait choisi Ie meilleur exemple pour illustrer son modele de com-
binaison entre sourcesecrites et tradition orale, qui, en soi, est du
plus haut interet57.
D'ailleurs, il sembledifficile que ce cass'explique en admettant
simplement que les auteurs du PsH et des ANA ont eu sous es
yeux les anciensAPt lorsqu'ils ecrivaient. La situation s'explique
probablement au mieux en admettantqu'ils evoquent es episodes
de memoire : chacun a retenu avec un plus grand degre de preci-
sion des elements particulierement vivants, en premier lieu l'ac-
tion magique de Simon et la reponse de Pierre, ainsi que l'enjeu
consistantdans e risque du lynchage pour l'un ou pour l'autre des
deux antagonistes.Mais a l'origine de tout cela, on n'a pas besoin
de postuler autre choseque les APf8.
IV. Venons-en, beaucoup plus rapidement, aux autres contri-
butions du volume. Istvan Karasszon ( Agrippa, King and Pre-
fect , p. 21-28)pose a question de l'apparente incoherenceentre
Ie portrait d' Agrippa donne loTS e la dispute entre Pierre et Simon
dans Ie Forum (oil il est en theorie un juge impartial, en realite
bien dispose envers e christianisme) et loTS es circonstancesqui
menent au martyre de Pierre (oil il est urieux contre I' apOtreparce
que la predication de ce dernier a eloigne du prefet ses quatre
concubines). Reprenant a certains egards (tacitement) une sug-
57. Ce n'est peut-etre pas par hasard si, dans son etude publiee en 1999,
THOMAsmentionne Ie PsH et es ANA ( The 'Prehistory ', p. 39 note 2),
mais ne renvoie pas a l'article discute ici, se limitant ala remarque gene-
rale que les ANA, comme Ie Pseudo-Linuset Ie Pseudo-Marcellus, form
a separatearea of inquiry, but do illustrate the liveliness of the narrative
tradition and the relative fluidity of the base story of Peter (p. 61).
58. II Y aurait la un cas comparable,dans une certaine mesure,aux evo-
cations de deux episodesde l'Ascension d'Esai echezdeux auteurschre-
tiens: l'Opus imperfectum in Matthaeum (PG 56,626: cf. Asc. Es. 1) et
Ambroise de Milan (Comm. du Ps 11812,32: CSEL 62,270). Dans les
deux cas on a souventpense a la dependanced'une pretendue source de
l'Ascension, Ie Martyre d'Esai e uif, alors qu'on peut montrer qu'un tel
Martyre n'a pas existe et que ces extes dependent de l'Ascension,citee
peut-etre par creurdans e casd' Ambroise. a. mon L 'Ascensione i 1saia.
Studi su un apocrifo al croceviadei cristianesimi,Bologna 1994,p. 69-78
et 221.
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gestion de Carl Erbes59,l considere que Ie modele de ce person-
nage est Herode Agrippa, et tente de montrer que les evaluations
contradictoires de cette figure historique chez es Juifs et les chre-
tiens ont pu influencer les contradictions du personnage itteraire.
Cet essai vent avoir des implications methodologiques : il s'agit
d'une tentative d'expliquer des tensions a l'interieur d'un texte
non pas en supposantdes sourcesdifferentes, mais par I'influence
de roles et de modeles developpesa partir de personnageshisto-
riques et passesdans a creation litteraire; tentative interessante,
mais, a mon avis, hautement hypothetique.
Pal Herczeg, Theios aner Traits in the Apocryphal Acts of
Peter (p. 29-38), llustre comment a representationhellenistique
du eELO~vtlP a servi, dans es APt, a caracteriser es personnages
opposesde Simon et de Pierre. 11n'y a pas grand chose de neuf
dans cette contribution, qui adopte en plus des categories igides
qu'il est devenu difficile de considerer comme adequates60.
Tamas Adamik, The Image of Simon Magus in the Christian
Tradition (p. 52-64), compare la representation de Simon dans
les APt aux autres sources qui Ie concernent pour montrer que
Ie traducteur des APt [mais que dire de I'auteur?] ne se propo-
sait pas seulementd'entretenir des chretiens simples,mais voulait
aussiprouver la divinite de Jesus-Christcontre les accusationsde
Simon e Magicien, qui nia a plusieurs eprises a divinite de Jesus
(p. 64). Le probleme est qu' Adamik presuppose, plutot qu'il ne
Ie prouve, que Simon etait un philosophe gnostique, en lui attri-
buant plus ou moins les systemes imoniens du lIe et du lIIe siecle,
ce qui va a l'encontre de la recherche recente61.L'analyse des
59. C. ERBES, Petrus nicht in Rom, sondern in Jerusalem gestorben ,
ZKG 22 (1901) 1-47 et 161-224, ur ce point 186-188.
60. Ainsi I'opposition entre Ia periode du Nouveau Testament , oil Ia
pensee et Ia production ecrite des chretiens seraient nfluencees essen-
tiellement par 1'Ancien Testament , et Ia periode successive, partir
du deuxieme siecle,caracterisee par Ia production d'apocryphes, arge-
ment influences par Ies formes et Ies contenus de Ia Iitterature grecque
(p. 30). A cette epoque, the New Testament canon serves ess and less
as he source of this literature (ibid.). Cette idee que, usqu'au milieu du
lIe siecle, un canon du Nouveau Testament aurait servi comme source
de Ia Iitterature chretienne, parait liee a des schemasde penseequi n'ont
plus vraiment de raison d'etre.
6L ADAMIK se refere a tine bibliographie trop limitee, ignorant des tra-
vaux fondamentaux (par exemple Ies deux monographies de K. BEY-
SCHLAG t de G. LlJDEMANN ur Simon Ie Magicien); par ailleurs, il cite
d'excellents savants,mills il s'en tient a des syntheses,qu'en plus il solli-
cite volontiers; par exemple, a phrasede J. Dll-LON itee ala p. 57 ( Many
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UR LES ACI'ES DE PIERRE
sourcespar Adamik est superficielle et insuffisante62.
I;nteressante,en revanche, est 'approche sociologique d' stvan
Czachesz "Who is Deviant? Entering the Story-World of the ActS'
of Peter", p. 84-96). A l'aide des categories socio-psychologiques
developpeessurtout par Bruce J. Malina et Jerome H. Neyrey, cet
auteur propose de voir dans a figure de Pierre crucifie a l'envers
une sorte de chiffre de l'inversion que les APt sont en train de rea-
liser; les chretiens, "etiquetes" (c'est la notion sociologique du
"labelling") comme deviants dans eur milieu, "etiquettent" a leur
tour leurs propres adversaires, les "denoncent" et mettent en
oeuvre des "rituels de degradation" s'effor~ant de gagner de la
respectabilite aupres du public. Ce processusmontrerait que les
chretiens qui ecrivent es APt ant deja Ie regard tourne du cote du
pouvoir; a une epoque ou ils sonfpersecutes, ts "renversent" cette
situation par l'utopie narrative. Quelques arguments de Czachesz
sont un peu forces; il est inexact de dire (p. 95) que Pierre prie
pour la mort de Simon; c'est plutot l'inverse qui est vrai (ch. 32,
Lipsius p. 83ligne 18). En fait, ce qui est vise n'est pas a mort de
l'adversaire, mais la demonstration eclatante et ecrasante (ici au
sens itteral ) de son erreur et de sa faiblesse.
Dans ce sens, une consideration pourrait etre utile pour pro-
longer la reflexion de Czachesz.Ce dernier n'a pas souligne un
element qui me parait important: Ie role attribue aDieu et au
Christ dans son rapport avec Ie role attribue a l'apotre. Dans des
textes chretiens plus anciens que les APt, l'honneur (c'est l'une
des categoriesmises en evidence par Czache:lf a la base de~ APt)
de Dieu et celui des humains (qui cherchent l'honneur del:Dieu)
ne vont pas ensemble, du mains aux yeux des spectateurs du
dehors: les chretiens sont prets a perdre leur honneur, pourvu que
Dieu soit honore63.Mais deja a cette epoque se manifeste une
ingredients of 2nd-cent. Gnosticism are pre-Christian") ne signifie pas
qu'il existait un gnosticisme prechretien avec un mythe de redemption,
une idee de la religionsgeschichtliche chute qui a fait son emps.
62. Ainsi, a la p. 58, l affirme que les renseignementsde Justin sur Simon
peuvent etre tenus pour authentiques,parce qu'il connaissaitbien la theo-
logie et a philosophie palenneset uives ; cette affirmation tient lieu d une
analysedes sources.Par consequent, l peut ecrire que Justin confirme la
notice des Actes des apotres, sansse demander si les Actes n'ont juste-
ment pas ete sa source; et il affirme que, si es decouvertesarcheologiques,
comme il est bien connu, ont montre que Justin avait pris une statue de
Semo Sancus pour une statue de Simon, cela ne nous autorise pas a
conclure que Simon n'avait pas re~u une statue a Rome (ibid.)
63. Le premier exemple est bien entendu celui de Jesus (ou en tout cas,
celui de la lecture de sa crucifixion dans es evangiles); encore plus evi-
dente est 'image de l'apotre chez Paul (theologie de la croix f).
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option radicalement autre: leg adversaires de Paul en 2 Corin-
thiens, leg super-apotres , lient apparemment eur propre hon-
neur a celui de Dieu, qui se manifeste et triomphe precisement
dans eur sucres leurs manifestationsde puissance emoignent de
la puissancede Dieu64.Or, legActes apocryphesviennent se situer
en general sur la ligne des adversairesde Paul (y compris, ironi-
quement, leg Actes de Paul); ils pretendent que, pour que Dieu
re<;oive 'honneur qui lui est du, c'est son apotre qui doit recevoir
publiquement de l'honneur, avoir du succes65. lors que certains
chretiens acceptent un etat de degradation et de marginalisation
comme etant destine a etre compense par Dieu (que l'on pense
aux cas,qui envisagent ifferents typesde compensation,de I' Apo-
calypse de Jean et de la premiere epitre de Pierre), d'autres, qui
s'expriment notamment dans leg Actes apocryphes des apotres,
commencenta considerer a respectabilite sociale comme neces-
saire ad maio rem Dei gloriam. Pourquoi? Probablement, parce
que leg communautes chretiennes commencent a se preoccuper
de leur visibilite66et, du meme coup, a se presenter comme res-
ponsables pour un monde et un ordre dans lequel elles se ren-
dent compte qu'elles doivent s'habituer a vivre. C'est ainsi que,
dans Ie jell de challenge / response qu'evoque Czachesz, eur
reponse doit devenir socialementefficace; il s'agit de montrer que
leg chretiens peuvent agir pour Ie bien de ce monde et de seshabi-
tants, et meme qu'ils soot leg seulsa Ie pouvoir reellement.
D'oules prieres de l'apotre a Dieu pour accomplir un prodige,
prieres regulierement exauceeset produisant un effet significa-
64. Paul ne renonce pas a l'argument tire de la manifestation de la puis-
sancede Dieu dans a communaute (p. ex. Gal 3,5), mais cette manifes-
tation est ndependante de l'honneur de l'apotre et peut me-me e mani-
fester au detriment de cet honneur (2 Cor 10-11;4-6).
65. Et plus on insiste, surtout dans es recits de martyre, sur les mauvais
traitements infliges aux apotres,plus Ie lecteur est averti que l'ap6tre a Ie
controle de la situation et peut exercersespouvoirsme-me ans a detresse
apparente; les Actes d'Andre et leurs recritures en representent des
exemples eclatants,parmi bien d'autres. Cependant, on ne peut pas dire
que l'ap<>tre ec;oive personnellement de l'honneur et que cet honneur
rejaillisse sur Dieu. C'est Dieu qui, dans res recits, procure a l'apotre un
succesque ce dernier ne saurait nullement se procurer tout seul; cette
incapacite est soulignee constamment,aussibien pour Ie passe dans es
APt, l'evocation desdefaillancesde Pierre) que pour Ie present les prieres
qui precedent es prodiges).
66. Un processusqui a ete bien etudie recemmentpour les Pastoralespar
Y. REOALIE,Paul apresPaul. Le temps, e salut, a morale selon esepitres
ii Timotheeet i Tite (Le monde de la Bible 31), Geneve 1994.
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tif: uidentes turbe mirate sunt, et populo clamante.. Tu, deus salua-
fUr [lege.. saluatorJ, tu Petri deus, deus inuisibilis et saluatul: Et dice-
bant inter se, uere mirantes hominis uerbo inuocantis dominum
suum uirtutem (Actes de Verceil 27). Et si Pierre dans sa priere a
demande Ie miracle afin que omnia quae sunt in seculo contem-
namus, et te solum sequi (ibid.), il ne faut pas s'y tromper: l'enjeu
est bien la conquete du monde. Le seculum dont il est question
ici est seulement Ie pouvoir de Satan, non pas Ie monde en tant
que tel. Car parallelement, Ie deshonneur de Simon devient Ie
deshonneur de Satan. Le conflit defi / reponse se oue egalement
(et en meme temps) au niveau des puissances superieures. Ce qui
est caracteristique, c'est que l'honneur ou la honte de l'une ou de
l'autre puissance spirituelle a besoin, dans cette logique, de se
manifester comme tel au niveau des humains. Les puissances pro-
tagonistes de ce conflit se deploient comme telles precisement en
se manifestant dans l'histoire humaine. C'est qu'il s'agit de deter-
miner, et surtout de montrer, qui a vraiment Ie controle sur ce
monde; les operations reciproques mises en reuvre par Pierre et
Simon dans les APt, illustrees par Czachesz, ont justement pour
fin de persuader qu'on pent (mieux: qu'il faut) faire confiance aux
representants du Dieu des chretiens pour que les structures de ce
monde puissent bien fonctionner.
Ce genre de considerations prolonge non seulement la contri-
bution de Czachesz, mais aussi celIe de Magda Misset-van de Weg
( 'For the Lord always takes Care of His own'. The Purpose of
the Wondrous Works and Deeds in the Acts of Peter , p. 97-110).
Elle etudie en particulier la fonction du miracle, qui doit etre rea-
lise par l'apotre, non pas pour augmenter Ie credit de ce dernier,
mais celui de Dieu; j'ai esquisse ci-dessus ce qui me semble etre
l'articulation entre l'apotre et Dieu par rapport a la fonction prag-
matique du texte.
Deux contributions s'occupent de la signification de la croix.
Janos Bolyki ( 'Head Downwards' : The Cross of Peter in the
Lights of the Apocryphal Acts, the New Testament and of the
Society-transforming Claim of Early Christianity , p. 111-122),
voit dans la crucifixion de Pierre la tete en bas une expression de
la comprehension de soi qu'avaient l'auteur et les premiers lec-
leurs du texte, et qui impliquait un renversement total des valeurs
(et peut-etre aussi des rapports de pouvoir) dans l'Empire, en vue
d'une christianisation de toute la societe. II convient de relever
ce qui semble une opposition rigide entre ecrits canoniques et
apocryphes (notamment p. 118-119) : les premiers attribueraient
une signification soteriologique a la croix du Christ; les seconds,
ignorant a pen pres la valeur concrete de la croix comme lieu d'exe-
cution, feraient de la croix (non seulement de celIe du Christ, mais
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semble 'etre moins: l'insistancesur a transcendance e Dieu trou-
verait ses meilleurs paralleles en Afrique du Nord69.
A. Hilhorst examine une serie de passages eu ou pas compre-
hensiblesdes Actes de Verceil,qui, comme il est bien connu, pre-
sentent un texte latin extremement autif et difficile. n ne peut pas
faire avancer a recherche sur taus les points examines,mais ses
propositions semblent oujours competenteset equilibrees, nspi-
feeS du principe tres sain qu'il taut essayer,autant que possible,
de comprendre Ie texte tel qu'il se presente, et que les corrections
doivent etre reduites au minimum7°.
Deux contributions sont consacrees ux rapports entre les APt
et deux autres Actes apocryphesanciens.PieterJ. Lalleman, The
relation between he Acts of John and the Acts of Peter (p. 161-
177), critique la tentative de D. R. MacDonald de prouver que
les Actes de Jean dependent des APt, et apporte des arguments
dans e senscontraire, proposant (comme d'autres l'ont deja fait)
une liste des affinites entre les deux ouvrages p.170-177). Parmi
sespropres arguments, Ie meilleur semble etre Ie quatrieme (p.
168) si les Actes de Jean se composent de deux parties ecrites
69. A bien regarder, cette insistance se reduit a peu pres a l'usage du mot
invisibilis, ce qui est vraiment peu; l'invisibilite de Dieu est souvent sou-
lignee, par exemple par Novatien a Rome, et l'opposition entre invisibi-
lite du Pere et visibilite du Fils est aussi tIes frequente un peu partout.
70. Une seule remarque : a la p. 156, pour ut uiderent domini apostolum
fundari in Christum, HILHORST suggere la correction fundati, en para-
phrasant: les foules s'etaient reunies to see the apostle who, unlike them,
was built on, that is, inseparable from Christ . Or Ie texte ne petit pas
avoir ce sens avec fundati, qui s'accorde avec Ie Seigneur et non pas avec
l'apotre: il faudraitfundatum. 11est peut-etre vermis d'avancer tine autre
hypothese, encore plus economique :fundari pourrait etre Ie calque d'un
infinitif grec a valeur finale, courant (BLASS-DEBRUNNER-REHKOPF 390)
avec des verbes de mouvement, ct. ici concurrit; Ie sens serait alors toute
la foule se reunit en courant pour voir l'apotre du Seigneur, afin d'etre
fondee dans (ou: sur) Ie Christ par la parole de l'apotre. Le fait que deux
finales successives seraient exprimees de deux manieres differentes ne me
parait pas representer un obstacle: ct. APt 27, cite ci-dessus, p. 251. In
Christum pourrait etre l'un des cas tout a fait habituels ollie manuscrit
echange l'ablatif et l'accusatif, notamment apres in (LIPSIUS, . XLVI-XLVU),
mais il pourrait aussi traduire un E3tL 'tOv) XpLO'tOv; ct. Mt 7,25; Lc 6,48
pour cette construction. Dans l'interpretation de Hilhorst, l'usage de fun-
dare I 6EI1EALOW'ecarte en realite de celui des premiers textes chretiens,
y compris ceux qu'il cite (Eph 3,17; CoI1,23; 2,7), car ce serait l'apotre
qui est ronde sur Ie Christ, a la difference de la communaute (comme il
Ie souligne); l'interpretation ici proposee correspond par contre a l'usage
du premier christianisme, oula communaute est fondee par l'action
de Dieu qui se sert des apotres.
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posterieur; une dependanceTeste ossibleegalementpour les rois
premiers chapitres des APt, qui soot dans Ie meme cas. Quant a
la forme primitive des APt, rien n'oblige ala considerer comme
dependante des Actes de Paul; tous les paralleles can be easily
explained by a common stock of oral tradition from which both
authorshave respectivelydrawn (p. 191), et pour eclairer cespro-
blemes, il faudra avoir recours a d'autres criteres (ibid.), que
Rordorf ne precise pas.
Dans sa contribution, Gerard Poupon, L'origine africaine des
Actus Vercellenses (p. 192-199)montre qu'au ch. 2 (Lipsius p.
47, lignes 10-11) 'expression in pace cum dominum nostrum est
nee d'une faute de copiste a partir du chrisma utilise comme abre-
viation de Christus(la superposition des ettres grecquesX et P),
qu'un scribe a compris comme une abreviation de pax; Ie texte
aurait donc eu Jesus-Christnoire Seigneur . La meme faute est
typique de certainsmanuscritsafricains.Les APt ont pu etre appor-
tes en Afrique et traduits en latin par des missionnaires mani-
cheens,pour servir au culte dans 'une de leurs communautes.Ces
arguments,meme s'ils ne represententpasdespreuves rrefutables,
me semblent avoir beaucoupde vraisemblance.
Enfin, Ie volume est complete par une Bibliography of Acts
of Peter (p. 200-202), edigee par Pieter J. Lalleman and Jan N.
Bremmer. Bien entendu, il faut maintenant ajouter parmi les tra-
ductions celle, avec introduction et notes, de G. Poupon dans es
Ecrits apocryphes chretiensde la Bibliotheque de la Pleiade; on
est aussi un peu etonne par l'absence, parmi les traductions, de
celle de W. Schneemelcher, Petrusakten , in W. Schneemelcher
(ed.), NeutestamentlicheApokryphen. II: Apostolisches,Apoka-
lypsenund Verwandtes, tibingen 51989, . 243-289 on remarquera
egalement que, depuis 1994, il existe une nouvelle edition du
recueil de Moraldi, doni la premiere edition de 1971 est ici signa-
lee). II sera permis de signaler au moins deux omissionsparmi les
etudes: A. Orbe, Los primeros herejesante a persecuci6n Estu-
dios Valentinianos 5 = Analecta Gregoriana 83), Romae 1956,p.
176-212 El misterio de la cruz en los Acta Petri) ; T. v: Smith,
Petrine controversies n Early Christianity. Attitudes towards Peter
in Christian writings of the first two centuries (WUNT 2. R. 15),
Ttibingen 1985 (sur les APt: p. 54-59).
Dans l'ensemble, e volume parait asseznegal. Plusieurscontri-
butions s'efforcent d'ouvrir des perspectives nouvelles, par
exemple en situant leg APt dans l'evolution du christianisme au
lIe siecle, et en utilisant aussides outils elabores par la sociologie.
Cependant, leg grands problemes des APt ne sont pas vraiment
approfondis.La genIeetude qui aborde desquestionsde fond, celIe
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de Christine Thomas, n'est pas entierementsatisfaisante.Plusieurs
etudes evoquent a problematique de l'histoire litteraire de l'ou-
vrage, mais aucun effort n'est fait pour la reprendre a la base,de
sorte qu'on se borne a rappeler leg thesesexistantes (notamment
celie de Poupon), sansprendre vraiment position, ou bien on aisse
Ie probleme entierement de cote, ou bien on avanced'autres solu-
tions, mais sans eg fonder vraiment (ainsi Luttikhuizen et sur-
tout Lalleman). Manque une enquete sur Ie caractere gnostique
ou non des APt; quelques-uns l'affirment tout simplement,
d'autres ne mentionnent Ie probleme que pour assurerqu'ils ne
vont pas en traiter (ainsi Pesthy,p. 123 note 1). Le probleme des
sources des APt n'est aborde que pour ce qui concerne la rela-
tion reciproque avec eg Actes de Paul et de Jean,avec des resul-
tats plutot negatifs que positifs; Ie rapport avec leg Pseudocle-
men ines et avec d'autres traditions relatives a Pierre n'est pas
approfondi. Les suggestionsconcernant a date et Ie lieu d'origine
de l'reuvre (et, eventueliement, de son ou de ses remaniements)
restent ainsi episodiques.
En somme, 'absence d'un desseind'ensemble et d'une enquete
systematique sur eg problemes fondamentaux des APt, ainsi que
Ie caracterecontradictoire et parfois inaccompli de certainessug-
gestionsavancees, ont quelque peu regrettables.Nonobstantcela,
la plupart descontributions meritent d'etre lues et fournissentune
remarquablequantite de pistes qui devraientetre verifiees et pour-
SUlVles.
Note complementaire
Les pages qui precedent etaient destinees a la publication
pour Ie volume 10 de la revue Apocrypha. La nouvelle contribu-
tion de Christine M. Thomas sur les Actes de Pie e «<Canon
and Antitype : The Relationship Between the Acts of Peter and
the New Testament », Semeia 80, The Apocryphal Acts of the
Apostles in lntertextual Perspectives,ed. R. F. Stoops, Jr., p.
185-205),publiee en 1999 -bien que la couverture de cet impor-
tant volume indique l'annee 1997-, appelle les remarques sui-
vantes.
C.M. Thomas reprend l'idee que leg Actes de Pierre represen-
tent Ie resultat d'un processusen plusieurs 6tapes. Tout en men-
tionnant la tradition orale qui en aurait 6t6 a l'origine (voir
ci-dessus),elle s'en tient aux phasesdes textes 6crits, pour mon-
trer que chacune d'entre elles entretient un rapport different
avec leg ecrits qui devaient ensuite former Ie Nouveau
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Testament. Trois unites separees auraient prig forme a une
epoque ancienne: la serie des miracles des chapitres 11-15, e
noyau du conflit avec Simon chapitres 22-27, et Ie martyre de
Pierre chapitres 37-40. La premiere de ces sections ne contient
pas de references a d'autres textes; la deuxieme ne contient que
des references a la bible juive et a la tradition synoptique, mais
pas aux evangiles en tant que tels; la troisieme ne cite que qua-
tre logia de Jesus, dont trois non'-canoniques.Dans tous ces cas,
il s'agit de citations explicites utilisees comme preuve tiree de
l'Ecriture, ou faisant l'objet d'une exegese.Les parties des Actes
de Pierre relevant de la redaction utilisent en revanche plusieurs
ecrits chretiens des origines: evangiles, Actes des Apotres, let-
tres, ainsi que leg Actes de Paul. En somme, eg relations inter-
textuelles entre leg Actes de Pie e et la litterature qui allait for-
mer Ie Nouveau Testament ne peuvent pas etre definies de
maniere statique, comme si des deux cotes il n'y avait qu'une
forme fixe de texte, mais comme une serie diachronique de con-
tacts, car aussibien leg Actes de Pierre que la tradition qui devait
aboutir aux ecrits neotestamentaires ont connu un processusde
developpement. Un cas significatif est celui des relations avec eg
Actes de Paul: comme l'a montre G. Poupon, au chapitre 35
-qui d'apres C.M. Thomas appartiendrait a une unite preexis-
tante aux Actes de Pierre, Ie martyre de l'apotre -l'histoire du
Quo vadis semble la source du meme episode dans leg Actes de
Paul, tandis que Ie chapitre 41 semble s'inspirer des Actes de
Paul; ceci est possible parce que Ie chapitre 41, comme leg
chapitres 1-3 des Actes de Verceil, aurait ete ajoute dans la
derniere phase de redaction de l'reuvre. Les relations inter-
textuelles ne trouvent d'explication satisfaisanteque si l'on tient
compte de l'evolution litteraire des Actes de Pierre.
Cette approche est a mon avis correcte et feconde. II
resterait, bien SilT, la fonder solidement par une analyse appro-
fondie de la composition litteraire des Actes de Pierre; C. M.
Thomas en a donne quelques elements dans ses travaux prece-
dents, developpant certaines theses de G. Poupon (voir
ci-dessus),mais on attend encore une contribution systematique
a ce sujet. Si e vois bien, il faut distinguer, d'apres elle, au moins
trois phases au niveau des documents ecrits: (1) des unites
independantes (11-15; 22-27 et 37-40); (2) l'ensemble des Actes
de Pierre grecs, integrant ces trois unites anterieures; (3) les
chapitres 1-3 et 41 lies a la separationde la sectionromaine de la
section hierosolymitaine qui la precedait et qui a disparu a
quelques ragments pres. Mais oil placer Ie chapitre 7 qui serait a
attribuer a «la couche la plus tardive de redaction» (p. 191),
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258
E. NORELLI
caracterisee par Ie theme des lapsi, et que C.M. Thomas oppose
au chapitre 8 attribue, selon elle, a une couche precedente, dif-
ferente de celIe des unites separees? C.M. Thomas distingue
deux niveaux d'allusions, ou de references, a d'autres textes
(voir p. 193-195),mais elle postule en meme temps plus de deux
couches dans l'histoire de la composition en sorte que l'on ne
voit pas exactement comment relief ces deux series entre elles;
ainsi, a la page 193 elle montre que Ie « sommaire » d' Actes
2,47 est utilise dans quatre passages es Actes de Pierre qui sont
aussides sommaires; mais l'un d'eux appartient au chapitre 41,
assigneala toute derniere redaction, leg trois autres (chapitres 9,
31, 33) n'appartiennent ni a celle-ci, ni a la phase la plus an-
cienne. Le deuxieme niveau d'allusions caracterise-t-il plusieurs
phasesde composition? Lesquelles?
En outre, je trouve convaincante la these (p. 196-198) selon
laquelle l'histoire de Simon dans les Actes de Pierre ne depend
pas d' Actes 8,9-24.Dans ses echerchessur l'histoire du materiel
relatif au conflit entre Pierre et Simon, C.M. Thomas devra
d'ailleurs se confronter a la these de J. Wehnert selon aquelle il y
a, a l'origine des Pseudoclementines,ne «Novelle» sur Pierre et
Simon, qui aurait presuppose e texte complet des Actes de Pierre
(voir J. Wehnert, «Abriss der Entstehungsgeschichte es pseu-
doklementinischen Romans », Apocrypha 3, 1992, p. 211-235,
surtout 229-230). Elle aurait pu aussi tenir compte, pour ses
pages 192-193,de l'article 011'ai essayede montrer qu'au cha-
pitre 24 es Actes de Pierre utilisent un recueil de testimoniadeja
existant et ne dependant pas de I' Ascensiond' Esai e«<Avant Ie
canonique et l'apocryphe: aux origines des recits de la naissance
de Jesus », Revue de theologie et de philosophie 126, 1994, p.
305-324);ce point est en effet significatif pour bien saisir es refe-
rences ntertextuelles des Actes de Pierre.
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Remi GOUNELLE
University of Lausanne
Zbigniew IZYDORCZYK
University of Winnipeg
THEMATIC BIBLIOGRAPHY
OF THE ACTS OFPILATE:
ADDENDA AND CORRIGENDA
The following bibliographicallistings are intended to correct
and supplement he bibliography of editions of and studies on the
Acts of Pilate- published in The Medieval Gospel of Nicodemus:
Texts, ntertexts,and Contexts n WesternEurope,edited by Z.Izy-
dorczyk (Tempe, AZ: Medieval & RenaissanceTexts & Studies,
1997),pp. 419-519.
The original bibliography was conceived as a chronological
overview of researchmaterials published over the last five cen-
turies, providing the first necessarystep owards the writing of a
history of research on the AP' s eminently complex tradition. It
comprised 968 tems in three thematically organized sections: he
first focusing on the apocryphon tself, the second devoted to its
cutural and textual backgrounds and legacies,and the third cov-
ering ts impact on visual arts. Each of the sectionswas urther sub-
divided into more uniform thematic and linguistic units. Within
those units, ndividual items were isted in chronological order from
the earliest to the most recent.
The following corrections and additions follow the same style
sheetas he 1997publication. Each correction is identified by the
number of the corrected item in the original bibliography; each
addition s assigneda number ollowed by a lower case etter (from
a to z) specifying the thematic and chronological location of the
added item in relation to the original bibliography. If the original
* This title is used both generically and specifically o refer to the ancient
and Eastern versions of the apocryphon; it is abbreviated AP. Latin ver-
sions of the same text are called Evangelium Nicodemi, abbreviated EN.
For European vernacular adaptations,we have used the title Gospel of
Nicodemus,abbreviated GN. We should like to thank Dr. G. Ziffer, Dr.
A. Jakab, and Dr. C. T. Ariesan for information on Slavonic,Hungarian
and Romanian GN traditions.
Apocrypha 11, 2000,p. 259 -292
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 255/330
260
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
entry was already marked with the lower case etter a, entries
that must be inserted immediately before it are marked with a
numerical subscript; for example, no. 3791 ollows no. 379 but pre-
cedesno. 379a. For the sakeof clarity, we have also ncluded head-
ings and subheadingsof all sectionswhich have been either altered
or expanded.Five new sectionshad to be created o accommodate
Modem Greek (1.1.4.8.d.), Hungarian (1.1.4.8.m.), Romanian
(1.1.4.11.d), Swedish 1.1.4.13.),and Wendish (1.1.4.14.) ransla-
tions of the Acts of Pilate. Finally, all newly added bibliographic
items are cross-referencedboth with other new tems and with the
original bibliography. To avoid needless epetition, if a new item
is cross-referenced o several original ones, only the first of the
original items is included here in its numerically appropriate place
with a cross-reference o the new tem.
Part 1: The Acts of Pilate
1.1. Textual traditions, editions, translations, studies
1.1.L Greek and Latin traditions
1.1.1.1.Editions
Dual (Greek and Latin)
4 a. also 350i, 350m,350n,3500.
Latin
Seealso no. 151a.
1.1.1.2Studies
Greek
Seealso nos. 322, 527a.
Latin
27
31
43a
43b
Cf. no. 330a.
Cf. no. 330a.
*Izydorczyk, Z. The Latin Evangelium Nicodemi in the
Middle Ages. In TheMedievalGospelof Nicodemus:Texts,
Intertexts, and Contexts n Western Europe, edited by Z.
Izydorczyk, 43-101.Medieval & RenaissanceTexts & Stu-
dies, vol. 158.Tempe (AZ): Medieval & Renaissance exts
& Studies,1997.
Izydorczyk, Z. Preaching Nicodemus's Gospel. In
MedievalSermonand Society: Cloistet;City, University,edit-
ed by J. Hamesseet al., Textes et etudesdu Moyen Age, vol.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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261
HEMATIC BIBLIOGRAPHY OF lHE ACTS OF PILATE
9, pp. 9-24.Louvain-la-Neuve: ederation nternationale
des nstituts d'EtudesMedievales, 998.
See lsonos.527a.
1.1.2Eastern raditions
1.1.2.1.Armenian
Studies
45a Guttier, B. Paralytique et ressuscite CANT85 et 62). Vie
des apocryphesen armenien. Apocrypha 8 (1997): 111-19.
[Pp.115-16,118-19.]
1.1.2.2.Coptic
Editions and translations
46 Ct. also no. 46a.
46a Rossi,F.,ed. Trascrizionecon traduzione taliana di un testo
copto del Museo Egizio di Torino. Memorie della Reale
accademiadelle scienzedi Torino, 2d ser.,vol. 42, pp. 107-
252. Turin: Stamperia reale, 1892. [According to W. Kam-
merer (A Coptic Bibliography, Ann Arbor, 1950,no. 1103),
this edition contains, amongother texts, a translation of AP.
Ct. nos. 46,47.]
48 Ct. also nos. 453d, 531a,534a,953a,957a.
Studies
54a Grossouw, W. De Apocriefen van het Oude en Nieuwe
Testament n de Koptische Letterkunde. Studia Catholica
10 (1934): 434-46; 11 (1935): 19-36. [On AP, see vol. 10
(1934), pp. 441-42.]
56a Dubois, J.-D. La version copte des Actes dePilate. Apoc-
rypha 8 (1997):81-88.
56b Dubois, J.-D. Sommos dans a version copte des Actes de
Pilate. Apocrypha 9 (1998): 291-300.
Seealso no. 375a.
1.1.2.3. Georgian
Seealso no. 376a.
1.1.2.5.Slavonic
Editions and translations
61a [Cztenij Nykodemowo 1527 ?] [Czech.] No copiesextant,
but seenos. 61b. [Cr. no. 293a.]
61b Cztenij Nykodemowo. W niem se wypisuge Co se ddlo
pfivmucenij Krysta pdna. Przito take gest Kterak Tyberius
Cysaf poslal po Pdna Gezijsse do GeruzalemaWoluzydna
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262
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
69
72a
76
79:
79h
79c
Knijte a BiskupaRiijmskiho Praha: uJanaHada, [1561 ?].
[Czech. The preface refers to an earlier edition: Ac pak pfed
Lety Tfidcyti a ctyfmi toto ctenij Nykodemowo brio gest
tisknuto wssak z fijdka se proto nachazy...; cf. no. 61a.]
Reprinted: n.p., [1563 ?], but the only extant copy is defec-
tive; Praha: u Gilijho Melantrycha z Awent<jnu, 1577. [Cf.
nos. 61a, 293a.]
Cf. also nos. 79a, 79b, 98a.
Bruckner, A. Rozmyslanie 0 zywocie Pana Jezusa z r{ kopisu
grecko-katol. kapituly przemyskiej. Krak6w: Nakladem
Akademii Umiej~tnosci, 1907. [Extensive fragments of a Pol-
ish translation of EN.]
Cf. no. 96a.
Wydra, W., and W. R. Rzepka, eds. Chrestomatia staropol-
ska: teksty od roku 1543. Wroclaw: Zaklad Narodowy im.
Ossolinskich, 1984. [pp. 139-48: partial edition of two Pol-
ish GN texts from Warszawa, Biblioteka Narodowa MS. 2040
IV. Cf. nos. 69, 72-74, 79b, 89, 91, 94, 98, 98a, 366.]
Rzepka, W., and W. Wydra, eds. Caly Swiat nie pomiescilby
ksiqg: staropolskie opowiesci i przekazy apokryftczne. Warsza-
wa: Wydawnictwo Naukowe PWN, 1996. [pp. 335-54: new
partial edition of two Polish GN texts from Warszawa, Bib-
lioteka Narodowa MS. 2040N. Cf. nos. 69, 72-74, 79a, 89,91,
94, 98, 98a, 366.]
Keller, F., and W. Twardzik. Rozmyslanie przemyskie:
transliteracja, transkrypcja, podstawa lacinska, niemiecki
przeklad. Vol. 2. Freiburg: U. W. Weiher, 2000. [Extensive
fragments of a Polish translation of EN, with a German trans-
lation. ]
Studies
88a Sobolevskij, A. I. "Cerkovnoslavjanskie eksty moravskogo
proischozdenija." Russkij Filologiceskij Vestnik43 (1900):
150-207.
95a Vaillant, A. "L 'imperfectif otvraziti." Die Welt der Slaven10
(1965): 367-368.
95b Vaillant, A. "Le vieux slaveoccidental." Zbornik zafilologi-
ju i lingvistiku 9 (1966): p. 7-9.
96a Aitzemuller, R. "Zur Frageeiner kirchenslawischen iteratur
im slowenisch-kroatischenaum." In StudiaSlovenicaMona-
censia in honorem Antonii Slodnjak septuagenarii, 1-5.
Munchen: Trofenik, 1969.
96a Freydank,D. Review of L 'Evangilede Nicodeme, y A. Vail-
lant (no. 76). Zeitschrift fUr Slawistik 15 (1970): 300-302.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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263
IEMAllC BffiLIOGRAPHY OF nIE ACTS OF PILATE
98a
98b
98c
98d
98e
98f
98g
98b
Reinhart, J. «Bohemismen m Tschechisch-Kirchenslavis-
chenam Beipsiel der Homilien Gregorsdes Grossen Studia
boemico-slavonica, I»>, Wiener Slavistisches ahrbuch 26
(1980): 46-102. [pp. 89-90 on GN.]
Birnbaum,H., Zur ProblematikdesWestkirchenslavischen.
In Litterae SlavicaeMedii Aevi Francisco VenceslaoMares
oblatae,editedby J. Reinhart,53-65.Miinchen: Sagner,1985.
Minceva, A. Nikodimovo evangelie. Paleobulgarica 9/4
(1985): 30-44.
Kobjak, N. A. «EvangelieNikodima. In Slovar' kniinikov i
kniinosti Drevnej Rusi, vol. 1, XI-pervaja polovina XIV V.,
pp. 120-123.Leningrad: Nauka, 1987.
Blahova, E. Jubileum Slovm'kuazyka staroslovenskiho.
Slavia 58 (1989): 337-352. [Po342 on GN.]
Mladenova,M. Edna osobena potrebana glagola zapove-
dati'/'zapovedeti' v teksta na Nikodimovoto evangelie. In
Medievisticni rakursi. Topos i enigma V kulturata na
pravoslavnite slavjani,64-70. Sofija: Obscestvo a zucavane
na slavjanskatastarina, 1993.
Konzal, V. «Latinske participium futuri v staroslovenskem
plekladu (Responzeatinske syntaxe v ceskocsl.pamatkach,
I»>, Slavia 63 (1994): 193-205.
Michalowska, T. Sredniowiecze.Warszawa:Wydawnictwo
Naukowe PWN, 1997. [pp. 590-93: on the Polish GN. cr.
nos. 69, 72-74, 79a, 79b, 89, 91, 94, 98,366.]
1.1.3.MedievalWesternraditions1.1.3.1.
Castilian, Catalan,Occitan
Editions and translations
103 Cf. also no. 112a.
112a Aux frontieres du Nouveau Testament. nventairedesmotifs
apocryphesen Maurienne et en Tarentaise Savoie).Vol. 1.
Grenoble [& Turnhout]: Alzieu & Brepols, 1998. Pro 59-
135:C. Cennac's ranslation of the Occitan Gamaliel from
MS. BoP F-24945.Cf. nos. 103-6, 119-20,184-86,193,200,
363, 679-680,686, 776.]
Studies
121a *Izquierdo, J. The EvangeliumNicodemi n Medieval Cata-
lan and Occitan Literatures. In The Medieval Gospel of
Nicodemus: Texts, Intertexts, and Contexts in Western
Europe, edited by Z. Izydorczyk, 133-64. Medieval &
Renaissance Texts & Studies, vol. 158. Tempe (AZ):
Medieval & RenaissanceTexts & Studies, 1997.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 259/330
264
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
1.1.3.2.Dutch,Low German
Studies
128a *Hoffmann, W. J. The EvangeliumNicodemi in Dutch and
Low German Literatures of the Middle Ages. In The
Medieval Gospel.of Nicodemus: Texts, ntertexts, and Con-
texts n Western Europe, edited by Z. Izydorczyk, 337-60.
Medieval & RenaissanceTexts & Studies,vol. 158.Tempe
(AZ): Medieval & Renaissance Texts & Studies, 1997.
1.1.3.3. English
Editions
133 a. alsono. 5la, l55a.
Studies
151a Cross, . E., ed. Two Old English Apocrypha and Their Man-
uscript Source: The Gospelof Nichodemus and the Aveng-
ing of the Saviour.Cambridge: Cambridge University Press,
19%. [Editions of the Old English GN and its Latin source
in Saint-Orner, Bibliotheque municipale MS. 202. Cf. nos.
133-34,136-37,139,141-42,145,147,153-55,55a,158,160-
61, 166, 173-74,432.]
155a Swaen,A. E. H. The Old English Gospel of Nicodemus.
Modern Language Review 10 (1915): 222. [Proposes an
emendation to Hulme's edition (no. 137)of CCCC MS. 41.
Cf. nos. 133-34,136-37,139,141-42,145,147,153-55, 55a,
158, 160-61,166,173-74,432.]
183a Smith, Kathryn A. Canonizing the Apocryphal: London
British Library MS Egerton 2781 and Its Visual, Devotion-
al, and Social Contexts. Ph.D. diss., New-York University,
Institute of Fine Arts, 1996. On a manuscript containing a
Middle English version of GN. Cf. no. 183c.]
183b *Marx, C. W. The Gospelof Nicodemus n Old English and
Middle English. In The Medieval Gospel of Nicodemus:
Texts, ntertexts,and Contexts n WesternEurope, edited by
Z. Izydorczyk, 207-59. Medieval & RenaissanceTexts &
Studies, vol. 158. Tempe (AZ): Medieval & Renaissance
Texts & Studies, 1997.
183c Smith, Kathryn A. The Neville of Hornby Hours and the
Design of Literate Devotion. Art Bulletin (New York) 81
(1999): 72-92. Cf. no. 183a.]
See
also no. 525a.
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265
BffiLIOGRAPHY OF THE ACTS OF PILATE
1.1.3.4. French
Studies
211a *O'Gorman, R. The Evangelium Nicodemi in the Vernac-
ular Literature of Medieval France. In The Medieval
Gospelof Nicodemus: Texts, ntertexts, nd Contextsn West-
ern Europe, edited by Z. Izydorczyk, 103-31. Medieval &
Renaissance Texts & Studies, vol. 158. Tempe (AZ):
Medieval & RenaissanceTexts & Studies, 1997.
1.1.3.5. High German
Editions
212 Ct. also no. 214a.
214 Ct. also nos. 354a, 354b,354c.
214a Evangelium Nicodemi Auj3 d. Lat. ins teutsch gebracht.
[Augsburg: Ulhart, ca. 1525]. Ct. nos. 212-13,216,218,334.]
214b Van dem warhafftigen CreutzCristi: wo man dasselbigfind-
en, wie man ouch solchs Eeren tragen und erhebensol; vii
schoner Spruch den bekumerten Hertzen, vast nutz und
trostlich Nicodemus Martyr. [Niirnberg: Gutknecht,] 1528.
215a Wahrhafftige Hystoria des leidens und urstendJesu Christi
unsers herren und ewigen seligmachers: Van Nicodemo
beschribenmil auj3legung tlicherspruch,angehenckterCon-
cordantz,sampteyner schonenund hefftiger beweisungdes
leidens Messie, auj3dem Talmut und zeugnuj3 osephi, van
Christo Jesu nn teutschen it mehr gesehen. .p., [ca. 1550].
220 Ct. nos. 233a,234a,237a.
Studies
233a Wolff, G. Erlanger Bruchstiicke aus dem Evangelium
Nicodemi. Zeitschrift fUr deutsches Altertum und deutsche
Literatur 33 (1889): 115-23. [Heinrich von Hesler's Evan-
gelium Nicodemi; includes a diplomatic edition. a. nos. 220,
232, 234, 234a, 236, 237a, 238, 240, 244-45, 823, 843.]
234a Klatscher, A. Zur Metrik und Textkritik van Heinrich Hes-
leTsEvangelium Nicodemi. Jahresberichte del K. K. Staats-
Oberrealschule in Eger fUr das Schuljahr 1907-8 and 1908-
9. Eger, 1908-9. [Cf. nos. 220, 232, 233a, 234, 236, 237a, 238,
240,244-45, 823, 843.]
237a Eis, G. Zur Uberlieferung von Wolframs Willehalm und
Heslers Evangelium Nicodemi. Zeitschrift fur deutsche
Philologie 73 (1954): 103-10. [Cf. nos. 220, 232, 233a, 234,
234a, 236, 238, 240, 244-45, 823, 843.]
249a *Hoffmann, W. J. The Evangelium Nicodemi in High Ger-
man Literature of the Middle Ages. In The Medieval
GosDel of Nicodemus: Texts. ntertexts. and Contexts in West-
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2
.
GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
em Europe, edited by Z. Izydorczyk, 287-336.Medieval &
Renaissance Texts & Studies, vol. 158. Tempe (AZ):
Medieval & RenaissanceTexts & Studies, 1997.
1.1.3.6.
Irish
Studies
256a *Dooley, A. The Gospel of Nicodemus n Ireland. In The
Medieval Gospel of Nicodemus: Texts, ntertexts,and Con-
texts in WesternEurope, edited by Z. Izydorczyk, 361-401.
Medieval & RenaissanceTexts & Studies,vol. 158.Tempe
(AZ): Medieval & Renaissance Texts & Studies, 1997.
1.1.3.7.
Italian
Studies
259 Cf. no. 259a.
259a *Iannucci, A. A. The Gospel of Nicodemus in Medieval
Italian Literature: A Preliminary Assessment. In The
Medieval Gospel of Nicodemus: Texts, ntertexts,and Con-
texts n WesternEurope, edited by Z. Izydorczyk, 165-205.
Medieval & RenaissanceTexts & Studies,vol. 158.Tempe
(AZ): Medieval & Renaissance Texts & Studies, 1997.
[Revised version of no. 259.]
1.1.3.8.
Norse
Studies
286 Ct. no. 286a.
286a *Wolf, K. The influence of the Evangelium Nicodemi on
Norse Literature: A Survey. In The Medieval Gospel of
Nicodemus: Texts, Intertexts, and Contexts in Western
Europe, edited by Z. Izydorczyk, 261-86. Medieval &
Renaissance Texts & Studies, vol. 158. Tempe (AZ):
Medieval & Renaissance exts& Studies,1997. Ct. no. 286.]
1.1.3.9.Welsh
Studies
291a *Klausner, D. N. The Gospelof Nicodemus n the Litera-
ture of Medieval Wales. In TheMedieval Gospelof Nicode-
mus: Texts, ntertexts,and Contexts n WesternEurope,edit-
ed by Z. Izydorczyk, 404-17.Medieval & Renaissance exts
& Studies,vol. 158.Tempe (AZ): Medieval & Renaissance
Texts & Studies,1997.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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267
HEMATIC BIBLIOGRAPHY OF lHE ACTS OF PILATE
1.1.4. Modem translations based on Greek and Latin (post-1600)1.1,4.3.
Czech / Slovak
293a CztenjNykodemowo.W nemz se wypisuge Co se ddl'o pfi
Umucenj rysta Pdna.Pfitom takegestkterakTyberius Cysaf
postal' pro Pdna Gezijssedo GeruzalemaWol'uzydnaKnijze
a Biskupa Rfjmskeho.W Hofomaucy: u Mikulasse Hradeck-
eho, 1631.Reissued n 1651. Cr. nos. 61a, 61b.]
293b Nykodemowo Cztenj Obsahugjcy w sobe Newinny, a
nesprawedliwy OrteZ,kteryz gest Pilat Pontsky na Krysta
GEfjsse wydal, aby mezy dwema Lotry byl ukfizowdn, ana
takeDiwy a Zdraky, kterezseddly pfi geho hofkem Umucenj,
y potem po z Martwych wstdnij.Nynj w nowepooprawene a
wytisstene.W Praze:u Pe~aAntonjna Benka, 1700. Reprint-
ed (with minor changes ri'the title) as follows: w Praze: u
Karla Jozeffa Jaurnicha, 1761; w Uherske Skalicy, u Joseffa
Antonjna Sskarnycla, 1765; [v Jindfichove Hradci 1: V. Ig.
Hilgartner 1, 1780-85 1]; n.p., 1788; w Holomaucy, 1794;
n.p., 1800; w Gjhlawe: u FabyanaBaynhaura,ca. 1800; n.p.,
1806; n.p. 1823 w Skalici: typo Skarnicla, 1829; w Budjne:
M. Bag6; 1852; v Litomyeli, n.d.; v Skalici: typo dedic. J.
Skarnicla, 1886. Cr. no. 293c.]
293c CtenjNikodemovo0 Umucenja Smrti Pdna Gefjsse Krysta.
Vh. Skalica, 1777. Reprinted w Skalicy: Pjsmem Fr. X.
Skarnycla Synu, 1876. [Cr. no. 293b.]
1.1.4.6. English t~
303 See also no. 316a. 1,
308 Pp. 90-91:comments on the links between Mt 27: 1-11, Mk
16: 9-20 and the Greek AP B. '
316a The Lost Books of the Bible, Being All the Gospels,Epis-
tles,and Other PiecesNow Extant Attributed in the First Four
Centuries o Jesus Christ, His Apostles and Their Compan-
ions,Not Included, by Its Compilers, n the Authorized New
Testament;And the Recently Discovered Syriac Mss. of
Pilate's Letters to Tiberius, etc..., Westford (MA): Alpha
House, 192 [A reprint of Hone (no. 303), with an ntroduc-
tion by F. Crane; seealso no. 305. Reprinted by Meridian in
1963and 1974, along with The Forgotten Books of Eden,
first published by Alpha House in 1927.]
320 Cf. also no. 322a.
322 Cf. also no. 527a.
322a Barnstone, W.,ed. The Other Bible: Jewish Pseudepigrapha,
Christian Apocrypha, Gnostic Scriptures,Kabbalah, Dead
SeaScrolls. SanFrancisco: Harper Row, 1984. [Pp. 359-
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268
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
80: Hennecke-Schneemelcher-Wilson translation (no. 320).
Cf. also nos. 321-22.]
323 Cf. no. 323a.
323a Elliott, J. K., ed. The Apocryphal Jesus:Legendsof the Early
Church. Oxford: Oxford University Press,1996. Pp. 73-88:
excerpts romAP 1-16,Pilate's etters; pp. 91-96:Paradosis
Pilati, Mors Pilati; pp. 99-102: excerpts from Descensus.
Based on no. 323.]
1.1.4.7.French
324 a. also nos. 3791, 09a,512b.
325 Cf. also no. 326a.
326a Bertoni, G. San Gral. Istituto di filologia romanza della R.
Universita di Roma, Testi e Manuali, vol. 19.Modena: Soci-
eta tipografica Modenese, 1940. Pp. 23-24: extracts from
Brunet's translation (no. 325) of AP 12-13.Cf. nos. 325-26,
328-29.]
330a *Gounelle, R., and Z.lzydorczyk. L 'Evangile de Nicodeme
ou lesActes aits SOlIsPoncePilate (recensionatine A), suivi
de La lettre de Pilate a l'empereur Claude.Apocryphes, vol.
9. Thmhout: Brepols, 1997. Translation of Kim's Latin edi-
tion (no. 27) and of Philippart's edition of the Vienna
palimpsest ext (no. 31).]
1.1.4.8.
German
333a Die Jungers Nicodemi Evangelium von unsers Meisters
und Heylands Jesu Christi Leiden und Auferstehung. In
Die Heilige Schrift Altes und Neues Testaments ach dem
Grund- Textaufs neue lbersehenund ilbersetzt;nebsteiniger
Erkliirung desbuchstiiblichenSinneswie auch der ilrnehm-
sten Filrbilder und Weissagungen an Christo und seinem
Reich und zugleich einigen Lehren,die auf den Zustand der
Kirchen in unseren etztenZeiten gerichtetsind..., ol. 8, Let-
zter Theil: bestehendn einem Zusatz van Apocryphischen
Schrifften desAlten und Neuen Testaments Burlenburg:
[J. F. Haug], 1742.
340 Reads: Volksbucher, vol. 48. Leipzig: W. Wigand, 1848.
Should read: Volksbucher,vols. 49,50.Leipzig: W. Wigand,
[1849 ?].
350a Ceming, K., and J. Werlitz. Die verbotenen Evangelien.
Apokryphe Schriften. Pattloch Verlagf, 1999.
1.1.4.8.d.Greek
35Oi MlTo(tVl1C, K., trans. EuaYYEALO NlKOOT1110U. n A1T6KpvcjJa
XPLaTLaVa Kf LJiEIJa,T. cr', A1T6KpvcjJa vaYYEALa, edited by
I. 6.. Kapa~l86lToUAoc;, 136-224. Bl~ALKTj Bl~ALo81'1KT1,ol. 13.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 264/330
269
HEMATIC BIBLIOGRAPHY OF lHE ACTS OF PILATE
Thessalonique:P.Poumaras,1999. Pp. 136-224: ranslation
of Tischendorf's(no. 4) GreekAPA andAPB, 17-27,with
a long introduction and notes.]
1.1.4.8.m.Hungarian
350m Raffay, S. Apokrifus evangeliomokJezusgyermeksegerol.
Toldalekul Nikodemus evangelioma.Pozsony Bratislava]:
Wigand F. K. Konyvnyomdaja, 1912. pp. 112-143: ransla-
tion of Tischendorf's (no. 4) GreekAP A andAPB, 17-27.]
350n Vanyo, L. Apokrifek. Okereszteny rok, vol. 2. Budapest:
Szent stvan Tarsulat, 1980.2d ed., 1988. Pp. 274-82of the
2nd ed.: translation of Tischendorf's (no. 4) Greek AP B,
17-27.]
3500 Adamik, T., et al. Csodas evangetiumok. Apokrif iratok.
1996.2d ed., Budapest: Telosz, 1998. Pp. 119-40of the 2nd
ed.: translation of the Greek AP A on the basisof Tischen-
doff's first edition (no. 4).]
1.1.4.9. talian
See also no. 46a.
1.1.4.10. Polish
354a B'ldzio, J., ed. Czytania naboine ku chwale Boga. Ksiqika
dla ludu. Jansbork: Ant. G'lsiorowski, 1852. [A popular edi-
tion of GN in Eastern Prussia; translated from the German
version represented by nos. 214, 331-32, 336, 340, 342-43.
Cf. nos. 354b, 354c, 362b.]
354b Michalczyk, W., ed. Prawdziwa historya 0 belesney mf ce i
smierci, 0 cudownym zmartwychpowstaniu i wniebowstqpie-
niu Odkupiciela i Pana naszego Jezusa Chrystusa... Johan-
nisburg: Ant. G'lsiorowski, 1855. [A revision ofB'ldzio (no.
354a); it was apparently fITStpublished in 1854. Cf. nos. 354c,
362b.]
354c Michalczyk, W., ed. Ewangelia Nikodema czyli kr6tka wiado-
most 0 iywocie Pana Jezusa Chrystua ktorq napisaf Niko-
dem, Ksiqie Zydowskie, ak on sam byl widzial i doiwiadczyl,
gdyi byl nietylko Rabinem i nauczycielem Zydowskim, ale
oraz taiemnym uczniem Jezusowym Ostrooa: C. E. Salews-
ki, n.d. [3rd and 4th editions of no. 354b; revised on the basis
of a German translation published in Insterburg ("Instruci";
not otherwise identified, but apparently similar to nos. 214,
331-32. 336. 340. 342-43). Cf. nos. 354a, 354b, 362b.]
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270
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
1.1.4.11.d.
Romanian
Seeno. 366a.
1.1.4.12.Spanish
360 See also pp. 79-87: translation of Greek AP B, 17-27,pre-
ceded by a paragraph taken from the Gospel of
Bartholomew.
360a Pinero, A. El oltro JesUs.Vida de JesUs egun os Evange-
lios Ap6crifos. Argabda del Rey: EI Almendro, 1993. Life
of Christ taken from apocryphalgospels; everalpages rans-
lated from EN (see ootnotes).]
1.1.4.13. wedish
360e P.Tolleson,ed. Nicodemi Evangeliumom vaTherresoch ral-
saTes esu Christi lidande och dad, nedstigande ill hellvetet
samt uppstandelse a den tredje dagen; emte nagra vaT ral-
saTesesu Christi tal och sprak, sam val ickeanfaras afevan-
gelisterna,men finnas has andra trovardiga skriftstallare.
Stockholm:ZachariasHaeggstrom, 818.
1.1.4.14.Wendish
360m Nikodemusowakniika. Bautzen, 1843. [Mentioned in A. N.
Pypin, Das Serbisch-Wendische chriftthum n der Ober- und
Niederlausitz, Leipzig: F. A. Brockhaus, p. 42, note 3.]
1.2.Bibliographic repertories and general ntroductions to the Acts
of Pilate
1.2.1.Bibliographic epertories
362b Sembrzycki, J. K. Krotki przeglqd literatury ewangelicko-
polskiejMazurow Slqzakowod r. 1670.Wien: H. Feitzinger,
1888. pp. 43-44: on the nineteenth-century opular editions
of the Polish GN in Eastern Prussia. Cf. nos. 354a, 354b,
354c.]
366a Cartojan, N. Carlile populare in iteratura romaneasca. ol.
2. Bucarest, 1974 pp. 94-102: on the ultimate Polish origin
of EN traditions in Romania].
375a Coquin, R.-G. Langue et litterature coptes. In Christia-
nismes orientaux. Introduction a l'etude des angueset des
litteratures. nitiations au christianisme ancien. Paris: Cerf,
1993. [Po 98.]
376a Outlier, B. Langue et litterature georgiennes. In Chris-
tianismesorientaux. ntroduction a l'etude des angueset des
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http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 266/330
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272
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
38. This work has been translated into French by J. Cohen
under the title La Patrologie, ou histoire litteraire des trois pre-
miers siecles de l'Eglise chretienne (Paris: Debecourt); the
relevant passagesare found in vol. 2 (1843), pp. 562-65.]
382a Hell. In Cyclopedia of Biblical, Theological, and Ecclesi-
astical Literature, edited by J. McLintock and J. Strong,
5:171a. New York: Harper and Brothers, 1876.
383a Lipsius, R. A. Gospels, Apocryphal. In A Dictionary of
Christian Biography, Literature, Sects and Doctrines, edited
by W. Smith and H. Wace, 3:700-17. London: J. Murray,
1880. [Pp. 707-709: on AP.]
383b Christ, W. Geschichte der grieschichen Litteratul; his auf die
Zeit Justinians. Handbuch der klassischen Altertumswis-
senschaft, vol. 7. 1888. 3rd ed., 1898. [P. 886. For the 6th ed.,
see no. 393a.]
388a Rauschen, G. Grundriss der Patrologie mil besonderer
Beracksichtigung der Dogmengeschichte... Freiburg im
Breisgau: Herder, 1903. [Numerous editions. In the sixth
and seventh editions (revised by Joseph Wittig, published
in 1921), the section on the AP is on pp. 26-27.]
388b Kirchliches Handlexikon. Ein Nachschlagebuch abeT das
Gesamtgebiet der Theologie und ihrer Hilfswissenschaften,
edited by M. Buchberger, 1:45. Munich, 1907.
390a Jordan, H. Geschichte der altchristlichen Literatul: Leipzig:
Quelle und Meyer, 1911. [P. 77.]
390b TlXeront, J. Precis de Patrologie. Paris: J. Gabalda, 1918.
[Pp. 85-86.]
393a Schmid, W., and O. Stiihlin. Wilhelm van Christs Geschichte
der grieschichen Litteratur. 6th ed. Handbuch der Alter-
tumswissenschaft, vol. 7, pt. 2, 2. Munich: C. H. Beck'sche
Verlagsbuchhandlung, 1924. [Pp. 1196-98. Revised edition
of no. 383b. This edition has also been published as a sepa-
rate volume by the same publisher in 1924 under the title:
Die altchristliche griechische Litteratul: Sonder-Abdruck aus
W v. Christs Geschichte der Griechischen Literatur, 11/2, 6th
ed., with O. Stiihlin as the sole author.]
393b Cayre, F. Patrologie et histoire de la theologie. Vol. 1. 1927
(published as an independant volume under the title Precis
de Patrologie). 4th edition, Paris: Desclee, 1945. [P. 155.]
Revised edition was published in 1953. [P. 110 on EN.]
396a Goodspeed, E. J. A History of Early Christian Literature.
Chicago: University of Chicago Press, 1942. [P. 94.]
404 See no. 418e.
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273
EMATIC BffiLIOGRAPHY OF mE ACTS OF PILATE
404a Wessel,K. Apokrypha. In Reallexikon zur byzantinische
Kunst, edited by K. Wessel, 1:209-18. Stuttgart: Anton
Hiersemann, 1966. Pp. 213-14: on AP.]
405a Pilate, Acts of. In The Oxford Dictionary of the Christian
Church, ed. by F. L. Cross and E. A. Livingstone. 2d ed.,
Oxford: University Press,1974. Po 090.]
410a Trevijano, R. Pilato nella tradizione. In Dizionario Patris-
fico e di Antichita, edited by A. di Berardino, 2:2799-801.
CasaleMonferrato: Marietti, 1983. [This encyclopediahas
been ranslated into several anguages,without any signifi-
cant changes.]
411a Wilson, R. McL. New TestamentApocrypha. In The New
Testament nd Its Modem Interpreters,edited by J. Epp and
G. W. Mac Rue, pp. 429-55. Philadelphia: Fortress Press,
1988. [Pp. 441-42: on EN.]
412a McHugh, M. P. Acts of Pilate. In Encyclopaediaof Early
Christianity, edited by E. Ferguson. 1990. 2d ed., 1:13-14.
New York: Garland, 1997.
417a Drobner, H. R. Lehrbuch der Patrologie. Freiburg i. Br.:
Herder, 1994. [Pp. 22-24. French translation: Les Peresde
l'Eglise. Septsieclesde litterature chretienne, rad. de l'alle-
mand par J. Feisthauer, revu, adapte et complete... Paris:
Desclee, 1999,pp. 32-34.]
418a Moreschini, C., and E. Norelli. Storia della letteratura cris-
tiana anticagreca e latina. Brescia: Morcelliana, 1996. Vol.
2, pt. 1, pp. 300-302:on AP.]
418b Hadot, J. Nicodeme, Evangile de. In Dictionnaire de la
theologiechretienne. ncyclopaediaUniversalis.Paris:Ency-
clopaedia Universalis and Albin Michel, 1998. Pp. 588-89.]
418c Da Spinetoli, 0., Norelli, E., Zamagni, C., and Arata Man-
tovani, P., Gli apocrifi cristiani (BIBLIA.Associazione aica
di cultura biblica. Seminariestivi1998.Frascati,agosto 998).
Firenze: [Settimello], 1999. [Pp. 95-109 on EN, written by
C. Zamagni.]
418e Speyer, W. Pilatus. II. In Lexikon fur Theologie und
Kirche, 8: 298-299. Freiburg i. Br.: Herder, 1999. See no.
404 for an older edition of the same encyclopaedia.]
1.3. Studies on the Acts of Pilate
1.3.1.Date, composition, transmission
422a Calmet, Dam A. Dissertation sur les Actes de Pilate,
envoyeza l'empereur Tibere, au sujet de la mort de Jesus-
Christ. In Nouvelles dissertations mportanteset curieuses,
sur plusieurs questions qui n' ont point ete traitees dans le
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R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
Commentaire Litteral sur tous les livres de L'Ancien et du Nou-
veau Testament. Paris: Emery, Saugrain and P. Martin, 1720.
[Pp. 338-52. Cf. no. 481.]
426 On Veronica, see also nos. 566a, 971.
437a *Izydorczyk, Z. ed. The Medieval Gospel of Nicodemus:
Texts, Intertexts, and Contexts in Western Europe. Medieval
& Renaissance Texts & Studies, vol. 158. Tempe (AZ):
Medieval & Renaissance Texts & Studies, 1997. [Cf. nos.
43a, 121a, 128a, 183a, 211a, 249a, 256a, 259a, 286a, 291a,
376c, 43Th.]
437b *Izydorczyk, Z., and I.-D. Dubois. Nicodemus's Gospel
before and beyond the Medieval West. In The Medieval
Gospel of Nicodemus: Texts, ntertexts, and Contexts in West-
ern Europe, edited by Z. Izydorczyk, 21-41. Medieval &
Renaissance Texts & Studies, vol. 158. Tempe (AZ):
Medieval & Renaissance Texts & Studies, 1997.
1.3.2. The Acts of Pilate, chapters1-16 (trial of Jesus,his death,
and his resurrection)
448 Ct. nos. 513a,535a,539a,540a,544a.
453a Dubois, J.-D. L'apport des chretiens au langage symbol-
ique de I' Antiquite. L'Exemple de la litterature apocryphe
chretienne. In Les Peres de l'Eglise au XXe siecle. His-
toire-Litterature- Theologie. L' Aventure desSourcesChre-
tiennes, Patrimoine~hristianisme, pp. 237-49. Paris: Cerf,
1997. [Pp. 241-45: on AP.]
453b Gounelle, R. La Divinite du Christ est-elle one question
centrale dans Ie proces de Jesus rapporte par les Acta
Pilati? Apocrypha 8 (1997): 121-36.
453c Norelli, E. II processodi Gesu negli apocrifi. Alcuni esem-
pi. In II processoa Gesu.(BIBLIA.Associazione aica di cul-
iura biblica. Atti del Convegnonazionale. Pisa,11-13aprile
1997),pp. 89-117.Firenze: [Tipogr. Giuntina], 1998.
453d Furrer, C. Du fecit au drame: Passionevangeliqueet Actes
de Pilate. In Intertextualites.La Bible en echos,edited by
D. Marguerat and A. Curtis, 305-18.Le Monde de la Bible,
vol. 40. Geneva:LaboretFides, 2000 [OnAPB, 10; seenos.
48, 533, 534b, 572, 580, 598, 603, 634, 646, 654, 657, 888,
953a.]
1.3.3.The Acts of Pilate, chapters17-27 (Descent nto Hell)
458a. Baumstark,A. Review of Les Evangilesdesdouze apotres...,
by E. Revillout. Revue BibliQue, l. s. 3 (1906): 245-65. po.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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275
HEMATIC BffiLIOGRAPHY OF THE ACTS OF PILATE
257-58:on the relationship betweencertain ragmentsof the
Gospelof BartholomewandAP. Cf. nos.458b,466-67,468a.]
458b Tisserant,E. and Wilmart, A. Fragments grecs et latins de
l'evangile de Barthelemy (II). Revue Biblique, n. s. 10
(1913):321-68. pp. 344-47:on the relationship betweencer-
tain fragments of the Gospel of Bartholomew and AP. Cf.
nos. 458a,466-67,468a.]
461 Cf. no. 544s.
463a Du Toit, A. Neergedaal erhelle... Uit die geskiedenis an
'n interpretasieprobleem.Kampen: J. H. Kok, 1971. [On
Ap, see mainly pp. 148-50.]
466 Cf. also nos. 458a,458b, 468a.
466a Bernstein, A. E. The Formation of Hell. Death and Retri-
bution in theAncient and Early Christian Worlds. thaca and
London: Cornell University Press,1993. Pp. 274-82:analy-
sis of the Latin D I A. Cf. also no. 468.]
468 Cf. also no. 466a.
468a Westerhoff, M. Auferstehung und Jenseits m koptischen
Buch der AuferstehungJesu Christi, unseresHerrn. Ori-
entalia Biblica et Christiana, vol. 11. Wiesbaden: Harras-
sowitz Verlag, 1999 See ndex, s. v. Nikodemus Evangeli-
um. Cf. no. 458a-b,466-67].
Seealso no. 671a.
Part 2: Supplementaryexts and studies
2.1. Patristic attestations of the Acts of Pilate
Seealso no. 437b, 478a,478b, 478c,SOla,512c.
2.1.1.Greek
468m Acts of the Saint Martyrs Tarachus, Probus et Androni-
cus, chap. 9. In Acta primorum Martyrum sinceraet selec-
ta,edited by T. Ruinart. 2d ed., Amsterdam: ex officina Wet-
steniana,1713. Pp. 421,442: eferences o the anti-Christian
Acts of Pilate. This text has been ranslated nto Spanish
by D. Ruiz Bueno in Actas de los Martires, Biblioteca de
Autores Cristianos, vol. 75, 2d ed. (Madrid: La Editorial
Catolica, 1968),pp. 1128-29.]
469 Cf. also no. 501a.
471 Cf. also nos. 500a,506a,512c.
472 a. no. 512a.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 271/330
276
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
2.1.2.Latin
476 cr. alsono.478c.
2.2. Diverse studies on the Acts of Pilate
2.2.1. Date, composition, transmission
478a Baronius, C. Annales ecclesiastici.Moguntiae: Sumptibus .
Gymnici et A. Hierati Coloniens,1601. Discussionof patris-
tic attestations of AP in vol. 1:282-83and 3:80-81.]
478b Casaubon, . De rebussacriset eccciesiasticis, xercitationes
XVI ad Cardinalis Baronii prolegomena in Annales etpri-
mam eorumpartem...Geneve:J. Antoine and S. de Tournes,
1663. Pp. 675-77:discussionof patristic attestations of AP.]
478c Le Febvre, Tannegui,Epistolae.Pars altera Saumur:Apud
Danielem de Lerpiniere et Ioannem Lesnerium, 1668. Pp.
33-39: Epistula XII, Locus Tertulliani in Apolog. cap. v:
examinatur. Cf. nos. 476, 501a,504.]
478d Van Dale, A. De oraculis ueterumethnicorum dissertationes
duae...Editio secundaplurimum audacta.Amsterdam: apud
Henricum et uiduam Theodori Boom, 1700. [Pp. 608-24:
dissertatio de Actis Pilati. ]
481 Cf. no. 422a.
485 Cf. no. 379a, where the same book is quoted more accu-
rately.
500a Allard, R. La Persecution de Diocletien et Ie triomphe de
l'Eglise. 1890.2d ed., Paris: v: Lecoffre, 1900. 2:189-92:on
the Acts of Pilate published by Maximin Da ia.Cf. nos.
471,474, 505, 506b.]
501a Barnes, A. S. The Acta Pilati and the PassionDocument
of St. Luke. Dublin Review, ser. 4, 137:55 (July 1905):99-
112. [Argues for the authenticity of Pilate's report men-
tioned by Justin Martyr and Tertullian. Cf. nos. 469, 476,
478c, 483-84,489, 493, 501, 504.]
503a Schmidt, C. Exkurs III : Die Passahfeier n der kleinasi-
atischenKirche. In C. Schmidt, GespriicheJesumil seinen
Jungem nach der Auferstehung,ein katholisch-apostolisches
Sendschreiben des 2. Jahrhunderts... Texte und Unter-
suchungenzur Geschichte deraltchristlichen Literatur, vol.
43, pp. 577-725.Leipzig: J. C. Hinrich, 1919. Po 33: on the
date of Easter in the Prologue to AP.1
506a De Labriolle, P. La reactionpaioenne. tude sur a polemique
antichretienne du Ier au VIe siecle.Paris: Artisan du livre,
1934. Pp. 327-28:on Acts of Pilate published by Maximin
Dala. Cf. nos. 471, 474, 500a,505,512c.1
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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277
IBMA11C BffiLIOGRAPHY OF nIB ACTS OF PILATE
509a Cotoni, M.-H. L'Exegese du Nouveau Testamentdans la
philosophie [ran<;aisedu dix-huitieme siecle. Studies on
Voltaire and the Eighteenth Century, vol. 220. Oxford:
Voltaire Foundation, 1984. pp. 48, 62, 142, 58. Ct. nos. 324,
379, 3791, 11, 512b.]
512a Pourkier, A. L'Heresiologie chez Epiphane de Salamine.
Christianisme antique. Paris: Beauchesne,1992. pp. 366-
70: on Epiphanius's reference to AP. Ct. no. 472.]
512b Gounelle, R. Voltaire, traducteur et commentateurde l' E-
vangile deNicodeme. RevuedesEtudesAugustiniennes43
(1997): 173-200. Ct. nos. 324, 379, 3791, 09a,511.]
512c Levieils, X. La polemique anti-chretienne des Actes de
Pilate. Revue d'histoire et dephilosophie religieuses79/3
(1999): 291-314. Ct. no. 471, 474, 500a,505, 506a.]
2.2.2. Trial of Jesus, His Death, and His Resurrection (Acts of
Pilate, chaps. 1-16)
513a Huidekoper,F. TheJudaism at Rome (B.C. 76 to A.D. 140).
1876. Reprinted in Works of F: Huidekoper, vol. 1, New-
York: D. G. Francis,1887. Pp. 462-63:on the Jews nAP.
Ct. nos. 448, 535a,539a.540a,544a.]
525a Peebles,R. J. The Legend of Longinus in EcclesiasticalTra-
dition and in English Literature, and Its Connectionwith the
Grail. Baltimore: J. H. Furst Compagny,1911. [Especially
pp. 87-92. Ct. nos. 528, 535, 544, 871, 878, 889, 893, 896.]
525b Bludau, A. Namen der Namenlosen n den Evangelien.
TheologieundGlaube21 (1921):273-93. Ct. nos.534a,535.]
527a Benoit, P.,and M. E. Boismard. Synopse esquatre evangiles
en ranrais avecparalleles desapocrypheset desPeres.Vol.
1. 1965.3rd ed., Paris: Cerf, 1981. Indicates numerous par-
allels between AP Greek A and B and the canonical
Gospels. See ndex. Ct. no. 322.]
528 Ct. also nos. 525a,544c.
531a Cecchelli, C. Mater Christi. Vol. 2, pt. 3. Oriente et Occi-
dente,vol. 4. Rome: Fr. Ferrari, 1948. pp. 116-17:on Mary's
laments n AP Greek B. Ct. nos.48, 533,534b,572,580,598,
603, 634, 646,654, 657, 888, 953a,957a.]
534a Metzger, B. M. Names for the Nameless n the New Tes-
tament. A Study in the Growth of Christian Tradition. In
Kyriakon. FestschriftJ. Quasten,edited by P.Granfield and
J. A. Jungmann, 1: 79-99.Munster: Aschendorff, 1970. Ct.
nos. 525b, 535.]
534b Alexiou, M. The Ritual Lament in Greek Tradition. Cam-
bridge: Cambridge University Press, 1974. [Pp. 68-74. Ct.
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278
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
nos. 48, 531a, 533, 572, 580, 598, 603, 634, 646, 654, 657,888,
953a,957a.]
535 Reprint of no. 534a. Ct. also no. 525b.
535a Schreckenberg, H. Die christlichen Adversus-Judaeos- Texte
und ihr literarisches und historisches Umfeld (1.-11. Jh.).
Europaische Hochschulschriften, Reihe 23, vol. 172. Frank-
furt am Main: P. Lang, 1982. [P.350. Cf. nos. 448, 513a, 539a,
540a, 544a.]
539a Dehanschutter, B. Anti-Judaism in the Apocrypha. In
Papers Presented to the Tenth International Conference on
Patristic Studies, Oxford 24-29 August 1987, edited by E. A.
Livingstone, Studia Patristica, vol. 19, pp. 345-50. Louvain:
Peeters Press, 1989. [Po347. Cf. nos. 535a, 540a, 544a.]
540a Poorthuis, M. The Improperia and Judaism. Questions
liturgiques 72 (1991): 1-24. [Pp. 11-13: on AP 9, 2. a. nos.
448, 513a, 535a, 539a, 544a.]
540b Evans, C. A. Noncanonical Writings and New Testament
Interpretation. Peabody (MA): Hendrickson Publishers,
1992. [Pp. 220-24: on correspondences between the canon-
ical gospels and AP. Cf. no. 540f.]
540c Atwood, R. Mary Magdalene in the New Testament Gospels
and Early Tradition. Ph.D. diss., University of Basel. Bern:
P. Lang, 1993. [P. 190: wrongly considers AP as a Gnostic
text. ]
540e Brown, R. E. The Death of the Messiah. From Gethsemane
to the Grave 2 vols. The Anchor Bible Reference Library.
New-York: Doubleday, 1994. [See index in vol. 2, s.v. Acts
of Pilate .]
54Of Charlesworth, J. H., and C. A. Evans. Jesus in the Agrapha
and Apocryphal Gospels. In Studying the Historical Jesus.
Evaluations of the State of Current Research, edited by B.
Chilton and C. A. Evans, New Testament Tools and Stud-
ies, vol. 19, pp. 479-533. Leiden: E. J. Brill, 1994. [Pp. 493-
95: on correspondences between the canonical gospels and
AP. Cf. no. 540b.]
544a Cerbelaud, D. Themes de la polemique chretienne contre
Ie judaIsme au lie siecle. Revue des sciencesphilosophiques
et theologiques 81 (1997): 193-218. [Pp. 204-5. Cf. nos. 448,
513a, 535a, 539a, 540a.]
544b Elliott, J. K. The Influence of the Apocrypha on Manu-
scripts of the New Testament. Apocrypha 8 (1997): 265-71
[Pp. 269-70: on AP.]
544c Beggiato, F. Origini e diffusione del topos leggendario-nar-
rativo del 'Perdono di Longino' nelle letterature romanze.
In Il Viaggio dei Testi. Atti del III Colloquio Internazionale
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279
HEMAllC BmLIOGRAPHY OF THE ACTS OF PILATE
sui Medioevo Romanzo e Orientale,Venezia,10-13 ottobre
1996, Istituto Ellenico di Studi Bizantini e Postbizantini,
Castello3412, orthcoming. [Cf. nos. 528,535,871, 878,889,
893,896.]
544d Norelli, E. La tradizione sulla Nascita di Gesu nell'
AAH8HL AOrOL di Celso. In Discorsi di verita. Paganes-
imo, Giudaismo e Cristianesimo a confronto nel Contro
Celso di Origene.Atti del II Convegnodel Gruppo Italiano
di Ricercasu Origene e la Tradizione Allessandrina , edit-
ed by L. Perrone, Studia Ephemeris Augustinianum, vol.
61, pp. 133-69. Rome: Institutum Patristicum Augustini-
anum, 1998.
544e Feiertag, J.-L. Le theme litteraire des vetements mortu-
aires du Seigneur depuis Ie temoignage des 'apocryphes'
jusqu'a ceux des ecits de pelerinage. Apocrypha 10 (1999):
56-74.
544f Kaestli, J.-D., La litterature apocryphepeut-elle etre com-
prisecommeune litterature auseconddegre'(G. Genette)?
In Intertextualites.La Bible en echos, dited by D. Margue-
rat and A. Curtis, 288-304.Le Monde de la Bible, vol. 40.
Geneva: Labor et Fides, 2000. [pp. 295-296and 303-304.]
Seealso no. 308.
2.2.3. Descent nto HeD (Acts of Pilate, chaps.17-27)
544m Dietelmair, J. A. Historia dogmatis de descensuChristi ad
inferos itteraria Nuremberg: Seitzund Zeit, 1741.Reprint,
Altorff: L. Schupfelius,1762. Pro 70-73.]
544n Huidekoper, F. The Beliefof the First Three CenturiesCon-
cerning Christ's Mission to the Underworld. 1879.Rev. ed.,
New-York: D. G. Francis, 1886, eproduced in Works of F.
Huidekoper,vol. 2, New-York: D. G. Francis,1887. Pp.153-
56, note D.]
5440 Meyer, W. Die Geschichtedes Kreuzholzes vor Christus.
Abhandlungen der Philosophisch-PhilologischenClasse er
Koniglich BayerischenAkademie der Wissenschaften 6/2
(1882): 104-6. Cr. nos. 548,552, 560-61,586, 606.]
544p Turmel, J. Etude historique sur la descentedu Christ aux
enfers. Annales de Philosophie Chretienne, d series,no. 1
(1902-3): 508-33 pp. 526-28.]
544q Schmidt, C. Exkurs II : Der Descensusad inferos in der
alten Kirche. In C. Schmidt, Gespriiche esu mil seinen
liingern nach der Auferstehung,ein katholisch-apostolisches
Sendschreiben des 2. lahrhunderts Texte und Unter-
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280
R.
GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
suchungenzur Geschichte der altchristlichen Literatur, vol.
43. Leipzig: J. C. Hinrich, 1919. [Pp. 573-75: on EN.]
544r Dolger, F. J. Sol Saluris. Gebet und Gesang m christlichen
Altertum, mil besondererRucksicht aufdie Os ung in Gebet
und Liturgie. 1925.3rd ed., Munich: AschendorffscheVer-
lagsbuchhandlung,1972. pp. 349-51: on EN.]
544s Prtimm, K. Die Darstellungsform der Hadesfahrt des
Herrn in der Literatur der alten Kirche. Kritische
Bemerkungen zum ersten Kapitel des Werkes von Jos.
Kroll: Gott und Holle. Scholastik. Vierteljahresschrift ur
Theologie und Philosophie 10 (1935): 55-77. Pp. 70-72: on
J. Kroll's (no. 461) interpretation ofD/.]
545a Bar, F. Les routesde 'Autre-Monde. Descentes ux enferset
voyagesdans 'au-dela. Mythes et Religions. Paris: Presses
Universitaires de France, 1946. Pp. 60-63.]
545b Grillmeier, A. Der Gottessohn m Totenreich. Soteriolo-
gischeund christologischeMotivierung der Descensuslehre
in der alteren christlichen Ueberlieferung. Zeitschrift fur
katholische Theologie71 (1949): 1-53,184-203. Pp. 10, 19:
on EN. Reprinted in no. 5521.]
546a Rousseau, O. La descente aux enters dans Ie cadre des
liturgies chretiennes. La Maison-Dieu 43 (1955): 104-23.
[pp. 113-19: on EN.]
548 Ct. nos. 5440,562b.
550a Simon, M. Adam et la redemption dans a perspective de
l'Egiise ancienne. In Types of Redemption. Contributions
to the Theme of the Study-Conference eld at Jerusalem14th
to 19th July 1968, edited by R. J. Z. Werblowsky and C. J.
Bleeker, Studies n the History of Religions, vol. 18,pp. 62-
71. Leiden: E. J. Brill, 1970. [Pp. 68-69: on Christ-Adam
typology in D/.]
5521 Grillmeier, A. Mit ihm und in ihm. Christologische
Forschungen nd Perspektiven. ribourg: Herder, 1975. pp.
86, 95. Reissue,with minor changes,of no. 545b.]
553a Vogels, H. J. Christi Abstieg ins Totenreich und das
Liiuterungsgerichtan den Toten.Eine bibeltheologisch-dog-
matische Untersuchung um Glaubensartikel descenditad
inferos. Freiburger heologischeStudien,vol. 102.Freiburg:
Herder, 1976. pp. 210, 223.]
554 Seealso no. 561a.
559a Cozby, . A., Jr. Gnosis and the Cross:The Passionof Christ
in Gnostic Soteriology as Reflected in the Nag Hammadi
Codices. Ph.D. diss.,Duke University, 1985. P.208: draws
a parallel betwen the Concept of the Great Power (NH VI,
4) and the D/.]
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http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 276/330
281
HEMAllC BIBLIOGRAPHY OF THE ACTS OF PILATE
561a Ernst, J. Johannes er TiiufeJ: nterpretation Geschichte-
Wirkungsgeschichte. eiheft zur Zeitschrift fiir die neutes-
tamentliche Wissenschaft, vol. 53. Berlin and New-York:
Walter de Gruyter, 1989. Pp. 239-40.Cf. nos. 554, 566,650-
51,653,671-72.]
562a Bauckham, R. "Descents to the Underworld." In The
Anchor Bible Dictionary, edited by D. N. Freedman,vol. 2,
pp. 145-59. New-York: Doubleday, 1992. [Pp. 156-58.]
Reprinted in R. Bauckham, The Fate of the Dead. Studies
on the Jewish and Christian Apocalypses,Supplements o
Nouum Testamentum,vol. 3. Leiden: E. J. Brill, 1998. [On
EN, seepp. 40-44.]
562b Stone, M. E. A History of the Literature of Adam and Eve.
Society of Biblical Literature, Early Judaismand Its Liter-
ature, vol. 3. Atlanta, Georgia: ScholarsPress,1992. Pp. 2,
22, 37, 53, 57: on Seth's trip to Paradise.Ct. nos. 548, 552,
559-61,586, 606.]
562c Baudry, G.-H. "Le retour d' Adam au Paradis, symbole du
salut de l'humanite." Melangesde ScienceReligieuse51/2
(1994): 117-47 Pp.137-39, 141.]
562d Dufraigne, P.AdventusAugusti, AdventusChristi.Recherche
sur l'exploitation ideologique et litteraire d'un ceremonial
dans l'Antiquite tardive. Collection des Etudes Augustini-
ennes, Serie Antiquite, vol. 141. Paris: Institut d'Etudes
Augustiniennes, 1994. Pp. 138-40.]
Seealso nos. 376d, 676a.
2.3. Texts related or indebted to the Acts of Pilate
2.3.1.Greekand Latin traditions
2.3.1.1. Greek
Editions
563 Cf. no. 671a,963a.
564 Cf. also nos. 579b,638a.
566a Macarius Magnus.Apocritikos. Edited by C. Blondel. Paris:
Klincksieck, 1876. [A fragment of the sixth chapter of bk. 1
deals with Veronica. Cf. nos. 426,524-25,971.]
567a Goltz, E. F., von der, ed. A6yot; aUJT7JP[at;TpOCT]I 1Tap-
eiVOI .Eine echteSchrift desAthanasiw. Texte und Unter-
suchungenzur Geschichte der altchristlichen Literatur, n.
s., vol. 14.2a.Leipzig: J. C. Hinrichs, 1905. [Pp. 51, 107-9:
questions asked by Hell at Christ's Descent.]
574a Rey, A.-L. Patriciw. Eudocie, Optimw, ComedeJerwalem.
Centons homeriques (Homerocentra). Sources Chreti-
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ennes,vol. 437. Paris: Cerf, 1998. [Pp. 474-83.C
585a.
no
Seealso no. 671a.
Studies
576 Cf. also no. 638a.
579a Pallas, D. I. Die Passion und BestattungChristi in Byzanz.
Der Ritus-Das Bild. Munich: lnstitut fUr Byzantinistik und
neugriechischePhilologie, 1965. pp. 52-53,55,58,175,228.]
579b Lafontaine, G. "Les homelies d'Eusebe d' Alexandrie."
Memoire de licence en Philosophie et Lettres, Universite
catholique de Louvain, 1966. Ct. nos. 564-66,576,613,627,
638a.
585a Rey, A.-L. "Homerocentra et litterature apocryphe chreti-
enne: quels apports ?" Apocrypha 7 (1996):123-34. [P.133.
Ct. no. 574a.]
Seealso no. 952a.
2.3.1.2. Latin
Editions
593 Ct. also no. 757a.
619a Ratcliff, E. C. Expositio antiquae liturgiae Gallicanae...
Henry Bradshaw Society, vol. 98. London: The Regnum
Press,1971. Suggests hat in sections1.8and 1.12 he litur-
gy alludes to the Latin DI A.]
633a Geerard, M. "Le bon larran. Un apocryphe inedit." In
Philologia Sacra.Biblische und patristischeStudien iir Her-
mann J. Frede und Walter Thiele zu ihrem siebzigsten
Geburtstag, dited by R. Gryson, 355-63.Vetus Latina. Die
Reste der altlateinischen Bibel, Aus der Geschichte der
lateinischenBibel, vol. 24,pt. 2. Freiburg: Herder, 1993. a.
no. 676a.]
Studies
638a Leroy, J., and F. Glorie. " 'Eusebe d' Alexandrie' source
d' 'Eusebe de Gaule'." SacrisErudiri 19 (1969-70):33-70.
[Cf. nos. 564-66,576, 579b, 613,627.]
643a Bestul, T. H. Texts of he Passion: Latin Devotional Litera-
ture and Medieval Society. Middle Ages Series. Philadel-
phia: University of PennsylvaniaPress,1996. See index s.
v. "Nicodemus, Gospel of'.l
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 278/330
283
HEMATIC BffiLIOGRAPHY OF THE ACTS OF PILATE
2.3.2. Eastern Traditions
2.3.2.1.Arabic
Editions and translations
646a Galbiati, G., ed. Joannis Evangelium apocryphum arab ce.
Milan: In Aedibus Mondadorianis, 1957. [1:198-263 and
2:266-352:chaps.44-55 contain parallels with AP. Cf. nos.
647a,647b, 665a.]
647a Moraldi, L., ed. Vangeloarabo apocrifo dell'Apostolo Gio-
vanni da un manoscrittodella BibliotecaAmbrosiana.Milan:
JaccaBook, 1991. Pp. 173-209: haps.44-55 contain paral-
lels with AP. Cf. nos. 646a, 647b,665a.]
647b Provera, M. E. II VangeloArabo dell' Jnfanzia secondo l
Ms. Laurenziano Orientale (n. 387). Quademi de La Terra
Santa. Jerusalem:FranciscanPrinting Press,1973. a. nos.
646a,647a,665a.]
647c Battista, A. and Bagatti, A. II Combattimento di Adamo.
TestoArabo inedito con traduzione italiana e commento.
Studium Biblicum Franciscanum,Collectio Minor, vol. 29.
Jerusalem: FranciscanPrinting Press,1982. Seepp. 132-33
for parallels with EN.]
2.3.2.2.Armenian
649a Sargisean,B. Elisei ew Zak'aria kat'olikosi i t'alumn K'ris-
tosi carern ew Nikodimosi awetaran. Venise: Saint-Lazare,
1910.
653a Ordoyan, G. V. Nikodimosean parakanonibemakanac'man
mi nor tarberakxm dari kilikyan jeragrum, Palma banasir-
akan handes: Istoriko-Filologicheskii Zhurnal 118, no. 3
(1987): 141-52.
2.3.2.3. Coptic
Editions and translations
656a Pseudo-Chrysostom. Homily on the Resurrection and the
Apostles. In Homelitica rom the Pierpont Morgan Library.
Seven Coptic Homilies Attributed to Basil the Great,John
Chrysostom,and Evodius of Rome,edited and translated
under the direction of L. Depuydt. Corpus Scriptorum
Christianorum Orientalium, vols. 524-25,Scriptores Copti-
ci, vols. 43-44.Louvain: E. Peeters,1991. [Severalparallels
with EN are suggested n vol. 525, p. xix.]
Studies
656m Luisier, p. De Pilate chez es Coptes. Orientalia Christiana
Periodica 62 (1996): 411-25.
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284
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
2.3.2.4. Ethiopic
Studies
665a Witakowski, W. The Miracles of Jesus: An Ethiopian
Apocryphal Gospel. Apocrypha 6 (1995):279-98. pp. 292-
93: onAP 1.5-6as he ultimate sourceof Jesus' ortieth mir-
acle. Cf. nos. 646a,647a,647b.]
Seealso 656m.
2.3.2.5.Georgian
667a Tchkhikvadze, N. Vne traduction georgienne d'un origi-
nal perdu: l'histoire de l'apocryphe de l'Eglise de Lydda
(CANT 77). Apocrypha8 (1997):179-91.
2.3.2.6.
Slavonic
Editions
671a Vaillant, A. L'Homelie d'Epiphane sur l'ensevelissement
du Christ. Texte vieux-slave, exte grec et traduction fran-
caise. Radovi Staroslavenskog nstituta 23 (1958): 6-83.
[Edition and translation of Pseudo-Epiphanius, Oratio in
divini corporis sepulturam Ct. nos. 563, 963a.]
674a Makaryk, I., ed. About the Harrowing of Hell. Edmonton:
Canadian nstitute of Ukrainian Studies,1989. [An Ukrain-
ian text related to the Descent nto Hell.]
2.3.2.7.
Syriac
Editions
676a Pennacchietti,F.A. Illadrone e l cherubino. Dramma litur-
gico cristiano orientale n siriaco e neoaramaico.Torino: S.
Zamorani, 1993. [Pp. 4-5, 94-95: on the Good Thief at the
gates of Paradise.a. no. 633a.]
Seealso 665a.
2.3.3. Medieval WesternTraditions
2.3.3.3 Dutch, Low German
Editions
701 Ct. also no. 776a.
2.3.3.4English
Editions
712 Ct. alsono. 755a.
723 a. alsono.737a.
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285
EMATIC BIBLIOGRAPHY OF mE ACTS OF PILATE
Studies
728a Kretzmann, P. E. The Liturgical Element in the Earliest
Forms of the Mediaeval Drama, with SpecialReferenceso
the English and German Plays.Minneapolis: University of
Minnesota, 1916. Pp. 116-33:on the plays on the Harrow-
ing of Hell and EN.]
737a Barclay, L. L. Gospel writing in the later Middle Ages.
Three Dramatic Examples: Das St. Galler Passionsspiel, a
Passion Nostre Seigneur (Sainte-Genevieve)nd The York
Plays. Ph.D. diss., ndiana University, 1975. Cf. nos. 723,
728-30,739,769.]
754a Hall, T. N. The Cross as Green Tree in the Vindicta Salva-
toris and the Green Rod of Moses n Exodus. English Stud-
ies72, no. 4 (1991):297-307.
755a Taylor, S. Harrowing Hell's Halfacre: Langland's Medita-
tion of the 'Descensus' from the Gospel of Nicodemus.
Essays in Medieval Studies: Proceedings of the Illinois
Medieval Association 10 (1993): 145-58. Cf. nos. 712,719,
722,751, 753-54.]
757a Faerber, R. Deux homelies de Paques en angiais ancien.
Apocrypha 6 (1995):93-126. Translation, with commentary,
of two homilies on Christ's Descent nto Hell (Blicking VII
and CCC 41). Cf. also nos. 593,595-96,600,608,611,618,
626-28,630a, 637,711,717, 812,821-22,830.]
2.3.3.5. French
Studies
776a Zambon, F. Robert de Boron et segretidel Graal. Bibliote-
ca dell' Archivum Romanicum, SeT.1, vol. 189. Firenze:
Leo S. Olschki, 1984. [Pp. 19-27: on EN as a source of Le
Roman de l'estoire dou Graal. Cf. nos. 701-2,762, 792-93.]
Seealso no. 737a.
2.3.3.6 High German
See also 5440, 728a.
Part 3: Iconography and the Acts of Pilate
950a Cabrol, F. Ascension dans 'art. Dictionnaire d'archeolo-
gie chretienneet de liturgie, edited by F. Cabrol, vol. 1, pt. 1,
cols.2931-32.Paris: Letouzey et Ane, 1907. On the Venise
Ciborium. ]
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286
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
952a *Millet, G. Recherches sur l'iconographie de I' Evangile aux
XWe, XVe et XVIe siecles d'apres les monuments de Mistra,
de la Macedoine et du Mont-Athos. Bibliotheque des Ecoles
fran~aises d' Athenes et de Rome, vol. 109. Paris: Fonte-
moing, 1916. [Often quotes AP Greek B and gives icono-
graphical and textual parallels.]
953 Published in 1907 and not in 1924.
953a Cottas, v: L'Influence du drame Christos Paschon sur l'art
chretien d'Occident. Paris: P. Geuthner, 1931. [On Mary's
laments. a. nos. 48, 533, 572, 534b, 580, 598, 603, 634, 888,
957a.]
954a Weitzmann, K. The Narrative and Liturgical Gospel Illu-
mination. In New Testament Manuscript Studies, edited by
M. M. Parvis andA. P. Wikgren, 151-174,215-219. Chicago:
University of Chicago Press, 1950. Reprinted in K. Weitz-
mann, Studies in Classical and Byzantine Manuscript Illus-
tration, Chicago, 1971, pp. 247-70. [Pp. 257-58 on EN.]
957a Weitzmann, K. The Origin of the Threnos. In De Artibus
Opuscula XL. Essays in Honor of Erwin Panofsky, edited
by M. Meiss, 476-491, New York: University Press, 1961.
Reprinted in K. Weitzmann, Byzantine Book Illumination
and Ivories, Collected Studies Series, vol. 107, London: Var-
iorum Reprints, 1980. [Ct. nos. 48, 533, 534b, 572, 580, 598,
603, 634, 646, 654, 657, 888, 953a.]
958 Reprinted in K. Weitzmann, Byzantine Book Illumination
and Ivories, Collected Studies Series, vol. 107. London: Va-
riorum Reprints, 1980.
963a Storer, J. The Anastasis in Byzantine iconography. Ph.D.
diss., University of Birmingham, 1986. [Also discusses sim-
ilarities between EN and some pseudo-Epiphanian homi-
lies. Ct. nos. 563, 671a.]
967a Mariaux, P.-A. Detoumements iconographiques chez
Theophile-Alexandre Steinlein. A propos de La Libera-
trice. Gazette des Beaux-Arts May-June 1993: 231-40. [Ct.
no. 970.]
969 Delage, E. La Descente du Christ aux enfers de la cathe-
drale de Faras. Genese et developpement d'un theme icono-
graphique. These de doctorat nouveau regime, Ecole Pra-
tique des Hautes Etudes, Section des Sciences religieuses,
Paris, 1995. Now published in Villeneuve d' Ascq: Les Pres-
ses du Septentrion, 1999.
970 Mariaux, P.-A. Figurer l'apocryphe, ou la verite devoilee
par la peinture. Quelques iconographies du XIXe siecle face
a l'imaginaire chretien. Apocrypha 7 (1996): 293-30. [P. 299:
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287
mEMA11C BIBLIOGRAPHY OF mE ACTS OF PILATE
on Th.-A. Steinlein's rethinking of the iconography of
Christ's Descent nto Hell. Cf. no. 967a.]
971 Tristan, F. Les premieres mageschretiennes.Du symbolea
l'icone: lIe-VIe siecles.Paris: Fayard, 1996. Pp. 190-94,338-
42: on DI and on Veronica. Cf. nos. 426, 524-25, 566a.]
972 Thierry, N. "Images cappadociennes typiquesdu proces du
Christ. L'intervention de la femme de Pilate -Le Christ en
gloire -Calphe d6icide." In Apocryphes armeniens trans-
mission -traduction -creation -iconographie. Actes du
colloque international sur la litterature apocrypheen angue
armenienne (Geneve,18-20 septembre1997), edited by v:
Calzolari Bouvier, J -D. Kaestli and B. Outtier. Publications
de l'Institut Romand des SciencesBibliques, vol. 1. Lau-
sanne:Editions du zebre, 1999. Pp. 179-87.]
Seealso no. 183a,183c,525a,676a.
We have been unable to find a place in this bibliography for a
curious polemical booklet entitled My resurrection. A Missing
Chapter rom the Gospel of Matthew Discoveredand Published by
G. 'W;Foote (London: R. Forder, 1892,14pp.), which uses he EN
for largely satyrical purposes. The pamphlet implies that, at the
end of the nineteenthcentury, he EN wasevoked in some (local ?)
controversies concerning Christ's resurrection and held in high
esteem.Foote invents a mockingly disrespectfulcounter-narrati-
ve of Christ's resurrection, ostensibly old by another man raised
from the dead, o show hat any narrative of the EN kind is nothing
but fanciful. Here are some extracts of this booklet:
"A short time ago, I had occasion o treat the most remarkable
episode of the story of Christ's crucifixion and resurrection. (...)
Now, although I dealt with this marvel, I felt I had not exhausted
the subject, so I pondered it until it nearly exhausted me. Further
researchesafforded me very little relief. (...) Alack and alack Such
are the difficulties that beset a man who would 'prove all things' in
that simple Book which a wayfaring man though a fool mayunders-
tand, and which no wayfaring man except a fool doesunderstand.
In this mood, read again,after an nterval of some years, he apo-
cryphal Gospel of Nicodemus: an ancient Scripture, supposed by
some earned owls to be the work of Christ's disciple of that name,
by sharpercritics to be a pious forgery, and by some still more saga-
cious to be an honest document once in considerable use by Chris-
tians, and written in much the same way as other gospels, ncluding
our four canonicalones; hat is,by some unknown person,at an unk-
nown time, in an unknown place, for the use of unknown churches,
with an unknown amount of truth, an unknown quality of tradition,
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288
R.
GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
and an unknown ratio of invention. Now the Gospel of Nicodemus
is especially ull of information on the very subject of my perplexi-
ty."
A summary of the EN 16-17 follows. Foote quotes EN 27.3:
"'what they wrote was ound perfectly o agree, he one not contai-
ning a one letter more or less than the other.' No such nsistanceof
Gospel Harmony ever occured before or since. Most inspired histo-
rians flatly contradict each other on essentialpoints, but these two
agreed on the minutest details. (...)"
and summarizes EN 18-27. He then continues:
"Nicodemus ong-winded narrative (...) fits in with Matthew's brief
account,amplifying and supplementing t in the mostadmirable man-
ner. Here then, I thought, is a good basis o work from; the matter
will now perhaps be cleared up, and my mind will obtain rest. The-
reupon I walked out into the quiet night, under the solemnstars and
amid the ghostlyrustle of trees,absorbed n contemplation, nhaling
deep breaths, only occasionnalybroken by a piff from my friendly
pipe. Suddenly was confronted by a strange old man of venerable
aspect.Centuries seemed o have ploughed their traces on his featu-
res, ancient memories brooded in the depths of his hollow eyes,his
long white locks and beard were like the accumulated snows of a
thousand winters, and his low sepulchral voice sounded like faint
echoes rom a profound abyss.
'Stranger,' he began, do not be alarmed. (...) For more than eigh-
teen centuries I have roamed this world like the Wandering Jew of
tradition, waiting for the occasion which has come now. This roll
(here he placed it in my hand) contains the true record of what you
are pondering. You alone of all mortals have beenseizedwith a bur-
ning desire to explore its dephths,and only to such an one I am per-
mitted to entrust my long-hoarded treasure. My task s now ended,
and peace visits me after centuries of unrest. Farewell Farewell '
I looked, and he wasgone. (...) When I opened he mysterious roll
I found an unintelligible document,written in some strange,uncouth
tongue. Closer inspection convinced me that the characters were
Hebrew. (...) Early in the morning I visited my friend. He informed
me that the manuscript was ndeed written in Hebrew, but without
points. He therefore concluded that it was very ancient, and would
take a considerable ime to decipher. (...)
The following is my friend's translation, with just a few touches
from my own pen, which, he allows, do no violence to the senseof
the original.
'My name is Obadias. am one of the saints who rose from their
graves at the Crucifixion, and the only survivor of the company. am
doomed to roam the world until I find the appointed recipient of my
story.
The Gospel of Nicodemus s a fraud. There is no word of truth in
it. The whole narrative may easilybe proved fabulous. Charinus and
Lenthius are not Hebrew names.Some Roman namesdid creep nto
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289
HEMATIC BIBLIOGRAPHY OF THE ACTS OF PILATE
Palestine at that time, but they were never adopted by strict Jews,
least of all by Levites like Simeon.
I became a follower of JesusChrist in the fIrSt year of his minist-
ry, which lasted sevenyears,and not three, as s generally supposed.
Tho years later I died eating too much Paschal amb...'
There follows an ronic narrative of the resurrectionof Obadias,
along with sixty-nine other disciples of Jesus,among whom were
Shimei, Zambres, Simeon,Jonathan,David and Amos. At Christ's
crucifixion, their gravesopened,and they cameback nto the world,
naked. They spent a few days looking for food. They learnt from
a man (angel Gabriel) that Christ would rise and that they had to
wait until his resurrection before entering Jerusalem.So they wai-
ted, meeting several people, including Cephas. As soon as they
heard that Christ had risen, they went to Jerusalem. Christ appea-
red to them and preached o them for three hours; one by one, the
risen men fell asleep.The following day, Obadias began o search
for his wife... whom he found married again (to Zebedee). The
authorities brought witnesses o prove that Obadiasdied four years
earlier, and pronounced the risen man to be an mpostor. So Oba-
dias married a younger woman and had to live until such ime as
he found a person whom he could entrust with the narrative of his
own resurrection.
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290
R. GOUNELLE -Z. IZYDORCZYK
Index of Authors
Adamik, T. no. 3500
Aitzemiiller, R. no. 96a
Alexiou, M. no. 534b
Allard, R. no. 500a
Arata Montovani, P. no. 418c
Arouet, F.-M. SeeVoltaire
Atwood, R. no. 540c
B1idzio, J. no. 354a
Bagatti, A. no. 647c
Bar, F. no. 545a
Barclay, L. L. no. 737a
Barnes, A. S. no. 50la
Bamstone, W. no. 322a
Baronius, C. no. 478a
Battista, A. no. 647c
Bauckham, R. no. 562a
Baudry, G.-H. no. 562c
Baumstark, A. no. 458a
Beggiato, F. no. 544c
Benoit, P. no. 527a
Berardino, A. di no. 410a
Bergier, N.-S. nos. 37921 793
Bernstein, A. E. no. 466a
Bertoni, G. no. 326a
Bestul, T. H. no. 643a
Birnbaum, H. no. 98b
BI8hova, E. no. 98e
Bleeker, C. J. no. 550a
Blondel, C. no. 566a
Bludau, A. no. 525b
Boismard, M. E. no. 527a
Bozinis M1To lVT]t;;), . no. 350i
Brown, R. E. no. 540e
Bruckner, A. no. 72a
Buchberger, M. no. 388b
Cabrol, F. no. 950a
Calmet, Dom A. no. 422a
Calzolari Bouvier, V. no. 972
Cartojan, N. no. 366a
Casaubon, I. no. 478b
Cayre, F. no. 393b
Cecchelli, C. no. 351a
Ceming, K. no. 350a
Cennac, C. no. 112a
Cerbelaud, D. no. 544a
Charlesworth, J. H. no. 540f
Chilton, B. no. 54Of
Christ, W. no. 383b
Cohen, . no. 381a
Coquin,R.-G. no. 375a
Cotoni,M.-H. no. 509a
Cottas, : no.953a
Cozby . A. Jr. no. 559a
Crane, . no. 316a
Cross, .L. no. 405a
Cross, . E. no. 15la
Curtis,A. nos.453d, 44f
Da Spinoteli,O. no. 418c
De Beaumarchais,.-A.no.379]
De Labriolle,P.no. 506a
Dehanschutter,. no. 539a
Delage,E. no. 969
Depuydt, . no.656a
Dietelmair, . A. no. 544m
Dolger,F.J. no.544,
Dooley, . no.256a
Drobner,H. R. nos.4l7a
Du Toit,A. no.463a
Dubois, J.-D. nos. 56a, 56b, 437b,
453a
Dufraigne,P.no.562d
Eis,G. no.237a
Elliott, J. K. nos.323a, 44b
Epp,J. no. 41la
Ernst, . no.561a
Evans,C. A. nos.540b, 40f
Faerber, . no. 757a
Feiertarg, .-L. no.544e
Feisthauer,. no. 4l8c
Ferguson, . no. 4l2a
Fischer, . no.376b
Foote,G. W.p. 287
Frede,H. J. no. 376b
Freedman . N. no.562a
Freydank,. no.96a
Furrer, . no.453d
Galbiati,G. no. 646a
Geerard,M. no.633a
Glorie,F.no. 638a
Goodspeed,. J. no. 396a
Goltz,E. F. vonder.no.567a
Goscher,. no. 380b
Gounelle,R. nos.330a, 76c,
453b, 12b
Granfield,P.no. 534a
Grillmeier,A. nos.545b, 52]
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291
IBMATIC BIBLIOGRAPHY OF nIB ACTS OF PILATE
Grossouw,W. no. 54a
Gryson, R. no. 633a
Hadot, J. no. 418b
Hall, T. N. no. 754a
Hamesse, . no. 43b
Hoffmann, W. J. nos. 128a,249a
Huidekoper, F. nos. 513a,544n
Iannucci, A. A. no. 259a
Izquiero, J. no. 121a
Izydorczyk, Z. nos.43a, 43b, 121a,
128a,183b, 211a,249a, 256a,
259a,286a, 291a,330a,376c,
437a,437b
Jordan, H. no. 390a
Jungmann,J. A. no. 534a
Kaestli, J.-D. nos. 544f, 972
Karavidopoulos,J. D. no. 350i
Keller, F. no. 79c
Klatscher,A. no. 234a
Klausner, D. N. no. 291a
Kobjak,N. A. no. 98d
Konzal,V. no. 98g
Krammerer, W. no. 46a
Kretzmann, P. E. no. 728a
Kroll, J. no. 544s
Lafontaine, G. no. 579b
Le Febvre, Tannegui. no. 478c
Leroy, J. no. 638a
Levieils, X. no. 512c
Lipsius, R. A. no. 383a
Livingstone, E. A. nos. 405a,539a
Luisier, P. no. 656
Mac Rue, G. W. no. 411a
Macarius Magnus no. 566a
Makaryk, I. no. 674a
Marguerat, D. nos. 453d,5441
Mariaux, P.-A. nos. 967a,970
Marx, C. W. no. 183b
McHugh, M. P.no. 412a
McLintock J. no. 382a
Meiss, M. no. 957a
Metzger, B. M. no. 534a
Meyer, W. no. 5440
Michalczyk, W. nos. 354b, 354c
Michalowska, T. no. 98h
Millet, G. no. 952a
Minceva,A. no. 98c
Mladenova,M. no. 981
Moehler, J. A. no. 381a
Moraldi, L. no. 647a
Moreschini, C, no. 418a
Movers, F. C. no. 380a
Norelli, E. nos. 418a,418c,453c,
544d
O Gorman, R. no. 211a
Ordoyan, G. v: no. 653a
Guttier, B. nos. 45a,376a,972
Pallas,D. I. no. 579a
Parvis,M. M. no. 954a
Peebles,R. J. no. 525a
Pennacchietti,F. A. no. 676a
Perrone, L. no. 544d
Pinero, A. no. 360a
Poirot, E. no. 376d
Poorthuis, M. no. 540a
Pourkier, A. no. 512a
Provera, M. E. no. 647b
Priimm, K. no. 544s
Pseudo-Athanasiusno. 567a
Pseudo-Chrysostom o. 656a
Pseudo-Epiphaniusno. 570a
Raffay, S. no. 350m
Rauschen,G. no. 388a
Ratcliff, E. C. no. 619a
Reinhart, J. no. 97a
Revillout, E. no. 45a
Rey, A.-L. nos. 574a,585a
Reinhart, . no. 98ab
Rousseau,O. no. 546a
Rossi,F. no. 46a
RUinart, T. no. 468m
Ruiz Bueno, D. no. 468m
Rzepka, W. R. nos. 79a,79b
Sargisean,B. no. 649a
Schmid,W. no. 393a
Schmidt,C. nos. 503a,544q
Schreckenberg,H. no. 535a
Sembrzycki,J. K. no. 362b
Simon, M. no. 550a
Smith, Kathryn A. nos. 183a,183c
Smith,W. no. 383a
Sobolevskij,A. I. no. 88a
Speyer,W. no. 418e
Stiihlin, O. no. 393a
Stone,M. E. no. 562b
Storer,J. no. 963a
Strong,J. no. 382a
Swaen,A. E. H. no. 155a
Taylor, S. no. 755a
Tchkhikvadze,N. no. 667a
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COMPTESRENDUS
LEHNARDT, Andreas, Bibliographie zu den Jildischen Schriften aus
hellenistisch-romischer Zeit, Glisterloh, Glisterloher Verlag
(Jtidische Schriften ailS hellenistisch-romischer Zeit, VI/2), 1999.
ISBN 3-579-04277-7.
La serle Judische Schriften aus hellenistisch-romischer Zeit (JSHRZ), fon-
dee par Werner Georg Ktimmel en 1974 et bien confine de tout chercheur dans
Ie domaine du Judaisme antique, contient des traductions, avec ntroductions
et notes, des textes juifs non compris dans Ie canon des rabbis, a l exclusion
des textes de Qumran, de la litterature rabbinique, de Philon et de Flavius
Josephe. Les fascicules separes (de taille parfois importante) se distribuent
sur cinq «volumes» (Biinde), intitules respectivement« Narrations historiques
et legendaires », « Instruction sons orme narrative »,« Instruction sons orme
didactique », «Ecrits poetiques », «Apocalypses ». A la collection des textes
va s ajouter maintenant un sixieme volume de Supplementa,destine a paraitre
en trois parties entre 1999 et 2001. La premiere partie, confiee a H. Lichten-
berger, U. Mittmann- Richert et G. S. Oegema, doit contenir une Introduction
litteraire, historique et theologique a la litterature comprise dans la serie; la
troisieme partie, preparee par F. W. Horn, H. LOhr, H. Omerzu et C. Billles-
bach, consiste en un Index des sujets, des noms propres et des passagescites.
La deuxieme partie, dont il est question ici, est la Bibliographie redigee par
A. Lehnardt, qui se propose de completer les bibliographies des fascicules deja
edites. La preface la presente comme «une liste, mise a jour jusqu en 1998»
[Ie papillon sur les Supplementa, nclus dans Ie volume, a «jusqu en 1997»]
«et tendant a l exhaustivite -ce qui n est certes pas realisable -de publi-
cations scientifiques concernant les traductions des apocryphes incluses dans
les JSHRZ, de certains pseudepigraphes non esseno-qumraniens et d ecrits
juifs hellenistiques (a l exception de Philon et de Josephe) » (p. XI).
Les bibliographies sur les differents ecrits, diposees dans l ordre qu ils ont
dans les volumes des JSHRZ, sont precedees d une partie generale (subdivi-
see en sections consacrees respectivement aux bibliographies, aux introduc-
tions generales aux ecrits juifs d epoque hellenistico-romaine, aux reuvres de
methodologie et d histoire de la recherche, aux anthologies et aux repertoires)
et d une partie thematique comprenant 590 titres. Les travaux anterieurs a
1800 ne sont mentionnes qu exceptionnellement; les recensions Ie sont de
maniere tres partielle. Un index des auteurs modernes complete Ie volume.
Quiconque a utilise des repertoires bibliographiques sait combien il faut
etre reconnaissant a leurs auteurs et combien il est facile de leur adresser des
critiques. L ampleur du domaine retenu dans ce volume (9240 itres, sans comp-
ter les recensions), Ie rend extremement utile et, dans Ie meme temps, l ex-
pose a des omissions et a d autres types d imperfections. Il est donc honnete
d en reconnaitre d abord l utilite: aucun chercheur interesse au Judalsme de
l epoque hellenistique et romaine ne pourra s en passer. La prise en compte
de travaux ecrits en hebreu et dans les langues slaves Ie rend d autant plus
interessant. Les remarques qui suivent, dues a quelques sondages,ne visent
qu a contribuer a line amelioration loTSd eventuelles reeditions.
L ordre des itres a l interieur des subdivisions pour chaque ouvrage ancien
est alphabetique. Cela est parfaitement comprehensible, mais on regrette un
Apocrypha 11, 2000,p. 293 -320
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 289/330
294
COMPTES RENDUS
pen de ne pas avoir, par exemple, es editions successives 'un texte dans 'ordre
chronologique. En outre, l'auteur a renonce a toute information ou evalua-
tion, ce qui est legitime, mais qui ne permet de se aire aucune idee non seu-
lement de la valeur des contributions, mais aussi du niveau auquel elles se
situent (des articles tres courts de dictionnaire ou des renseignements donnes
en passant ootoient des etudes approfondies). Mais tout celareleve d'options
sur lesquelles on petit discuter. Plus graves sont certaines omissions. La revue
italienne Ricerche storico-bibLiche figure dans a liste des abreviations, mais je
ne trouve pas de trace des contributions contenues dans un numero sur l'apo-
calyptique publie en 1995, dont certaines portaient sur les apocalypses uives
et sur les problemes de methode. De l'un des collaborateurs de ce volume,
Gabriele Boccaccini (Universite d' Ann Arbor), specialiste du judaisme entre
300 avant notre ere et 200 apres, sont mentionnes trois articles, mais pas l'im-
portant volume Middle Judaism, Philadelphia, Fortress Press 1991 (nouvelle
ed. italienne 1993), largement consacre a des etudes sur des textes pris en
compte dans a presente bibliographie. Et on remarque avec etonnement qu'a
propos du Martyre d'Isai"e (un pseudepigraphe uif cree par les savants du XIXe
siecle, et encore difficile a exclure de la recherche) toutes les anciennes edi-
tions des differents temoins du texte sont enumerees a la p. 167,mais il manque
l'edition critique complete publiee en 1995 par line equipe de specialistes
comme vol. 7 de la Series Apocryphorum du Corpus Christianorum (Thm-
hout, Brepols). Omission d'autant plus singuliere que Ie volume de commen-
taire qui accompagne cette edition figure dans la bibliographie sons e n 3082.
Les coquilles sont trop nombreuses. La grande majorite des titresen ita-
lien, par exemple, est plus ou moins gravement defiguree. II suffira d'en
prendre comme exemple la serie de titres du professeur Paolo Sacchi, 'un des
specialistes reconnus de l'apocalyptique juive (n 583-587 pour les titres en ita-
lien). Le premier contient trois ralites sur une ligne. Dans les suivants, Ie titre
de son recueil L' apocaLittica giudaica e Lasua storia revient a plusieurs reprises,
sons deux formes egalement fantaisistes. Une perle: Ie n 3101, attribue a un
imaginaire P. C. L. Bovi (present, bien sur, dans l'index final), n'est qu'un
double atrocement deforme du n 3098 (P.C. Bori). On a l'impression que les
fiches ont ete compilees par plusieurs collaborateurs, plus ou moins conscien-
cieux, et qu'elles ontete juxtaposees sans verification suffisante.
La liste des abreviations est elle aussi a corriger. Un regard rapide sur les
p. 1-2 revele la necessite au moins des corrections suivantes: AAA: ...
Arch. .e.ology...;AAST: ...A~ademia...; ACFr: Annuaire (sans article) du
Coll~e...; AlON: ...dell'lstituto...; ArztChr: ~..: (ce qui montre que me-me
les titres allemands, en general corrects, ne sont pas totalement a l'abri d'er-
reurs); ASB : AttiJ;lella...; Asp. : Aspren~; BA: ...Arch. .e.ologist.
Loin de disqualifier Ie volume, ces remarques veulent souligner l'exigence
de l'ameliorer en vue des services remarquables qu'il pourra rendre.
E. NORELL
CHAzON,Esther G. & STONE, ichael (ed.), with the collaboration
of Avita PINNICK, seudepigraphicPerspectives.. he Apocrypha
and Pseudepigrapha n Light of the Dead SeaScrolls. Proceedings
of the International Symposiumof the Orion Center or the Study
of the Dead SeaScrolls and Associated Literature, 12-14 January,
1997, Leiden / Boston. / Koln, Brill (Studies on the Texts of the
Desert of Judah, XXXI), 1999, viii + 217 p. ISBN 90-04-11164-6.
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295
OMPTESRENDUS
Le present ouvrage reunit les contributions du deuxieme congres interna-
tional de l Orion Center a Jerusalem. Son titre met deja en lumiere la pro-
blematique delicate de ce congres, a savoir completer la definition du terme
« pseudepigraphe » a partir des manuscrits de la Mer morte. Dans son article
« Pseudepigraphy in the Qumran Scrolls: Categories and Functions» (p. 1-
26), Moshe J. BERNSTEINente de differencier les diverses categories de pseu-
depigraphie. Apres examen de l ensemble des textes, il propose de distinguer
les trois categories suivantes: «authoritative », «convenient» et «decorative
pseudepigraphy» (p. 3). Dans Ie cadre de la pseudepigraphie «pre-qoumra-
nienne », Bernstein considere la litterature henochienne, 2 Baruch, 4 Esdras
et Jubiles comme faisant partie de la categorie « Authoritative pseudepigra-
phy », parce que « he function of pseudepigraphy in these examples is to
strenghten the work s authority» (p. 6). La litterature testamentaire, de son
cote, est classee comme «convenient pseudepigraphy» (p. 6), c est-a-dire «a
lighter or weaker form of authoritative pseudepigraphy» (p. 7). D autres
ecrits (comme les Psaumes de Salomon ou la Priere de Manasse) sont, quant
a eux, consideres comme «decorative pseudepigraphy» (p. 7), comme des
pseudepigraphes dont Ie contenu n a rien a voir avec Ie titre. II propose cette
repartition pour etudier la pseudepigraphie de Qoumran. Au terme de son
etude, il conclut que la plupart de ces manuscrits, communement appeles
«Bible reecrite », appartiennent a la categorie «convenient pseudepigraphy»
(p. 25).
Du fait de la notoriete du livre des Jubiles au sein des ecrits pseudepigra-
phiques, il est tout a fait normal que plusieurs chapitres de cet ouvrage lui
soient consacres. James C. V ANDERKAM «<The Angel Story in the Book of
Jubilees », p.151-170) s interesse a l histoire de la chute des anges (Gn 6, 1-4)
qui apparait en Jub 5-7; il demontre que Ie fecit raconte en Jub est probable-
ment «< t does seem he most economical explanation », p. 169) ortement ins-
pire de 1 Henoch 6, Ie scribe des Jubiles ayant reecrit les versets de sa source
pour qu ils s accordent au mieux a ses ntentions (p. 170). La question de la
revelation dans Jubiles est abordee par George W. E. NICKELSBURGans son
article «The Nature and Function of Revelation in 1 Enoch, Jubilees, and
Some Qumranic Documents» (p. 91-119); il compare Ie contenu, la forme, la
fonction et l arriere-plan social de la notion de «revelation» dans deux livres
et quelques ecrlts sectaires rouves a Qoumran (p. 91) la caracteristique « reve-
latrice» du livre des Jubiles tient avant tout au fait qu il est attribue a MoIse
dont la source d inspiration, Dieu, est la figure «revelatrice » par excellence
(p. 104). Le troisieme article qui traite un aspect du livre des Jubiles est inti-
tule « The Naming of Levi in the Book of Jubilees » (p. 59-69) et a ete ecrit
par Betsy HALPERN-AMARU; Levi, l ancetre des pretres, est aussi cense etre
un personnage ideal par excellence pour un ecrit pseudepigraphique; la per-
sonne responsable de son nom varie: dans Ie Texte Massoretique, c est (pro-
bablement) son pere Jacob; dans la LXX, Ie Pentateuque Samaritain et des
textes syriaques, c est sa mere Lea.
Levi est aussi e sujet de l article qui suit: «Levi in Aramaic Levi and in the
Testamentof Levi» (p. 71-89). Marinus DE JONGEY met en relation les frag-
ments d un document arameen de Qoumran sur Levi (ALD) avec es Testa-
ments des Douze Patriarches, et, avant tout, avec e Testament e Levi. II semble
possible qu ALD soit Ie modele direct du Testament e Levi (p. 87). U ne autre
question (a mes yeux non sans implications ideologiques) se pose: Ie docu-
ment arameen de Levi (ALD) et Ie Testamentde Levi sont-ils issus du chris-
tianisme, sans aucun trait originaljuif? Selon de Jonge, une Grundschriftjuive
ne peut pas etre etablie a partir de ces textes, a supposer qu il y en ait eu une;
«the Testamentsmust be studied as a Christian composition which makes use
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COMPTES RENDUS
of a surprising number of Jewish traditions, probably on the basis of acquain-
tance with written Jewish sources» (p. 71).
Dans son article « Pseudepigraphy in Rabbinic Literature» (p. 27-41), Marc
BREGMAN laide pour une comprehension indulgente du fait que leg rabbins
«have no compunction about simply putting words into the mouth of God,
Moses and other biblical figures» (p. 28). Leur attitude est ustifiee par la foi
qu ils ont que la Torah orale a ete revelee a Moise sur Ie mont Sinal et qu el-
Ie doit etre transmise aux generations futures.
John J. CoLLINS,dans son article «Pseudepigraphy and Group Formation
in Second Temple Judaism» (p. 43-58), examine des textes de la secte de
Qoumran qui se pretendent ecrits par Henoch, Daniel (4Q243-246) et Moise
(4Q390); cette etude lui donne l occasion de se demander si la pseudepigra-
phie est une forme d ecriture individuelle ou collective.
Le Rouleau du Temple (llQT) est un des ecrits leg mieux connus de Qoum-
ran. Lawrence H. SClllFFMANmet cet ecrit en rapport avec son environnement
«<The Temple Scroll and the Halakhic Pseudepigrapha of the Second Temple
Period », p. 121-131); il distingue (p. 125) des pseudepigraphes mosaiques
(Moise conIIne revelateur, mais pas conIIne auteur) et des pseudepigraphes
diving (un texte dans lequel Dieu se revele) ; pour Schiffman, Ie Rouleau du
Temple appartient aux pseudepigraphes diving, parce que Moise ne parle pas
lui-meme mais qu il est Ie destinataire de la parole divine (p. 131).
Le personnage de Noe convient aussi bien a la pseudepigraphie que Moise
ou Daniel. Michael E. STONE ecrit dans « The Axis of History at Qumran »
(p. 133-149) a genealogie de Noe ainsi que son role de relais entre leg eres
ante- et postdiluvienne. Noe, en accomplissant un holocauste, peut etre relie
a la tradition des Levites (Gn 8, 20). Bien qu il soit «difficult to make abso-
lutely certain statements about what existed and what didn t » a Qoumran (p.
142), Stone suppose qu il y avait un/des livre/s de Noe abordant leg sujets sui-
vants: la naissance de Noe, leg instructions sacerdotales, la medecine et la
demonologie (p.l40). Le Livre de Noe interesse aussiCana WERMAN«<Qum-
ran and the Book of Noah» (p. 171-181]). Comme cet ouvrage est mentionne
dans la litterature qoumranienne et pseudepigraphique, Werman etudie Ie
contenu different de chaque source en leg mettant en relation; elle conclut
que l auteur des Jubiles utilisa l Apocryphe de la Genese et Ie texte arameen
de Levi de Qoumran (ALD), qui eux, au contraire, connaissaient Ie Livre de
Noe.
Le dernier article, « Qumran Pseudepigraphy in Early Christianity. Is 1
Clem. 50:4 a Citation of 4QPseudo- Ezekiel (4Q385)?» de Benjamin G.
WRIGHT (p. 183-193) met en evidence la transmission de la litterature juive
non-biblique avant tout par les auteurs chretiens. Comme champ de recherche,
il choisit 4Q385, fragment 12, qui suit Ez 37 (vision des ossements desseches)
en Ie combinant avec Es 26, 19-20. Au vu d autres ecrits chretiens qui effec-
tuent une combinaison semblable, B. J. Wright estime probable qu 1 Clem 50,
4 cite Ie texte de 4QPseudo-Ezekiel, ou que res deux documents dependent
d un modele commun.
Contrairement a ce que Ie titre de ce collectif laisse entendre, legapocryphes
ne sont guere pris en consideration par leg auteurs. En depit de cela, leg dif-
ferents articles stimulent la reflexion et l approfondissement des multiples
aspectsenonces concernant leg pseudepigraphes et leg manuscrits de la Mer
morte.
T. NAEF
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297
OMPTESRENDUS
POWELL, Mark Allan, Jesus as a Figure in History. How Modem
Historians View the Man from Galilee, Louisville (KY), Westmin-
ter John Knox Press, 1998, pp. 238. ISBN 0-664-25703-8.
Vittorio Fusco, dans un article paru en 1998 «<La quete du Jesus histo-
rique. Bilan et perspectives », dans D. Marguerat, E. Norelli, J.-M. Poffet
[ed.], Jesus de Nazareth. Nouvelles approches d une enigme, Geneve, Labor
et Fides, 1998, p. 25-57), conclut ainsi: «Nous ne partageons donc pas la
conclusion selon laquelle la recherche historique sur Jesus ne serait parve-
nue a aucun resultat (...). Devrait-on admettre qu il ne reste de place que pour
le Jesus de la lvi, mais dans ce cas, d une foi qui ne releve pas le deli de l his-
toire, ou bien unefoi en d autres Jesus, etrangers aussi bien d lafoi qu d l his-
toire, relatifs aux besoins des individus ou des groupes?» (p. 56, c est nous
qui soulignons). L enjeu theologique de la question du «Jesus historique»
est pose; c est Ie meme, si nous voyons bien, que celui qui anima la «pre-
miere quete» liberale : reinscrire la figure de Jesus dans l histoire en l arra-
chant a une «foi pure », sans liens avec l histoire, une «foi» qui ne serait
que reponse a des « besoins ». Cet effort a maintenant une histoire, faite
d echecs et de recommencements, d arrets et de renouvellements, d apories
et d euphories. Apres Ie seisme de Schweizer,puis l etiolement de la« deuxie-
me quete» autour de Kiisemann, nous voici dans ce que l on nomme depuis
Ie debut des annees 1990 la «troisieme quete du Jesus historique ». Dix
annees qui meritent deja un bilan auquel s emploie Ie precieux livre de Mark
Allan POWELL.
L auteur, professeur au Trinity Lutheran Seminary de Columbus (Ohio),
offre une synthese a la fois breve et bien informee des nombreux debats qui
s inscrivent dans cette« troisieme quete », essentiellement americaine. Apres
une rapide introduction, il propose un tableau fiche et varie des differentes
theses avancees ces dix demieres annees. Le merite du livre ne s arrete pas
la: non content de presenter d une maniere fort pedagogique et toute ame-
ricaine un debat en realite complexe, il situe ces travaux dans une proble-
matique historiographique plus large, portant sur la question des criteres et
de la methode.
Le premier chapitre «<Les historiens decouvrent Jesus») s efforce de
retracer l histoire de la quete historique de Jesus, depuis Ie XVIlie siecle et
la «premiere quete» jusqu au milieu du xxe siecle (la «deuxieme quete»
de la theologie post-dialectique). Le merite de ce chapitre n est pas seule-
ment didactique: il permet a M. A. Powell de montrer que la «troisieme
quete » ne trouve son sellSque sur Ie fond d une histoire plus longue: il y a
une histoire de la quete historique, une histoire instructive puisqu elle nous
permet de saisir sur Ie vir l interaction complexe entre travail historique et
historicite du travail historique lui-meme. Cette «double historicite» (ou
cette historicite de l enquete historique) ne devrait certes pas nous condui-
re au scepticisme radical de Schweizer, mais elle interroge Ie travail de l his-
torien.
Le deuxieme chapitre ( « Sources et criteres » esquisse une presentation
de ce qui fait Ie ClEurde la troisieme quete : la question des sources et celie
des criteres. L historien qui se penche sur la question du Jesus historique se
trouve devant une quantite de sources res modeste. Le renouvellement passe
des lors par deux chemins: l interrogation a nouveaux frais de sources
anciennes, eevaluees (ainsi de certains apocryphes), tres rarement de sources
nouvelles, et une discussion sur les criteres d authenticite (l attestation mul-
tiple, la dissimilarite, Ie langage et l environnement [culturel], la coherence,
etc.). A ce stade, l auteur se contente de l enumeration. Mais toute la ques-
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298
COMPTES REND US
tion estde savoircommenthierarchiseret articuler ces riteres.Pourne don-
neTqu'un exemple, . D. Crossan onde toute sa reconstitution d'un Jesus
non-apocalyptique ur e critere de l'attestation multiple, en ecartanta prio-
ri ce qui ne serait attesteque par tine seule source,ce qui Ie conduit a valo-
riser (sur-?) a double attestationQueUe & Evangilede Thomas.Question
difficile et decisives'il en est,qui aissera eut-etre e lecteurde M. A. Powell
sur sa aim.
Le troisieme chapitre «< nstantanes: magescontemporaines e Jesus»)
leve un premier voile sur a stimulante et parfois deconcertante iversite de
la troisieme quete. On y voit Jesus our a tour «prophete social» (R. A.
Horsley),« Juif charismatique» G. Vermes),«magicien» M. Smith),« sage
juif» (B. Witherington) ou encore«philosophe cynique» (F.G. Downing).
Cet« eclatement»dit bien quelquechosede la troisieme quete.La suite de
l'ouvrage accentuedu Teste e sentiment: la forte variation dans e jell des
criteres et dessources qui s'inscrit dans a recherche ecente redecouvrant
l'incroyable diversite du uda isme u premier siecle,mais aussides philoso-
phies et religionshellenistiques lus ou moinspresentes ncettememePales-
tine du ler siecle)suscite ine multitude de «pistes» que legchercheurs ar-
courent en tOllSgens.Les paradigmessautent, egenquetesse disseminent,
I' «enigme » se creuse.Si 'heure de a «synthese» commence sonner, lle
ne petit etre, comme on voit, que bien fragmentaire,de juxtaposition, en un
mot fort peu «synthetique».
Du quatrieme auneuviemechapitre,M. A. Powell sepenchesurquelques
figures importantes de la troisieme quete :,le JesusSeminar onde par R.
Funck (chapitre 4), J. D. Crossan chapitre 5), N. J. Borg (chapitre 6), E. P.
Sanders chapitre 7),J. P. Meier (chapitre 8), et enfin N. T. Wright (chapitre
9). Ceschapitres ont tOllS egmerites et leg quelques imites de l'ensemble
de l'ouvrage: its nous font decouvrir des travauxparfois peu connusenco-
re sur Ie continent, d'une maniere a la fois claire et bien informee, mais,
comme oute tentative de presentation 'ensembleet de synthese ansdoute,
ils nous laissentsur notre faim. L'essentielest ci la decouverteet l'horizon
qui s'ouvre: Ie Jesusde Crossans'inscrit dans 'ethico-sapiential uif (avec
influence hellenistique),sanshorizon eschatologique.Borg, quant a lui, en
se basantsur tine meme nterpretation de la couche a plus profonde de Q
(suivant en cela leg travaux de J. Kloppenborg), parvient aussia un Jesus
sapiential,dont 'eschatologie e seraitoriginellementque« politique », 'es-
poir d'un «renversementsocial». Cette igne est bien differente de celIe de
Sanders,qui renoue avec a questionde la messianitede Jesus, ur e fond
d'un judaisme beaucoupplus riche et divers que ne Ie pensaientencore un
Bultmann ou un Kiisemann.Meme resistanceet meme reprise de l'escha-
tologique et de l'apocalyptique chez Meier, contre un Jesus strictement
sapientialou cynique. Wright, pour sa part, rejoint cette resistanceen insis-
tant sur a conscience rophetique de Jesus, ans a ligne messianique.On
voit que Ie champ est arge et Ie debatvif: Ie lecteur sauragre a Powell de
nous y introduire.
Dans un dernier chapitre conclusif, M. A. Powell reprend leg grandes
questionsposeespar la troisieme quete, qui restent devantnous leg ques-
tions de methode (sourceset criteres), a place de Jesusdans e judaisme,et
dans quel udaisme (hellenistique? charismatique? rophetique ?), a ques-
tion de l'eschatologiqueet de l'apocalyptique, a question du politique, la
questionde a conscience e soide Jesus, tc. L'auteur s'interroge aussi, ort
judicieusementnous semble-t-il, sur legpresupposesdeologiquesqui ani-
ment legchercheurs.oar exemvle sur a Questiondu surnaturel.
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OMPTESRENDUS
Un livre passionnant, lair et solide, ouvrant sur de multiples questions
et introduisant a un champde recherches arfois meconnusur e continent.
Meconnaissanceeciproque? On pent se e demanderen constatant 'ab-
sence e toute reference ontinentale ecentedans a presentation e Powell,
y compris dans sa precieuse bibliographie de pourtant vingt-trois pages.
T. LAUS
MARGUERAT, aniel, NORELLI,Enrico POPPET,ean-Michel
(du.), Jesus de Nazareth. Nouvelles approches d'une enigme, Gene-
ve, Labor et Fides (Le Monde de la Bible, 38), 1998,612p. ISBN
9-782830-908572.
Amid the torrent of recent publications on the historical Jesus, many of
them generally classified as contributions to the « hird quest » of the histori-
cal Jesus, his book is a significant one for serveral reasons. It is a product of
a research programme in the universities of Lausanne, Geneva, Neuchatel and
Fribourg, and so most of its contributors (13) are francophone scholars from
Switzerland and France, joined by one francophone Canadian, two English-
speaking North Americans, two Italians, two Germans and four German-
speaking Swiss.While thus genuinely international, it represents most obvious-
ly and engagement by francophone scholars with the third quest, treated here
mainly as a North American phenomenon (British third-questers such as Geza
Vermes, N. T. Wright, or A. E. Harvey are ignored). It deserves not only to
rank as a new landmark in the important tradition of francophone study of
the historical Jesus here surveyed in a useful essayby E. CuVILLIER), but also
to contribute to the North American debate itself. In addition, it is unusual
(in the context of contemporary historical Jesus research) in its interdiscipli-
narity, including contributions by three systematic theologians, who interact
with the biblical scholars, alongside also experts in Jewish studies and histo-
rians of art and literature, However, the dialogue between biblical and theo-
logical scholars is disappointingly one-sided. The presumption on all sides
seem o be that the exegetesprovide the historical results with which the theo-
logians must then come to terms. There is very little theological critique of the
quest, despite the fact that there is a strong rejection of the positivist illusion
of historians' neutrality (D. MARGUERAT, . 561-562)and despite recognition
of the secular ethos of the American third quest, with its deliberate removal
of Jesus from christology and the history of salvation (V: Fusco, p. 42). Never-
theless this is a rich and wide-ranging volume, comprising surveys and ana-
lyses of Jesus scholarship, studies of Jesus in nineteenth-century French art
and literature, first-century Judaism and Jesus' relation to it, the character of
Jesus' role and teaching, the value of apocryphal Christian literature for the
quest, Jewish readings of Jesus, and systematic theological reflections. One
only misses attention to the contribution of the Fourth Gospel to the quest,
since the only essay o deal with John concerns not the quest, but the signifi-
cance of the eartWy Jesus for Johannine theology (J. ZUMSTEIN).
Obviously a short review cannot do justice do such varied content. I will
limit myself to mentioning four themes and issues which for me emerged from
more than one essay as significant contributions to the quest. First, there is a
strong rejection (especially by V. Fusco, D. MARGUERAT nd J. SCHLOSSER)
of the dichotomy between eschatological and sapiental elements in the Gos-
pel traditions, which has led to reconstructions of Jesus exclusively in one or
other of these modes: an apocalyptic visionary (E. P. Sanders) or a socially
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300
COMPTES RENDUS
radical wisdom teacher (D. Crossan, B. L. Mack etc.). This dichotomy is cor-
rectly shown to be alien to first-century Judaism (D. MARGUERAT), hough
surprinsingiy without reference to the Qumran wisdom texts which now show
how far Jewish wisdom was also eschatological by Jesus' time. MARGUERAT
and S~OSSER both argue for a Jesus whose teaching in sapiental form was
decisively affected by his expectation of the coming kingdom. Moreover, the
dichotomy between wisdom and apocalyptic fails the test of the criterion of
«sufficient explanation» which is the second theme to which I wish now to
draw special attention.
\/: Fusco's incisive, critical account of the history of all three questsends with
a brief but important discussion of criteria of authenticity, notable for its refu-
tation of the way Crossanuses he criterion of multiple attestation. Fusco argues
that the criterion« par excellence », under which the others, nsofar as hey have
validity, can be subsumed, s what he calls the criterion of « sufficient explana-
tion» (p. 53) and D. MARGUERAT alls the criterion of «historical continuity»
(p. 294). It means that Jesusand his teaching must have been such as o explain
both the facts of his own fate and the character of earliest Christianity, as well
as the variety of the Gospel traditions. The criterion is not new. Indeed, Cros-
san himself defined a form of it, only to reject it later as oo subjective. As Fusco
points out, it is a criterion with which much good Jesus scholarship has implici-
tely worked. It is good to see ts superiority to the more commonly defined cri-
teria set out in Fusco's essayand exemplified in MARGUERAT's.
Since the extra-canonical Gospels and Gospel traditions are a topic of com-
mon interest between Swiss biblical scholarship and the American third ques-
ters, the contributions of J.-D. KAESTLIand E. NORELLI,on the GospelofTho-
mas and Papyrus Egerton 2 respectively, along with NORELLI'S oncluding
reflections on the historical sources for the quest, are of special nterest. KAEST-
u is critical both of Crossan's excessivelypositive and John Meier's excessively
negative evaluation of Thomas as an independent source of Gospel traditions.
NORELLIargues that the question of dependence or interdependence of the
canonical sources s not the most important question; rather the extra-canoni-
cal sources are part of the whole picture of the various ways in which Jesusand
his teaching were received and reflected in early Christian traditions, of all of
which an adequate account of the historical Jesusmust take account.
Finally, several of the contributors (G. THEIssEN,G. RoCHAIs,C. GRAPPE),
join Richard Horsley in seeing in the ministry of Jesus a distinctive response
to the socio-economic crisis of Jewish-Palestine in his time. Gerd THEISSEN'S
masterly essay s especially illuminating in its attention to the precise chro-
nological place of Jesus' ministry and in expounding the crisis as created by
the political and cultural integration of Palestine into the Roman Empire.
R. BAUCKHAM
LUDEMANN,Gerd JANSSEN, artina, Suppressed Prayers. Gnos-
tic Spirituality in Early Christianity, trad. par John Bowden, Lon-
don, SCM Press, 1998, 174 p. ISBN 0-334-02716-0.
Cet ouvrage epresenteune nouvelle edition, augmenteeet corrigee,de
l'original allemand UnterdruckteGebete.GnostischeSpiritualitiit m fruhen
Christentum Stuttgart,Radius Verlag, 1997), raduit par John Bowden. Ce
livre fournit une Ies utile anthologiede extesspirituelsanciensd'inspiration
gnostique.
Les textes sont presentesen traduction,sans exte original en regard. Is
sont raduits du grec,du latin, du syriaque,du corte et du mandeen les ver-
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301
OMPfES RENDUS
sions syriaques et mandeennes sont dues a Roald Zellweger, p. 10). La matie-
re est organisee selon quatre grands themes, a leur tour subdivises en sous-
rubriques: Ie PeTe nconnu (p. 17-38), a chute et la souffrance dans Ie monde
(p. 39-56), Ie salut et Ie retour (p. 57-119) et l hostilite de la part de l Eglise
(p. 120-123), auxquels s ajoute tine section contenant des donnees supple-
mentaires sur res differents themes (p. 124-147).
Une introduction generale presente Ie cadre historique, tandis que d autres
introductions particulieres presentent chaque theme principal et chaque texte.
La traduction, avertit la preface, est souvent libre, et les phrases incompre-
hensibles ou trop longues ont ete coupees, alors que d autres peu claires ont
ete completees ou corrigees, et ce toujours dans Ie but de fournir une traduc-
tion aisement lisible. II va sans dire que toutes res interventions sont signalees
dans Ie texte avec des signes diacritiques (p. 9). Des notes en fin de volume (p.
148-170), tine notice sur les sources (p. 171) et une bibliographie sommaire (p.
173-174)concluent Ie livre. On regrettera l absence d index analytique.
Quels sont es textes figurant dans cette anthologie, et de quelle epoque sont-
ils? La preface declare qu il s agit d une collection de textes taxes d heretiques
par l Eglise (p. 9), mais Ie choix comprend aussi (heureusement) des extes qui
n ont que peu a voir avec Ie christianisme, notamment des textes mandeens,
manicheens, hermetiques et neo-platoniciens (cf. p. 12-14). L adjectif« gnos-
tique » doit donc ici etre entendu dans son sellS arge. L introduction generale
Teste assezvague sur la datation de res textes. Elle presente la situation ecla-
tee du christianisme a ses debuts, plus particulieremnent au COUTsu deuxie-
me siecle. A cette epoque beaucoup de groupes heterodoxes subsistaient, dont
les textes ont difficilement survecu aux attaques des auteurs ecclesiastiques et
a la persecution de l Eglise, qui se deroulera toutefois un peu plus lard (d. p.
11). On pourra dater une partie des textes cites dans cette anthologie du deuxie-
me siecle, mais beaucoup sont du troisieme, voire du quatrieme.
II me semble que les auteurs insistent souvent sur l intolerance de l Eglise
envers les gnostiques, alors que ceux-ci apparaissent comme des champions
de la liberalite. Ainsi s explique Ie developpement du quatrieme theme, qui
conceme l hostilite de l Eglise a leur egard. Par exemple, a propos de l atti-
tude positive des gnostiques envers les femmes (p. 15 et n. 22), les auteurs ne
mentionnent pas que les Actes de Paul et Thecle, contemporains, rencontrent
un grand sucres dans la plupart des eglises «officielles », ce qui pourrait indi-
quer que la condition « nferieure » de a femme etait aussidiscutee au sein de
l Eglise. Quoi qu il en soil, ce recueil offre un bon aper~u des themes majeurs
de la spiritualite gnostique. On remarque ainsi Ie caractere a la fois modeme
et ancien de cette forme de religiosite (par exemple sa nature rationnelle et
existentielle, son caractere elitaire et son mepris du corporel). Ce choix de
textes permet enfin de se plonger dans e climat spirituel tourmente de l epoque
qui va de Marc Aurele au seuil de l age de Constantin, oilles differentes gnoses
s inscrivent bien (tout comme Ie christianisme).
Les traductions sont tres lisibles. Les notes de commentaire aux textes sont
toutefois tres fares sinon inexistantes. II faut donc se servir des explications
donnees dans les introductions, qui sont lisibles et d une remarquable quali-
te ; pour alleger Ie texte, tout discours technique est en effet concentre dans
des notes en fin de volume, oil figurent des renvois bibliographiques utiles, et,
parfois, la discussiondes positions critiques actuelles. Dans ces notes, on aurait
pu encore signaler les problemes poses par l identite d Hippolyte (dont on cite
l Elenchos) et l existence de deux Apocalypses de Paul (on cite ici celIe de Nag
Hammadi).
Grace a ce livre, qui, tout en etant facile d acces, respecte les exigences du
discours scientifique, Ie lecteur peut donc se familiariser avec les principaux
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302
COMPTES RENDUS
textes (et inscriptions) gnostiques parvenus en tradition directe (textes de Nag
Hammadi, Corpus Hermeticum, etc.), ainsi qu avec les sources indirectes,
constituees principalement par les plus anciens auteurs ecclesiastiques qui se
sont occupes de gnose (Irenee, etc.), et des quelques textes apocryphes qui
conservent des traditions gnostiquesoDans Ie champ des apocryphes, ce livre
cite en particulier les Odes de Salomon comme texte gnostique, bien qu avec
prudence (po 15, 81, 103-104), et des passagesd influence gnostique tires des
Actes de Jean (po 67-70, 73,107-108) et des Actes de Thomas (p. 98-99, 101-
103,105-107).
C.
ZAMAGNI
MIKKELSEN, Gunner B., Bibliographia Manichaica. A Compre-
hensive Bibliography, Thmhout, Brepols (Corpus Fontium Mani-
chaeorum, Subsidia I), 1997, xlvi + 314 p. ISBN 2-503-50653-4.
Le renouveau actuel des etudes manicheennes imposait la confection d une
bibliographie qui balise I essentiel des champs couverts par la discipline. Voici
chose faite avec I ouvrage bienvenu de G. B. Mikkelsen dans Ie cadre de la
collection annexe, publiee par les editions Brepols, des nouvelles editions cri-
tiques des textes manicheens, Ie Corpus fontium manichaeorum (C.F.M.).
Apres une preface d A. van Tongerloo, qui dirige ce corpus, et les remercie-
ments d usage par I auteur, une introduction de cinq pages rappelle les prin-
cipales initiatives bibliographiques concernant les etudes manicheennes. Puis-
qu il mentionne en premier la contribution de H.-Ch. Puech dans Ie troisieme
volume de I Histoire generale des religions chez Quillet, on peut aussi ren-
voyer a une version augmentee de cette bibliographie, pratique parce que les
titres sont classes par reuvres manicheennes, dans la presentation du mani-
cheisme publiee dans H.-Ch. Puech (ed.), Histoire des Religions, t. 2, Paris,
Gallimard (Encyclopedie de la Plelade), 1972,p. 636-645. G. Mikkelsen men-
tionne toutefois cette contribution, ailleurs dans Ie volume, dans Ia liste des
articles de H.-C. Puech, sous Ie n 2295; par un curieux hasard, ce titre est
aussi attribue a tort a G. Monnot, sous Ie n 1907 (avec une reference erro-
nee, p. 524 au lieu de 523). Parmi les bibliographies sur Ie manicheisme, on
peut aussi ajouter la bibliographie iranienne de F. Razi, Teheran, 1994 (men-
tionnee seulement sous Ie n 2361), qui classe par langue les titres sur Ie mani-
cheisme ecrits en persall, anglais, fran~ais et allemand, soit quand me-mepres
d un millier de titres. Le reste de I introduction de G. Mikkelsen presente Ia
liste des abreviations, des collections et des periodiques utiles pour Ie corps
de I ouvrage.
La bibliographie proprement dite repere plus de 3600 titres (volumes et
articles) et comporte trois parties: une liste des contributions sur Ie mani-
cheisme classees par nom d auteurs, une section speciale pour les travaux en
chinois et en japonais, et un index des sources manicheennes et antimani-
cheennes classeespar langue. Un coup d reil global sur cet imposant volume
permet de retrouver tres facilement la bibliographie d un auteur, quand on
connait son nom. Comme G. Mikkelsen a pris la peine de contacter indivi-
duellement Ie maximum de personnes, il a pu beneficier souvent d informa-
tions directes. Mais comme il a pris Ie paTti de donner un maximum de don-
nees sur les etudes manicheennes, on ne sait pas toujours ce qui a preside aux
choix pour inclure et exclure tel ou tel titre de sa base de donnees. Dans I in-
troduction (p. XIII), il dit explicitement qu il s en tient aux textes manicheens
ou presumes tels. Si I on prend I ouvrage de F. C. Burkitt, The Religion of the
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OMPfES RENDUS
Manichees, Cambridge, 1925 (classe ici SOliSe n 457), un lecteur non initie
ne saura pas que les fragments syriaques edites en fin de volume ne sont pas
manicheens, d'autant plus qu'ils sont repertories dans l'index des sources
syriaques du manicheisme p. 312.
De plus, bon nombre de titles font partie de celie bibliographie qui ne trai-
tent que du gnosticisme, comme si l'on pouvait assimiler Ie manicheisme au
gnosticisme ; il aurait ete plus simple de fixer un critere precis et de s'en tenir
aux travaux sur les sources gnostiques du manicheisme. On touche la line des
limites de la bibliographie, car s'il fallait aborder la gnose, il aurait peut-etre
fallu consacrer line section de la bibliographie a ce type d'etudes. Dans un
autre secteur, on reperera de nombreux travaux sur saint Augustin; mais la
aussi, Ie debutant en etudes manicheennes ne retrouvera pas facilement les
principaux travaux sur les relations d' Augustin avec Ie manicheisme, malgre
la page de references chiffrees aux sources augustiniennes dans l'index des
sources, p. 311. Entin, du cote des etudes iranologiques et islamiques, il exis-
te plus de travaux qui concernent Ie manicheisme que ne Ie laisse apparaitre
la simple consultation de listes bibliographiques : par ex. Ph. Gignoux, « La
doctrine du macro-microcosme et ses origines greco-gnostiques », dans P.
Vavrousek (ed.), Iranian and Indo-European Studies,Memorial Volume of O.
Klima, Prague, 1994,p. 27-52, ou G. Monnot, «Abu Qurra et la pluralite des
religions », Revue de I'Histoire des Religions CCVIII (1991), p. 49-71 (sur Ie
manicheisme, p. 58s.).
En revanche, dans a ligne des travaux bibliographiques de J. Ries, on appre-
ciera leg references aux reuvres anciennes qui depuis la Renaissance traitent
du manicheisme, a l'occasion de controverses theologiques (ex. Bebel n 184;
Bernard -Birch -Lockman n 219; Crocius n 660; Eckbertus n 822 etc.).
Dans la section dediee aux titles chinois et japonais (p. 281-301), Ie lecteur
occidental appreciera aussi a traduction des titles TereTeS.On est aussi frap-
pe par Ie ires net renouveau des etudes manicheennes en Chine depuis line
vingtaine d'annees. La derniere section de l'ouvrage (p. 303-314) epresente
un index des sources,manicheennes et antimanicheennes, avec les references
chiffrees aux titles mentionnes dans la bibliographie. Ces quelques pages sont
indispensables pour retrouver les travaux publies sur un texte particulier ; en
ce qui concerne les innombrables fragments iraniens ou turcs, il etait sans
doute difficile d'envisager line lisle detaillee avec les references aux publica-
tions ; il faut donc utiliser maintenant Ie repertoire pratique de S. Lieu «<Wor-
king Catalogue of Published Manichaean Texts », Manichaeism in Central Asia
and China, Leiden, Brill [Nag Hammadi and Manichaean Studies, XLV], 1998,
p. 196-246), celui de L. Clark pour les textes turcs «<The Thrkic Manichaean
Literature », dans P. Mirecki J. BeDuhn [ed.], Emerging from Darkness,Lei-
den, Brill [Nag Hammadi and Manichaean Studies, XLIII], 1997,p. 89-141),
et a lisle de traites antimanicheens grecs et latins de S. Lieu ( « List of the main
anti-Manichaean works in Greek and Latin [3rd-6th century] ». dans Mani-
chaeism n Mesopotamia and the Roman East, Leiden, Brill [Religions in the
Greco-Roman World, 118], 1994, p.197-202), ainsi que l'ouvrage de W. Klein,
Die Argumentation in den griechisch-christlichen Anti-Manichaica, Wiesba-
den, Harrassowitz, 1991. Avec l'arrivee de nouveaux textes manicheens de
l'oasis de Dakhla, il faudra prevoir un jour une bibliographie manicheenne
qui presente de maniere critique les references principales aux editions de
chaque texte maintenant a disposition. Les specialistes des litteratures apo-
cryphes pourraient y retrouver les versions manicheennes de certaines tradi-
tions juives et cmetiennes apocryphes.
I.-D. DUBOIS
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304
COMPTES RENDUS
ADAMIK,Tamas, BOLYKI, anos, DERI,Balazs, KIsm, Klara, bsz,
Ferenc, PESTHY,Monika, SIMON, . Zoltan & SZEPESSY,ibor,
Apokrif levelek,Budapest, Telosz (Apokrif iratok), 1999, 208 p.
ISBN 963-8458-176.
Ce recueil de Lettres fait suite aUK rois volumes de traductions deja publies
chez Ie meme editeur (voir notre compte-rendu dans Apocrypha 10, p. 314-
317). D'apres la presentation qui figure sur la quatrieme de couverture de ce
nouveau livre, Ie lecteur a dans les mains une collection de lettres oula figu-
re de Jesus ainsi que son epoque apparaissent sous un nouvel eclairage, grace
notamment a la correspondance d'Herode avec Pilate, de Pilate avec Tibere,
de Seneque avec saint Paul.
Voici Ie contenu de ce volume: Lettre d'Aristee Ii Philocrate (p. 5-43),
d'apres Ie texte critique, avec traduction et notes, publie par A. Pelletier, Paris
(Sources Chretiennes, 89), 1962; Ie traducteur, L. Z. Simon, pour rnieux pou-
voir restituer Ie sells de quelques passagesobscurs ou corrompus du texte grec
a egalement tenu compte de la traduction anglaise de H. T. Andrews dans
R. H. Charles, The Apocrypha and Pseudepigrapha of the Old Testament n
English, II, Oxford, 1913,p. 83-122, et de l'etude de J. R. Bartlett, Jews in the
Hellenistic World. Josephus, Aristeas, The Sibylline Oracles, Eupolemus, Cam-
bridge, 1985,p. 11-34. -L' Epitre des Apotres. Testamentde notre Seigneur et
notre Sauveur Jesus-Christ (p. 44-63), d'apres Ie texte ethiopien publie par L.
Guerrier, avec e concours de S. Grebaut, Paris (Patrologia Orientalis, 9), 1913,
p. 143-234. Contrairement au titre, la traduction commence avec Ie Testament
et se poursuit avec ' Epitre (sur ces ecrits voir J -N. Peres,L' Epitre desApotres
Turnhout, Brepols [Apocryphes, 5], 1994,p. 20-30). -L' Epitre apocryphe de
Jacques p. 64-70), d'apres Ie texte du Codex Jung publie par M. Malinine, H.-
Ch. Puech et alii, Epistula Iacobi Apocrypha, Zurich & Stuttgart, 1968. -
Epitre de Paul aux Laodiceens (p. 71), d'apres Ie texte publie par A. von Har-
nack, Apocrypha IV; Die apokryphen Briefe des Paulus an die Laodicener
und Korinther, Berlin (Kleine Texte ffir Vorlesungen und Ubungen, 12),
1931,p. 2-6 et J. B. Lighfoot, St. Pauls Epistles to the Colossians and to Phi-
lemon, Peabody, Massachusetts, 1879 (reimpression en 1987), p. 274-300.-
«Lettre des Corinthiens a Paul» (p. 72) et «Lettre de Paul aUKCorinthiens
au sujet de la chair» (p. 73-74), c'est-a-dire Correspondance de Paul avec les
Corinthiens (ou Actes de Paul X, 2-6) d'apres Ie Papyrus Bodmer X, publie
par M. Testuz, Geneve, 1959,p. 30-45. -Co espondance de Paul et de Seneque
(p. 75-80), d'apres L. Bocciolini Palagi, II Carteggio apocrifo di Senecae san
Paolo. Introduzione, testo, commento, Firenze, 1978. -«Lettre de Pierre a
Jacques» (p. 81-84) et« Lettre de Clement a Jacques» (p. 85-91), c'est-a-dire
Homelies du Pseudo-Clement, d'apres Ie texte publie par B. Rehm, Berlin
(GCS), 1953, p.1-22, et d'apres la traduction de Georg Strecker dans New Tes-
tament Apocrypha, II : Writings relating to the Apostles, Apocalypses, and Rela-
ted Subjects. English translation edited byR. McL. Wilson, revised edition,
Louisville & Cambridge, 1992. -Epitre de Bamabe (p. 92-109), d'apres Ie
texte publie par F. X. Funk, Patres Apostolici, I, Tfibingen, 1878. -« Epitre
de Tite, disciple de Paul, sur la virginite» (p. 110-125), d'apres Ie texte publie
dans PLS II, Paris, 1960,col. 1522-1542. « De la correspondance de Pilate »
(p. 126-132) sont traduits :« Lettre d'Herode a Pilate» (p. 126-127), d'apres
Ie texte publie par M. R. James, Apocrypha anecdota, II, Cambridge (Texts
and Studies, V /1), 1897,p. 68-69; « Lettre de Pilate a Herode » (p. 127-128),
d'apres Ibid., p. 66-67; «Le rapport de Pilate sur Jesus-Christ, notre Seigneur,
que Ie gouverneur a envoye a Rome a l'empereur Auguste» (p. 128-131),
d'apres la version longue du texte publiee par C. von Tischendorf, Evangelia
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OMYrES RENDUS
apocrypha, Hildesheim, 1966 (reimpression de l'edition de 18762); «Lettre de
l'empereur Tibere a Pilate» (p. 131-132), d'apres Ie texte publie par M. R.
James, Op. cit., p. 78-81. -« Correspondance d' Abgar (Abgaros), roi d'Edes-
se, avec Jesus» (p. 133-136), d'apres Eusebe de Cesaree, Histoire Ecclesias-
tique 1,13. La source utilisee pour la traduction n'est pas mentionnee. -« L'en-
seignement de l'apotre Addai» (p.137-140), c'est-a-dire La doctrine d'Addai;
1-7,74-76, d'apres Ie texte publie par G. Howard, The Teaching of Addai,
Chico, California (Texts and Translations, 16. Early Christian Literature
Series,4),1981.-« Mani, Epistu/ajimdamenti (extraits»> (p.141-143), d'apres
Ie texte publie par A. Adam, Textezum Manichiiismus, Berlin, 1954,p. 27-30.
-«Lettre de Mani a Markellos» (p. 144), c'est-a-dire Hegemonius, Acta
Archelai, V; d'apres Ie texte publie par C. H. Beeson, Leipzig (GCS), 1906,
p. 5-8. -«Lettre du ciel, ou l'Edit de Dieu envoye a Rome. Lu Ie deuxieme
dimanche du Careme» (p. 145-150), d'apres la version a du texte publie par
M. Bittner, Der yom Himmel gefallene Brief Christi, Wien (Denkschriften der
Akademie der Wissenschaften in Wien. Philosophisch-historische Klasse, 51),
1906,p.1-240; sur cet ecrit, voir N. F. Palmer,« Himmelsbrief», Theologische
Realenzyklopiidie XV; Berlin New York, 1986,p. 344-346.
Ce volume particulierement heteroclite se termine avec une «Postface »
qui presente brievement Ie genre litteraire epistolaire, parle de la lettre dans
Ie monde antique et donne Ie resume des traductions. La perspective est pure-
ment litteraire. Les notes sont de valeur tres inegale, a predominance biblique.
C'est pourquoi Ie travail de Balazs Deri (Epitre apocryphe de Jacques,es deux
lettres de Mani) merite d'etre salue. Ses ntroductions plus historiques appor-
tent des renseignements qui permettront au lecteur peu familier avec a theo-
logie et l'histoire du christianisme ancien de situer et de comprendre Ie texte
en question. D'une maniere generale, e merite de cette collection est de rendre
accessible des ecrits jusque la meconnus, ce qui est deja considerable.
A.
JAKAB
BOVON,Fran~ois, BROCK,Ann Graham MA1THEWS, hristo-
pher R., The Apocryphal Acts of the Apostles,Cambridge (MA),
Harvard University Press (for the Harvard University Center for
the Study of World Religions) (Harvard Divinity School Studies,
Religions of the World), 1999,pp. xxx+394. ISBN 0-945454-18-X.
Ce recueilde douzecontributions,qu'il n'estguerepossiblede discuteren
detail dans es limites imparties a cette recension, 'ouvre par de precieux
conseilsque F. BOVON,ort de sonexperiencepersonnelleavec es Actesde
Philippe,prodiguea qui voudrait se ancerdans 'edition de piecesde a litte-
rature apocryphe.
Les rois etudessuivantes ont egroupees ansune sectionntitulee « Per-
formanceand Rewriting» : Christine M. THOMASevient, avecde nouveaux
developpements,ur a prehistoire et es sources esActesde Pierre.Comme
G. Poupon,elle voit dans es Actesde Verceil un remaniement esActespri-
mitifs, mais plutot que de Ie lier au conflit souleveen Occidenta proposde a
secondepenitence (debut du IIIe s.), elle se refere a la lettre de Denys de
Corinthe aux Eglisesd'Amastris et du Pont (Eusebe,Histoire ecclesiastique,
IV.23.6)pour Ie situer en Asie, veTSa fin du lie siecledeja. Par ailleurs,elle
attribue aucopistedu codexde Verceillui-meme e transfertde 'episoded'Eu-
bula auch. 17et, correlativement, ' omissiondu debutdesActes.Elle note en
ce sensque Ie brusque passageau nominatif dans a formule ad quandam
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COMPTES RENDUS
mulier Eubola (AAA 1,63,2)suggere que Ie responsable du transfert travaillait
sur line source latine; mais la graphie aleatoire du codex permet-elle line
pareille conclusion? De plus, la suscription du Vatopedi 79 (cf. l'apparat de
AAA I, 78) montre que, dans la tradition grecque deja, la fin des Actes avait
ete excisee pour etre rattachee, comme dans Ie codex de Verceil, aux Recon-
naissancespseudo-clementines.. .-A partir des versions arabe et ethiopien-
ne des Actes de Marc, egalement attestes en grec (BHG 1035) et par quelques
fragments cortes, Allen D. CALLAHANentend prouver que ce texte a ete ori-
ginellement compose en corte; leg ndices qu'il avance a l'appui de sa these
paraissent cependant assez ragiles. -Enfin F. BOVONmontIe, a partir de la
huitieme homelie de Nicetas Ie PapWagonien sur Jacques, ils d' Alphee, tout
l'interet qu'il y a a etudier de semblables documents tardifs pour comprendre
la spiritualite byzantine... et pour apprendre incidemment que Jacques a ete
crucifie a Ostrakine, en Egypte, apres avoir preche a Eleutheropolis (donnees
empruntees aux traditions relatives a Simon-Judas ou a Thaddee?) Bovon
pense plutot a une tradition originale sur Jacques,ce que pourrait appuyer la
Passion toujours inedite de cet apotre (BHG 762z).
Les deux etudes suivantes traitent du niveau de la langue des Actes apo-
cryphes, tIes variable d'une oeuvre a l'autre. David H. WARRENuse surtout
de criteres statistiques: complexite des phrases (parataxel hypotaxe), style
des prefaces, position du verbe, particularites diverges tournures semitisantes,
etc.). Son deuxieme critere est assezcurieusement choisi puisqu'on ne connait
Ie debut que des Actes de Thomas, oil la scene de la repartition des champs
missionnaires semble d'ailleurs secondaire (elle a se passe en effet a Jerusa-
lem, tandis que Ie fecit se poursuit... dans un port ) Toujours a propos des
Actes de Thomas, Warren estime difficile de savoir s'ils ont ete traduits du
syriaque, mais il ne s'est pas demande pour autant si, Ie cas echeant, on pou-
vait sans autre comparer la qualite de leur grec a celui d'ecrits rediges d'em-
blee dans cette langue. -Plus intuitivement, Evie ZACHARlADES-HoLMBERG
tente, pour sa part, de reperer leg developpements linguistiques qui, jusque
dans leg Actes leg plus atticisants, annoncent leg formes du grec moderne.
Les six etudes suivantes sont consacrees aux aspects itteraires et religieux :
Ann Graham BROCKmet en evidence leg attitudes opposees des Actes de Paul
et des Actes de Pierre a l'egard des autorites politiques, du role des femmes,
des valeurs familiales et de l'organisation ecclesiastique. Ses observations sont
generalement convaincantes, quoique parfois un pen forcees, comme lors-
qu'elle s'indigne que Pierre puisse appeler a a repentance Eubula,« coupable»
d'avoir ete la victime de l'indelicatesse de Simon (p.157) Eubula n'etait-elle
pas tout simplement paienne? -Caroline JOHNSONropose de chercher l'ori-
gine de la forme des epicleses des Actes de Thomas 27 et 50 (caracterisees par
l'anaphore de EAeE) n leg rapprochant de textes magiques. Sa demonstration
n'est guere convaincante, car leg magiciens qui usent de cet imperatif requie-
rent l'aide d'une divinite pour eux-memes (EAeE 10L),ce qui n'est pas Ie cas
dans leg extes envisages; lorsqu' elle en vient a commenter ces textes, elle ne
propose d'ailleurs aucun rapprochement avec leg extes magiques. -ChI. R.
MAlTHEWSetudie Ie cas des animaux parlant dans leg Actes de Pie"e, leg Actes
de Thomas et leg Actes de Philippe a la lumiere des reflexions philosophiques
sur a rationalite des animaux. -Laura S. NASRALLAH 'interesse a la conclu-
sion des Actes d'Andre 65. Partant de a fonction maleutique du A6yo<; u des
A6YOLans ces Actes, notamment du passage affirmant que Maxirnilla, ayant
ecoute leg paroles de l' apotre, « devint ce que res paroles signifiaient» (ch.
46), et recourant aux analysespragmatiques de la lecture, elle montre que l'au-
teur y definit son lecteur implicite: c'est celui qu'atteindront leg paroles qu'il
s'est efforce lui-meme de transmettre dans son oeuvre. -Du fait que leg Actes
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OMPTESRENDUS
apocryphes des Apotres deprecient ce qui est charnel, David W. PAO s'eton-
ne du role que jouent les guerisons dans Ie resume qu'en a donne Gregoire de
Tours; et d'expliquer que l'auteur recourt ii ce type de recits soit pour prou-
ver Ie sucres d'un exorcisme, soit pour amener la conversion des foules, soit
encore pour en degager un enseignement ethique. Enfin, mais c'est peut-etre
par Iii qu'il aurait fallu commencer, Pao suggere que les guerisons des Actes
symbolisent la valeur salutaire des paroles de l'apotre. Dans ce sellS, la gueri-
son initiale d'un aveugle, possede par Ie diable, qui, tout en sachant que l'apotre
pouvait Ie guefir, preferait lui demander l'aumone, apparait comme bien autre
chose que la confirmation d'un exorcisme (p. 266): n'y faut-il pas voir une
mise en garde contre une lecture plate des miracles suivants? -N. SLATER
montre enfin que les Actes de Philippe emanent d'une communaute asiate
encratite qui en est reduite ii la defensive, face aux menees de la grande Egli-
se; leur description des peines infemales (1.5-16), ii la difference de celIe des
Actes de Thomas 51-61, ne fustige en effet pas les fautes sexuelles, mais urn-
quement les calomnies dirigees contre les vierges (et contre un clerge mixte).
En appendice, edition de deux petites pieces: Ie Martyre d'Ananias (BHG
75y) par F. BOVON et E. ZACHARlADES-HOLMBERG, et l' Hypomnema de saint
Jean (BHG 919fb) par Yuko TANIGUCHI, F. BOVON et A. ANTONOPOULOS.
L'ouvrage, agreablement presente, comporte ici ou Iii de petites erreurs.
Ainsi, Chr. Thomas commet -elle une bevue en ecrivant, ii propos des recits de
resurrections des Actes de Pierre 25-28: «The resurrection of the first victim
only takes place after Peter has performed another complete resuscitation»
(p. 54). Parlant du style recherche des Actes apocryphes des Apotres, Evie
Zachariades affirme qu'au debut de la reponse de l'apotre ii Maximilla au ch.
4 (lignes 9-11 de I' ed. de Prieur), un auteur moins maniere eut place ToiJT6 EU-
TlV apres Ie vocatif (p. 132); mais la phrase garde-t-elle Ie meme sells si l'ob-
jet du verbe de la principale «< ce qui trouble Ie plus ceux qui [...] se toument
vers la foi en Dieu, c'est de voir guefir ces maux qui semblent desesperes ii la
plupart des gens») devient Ie sujet de l'infinitive «< e plus troublant, c'est que
ceux qui [...] se toument vers la foi en Dieu voient guefir... » ? Dans leur
commentaire sur Ie texte du Martyre d'Ananias, les editeurs decrivent la pre-
miere phrase du § 9: EV BE TalS' TII1EpalS' EICElvalS' EupE6ELS' > CiYlOS Ava-
vlaS' lCaTa T1')V xwpav EICElV1lv6EpaTTElxuVToilS EICElUEd&>-<j>oilS', }V yap I>
KUplOS I1ET' airroiJ TTapEXWV8l' airroiJ T1')V (aulv TOlS' du6EvoOOlV, comme
« a phrase without a principal verb that contains two present participles (6Epa-
TTElxuV nd TTapEXwv) eparated by an insertion«< for the Lord was with him») »
(p. 323); or les deux participes ne sont pas au meme niveau, puisque le second
a pour sujet le Seigneur et non Ananias (Ol' airroiJ); comment y aurait-il donc
une incise entre eux? Quant a I'absence de verbe principal dans la premiere
proposition, on pourrait y suppleer en corrigeant EupE6ElS'en EUpE~.
Y. TISSOT
Libri de Natiuitate Mariae. Pseudo-Matthaei uangelium.Textus et
commentarius, cura Jan GUSEL.Libellus de Natiuitate sanctae
Mariae. Textus et commentarius, cura Rita BEYERS, vol., Turn-
bout, Brepols (CorpusChristianorum,SeriesApocryphorum, 9-10),
1997, pp. xvi+S20+4S6. SBN 2-S03-41091-X& 2-S03-411101-X.
Dans e premier de cesdeux volumes, an GUSEL, ont a these, outenue
en 1971, oncemaitDie unmittelbareTextUberlieferunges og. Pseudo-Mat-
thilus (c'est e titre de a versionallemandeabregeepubliee a Bruxelles en
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308
COMPfES RENDUS
1981), nous livre tine nouvelle edition critique du Pseudo-Matthieu, un rema-
niement latin du Protevangile de Jacques augmente d'une serie de prodiges
accomplis pendant la fuite en Egypte.
La lisle des emoins manuscrits du Pseudo-Matthieu (decrits aUK . 108-217)
s'eleve a 190. GUSEL eg repartit entre quatre familIes (p. 71-97), composees
de sous-groupes et de branches (p. 218-264). Les temoins que Gijsel, en repre-
nant tine designation d' E. de Strycker, definit comme metaphrastiques (ceux
oil les scribes adaptent tellement Ie fecit au gout et aUK xigencesde leur milieu
que Ie Pseudo-Matthieu« a passepar tine metamorphose; il est devenu Ie vehi-
cule de leurs opinions ou de celles du groupe pour lequel ils ecrivent », p.187)
ne sont pas pris en compte dans l'apparat critique, malgre l'interet de ces
temoins pour l'histoire de la reception, que Gijsel souligne.
Nous en venons ainsi a tine question cruciale: lorsqu'on edite un apocryphe,
il faut savoir ce que Pon vetil editer, et en prevenir Ie lecteur. Etant donne que
les apocryphes se caracterisent par la mobilite de leur texte, en travaillant avec
leg outils classiques de la critique textuelle, on ne petit souvent pas remonter
plus haul qu'un certain nombre de formes textuelles d'un ouvrage donne, done
de subarchetypes. A chaque endroit oil ceux-ci different entre eux, on avan-
cera des hypotheses sur la forme la plus ancienne et sur es raisons de la modi-
fication, mais il devient impossible d'ecarter separement chacune des variantes
jugees secondaires,car elles sont solidaires d'une revision d'ensemble du texte,
d'une «recension ». L'evaluation des modifications a alors sa place dans Ie
commentaire, sans amener a l'edition critique d'un archetype. Jan Gijsel a ici
prig Ie parti d'editer separement les formes textuelles (subarchetypes) A et P.
Cela estdu aussi a une raison pratique: « Editer un seul exte et rendre comp-
te de l'histoire textuelle dans un seul apparat critique aurait surcharge celui-
ci et l'aurait renduillisible» (p. 266). Me-me ainsi, la lecture de l'apparat n'est
pas simple. GUSELentend donner les variantes des differentes branches, mais
pour chacune d'elles, il y a differentes possibilites. Parfois, il estime qu'il est
possible d'identifier dans une blanche un manuscrit constituant une «bonne
copie » (cf. p. 268 n. 1) il prend alors ce manuscrit comme representant de la
branche, Ie designant par une lettre majuscule. Mais il se reserve egalement
de signaler des cas oil ce manuscrit s'ecarte du reste de la branche, et designe
alors ce reste par la lettre minuscule correspondante. Par exemple, A est Ie
« bon» temoin qui represente la blanche Ala (il s'agit du manuscrit A1a2 de
la lisle de Gijsel), tandis que la lettre a designe Ie modele commun reconstruit
de la blanche Ala lorsque A s'en ecarte. Cette dualite ne se verifie d'ailleurs,
si e vois bien, que dans deux cas. Or, si l'on parvient encore a se souvenir que
les lettres de AI a a F se referent aUKbranches de Ala a All, il devient com-
plique de retenir que GIg se refere a la blanche A2a, L a la blanche A4c et
ainsi de suite. II est vrai qu'a chaque page, entre Ie texte et l'apparat, apparm' t
la lisle des sigIes des temoins retenus, regroupes par faIllille (p. ex. AbCeF
GH Ij kL); cependant un encart avec leg sigIes et leur distribution n'aurait
probablement pas ete inutile. Mais on petit aussi se demander pourquoi il fal-
lait prendre comme temoin d'une blanche un manuscrit donne et non pas Ie
modele commun reconstruit de la branche, alors qu'on ne renonce pas (et a
raison) a releguer dans l'apparat critique la le<;on du manuscrit choisi lors-
qu'elle est manifestement secondaire par rapport a la le<;on ropre a 1abranche.
On aurait ainsi pu eviler d'adopter la notion de «bon» manuscrit qui, comme
Gijsellui-meme Ie reconnait, ne va pas sans danger. On pourrait egalement
critiquer la definition que Gijsel donne de la regIe fondamentale qu'il a adop-
tee pour choisir entre les variantes, et qu'il raIllene a la « Faustregel » de Paul
Maas et a la «regIe de fer» de Dom Quentin: «Pour nons, cette regIe signi-
fie que la lecon attestee par Ie plus grand nombre de temoins est consideree
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309
OMJ7rESRENDUS
comme originale, a condition que cette majorite soit reellement probante »
(p. 269). En effet, Ie probleme estde savoir dans quelles conditions cette majo-
rite sera « reellement probante »; ce seront alors ces conditions qui definis-
sent Ie critere, et nullement « e plus grand nombre de temoins » en tant que
tel (a titre d'exemple, on peut comparer Ie texte de A au ch. 8.3lin. 10, p. 361,
oil Gijsel choisit, correctement a mOD avis, habita des seuls ej contre habitu
de AbCDFGHIkL).
Le choix d'editer separement legdeux familIes A et Pest interessant, meme
si leg differences entre leg deux n'etant finalement pas tres importantes, on
peut se demander s'il se ustifie autrement que par la raison pratique du
nombre des temoins. En fait, cette option semble rester un peu en suspens
entre deux exigences. D'une part, il y a l'effort de remonter autant que pos-
sible veTSa forme la plus ancienne atteignable du Pseudo-Matthieu; c'est la
visee classique des editions critiques, et l'ideal dans cette direction serait la
reductio ad unum des deux formes textuelles retenues ici. D'autre part, Ie fait
de leg avoir gardees temoigne d'un souci de documenter la vie du texte a tra-
vers leg ages; mais il faut alors admettre que, dans ce gens, 'interet principal
se rattache a ce qui n'a pas ete retenu, c'est-a-dire aux formes textuelles de
plus en plus eloignees de l'original.
II sera peut-etre approprie d'exprimer aussiune preoccupation qui exige a
mODavis une reflexion methodologique. Gijsel a sans doute raison d'affirmer
que la Pars altera de Tischendorf n'appartenait pas a la forme la plus ancien-
ne du Pseudo-Matthieu. Le probleme est que de cette maniere on n'aurajamais
d'edition critique du complexe textuel Pseudo-Matthieu + Pars altera, qui a
bel et bien existe et a meme largement circule : on ne l'aura ni avec Ie Pseu-
do-Matthieu, comme l'atteste Ie present ouvrage, ni avec eg lal KQ TOUKupi-
ou 'I1]<Joucf.le manuscrit grecd' Athenes, B.N. 355, et la version latine appa-
rentee, editee par Tischendorf, Evangelia apocrypha, 1876, p. 164s.), dans la
mesure oil l'editeur de res derniers dans la Series Apocryphorum sera lui aussi
probablement preoccupe de remonter veTSa forme la plus ancienne de l'ou-
vrage et ne s'interessera pas aux elaborations qu'il a re~ues lorsqu'il a ete mis
en rapport avec d'autres textes. Or, cette section est sansdoute secondaire par
rapport aussi bien aux llalOlKQ qu'au Pseudo-Matthieu, mais, comme j'essaie
de Ie montrer dans une etude en preparation, elle pourrait etre ancienne, peut-
etre du lIe siecle.
Quoi qu'il en soit, cette nouvelle edition du Pseudo-Matthieu represente
un progres evident et decisif par rapport aux precedentes, et c' est elle qui fera
desormais reference. On est toutefois un peu etonne de trouver a a p. 276 la
traduction du prologue original Ego Jacobus SOilSe titre « Traduction de la
forme textuelle A de l'evangile du Pseudo-Matthieu », alors que la forme A
se caracterise justement par l'absence de ce prologue, dont Ie latin est donne
en face SOilS'intitule correct «Forma textus P ». Le titre de la p. 276 se refe-
re sans doute au fait que la page de gauche ne contiendra que la seuletra-
duction de A, mais il est tout de meme bizarre de Ie voir apparaitre precise-
ment au-dessus du seul passage qui n'est pas contenu dans cette famille.
Quant a la traduction, d'apres mes sondages,elle est tres bonne. Une seule
remarque : p. 281, ignes 15s. (lettre des eveques), il est dit a propos des here-
tiques : bonae Christi natiuitati sua mendacia miscuerunt ut per dulcedinem
uitae mortis amaritudinem occultarent. Je doute que la traduction de la p. 280
« afin de dissimuler SOilSa douceur de sa vie l'amertume de sa mort » soit
exacte. II ne s'agit pas du fait que les heretiques paTIent de la naissance du
Christ pour introduire sa vie « douce » afin de cacheT a mort « amere » (laquel-
Ie n'a rien a voir dans ce contexte). II me semble qu'il y a la une application
du tapas opposant orthodoxie I vie I douceur a heresie I mort I amertume :
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310
COMPTES RENDUS
les heretiques ont adopte un recit apostolique de la «bonne » naissance du
Christ (porteur de douceur et de vie) afin de faire accepter, en les y introdui-
sant de fa<;ondissimulee, leurs heresies, qui ont l amertume de la mort. Cela
s accorde avec la fin de la reponse de «Jerome» (p. 285, ignes 18-19) selon
laquelle Ie livre de l heretique Leucius non aedificationi sed destructioni mate-
riem exhibuerit.
Je ne voudrais pas oublier la contribution de Gijsel it la datation du Pseu-
do-Matthieu. II semontre sceptique face it la proposition de Michael Berthold
qui voit line influence de cet ecrit sur la Vita Agnetis du Pseudo-Ambroise, de
datation incertaine mais en tout cas anterieure it 690. Avec Amann, Gijsel
prend comme terminus post quem la diffusion de la regIe benedictine en Occi-
dent (milieu du VIe siecle); Ie terminus ante quem est fixe it la fin du VIIIe
siecle en raison de l essor de la tradition manuscrite veTS 00. Mais Gijsel esti-
me que l importance attribuee it Joachim, plus grande que dans Ie Protevan-
gile, reflete l image de la noblesse merovingienne, qui joue un role important
dans la diffusion du christianisme parmi les Francs dans Ie premier quart du
VIle siecle; Ie Pseudo-Matthieu aurait pu voir Ie jour it cette epoque. C est
bien entendu aUKmedievistes d evaluer cette proposition. On pent egalement
signaler les pages interessantes sur «Le titre de l ouvrage et ses metamor-
phoses dans la tradition manuscrite » (p. 98-107) qui exploitent avec finesse
ce seuil qu est Ie titre pour suivre, it travers ses transformations, l evolution
de la reception de l reuvre au Moyen Age.
Le deuxieme volume des Libri de Nativitate Mariae offre l edition d un rema-
niement latin ulterieur de l ouvrage precedent, Ie Libellus de Natiuitate sanc-
tae Mariae. Ceci est Ie titre que lui donne l editeur, Rita BEYERS, ur Ie fon-
dement de quelques temoins; l ensemble de la tradition atteste line grande
variete de titres (voir l apparat de la p. 269). A la difference du Pseudo-Mat-
thieu, cet ouvrage a connu un large succes t l epoque du livre imprime, grace
it sa forme «vulgate» qui est celIe de l une des sons-branches de la tradition
manuscrite, oil il est precede d une adaptation de la correspondance fictive de
Jerome forgee pour introduire Ie Pseudo-Matthieu (il commence me-me omme
une lettre de Jerome). II a done ete longtemps edite parmi leslettres (non
authentiques) de Jerome, et ce des 1468 et jusqu au vol. 30 de la Patrologia
Latina.
Emile Amann a propose en 1910 de dater Ie De Nativitate de l epoque de
Charlemagne, et, en 1934,C. Lambot l a assigne t Paschase Radbert et date
de 846-849. Reprenant la critique de Lambot esquissee par M. Cappuyns
(1937/1940) et developpee par elle-me-medans un article de 1990,Rita BEYERS
montre que la lettre d Hincmar de Reims de 868-869 sur laquelle se fondait
cette hypothese non seulement ne se refere pas au De Nativitate, mais semble
indiquer que ce demier n etait pas connu d Hincmar. La lettre semble done
fixer un terminus post quem, tandis que Ie terminus ante quem est represente
par Ie temoignage de Fulbert de Chartres, mort en 1028; la tradition manus-
crite oriente elle aussi veTSa fin du Xe siecle (p. 28-33).
La tradition manuscrite de ce court texte est tIes fiche et son examen occu-
pe la plupart du volume (p. 35-266). Comme J. Gijsel, R. BEYERS rocede elle
aussi, par un examen minutieux, it un classement en formes textuelles des
manuscrits conserves. Des stemmata des differents sous-groupes, dont
quelques-tins sont complexes (voir p. ex. p. 235), aident it se reperer. Quant
aUKprincipes d edition (p. 262-265), Beyers ne donne pas d edition separee
des deux formes textuelles A et B, ce qui est it notre avis pleinement justifie
car les differences entre elles ne permettent pas de parler de deux recensions
(voir leur liste et leur evaluation aUKp. 146-155). II s agit pour Beyers de
remonter veTSa forme primitive du texte et non pas de retrouver les etapes
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311
OMPTESRENDUS
de son developpement. Ayant montre que les sous-groupes Al et A2 trans-
mettent Ie meilleur texte, elle ronde son edition sur cinq temoins d AI, deux
d A2 et deux temoins independants d A. Pour chacun des autres sous-groupes
d A (sauf A 7), elle ne retient qu un ou deux manuscrits, en renon~ant
consciemment (a la difference de Gijsel) a reconstituer Ie modele commun de
chaque sons-groupe, car elle estime que l analyse de manuscrits a permis «de
determiner quels etaient les meilleurs representants de tel sons-groupe ou de
telle autre ramification, c est-a-dire les temoins comportant Ie moins de le~ons
fautives ou de variantes propres» (p. 262). Pour les manuscrits retenus, elle
communique la totalite des variantes (sauf celles purement orthographiques,
signalees seulement pour les noms propres), tout en restant consciente que ce
systeme ne permet pas de savoir si telle variante est partagee par Ie sous-grou-
pe (ou la branche) ou si elle ne caracterise que Ie manuscrit en question. L ap-
parat critique ne permet donc pas de se faire line idee exacte du temoignage
de chaque branche pour line variante donnee. Les deux sous-groupes de B
sont representes chacun par deux manuscrits ; la presence de la suite de sigles
CH MS pour line variante dans l apparat devrait donc permettre de l attri-
buer a la forme textuelle B. Meme ainsi, l apparat critique est partout plus
long que Ie texte, et il est difficile de reprocher a Rita Beyers les options qu el-
Ie a prises, d autant plus que son analyse de la tradition manuscrite manifes-
te sa competence et Ie serieux de sa demarche et de sa reflexion methodolo-
gique.
II n existe pas de modele oblige des volumes de la Series Apocryphorum
du Corpus Christianorum. Cependant, mis a part les vol. 3 et 4 qui contien-
nent la traduction des Actes armeniens des apotres d apres line edition deja
existante, les autres volumes publies (y compris les tres recents 11 et 2 avec
les Actes de Philippe) contiennent, en plus de I edition critique des textes avec
introduction et traduction, un commentaire plus ou moins developpe (occu-
pant en general un volume separe). Les deux volumes dont il est question ici
se distinguent de ce modele au moins a deux egards. En premier lieu, I ana-
lyse de la tradition manuscrite y prend des proportions jusque-la inusitees:
pour Ie Pseudo-Matthieu, plus de 200 pages contre entliron 200 pages ~e texte,
apparat critique, traduction et notes; pour Ie De Nativitate, plus de 230 pages
contre environ 65 pages pour Ie Teste.Mais cela etait inevitable face a la riches-
sede cette tradition et aux problemes qu elle pose, si on voulait marquer enfin
un progres decisif par rapport aux editions anterieures fondees sur line base
manuscrite extremement limitee et sans aucun classement des temoins. Nous
avons ici enfin un texte fiable de res deux ouvrages, dans I attente de la nou-
velle edition critique de leur ancetre, Ie Protevangile de Jacques, en prepara-
tion pour la SeriesApocryphorum. En second lieu, il n y a pas de commen-
taire a proprement parler, mais des notes a la traduction. Elles sont plus sobres
dans Ie cas du Pseudo-Matthieu; soit elles sont consacrees a des questions phi-
lologiques, soit elles comparent les familIes textuelles entre elles, soit elles
commentent les rapports avec Ie Protevangile ou servent a eclairer certains
passages ou themes (voir par exemple p. 330, n. 1, p. 344, n. 2). Les notes du
De Nativitate sont plus abondantes. Elles documentent en particulier combien
cette recriture du Pseudo-Matthieu est nfluencee par la Vulgate ainsi que par
Ie latin des auteurs ecclesiastiques et de la liturgie. Plusieurs notes contien-
nent de precieuses informations sur l histoire de certains themes theologiques
et sur l exegese de certains passagesevangeliques au Moyen Age (voir p. ex.
p. 312-313, n. 2, p. 328, note 1, p. 322-323). Beaucoup de notes lexicales sont
aussi ort tittles. De meme, Rita Beyers montre combien Ie De Nativitate, beau-
coup moins interessant que Ie Pseudo-Matthieu pour l histoire des traditions
apocryphes (il revient largement aux donnees bibliques), Ie depasse cependant
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COMPTES RENDUS
quant a la qualite litteraire; elle a aussi, sur es finessespsychologiques de l'au-
teur, d'heureuses remarques qui temoignent de sasensibilite a elle. n etait dif-
ficile de faire mieux dans cette annotation qui depasse de loin celIe, cepen-
dant meritoire, d'Emile Amann.
n ne faut pas oublier l'introduction generate aux deux textes edites signee
par Rita Beyers en ouverture du vol. 9 (p. 1-34); elle y situe Ie Protevangile,
Ie Pseudo-Matthieu et Ie De Nativitate Mariae dans Ie developpement de la
mariologie, et en retrace la reception en Occident jusqu' au XIlle siecle. Cette
synthese claire et fiche represente une mise a jour indispensable des pages
consacrees par Amann a la reception du Protevangile en Occident, d'autant
plus que l'histoire de cette reception est aujourd'hui infiniment mieux COnfine
qu'en 1910. Chaque volume est complete par des listes des manuscrits par
lieux de conservation, par branches, selon Ie contenu, par ordre chronologique
et par provenance. A la fin du vol. 10 figurent les index pour les textes edites :
scripturaire, onomastique, des auteurs et des reuvres, thematique, des manus-
crits et des incunables, de meme que les index des mots latins (etablis par
Albert Frey).
Pourla premiere fois, des textes d'origine medievale sont edites dans la
SeriesApocryphorum. Valait-illa peine de leur consacrer tant de place? ani,
sans doute. Ces deux textes qui ont influence d'une maniere decisive Ie Moyen
Age occidental font enfin l'objet d'editions critiques qui permettent de les lire
sous leurs formes anciennes. Ces editions contribuent en outre a la connais-
sance de la production d'apocryphes au Moyen Age et du rapport entre ce
genre de textes et d'autres formes de communication litteraire, en stimulant
aussi la reflexion sur la notion me-med'apocryphe et sur les condition de la
production d'apocryphes a une epoque oil Ie canon des Ecritures est solide-
ment affirme et oil la matiere apocryphe a besoin de nouvelles legitimations.
Cette contribution de deux medievistes a l'etude de la litterature apocryphe
chretienne est precieuse pour les specialistes des apocryphes chretiens, qui
s'occupent Ie plus souvent de I' Antiquite. Enfin, la tradition textuelle des apo-
cryphes va de la penurie extreme de temoins a l'abondance foisonnante.
Jusque-la, la Series a vu paral"tre des editions d'apocryphes a tradition manus-
crite tres reduite ; cesvolumes aideront a poser, et a resoudre progressivement,
les problemes que pose une tradition tres abondante.
E. NORELL
IZYDORCZYK,bigniew (ed.), The Medieval« Gospel of Nicode-
mus ». Texts, ntertexts and Contexts n Western Europe, Tempe
(Arizona), Medieval RenaissanceTexts and Studies (Medieval
RenaissanceTexts and Studies, 158), 1997,pp. xvi+570. ISBN 0-
86698-198-5.
Si l' on dresse a liste des ecrits es plus populaires de la litterature apocryphe
chretienne, la premiere place reviendra probablement au fecit connu sous Ie
nom de Gesta Saluatoris ou Euangelium Nicodemi. L' Evangile de Nicodeme
(ci-apres EN) est a forme sous aqueIIe les Actes de Pilate, un apocryphe sur
la Passion du Christ compose en grec au IVe siecIe, ont ete diffuses en latin et
dans les langues vernaculaires du Moyen Age occidental. n relate Ie proces
de Jesus (ch. 1-11), l'emprisonnement et la liberation de Joseph d' Arimathee
(ch. 12-16) et la descente du Christ aux enfers (ch. 17-27). Absent du fecit
grec original et des versions orientales, Ie Descensusad inferos semble avoir
ete con~u pour completer Ie fecit latin, peut-etre au VIe siecle. nest la dra-
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313
OMPfES RENDUS
matisation la plus elaboree d une croyance consacree des Ie IVe siecle dans Ie
Symbole des apotres, mais qui est elle-meme plus ancienne et a ses racines
dans des textes de l Ancien et du Nouveau Testament. Temoignent concrete-
ment du succes de la version latine d une part les quelques 400 manuscrits
aujourd hui conserves ou connus (d. Z.lzydorczyk, Manuscripts ofthe« Evan-
gelium Nicodemi ». A Census,Toronto, Pontifical Institute of Mediaeval Stu-
dies [Subsidia Mediaevalia 21],1993), et, d autre part, les traces de l influen-
ce que Ie texte latin a exercee, sons differentes formes, dans les langues
vernaculaires durant Ie Moyen Age. C est a ce dernier sujet qu est consacre
Ie present recueil d etudes, con~u par Zbigniew Izydorczyk (Universite de
Winnipeg), et publie sons sa direction. Precisons d emblee que l ouvrage rea-
lise pleinement cet objectif et qu il doit etre qualifie d oeuvre de reference
pour la survie de l EN au COUTSu Moyen Age occidental.
Le fecit latin constitue Ie point de depart des diverges recherches menees
dans ce recueil. Les grandes lignes de la tradition textuelle de l EN sont resu-
mees aux p. 44-68 de la contribution de Z. IzYDORCZYKntitulee «The Evan-
gelium Nicodemi in the Latin Middle Ages» (cf. aussi, du meme auteur, « The
unfamiliar Evangelium Nicodemi», Manuscripta 33 [1989], p. 169-191, ainsi
que Ie compte rendu d une communication faite a Dole Ie 26 juin 1998,publie
dans Ie Bulletin de l AELAC 8 [1998],p. 6-7). Un trait caracteristique de la tra-
dition textuelle toUjOUTS ouvante et croissante est l apparition de differents
textes satellites concernant Pilate et ses relations avec la cour imperiale de
Rome, que l on regroupe sons Ie nom de «cycle de Pilate» (voir CANT 64-
78). Des la seconde moitie du Xllle siecle l EN trouva une voie de diffusion
supplementaire par son insertion partielle dans deux reuvres de compilation.
On lit des emprunts aux ch. 3 a 8 de l EN et une adaptation des ch. 12-27dans
Ie Speculum historiale de Vmcent de Beauvais; Jacques de Voragine, pour sa
part, evoque a differents endroits de sa Legenda aurea des episodes de l apo-
cryphe (EN 3.2; 12; 19.1) et il inclut un abrege de la descente aux enfers (EN
18-27) dans Ie chapitre sur la resurrection du Seigneur (qui forme Ie ch. 52
dans l edition recente de Giovanni Paolo MAGGIONI, Iacopo da Varazze,
Legenda aurea, I, Florence, 1998,p. 366-369).
La plus ancienne traduction de l EN en langue vernaculaire date du XIe,
ou peut-etre meme du milieu du Xe siecle; elle rut faite en ancien anglais et
est conservee dans trois manuscrits, dont Ie plus ancien est Cambridge Univ.
Libr.Ii.2.11 (troisieme quart du XIe s.). Mais c est surtout a partir du XIIIe
siecle que l EN entra, sonsdifferentes formes, dans les cultures vernaculaires.
Ces differentes formes sont 1) la traduction ou l adaptation en veTSou en
prose; 2) l insertion du fecit dans des reuvres de plus grande envergure, de
caractere historique, didactique, romanesque, devotionnel et, bien sur, dra-
matique; 3) la presence de motifs, de personnages, ou de details qui ont leur
origine dans l EN mais qui en sont venus a mener une existence independan-
te, et non plus liee au texte meme de l apocryphe. -Dans Ie cas des traduc-
tions ou des adaptations, la forme vernaculaire refletera la forme latine dont
elle est tributaire. Aussi est-ce la recension A que l on reconnait Ie plus sou-
vent derriere les versions vernaculaires. Parfois, les recherches ont permis
d identifier Ie modele latin au niveau de familIes textuelles ou meme de manus-
crits individuels. C est ainsi que la forme textuelle (B1) transmise par Ie ms.
Sa1zbourg, Erzabtei St. Peter a V 27 represente Ie modele d au moins deux
oeuvres en haul allemand, a savoir Diu Urstende «<La resurrection»), une
adaptation en veTS omposee par Konrad von Heimesfurt au debut du Xllle
siecle, et la traduction en prose conservee dans Ie manuscrit de Munich, Cgm
7240, ecrit en Baviere en 1447. On constate, d autre part, que les multiples
metamorphoses que l EN medieval a subies sont conditionnees par Ie role
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COMPTES RENDUS
joue par l apocryphe dans des contextes toujours changeants. Enfin, Ie fait que
sa fonction a pu meme se reduire a celli de reservoir auquel on emprunta des
motifs ou des personnages pour les developper librement pent etre conside-
re comme la preuve ultime de son sucres.
A l exception de l espagnol et du portu~ais, Ie recueil couvre tout Ie champ
des litteratures vernaculaires du Moyen Age. Richard a GoRMAN presente
l etat des connaissances actuelles pour Ie fran~ais (p. 103-131; contribution
posthume). Josep IzQUIERDOanalyse quatre textes en catalan et en occitan
(p. 133-164). Amilcare IANNUCCI echerche surtout les traces de I EN dans la
poesie italienne, des laude a Dante (p.165-205; revision d un article paru dans
Quademi d italianistica 14 [1993]). C. W. MARX passe en revue les nombreuses
marques de la presence de l apocryphe en ancien et moyen angiais (p. 207-
259). Kirsten WOLFpropose une modeste recolte pour Ie norois, Ie danois et
Ie suedois (p. 231-286; reedition d un article paru dans Mediaeval Studies 55
[1993]). Werner HOFFMANN illonne Ie terrain fructueux du haut allemand (p.
287-336), et fait egalement Ie point pour Ie neerlandais et Ie bas allemand (p.
337-360). Ann DooLEY decrit Ie developpement de l apocryphe dans Ie contex-
te de la litterature irlandaise (p. 361-401). Enfin, David KLAUSNER ttire l at-
tention sur la survie de motifs apocryphes dans la poesie en langue galloise
(p. 403-418). Le recueil commence par un resume riche en informations de
Zbigniew IzYDORCZYKp. 1-19), et par un essai sur Ie developpement de l apo-
cryphe dans les traditions grecque et orientales, de la main de Zbigniew Izy-
DORCZYK t de Jean-Daniel DUBOIS p. 21-41). Enfin, la bibliographie the-
matique, resultat de la collaboration de Remi GOUNELLE et de Zbigniew
IZYDORCZYK p. 419-532), offreau lecteur un instrument de travail de tout
premier ordre (surtout la partie 1. The Acts of Pilate, qui compte 468 titres,
dont 46 sont consideres comme particulierement interessants).
La lecture des differentes contributions souleve une multitude de reflexions.
Je me limite aux remarques suivantes : 1) Les articles font ressortir que la pre-
sence de materiel apocryphe concernant I EN differe considerablement dans
les diverses litteratures, et que ce materiel n est pas exploite partout avec la
meme intensite. Une edition de I EN latin qui refletera la tradition complexe
de l apocryphe (et que prepare Z.lzydorczyk pour la Series Apocryphorum
dans Ie cadre du projet d edition des Actes de Pilate dirige par Jean-Daniel
Dubois), constitue tout naturellement un des desiderata es plus urgents. -2)
C est a uste raison que Ie recueil ne se limite pas aux relations intertextuelles
directes et claires entre texte latin et version vernaculaire. Toutefois, comme
Ie remarque Z.lzydorczyk (p. 16-17), identifier les cas d influence indirecte
et meme purement thematique de I EN est une tache souvent difficile, voire
impossible, surtout si les allusions a l apocryphe sont courtes ou generales ou
subtiles. Aussi ne faut-il pas perdre de vue que les auteurs medievaux avaient
a leur disposition differents modeles pour leur presentation de la descente aux
enters. II en resulte une profusion de textes mentionnes qui temoignent de la
popularite du theme de la passion du Christ ou de sa descente aux enters, mais
dont l analyse conclut souvent a un non liquet quant a leur relation avec I EN.
-3) Un ouvrage de reference comme celui-ci n offre normalement que pen
de place a des discussions detaillees. Aussi arrive-t-il que la presentation d un
probleme ou d un texte soit trop succincte pour pouvoir convaincre Ie lecteur.
Le cas du sermon pseudo-augustinien 160 peut servir d exemple. Ce sermon
relate, lui aussi, a descente du Christ aux enters, et il est un des textes qui ont
contribue it la diffusion du theme du descensusad inferos : Ie sermon faisait
partie de l homeliaire d Alain de Farfa (11.2); Jacques de Voragine en fit des
emprunts dans Ie meme chapitre sur la resurrection du Seigneur; des traces
du sermon sont ici signalees dans des textes tant en latin qu en anglais et en
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OMPTESRENDUS
allemand.Le problemede a relation de ce sermonavec ' EN n' estpas enco-
re resolu.Tandisque a communisopinio considereque e sermondependde
l' BN, Z. Izydorczyk emet 'hypotheseque les deux extes refletent indepen-
damment 'un de l'autre une tradition latine plus ancienne p. 50). D'autre
part, dans eur presentation,es auteurs iennent nsuffisamment ompte de
la tradition complexedu sermon,qui circulait sousdifferentes orme~ Ie ser-
mon estd'ailleurs cite d'apres PL 39, 2059-2061, ui donne une forme inter-
polee, es nterpolations etantmisesentre crochets;une edition du texte non
interpole se trouve dans Dolores OZIMIC,Der pseudoaugustinische ermo
CLX. Hieronymusalssein vermutlicherVerfasse1;einedogmengeschichtliche
EinordnungundseineBedeutungUr dasosterlicheCanticum riumphale« Cum
rexgloriae» [Dissertationen er UniversitatGraz 47],1979, . 19-36, ui repo-
se sur 20 manuscritsdu Vlle-VIlle au XIVe siecle). C'est ainsi que,dans e
poemeabecedaire u VIle- VIlle siecleAudite omnes anticummirabile,signa-
Ie a la p. 98, es parolesdes turbaebeatae emblentmodeleesnon pas sur Ie
passagenterpole dans e §4du sermo~pseudo-augustinien, ais sur es ignes
63s e 'homelie XIla d'Eusebe«Gallil:an» (CCSL 101, 49).Tantque ne sera
pasdenouee a tradition complexedu sermon160, es conclusions ormulees
dans ce recueil restent necessairementrovisoires. -4) L'abondanced'in-
formation offerte aux ecteursconstitue ndubitablementun despoints forts
de ce recueil. Cependant,un plus grand effort de coordination aurait pu la
mettre plus amplementau profit de ceux qui veulent consulter e livre sans
pour autantprendre connaissancee tout soncontenu.Ainsi faut-il deplorer
l'absence resque otale de references 'un article a un autre,surtout orsqu'il
s'agitd'informations complementaires par ex. p. 170et p. 159 au sujet des
noms Alexanderet Rufus). Quanta l'Index of Names,Subjects, nd Texts,l y
manqueun certainnombred'entreesqui auraient acilite 'accesa desmatieres
moins connues.Cela est notamment e caspour les multiples personnages
mentionnesdans es divers ouvrages, our es variantessous esquellesappa-
raissent es noms propres, ainsi que pour les motifs narratifs developpesou
ajoutespar tel ou tel auteur (par ex. a sourcequi jaillissait dans a <;ellule e
Josephd'Arimathee d'apres 'adaptationde Gundacti:er onJudenb1J gigna-
lee ala p. 293). -5) Si,comme l se doit a 'heure actuelle, outes es citations
de extes atins sontaccompagnees'une traductionanglaise, ememecontort
de lecture n'est malheureusement as toujours offert lorsqu'il s'agit de cita-
tions de passages u memede itres d'ouvrages ans es angues ernaculaires
du MoyenAge. -6) Quelquesnotesde ecture: p. 92, 'homeliaire de Saint-
Pere de Chartresne contient pas une adaptation du Pseudo-Matthieu, ais
une version atine des huit premiers hapitresdu Protevangile e Jacquesvoir
en dernier ieu J -D. Kaestli, «Le Protevangilede Jacquesen atin. Etat de a
questionet perspectives ouvelles», Revued'histoiredes extes 6 [1996],p.
51). -P. 237: a cote du manuscritd'Oxford, Queens'sCollege n'estpas 304,
mais 305,commea la p. 109. P. 490,n° 640: on s'etonne,a propos de l'ar-
ticle de Barbara Fleith sur a tradition manuscritede a Legendaaurea, e ne
pas retrouver son etude magistrale parue en 1991: Studienzur Oberliefe-
rungsgeschichteer lateinischen egendaAurea, Bruxelles,Societedes Bol-
landistes SubsidiaHagiographica 2),1991. P. 533 (Index of Manuscripts)
Ie manuscritolim Louvain, Universiteitsbibliotheek 145,n'a pas echappea
l'incendie qui aneantit a bibliotheque e 8 aout 1914; l ne sauraitpar conse-
quent etre identifie au ms. I G 5 de la bibliotheque universitaire d' Amster-
dam (on trouve une descriptionde ce dernier manuscritdansW. DEVREESE,
De handschriftenvanJan van Ruusbroec'swerken,Gant, 1900,p. 403-413).
BEYERS
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COMPTES RENDUS
SCHWEMER,nna Maria, Vitae Prophetarum,Gfitersloh, Giiters-
loher Verlagshaus Jiidische Schriften aus hellenistisch-romischer
Zeit, 1/7), 1997,177 p. ISBN 3-579-03918-0.
A.M. Schwemer est l auteur d une volumineuse these sur les Vies des Pro-
phectes ubliee en deux volumes a Ttibingen, Studien zu den fruhjUdischen Pro-
phetenlegenden, Vitae Prophetarum dans la collection «Texts and Studies in
Ancient Judaism », t. 49 (1996) et 50 (1996). Ce fascicule bleu de la collection
des textes du judaIsme hellenistique propose une version allegee de ce ravail
monumental, en donnant une introduction, une traduction du texte et une
annotation qni renvoie aux principales sources de ce texte et a sa bibliogra-
phie. La plupart des discussions detaillees du double volume se trouvent natu-
rellement omises du fascicule ; mais on y trouvera les references principales,
et les renvois bibliographiques utiles.
Si l on tient compte de la collection dans laquelle cet apocryphe est publie,
on peut penser que Ie commentaire d A. M. Schwemer souligne l ancrage juif
hellenistique de cette compilation originale de notices sur les prophetes
bibliques; et pourtant, des la premiere page de l introduction (p. 539), elle
reconnait que l unanimite n est pas encore faite sur Ie fait de savoir s il s agit
d un texte fondamentalement juif ou d une compilation authentiquement chre-
tienne. II est vrai qu elle fait place ici et la aux objections de David Satran,
objections deja anciennes, et recapitulees dans son dernier livre Biblical Pro-
phets in Byzantine Palestine, Reassessing he Lives of the Prophets (Leiden,
Brill, 1995), qui insiste sur origine chretienne de cette compilation. Mais pour
elle, les Vies des Prophecies emanent d un milieu qui a redige a l origine ce
pseudepigraphe en hebreu. A. M. Schwemer connait les travaux des membres
de l A.E.L.A.C. autour de ce texte et les nombreuses traductions orientales
de ce texte.1I est etonnant qu elle ne fassepas plus de place dans Ie paragraphe
sur Ie texte et sa tradition manuscrite (p. 540-543) au fait que dans les manus-
crits les Vies desprophecies ont partie d un ensemble plus vaste qui inclut les
vies desapotres. De plus, Ie fait qu elle privilegie la recension anonyme comme
texte de base fait apparaitre autant que necessaire les divergences avec la
forme du texte representee par les recensions attribuees a Epiphane; celIe qui
est indiquee comme Epiphane 1 est d ailleurs pour elle, a raison, une recen-
sion chretienne du texte. Pour vraiment comprendre les variantes entre les
diversesversions de ce pseudepigraphe, l faut renvoyer a la synopse qui accom-
pagne la publication de sa hese plus qu a ce fascicule.
Cette publication a l avantage de renvoyer aux principaux passagesqui ser-
vent de sources aux traditions sur les prophetes, leur naissance, eurs miracles
leurs propheties, leur mort et Ie lieu de leur sepulture. En analysant Ie detail
des vies de grands prophetes comme Jeremie, Daniel, Ezechiel, A. M. Schwe-
mer montre que la collection des 23 vies rassemblees dans ce texte provient
de milieux divers de la Diaspora juive, en Egypte et en Babylonie. En exami-
nant les anachronismes du texte par rapport a ses sources bibliques, elle arri-
ve a sittler l essentiel des details de ces vies au plus lard dans Ie judaisme du
ler siecle de notre ere, « et peut-etre avant ».11 y a, en effet, plusieurs raisons
qui militent dans ce sens, en particulier les travaux sur Ie contexte historique
du logion attribue a Jesus (Lc 11,47 et Mt23, 29) et les premieres traces de la
veneration des morts de prophetes dans Ie christianisme ancien. Tout cela ne
peut pas s expliquer a partir du IV- Ve s. seulement.
Pour aller dans Ie sens de cette these, nous avons cherche a montrer ailleurs
que les traditions juives sur la mort de Zacharie ne peuvent pas s expliquer
par Ie seul developpement chretien de traditions sur la mort des prophetes.
Pour la vie de Zacharie, fils de Jehojada, il ne suffit pas de differencier Ie pro-
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OMPfES RENDUS
phete de l Ancien Testament du peTe de Jean-Baptiste en prenant les tradi-
tions sur la mort du peTedu Baptiste pour un developpement chretien tardif ;
il y a plusieurs figures prophetiques veterotestamentaires pour expliquer les
divergences entre les deux notices consacrees a un prophete Zacharie, dans
la forme du texte examinee par l auteur. Nous nous en sommes explique deja
dans deux articles qui n apparaissent pas dans la bibliographie ou les notes:
«Hypothese sur l origine de l apocryphe Genna Mariae », Augustinianum,
XXIII (1983), p. 263-270, et dans «La mort de Zacharie : memoire juive et
memoire chretienne », Revue des etudes augustiniennes,40/1 (1994), p. 23-38.
II faut donc souhaiter que les travaux de l equipe de l A. E. L. A. C. progres-
sent vile pour qu un debat avec es etudes d A.M. Schwemer ail lieu.
TARDIEU,Michel, Recherches ur la formation de l Apocalypse de
Zostrien et les sources de Marius Victorinus -HADOT, Pierre,
« Porphyre et Victorinus». Questions t hypotheses, ures-sur- vet-
te, Groupe pour l Etude de la Civilisation du Moyen-Orient (Res
Orientales, IX), 1996, 157 p. (diff. par Peeters Press). ISBN 2-950-
8266-3-6.
Le present volume est ne de discussions entre Pierre Hadot, specialiste
inconteste de cet erudit neoplatonicien chretien du IVe s., Marius Victorinus,
et Michel Tardieu qui a longtemps recherche les sources des gnostiques criti-
ques dans l ecole de Plotin. C est en commentant les titres des apocalypses
employees par les gnostiques selon Ie paragraphe 16de la Vie de Plotin (Paris,
Vrin, 1992,p. 503-546) que M. Tardieu a donne en note (p. 539) une traduc-
tion d un passage de l Apocalypse de Zostrien (NHC VIII) a propos duquel
Pierre Hadot a cru apercevoir un echo de Marius Victorinus. Dans un premier
chapitre du livre qui presente cette decouverte, M. Tardieu retrace Ie parcours
de l interpretation des textes de Marius Victorinus dans Ie cadre des travaux
qui cherchent a retrouver les traces de l exegese porphyrienne des Oracles
Chaldaiques. Or, les textes de Nag Hammadi sont rarement sollicites pour
retrouver des pans de l histoire de la philosophie a part des traites comme les
Trois Stelesde Seth (NHC VII), I Allogene (NHC XI) ou Zostrien (NHC VIII).
Pour ce demier texte, assezmal edite dans la collection americaine des Nag
Hammadi Studies, M. Tardieu a retrouve la trace d equivalents coptes de
termes philosophiques utilises en latin par Marius Victorinus dans sa contro-
verse avec es ariens (Contre Arius, 1,49-50, ed. P. Hadot, Sources chretiennes
68, Paris, 1960,p. 3428.). Voila que Ie texte copte deZostrien montrait un paral-
lelisme frappant avec un passage d un texte d un Pere de l Eglise peu suspect,
par sa endance philosophique, d emprunter sesarguments a une source gnos-
tique. Le texte de Marius Victorinus devenait Ie premier temoin patristique
litteral d un texte de Nag Hammadi. Mais comme Ie texte de Zostrien ne pou-
vait avoir ete puise sa source chez Marius Victorinus, pour une simple raison
de chronologie des deux reuvres, et que Ie texte copte de Zostrien provenait
d un original grec, Ie texte de Marius Victorinus devait dependre d un origi-
nal grec. Entre Ie milieu philosophique copte atteste par Nag Hammadi, Ie
monde du neoplatonisme latin dans la deuxieme moitie du lYe s. et es sources
grecques des neoplatoniciens, ce ivre s adressea plusieurs disciplines et consti-
tue deja un pas important dans la redecouverte des sources medioplatoni-
ciennes des philosophes neoplatoniciens.
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COMP1ES RENDUS
Pour donner un cadre chronologique aux questions abordees dans ce livre,
M. Tardieu a pris Ie paTti,dans un deuxieme chapitre, de fixer quelques reveres
datables de l histoire du christianisme et de la philosophie entre Ie milieu du
IIIe s. et la fin du IVe s. Au lieu de brosser a grands traits l histoire des contro-
verses christologiques ou les traces des grands figures de l ecole de Plotin, M.
Tardieu choisit quelques faits marquants et quelques dates majeures, toujours
attestees par des textes et quelques citations appropriees. Les textes de Nag
Hammadi font ainsi irruption dans Ie paysagedesquerelles philosophico-theo-
logiques. Dans Ie chapitre suivant, M. Tardieu donne la reproduction du
manuscrit du passage de Marius Victorinus, son edition et la traduction de
Pierre Hadot, avec tine synapse qui suit Ie mot a mot du texte de Marius Vic-
torinus et Ie texte copte des passages en question de Zostrien. Le texte latin
sert a reconstruire Ie texte copte, et Ie texte copte qui manifeste quelques
variantes par rapport a Marius Victorinus petit, lui aussi, servir a comprendre
comment Marius Victorinus a utilise sa source grecque. Sur la base de ce tra-
vail patient de reconstruction, un quatrieme chapitre donne une edition cri-
tique des pages 64-68 et 75, 84 et 74 du texte copte de Zostrien, parallele a
Marius Victorinus, avec a reproduction photographique du papyrus original.
Le demier chapitre, Ie plus volumineux (p. 59-114)propose un commentaire
detaille de ces quelques pages de Zostrien.
Sur Ie mode de ce que M. Tardieu avait deja commente dans un autre grand
texte gnostique, l Apocryphe de Jean (Sources gnostiques et manicheennes 1,
Paris, 1984), on decouvre ici une speculation sur l existence de l Un en soi, avec
les arguments traditionnels de a theologie negative (la denomination, la nega-
tion des formes, selon es arguments ires du Parmenide, du Sophiste,du Phedre,
et du Timee, a voie d eminence, la synthese des opposes), mais aussi es argu-
ments de la theologie affirmative sur l Un par rapport au Tout. Ce chapitre
substantiel est tine mine de renseignements varies tant sur exegese de Marius
Vistorinus que sur les sources plotiniennes et les antecedents philosophiques
du plotinisme. Plusieurs fois, M. Tardieu renvoie a Numenius pour comprendre
ce qui fait l originalite des speculations du Zostrien a propos du premier prin-
cipe. Dans un appendice, P. Hadot revient a la recherche qu il a menee toute
sa vie sur les sources porphyriennes de Marius Victorinus et souhaite que la
decouverte de M. Tardieu soit exploitee a sa uste valeur, sans souscrire com-
pletement a l attribution a Numenius de la source grecque de Zostrien.
Un tel volume suscite debats et controverses,mais l importance de cespages
a ete tIes vite remarquee parmi les specialistes de l ecole neoplatonicienne.
Comme Ie reconnait M. Tardieu, il faut encore ameliorer la reconstitution du
texte copte, et peut-etre retrouver ailleurs dans Zostrien d autres sources de
Marius Victorinus. Un imposant index des termes grecs, atins et coptes ainsi
que des auteurs anciens permettra d autres travaux sur les composantes phi-
losophiques des textes gnostiques et des textes de Nag Hammadi en particu-
lier, au-dela des textes rattaches a ce qu on nomme la gnose sethienne. La
concordance du texte copte de Zostrien, signee par W.-P. Funk, produite par
l equipe canadienne de la bibliotheque copte de Nag Hammadi (Concordan-
ce des textesde Nag Hammadi, Les codices VIII et IX, Quebec, 1997,p. Xlss.)
integre deja les propositions de M. Tardieu, sans es retenir toutes (sans doute
a raison, cf. par ex. en 65, 9-13, 68, 4-13, et peut-etre 66, 12). On petit donc
s attendre a d autres decouvertes sur ce texte majeur pour lequel M. Tardieu
a eu Ie bonheur d inventer une piste de recherche feconde.
I.-D. DUBOIS
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COMPTESRENDUS
PAUPERT,atherine (dir.), Aux frontieres du Nouveau Testament.
Motifs apocryphesen Maurienne et en Tarentaise Savoie),vol. 3:
Vie du Christ, Passionet Culte des morts,Grenoble, Alzieu Bre-
pols, 1999,179 p. ISBN 2-910717-51-8 t 2-503-990-49-5.
Ce volume, consacre a la vie du Christ (de sa naissance a son ascension,
gaUr ce qui est lie au culte de Joseph), fait suite aux deux ouvrages dont il a
ete question dans Apocrypha 10, p. 327-329. La premiere partie est consti-
tuee d'une longue introduction (p. 16-74), qui presente sommairement leg
traditions apocryphes sur la vie du Christ et quelques generalites sur Ie culte
des morts. La seconde (p. 95-174) est formee de l'index thematique et geo-
graphique des representations figurees de la vie du Christ identifiees en Mau-
rienne et en Tarentaise. En annexe sont donnees la table des matieres de
I'Histoire des trois rois mages (sur ce texte, cr. p. 28-30) et quelques docu-
ments d'archives sur Ie culte des morts. II est regrettable qu'aucune presen-
tation ne soit faite de ces documents et de leur origine (on ne gait en parti-
culier rien de l'endroit oft ils sont deposes et de la cote SOliSaquelle il y sont
repertories).
La quantite de materiaux iconographiques mis a jour est impressionnante,
et leg descriptions qui en sont donnees dans l'index couvrant la Tarentaise sont
souvent tres detaillees, ce qui est fort appreciable. Si la notion d'apocryphe
est utilisee d'une fa~on plusconvainquante dans cet ouvrage que dans Ie volu-
me precedent (consacre au Rosaire et vie de fa Vierge), on pourrait, en revanche,
s'attendre a trouver dans l'introduction des informations moins imprecises,
voire plus exactes. Voici quelques notes de lecture qui ne pretendent pas a
l'exhaustivite: p. 20: s'il est vrai que Lc situe la naissance de Jesus dans line
creche, sans plus de precision, il n'est pas pour autant vrai que« leg artistes et
artisans ont pu representer» librement ce lieu «soit comme line etable, soit
comme une grotte amenagee: il n'y a donc la aucune allusion apocryphe ».
D'une part, il existe plusieurs traditions apocryphes occidentales situant la
naissance de Jesus dans une grotte ou, au contraire, dans line maison-etable;
d'autre part, la liberte des artistes etait restreinte par leg raditions exegetiques
et homiletiques en vigueur dans leg milieux dans lesquels ils travaillaient. P.
23-24: la pretrise de Simeon figure dans Ie Protevangile de Jacques 24 et dans
leg textes apparentes. P. 48: la presentation des traditions sur la Passion n'est
pas heureuse; elle donne pele-mele des donnees sur leg Actes de Pilate pro-
prement dits, l' Evangile de Nicodeme selon Gamaliel traduit dans Ie vol. 1 de
la collection, et la Vengeancedu Sauveur.P.60: Ie personnage d' Adam (accom-
pagne d'Eve) se detache bien de la foule des ustes sur la representation repro-
duite en couverture. II est, en revanche, remarquable que leg portes que Ie
Christ foule aux pieds soient en bois et non en metal comme Ie voudraient leg
textes bibliques (cf. surtout Ps 107[106], 16) et leg multiples traditions qui s'en
inspirent. P. 60: il aurait ete utile de renvoyer aJn 20, is. a propos de la« pieu-
se egende » selon aquelle Marie a beneficie de la premiere apparition du Res-
suscite. P.61 : Ie Tocher oft figurent leg empreintes du Christ montant aux cieux
n'est certes pas atteste chez Egerie, mais ill'est en 403 dans la Lettre 31 de
Paulin de Nole; c'est donc bien une legende qui remonte a l'antiquite chre-
tienne. P. 64, a definition des apocalypses apocryphes DOUg laisse perplexe.
Enfin, leg allusions a «la sortie 'honorable' de l'Eglise» de Lucien Lacroix,
«pasteur ambigu» (p. 73) et aux «diables de Bessans », qui n'auraient aucu-
ne «resonance religieuse» (p. 74) sont trop sibyllines pour etre comprehen-
sibles.
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COMPTES RENDUS
L ouvragecontientun certainnombrede autesde rappe lesplusgenantes
etant p. 42 §2,ou il taut corriger «exterieure» en «anterieure », et p. 50 §2,
ou il taut lire «garde-rent» t non «garderaient»),mais estagremented un
beaucarnerd illustrations.
R. GOUNELLE
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LIVRES RECUS A LA REDACTION
ADAMIK, Tamas, BOLYKI, Janos, DERI, Balazs, KIsrn, Klara, Osz, Ferenc,
PEsTHY,Monika, SIMON,L. Zoltan SZEPESSY,ibor, Apokrif levelek,
Budapest, Telosz (Apokrif iratok), 1999,208 p. ISBN 963-8458-176.
ALBL, Martin C., «And Scripture Cannot Be Broken ». The Form and Func-
tion of the Early Christian Testimonia Collections, Leiden I Boston I
Koln, Brill (Supplements to Nouum Testamentum, 96), 1999, xvi + 335
p. ISBN 90-04-11417-3.
AMSLER, Frederic, Acta Philippi. Commentarius, Thmhout, Brepols (Cor-
pus Christianorum, Series Apocryphorum, 12), 1999, xxxvi + 698
p. ISBN 2-503+41122-3.
ANDERSON,Gary A. STONE, Michael E., A Synopsis of the Books of
Adam and Eve, Second Revised Edition, Atlanta (Georgia), Scholars
Press (Society of Biblical Literature, Early Judaism and Its Literature,
17),1999, xx + 196 p. ISBN 0-7885-0566-1.
Aux origines du christianisme. Textes presentes par Pierre GEOLTRAIN,
Paris, Gallimard (Folio Histoire, 98), 2000, lxxiv + 601 p. ISBN 2-07-
041114-1.
BAYLESS,Martha LAPmGE, Michael, Collectanea Pseudo-Bedae, Dublin,
Dublin Institute for Advanced Studies (Scriptores Latini Hiberniae,
XIV), 1998, xiv + 329 p. ISBN 1-85500-160-8.
BYNUM, Caroline Walker FREEDMAN,Paul (ed.), Last Things. Death and
the Apocalypse in the Middle Ages, Philadelphia, University of Pennsyl-
vania Press (The Middle Age Series), 2000, viii + 365 p. ISBN 0-8122-
1702-0.
CALZOLARI BOUVIER, Valentina, KAESTLI, Jean-Daniel OUTTIER, Ber-
nard (ed.), Apocryphes armeniens: transmission -traduction -crea-
tion -iconographie. Actes du colloque international sur la litterature
apocryphe en langue armenienne (Geneve, 18-20 septembre 1997), Lau-
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par Folker SIEGERTet Jacques DE ROULET, avec la collaboration de
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bout, Brepols (Corpus Fontium Manichaeorum, Series Coptica, 1/2/2),
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TARDIEU, Michel, Recherches sur la formation de l'Apocalypse de Zostrien et
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Verlag (Orientalia Biblica et Christiana, 11), 1999, xvi +396 p. ISBN 3-
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8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 319/330
INDEX DES VOL. 1-10 (1990-1999)
Tablesdesmatieresdesvol
-10
NOTE: « Rec. : » ndique un ouvrage recense,suivi, entre parentheses,du
nom du recenseur.
(1990)
7-12: Pierre GEOLTRAINJean-Claude PICARD Alain DESREU-
MAUX, a fable, pour tout dire.
13-67: Bibliographie generale.
69-117: Jean-Claude PICARD, apocryphe a l etroit: notes historio-
graphiques sur Ie corpus d apocryphesbibliques.
118-145: Francis SCHMIDT,ohn Toland, critique deiste de a litterature
apocryphe.
147-165: Bernard TEYSSEDRE,es representationsde la fin des temps
dans Ie chant V des Oraclessibyllins. Les strates de l imagi-
naire.
167-179: Luigi CIRllLo, L apocalypsed Elkhasai: son 6le et son mpor-
tance pour l histoire du udaYsme.
181-196: Richard BAuCKHAM,TheConflict of Justiceand Mercy: Atti-
tudes to the Damned in Apocalyptic Literature.
197-217: Philip S. ALEXANDER,ate Hebrew Apocalyptic: A Prelimi-
nary Survey.
219-230: Moshe D. HERR,Les raisons de la conservationdes estes de
la litterature juive de l epoque du SecondTemple.
231-247: Han J.W. DRIJVERS, pocryphal Literature in the Cultural
Milieu of Osrhoene.
249-267: Alain DESREUMAUX,a Doctrina Addaf: Ie chroniqueur et
sesdocuments.
269-277: Javier TEIXIDOR, ap6tre d apres a litterature syriaque.
279-302: Jean-Daniel KAEsTLI,Fiction litteraire et realite sociale: que
peut-on savoir de la place des emmes dans e milieu de pro-
duction des Actes apocryphesdes ap6tres?
303-311: Michael E. STONE, ravauxactuelssur a litterature apocryphe
armenienne.
2 (1991)
11-16: Jean-Claude PICARD Alain DESREUMAUXPierre GEOL-
TRAIN, a fable, du texte a l image.
17-30: Pierre GEOLTRAIN, emarques sur a diversite des pratiques
discursivesapocryphes: exemple de 5 Esdras.
31-83: Enrico NORELLI,Situation des apocryphespetriniens.
85-98: Jean-Daniel DUBOIS, es «Actes de Pilate» au quatrieme
siecle.
99-117: Fran~ois BOVON, es paroles de vie dans es Actesde l apotre
Andre.
Apocrypha 11, 2000,p. 325 -337
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 320/330
326
2*NDEX
119-132: SeverVoIcu,Notessurl histoiredutexte de I Histoire de [ en-
lance de Jesus.
133-153: Gedaliahu G. STROUMSA,aradosis.Traditions esoteriques
dans e christianisme des premiers siecles.
155-163: Evelyne PATLAGEAN, emarques sur la diffusion et la pro-
duction des apocryphesdans e monde byzantin.
165-180: Peter DINZELBACHER,a «Visio S. Pauli.» Circulation et
influence d un apocryphe eschatologique.
181-215: Gerard ROQUET, a «reception» de l image et du texte a
motifs d apocryphesdans es chretientesd Egypte et de Nubie.
Quelques aper~us.
217-247: Nicole THIERRY, illustration des apocryphesdans es eglises
de Cappadoce.
249-259: Marius HUDRY, es apocryphes ans iconographiedes eglises
et chapellessavoyardes.
261-285: Index des citations bibliques, apocryphes, ncienneset medie-
vales.
3(1992)
9-11: Jean-Daniel KAESlLI -Albert FREY,Avant-Propos.
13-15: Abreviations.
17-46: Eric JUNOD,«Apocryphes du Nouveau Testament»: une
appellation erronee et une collection artificielle. Discussion
de la nouvelle definition proposee par W. Schneemelcher.
47-68: Richard I. PERVO,ohannine Trajectories in the Acts ofJohn.
Hommage a Helmut Koester.
69-109: Eckhard PLOMACHER,aignion und Biberfabel. Zum litera-
rischen und popularphilosophischen Hintergrund von Acta
Iohannis 60f.48-54.
111-123: Jean-Daniel KAESlLI,Le rapport entre es deuxVies atines de
l apotre Jean. A propos d un recent article de K. Schaferdiek.
125-164: Christine M. THOMAS,Word and Deed: The Acts of Peterand
Orality.
165-209: Albert FREY,L « Eloge de Philippe, saint apotre et evange-
liste du Christ» (BHG 1530b).
211-235: Jiirgen WEHNERT,briss der Entstehungsgeschichteespseu-
doklementinischenRomans.
237-257: F. StanleyJONES,valuating the Latin and SyriacTranslations
of the Pseudo-Oementine Recognitions.
259-278: Franc;:ois OLBEAU, istes atines d apotres et de disciples, ra-
duites du grec.
279-283: English Summaries.
4 (1993)
13-16: Jean-Daniel DUBOIS, vant-propos.
13-15: Abreviations.
19-23: Bernard OU1TlER,Un fragment syriaque nedit de W Esdras.
25-64: Pierluigi PlOYANELLI,Les origines de I Apocalypse de Paul
reconsiderees.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 321/330
3*
INDEX
65-82: Alain DESREUMAUX,es symboles a la realite: la preface a
l Apocalypse de Paul dans a tradition syriaque.
83-99: Gerard ROQUET, Ange des Eaux et Ie Dieu de la Crue selon
Chenoute. Sur un fragment copte des visions de l Apocalyp-
sisSinuthii.
101-112: Simon C. MIMoUNI,Les Apocalypsesde la Vierge..etat de la
question.
113-123: Catherine PAUPERT,resencedes apocryphesdans a littera-
ture monastique occidentale ancienne.
125-139: Robert FAERBER, Apocalypse de Thomas en vieil-anglais.
141-175: Richard BAUCKIlAM,The Apocalypse of the SevenHeavens:
The Latin Version.
177-195: Michel CAMBE, a Predication de Pierre (ou : Ie Kerygme de
Pierre).
197-224: Pierluigi PIovANELLI, es aventuresdes apocryphesen Ethio-
pie.
225-243: Jean-Pierre ALBERT, e parIum et Ie sang.
245-261: Peter W. DUNN,Women s Liberation, the Acts of Paul, and
other Apocryphal Acts of the Apostles: A Review of Some
Recent nterpreters.
263-293: Valentina CALZOLARI, a tradition armenienne des Pseudo-
Clementines etat de la question.
295-297: English Summaries.
5 (1994)
7-111: Richard BAUCKHAM,he Apocalypse ofPeter: a JewishChris-
tian Apocalypse from the T1Ineof Bar Kokhba.
113-117: Fran~oisBOYON, ne nouvelle citation des Actesde Paul chez
Origene.
119-136: Ann G. BROCK,Genre of the Acts of Paul: One Tradition
Enhancing Another.
137-164: Alain DESREUMAUX, n manuscrit syriaque de Teheran
contenant des apocryphes.
165-188: Remi GOUNELLE, propos d une refonte de la Narratio Iose-
phi jadis confondue avec les Acta Pilati, et d un drame reli-
gieux qu elle a inspire.
189-210: Remi GOUNELLE,enset usaged apocryphusdans a Legende
doree.
211-248: SimonC. MIMOUNI, es Viesde a Vierge..etat de la question.
249-268: Catherine PAUPERf, hemesapocryphesde l iconographie des
eglisesde Tarentaise et de Maurienne (Savoie).
269-288: Marek STAROWIEYSKI,es apocryphesdans a tragedie Chris-
tuspatiens.
6 (1995)
7-65: Irena BACKUS,Guillaume Postel, Theodore Bibliander et Ie
« Protevangile de Jacques.» Introduction historique, edition
et traduction fran~aisedu MS. Londres, British Library, Sloane
1411,260r-167r.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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4*
28
INDEX
67-77: Christian-Bernard AMPHOUX, Evangile selon es Hebreux,
source de l Evangile de Luc.
79-92: Rene-Georges COQUIN,Quelle etait la langue originelle du
pseudepigrapheconserve en copte sous Ie titre de Paralipo-
menesde Jeremie et en arabe sous e titre de Captivite des ils
d Israel Ii Babylone?
93-126: Robert FAERBER, eux homeliesde Paquesen angiaisancien.
127-164: Martin McNAMARA, Midrash, Apocrypha, Culture Medium
and Development of Doctrine: SomeFacts n Quest of a Ter-
minology.
165-177: Bernard OU1TIER,Deux homelies pseudo-chrysostomiennes
pour la fete mariale du 15 aoftt.
179-202: David W. PAD,The Genre of the Acts of Andrew.
203-234: Madeleine SCOPELLO,erites et contre-verites: a vie de Mani
selon es Acta Archelai.
235-278: Isabelle ULLERN-WEnE, Pour une comprehensionde a signi-
fication apocryphe dans e « continent scripturaire. »
279-298: Witold WITAKOWSKI,he Miracles of Jesus: An Ethiopian
Apocryphal Gospel.
299: Erratum. [voir: 5, 113-117].
7 (1996)
7-8: Albert FREy, Liminaire.
9-26: Paul-Hubert POIRIER,Evangile de Thomas, Actes de Thomas,
Livre de Thomas. Une tradition et ses ransformations.
27-41: Alain LE BoULLUEc, La lettre sur I «Evangile secret» de
Marc et Ie Quis dives salvetur? de Clement d Alexandrie.
43-62: Annewies VAN DEN HOEK, Divergent Gospel Traditions in
Clement of Alexandria and Other Authors of the Second Cen-
tury.
63-79: Bernard POUDERON,Flavius Oemens et Ie proto-Oement juif
du roman pseudo-clementin.
81-108: Flavio G. NUVOLONE,Apocalypse d Esdras grecque et latine,
rapports et rhetorique.
109-122: Pier Franco BEATRICE,Traditions apocryphes dans la Theo-
sophie de Tubingen.
123-134: Andre-Louis REY, Homerocentra et litterature apocryphe
chretienne : quels rapports?
135-145: Christopher R. MA1THEWS, Nicephorus Callistus Physical
Description of Peter: An Original Component of the Acts of
Peter?
147-165: Alberto FERREIRo, Simon Magus: The Patristic-Medieval Tra-
ditions and Historiography.
167-191: Barbara FLEmI, Die Legenda Aurea und ihre dominikani-
schen Bruderlegendare. Aspekte der Quellenverhiiltnisse apo-
kryphen Gedankenguts.
193-203: Marek STAROWIEYSKI, a legende de saint Jacques Ie Majeur.
205-224: Edoardo BARBIERI, Lo ps. Marcellus brevior in una traduzio-
ne italiana del Trecento.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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5*
INDEX
329
225-234: Pierre GISEL, pocryphes et canon: leurs apports et leur sta-
tut respectif. Un questionnement heologique.
235-241: Marc FAESSLER,erygme et imaginaire.
243-247: Walter RESELL, es apocryphes,extesconcurrentielsdu Nou-
veau Testament.
249-251: Catherine PAUPERT, apocryphe, able catechetique.
253-259: Marguerite RASSART-DEBERGH,itterature apocryphe et art
copte.
261-272: Nicole THIERRY, iconographie cappadociennede l affront
fait a Anne d apres Ie Protevangilede Jacques.
273-292: Giuseppe DE SPIRITO, Annonciation de Sainte-Marie-
Majeure: image apocryphe?
293-300: Pierre-Alain MARIAUX, Figurer l apocryphe, ou la Verite
devoilee par la peinture. Quelques iconographes du XIxe
siecle face a l image chretienne.
301-303: David R. CARTLIDGE, n Electronic Database of Pictorial
Images Paralleled in Christian Apocrypha.
8(1997)
7-8: Albert FREY, Liminaire.
9-23: Michel TARDffiU, Le proces de Jesus vu par les Manicheens.
25-44: Aline ROUSSELLE,A propos d articulations logiques dans les
discours gnostiques.
45-69: Louis PAINCHAUD -Timothy JANZ, La «generation sans roi»
et la reecriture polemique de quelques textes de Nag Ham-
madi.
71-80: Rodolphe KASSER, L Eksegesis etbe Tpsukhe (NH II, 6).
Histoire de l ame puis exegese parenetique de ce mythe gnos-
tique.
81-88: Jean-Daniel DUBOIS, La version caple des Actes de Pilate.
89-96: Jacques-Noel PERES,L EpEtre des Apotres et l Anaphore des
Apotres : quelques convergences.
97-110: Valentina CALZOLARI, Reecriture des textes apocryphes en
armenien: l exemple de la legende de l apostolat de Thaddee
en Armenie.
111-119: Bernard OUITIER, Paralytique et ressuscite (CANT85 et 62).
Vie des apocryphes en armenien.
121-136: Remi GOUNELLE,La divinite du Christ est-elle tine question
centrale dans Ie proces de Jesus rapporte par les Acta Pilati?
137-146: Fran~is BOVON, Reception apocryphe de l Evangile de Luc
et lecture orthodoxe des Actes apocryphes des apotres.
147-164: Enrico NORELLI, Pertinence theologique et canonicite: les
premieres apocalypses chretiennes.
165-177: Alain DESREUMAUX,Remarques sur Ie role des apocryphes
dans la theologie des Eglises syriaques: l exemple de testi-
monia christologiques inedits.
179-191: Nestan TCHKHIVADzE, Une traduction geor~ienne d un ori-
ginal perdu: l histoire de l apocryphe de l Eglise de Lydda
(CANT 77).
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
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6*
30
INDEX
193-205: Ron CAMERON, yth and History in the Gospelof Thomas.
207-224: Daniel MARGUERAT, ctes de Paul et Actes canoniques: un
phenomene de relecture.
225-230: Jean KARAvmOPOULOS,Hapax legomena » et autres mots
rares dans l Evangile apocryphe de Pierre.
231-250: Folker SIEGERT,nalyses rhetoriques et stylistiques portant
sur es Actes de Jean et les Actes de Thomas.
251-264: Frederic AMSLER,Remarques sur la reception liturgique et
folklorique des Actes de Philippe (APh VIII-XV et Martyre).
265-271: James Keith ELLIOTT,The Influence of the Apocrypha on
Manuscripts of the New Testament.
273-286: Madeleine PETIT,Generation et transformation de themes
appartenant aUKVitae Prophetarum.
287-301: Renzo PETRAGLIO,e Siracideet l Ancien Testament: relec-
ture et tendances.
303-304: Pierre GEOLTRAIN,dieu. [A Jean-ClaudePicard].
9 (1998)
7-95: Sever J. VOIGU, Verso il testo primitivo dei llaLBLKU TOOK\lpi-
0\1 lllaoO« Racconti dell Infanzia del Signore Gesti. »
97-132: Christoph MARKSCHIES,«Neutestamentliche Apokryphen ».
Bemerkungen zu Geschichte und Zukunft einer von Edgar
Hennecke im Jahre 1904 begrundeten Quellensammlung.
133-156: Irena BACKUS, Christoph Scheurl and his Anthology of « New
Testament Apocrypha » (1505, 1513, 1515).
157-177: Marcello GARZANm, Les apocryphes dans la litterature slave
ecclesiastique de pelerinage en Palestine (XIIe-XVe s.).
179-223: Jean-Daniel KAESTLI, Un temoin latin du Protevangile de
Jacques: l homelie Postulatis filiae Jerusalem en l honneur de
Sainte Anne (BHL 483-485).
225-261: Robert FAERBER,L ermite de Thebes et Ie diable.
263-289: Paul-Hubert POIRIER, Les Actes de Thomas et Ie manicheis-
me.
291-299: Jean- Daniel DUBOIS, Sommos dans la version copte des Actes
de Pilate (XVI,7).
301-304: Bernard OUITlER, Dormition et assomption de Marie. A pro-
pos d un livre recent. [Simon C. MIMOUNI, Dormition et
Assomption de Marie. Histoire des traditions anciennes].
10 (1999)
7 -15: Attila JAKAB, Une lettre «perdue » de Clement d Alexandrie?
(Morton Smith et I «Evangile secret » de Marc).
16-55: Hugues GARCIA, La polymorphie du Christ: remarques sur
quelques definitions et sur de multiples enjeux.
56-73: Jean-Louis FEIERTAG,Le theme litteraire des vetements mor-
tuaires du Seigneur depuis les temoignages des « Apocryphes »
jusqu a ceux des recits de pelerinage.
74-98: Mary CLAYTON,The Transitus Mariae: The Tradition and Its
Origins.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 325/330
7*
331NDEX
99-138: Robert FAERBER,La tradition litteraire de la dormition et de
l'assomption de Marie en anglais ancien.
139-176: Marie-Joseph PIERRE, Lait et miel, ou la douceur du Verbe.
177-193: Christelle et Florence JULLIEN, Les Actes de Milr Milri: une
figure apocryphe au service de l'unite communautaire.
195-296: Jean-Pierre PEnoRELLI, La Vie latine d' Adam et Eve. Ana-
lyse de la tradition manuscrite.
297-300: Rec.: Jean-Daniel DUBOIS -Bernard ROUSSEL dir.), Entrer
en matiere (C. ZAMAGNI).
300-301: Rec.: Jean-Claude HAELEWYCK, Clauis Apocryphorum Vete-
ris Testamenti (EG. NUVOLONE).
302-303: Rec.: John J. COLLINS, Seers, Sybils and Sages in Hellenistic-
Roman Judaism (P. PIovANELLI).
303-305: Rec.: Giovanni CASADIO, Vie gnostiche all'immortalitli (J.-M.
ROESSLI).
305-307: Rec.: Gregor WURST, The Manichaean Coptic Papyri in the
Chester Beatty Library. Psalm Book. Part II, Fasc. 1: Die
Bema-Psalmen (P. OIERIX).
307 309: Rec.: Manichaica Latina, I : Epistula ad Menoch. Text, Uber-
setzung, Erliiuterungen von Markus STEIN F.G. NUVOLONE).
309-314: Rec.: Luigi CIRILLO -Alois VAN TONGERLOO dir.), Atti del
terzo congresso intemazionale di studi « Manicheismo e Oriente
Cristiano antico », Arcavacata di Rende -Amantea, 31 agosto-
5 settembre 1993 (C. et F. JULLIEN).
314-317: Rec.: ADAMIK Tamas al., Az apostolok csoddlatos cseleke-
detei. -ADAMIK Tamas al., Apokalipszisek. -ADAMIK Tamas
al., Csodtis evangeliumok (A. JAKAB).
317-320: Rec.: Eliane POIROT, Les prophetes Elk et Elisee dans la lit-
terature chretienne ancienne (P. PIovANELLI).
320-322: Rec.: L'« Evangile de Nicodeme » ou les « Actes faits sous
Ponce Pilate» (recension latine A), suivi de« La lettre de Pilate
Ii l'empereur Claude. » Introduction et notes par Remi Gou-
NELLE et Zbigniew IzYDORCZYK ...(0. EHLEN).
322-324: Rec.: Theodore SILVERSTEIN Anthony HILHORST, Apoca-
lypse of Paul. A New Critical Edition of Three Long Latin Ver-
sions (C. ZAMAGNI).
324-327: Rec.: Michael LA1TKE, Die aden Salomos in ihrer Bedeutung
Jilr Neues Testament und Gnosis, IV (A. FREY).
327-329: Rec.: Aux frontieres du Nouveau Testament. lnventaire des
motifs apocryphes en Maurienne et en Tarentaise (Savoie), I;
II: Rosaire et vie de la Vierge (R. GOUNELLE).
329: Rec.: Danielle ELLUL -Odile FLICHY, Le grec du Nouveau
Testamentpar les textes.Methode d'initiation au grec de la koine
Ii l'aide de textes tires du Nouveau Testament (R. GOUNELLE).
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 326/330
332
8*NDEX
2. Index des auteursmodernes
NOTE: «[a]» indique un auteur recense ou qui fait l objet d une presen-
tation; «[r]» indique I auteur d une recension ou d une presentation
FAERBER,obert: 4, 125-139;6,93-
126; 9, 225-261; 10,99-138.
FAESSLER,arc: 7,235-241.
FEIERTAG,ean-Louis: 10,56-73.
FERREIRO,Alberto: 7, 147-165.
FLEffiI, Barbara: 7,167-191.
FuCHY,Odile: 10,329 [a].
FREY,Albert: 3, 9-11.165-209;7, 7-
8; 8, 7-8; 10,324-327 r].
GARCIA,Hugues : 10, 16-55.
GARZANm,Marcello: 9,157-177.
GEOLTRAIN,ierre: 1,7-12; 2,11-
16.17-30; 8, 303-304.
GISEL,Pierre: 7, 225-234.
GOUNELLE, emi : 5, 165-188.189-
210; 8,121-136; 10, 320-322 a].
327-329 r].
HAELEWYCK,ean-Oaude: 10,300-
301 a].
HERR,Moshe D. : 1, 219-230.
HOWE,Margaret: 4,245-261 a].
HILHORST, nthony: 10, 322-324
[a].
HUDRY,Marius: 2, 249-259.
IZYDORCZYK, bigniew: 10, 320-
322 a].
JAKAB,Attila: 10,7-15.314-317r].
JANZ,Timothy: 8, 45-69.
JONES,. Stanley: 3, 237-257.
JULLIEN,Christelle: 10, 177-193.
309-314 r].
JULLIEN, Florence: 10, 177-193.
309-314 r].
, .
JUNOD, nc: 3, 17-46.
KAESTLI, ean-Daniel: 1,279-302;
3,9-11.111-123; 9, 179-223.
KARAVIDOPOULOS,ean: 8, 225-
230.
KAsSER, odolphe : 8,71-80.
LATTKE,Michael: 10,324-327 a].
LE BOULLUEC, lain: 7, 27-41.
MACDoNALD,Dennis R. : 1, 279-
302 a]; 4,245-261 a].
MARGUERAT,aniel: 8, 207-224.
ADAMIK, Tamas: 10, 314-317 a].
ALBERT,Jean-Pierre: 4, 225-243.
ALEXANDER, hilip S.: 1, 197-217.
AMPHoux, Christian-Bernard: 6,
67-77.
AMSLER, rederic: 8, 251-264.
BACKUS,rena: 6, 7-65; 9, 133-156.
BARBIERI, doardo: 7, 205-224.
BAuCKHAM,Richard:1, 181-196;4,
141-175;5, 7-111.
BEATRICE, ier Franco: 7, 109-122.
BovoN,Fran~is: 2, 99-117;5,113-
117;8,137-146.
BROCK,Ann G.: 5, 119-136.
BURRUS,Irginia: 1,279-302 a];4,
245-261 a].
CALZOLARI, alentina: 4, 263-293;
8,97-110.
CAMBE,Michel: 4, 177-195.
CAMERON, on: 8, 193-205.
CARLE,B.: 4, 245-261 a].
CARTLJDGE,avid R. : 7,301-303.
CASADIO, iovanni: 10,303-305a].
CHERIX, .: 10,305-307 r].
QRILLO,Luigi: 1, 167-179;10,309-
314 a].
CLAYTON, ary: 10,74-98.
COLLINS, ohn J.: 10,302-303 [a].
COQUIN,Rene-Georges: 6, 79-92.
DAVIES, tevan L.: 1,279-302 a].
DE SPIRITO, iuseppe: 7, 273-292.
DESREUMAUX,lain: 1,7-12.249-
267; 2, 11-16;4, 65-82;5, 137-
164; 8, 165-177.
DINZELBACHER,eter: 2, 165-180.
DOLBEAU,Franc;ois: 3, 259-278.
DRDVERS, an J.W.: 1,231-247.
DUBOIS, ean-Daniel: 2, 85-98; 4,
13-16; 8, 81-88; 9, 291-299; 10,
297-300 a].
DUNN,Peter W. : 4, 245-261.
EHLEN,0.: 10,320-322 r].
ELLIOTT, amesKeith: 8, 265-271.
ELLUL,Danielle: 10,329 [a].
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 327/330
9
333
NDEX
REBELL, Walter: 7, 243-247.
REY, Andre-Louis: 7,123-134.
ROESSLI, .-M.: 10,303-305 [r].
ROQUET,Gerard: 2, 181-215; 4, 83-
99.
ROUSSEL, ernard: 10,297-300 [a].
ROUSSELLE, line : 8, 25-44.
SCHMIDT,Francis: 1, 118-145.
SCOPELLO,Madeleine: 6, 203-234.
SIEGERT,Folker: 8,231-250.
SILVERSTEIN,Theodore: 10, 322-
324 [a].
STAROWlEYSKI,Marek: 5, 269-288;
7, 193-203.
STEIN,Markus: 10,307-309 [a].
STONE,Michael E. : 1,303-311.
STROUMSA,Gedaliahu G.: 2, 133-
153.
TARDlEu, Michel: 8, 9-23.
TCHKHIVADzE, Nestan: 8, 179-191.
TEIXIDOR, Javier: 1,269-277.
TEYSSEDRE, ernard: 1, 147-165.
TmERRY, Nicole: 2, 217-247; 7, 261-
272.
THOMAs, Christine M. : 3, 125-164.
ULLERN-WElTE, Isabelle: 6,235-278.
VAN DENHOEK, Annewies : 7,43-62.
VAN TONGERLOO,Alois: 10, 309-
314 [a].
VOICU, Sever J.: 2, 119-132; 9, 7-95.
WEHNERT, tirgen: 3, 211-235.
WITAKOWSKI, Witold: 6, 279-298.
WURST, Gregor: 10, 305-307 [a].
ZAMAGNI, C.: 10,297-300 [r]. 322-
324 [r].
MARIAux, Pierre-Alain: 7,293-300.
MARKSCHIES,Christoph: 9, 97-132.
MATrHEws, Christopher R. : 7, 135-
145.
McNAMARA, Martin: 6, 127-164.
MIMOUNI, Simon C.: 4, 101-112; 5,
211-248; 9, 301-304 [a].
NOREILI, Enrico: 2, 31-83; 8, 147-
164.
NUVOLONE, Flavio G.: 7, 81-108;
10,300-301 [r]. 307-309 [r].
OUTl1ER, Bernard: 4, 19-23; 6, 165-
m; 8,111-119; 9, 301-304 [r].
PAINCHAUD,Louis: 8, 45-69.
PAO, David W. : 6, 179-202.
PAlLAGEAN, Evelyne: 2, 155-163.
PAUPERT,Catherine: 4, 113-123; 5,
249-268; 7,249-251.
PERES, acques-Noel: 8, 89-96.
PERVO,Richard I. : 3, 47-68.
PETIT, Madeleine: 8, 273-286.
PETRAGLIO,Renzo : 8, 287-301.
PETTORELLI,Jean-Pierre: 10, 195-
296.
PICARD, Jean-Claude: 1,7-12.69-
117; 2, 11-16.
PIERRE,Marie-Joseph: 10, 139-176.
PIOVANELLI,Pierluigi: 4, 25-64.197-
224; 10,302-303 [r]. 317-320 [r].
PLiJMACHER,Eckhard: 3, 69-109.
POIRIER, Paul-Hubert: 7, 9-26; 9,
263-289.
POIROT,Eliane: 10,317-320 [a].
POUDERON,Bernard: 7,63-79.
RAssART-DEBERGH,Marguerite: 7,
253-259.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 328/330
334
10*NDEX
3.
Index selectifdes hemes,
dessourceset desnoms anciens
NOTE: Sauf exception, pour les noms des ouvrages anciens nous avons
adopte 'usage des epertoires suivants BibliothecaHagiographica Grae-
ca (BHG), Bibliotheca Hagiographica Latina (BHL), Clauis Apocrypho-
rum Noui Testamenti CANT), Clauis Apocryphorum VeterisTestamenti
(CA VT), C/auisPatrum Graecorum CPG). Le sigle NH designe es textes
de Nag Hammadi.
Cet ndex ne renvoie qu'a des notions qui ont ete traitees avecone cer-
taine ampleur dans Ie cadre d'« Apocrypha» (y compris les ouvrages
recenses), aissantde cote les simples mentions.
Un index ires detaille des citations d'ouvrages ancienscontenuesdans
les vol. 1-2 a ete publie dans e vol. 2 (1991),p. 261-285.
Apocalypsis Petri (CANT 317): 2,
34-62.228-231; 5, 7-111; 8, 147-
164.
ApocalypsisSedrach CANT 342)
7,81-108.
Apocalypsis septem caelorum: 4,
141-175.
ApocalypsisSinuthii: 4, 83-99.
Apocalypsis Thomae CANT 326):
4,125-139.
Apocalyptique et apocalypses: 1,
181-196.197-217; , 147-164.
Apocryphes -bibliographie: 1, 13-
67.
-definition et nomenclature: 1,7-
12; 3,17-46; 5, 189-210; 6, 235-
278; 7,167-191.225-234.
-production: 1, 197-217; 2,155-
163; 5, 119-136.165-188; 0,297-
300.
-reception: 7, 249-251. 93-300;8,
251-264;9, 157-177.
-recueils:1,69-117;6,7-65;9,97-
132.133-156;10,314-317.
-sources: 1, 279-302; 3, 69-109.
-transmission: 1,219-230; 2, 155-
163; 7, 109-122.
-dans I'art: 2, 177-180. 181-215.
217-247.249-259; 5, 249-268; 7,
253-259.261-272. 273-292.293-
300.301-303;10,327-329.
-dans la litterature: 5, 189-210.
269-288; 6, 93-126; 7,123-134.
Acta Andreae (CANT 225): 1,294-
298; 2, 99-117; 3, 41-43; 6, 179-
202.
Acta /ohannis (CANT 215) 1,298-
302; 3, 47-68; 8, 231-250.
-48-50 60-61 3, 69-109.
Acta Mari: 10,177-193.
Acta Pauli (CANT211): 1,291-294;
4,245-261;5,113-117.119-136;6,
299;8,207-224.
Acta Petri (CANT 190) 2, 73-75; 3,
125-164;7,135-145.
Acta Philippi (CANT 250): 3, 165-
209; 8, 251-264.
Acta Pilati : v. Euangelium Nicode-
mi.
Acta Thomae (CANT 245): 1,231-
247.269-277;7, 9-26; 8,231-250;
9,263-289.
Actes apocryphes des apotres: 1,
279-302; 4, 245-261; 8, 137-146.
Agrapha: 7, 43-62; 8, 265-271.
Anaphora Apostolorum : 8, 89-96.
Animaux qui parlent: 2, 199-200.
ApocalypsisEsdrae CANT 340) 7,
81-108.
ApocalypsisMariae (CANT327): 4,
101-112.
Apocalypsis Moysi (CAVT 135): 2,
189-190.
Apocalypsis Pauli (CANT 325): 2,
165-180;4, 25-64.65-82. 113-123.
147-149;8, 165-177;10,322-324.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 329/330
11*
335
NDEX
167-191; 9, 225-261; 10,56-73. 99-
138.317-320.
-duNouveau Testament: 3, 17-46.
-et liturgie : 8, 251-264.
Apocryphon Iohannis (NH) : 7, 243-
247.
Apotres -iconographie: 2, 256-259.
Arabe: 6, 79-92; 9, 16-18.
Arcane: 2,133-153.
Armenien: 1,303-311; 3, 237-257; 4,
263-293; 8, 97-110.111-119; 9, 18-
19.
Ascensio Isaiae (CANT 315) : 2, 193 ;
4, 197-224.
BARNABAS,pseudo-, Epistula (CPG
1050) : 7, 243-247.
Bible. A. T. Siracide: 8, 287-301.
-N.T.: 10,324-327.329.
-Actes des apotres: 8,207-224.
-Apocalypse: 8, 147-164.
-EvangiledeJean:3,47-68;7,243-
247
-20:7,235-241.
-EvangiledeLuc:6,67-77;8,137-
146.
, .
-EvangIles: 7, 43-62; 8, 265-271.
BmUANDER, Theodore: 6, 7-65.
Byzance et monde byzantin : 2, 155-
163.
Canon scripturaire: 4, 197-224; 7,
225-234; 8,147-164.
Cappadoce: 2, 217-247; 7, 261-272.
Christus patiens (CPG 3059): 5, 269-
288.
CLEMENTD ALEXANDRIE: 7, 27-41.
43-62.
CLEMENTDE ROME: 7, 63-79.
Copte: 2, 181-215; 4, 83-99; 6, 79-92;
8,81-88; 9, 291-299; 10, 305-307.
Dialogus Iesu cum paralytica
(CANT 85): 8, 111-119.
DoctrinaAddai (CANT 89): 1,231-
247.249-267; 8, 97-110.
Ecrits intertestamentaires : 1, 197-
217.219-230; 10,300-301.
Egypte: 2, 181-215; 4, 83-99; 6, 79-
92; 7,253-259.
Elchasai (CANT 322): 1, 167-179.
Encratisme: 3, 91-109.
Epistula Apostolorum (CANT 22) :
8, 89-96.
Eschatologie: 1, 147-165.181-196; 2,
165-180; 6, 93-126.
4 Esdrae (CA VT 180) : 2, 20-27; 4,
19-23.
5 Esdrae (CAVT 182): 2,17-30.
Esoterisme chretien: 2, 133-153.
Ethiopie et ethiopien: 4,197-224; 9,
19-23.
Euangelium arcanum secundum
Marcum (CANT 15): 7, 27-41;
10,7-15.
Euangelium infantiae arabice (CANT
58) : 4, 225-243.
Euangelium Nicodemi (Gesta Pila-
ti,. CANT 62): 2, 85-98; 4, 210-
212; 8, 81-88. 111-119. 121-136;
10, 320-322
-XVI, 7: 9, 291-299.
Euangelium Petri (CANT 13): 2, 71-
73; 3, 39-41; 8, 225-230.
Euangelium secundum Hebraeos
(CANT 11): 6, 67-77; 7, 243-247.
Euangelium Thomae (CANT 19) : 7,
9-26; 8, 193-205.
Euangelium Thomae de infantia
Saluatoris (CANT 57): 2, 119-
132; 9, 7-95.
Europe occidentale: 2, 165-180; 7,
293-300.
Exegesis animae (NH II, 6) : 8, 71-80.
FABRICIUS, Johann Albert: 1, 69-
117.
Femme: 1,279-302; 4, 245-261.
FLAVIUSCIEMENS: 7, 63-79.
Folklore: 4, 225-243; 8, 251-264.
Georgien: 6, 165-177; 8, 111-119.
179-191; 9, 23-24.
Gnosticisme: 8, 25-44; 10, 303-305.
Grec: 8, 225-230; 10,329.
HEGEMONIUS,Acta Archelai (CPG
3570) : 6, 203-234.
Henoch aethiopicus (1 Henoch;
CAVT 67): 2, 192.
HERMAs, Pastor (CPG 1052): 4,197-
224.
Historia et sapientia Ahiqar (CAVT
195) : 1, 269-277.
8/20/2019 Apocrypha 11, 2000
http://slidepdf.com/reader/full/apocrypha-11-2000 330/330
336
12*
NDEX
Historia infantiae Domini: v. Euan-
geliwn Thomaede nfantia Salua-
toris.
Homerocentra 7, 123-134.
Homilia Postulatis iliae Jerusalem
(BHL 483-485) 9, 179-223.
Indices Apostolorwn (BHG 15Om-
154; BHL652f-6541): 3,259-278.
Iohannis Euangelium apocryphum
arabice (CANT 44): 6,279-298.
lrlande et irian dais: 6, 156-159; 9,
27-28.
ltalien: 7,205-224.
JACQUES E VORAGINE, egenda
aurea: 5, 189-210; 7,167-191.
Jacques e Majeur, ap6tre: 7,193-
203.
Jean Chrysostome,Pseudo- 6, 165-
177.
Jerusalemet Palestine: 6,165-177;
9,157-177.
JesusChrist -descente aux enters
2, 224-228. 255-256; 6, 93-126.
-enfance: 2, 254-255.
-proces: 8, 9-23.
-vetements mortuaires : 10,56-73.
Joseph et Aseneth (CAVT 105): 4,
207-209.
Judalsmeantique-tardif: 1,197-217.
-babylonien:1,167-179.
-du Second Temple: 1,219-230.
JUSTIN ARTYR: ,43-62.
Kerygma Petri (CANT 208) 2, 63-
71; 4,177-195.
Latin: 3, 111-123.237-257.259-278;
4,113-123.141-175;7, 81-108; 9,
28-34. 179-223;10, 195-296. 07-
309.320-322.322-324.
Laudatio Philippi apostoli (BHG
1530b):3,165-209.
Libellus de exsequiis B. ~ Mariae
(CANT 130) 10,74-98.
Liber Bartholomaeide resurrectione
Iesu Christi (CANT 80): 7, 235-
241.
Liber de pueritia Saluatoris arme-
niace (CANT 59): 2, 233-234.
Liber Jubilaeorwn (CAVT 132): 2,
192.
Liber Requiei (CANT 154) : 10,74-
98.
Liber Thomae Athletae (NH II, 7) :
7,9-26.
Londres, British Library, Ms. Sloane
1411: 6, 7-65.
Mani et manicheens: 6,203-234; 8,
9-23; 9,263-289; 10,305-307. 307-
309.309-314.
Marie: 2, 250-254; 5, 249-268.
-apocalypses (CANT 327-330): 4,
101-112.
-dormition et assomption : 2, 221-
224; 6, 165-177; 9, 301-304; 10, 74-
98.99-138.
-vies: 5, 211-248.
Mastema: 2, 200-203.
Maurienne:5,249-268;10,327-329.
Midrash: 6, 156-159.
Miracula Jesu aethiopice (CANT
45) : 6, 279-298.
Monachisme : 4, 113-123.
Nag Hammadi : 8, 45-69.
Na atio Josephi (CANT76): 5, 165-
188.
Na atio Josephi de Arimathaea
georgice (CANT 77): 8,179-191.
NICEPHORECALLISTE: 7, 135-145.
Nubie: 2, 181-215.
Odae Salomonis (CAVT 205): 1,
231-247; 10, 139-176.324-327.
Dracula Sibyllina (CANT 319) : 10,
302-303
-V: 1, 147-165.
Oralite et ecriture: 2, 133-153; 3,
125-164.
ORIGENE, Contra Celsum (CPG
1476): 2, 133-153.
-De pascha (CPG 1480), 36-37: 5,
113-117; 6, 299.
Osrhoene: 1,231-247.
Paralipomena Jeremiae (CAVT
225) : 6, 79-92.
Parfums et bonne odeur: 4, 225-243.
Passio apostolorum Petri et Pauli
(Pseudo Marcellus; CANT 193) :
7,205-224.
Passio Jacobi Zebedaei (CANT
272) : 7, 193-203.