Quelle maîtrise environnementale pour un tourisme durable ?

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E.B.AZZAG, Quelle maîtrise environnementale pour un tourisme durable ? Colloque international, LGAT-USTHB & IUP Université Paris XII, Alger, les 17&18 novembre 2008

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Colloque international "Tourisme, secteur de l'économie de substitution et de développement durable"

LGAT-USTHB/IUP Université Paris XII, Alger les 17 & 18 novembre 2008

Quelle maîtrise environnementale pour un tourisme durable ?

Pr. Ewa Berezowska-Azzag, EPAU Alger Laboratoire de recherche VUDD

Résumé: Que ce soit le tourisme balnéaire, de montagnes ou saharien, le tourisme d'affaires, de découverte, d'aventure ou de détente, le tourisme patrimonial, urbain ou rural - tous participent, d'une part, au développement économique régional ou local par les ressources fiscales qu'ils produisent, les emplois qu'ils engendrent et l'essor des activités et de services, et au développement humain d'autre part, par le renforcement des échanges socioculturels, scientifiques, technologiques, par l'ouverture sur les autres, sur la nature et sur la connaissance de soi. Bénéfiques sur bien des aspects, toutes ces formes de tourisme peuvent cependant avoir aussi des effets hautement nuisibles quant elles intègrent des écosystèmes fragiles ou mènent à l'épuisement de ressources naturelles et à la multiplication des sources de pollution environnementale. Sur la balance de développement qui se veut durable, il faut alors savoir maintenir les deux plateaux " bénéfices socioéconomiques / pertes environnementales" en équilibre plus ou moins stable. Hier, c'était l'industrie qui était accusée d'être à l'origine de tous les maux environnementaux. Harcelée par les écologistes, contrainte par des outils juridiques et règlementaires, elle a fini cependant par prendre conscience des dangers qu'elle crée, adopter une démarche plus respectueuse de l'environnement et moins génératrice de risques, essentiellement grâce aux adaptations technologiques. Ce n'est malheureusement pas encore le cas pour le secteur touristique dans le monde, et en Algérie en particulier. Depuis que le tourisme est devenu, lui aussi, une véritable industrie, depuis qu'il attire des masses humaines en les dirigeant vers des pôles touristiques dont seule la rentabilité compte, une prise de conscience des effets néfastes éventuels d'une telle "occupation agressive" (même en ce qui concerne l'écotourisme) commence à prendre de l'essor – timidement cependant et sans disposer des outils de maîtrise efficace. En Algérie, les orientations de l'économie hors hydrocarbures misent sur un développement touristique tous azimuts, exploitant les richesses formidables, autant patrimoniales que humaines, que recèle le territoire algérien. Les ZEST en sont un exemple flagrant de l'insouciance environnementale, mais aussi certaines décisions d'implantation des grands équipements supports des activités touristiques, que ce soit dans les grandes villes ou dans les sites naturels. En s'appuyant sur une expérience tchèque d'une vision planificatrice d'un tourisme durable dans la région de Liberec, nous tenterons de montrer comment, avec quels outils et en employant quelles méthodes on pourrait efficacement introduire les préoccupations de durabilité de développement dans les outils de planification spatiale sans compromettre les objectifs d'attractivité et de compétitivité. Mots clés: tourisme durable – développement socioéconomique - capacité de charge démographique – planification environnementale – indicateurs de seuils d'absorption

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1. Tourisme, facteur de développement ? Le tourisme est, de manière indéniable, un facteur de développement. Les recherches démontrent qu'il est d'abord un moteur socioculturel puissant, en ouvrant les frontières, renforçant les échanges, rapprochant les peuples, en montrant les acquis civilisationnels qui ont contribué au développement de l'humanité et en faisant connaître les merveilles de la nature. 1 L'OMT par contre le considère comme un véritable moteur socio-économique – les recettes de tourisme international corrigées de l'inflation progressent depuis 1950 à un rythme moyen de plus de 11% par an. Le nombre des arrivées internationales est passé de 25 millions en 1950 à 808 millions en 2005 et l'expérience montre que les échanges touristiques bénéficient par priorité aux pays du Sud. 2 Cette dynamique continuera à se renforcer. La forte croissance du tourisme mondial constatée au premier semestre du 2007 le confirme: tandis que l'Europe enregistre un taux de croissance de 8%, l'Asie dépasse 12%, l'Amérique du Sud 9% et l'Afrique 8%. Figure 1. Evolution de la croissance du tourisme Figure 2.Croissance du tourisme et dans le monde, 1950-2020 recettes en Afrique, 1990-2005

Source: "Nouvelles OMT", n°3/2006 M.Frangialli affirme que "la reconnaissance grandissante de la contribution du tourisme à la croissance économique et à la création d'emplois signifie que les gouvernements nationaux, tout spécialement ceux des pays en voie de développement, lui accordent de plus en plus d'attention. L'augmentation des investissements dans l'infrastructure, le marketing et la promotion, le développement des marchés intérieurs, la libéralisation du transport aérien, les progrès de la coopération interrégionale et la multiplication des partenariats public-privé sont des facteurs clés qui contribuent à l'expansion de l'activité touristique."3

1 On peut citer ici les circuits culturels de la peinture, de musique ou du cinéma, les circuits gastronomiques, les boucles archéologiques, écologiques, les circuits des événements sportifs, et bien d'autres. 2 Le rythme de croissance annuelle des arrivées de touristes dans les pays en développement a été supérieur durant la décennie 1995-2005 à la moyenne mondiale et comptait 326 millions, selon l'OMT (www.unwto.org). 3 "Forte croissance du tourisme mondial en 2007", OMT, Madrid 29 juin 2007

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Bien redistribuées, les recettes du tourisme aident en général à restaurer des monuments historiques, à ouvrir des musés, créer des parcs naturels, renforcer l'agriculture et l'artisanat local ou développer les infrastructures et les équipements bénéfiques pour l'ensemble de la population. Mais si cette redistribution se voit contrôlée et planifiée dans les économies basées sur le tourisme, elle l'est rarement dans les économies basées sur des recettes d'hydrocarbures, où l'on assiste souvent à un véritable pillage du patrimoine en absence d'une stratégie de valorisation et sous prétexte de développement de l'économie de substitution. Ainsi, bien que créateur d'emploi et de richesse, le tourisme ne contribue cependant pas toujours à la protection du patrimoine culturel et de l'environnement, contrairement à ce qu'affirme l'OMT4. Bien des sites sur-fréquentés subissent des dégradations qui menacent non seulement leur intégrité physique, mais aussi leur avenir en tant que site touristique ou patrimoine classé5. La croissance devient donc un véritable défi de l'avenir pour les sites qui sont appelés à recevoir les flux, que ce soit dans les pays développés ou en voie de développement, qu'ils soient les récepteurs du tourisme urbain ou rural, du tourisme de découverte, d'échanges scientifiques et technologiques, d'affaires, de spectacle, de sport et de loisirs, etc., parce que l'accroissement de la demande touristique va se traduire aussi par l'accroissement de la consommation des ressources naturelles, des nuisances et pollutions dans les pays qui souffrent déjà du stress hydrique, de la désertification, de la mauvaise gestion des déchets, etc. Si l'on veut parler du développement durable du tourisme, c'est-à-dire d'un développement respectueux des milieux socioculturels et naturels, le déséquilibre environnemental causé par la croissance de la demande en ressources face à l'insuffisance de l'offre risque de se traduire non seulement par les guerres économiques pour la survie du secteur, mais par un déséquilibre des cycles biologiques et des écosystèmes qui supportent l'activité touristique. Tous les avantages reconnus du tourisme peuvent ainsi être annihilés. Cette préoccupation constitue d'ailleurs l'un des défis majeurs parmi ceux formulés par l'OMT lors de la session du Conseil Exécutif de l'OMT à Quito en juin 2007, qui met l'accent sur les 10 points suivants:

* meilleure appréciation à l'avenir de l'importance économique du tourisme dans les pays en voie de développement (réduction de la pauvreté)

* réduction au minimum de l'encombrement des sites et de l'infrastructure par les flux touristiques ("… de même que le paysage du transport aérien international est bouleversé par l'encombrement du ciel et des installations portuaires, le milieu naturel et les communautés d'accueil souffrent de la mise en valeur anarchique de certains espaces ou de l'exploitation débridée de certaines destinations"6)

4 "Nouvelles OMT", Revue de l'Organisation Mondiale du Tourisme, Année XX, n°3/2006, page 4 5 Nous pouvons rappeler ici les problèmes de la protection des sites archéologiques égyptiens, problèmes du Tassili de Hoggar ou de la grotte de Lascaux en France fermée en raison de la dégradation des peintures rupestres, de la fermeture des circuits touristiques de randonnée des lacs dans les montagnes de Tatry en Pologne (Morskie Oko) en raison de la pollution généralisée et d'érosion de la roche, de la disparition des espèces terrestres et marines dans les Iles de Galápagos ou encore de la cité de Venise ou de Florence, menacée par la pollution générée par les flux touristiques démesurés, le Mont Blanc où le glacier est jauni par l'urine, l'Everest qui devient un dépotoir avec près de 700.000 visiteurs/an, le Machu Picchu où l'afflux de plus de 2500 touristes par jour provoque la déforestation, l'érosion du sol et des glissements de terrains. ("La planète malade du tourisme" L'Express du 26/7/2007, pages 44-47). 6 "Tourisme, la voie à suivre", Nouvelles OMT, Année XX, n°3/2006, page 6-7

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* libéralisation des échanges de services dans le respect du développement durable * prise en compte de l'impact environnemental, culturel et social du tourisme (les

excès de la libéralisation des échanges conduisent souvent "… à la détérioration irréversible des sites, la surexploitation des ressources naturelles, le recul de la biodiversité, la dégradation des monuments historiques, la précarité de l'emploi saisonnier, etc."7)

* renforcement de l'entente entre les peuples * réduction des inégalités d'accès aux NTIC * intensification de la lutte contre la pauvreté * partenariat équilibré entre les secteurs public et privé * développement des capacités d'intervention en cas d'urgence (sanitaire, climatique,

etc.) * adaptation constante aux mutations (économiques, climatiques, politiques, etc.),

notamment aux changements climatiques qui augmentent la menace par l'élévation du niveau des mers, la progression de la désertification et la multiplication des catastrophes naturelles (séismes, inondations, tsunamis, cyclones, etc.)8

La prise de conscience des dangers que peut induire le développement excessif et non maîtrisé du tourisme est donc effective au niveau mondial. Qu'en est-il en Algérie ? 2. Quelle voie pour l'Algérie ? Accrochée jusqu'à présent à une économie de la rente des hydrocarbures, l'Algérie passe dernièrement à une vitesse supérieure en ce qui concerne la politique de développement touristique. Adoptée en mars 2006, cette politique s'appuie sur trois axes majeurs:

* amélioration de la qualité de l'offre du produit touristique * durabilité et préservation des richesses et des espaces * concertation et coopération avec l'ensemble des partenaires et acteurs du tourisme

L'Algérie dispose des atouts touristiques riches et diversifiés: un territoire qui englobe trois climats radicalement différents (méditerranéen, steppique et désertique), des potentialités naturelles, culturelles, cultuelles, historiques, thermales, urbanistiques. Mais, face à ces atouts, une capacité d'offre insuffisante (seulement un peu plus de 1000 hôtels avec environ 82.000 lits et 755 agences de tourisme et de voyages) fait porter la politique des investissements sur les 172 ZET réglementées, qui couvrent non seulement le littoral, mais aussi l'intérieur du pays. 9

Les objectifs visés par la stratégie d'aménagement du territoire en matière de tourisme 10sont liés à la consolidation des indicateurs de la croissance du tourisme, une croissance économique induite par des investissements nouveaux (138.000 lits supplémentaires à

7 Idem 8 Après la Déclaration de Djerba (Tunisie) en 2003 lors de la Conférence Internationale sur le changement climatique et le tourisme, en 2007 trois manifestations importantes sont prévues: Sommet du PNUE à Davos, conférence des ministres du tourisme à Londres et enfin Assemblée générale de l'OMT à Cartagena (Colombie), qui doivent consacrer les objectifs du Millénaire pour le Développement en 2015. 9 Actes du Séminaire international "Gestion des destinations touristiques, la voie de la réussite", MT, Alger, décembre 2006 10 Un Schéma National d'Aménagement Touristique à l'horizon 2015 est actuellement en cours d'élaboration au MT (MATET) conformément à la loi n°01.20 (2001) relative à l'aménagement et développement durable du territoire et à la loi n°03.01 (2003) relative au développement durable du tourisme.

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l'horizon 2015) et un accroissement des flux touristiques pour atteindre 4 millions de touristes en 2015. 11 La loi n°03.01 relative au développement durable du tourisme, complétée ensuite par la loi n°03.10 relative à la protection de l'environnement répondent effectivement aux défis formulés par l'OMT quant à la nécessité de la prise en charge des problématiques environnementales dans toute action de développement touristique, les outils d'application (décrets exécutifs) n'existent toujours pas et les écarts entre les volontés politiques de mettre en place une dynamique de développement et la réalité de l'environnement se creusent. En effet, les ressources naturelles sont en situation de dangereux épuisement. Les sols urbanisables s'amenuisent et se concentrent sur des régions soumises aux risques majeurs naturels, la capacité de mobilisation de l'eau n'arrive pas à suivre la demande malgré des investissements considérables (barrages, forages, transferts, stations de dessalement, etc.), l'énergie est fournie essentiellement par des ressources fossiles non renouvelables, la gestion des déchets est rudimentaire malgré les efforts de régularisation et de réalisation des plusieurs CET et la pollution du sol et sous-sol, de l'air et de l'eau atteint des niveaux alarmants. L'urbanisation accélérée et mal contrôlée porte atteinte non seulement aux terres agricoles, mais aussi aux écosystèmes fragiles et à la biodiversité. Si l'on veut voir la situation de plus près, plusieurs constats s'imposent. Sur les plateaux de la balance environnementale on peut recenser du coté des potentialités et atouts12:

* 10 parcs nationaux (Chréa, Djurdjura, Gouraya, Taza, El Kala, Beni Salah, Babor, Mergueb, Tassili, Ahaggar, Belezma, Theniet El Had, Tlemcen et Macta), dont 4 sont classés réserve naturelle, avec un patrimoine paysager et une biodiversité extraordinaires;

* 5 zones de développement durable ZDD (parcelles pilotes d'aménagement: aquarium de Brablia à El Tarf, site de Murdjadjo à Oran, Palmeraie de Tiout à Naâma, foret de Senalba à Djelfa, aire de l'Arguier à Tindouf)13;

* 254 zones humides, dont 42 inscrites sur la liste Ramsar; * 4 réserves de chasse (Djelfa, Mascara, Tlemcen et Zeralda) avec au total 42.200 ha; * 202 sources thermales, dont 9 seulement sont spécialisées en thalassothérapie; * 130 sites naturels ou urbains préhistoriques (Oum El Bouaghi), antiques ou

médiévaux remarquables, dont 5 classés patrimoine mondial par l'UNESCO (Timgad, Tassili, Tipaza, Djamila, Qualaa de Beni Hammad et Vallée du M'Zab);

* 14 centres urbains historiques vivants (ksours, médinas); * plus de 400 sites et monuments historiques ; * 4 métropoles à vocation internationale pouvant, théoriquement, accueillir des

manifestations scientifiques, économiques, sportives, culturelles et cultuelles majeures;

* 6 villes moyennes pouvant participer à la formation des pôles de compétitivité POC * réseau de plus de 300 villes petites et moyennes pouvant constituer un support

potentiel d'un écotourisme futur;

11 A. Bouchdjira, in "Tourisme urbain, facteur de promotion de la ville", Actes du Séminaire National, Alger, 17&18 avril 2006, pages 40-41 12 Toutes les données de ce chapitre proviennent des sources suivantes: "Rapport sur l'état et l'avenir de l'environnement", MATE, Alger 2005; "Stratégie algérienne et plan d'action national d'utilisation durable de la biodiversité", FEM/PNUD, MATE, Alger 2004; "SNAT 2025", Rapport provisoire, MATE Alger, décembre 2006 et "Atlas de l'environnement de l'Algérie", Symbiose / Burlington Resources, Alger 2002 13 Rapport MATE 2005, page 422

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* réseau de télécommunication et d'information en développement; * bassin de la main d'œuvre considérable, mais peu formé.

En dépit de toutes ces potentialités, le littoral reste en Algérie la destination principale des touristes nationaux et, malgré l'existence de l'offre assez intéressante financièrement, la part du tourisme étranger demeure insignifiante: l'Algérie a été choisie comme destination balnéaire par seulement 1,2% des touristes du bassin méditerranéen durant la période 2000-2005 (0,77% en 1990). En revanche le nombre des visiteurs sur les plages est passé de 8 millions en 1988 à 160 millions en 200214, alors que la capacité d'accueil ne cesse de diminuer pour cause de fermeture des sites en raison de la pollution des eaux de baignade. Si le potentiel est énorme et diversifié, il reste fragile et mal exploité. De l'autre coté de la balance, les faibles performances environnementales pèsent lourd sur le plateau des menaces et faiblesses:

* l'Algérie produit annuellement plus de 7.000.000 tonnes des déchets urbains (14 millions de m3), et en moyenne 0,65kg/personne/jour des déchets domestiques, avec un taux de recyclage très faible (12%) et une totale insuffisance de leurs gestion (notamment pour ce qui est des déchets industriels et spéciaux);

* sur 47 stations d'épuration, 5 seulement sont opérationnelles, 22 font objet de réhabilitation et 11 sont en cours de réalisation. Selon les dernières estimations, environ 100 millions de m3/an d'eaux usées sont rejetées dans la nature;

* ceci explique en partie un taux élevé de pollution majeure des cotes et des eaux marines, aggravé par les rejets des métaux lourds et des hydrocarbures, pollution des nappes phréatiques (nitrates), phénomène d'érosion avec 7 à 8 ha quotidiennement détournés de la vocation agricole et un taux d'érosion le plus important de l'Afrique du Nord, de 2.000 tonnes/km2/an;

* en 2020, les disponibilités en eau seraient de l'ordre de 430 m3/hab/an, ce qui témoigne d'un risque de stress hydrique (le seuil de 1000m3/habitant/an est considéré comme seuil vital par l'OMS), si la réserve de mobilisation actuelle d'environ 5 milliards de m3/an ne va pas atteindre à terme 20 milliards m3/an;

* 20 million d'hectares sont touchés par la désertification (zones arides et semi-arides) et 12 millions d'ha par l'érosion hydrique;

* le littoral, qui offrait en 1966 un ratio de 3128 m2/1000 habitants de zone balnéaire, n'en offre en 1997 que 338 m2/1000 habitants, et chaque année, sur plus de 500 plages contrôlées 35 à 40% sont interdites à la baignade pour cause de pollution;

* la sécheresse et la désertification contribuent de plus à augmenter les risques d'inondation et de glissement de terrain; par ailleurs le risque sismique et industriel sont omniprésents sur la partie littorale, le principal réservoir des potentialités touristiques balnéaires, de montagne, culturelles et cultuelles.

Ce tableau de la situation environnementale, peu reluisant et qui témoigne des insuffisances de portage des besoins de la population locale, reste en total désaccord avec les objectifs de croissance du tourisme affichés par les politiques en cours d'élaboration. A notre connaissance, aucune vérification des capacités réelles d'accueil touristique des sites n'a été jusqu'à présent effectuée. Or, il est urgent d'élaborer non seulement un schéma d'aménagement touristique, mais une véritable stratégie nationale de développement du tourisme, qui prendrai en compte la balance entre ce que l'on veut faire pour passer à un stade de croissance économique libérée de la rente par le développement du tourisme, et ce que l'on peut réellement faire sans enclencher les mécanismes de destruction environnementale et patrimoniale.

14 Idem, page 106

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Il s'agirait de vérifier en fait une capacité de charge touristique CCT, qui ne se mesure pas en terme des investissements pour le nombre de lits à réaliser, mais par la capacité des sites à supporter ces investissements et les flux qu'ils vont engendrer. On parle ainsi de seuils limites du développement touristique, qui peuvent concerner aussi bien des sites urbains que naturels. 3. Notion de capacité de charge touristique Dans le centre historique de Venise dans les années 80, la moyenne quotidienne théorique des visiteurs était évaluée à 11.000 personnes. Elle s'élevait pourtant à près de 38 à 80.000 durant la saison, ce qui constituait 100.000 personnes au total avec la population résidente. Si les places d'hébergement semblaient suffire, des seuils critiques de tolérance de 40.000 visiteurs pour le transport sur les canaux, de 30.000 pour la capacité d'assainissement, 30.000 pour le stationnement ou encore 15.000 pour la visite non dommageable de la basilique St. Marc ont été constatés15. La capacité de charge a donc été fixée par les professionnels à 25.000 visiteurs/jour, alors que les responsables du site l'on haussée à 100.000, seuil à partir duquel la décision de fermeture du pont d'accès devait être prise. En fin de compte, une détérioration de l'environnement, une difficultés d'accessibilité, u affaiblissement de la base économique locale basée sur une monoculture touristique, une désurbanisation et une dépopulation ont été les effets directs de cette ruée touristique sur un site considéré comme remarquable. La notion de capacité de charge des sites a été alors développée. Elle se basait essentiellement sur les moyens techniques et économiques de réception des flux et sur les impacts directs constatés sur les sites (dommages architecturaux, sociaux). Depuis les années 80, cette notion a énormément évolué avec l'avènement de la démarche du développement durable pour le triptyque économie/société/environnement et l'apparition de la notion de capacité de charge environnementale. Car, si des mesures d'ordre technique ou organisationnel pouvaient être prises pour réguler les flux dans les limites admises (zonage spatial, étalement des flux dans l'année, limitation des flux entrants, mesures fiscales spécifiques, etc.), ou des mesures d'ordre technologique pour améliorer les performances de services (augmentation des capacités d'assainissement ou de transport et stationnement), les limites d'absorptivité environnementale ne sont malheureusement pas extensibles. L'approvisionnement en eau, l'absorption des déchets solides et liquides, degré de pollution, et de nuisances, exposition aux risques naturels dépendent peu de la volonté politique du moment, mais plutôt des capacités de charge environnementale locale calculée au terme de la période de prévision considérée, selon les caractéristiques du milieu naturel (désertique, steppique, montagnard, balnéaire, etc.) et en fonction de la situation géo climatique et socioculturelle locale.

15 Revue "Urbanisme", n°295, juillet 1997, page 51

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Figure 3. Cercle vicieux de la croissance touristique

Figure 4. Conditions d'équilibre entre la valorisation touristique et la conservation environnementale

Source: E.B.Azzag

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Le tourisme crée donc des pressions sur l'environnement naturel et social, les modèles culturels, les ressources, les structures sociales, les activités économiques, l'utilisation des sols dans les communautés locales. La question de développement touristique devient donc l'une de questions-clés dans la stratégie de développement durable des territoires. Savoir déterminer la capacité des systèmes locaux à soutenir le tourisme est alors primordial. Selon la définition du triptyque de l'écosystème (qu'il soit naturel ou anthropique), trois composantes entrent en interaction dans l'évaluation de sa durabilité:

* la dimension environnementale (physico-écologique) * la dimension sociodémographique * la dimension politico-économique

Pour évaluer la CCT, chacune de ces composantes peut être dotée d'une pondération en fonction16 :

* des particularités de la région (fragilité des écosystèmes naturels, nombre de population, structure démographique, économique et sociale locale, culture, patrimoine, organisation sociétale, etc., qui déterminent sa résistance aux pressions et aux impacts du tourisme)

* des types de tourisme concerné (qui déterminent les besoins, attentes et comportements des touristes: motifs de visite, mode de mobilité et de transport, fréquence et durée du séjour, type d'activités touristiques, etc.)

* de la relation tourisme / environnement (forme d'aménagement touristique, systèmes d'organisation et de gestion locaux, technologies de construction, d'exploitation des ressources naturelles (eau, énergie), d'assainissement (évacuation, tri, stockage, recyclage)

Selon les chercheurs, la CCT peut être évaluée aussi bien pour des sites urbains que ruraux, pour des zones côtières, montagnardes ou désertiques. Elle est particulièrement valable et souhaitée dans les zones d'intérêt environnemental spécial (parcs naturels, zones protégées, zones pilotes de développement durable, etc.). La démarche de développement du tourisme durable est basée sur l'enchaînement de quatre étapes:

A. Evaluation du mode de fonctionnement du système étudié, notamment de: * contraintes (facteurs de limitation non flexibles à terme) * bouchons (facteurs qui peuvent être manipulés par les gestionnaires, techniciens) * impacts (éléments du système touchés par les activités touristiques, le type d'impact déterminant le type de capacité socioculturelle, environnementale, politico-économique)

B. Stratégie à adopter et niveaux d'impacts acceptables (concertation, négociation) C. Plan d'Action à intégrer dans les instruments de planification locale (économique et

spatiale, régionale ou locale) D. Monitoring (estimation de l'évolution et suivi)

16 Rapport "Définir, mesurer et évaluer la CC dans les destinations touristiques européennes", Laboratoire de Planification Environnementale, Université de l'Egée, Athènes 2001

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Figure 5. Intégration de la notion de la CCT dans les instruments de planification touristique

Source: Rapport LPE, Athènes 2001 Cette démarche se sert d'un set d'indicateurs de capacité de charge 17 par composante:

17 Par exemple un indicateur global de fréquentation spatiale touristique IFST a été conçu pour mesurer les seuils de saturation territoriale des périmètres restreints (par exemple les îles, les sites fermés). Lozato-Giotart J.P. (2001) en cite la liste pour les îles (en nombre de touristes/km2 en 2000): Malte 3.800, Majorque 3.700, Djerba 1.800, Corfou 1.000, Corse 190, Crète 150, Sicile 105 – on observe donc des très gros écarts qui témoignent de réserves de capacité de charge territoriale, mais qui doit être confrontée aux capacités de charge environnementale.

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Figure 6. Quelques exemples d'indicateurs de seuils

Type de la CCT

Domaine de l'écosystème

Quelques Indicateurs d'état Quelques Indicateurs de capacité de charge

Capacité de Charge Sociale CCS

Domaine socioculturel

* Nombre de touristes vs nombre d'habitants * Structure sociale et démographique locale vs celle des visiteurs * Organisation sociétale locale * Type de tourisme vs développement culturel et traditions locales * Niveau de développement des systèmes de communication et d'information NTIC

* Nombre de touristes et activités touristiques capables de s'absorber sans dommages sociaux et culturels réciproques * Niveau d'encombrement des équipements et infrastructures locales * Niveau des capacités de gestion et d'organisation sociétale locale

Capacité de Charge Economique CCEco

Domaine politico-économique

* Niveau de spécialisation économique locale * Niveau des revenus global vs revenus de tourisme * Niveau d'emploi et structure d'emploi local * Niveau d'organisation économique locale * Niveau du PIB

* Niveau de spécialisation en services de tourisme * Perte de main d'œuvre dans certains secteurs au profit du tourisme * Niveau d'emploi dans le tourisme vs ressources humaines totales * Rentabilité des investissements d'amélioration de l'offre

Domaine environnemental naturel

* Qualité de l'air, du paysage, de faune et de flore locale * Offre disponible en ressources naturelles * Niveau d'intégration des énergies renouvelables * Niveau d'efficacité du système d'assainissement

* Niveau acceptable de pollutions (atmosphérique, hydrique) * Disponibilité des ressources naturelles (eau, énergie, sol, végétation) vs demande touristique * Perte acceptable des ressources naturelles sans dommage pour l'écosystème * Niveau acceptable de mutations paysagères * Niveau d'absorptivité des déchets solides et liquides sans dommages pour l'écosystème

Capacité de Charge Environnementale CCEnv

Domaine environnemental anthropique

* Densité d'usage du sol * Densité et répartition spatiale des flux * Disponibilité des équipements et services * Offre de logements vs offre d'hébergement touristique * Relations fonctionnelles et attractivité des sites

* Niveau acceptable d'encombrement territorial * Intensité d'usage de l'infrastructure de transport * Niveau d'encombrement des équipements et infrastructures locales * Niveau de saturation d'hébergement

Source: LPE Athènes 2001 & Postolka V. 2005 La CCT globale est obtenue par analyse matricielle de croisement des trois types de CC, avec pondération selon l'importance accordée à la composante par les acteurs concernés et en utilisant la méthode AMC.

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Comme la CCT se sert des indicateurs de capacité, elle ne peut être évaluée qu'en confrontant les valeurs d'état avec des valeurs standards:

* soit standards normatifs théoriques, quand ils sont disponibles * soit standards comparatifs obtenus par benchmarking sur un éventail des cas

compatibles locaux ou internationaux, où on obtient une valeur d'expérience moyenne admissible18.

La CCT n'aboutit pas à un seuil limite unique (par exemple nombre des visiteurs autorisé), mais exprime une fourchette d'admissibilité qui, de plus, n'est pas fixe et évolue dans le temps. Elle dépend pour beaucoup des techniques et technologies d'aménagement, de la qualité de la gestion locale et de la qualité de gouvernance territoriale, notamment en terme de réactivité aux situations critiques. "Fixer les limites de capacité en terme de soutien de l'activité touristique dans un endroit suppose une vision de développement local, ainsi que des décisions sur la gestion touristique qui doivent être prises en charge par des instruments de planification locale"19 . La Capacité de Charge Touristique CCT exprime le niveau du tourisme acceptable (nombre de touristes / unité de temps ou de densité), défini par l'analyse des facteurs-clés identifiés dans le territoire concerné (ressources naturelles, espaces protégés, modèles culturels et sociaux, traditions, patrimoine culturel et naturel, etc.) L'étude de la stratégie d'aménagement de la région de Liberec en Tchéquie en 2002, élaborée en collaboration avec l'Université Technique de Liberec et prévue à l'horizon 2015, constitue un exemple intéressant de l'évaluation de la CCT pour les besoins d'une politique de développement touristique20. Il s'agit d'un territoire de 3.163 km2, situé sur la frontière avec la Pologne, composé de 4 communes totalisant 430.000 habitants en 2001 avec la densité résidentielle moyenne de 135 habitants/km2, comprenant 216 localités, toutes touristiques, dont 36 avec le statut de ville moyenne. La principale ville de Liberec est située à environ 95 km de Prague. Riche en potentialités, cette région développe plusieurs formes de tourisme: de sport et loisirs, de montagne, l'éco-tourisme, le tourisme thermal, le tourisme de découverte culturel et cultuel et le tourisme urbain. En 2001, au total 110.000 touristes étrangers/jour21 ont visité les 4 communes de la région, ce qui constitue un charge moyenne d'environ 1 visiteur / 4 habitants. Mais, en période de pointe, la population régionale atteint le double et parfois le triple de la population résidente, ce qui pose surtout les problèmes d'hébergement. Lors de l'élaboration d'une stratégie de développement touristique, principale source des revenus de la région, les investissements ont donc été orientés essentiellement sur l'augmentation de la capacité d'accueil – mais, suite aux concertations intersectorielles et dans le cadre de la démarche de développement durable, une étude des capacités de charge à terme à été commandée à l'Université de Liberec, pour déterminer les seuils limites de durabilité et orienter ainsi les investissements de transport, de stationnement et des services, mais aussi identifier les capacités d'approvisionnement en énergie, en eau et celles d'assainissement.

18 V.Postolka, "Prpblems, Possibilities and Valuation Examples of Lanscape Burdens", Technical University of Liberec, actes du Colloque International "Aspects of equilibrium. Architecture, urban design and planning at threshold of the international decade of education for the sustainable development", Wroclaw 23-25 juin 2005 19 Rapport Athènes 2001, page 16 20 Etude de stratégie d'aménagement touristique de la région de Liberec en Tchéquie, Brno 2002 & Technical University of Liberec, SAUL Liberec 2003 21 Statistiques du tourisme, www.czso.cz Selon les données, pour la même année la seule commune de Prague a reçu plus de 84.000 de visiteurs étrangers.

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Figure 7. Région de Liberec - Carte de la densité d'occupation du sol et couloirs de développement touristique (SAUL, UT Liberec, 2003)

Figure 8. Région de Liberec - Capacité de charge territoriale vs pression touristique (Postolka V., 2005)

4971x7255657750- % others visitors

940021400- 1300128001330025000530085900One-day users (Var. A)

4070197244568640- on 100 perm.living

1128887233109189177118- on 100 temporary liv.

52,846,946,670,052,165,463,954,1- % carr.capacity

1900030000354001770024400387006900172100Others visitors / users

11,320,123,98,014,718,63,4100- % of total capacity

212188187333210290277218- % temporary living

5583347960679155- % total users

7514941103848613574- % permanent living

36000640007600025300468005920010800318100Carrying capacity, pers.

1,81,22,91,31,61,41,11,8- pressure i n d e x

3,32,45,81,42,12,31,32,9- total users / ha

1,82,02,01,11,31,61,21,6- limit persons / ha

9,816,219,411,418,719,74,7100- % of total lands

54,068,174,266,761,055,160,062,7- % of total area

196,3322,3384,2225,6369,7391,392,81982,2Lands for tourism, sqkm

363,5473,3517,9338,2606,1710,2154,63163Area, sqkm

649627681622403732059777408901711916576555Total users of area

169983394540622757822336203683888145735Temporary living

47964428711834152448155412686498028430820Permanent living, 2001

CRJKRPJIHFRYLH-JHMAKCSTALL

4971x7255657750- % others visitors

940021400- 1300128001330025000530085900One-day users (Var. A)

4070197244568640- on 100 perm.living

1128887233109189177118- on 100 temporary liv.

52,846,946,670,052,165,463,954,1- % carr.capacity

1900030000354001770024400387006900172100Others visitors / users

11,320,123,98,014,718,63,4100- % of total capacity

212188187333210290277218- % temporary living

5583347960679155- % total users

7514941103848613574- % permanent living

36000640007600025300468005920010800318100Carrying capacity, pers.

1,81,22,91,31,61,41,11,8- pressure i n d e x

3,32,45,81,42,12,31,32,9- total users / ha

1,82,02,01,11,31,61,21,6- limit persons / ha

9,816,219,411,418,719,74,7100- % of total lands

54,068,174,266,761,055,160,062,7- % of total area

196,3322,3384,2225,6369,7391,392,81982,2Lands for tourism, sqkm

363,5473,3517,9338,2606,1710,2154,63163Area, sqkm

649627681622403732059777408901711916576555Total users of area

169983394540622757822336203683888145735Temporary living

47964428711834152448155412686498028430820Permanent living, 2001

CRJKRPJIHFRYLH-JHMAKCSTALL

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Figure 9. Région de Liberec – Indice de saturation territoriale et paramètres de transfert des flux (Postolka V., 2005)

+112445001,8337620581318LH-JHHamr na J. - Osečná

-120250001,8620231243078CRJMalá Skála - Fýdštejn

+472694002,5467428201854CRJTroskovice - Hrubá Skála

-3334120002,41533497395595MAKS: Doksy - Staré Splavy

+ 90371002,2619746641533KRPBenecko - Vítkovice

+ 67575002,5682550681757KRPHarrachov

+ 38377002,2731759351382JIHBedřichov - Janov n.N.

x77002,2xxxLH-JHLiberec - Ještěd

+359690002,0540443761028JIHKořenov - Jizerka

- 715110002,41171580713644KRPW: Rokytnice - Paseky n.J.

Saldopers

CaCapers

Persha

Totalusers

TempLiv

PermLiv

TurReg

Tourism area / municipalitiesPrevailing season

+112445001,8337620581318LH-JHHamr na J. - Osečná

-120250001,8620231243078CRJMalá Skála - Fýdštejn

+472694002,5467428201854CRJTroskovice - Hrubá Skála

-3334120002,41533497395595MAKS: Doksy - Staré Splavy

+ 90371002,2619746641533KRPBenecko - Vítkovice

+ 67575002,5682550681757KRPHarrachov

+ 38377002,2731759351382JIHBedřichov - Janov n.N.

x77002,2xxxLH-JHLiberec - Ještěd

+359690002,0540443761028JIHKořenov - Jizerka

- 715110002,41171580713644KRPW: Rokytnice - Paseky n.J.

Saldopers

CaCapers

Persha

Totalusers

TempLiv

PermLiv

TurReg

Tourism area / municipalitiesPrevailing season

L'étude a révélé un indice limite de capacité d'accueil de 1,6 personnes/ha, alors que l'indice de l'état d'usage est de 2,9 personnes/ha. Le territoire peut ainsi supporter 318.100 personnes quotidiennement, alors qu'il est obligé d'accueillir plus de 576.500 personnes entre les habitants et les visiteurs. Parmi les municipalités touristiques principales, trois ont été identifiées qui accusent un déficit majeur de la capacité de charge touristique (c'est-à-dire dans les périmètres d'occupation touristique) de l'ordre allant de 700 à 3.300 personnes par jour. Plusieurs types de mesures ont été alors adoptées dans le Plan d'Action pour le développement du tourisme durable. Il s'agit aussi bien des actions restrictives (zonage précis avec des mesures réglementaires de protection et de restriction, limitation d'accès libre par péage, limitation de certaines activités, dispersion des flux par un système de réservation et d'orientation numérisé SIG, taxes touristiques élevées et différenciées par site, taxes de stationnement, limitation de la densité d'usage du sol, restrictions d'usage de l'eau22 et de l'énergie, etc.), que des actions proactives (incitation au développement des énergies renouvelables, soutien de l'Etat au labels écologiques des établissements touristiques afin de limiter la consommation des ressources et la production des déchets, aménagements spécifiques, incitation à la réduction de la mobilité mécanique et développement des moyens de transport écologique, etc.). Mais la mesure la plus intéressante est à notre avis celle de transfert des flux des localités avec un déficit de capacité de charge vers celles avec un surplus, afin de maintenir un certain équilibre d'exploitation des ressources naturelles et des équipements et infrastructures, sans toutefois limiter le développement du tourisme, moteur de croissance économique locale. Ce transfert s'effectue selon le principe de covalence territoriale et fait l'objet des contrats de programmes touristiques signés entre les communes et des contrats de projet entre les municipalités concernées par le transfert.

22 Une étude du cabinet Ernst&Young en 2005 a estimé la consommation moyenne de l'eau par nuitée touristique à 200 l/personne/jour pour l'hôtellerie de bas de gamme et à 550 l/personne/jour pour le haut de gamme. Les études démontrent que la consommation des habitants est nettement inférieure: de 137 l/personne/jour en France, elle peut descendre à 30 l/pers/jour dans la plupart des villes en Afrique. Le décalage et le gaspillage sont donc énormes. (L'Express, 26/7/2007). Or, si la dotation hydrique est saturée, aucun développement du tourisme ne pourra avoir lieu.

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Figure 10. Région de Liberec – Carte de zonage touristique à terme (périmètres de protection totale, de développement contrôlé et de développement encouragé) (SAUL, UT Liberec, 2003)

4. Outils de maîtrise de seuils de capacité de charge touristique Bien entendu, il ne servirait à rien de connaître la CCT si son application sur le terrain s'avérerait impossible. Une série des mesures législatives, réglementaires et institutionnelles est donc indispensable. Nous pouvons en citer quelques-unes:

* identification et délimitation précise des aires touristiques (à l'instar des aires urbaines comprises comme bassins de vie), afin de faciliter l'évaluation de la CCT

* mise en place d'instruments d'aménagement touristique (stratégiques et opérationnels) intégrant obligatoirement l'évaluation de la CCT à toutes les échelles concernées (régionale, locale, du site)

* limitation de la densité d'occupation du sol * limitation ou répartition des flux dans le temps et dans l'espace * réglementation d'exploitation des ressources naturelles * application du principe de compensation par l'attribution d'un coût aux valeurs

destinées à la protection (taxes et impôts) * mise en place d'un système de gestion informatisé et accessible par Internet * formation des planificateurs et de gestionnaires * contrôle du marché afin d'identifier les niches de potentialités et réaliser des

promotions pour des périodes pendant lesquelles il y a une CCT disponible

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* création des institutions spécifiques (observatoire de développement durable du tourisme23, inspections du tourisme et de l'environnement, etc.)

* mise en place des chartes touristiques24 et des codes d'éthique * mise en place des programmes spécifiques de développement et de recherche

(comme par exemple ROC Respecting Our Culture développé en Australie pour aider les habitants à élaborer des offres de séjour viables sur le plan commercial, respectueux de la culture et de l'environnement local; le programme EEAA de valorisation de 14 aires protégées en Egypte; programmes du RADDO Réseau Associatif de Développement Durable des Oasis, ou encore le projet du réseau T2D2, sorte d'Agenda 21 du tourisme local à Djibouti en Ethiopie25)

Le report de l'activité touristique vers des sites alternatifs afin de maintenir le développement local tout en préservant les sites, leurs populations et l'environnement, parait cependant constituer une mesure primordiale, comme c'est le cas dans l'exemple tchèque cité. 5. Conclusion L'introduction de la notion du seuil limite de la capacité de charge touristique dans le Schéma National d'Aménagement Touristique en Algérie et dans les outils locaux d'aménagement (PDAU et POS, PA/ZET) est à notre avis une condition sine qua non de réussite d'une politique touristique qui se veut durable. La situation environnementale alarmante décrite plus haut mise face aux potentialités énormes existantes ne peut que désoler tout acteur intéressé par l'investissement et le développement touristique, qu'il soit national ou étranger. Si cette notion est intégrée dans les instruments de planification économique et territoriale de manière consciente et responsable, elle pourrait non seulement guider les actions à entreprendre et les investissements à consentir durant la période ciblée, mais plus encore – elle pourrait stimuler les acteurs locaux dans le sens de la recherche des actions en faveur de la durabilité afin d'obtenir le soutien et les moyens de l'Etat. Il est évident que, malgré le processus de concertation et de négociation propre à ce type de la démarche planificatrice, des mesures contraignantes qu'il faudra prendre ne plairaient pas forcement à tout le monde et pourraient soulever des vives protestations. Mais le développement durable est aussi à ce prix. Pr Ewa Berezowska-Azzag Alger, avril 2008

23 Premier de ce type, un observatoire va être réaliser à Guilin en Chine, site qui accueille 12 millions de visiteurs/an, dont 1 mln des touristes étrangers et où les flux touristiques constituent une menace pour le site naturel des formations karstiques et pour ces ressources naturelles, uniques au monde ("Nouvelles OMT, n°3/2006). 24 Par exemple Charte RESPECT du désert pour le tourisme durable saharien (www.atalanta.fr) 25 "Développement durable du tourisme dans les déserts", OMT, Madrid 2006, pages 45-67

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Références bibliographiques: * Actes du Séminaire international "Gestion des destinations touristiques, la voie de la réussite", Ministère du Tourisme, Alger, décembre 2006 * "Atlas de l'environnement de l'Algérie", Symbiose / Burlington Resources, Alger 2002 * Berezowska-Azzag E., "Entre l'éphémère et le durable, les enjeux du tourisme en ville", in "Tourisme urbain, facteur de promotion de la ville", Actes du Séminaire National, Alger, 17&18 avril 2006 * Bouchdjira A., in "Tourisme urbain, facteur de promotion de la ville", Actes du Séminaire National, Alger, 17&18 avril 2006 * "Développement durable du tourisme dans les déserts", OMT, Madrid 2006 * "Définir, mesurer et évaluer la CC dans les destinations touristiques européennes", Laboratoire de Planification Environnementale LPE, Université de l'Egée, Athènes 2001 * Etude de stratégie d'aménagement touristique de la région de Liberec en Tchéquie, Brno 2002 & Technical University of Liberec, SAUL Liberec 2003 * "Forte croissance du tourisme mondial en 2007", OMT, Madrid 29 juin 2007 * Lozato-Giotart J.P., "Iles et tourisme: d'Ulysse à Amadeus", in "La Méditerranée", Editions du Temps, Paris 2001 * "Nouvelles OMT", Revue de l'Organisation Mondiale du Tourisme, Année XX, n°3/2006 * "Nouvelles OMT", Revue de l'Organisation Monsiale du Tourisme, Année XXI, n°2/2007 * Postolka V., "Problems, Possibilities and Valuation Examples of Lanscape Burdens", Technical University of Liberec, actes du Colloque International "Aspects of equilibrium. Architecture, urban design and planning at threshold of the international decade of education for the sustainable development", Wroclaw 23-25 juin 2005 * "Rapport sur l'état et l'avenir de l'environnement", MATE, Alger 2005 * Revue "Urbanisme", n°295, juillet 1997, page 51 * "SNAT 2025", Rapport provisoire, MATE Alger, décembre 2006 * "Stratégie algérienne et plan d'action national d'utilisation durable de la biodiversité", FEM/PNUD, MATE, Alger 2004 * www.atalanta.fr* www.czso.cz * www.ec.europa.eu * www.unwto.org