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OUR1022-extrait

Date post: 17-Mar-2016
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ISBN 978-2-940335-22-0 Imprimé en UE Titre original en anglais: Blue Like Jazz. Nonreligious Thoughts on Christian Spirituality, publié par Thomas Nelson Inc. Copyright © 2003 by Donald Miller Traduction: Thomas Constantini Jazz à l'âme-2.qxp 27.9.2007 12:32 Page 4
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Titre original en anglais: Blue Like Jazz. Nonreligious Thoughts on Christian Spirituality, publié par Thomas Nelson Inc. Copyright © 2003 by Donald Miller Traduction: Thomas Constantini © et édition: Ourania, 2007 Case postale 128, CH-1032 Romanel-sur-Lausanne [email protected] ISBN 978-2-940335-22-0 Imprimé en UE Jazz à l'âme-2.qxp 27.9.2007 12:32 Page 4
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Titre original en anglais: Blue Like Jazz. Nonreligious Thoughtson Christian Spirituality, publié par Thomas Nelson Inc.Copyright © 2003 by Donald Miller

Traduction: Thomas Constantini

© et édition: Ourania, 2007Case postale 128, CH-1032 [email protected]

ISBN 978-2-940335-22-0Imprimé en UE

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Table des matières

Note de l’auteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

01 Commencement.Dieu qui marche vers moi sur un chemin de terre . . . . . . . . . . 9

02 ProblèmeCe que j’ai appris en regardant la télévision . . . . . . . . . . . . . . . . 23

03. MagieLe problème avec Roméo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

04. TransformationComment on trouve une Penny . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

05. FoiA propos de la vie sexuelle des pingouins . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

06. RachatSexy Carotte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

07. GrâceLe royaume des mendiants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95

08. DieuxNos chers amis invisibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105

09. ChangementNouveau commencement pour foi ancienne . . . . . . . . . . . . . . 115

10. CroyanceLa naissance de la cool attitude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123

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11. ConfessionLa sortie du placard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135

12. EgliseComment y aller sans devenir dingue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

13. AmourA la rencontre des filles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165

14. SolitudeDes années dans l’espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179

15. CommunautéVivre avec des cinglés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203

16. ArgentQuand il faut payer le loyer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217

17. LouangeL’émerveillement mystique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233

18. AmourVraiment aimer les autres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 241

19. AmourVraiment s’aimer soi-même . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 259

20. JésusLes traits de son visage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281

Informations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 285

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Note de l’auteur

Je n’ai jamais aimé la musique jazz, parce que la musique jazzne résout rien. Cependant, un soir, je me trouvais devant leBagdad Theater à Portland, et j’ai vu un homme jouer dusaxophone. Je suis resté là une bonne quinzaine de minutes,et il n’a pas ouvert une seule fois les yeux.Après ça, j’ai aimé la musique jazz.Parfois, il faut voir quelqu’un aimer quelque chose pour vousmettre à aimer cette chose vous-même. C’est comme si cettepersonne vous montrait la voie.Je n’aimais pas Dieu parce qu’apparemment il ne résolvaitrien. Mais c’était avant que tout cela n’arrive.

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Chapitre 3

Magie

Le problème avec Roméo

Quand j’étais enfant, ma mère m’a emmené un soir voir unspectacle de David Copperfield, le magicien. Je crois qu’ellele trouvait très bel homme. C’était l’année où il a fait dispa-raître la statue de la liberté à la télé. Par la suite, il a fait dis-paraître un avion et il s’est fiancé avec Claudia Schiffer.

Au début du spectacle, David Copperfield nous a dit quela magie n’existait pas et que tout ce qu’il allait faire n’étaitqu’illusion. Il est entré dans une boîte que ses assistantessexy ont retournée et, quand elles l’ont ouverte, le magi-cien avait disparu. Il a placé une dame en état de lévitation.Il a transformé un tigre en perroquet, puis l’a fait redevenirun tigre, mais de couleur différente, puis il a rendu à sonpelage ses couleurs d’origine. Tout le monde était fasciné. Ily avait juste devant moi un monsieur avec une très grossetête, et j’ai dû me pencher pour arriver à tout voir.

Plus tard, je suis moi-même devenu magicien. Ma mèrem’avait acheté une boîte de tours de magie, et j’ai étudié lelivret qui allait avec. Je pouvais faire transformer trois petitsmorceaux de ficelle en un seul long morceau. Je pouvaisfaire passer une pièce à travers une assiette. Je pouvaisdeviner quelle carte vous aviez choisi dans un paquet.

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J’étais absolument sensationnel. J’avais dans l’idée dedevenir un très grand magicien, d’engager une assistantesexy et de partir m’installer à Las Vegas. Malgré tout, aubout de quelques mois, j’ai commencé à me sentir frustré.Je ne faisais que des tours de magie, pas de la vraie magie;tout n’était qu’illusion. J’ai donc décidé de grandir et dedevenir un astronaute avec une assistante sexy. Je m’imagi-nais vêtu d’un costume d’astronaute sophistiqué et imma-culé. A mes côtés se trouvait une fille du genre KatieCouric1 qui me regardait avec des yeux de biche pendantque je manipulais les leviers et les boutons de notre vais-seau spatial. Régulièrement, elle m’essuyait doucement lefront.

Tout le monde veut être quelqu’un de cool, même lesplus timides. J’ai une amie qui est tellement timide qu’ellefait pipi dans sa culotte si vous la regardez. Bon, elle ne faitpas vraiment pipi dans sa culotte, mais c’est presque ça.C’est une très jolie fille, mais elle ne sort jamais parcequ’elle est trop timide pour ça. Si vous ne la connaissez pasbien, il est tout à fait possible qu’elle ne veuille rien faired’autre que se cacher dans un placard. On pourrait croirequ’elle voudrait à tout prix éviter d’attirer l’attention mais,quand j’ai commencé à mieux la connaître, elle m’a avouéqu’elle rêvait d’être actrice. Quand on la connaît un peumieux, on oublie à quel point elle est timide, et je lui aidonc dit qu’elle pourrait devenir actrice. Elle est suffisam-ment belle pour ça. Mais je me suis rendu compte que cen’était pas une bonne idée, parce qu’elle est si timidequ’elle pourrait bien fondre en larmes si elle se retrouvaitdevant un public, ou quelque chose dans ce style.

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1 N.d.E.: journaliste et présentatrice télé américaine connue notamment pour sesinterviews de personnalités

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Je n’ai jamais voulu être acteur, mais j’ai toujours rêvéd’être une rock star.

Même quand j’étais magicien, je voulais être une rockstar. Quand j’étais plus jeune, j’écoutais les chanteurs à laradio et j’imaginais que c’était moi qui étais en face de mil-liers de personnes, avec toutes les filles que je connaissaisau premier rang. Je leur faisais un petit signe pendant queje chantais, et elles criaient comme si leur tête allait explo-ser. Je voulais être une rock star, mais je n’ai jamais vouluêtre acteur.

* * *

Je suis allé à une pièce de théâtre, une fois. Pour la pre-mière fois de ma vie, j’avais invité une fille à sortir avec moi,et nous sommes allés voir Roméo et Juliette. Certes, je n’aijamais voulu être un acteur, mais je croyais bien marquerdes points avec elle en l’emmenant voir une pièce. Elle étaitassise si près de moi que je pouvais entendre sa respira-tion. Elle était chaude comme le soleil et douce comme sielle avait utilisé un savon spécial.

Même si c’était une bonne idée de l’emmener à cettepièce, j’ai tout planté.

Résumons: il y a un moment dans la pièce où Juliette (lepersonnage féminin principal) se tient à un balcon etRoméo (le personnage masculin principal) est caché endessous, dans les buissons. C’est très intense, parce queJuliette dit combien elle aime Roméo, sans savoir qu’il peutl’entendre. Tout a très bien commencé. La fille s’est rouléeen boule tout près de moi, si près que je pouvais sentir ladouceur de sa peau et de son bras, qu’elle avait passéautour du mien. Je pensais que tout ça, c’était vraiment untruc à l’eau de rose mais, par moments, je faisais des petitsbruits, comme si je pensais que les acteurs disaient des

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choses merveilleuses. Quand je faisais ça, la fille me regar-dait avec des yeux surpris. C’est toujours une bonne idéede faire des petits bruits, quand vous emmenez une fillevoir une pièce.

La fille était emballée par le thème de l’amour, mais çane prenait pas avec moi. C’était plus fort que moi, tous cesmachins ne marchaient pas. Juliette disait que Roméodevait renier sa famille et il répondait: «Ah, ben, O.K.» Etpuis Juliette disait à Roméo qu’il sentait comme une rose,et il répondait encore: «Ah, ben, O.K.»

Et après ça, la phrase clé, dont j’ai compris, depuis, quetoute la pièce repose sur elle.

Roméo: «Je veux te prendre au mot. Nomme-moi seulement ‘amour’ et que ce soit comme un autrebaptême! Jamais plus je ne serai Roméo.»2

Plus tard dans la pièce, ils se tuent accidentellement tousles deux. Ce n’était pas très crédible, mais l’histoire finissaitcomme ça. La fille pleurait. Je pensais qu’ils avaient ce qu’ilsméritaient. Tout ça me semblait stupide. Je ne comprenaispas tout ce dont il était question, mais j’étais bien persuadéque ça devait avoir été écrit pour les filles. Les gensdevraient quand même apprendre à réfréner leurs émo-tions. Alors que nous sortions, la fille a mis sa main dans lamienne et, même si j’étais peu sensible à l’ambiance, je luiai souri. Nous avons remonté les allées pour arriver à l’en-trée du théâtre où les gens s’étaient agglutinés. Il y avaitdes filles partout, et elles avaient toutes les yeux humides. Ily en avait deux en face de nous qui parlaient ensemble.L’une d’elle a levé les bras au ciel et a dit: «J’aimerai tantpouvoir aimer comme Roméo et Juliette!!»

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2 N.d.T.: William Shakespeare, Roméo et Juliette (acte II scène II), Folio, p. 70, traduc-tion d’Yves Bonnefoy

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Je n’en pouvais plus. J’ai murmuré entre les dents: «Ilssont morts!»

Je pensais que personne n’avait entendu, mais la filleavec qui j’étais venu avait entendu. Deux filles près de nousm’avaient aussi entendu, et elles ont tout raconté auxautres. Un idiot a répété ce que j’avais dit et il a rigolé enme montrant du doigt. Toutes les filles me regardaientcomme si je venais d’écraser un chaton. Le corps de macopine est devenu froid. Elle a lâché ma main. Elle a croiséses bras sur la poitrine et a marché devant moi durant toutle trajet jusqu’à ma camionnette. Sur le chemin du retour,elle se tenait si près de la porte que j’ai cru qu’elle allaittomber. Quand nous sommes arrivés chez elle, je lui aidemandé si elle aimerait sortir de nouveau avec moi.

«Je ne pense pas», m’a-t-elle dit.«Pourquoi?»«Je ne pense pas que je pourrai être avec toi.»«Pourquoi?»«C’est juste que je ne peux pas.»«Est-ce qu’on peut s’embrasser? Il paraît que ça aide les

filles à tomber amoureuses.»«Tu es mauvais, a-t-elle dit, tu es l’Antichrist!»Elle est rentrée chez elle en claquant la porte à mon nez

et à notre relation. Sincèrement, je ne l’avais jamais vrai-ment aimée. Elle était jolie et tout, mais il n’y avait jamaisrien eu de profond. Je n’ai donc pas vraiment été triste.

Ma mère m’avait donné sa carte Texaco pour mon ren-dez-vous et, avant de rentrer, je me suis arrêté acheter desCheetos et des beignets. Je me suis garé dans le parking duTexaco et j’ai pensé à ce pauvre vieux Roméo, assoifféd’amour, quittant tout avec la femme qu’il aime et mourantdans un accident. Certaines relations se révèlent désastreu-ses, c’est un fait. Et, si voulez savoir, j’aurais pu vous dire dès

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le début qu’il était voué à l’échec. Il était voué à l’échecparce qu’il croyait à la magie. Il croyait qu’en s’accrochant àJuliette il deviendrait une nouvelle personne, avec un nou-veau nom, qu’il serait baptisé et tout brillant.

Tout le monde veut être cool et neuf. Nous ne voulonsjamais être nous-mêmes. Enfin, peut-être que nous som-mes prêts à être nous-mêmes, mais différents, mieux habil-lés, mieux coiffés ou moins gros. S’il existait un seul typequi aime être lui-même et qui ne veuille pas être quelqu’und’autre, il serait la personne la plus différente au monde ettout le monde voudrait être lui.

Un soir, j’ai vu à la télé une publicité pour un couteau quipouvait découper une botte et rester suffisamment affûtépour couper une tomate en rondelles. Ils l’appelaient lalame miracle. Un autre soir, c’était un produit nettoyant faità base de jus d’orange qui pouvait enlever des taches desang sur un tapis. Ils ont dit qu’il était quasiment magique.

Dans ma relation avec Dieu, tout ce désir d’être une nou-velle personne jouait un rôle important. Dieu avait enmagasin quelque chose que je voulais. Mais je plaçais Dieudans la même catégorie que le gars qui voulait me vendreson couteau ou Juliette promettant à Roméo de faire de luiune nouvelle personne. Tous ceux qui veulent vous vendrequelque chose exagèrent. Tout le monde dit que son pro-duit est magique. A l’époque, je comprenais l’offre de Dieucomme une proposition magique, et c’est d’ailleurs cequ’elle est en réalité. Mais la plupart de ces propositionsmagiques sont des pièges. Plus vous vieillissez et plus ildevient difficile de croire en la magie. Plus vous vieillissezet mieux vous comprenez que le magicien d’Oz n’existepas et qu’il n’y a qu’un crétin derrière un rideau. Le pasteurm’apparaissait comme un représentant ou un magicien quiessayait d’embobiner l’assemblée pour lui faire croire que

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mettre notre confiance en Jésus ferait de nous de nouvel-les personnes. Et, très honnêtement, j’avais l’impressionqu’il essayait de se convaincre lui-même, comme s’il n’avaitcru qu’à moitié tout ce qu’il disait. Ce n’est pas que toute laspiritualité chrétienne ait eu l’air d’une complète escroque-rie, mais elle y ressemblait par certains de ses aspects.

Cependant, j’étais attiré par ce message. Dieu disait qu’ilferait de moi quelqu’un de nouveau. Il m’est impossible dedire que je ne le voulais pas, que je ne voulais pas prendreun nouveau départ. Et c’est ce qui est arrivé.

* * *

Il y avait des aspects de la spiritualité chrétienne que j’ai-mais et d’autres qui me semblaient être d’une affligeantebanalité. J’avais envie de pouvoir adhérer à certains aspectsde la foi chrétienne, mais pas à l’ensemble. Laissez-moivous expliquer.

J’ai grandi dans l’église et, à cause de cela, j’associais unegrande partie de la doctrine chrétienne avec les histoirespour enfants. Les personnes qui nous faisaient le caté-chisme avaient transformé le récit biblique en fables pourenfants. Elles nous parlaient de Noé et de l’arche parce qu’ily avait des animaux dans l’histoire. On négligeait quandmême de nous mentionner que c’était à cette occasion-làque Dieu avait détruit presque toute l’humanité.

J’étais aussi confus quand je voyais des chrétiens se réfé-rer à certaines parties de la Bible, mais pas à son ensemble.Ils ignoraient un grand nombre de questions bien réelles.J’avais l’impression qu’en tant que système religieux lechristianisme était un produit en train de s’effriter complè-tement et que ceux qui le vendaient devaient tenir les mor-ceaux ensemble derrière leur dos en essayant de détournerl’attention de tout le monde.

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Toutes ces histoires pour enfants représentaient ce quele christianisme essayait de tenir derrière son dos. Le jardind’Eden et la chute de l’homme, c’était une histoire assezidiote, et tout le récit autour de Noé et de son arche res-semblait quand même beaucoup à un conte de fées.

Il m’a fallu du temps avant de comprendre que ces his-toires, bien que souvent utilisées avec les enfants, n’étaientpas du tout des histoires pour enfants. Je pense que le dia-ble a réussi à nous faire croire que la plus grande partie dela Bible relève du conte. Comment en sommes-nous arrivésà penser que l’histoire de l’arche de Noé convient aux plusjeunes? Est-ce que vous pouvez imaginer un livre pourenfants sur cette histoire qui serait rempli d’images degens suffoquant dans des décilitres d’eau, avec des mèress’accrochant à leurs enfants pendant qu’elles sont empor-tées par des torrents en crue et que la petite tête desenfants finit écrasée sur un rocher ou accrochée aux arbrestombés? Je ne pense pas qu’un livre comme celui-là auraitdu succès au rayon jeunesse de nos librairies.

Je ne pouvais pas devenir chrétien parce que c’était unereligion bonne pour des personnes intellectuellement naï-ves. Pour devenir chrétien, il fallait réduire d’énormes diffi-cultés théologiques en fables pour enfants, ou bien lesignorer. Mon intellect avait beaucoup de mal à saisir toutecette question, mais rien de tout ça n’était bien défini, et laplus grande partie se jouait dans mon subconscient.

* * *

La solution est venue d’où je ne l’attendais pas. J’ai suivià l’université un cours de littérature où nous avons étudiéles éléments qui composent une histoire: le contexte, leconflit, le paroxysme et le dénouement.

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C’est alors que, pendant que j’étudiais ce sujet, une drôled’idée m’est venue, et j’ai pris conscience que nous nesavons pas d’où viennent les éléments d’une histoire. Biensûr, nous pouvons connaître le nom de celui qui en a eul’idée, mais nous ne savons pas pourquoi ils existent. J’aicommencé à me demander pourquoi nos esprits utilisentce schéma spécifique pour raconter une histoire. J’ai donctout décomposé. Contexte: c’était simple, toutes les histoi-res en ont un. Mon contexte, c’est l’Amérique, sur la planèteTerre. Je comprends la notion de contexte parce que je l’ex-périmente. Je suis assis dans ma chambre, dans ma maison.D’autres gens partagent cette maison avec moi, etc., etc. Jesavais par expérience ce qu’était un contexte, et mon cœurpouvait donc le comprendre.

Mais ensuite vient le conflit. Toute bonne histoirecontient un conflit. Il peut être interne ou externe, mais sivous voulez écrire un livre qui va se vendre, il faut que vousy mettiez du conflit. Là encore, je crois pouvoir dire quenous comprenons le conflit parce que nous l’expérimen-tons. Mais d’où vient le conflit? Pourquoi fait-il partie denotre existence? Cela m’a beaucoup aidé, d’accepter l’idéedu péché originel et de la naissance du conflit. La rébellioncontre Dieu expliquait pourquoi les humains font l’expé-rience du conflit dans leurs vies, et personne ne connaîtd’autre explication à cet état de fait. Ce dernier point a étécrucial. J’ai ressenti comme une révélation. Sans le péchéoriginel et l’histoire apparemment idiote d’Adam et Eveavec l’arbre de la connaissance du bien et du mal, on seretrouve sans explication pour le conflit. Il n’y en a aucune.Il est vrai que certains verront le récit du péché originelcomme une métaphore, comme un symbole de quelquechose de différent qui s’est produit. Mais que vous preniezl’histoire de façon littérale ou que vous préfériez son inter-

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prétation métaphorique, elle donne une explication satis-faisante des luttes que nous expérimentons tous: solitude,fait de s’endormir le soir en pleurant, dépendance, orgueil,guerre ou encore égoïsme. Notre cœur réagit au conflit quise joue au sein de l’histoire, me suis-je dit, parce que noussommes tous pris dans un grand conflit à l’échelle de l’uni-vers, même si c’est de façon subconsciente. Si nous neconnaissions pas le conflit au sein de nos propres vies, il nenous ferait pas réagir dans un livre ou dans un film. L’idéed’un conflit, d’une tension, de suspense ou même d’unennemi nous serait étrangère. Mais elle ne l’est pas. Nouscomprenons ces choses parce que nous les expérimentons.Même si je ne voulais pas l’admettre, la spiritualité chré-tienne expliquait pourquoi.

Il faut maintenant parler du paroxysme. Toute bonne his-toire en a un. Le paroxysme se place là où une décision ouune action détermine la fin de l’histoire. C’est à cemoment-là que j’ai commencé à avoir un petit peu peur. Sile cœur humain utilise les éléments de la réalité pour créerune histoire, et s’il réagit au paroxysme au sein de sa struc-ture, cela veut dire que le paroxysme, ou point de décision,pourrait très bien exister dans l’univers. Ce que je veux dire,c’est qu’il y a une décision que le cœur humain doit pren-dre. Les éléments de l’histoire commençaient à coïncideravec ma compréhension de la spiritualité chrétienne. Lechristianisme offrait une décision, un paroxysme. Il offraitaussi une fin de l’histoire bonne ou mauvaise, et nos déci-sions étaient en partie responsables de la façon dont l’his-toire se finissait.

J’en arrivais donc à réaliser quelque chose d’assezeffrayant. Cela fait des centaines d’années qu’un certaindiscours chrétien affirme que nous devons prendre unedécision et choisir de suivre Jésus ou de le rejeter. C’est

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présenté comme une solution magique au dilemme de lavie. J’avais toujours détesté cette idée, qui m’apparaissaittotalement passéiste, mais je devais reconnaître qu’ellefournissait une explication. Peut-être que cette idée pas-séiste pointait finalement vers quelque chose de mystiqueet de vrai. Et peut-être avais-je jugé l’idée, non pas sur sesmérites, mais sur la façon passéiste ou non de la présenter.

* * *

Il y a longtemps, je suis allé au concert avec mon amieRebecca, qui a la plus belle voix que je connaisse. J’avaisentendu dire qu’un chanteur folk passait en ville et j’avaispensé qu’elle aimerait peut-être le voir, puisqu’elle étaitchanteuse, elle aussi. Les tickets m’ont coûté 20 dollars cha-cun, ce qui est cher quand vous invitez une fille à proposde laquelle vous n’avez aucune ambition. Entre deux airs, lechanteur nous a raconté une histoire qui m’a aidé à clarifiercertaines choses dans ma façon de voir Dieu. C’était l’his-toire d’un de ses amis, membre des Navy SEAL, une unitéde commandos d’élite de la marine militaire américaine. Ill’a racontée comme si elle était vraie, et je pense doncqu’elle l’était, bien qu’il ait aussi pu s’agir d’une complèteinvention.

Le chanteur nous a raconté que son ami menait uneopération secrète dans le but de libérer des otages enfer-més dans un immeuble, dans un pays marqué par laguerre. Son équipe a été transportée par hélicoptère, s’estrendue au bâtiment et a surgi dans la pièce où les otagesétaient détenus depuis des mois. La pièce était sombre etrépugnante de saleté. Les otages étaient recroquevillésdans un coin, terrifiés. Quand les SEAL sont entrés, ils ontentendu le souffle des otages. Les soldats se sont tenus à

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l’entrée de la pièce et ont appelé les otages, en leur disantqu’ils étaient américains. Ils leur ont demandé de les suivre,mais les prisonniers refusaient. Ils restaient assis sur le solet la peur leur faisait mettre leurs mains devant leurs yeux.Leur esprit avait été ébranlé par la captivité et ils necroyaient pas qu’ils avaient devant eux leurs libérateurs.

Les SEAL sont restés là, sans vraiment savoir que faire. Illeur était impossible d’emmener tous ces gens en les por-tant. C’est alors que l’ami du chanteur a eu une idée. Il alaissé son arme, enlevé son casque et s’est approché des ota-ges, suffisamment près pour pouvoir les toucher. Il a adoucil’expression de son visage et a mis ses bras autour d’eux.Aucun de leurs gardiens n’aurait jamais fait ça. Il est restéainsi un petit moment, jusqu’à ce que certains des otagescommencent à le regarder et que leurs regards se croisentenfin. Le commando a murmuré qu’ils étaient américains etqu’ils étaient venus pour les secourir. «Est-ce que vous êtesprêts à nous suivre?» a-t-il murmuré. Il s’est redressé, et undes otages a fait de même, puis un autre, jusqu’à ce qu’ilssoient tous prêts à partir. L’histoire se termine à bord d’unavion militaire emmenant tous les otages sains et saufs.

Je n’ai jamais aimé quand les pasteurs disaient que nousdevions suivre Jésus. Parfois, ils donnaient l’impression queJésus était en colère contre nous. Mais j’ai beaucoup aimél’histoire du chanteur. J’aimais l’idée que Jésus soit devenuun homme comme nous afin que nous puissions lui faireconfiance, et j’aime le fait qu’il a guéri les gens, qu’il les aaimés et que ce qu’ils pouvaient ressentir était vraimentimportant pour lui.

Quand j’ai compris que la décision de suivre Jésus res-semblait beaucoup à celle que les otages avaient prise desuivre leurs libérateurs, j’ai pris conscience que je devaisdécider de le suivre ou non. Cela a été simple une fois queje me suis posé certaines questions: «Est-ce que Jésus est le

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Fils de Dieu? Est-ce que nous sommes prisonniers d’unmonde dominé par Satan et où nos vies sont brisées? Est-ceque je crois que Jésus peut me libérer de cette situation?»

Si la vie avait un paroxysme, et il le fallait pour que l’élé-ment du paroxysme se retrouve dans nos récits, alors la spi-ritualité chrétienne offrait un paroxysme. Elle offrait unedécision à prendre.

Le dernier élément d’une histoire est son dénouement.La spiritualité chrétienne en offrait un: le dénouement dupardon et d’un endroit préparé pour nous après la mort.Encore une fois, cela me paraissait être d’un simplismeconfondant, mais j’avais désespérément envie d’y croire.C’était comme si mon âme avait été faite pour vivre l’his-toire que racontait la spiritualité chrétienne. Je sentais quemon âme voulait être pardonnée. Je voulais le dénouementque Dieu m’offrait.

Tout y était: contexte, conflit, paroxysme et dénouement.Cela pouvait sembler idiot, mais cela répondait aux besoinsdu cœur et correspondait aux faits de la réalité. Ça avaitl’air plus que vrai, ça avait l’air riche de sens. Je commençaisà croire que j’étais un personnage inclus dans une histoirebien plus vaste, ce qui expliquait que les éléments d’unrécit aient eu du sens en premier lieu.

Une fois libérée de l’emprise du conte de fées, la propo-sition magique de l’Evangile me semblait très adulte, aussicrue que quelque chose tiré d’Hemingway et de Steinbeck,quelque chose avec une copieuse quantité de sexe et desang. La spiritualité chrétienne n’était pas une histoire pourenfants. Elle n’était pas mignonne ou gentillette. Elle étaitmystique, étrange et nette, et n’avait pas peur de mettre lesmains dans le cambouis. Il y a avait en elle de la merveilleet de l’enchantement.

Peut-être, me suis-je dit, que la spiritualité chrétienne,c’est ce qui fait la différence entre la magie et l’illusion.

Magie

Jazz à l'âme-2.qxp 27.9.2007 12:32 Page 49


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