149 RUE ANATOLE FRANCE 92534 LEVALLOIS PERRET CEDEX - 01 41 34 60 00 15/21 MAI 14 Hebdomadaire OJD : 575038 Surface approx. (cm²) : 4725 N° de page : 102-109 Page 1/8 BLANC6 6551710400504/XCB/OTO/2 Eléments de recherche : Passages significatifs : - GEORGES BLANC : hôtelier-restaurateur à Vonnas (01) - CHEZ BLANC : restaurant à Bourg-en- Bresse (01) Pour ce retour aux sources, ni eaux minérales ni limonade. Seulement du champagne. C est dans I établissement le plus anciennement étoile au monde que les meilleurs chefs de la planète ont fêté l'événement. Le 12 mai 1954, huit hôteliers, situés entre Paris et Nice, se réunissaient chez l'oncle de Georges Blanc, pour créer les Relais de Campagne, ancêtres des Relais & Châteaux. « Se retrouver ici, e était le moyen de nous souvenir dou nous venons», précise Philippe Gombert, président international d'une association qui compte aujourd'hui 520 enseignes réparties dans 64 pays. « La route du bonheur» ne se limite plus à la nationale?, elle a traversé les océans. Lart de vivre ne connaît plus de frontières. Mais la philosophie reste la même, celle des cinq « e » : caractère, charme, calme, courtoisie... et cuisine d'exception. PLUIE CHEZ! GEORGE BLANC PÂBRIOU
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Pour ce retour aux sources,ni eaux minérales ni limonade.Seulement du champagne.C est dans I établissement leplus anciennement étoile aumonde que les meilleurs chefsde la planète ont fêtél'événement. Le 12 mai 1954,huit hôteliers, situés entre Pariset Nice, se réunissaient chezl'oncle de Georges Blanc, pourcréer les Relais de Campagne,ancêtres des Relais &Châteaux. « Se retrouver ici,e était le moyen de noussouvenir dou nous venons»,précise Philippe Gombert,président international d'uneassociation qui compteaujourd'hui 520 enseignesréparties dans 64 pays. « Laroute du bonheur» ne se limiteplus à la nationale?, elle atraversé les océans. Lart devivre ne connaît plus defrontières. Mais la philosophiereste la même, celle descinq « e » : caractère,charme, calme, courtoisie...et cuisine d'exception.
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POUR LEUPf|B 60E ANNIVERSAIRE,LES RELAIS & CHÂTEAUX
SE SONT RETROUVÉSI ÀVONNAS, DANS[AUBERGE MYTHIQUEI OUVERTE EN 1872
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Ce sont les plus grands chefs de Franceet ils n'ont pas peur d'assumer leurs dif-férences: au menu, pour tout le monde,l'une des spécialités de la région, descuisses de grenouille sautées en persillade!Pour continuer, une volaille aux morilles,la recette emblématique d'Elisa, grand-mère de Georges, surnommée «la MèreBlanc». «Ce que jai dans mon assiettedoit me parler de là où je suis», rappelle lecuisinier Olivier Roellinger. Surprise finalede ce déjeuner d'anniversaire, une pin-upjaillissant d'un gâteau en carton. La seulegourmandise qui n'avait rien de local
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ï. Georges Wenger 2. Gaetano Trovato I. Michel Troisgros4. César Troisgros 5. Jean-Michel Lorain 6. AlexandreGauthier 7. Patrick Hennroux 8. Thierry Drapeau 9. MichelRochedy W. Michel Guérard 11. Marc Meneau 12. GeorgesBlanc 13. Pierre Troisgros 14. Philippe Gombert 15. EdouardLoubet 16. Olivier Roellmger 17. Jean Sulpice IS. AnnieFêolde 19. Ricardo Moneo 20. Michel Kayser 21. DavidSmapian 22. Dominique Loiseau 23. Yuki Yamaguchi 24.Philippe Vételé 25. Pierre Basso More 26. Shnichi Sato 27.fao Mosconi 28. Philippe Mille 29. Jean-Pierre Jacob 30Emesto /«canne 31. Alain Weissgerber 52. Walter EselbockJJ. Michel Trama 34. Michel Rostang JS Jean-LouisBottigliero 36. Patrick O'Connel 37. Alberto Santini 58.Georges Victor Schmitt 59. Jean-Georges Klein 40. MauroColagreco 41. Peter Tempelhoff 42 Didier Clément 43.Jean-André Charal 44. Korian Kervarrec 45. Enrico Cerea46. Tom Morwald 47. Mark Lundgaard 48. Stéphane Baron49. Per Hallundbaek SO. frette Anton Sl. GuyLassausaie52. Régis Marcon 53. Davy Tissot 54. Bernard Ravel SS.EncPras 56. Franck Reynaud 57. Jean-Luc Rocha 58. JulienLahire 59. Jacques Lameloise 60. Cynl Leclerc 61. StéphaneDecotterd 62. Frédéric Blanc 63. Frédéric Desmurs 64.Jacques Decoret 65. Patrick Bertron 66. Hiroshi Yamaguchi
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Depuis quarante-six ans, Georges Blanc fa-çonne sa version du paradis. Ici, pas de bonnecuisine dans un décor sans âme. De la teinte desfleurs à l'intensité des luminaires, tout est étudiépour mettre en valeur le charme des canaux dela Veyle, des maisons à colombage et des parcsverdoyants. Il a remis en état la boulangerie deson grand-père, reconstitué l'auberge de sagrand-mère et même construit le cinéma.Convaincu que la beauté fait partie du menu, lechef étoile distille sur plus de 5 hectares son idéedu «village gourmand » avec son épicerie fine etsa boutique d'arts de la table. Ce qui ne l'em-pêche de s'adapter aux exigences des happy few :Vonnas a désormais son spa et son héliport.
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EN PLEIN PAYSDE BRESSE. IL RECRÉELE VILLAGE DECAMPAGNE IDÉALDans le domaine, le parc du Pigeonnier.I hectares, avec des bronzes animaliers dusculpteur Christian-Maas ""
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LE DIMANCHE, LE PETIT GEORGESRÂPAIT LE COMTÉ ET PRÉPARAIT LES CROÛTONSDE LA SOUPE. CHEZ LES BLANC,LA VOCATION VIENT EN MANGEANTPAR ANNE-CÉCILE BEAUDOIN
Tout commence avecf auberge de Jean-LouisBlanc, installée surla place du village deVomas, en 1872
i Georges Blanc n'existait pas, personnene connaîtrait Vonnas. On n'y verrait
pas défiler d'extravagantes voi-tures de collection, ni d'élé-gantes en fourreau et talonshauts. A table au milieu denulle part. Pour y parve-
nir, il faut suivre l'air tièdeet mouillé, les odeurs de boue et d'hu-mus. Passer des villages fantômes, tra-verser les champs de maïs, atteindre lecœur de la Bresse, là où la poularde enmanteau de soie blanche se laisse cajo-ler comme un chat. A Vonnas, le bonheurn'est plus dans le pré. Il y a un héliportet la vingtaine de maisons aux murs ocrerouge - toutes rachetées et recoloréespar Georges Blanc - s'enroulent pourfaire un village modèle qui ressembleà celui dAstérix. Une perspective tiréeau cordeau, le ronronnement d'une mai-son mère heureuse avec sa façade aux
colombages reconstitués, unpetit pont de bois fleuri quienjambe la rivière... C'estkitsch, propre et cossu maisça plaît : de Romy Schneiderà Nicole Kidman en passant
par François Mitterrand, tous se sontlaissé séduire par le monde merveilleuxdu chef. Car, derrière la démesure, il ya la gourmandise et l'authenticité d'unefamille tombée dans la marmite depuiscent quarante-deux ans.
Tout commence avec l'auberge deJean-Louis Blanc et de son épouse, instal-lée près du Champ de Foire. Nous sommesen 1872.Chaque jeudi,les coquetiers arri-vent au marché en voiture à cheval. Ils seréchauffent d'une soupe chez les Blanc.On y casse aussi très bien la croûte avantde rentrer chez soi, le bruit se répand demarché en marché. En 1902, Adolphe, lefils Blanc, succède à ses parents et met safemme Elisa aux fourneaux. Elle a héritéde sa mère le talent d'une belle cuisinede terroir, toute simple, avec beaucoupde beurre. Les marchands de bestiaux etles commissionnaires aux halles de Lyons'y bousculent. Le dimanche, les familles,les amis arrivent de Mâcon par le che-min de fer pour se régaler de grenouillesaux herbes et d'un poulet de Bresse à lacrème. Le président Edouard Herriot faitdes crêpes vonnassiennes sa madeleinede Proust. Les affaires prospèrent, les
étoiles pleuvcnt à Vonnas ; la première en1929, la deuxième en 1931. Curnonsky,leprince des gastronomes, consacre la mèreBlanc «meilleure cuisinière du monde»en 1933. Un an plus tard, Jean, son filsaîné, et son épouse Paulette, la fille duboulanger, assurent la relève. Jean faitde la limonade et Paulette est au piano.
« Paulette, ma mère, tenait son artde sa belle-mère [Elisa] qui elle-mêmel'avait appris de sa mère», résumeGeorges Blanc. Elles se transmettaientleurs recettes sur des petits cahiers d'éco-lier.» Enfance passée dans les jupes decette lignée de femmes d'exception. Sachambre est située juste au-dessus de lacuisine du restaurant. «Le fils du bistroavait les odeurs de tabac. MoiJ'éduquaismon nez chaque matin dans les effluvesdes écrivisses à la nage au pouilly-fuissé,des gâteaux de foies blonds de poulardeet des cuisses de grenouille au beurremousseux et persillade.» Gourmand,Georges consacre ses jeudis à apprendrela pâtisserie avec Elisa qui habite la mai-son en face du restaurant : quatre-quarts,flans à la vanille et au caramel. Son grand-père, boulanger-pâtissier sur la place, lui
« En cuisine dans lesannées mo, Elisa, dite «kMère Blanc », et sa mère,Virginie en fichu blanc bressois
1953, Georges, W ans(à droite), rapporte te pamde chez son grand-pèreboulanger, pour lesclients de midi
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Georges Blanc, au centre, avec la brigadequi a prépare le destiner
Georges Blanc et Frederic, son fils (à droite),préparent les crêpes vonnassiennes
Deux cent cinquante personnesont été conviées à l'auberge.
confie le secret de ses meringues Ledimanche, le gamin apporte son aide encuisine. Il râpe le comté, prépare les croû-tons pour la soupe. L'été, il tire la limo-nade avec son père.
Chez les Blanc, la vocation vient enmangeant. Parfois, Georges hésite. Il severrait bien en pilote d'avion. Maîs onn'échappe pas à son destin L'adolescentfourbit ses casseroles dans la maison demaman, fait l'école hôtelière, le servicemilitaire, puis rentre au bercail. Paulettelui passe le relais en 1968. Il a 25 ans etla nouvelle cuisine, plus précise, pluslégère, s'éveille. Georges fait évoluer lesplats de ses ancêtres sans les révolution-ner. Il oublie les fonds de sauce, glisse dusaumon frais et du caviar dans la galettede pommes de terre, sert la volaille deBresse en croûte de sel, divise le beurrepar trois et le remplace, dans la purée, pardu mascarpone En 1981, c'est la consé-cration avec la troisième étoile.
Virtuose aux fourneaux, «le p'titBlanc»,comme l'appelle Paul Bocuse.semontre redoutable pour faire de son héri-tage une ville dans la ville. Il explique.«Parmi les fidèles de la maison Blanc, il
y avait Raymond Loewy, le père fonda-teur des idées sur l'esthétique industrielle(la bouteille en verre fuselée Coca-Cola,c'est lui1) Au fil de nos discussions, ilm'a fait prendre conscience que le rêven'était pas seulement dans l'assiette IIfallait que l'appréciation de la clientèleaille au-delà, qu'elle porte sur le décorde la table, sur le cadre du restaurant etsur les abords de l'établissement. L'écrin
A 71 ANS, IL CONSULTETOUJOURS LES PETITSCAHIERS DE RECETTESDE SA GRAND-MÈRE
doit compter autant que le joyau lui-même.» Dès lors, Georges acquiert lesmaisons tout autour de la place du vil-lage. La quincaillerie, d'abord. Puis lecafé-épi cène, la maison du maréchal-ferrant. Qui pourrait résister à l'hommequi régale le gotha, Platmi, Gorbatchev,Delon, Deneuve "> A ceux qui refusent,il propose un ravalement gratuit Rouge,le ravalement. Parce que c'est sa cou-leur fétiche Peu à peu, Georges crée son
I Paulette (f en partant de la gauche) reçoit pour la première fois PaulBocuse (derrière,6e en partant de la gauche en costume gris clair) qui vient d obtenir sa troisième étoile
1965, séance d'equeutageavec Georges en apprenti(au fond), à côté de sa mère,Paulette (cheveux gris)
«village gourmand» avec colom-bages à la sauce bressane, spa,hôtels, restaurants, auberge, bou-tiques, héhport et arboretum. Les120 mètres carrés de 1934 passentainsi à un empire de 5 hectaresoù 180 personnes turbinent. Onle traite de mégalo, il rétorque.«J'ai simplement eu envie d'offrirà mes visiteurs un lieu privilégié et dedonner à mon équipe de bormes condi-tions de travail. » Coup de maître en 1990 :au moment de la construction de l'au-toroute A40 Mâcon-Genève-Chamomx,il fait du lobbymg auprès des acteurséconomiques et des élus de la région etobtient une sortie directe pour desservirVonnas. Les jaloux l'appellent depuis « lasortie Georges Blanc» .
La postérité assurée, le cuisinier desstars ne faiblit pas. A 71 ans, il a déjà latête en 2022 pour les 150 ans de la mai-son Blanc, mais continue de consulterles petits cahiers de recettes de grand-mère Elisa En hommage à ces mèreset à ce terroir bressan qu'il vénère, il aconcocté, pour le 60e anniversaire deRelais & Châteaux, des cuisses de gre-nouille en persillade et un poulet à lacrème. «C'est Au Chapon fin, le restau-rant que mon oncle Paul Blanc avait àThoissey, à quèlques kilomètres d'ici,qu'a été signé le lancement des Relaisde campagne dont le premier guide allaitparaître en 1954 J'ai assisté à ce dîner quiréunissait les huit hôteliers cof ondateursde ce qui deviendra la chaîne des Relais& Châteaux. J'avais ll ans. Je dois êtreaujourd'hui le seul témoin du lancementde cette belle aventure.»
Le 12 mai, les invités sont arrivéschez Georges par le chemin de fer depuisMâcon. Comme autrefois, lorsqu'unenuée de voyageurs débarquaient ledimanche chez la mère Blanc pour fes-toyer et savourer la douce torpeur d'unrepas entre amis. •
