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Editorial | Le pourquoi et le commentde l'auto-immunité

Date post: 29-Nov-2023
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Les connectivites : la place des anticorps antinucl#aires Article LE POURQUOI ET LE COMMENT DE IJAUTO-IM M U NITI Pierre Youinou a,*, Yves Renaudineau a R6sum~ Le processus auto-immun resulte d'une rupture des mecanismes du maintien de la tolerance vis-&-vis des auto-antigenes. De multiples facteurs, innes et acquis, ont ete incrimines. Cette rupture de tolerance se traduit par une selection et un maintien des lymphocytes Bet T auto-reactifs. C'est ainsi que des auto-anticorps de forte affinite, des complexes immuns ou des lymphocytes T cytotoxiques auto-reactifs peuvent contribuer & la symptomatologie clinique. Maladies auto-immunes - r~ponse immunitaire - rupture de tolerance - lymphocytes - auto-anticorps. Summary : The "why" and the "how" of autoimmunity Autoimmunity results from a break down of mechanisms respon- sible for maintaining tolerance to self-antigens. Multiple factors, innate and acquired, have been implicated. This tolerance break- down conducts to the selection and to the rescue of autoreactive B and T lymphocytes. Then, high-affinity autoantibodies, immune complexes and autoreacfive cytotoxic T lymphocytes may contribute to the clinical symptomatolgy. Autoimmune diseases - immune response - tolerance break down - lymphocytes - autoantibodies. a Laboratoire d'immunologie Centre hospitalier universitaire - B.P. 824 29609 Brest cedex * Correspondance [email protected] article regu le 7 janvier, accept~ le 12 avril 2006. 9 ElsevierSAS. 1. Introduction 7 auto-immunite resulte de rimmunisation d'un organisme centre ses propres constituants. Pourtant, le plus normal d'entre nous pos- sede les lymphocytes B et/ou les lymphocytes T qui en sont respon- sables. Comme leur devergondage se solde par des auto-anticorps et/ou par des cellules cytotoxiques auto-reactives, il est evident que ces effecteurs sont tenus en respect par plusieurs systemes de contr61e. La situation devient pathologique si des agents aussi dan- gereux qu'auto-anticorps et cellules auto-reactives s'en affranchissent. C'est I'eventualite qui correspond & la notion d'auto-immunit~ agres- sive, le seul contexte qui permette & des maladies auto-immunes (MAI) ABREVlATIONS BCR : B cell receptor CG : centregerminatif CI : complex immun CMH : complexe majeurd'histo-compatibilit~ CPA : cellule pr~sentatriced'antig~nes CSF : colony-stimulating factor FR : facteurs rhumatdJ'des G : granulocyte GM-CSF : granulocyte-macrophage colony-stimulating factor GR : globules rouges HLA : humanleucocyte antigen HSP : heatshockproteins IL : interleukine INF : interferon LED : lupus~rythernateux dissemine LLC : leuc~mie lymphd(de chronique LPS : lypopolysaccharides MAI : maladie auto-immunes PR : polyarthrite rhumatdl'de RAG : recombination activatinggenes SRH : syst~me r~ticulo-histiocytaire SSA : siccasyndromea !TCR : T cell receptor TNF : tumor necrosis factor TSH : thyreo-stimulin-hormone VEB : virusd'Epstein-Barr VIH : virus de I'immunod~ficience humaine RevueFrancophone des Laboratoires, juillet-ao~t2006, N ~384 21
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Les connectivites : la place des anticorps antinucl#aires Art ic le

LE POURQUOI ET LE COMMENT DE IJAUTO-IM M U NITI

Pierre Youinou a,*, Yves Renaudineau a

R 6 s u m ~

Le processus auto-immun resulte d'une rupture des mecanismes

du maintien de la tolerance vis-&-vis des auto-antigenes.

De multiples facteurs, innes et acquis, ont ete incrimines.

Cette rupture de tolerance se traduit par une selection et

un maintien des lymphocytes B e t T auto-reactifs. C'est ainsi que

des auto-anticorps de forte affinite, des complexes immuns ou

des lymphocytes T cytotoxiques auto-reactifs peuvent contribuer &

la symptomatologie clinique.

M a l a d i e s a u t o - i m m u n e s - r ~ p o n s e i m m u n i t a i r e - r u p t u r e

d e t o l e r a n c e - l y m p h o c y t e s - a u t o - a n t i c o r p s .

S u m m a r y : T h e " w h y " a n d t h e " h o w " o f a u t o i m m u n i t y

Autoimmunity results from a break down of mechanisms respon-

sible for maintaining tolerance to self-antigens. Mult iple factors,

innate and acquired, have been implicated. This tolerance break-

down conducts to the selection and to the rescue of

autoreactive B and T lymphocytes. Then, high-affinity

autoantibodies, immune complexes and autoreacfive cytotoxic T

lymphocytes may contribute to the clinical symptomatolgy.

A u t o i m m u n e d i s e a s e s - i m m u n e r e s p o n s e - t o l e r a n c e b r e a k

d o w n - l y m p h o c y t e s - a u t o a n t i b o d i e s .

a Laboratoire d'immunologie Centre hospitalier universitaire - B.P. 824 29609 Brest cedex

* Correspondance [email protected]

article regu le 7 janvier, accept~ le 12 avril 2006.

�9 Elsevier SAS.

1. Introduction

7 auto-immunite resulte de rimmunisation d'un organisme centre ses propres constituants. Pourtant, le plus normal d'entre nous pos-

sede les lymphocytes B et/ou les lymphocytes T qui en sont respon- sables. Comme leur devergondage se solde par des auto-anticorps et/ou par des cellules cytotoxiques auto-reactives, il est evident que ces effecteurs sont tenus en respect par plusieurs systemes de contr61e. La situation devient pathologique si des agents aussi dan- gereux qu'auto-anticorps et cellules auto-reactives s'en affranchissent. C'est I'eventualite qui correspond & la notion d'auto-immunit~ agres- sive, le seul contexte qui permette & des maladies auto-immunes (MAI)

ABREVlATIONS

BCR : B cell receptor CG : centre germinatif CI : complex immun CMH : complexe majeur d'histo-compatibilit~ CPA : cellule pr~sentatrice d'antig~nes CSF : colony-stimulating factor FR : facteurs rhumatdJ'des G : granulocyte GM-CSF : granulocyte-macrophage colony-stimulating factor GR : globules rouges HLA : human leucocyte antigen HSP : heat shock proteins IL : interleukine INF : interferon LED : lupus ~rythernateux dissemine LLC : leuc~mie lymphd(de chronique LPS : lypopolysaccharides MAI : maladie auto-immunes PR : polyarthrite rhumatdl'de RAG : recombination activating genes SRH : syst~me r~ticulo-histiocytaire

SSA : sicca syndrome a ! TCR : T cell receptor TNF : tumor necrosis factor TSH : thyreo-stimulin-hormone VEB : virus d'Epstein-Barr VIH : virus de I'immunod~ficience humaine

Revue Francophone des Laboratoires, juillet-ao~t 2006, N ~ 384 21

Les connectivites : la place des anticorps antinucl#aires

de se developper. Effectivement, quand Donath et Landsteiner [1 0] ont ose imputer certaines manifestations pathologiques (l'hemoglo- binurie paroxystique au froid) au premier auto-anticorps d'une Iongue serie, ce fut une revolution !

Ivan Roitt [1 9] a class~ en deux categories les MAI qui en resultent : d'une part, les affections sp~cifiques d'organe (comme la myasthenie, le pemphigus, les anemies hemolytiques auto-immunes, AHAI, le dia- bete juvenile insulino-dependant, et la thyro'fdite d'Hashimoto) ; de I'autre, les affections non sp~cifiques d'organe (comme le lupus ery- themateux dissemin~ [LED], le syndrome de Gougerot-Sj6gren, la scl~- rodermie systemique et la polyarthrite rhumatdfde [PR]). II est Iogique d'incriminer les antigSnes de I'organe cible dans le declenchement des troubles du premier type, alors que, dans celui des troubles du second, c'est forcement le syst6me immunitaire que I'on dolt suspecter.

Dans un cas comme dans I'autre, la tolerance au - sol ,, vole en eclats. Trois conditions doivent 8tre remplies pour que cette rupture soit consommee. De multiples facteurs la declenchent (l'~tiologie), leurs effets se perennisent (la physiopathologie) et des dommages sont occasionnes (la pathog6nie). Aussi, d'innombrables facteurs ont-ils ete accuses de favoriser de tels troubles. Au depart, on distingue les influences acquises et leurs fondements innes. Plus tard, les devoie- ments de la physiologie empechent la tolerance immunologique de s'exercer. Au bout du compte, des lesions se d~veloppent devoilanl I'effet pathogene des derniers acteurs de la cascade.

La reponse immunitaire depend des rapports que deux systemes de reconnaissance entretiennent I'un avec I'autre (figure 1). Du c6t~ de la cellule presentatrice d'antigenes (CPA), s'activent les molecules du complexe majeur d'histo-compatibilit~ (CM H) dans lesquelles se sont

<

Les molecules HLA transportent les peptides resultant du debitage de I'antig~ne & la surface de la cellule presentatrice d'antig~ne et le tendent au T cell receptor (TCR) d'un lymphocyte T. Ce TCR est flanqu~ d'une molecule CD4 sur les T auxi- liaires, mais c'est une molecule CD8 sur les T suppresseurs et sur les T cytotoxiques.

coules les peptides qui persistent apres le debitage de I'antigene. De I'autre cSte, celui de la cellule effectrice, s'activent des recepteurs d'an- tigenes, les immunoglobulines de membrane du B cell receptor (BCR) s'il s'agit d'un lymphocyte B, les heterodimeres cq5 du Tcell receptor (TCR) si c'est un lymphocyte T.

Le scenario est toujours le meme. Les reliquats de proteine sont retro- cedes aux lymphocytes T par les molecules du CMH (figure 2). On distingue les molecules human leukocyte antigen (HLA) de classe I prepos~es aux auto-antigenes sur la totalite des cellules de I'organisme, et les molecules HLA de classe II charg6es des exo-antig~nes & la sur- face des seules CPA. Elles sont toutes extraordinairement poly- morphes. Les structures de classe I unissent une glycoproteine ct for- m6e de trois domaines & I'immuable 132-microglobuline par une liaison non covalente. Le polymorphisme du complexe se reduit donc& une ou plusieurs zones d'hypervariabilite situees de preference dans le domaine le plus externe de la chaine ct. En revanche, les molecules HLA de classe II se presentent sous la forme d'heterodim~res asso- ciant deux chaines, ct et 15, pourvues de deux domaines. La premiere est relativement constante, la seconde extremement variable. En effet, c'est I& que se trouvent la majorite des determinants allotypiques, ceux qui font la difference entre une molecule HLA-DR1 par exemple, et une molecule HLA-DR5 par exemple.

Cavit6 de liaison

# au pepuue ,~

: ? L, :i

CMH de classe I CMH de classe II

Molecules HLA de classe I (la chaine a est form6e de trois domaines et associ6e une chaine de ~2-microglobuline) et molecules HLA de classe II (h~tero-dim~res

unissant une chaine ctl/ct2 & une chaine I~1/1~2). La cavite de liaison au peptide anti- genique figure de part et d'autre.

Trois observations permettent d'appliquer ces notions au cas particulier de I'auto-immunit& D'abord, si un lymphocyte B capte un antigone, c'est par ses immunoglobulines de membrane. II peut 6videmment pro- venir du soi et les auto-peptides qui en derivent etre pris en charge par des molecules HLA de classe II, et non par des mol6cules HLA de classe I, comme le prevoit la regle. Ensuite, I'exces d'expression des molecules H LA propre b. toute MAI desynchronise la synthese des molecules de classe II de celle des chaines invariantes, les secondes 6tant censees assurer le contrSle des premieres. Ce d6bordement de la synth~se des molecules HLA les emancipe : il n'y a plus de contr61e. Ce qui leur permet de charger des auto-antigenes, et non pas des exo- antigenes comme d'habitude. Enfin, les glycoproteines de la membrane de la cellule, comme les substances qu'elle synthetise et secrete, peu- vent, elles aussi, etre appretees par des molecules HLA de classe II, bien qu'il s'agisse d'auto-antig~nes authentiques, cette fois encore.

2 2 Revue Francophone des Laboratoires, juillet-ao0t 2006, N ~ 384

Les connectivites :/a place des anticorps antinucl#aires Article

La finalite de I'operation n'a pas change. L'objectif est toujours d'ex- porter les antigenes A la surface des cellutes. Leur mission est de les retroceder A des cellules effectrices. Ces CPA peuvent etre ,, pro- fessionnelles ,, comme les macrophages et les cellules dendritiques ,, occasionnelles ,, comme les lymphocytes B e t les cellules endo- theliales, ou ,, accidentelles ,, comme les fibroblastes et les cellules epitheliales.

2.2.1. Activation des lymphocytes T

Les lymphocytes T auxiliaires prennent le relais et leur TCR, cueillent le peptide que leur tendent les molecules HLA de classe II d'une CPA. Deux cents copies de ce peptide suffisent pour que la mobilisation du lymphocyte T auxiliaire correspondant soit irreversible. Son activation A lui ne s'ebranle que sous I'effet cumulatif de deux signaux : ils declen- chent la proliferation, puis la differenciation de cette cellule. Le pre- mier est le peptide que la molecule HLA a glisse clans son TCR : il est specifique. Le second ne rest pas, constitue par une salve de cyto- kines. Elles sont destinees aux lymphocytes T auxiliaires [l'interleukine (IL)-2 ou I'interferon (INF)-c( par exemple], aux lymphocytes B (rlL-4 et rlL-6 par exemple) et aux macrophages (I'IFN-y et I'lL-5 par exemple).

Les lymphocytes B ne fonctionnent pas comme les lymphocytes T, puisque leurs recepteurs d'antigenes s'adaptent A la structure tridi- mensionnelle d'une proteine, et non plus uniquement h sa structure lineaire comme ceux des lymphocytes T. La proteine peut donc 6tre interceptee par ce BCR, internalisee et coupee en petits morceaux. Les peptides residuels sont transportes jusqu'A la membrane par les molecules du CMH qui les transmettent A un lymphocyte T ou #. un autre lymphocyte B. Ces CPA-IA sont occasionnelles.

2.2.2. Transmission du message antig~nique

Au coeur de ce dispositif, evoluent les lymphocytes T-CD4. Une fois qu'ils ont ete mobilises par les CPA des marqueurs d'activation, comme les molecules HLA de classe II et des recepteurs de forte affinite pour I'lL-2 affleurent A leur surface. Une lois que c'est fait, les cellules acquit- rent le pouvoir de transmettre le message antigenique A d'autres lym- phocytes T ou A des lymphocytes B. En effet (figure 3), ~ partir des lymphocytes T auxiliaires, ou T helper (Th)-0, les lymphocytes T auxi-

ThO

Thl IFN I L- 12 ~J' S~'

1 IL-IO

[hypersensibilit~ retard6e 1

Les lymphocytes T helper (Th) originaux peuvent se differencier en Th-1 qui pro- duisent, entre autres, interleukine (IL)-2 et interferon (IFN)-y et favorisent la reponse & mediation cellulaire (hypersensibilit(~ retardee). Ailleurs, I'evolution se fait vers les Th-2 qui secretent, entre autres, 11--3 et IL-10 et avantagent une reponse A media- tion humorale (production d'anticorps). I 'IFN-y des premiers freinent les Th-2, quand I'lL-10 des derniers contiennent les Th-1.

liaires-CD4 se resolvent en Th-1 qui secretent IL-2, tumor necrosis factor (TNF) et IFN-y pour favoriser la reponse A mediation cellulaire et en Th-2 qui produisent IL-4, IL-6 et IL-10 pour avantager la reponse A mediation humorale. On decrit egalement des Th-3, mais leur origine n'est pas claire.

II est interessant que I'IFN-y des Th-1 contrecarre les Th-2, pendant que I'lL-10 de ces derniers neutralise les Th-1. Si c'est un macrophage qui a presente I'antigene tout en secretant de I'IFN-c( et de rlL-12, la reaction s'oriente plutet dans le sens Th-l. Mais, si ce sont des lym- phocytes Bet que I'environnement fournisse de I'ILo4, c'est plut6t en Th-2 que se muent les Th-0. Neanmoins, dans certains mocleles, la molecule co-stimulante B7-1 des lymphocytes B (CD80), dont le recepteur est la molecule CD28 des lymphocytes T, promeut des Th-1 & partir des Th-0, tandis que les molecules B7-2 (CD86), dont le recepteur est CTLA-4, selectionne des Th-2.

2.2.3, La cascade des r~actions

Un encha~nement de reactions est ainsi amorce par la pichenette de la CPA... quelle que soit cette CPA. Mais pour 6tre operationnel, un lymphocyte B doit etre seconde par un lymphocyte T-GD4. Charge & lui de surprendre I'antigene, de s'en approprier le segment porteur et d'en retroceder le segment haptene & un lymphocyte B. II est entendu qu'A ce concept classique d e , pont antigenique ,, qui est primordial pour comprendre la tolerance immunitaire, s'est substitue le concept moderne de ,, pont peptidique ,, qui, lui, est indispensable pour com- prendre le mimetisme moleculaire. Du moins quand il concerne les lym- phocytes T, c'est-&-dire quand il se refere & la structure lineaire de I'an- tigene, et non pas au resultat tridimensionnel de son organisation dans I'espace.

Tout cela se deroule dans une zone T de I'organe lymphdide secon- daire (figure 4), avant que I'antig~ne ait selectionne un lymphocyte B pour creer un nouveau centre germinatif (CG) dans le follicule lym- phdfde primaire voisin.

2.3.1. L'apoptose

Une cellule commence-t-elle #. proliferer (la vie !), que le systeme qui en regule rapoptose se met en branle (la mort !). Heureusement, car la moelle osseuse produit beaucoup trop de lymphocytes (106 616-

I / ~'l~_ti~ d e s ~ ~

Ce follicule lymphdfde d'amygdale abrite un centre germinatif avec une zone, sombre en bas ou s'accumulent centroblastes et centrocytes et une zone claire en haut o0 se d~roule la commutation de classe des IgM vers rlgG. L'ensemble est couronne par la zone dite ,, du manteau ,,.

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Les connectivites : la place des anticorps antinucl#affes

ments par jour) par rapport aux besoins de I'organisme. A la diffe- rence de la n(~crose, I'apoptose doit ~tre programmee puisque, cette fois-I&, c'est un phenomene actif. Dans la majorite des cas d'apop- tose, des endonucleases scindent I'ADN en nucleosomes et com- pactent les elements du noyau et du cytoplasme en corps apopto- tiques. De ce fait (figure 5,), la cellule devient hypopld/de et, sur un gel d'electrophorese, son ADN se decompose pour adopter un aspect ,, en escabeau ,,. Instantanement, les corps apoptotiques sont recup6res par les macrophages qui les phagocytent. Dans le cas par- ticulier du thymus, la clairance des cellules sacrifiees est tellement precipitee qu'on n'a m6me pas le temps de la voir quand on la cherche dans un tissu. Si on prend I'exemple d'une coupe de thy- mus, on n'y trouve pas de cellules en apoptose, alors que les cellules indesirables disparaissent de cette fa~on. L'activation des endonu- cleases est amorcee, en particulier, quand le ligand de Fas (FasL) s'est engouffre dans le recepteur Fas (FasR). Qu'ils soient T ou qu'ils soient B, ces lymphocytes expriment & la fois FasL et FasR, des qu'est lancee leur activation [18]. L'introduction dans son r~cepteur et I'in- sertion du ligand CD40 d'un lymphocyte T auxiliaire dans le recep- teur CD40 d'un lymphocyte [] constituent deux autres signaux. N'importe lequel des deux emp~che la cellule de succomber sous I'effet de la reaction entre FasL et FasR. (~a n'est evidemment pas la seule raison qu'a un lymphocyte d'entrer en apoptose. Parmi d'autres, citons I'impact du TNF-cq raction des glucocorticoides et I'exces de rayons ultra-violets. Uantigene produit des effets plus ambi- valents que les agents precedents sur I'oncogene c-myc : il le rend anti-apoptotique quand il y a de I ' lb2 dans les parages, mais en fait un facteur pro-apoptotique quand il n'y en a pas. Le FasL peut se cou- ler dans le FasR de la mCme cellule (c'est un suicide) ou s'arroger celui de la voisine (cette fois, c'est un fratricide). Plusieurs proteines, comme Bax et Bad, ont pour mission d'appliquer le programme natu- rel de la cellule dans laquelle elles sont exprimees et, donc, de faci- liter I 'apoptose spontanee ; pour d'autres proteines, Bcl-2 et Bcl-xL par exemple, c'est au contraire, d'enrayer I'apoptose qui est le des- tin naturel de n'importe quelle cellule.

2.3.2. Les lymphocytes T suppresseurs

Uexistence des lymphocytes T suppresseurs a et6 contestee par cer- tains auteurs, au pretexte qu'il etait possible d'obtenir le m6me resul- tat en rempla?ant ces lymphocytes T suppresseurs par des lympho- cytes T cytotoxiques : les premiers ne sont pas plus indispensables

<GI t/

G0/G1 S/G2

Contenu en ADN/cellule

#

J/

Au cours de I'apoptose, I'ADN est fragmente et les cellules deviennent hypopld/des. Ce qui est d~tect6 par cytofluorometrie (pattie gauche de I'histogramme, a. gauche). Sur un gel d'e]ectrophorbse (& droite), rADN se presente sous forme de nucleosomes (c'est I'aspect dit ~ en escabeau ,,).

que les seconds. Les lymphocytes T cytotoxiques se comportent de la m6me fa?on que si ils etaient des vrais lymphocytes T suppresseurs. L'on ne fait, peut-etre, que jouer sur les mots. Toutefois, force est d'ad- mettre que ]a reponse immunitaire est vraiment freinee par certaines cellules : le phenomene de la suppression existe bien. D'aucuns sou- tiennent meme qu'il y a au moins quatre categories de lymphocytes T suppresseurs (figure 6) : les lymphocytes T suppresseurs specifiques des idiopeptides derives des recepteurs d'antigenes, les lymphocytes T suppresseurs specifiques des molecules HLA, les lymphocytes T suppresseurs specifiques de I'antigene et meme des lymphocytes T suppresseurs sans specificite du tout.

TS sp~cifique du TCR

TS sp~cifique TCR du HLA

T auxi l l ia ire

d'antig~ne "~,4 U:,~-m,

Cellule ~ M I I p r ~ s e n t a t r i c e

d'antig/~ne / " ~

TS non sp~cifique

Dans cette noria de lymphocytes T suppresseurs (TS), on distingue & partir de la ceUule presentatfice d'antig~nes et dans le sens des aiguilles d'une montre : des TS specifiques d'antigenes, des TS specifiques du T cell receptor (TCR), des TS specifiques de la molecule HLA du complexe majeur d'histocompatibilite (CMH), et des TS qui ne sont specifiques de rien du tout.

2.3.3. Le r6seau idiotypique

Tout recepteur d'antigene est contr61e par un membre du r6seau idio- typique, sachant que I'idiotype de la complement-determining-region de n'importe quel BCR et de n'importe quel TCR n'est jamais qu'un cas particulier d'auto-antigene (figure 7). Si on n'envisage que le ver- sant humoral de la reponse immune, on peut dire que chaque anticorps possede un idiotype jugule par un autre anticorps qui est un anticorps anti-idiotype. Mais, I'anticorps musele par I'intermediaire de son idio- type, il a, lui-m~me, pris en charge I'idiotype d'un troisieme anticorps. II est donc evident que ces anticorps anti-idiotypes ne sont jamais que des auto-anticorps naturels parmi d'autres.

3. Les facteurs etiologiques

3. t . Fac teurs innes

3.1.1. Observations familiales

L'objectif est de s'assurer que la frequence du LED, par exemple, est plus 6tevee dans la famille des malades connus que dans celle des t6moins normaux. Effectivement, la prevalence de cette affection grimpe

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Les connectivites : la place des anticorps antinucl#aires Article

Ab anti-anti-idiotype

> " A b l anti-a

Ab2 anti-idiotype anti-b

Uanticorps antiqdiotype (abl) de droite reproduit la structure de I'antigene a, car il est reconnu par un anticorps dont le paratope se fixe egalement & I'antigene ,, a >, externe. En revanche, I'anticorps anti-idiotype du milieu reconnaft I'idiotype de Pan- ticorps anti-,, a ,, mais est dirig6 contre I'antigene ,, b ,,, tout en etant contr616 par I'anticorps de gauche (qui est donc anti-anti-idiotype).

& un pour 100 chez les parents d'un malade, alors qu'elle culmine & un pour 2 000 chez ceux d'un temoin. II n'est donc pas 6tonnant de trouver des families renfermant plusieurs cas de LED [16]. Les jumeaux constituent, & cet 6gard, une sorte d'experience de la nature : la concor- dance entre le propositus (malade ou sain) et son germain (malade ou sain) depasse 60 pour cent si ces jumeaux sont monozygotiques, mais elle tombe & 10 pour cent s'ils sont dizygotiques. II arrive, cepen- dant, que la maladie dont souffre le parent differe de celle dont se plaint le propositus. Mais si ce dernier contracte une affection non specifique d'organe, il y a toutes les chances, dans le cas o0 Pun de ses parents souffre d'une MAI, pour que ce soit egalement une MAI non specifique d'organe dont il souffre. En revanche, s'il s'agit d'une affection spe- cifique d'organe chez le propositus, c'est plutet un tableau specifique d'organe que son parent est susceptible de developper. De nom- breuses families ont 6t6 decrites avec un LED assorti d'une PR dans I'une, un pemphigus double d'une anemie de Biermer dans I'autre.

La resurgence familiale peut se limiter & la biologie. Les parents du malade ne souffrent pas toujours d'un LED avere, mais ils en offrent souvent des equivalents serologiques comme les anticorps anti- nucleaires (AAN). En revanche, ce sont des facteurs rhumatdfdes (FR) que produit le parent si le propositus souffre d'une PR. De m6me, dans la famille d'un patient atteint de thyrd(dite d'Hashimoto, 6closent des anticorps contre la thyroglobuline, contre la peroxydase thyro'(dienne ou contre les cellules parietales de I'estomac.

�9 ~ un degre encore inferieur, it n'y a meme plus d'equivalents biolo- giques de la MAI dans la famille du malade, mais simplement les idio- types dont on salt qu'ils sont associes a des auto-anticorps. En theo- rie, toutes les immunoglobulines issues des cellules d'un clone expriment I'idiotype qui en est la marque de fabrique. Dans la realite, certains d'entre eux ne se restreignent pas & un seul clone (idiotypes ,< prives ,,), car ils debordent sur les immunoglobulines de plusieurs clones et concernent plusieurs individus (idiotypes ,, publics ,,). Au cours de telle ou telle maladie, un idiotype predomine sur I'auto-anti- corps qui en est I'arme du crime. C'est tout bonnement un auto-anti- gene ; son niveau s'eleve quand monte celui de I'auto-anticorps qui le porte. Le taux de I'anticorps charge de contenir I'auto-anticorps expri- mant cet idiotype augmente, lui aussi. On retrouve donc toujours le m6me idiotype public chez tes victimes de la maladie en question. II est

d'ailleurs possible de produire des anticorps monoctonaux qui I'ex- priment, en hybridant les lymphocytes B d'un lupique avec des cel- lules myelomateuses de souris, puis de fabriquer d'autres anticorps monoclonaux diriges contre I'idiotype public de ces anticorps mono- clonaux auto-reactifs. IIs servent & depister I'idiotype caracteristique des auto-anticorps dans le serum ou darts un organe, comme la peau ou les reins. Sa frequence chez les parents de malades est interme- diaire entre celle que I'on trouve chez les patients et celle clue I'on trouve chez les temoins.

3.1.2. Associations avec les al leles du syst~me HLA

La litterature regorge d'associations entre MAI et alleles H LA. C'est le cas, notamment, du syndrome de Gougerot-SjSgren lie & A1 B8DR3, du LED lie & DR2 et & DR3 et du diabete juvenile insulino-dependant lie & DR3, & DR4 et surtout aux deux & la fois. Le probleme cle la PR est & mettre & part. On y rencontre la famille des alleles DR4 chez 60 #, 80 pour cent des malades en Europe, mais c'est I'antigene DR1 que d'autres populations favorisent. En fait, la predisposition & cette maladie n'est pas due & n'importe quel allele de la famille DR4, elle est I'apanage de certains d'entre eux, le Dw4, le Dwl 4 et le Dwl 5. Lesquels partagent un quintette d'acides amines sur le troisieme seg- ment hyper-variable du domaine variable de leur chafne 13. II est inte- ressant de le retrouver sur I'allotype DR1 des autres populations. D'ailleurs, les residus des trois sous-types DR4 de la PR sont plus proches les uns des autres et de ceux des DR1, que des sous-types Dwl 0 et Dwl 3, alors qu'il s'agit de DR4 dans les premiers sous-types et dans les seconds.

II faut noter que certains haplotypes sont associes & des anomalies biologiques et non & des maladies parfaitement inventoriees. C'est le cas d'HLA-A1B8DR3 qui favorise I'apparition des AAN dans le syndrome de Gougerot-Sjegren, mais n'a joue aucun rele ,dans le developpement du syndrome de Gougerot-Sjegren & prop, rement parler. On a egalement insiste sur le polymorphisme des genes codant une pleiade de cytokines, mais certains de leurs alleles pour- raient 6tre associes & I'allele DR3 du CMH, en particulier dans le LED. Depuis quelques annees, on insiste aussi sur le polymorphisme des recepteurs de type II pour le Fc des IgG au cours de la m6me affection, car certains alleles y predisposent aux MAI non specifiques d'organes.

3.1.3. D~ficits en compldment

Les deficits hereditaires en composants du complement ne sont pas frequents. II en existe deux sortes : ceux des molecules intervenant plus basque C3 (ils provoquent plutet des infections repetees) et ceux des molecules intervenant plus haut (ils favorisent plutet les MAI). La carence en C2 est la moins rare de ces anomalies. On estime que 40 pour cent des sujets homozygotes pour le gene du C2 deficitaire developpent un LED et qu'& I'inverse six pour cent des lupiques tout- venant presentent cette particularite genetique, au moins & I'etat hete- rozygote. Les alleles silencieux QO de C4A et QO de C4B predis- posent egalement au LED. Pris individuellement, chacun de ces alleles silencieux est frequent, mais la probabilite pour qu'il yen ait quatre en meme temps, c'est-e-dire que I'anomalie se solde par une carence en C4, est negligeable. Et meme.., peut-6tre est-ce en raison du dese- quilibre de leur liaison avec I'haplotype HLA-A1 B8DR3. Le deficit en C1 q, C l r ou C1 s est frequemment associ6 & un LED. Dans le cas du C1 q, le deficit peut 6tre autonome ou succeder & une carence en inhi- biteur pour le C1 esterase, ce qui entrafne une consommation par un oedeme angio-neurotique. Quant au deficit de la surface des globules rouges (GR) en recepteurs pour le complement, on ne salt pas si c'est la cause car il existe chez les parents du malade, ou si c'est la conse- quence de I'inflammation car il augmente au moment des poussees du LED.

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Les connecfivites : la place des anticorps antinucleaires

3" 1.4. ModUles exp~rimentaux

Parmi les tr~s nombreux modeles murins de LED spontane, il n'y en a aucun qui reproduise fidelement, exclusivement et totalement la mala- die humaine. IIs ont quand meme aide & comprendre la physiopatho- Iogie de cette affection prodigieusement heterogene. On cite le LED de rhybride F1 entre la souris New Zealand Black et la souris New Zealand White, ou BW, celui de la B/SB et celui de la MRL Ipr/Ipr. Les anomalies immunologiques ne sont evidemment pas les memes dans ces trois lignees de souris anormales. Toutefois, il semble que le CMH soit moins engage dans la predisposition genetique au LED chez toutes les souris que chez I'homme. En effet, le phenotype H2 differe d'une lignee malade & une autre (la souris BW est H2 d/z, la B/SB H2 b/b et la MRL H2 k/k) et chacun des haplotypes incrimines se retrouve dans des lignees de souris normales (NZWx Balb/c F1 est H2 d/z, la C57 BI6 H2 b/b et I'AKR H2k/k).

Plusieurs genes ,, accelerateurs ,, ont ete identifies, en particulier le gene autosomique Iprde la souris MRL et le geneyaa du chromosome Y de la souris B/SB. De plus, ce qui n'est ni inclus dans le CMH, ni qualifie d'accelerateur.., bref, tout le reste du genome.., ne peut pas etre totalement etranger & cette predisposition. D'ailleurs, si on croise le fond genetique de la B/SB avec celui de la BW, on exagere le LED de I'hybride car les dysfonctionnements propres & chacune de ces deux lignees se cumulent. En revanche, si c'est avec celui de la MRL Ipr/Ipr qu'est croise le fond B/SB, on escamote le LED de I'hybride puisque les carences de chacune des deux lignees sont palliees par les genes de I'autre. De plus, si le gene Ipr, cense exacerber les MAI, est intro- duit dans un contexte genetique normal, on ne volt eclore que de vagues anomalies serologiques.

3.2.1. Micro-organismes

Les retrovirus ont ete soupgonnes bien avant que I'on ait constate que les individus infectes par le virus du syndrome d'immuno-deficit acquis (sida) produisaient une efflorescence d'auto-anticorps. Bien que I'influence de ce virus sur le cours du LED, celui de la sclerodermie systemique et celui du syndrome de Gougerot-Sjegren ne soit pas encore formellement etablie, plusieurs observations permettent de I'en- visager : I'analogie entre la structure de I'ADN purifie & partir de serums lupiques et celle des genes gag ou pol du VI H-l, I'apparition d'un syn- drome de Gougerot-Sjegren chez la souris & qui le gene retroviral tax a ete transfecte, la proliferation de particules virales dans des lym- phocytes cultives en presence de cellules exocrines de patients et la reactivit6 des serums des malades souffrant d'un syndrome de Gougerot-Sjegren vis-&-vis de la proteine p24 du virus de I'immuno- deficience humaine (VlH)-I ou de la proteine p l 7 du VlH-2. D'autres virus que ceux du sida ont ete mis en examen dans cette MAI : celui qui cause I'hepatite C et ceux qui sont sialotropes comme le virus d'Epstein-Barr (VEB) et le cytomegalovirus.

La PR est un autre exemple interessant. On y a incrimine, entre autres, le virus de la rubeole, les mycobacteries, le parvovirus et le VEB. Ce dernier reste un candidat serieux. Un titre eleve d'anticorps anti-VEB a ete signale par plusieurs auteurs au cours de la maladie. En face de ce virus, la proliferation des lymphocytes B des patients est exageree car leurs lymphocytes T cytotoxiques specifiques sont deficitaires. De plus, il induit une activation polyclonale des lymphocytes B et il immor- talise une poignee d'entre eux.

On sait provoquer une arthrite chez le rat en lui injectant des myco- bacteries emulsifiees dans I'huile de I'adjuvant complet de Freund. Cet adjuvant est riche en proteines de stress, ou heat shock proteins (HSP), et capable d'en induire la synthese chez I'animal & qui on ra adminis- tr& L'une de ces proteines, I'HSP-65, partage plusieurs de ses

sequences avec des proteines du cartilage, quelques antigenes du VEB et meme certains allotypes de molecules HLA de classe II. De plus, des IgA contre la proteine HSP-65 ont ete detectes au cours de la PR.

3.2.2. Mddicaments

On admet, depuis belle lurette, que beaucoup de drogues favorisent I'eclosion des auto-anticorps (les AAN sont particulierement frequents dans ce contexte), voire le developpement d'une authentique MAI (le LED est I'archetype de ces affections induites). C'est ce qui se passe en presence d'alpha-methyl dopa, de procainamide, de pyrazolone, de chlorpromazine, d'hydrazaline et de D-penicillamine. D'autres medi- caments provoquent AHAI, hepatites, pemphigus ou myasthenies. Certains d'entre eux modifient la conformation de I'auto-antigene auquel ils se sont fixes, ce qui les rend immunogenes ; d'autres favorisent la production de I'lL-2, ce qui leve ranergie de certains lymphocytes T auto-reactifs.

3.2.3. Ultra-violets

Les rayons ultra-violets declenchent une synthese de I'11_-1 par les cel- lules de Langerhans de la peau et favorisent la translocation de leurs proteines depuis le noyau jusqu'& la membrane plasmique. Sans doute, est-ce une consequence de I'apoptose des keratinocytes, car toutes ces proteines pourraient etre regroupees au fond des corps apopto- tiques avec les autres antigenes du noyau, de maniere #. Ctre pre- sentees en bloc aux cellules du systeme immunitaire. En plus, les rayons alterent I'ADN des noyaux en appariant de la cytosine & la thy- mine : ce qui pousse & I'auto-immunite puisque cette rencontre inso- lite est bien plus immunogene que I'enchainement naturel des nucleo- tides.

3.2.4. Hormones

Indiscutablement, les MAI sont plus frequentes chez la femme que chez I'homme, non pas en raison des particularites genetiques, mais & cause des differences de nature entre les impregnations hormonales. D'ailleurs, I'influence de la grossesse dans leur evolution est specta- culaire, exacerbant un LED et apaisant une PR... ce qui est bizarre ! Le modele murin qui reprend le mieux cette caracteristique humaine est celui de la BW. Dans cette race de souris, la castration retarde la survenue des anomalies chez la femelle, alors que I'injection d'oes- trogenes en precipite I'apparition chez le m&le./~, I'inverse, la castra- tion du m&le exacerbe I'auto-immunite alors que I'administration d'an- drogenes & la femelle en freine le developpement. Ce qui suggere que les oestrogenes favorisent ce type d'affections, mais cela indique aussi qu'elle sont prevenues par les androgenes.

3.4. k~6,~::anismes de ia to ierar, ce

3.4.1. Tolerance T

,&, peine sortis de la moelle osseuse, les lymphocytes T gagnent le thy- mus. La reaction immunologique qui s'ensuit enchafne deux recon- naissances : dans un premier temps, celle des molecules HLA de classe II par les glycoproteines CD4 et celle des molecules HLA de classe I par les glycoproteines CD8 ;dans un deuxieme temps, c'est la reconnaissance des antigenes par les TCR correspondants. Une selection sous-tend chacune de ces deux reactions. La premiere, posi- tive, se deroule dans le cortex thymique : les lymphocytes T dotes d'un TCR se fixant avec une faible affinite aux molecules H LA (vides de pep- tide d'antigene ace stade) sont les seuls qui soient retenus, les autres sont executes par apoptose. Une seconde selection, negative, attend le lymphocyte T dans la medullaire : ceux dont le TCR reconnaft les peptides dent les molecules HLA ont 6te garnies entre-temps, sont egalement detruits par apoptose.

2 6 Revue Francophone des Laboratoires, juillet-aos 2006, N ~ 384

Les connectivites : la place des anticorps antinucldaires Article

Bref, nous venons d'assister au double tri de trois sortes de lympho- cytes T : ceux qui sont nuisibles, ceux qui sont indispensables et ceux qui ne sont ni nuisibles, ni indispensables. Les cellules de cette der- n/ere categorie n'ont meme pas/ranch/I'obstacle de la selection posi- tive car /Is n'ont pas reagi en face des molecules HLA. C'est au moment de la deuxieme epreuve que les lymphocytes T potentielle- ment nocifs ont 6te reperes, car leur affinite pour les auto-peptides 6tait dangereusement forte. Tant est si bien que ne survivent que cinq cel- lules sur les cent qu'il y avait au depart ; celles-la, reconnaissent les molecules HLA (premiere selection) et ne se fixent aux peptides qu'avec une affinite faible (deuxieme selection). II est amusant de constater qu'une bonne partie de ces peptides proviennent de la degra- dation des proteines HLA-I et HLA-II elles-memes.

En quelque sorte, les molecules HLA prelevent dans une reserve les peptides qu'elles vont exporter jusqu'& la membrane, tout en partici- pant, elles-memes, & son approvisionnement. I 'apoptose qui efface les lymphocytes les moins utiles et pulverise les plus dangereux ne depend pas du systeme FasL/FasR. En effet, chaque cellule re?oit deux signaux antagonistes : I'appariement entre le TCR et le peptide est le premier d'entre eux, il induit I'apoptose, mais les glucocorticdfdes sont 6ga- lement capables de le faire. Chacun des deux signaux annihile les effets de I'autre quand/Is sont soil/cites en meme temps. Des Iors, trois even- tualites : si le TCR ignore le peptide, I'apoptose est declenchee par les glucocorticdfdes et les autres cellules sont ,, positivement ,, selec- tionnees ; s'il se fixe & I'antigene avec une affinite forte, cette reaction acquiert suffisamment de puissance pour engager l'apoptose en depit des glucocorticdfdes et les autres cellules sont ,, negativement ,, selec- tionnees ; si la reconnaissance est approximative et I'affinite faible, les deux signaux se neutral/sent mutuellement et la cellule est epargnee.

La mise sous tutelle des lymphocytes Test parachevee dans le sang circulant. II est exceptionnel qu'& la difference des genes responsables des parties variables des BCR, ceux qui codent les parties variables des TCR/assent I'objet de mutations. L'emergence intempestive d'un clone T auto-reactif est donc improbable. D'ailleurs, cette sorte de lym- phocyte est placee sous le contrele permanent des lymphocytes T sup- presseurs.

3.4.2. Tolerance B

Quand le systeme immunitaire selectionne les ant/corps du repertoire de ses lymphocytes B, il favorise ceux qui se comportent comme des auto-ant/corps de faible affinite [6]. II n'empeche, leur specificite est inversement proportionnelle h cette negligeable aft/nit& Beaucoup de ces lymphocytes B arborent & leur surface la molecule CD5 (figure 8),

recourent & des genes germinaux et secretent des immunoglobulines de classe IgM. Cependant, i lest possible que deux sortes de lym- phocytes B CD5+ coexistent [21]. Les uns, dans les organes lym- phdfdes primitifs et dans le cordon ombilical, pourraient 6tre innes ; les autres, dans le manteau des follicules lymphdfdes secondaires, devraient 6tre acquis. II s'agirait dans le premier cas de I'expansion d'une lignee autonome de lymphocytes ; dans le second, de la conse- quence d'une activation susceptible d'impliquer n'importe quelle cel- lule B. Mais si le debut de I'ontogenese privilegie les lymphocytes B qui expriment CD5 par rapport & ceux qui ne le font pas, c'est cer- tainement parce que le rele que leur reserve I'organisme est impor- tant. Peut-etre, leur incombe-t-il de desamorcer la production des auto- anticorps pathogenes en evacuant les debris du catabolisme cellulaire. Ou alors.., leur intervention facilite-t-elle la presentation de I'antigene par les lymphocytes B. En effet, & cause de la polyspecifi- cite de leurs immunoglobulines de membranes, les lymphocytes B CD5+ en captent davantage que les autres lymphocytes B, meme si I'affinite des reactions entre de tels BCR et n'importe lequel ,des anti- genes de ce panel est derisoire. ~a permet de parer au plus presse. Ces lymphocytes B CD5+ sont capables de traiter d'autant plus d'an- t/genes que la plupart d'entre eux peuvent 6tre incorpores dans un complexe immun (Cl) & IgG. C'est le Fc de cette immunoglobuline, et non pas I'antigene & proprement parler (figure 9), qui sera reconnu par les BCR des lymphocytes B CD5+ car beaucoup de ces BCR affichent, entre autres, une activit6 FR.

LB CD5+

UIgM de membrane du lymphocyte B CD5-positif capte I'lgG du complexe immun parce que c'est un facteur rhumatdfde (FR). Uantigene est ainsi insere daris le Tcell receptor (TCR) d'un lymphocyte T auxiliaire.

lgD faible

Ly.lp|ioc~l~ B %_~' IgM extra/is d'amygdale r "

~ [ Switch et h,'permutation I .......... . . . . . . . . . . . . . . . . ~ r ~ ; somafique faib|e

} Swq~eh et hypermutafion i CD l 9-FITC ~ ~mat/que n~-malc

J Ac de forte affinit~

Lymphocytes B -CD5 identifies par cytofluorometrie, gr&ce au double marquage (anti- CD5 marque 9. la phycoerythrine en ordonnee, et anti-CD19 rnarqu6 & I'isothiocyanate de fluoresceine en abscisse). En haut, les lymphocytes B CD5-positifs (minoritaires) ; en bas, les lymphocytes B CD5-n6gatifs (majoritaires).

On sait egalement que la molecule CD5 est I'un des instruments de I'anergisation d'un lymphocyte B. Quand un antigene est cue/Ill par le BCR, I'echo de cette prehension est transmis jusqu'au noyau cle la cel- lule. Cette transmission revient aux molecules activees par la phos- phorytation sequentielle des tyrosines de leurs immune tyros~he-acti- vating motifs. Une fois que ces tyrosines ont ete phosphorylees et que le message a ete transmis b. la molecule suivante, les phosphatases reprennent le dessus et 6tent les phosphates qui n'ont plus rien & faire dans cette cascade. Certaines d'entre elles (comme CD45), sont atta- chees & la membrane ; d'autres, recrutees dans le cytoplasme par les molecules CD5, CD22 et CD72 qui sont chargees de les transpor- ter jusqu'& la membrane.

En fait, tout se passe comme s'il surf/salt de hausser le seuil de reponse du lymphocyte. Quand cela se produit, le niveau des soil/citations capables de le faire reagir augmente, (ce qui anergise la cellule et lui impose la tolerance). D'autres marqueurs abaissent le seuil et les cel- lules s'ebranlent sous I'effet de soil/citations tellement faibles qu'elles seraient inefficaces si ces marqueurs ne leur avaient pas faci-

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Les connecfivites : la place des anticorps antinucl6aires

lite la t&che. Uarchetype de ces proteines est CD19. Une souris, dont le gene CD22 a ete 6te, developpe un syndrome auto-immun, comme celle & qui un gene CD19 a ete transfecte [8]. D'ailleurs, le rapport entre les molecules qui elevent et les molecules qui abaissent le seuil de la reponse diminue au cours de la sclerodermie systemique. Cette chute est de 10 & 20 pour 100. Ce n'est pas beaucoup, mais (~a suf- fit pour que les lymphocytes B auto-reactifs soient I&ches.

La transduction du message & partir du BCR est un phenomene capi- tal. Tellement que beaucoup d'efforts ont ete consentis & son etude depuis quelques annees. Cinq & 10 pour 100 des cellules B d'un sujet normal equipent leurs BCR de molecules CD5 ; cinq pour cent, c'est tres peu. Uaccessoire CD5 n'a pas pour fonction d'amplifier la reponse, comme il le fait dans les lymphocytes T, mais de la diminuer. Cette fois, le seuil d'excitabilite de la cellule est sureleve par la phosphatase src- homology domain-containing protein tyrosine phosphatase. II faut que les tyrosines des immune tyrosine-inhibiting motifs de ces phospha- tases soient, elles-memes, phosphorylees pour que ces enzymes soient utilisables. C'est I'un des mecanismes par lesquels le lymphocyte Best anergise. In vitro, (;a bloque toute reponse aux lipopolysaccharides (LPS). Ces connaissances ont ete acquises par I'etude d'une souris doublement transgenique : transgenique pour le gene codant ranticorps contre le lysosyme de poulet, et transgenique pour le g6ne corres- pondant & cette proteine qui est donc promue au rang d'auto-antigene [11]. Sous forme membranaire et fortement immunogenique, elle declenche I'apoptose car le signal est puissant ; ou sous forme soluble et faiblement immunologique, elle suscite I'anergie, car il est modeste. Si le gene de I'anticorps et celui de I'antigene soluble sont transfec- tes dans une souris qui n'a pas de molecules CD5 (souris KO pour CD5), I'anergisation n'est plus possible. Ceci suggere, du moins chez la souris, que la molecule CD5 est indispensable & I'anergisation des lymphocytes B. C'est etonnant puisqu'il y a beaucoup d'autres proteines qui remplissent la meme fonction qu'elle : CD22, CD32 et CD72, etc.

,& la difference de ce qui se passe dans les lymphocytes T, les muta- tions se multiplient au fur et & mesure que les lymphocytes B qui ont ete choisis (voir figure 4) progressent depuis la zone sombre du CG sous forme de centroblastes jusqu'& sa zone claire sous forme de cen- trocytes. Comme les lymphocytes B qui ne s'engagent pas sont voues & I'apoptose, I'affinite des IgG pour leur antigene augmente de muta- tion en mutation, et de selection en selection. II peut s'agir d'anticorps diriges contre le ,, non-soi ,,, mais egalement d'anticorps diriges contre le ,, soi >>, puisque la mutation est un phenomene aleatoire. I 'organisme a int6ret & se debarrasser des lymphocytes B diriges contre ses propres antigenes ; et I'effet des lymphocytes T suppresseurs devient determinant, d'autant plus qu'ils sont secondes par les anticorps diri- ges contre les idiotypes publics des auto-anticorps.

Un deuxieme mecanisme d'echappement a ete appele ,, edition des immunoglobulines ,,. I~tant donne que les immunoglobulines rear- rangent & nouveau I'ADN de leurs genes, le BCR change de specifi- cite : c'est I'edition. Elle consiste pour les lymphocytes B de la moelle osseuse a. substituer un BCR & celui que le hasard des rearrangements avait malencontreusement dirige contre un auto-antigene. Les recombination activating genes (RAG) sont transcrits une nouvelle fois et les enzymes correspondantes synthetisees de nouveau. Un tel phe- nomene peut se reproduire au coeur des CG oQ I'ARN messager des RAG a ete mis en evidence. Cette fois, ce sont des mutations qui peu- vent orienter le BCR vers un auto-antigene. Le rearrangement fondateur de la moelle osseuse est eventuellement corrige par I'edition. Les muta- tions censees am61iorer les performances de la cellule dans les CG sont, elles aussi, susceptibles d'etre corrigees. La cellule beneficie d'une troisieme chance d'echapper & I'apoptose, sans que pour autant

' soit accreditee la production des auto-anticorps. Cette fois, il s'agit de la revision des immunoglobulines de membrane. Au total, le lym- phocyte B a donc quatre chances de survivre : le rearrangement, I'edi- tion, la salve des mutations et la revision.

.4.!. R::ptJre. de ',~ to lerar, c.>:

4.1.1. Par activation polyclonale des lyrnphocytes B

Pendant Iongtemps, on a admis que les lymphocytes B n'etaient pas concernes par la double selection drastique des lymphocytes T. Maintenant, on salt qu'on s'est trompe et on insiste sur I'importance de filtres aussi efficaces que ceux des lymphocytes T pour les lym- phocytes B de la moelle osseuse [15]. II n'empeche que beaucoup de ces derniers continuent & reconnaRre quelques auto-antigenes, en depit de la selection negative dont ils ont fait I'objet [22]. Ces lym- phocytes B auto-reactifs sont cependant inoperants, parce qu'ils ne beneficient d'aucune assistance de la part des lymphocytes T cor- respondants, etant donne qu'il y a Iongtemps que ceux-I& ont ete eli- mines. Le deficit est anormalement corrige si un mitogene supplee les deux signaux a la fois, celui de I'antigene et celui des lymphocytes T. Une activation des lymphocytes Ben resulte : elle est polyclonale. C'est ce qui se passe dans la mononucleose infectieuse oQ I'influence poly- clonale du VEB sur les lymphocytes B suscite de leur part la production d'une myriade d'auto-anticorps. De meme, une injection de LPS & la souris induit une secretion de differentes sortes d'AAN. D'ailleurs, c'est de cette fa?on-I& que beaucoup d'agents infectieux agissent sur les cellules du systeme immunitaire../k cet egard, il est interessant de signa- ler que cette reaction surdimensionnee peut se derouler dans les CG ectopiques de la synoviale de la PR, du tissu exocrine du syndrome de Gougerot-Sjegren et de glandes endocrines de la thyrdi'dite d'Hashimoto [12]. Cette conception reposant sur la neutralisation des lymphocytes B auto-reactifs a ete renouvelee par la decouverte du super-antigene et de I'activation polyclonale qu'il declenche (figure 10). Cet antigene singulier est multipotent car il se fixe aux molecules HLA sans prefe- rer tel ou tel allele et s'emboite dans les domaines constants des TCR en negligeant ses parties variables. Ce qui les dispense evidemment de traitement prealable & rint&ieur des CPA et donc de transport sub- sequent depuis le cytoplasme jusqu'& la membrane de la cellule. Une noria de lymphocytes Test engagee et, par contrecoup, un exces de lymphocytes B mobilis& On estime qu'un super-antigene sollicite un lymphocyte T sur dix, alors qu'un antigene conventionnel n'en mobi- lise qu'un sur 100 000. L'effet est demultiplie et la probabilite de reveiller un lymphocyte T auto-reactif augmentee au prorata de cette demesure. I'enterotoxine du staphylocoque, par exemple, est un super- antigene pour les lymphocytes T, et la glycoproteine de 120 kiloDaltons

LB CD5+

Le super-antigOne exog~ne ou endogene adh&e en bas aux segments non variables de la molecule du complexe majeur d'hietocompatibilite (CMH), et en haut aux zones non variables des deux chafnes du T ceil receptor (TCR).

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Les connectivites :/a p/ace des anticorps antinuc/daires Article

du VIH est, sans doute, un super-antigene pour les lymphocytes B. Tout cela est encore plus vrai quand le super-antigene est, lui-meme, un auto-antigene. Mais le meilleur modele d'activation polyclonale des lymphocytes B par les lymphocytes T reste celui de la reaction du greffon contre I'hete, ou graft versus host (GVH). On realise une GVH experimentale en injectant #. un hybride les lymphocytes T-CD4 de I'un des parents, puisque ceux-ci stimulent les lymphocytes B de I'hybride par le tru- chement des molecules H LA classe II de I'autre parent. De ce fait, tous les signes d'une MAI systemique apparaissent : hypergammaglobu- linemie, AAN, AHAI, splenomegalie, sclerodermie systemique et glo- merulonephrite aigu#. Le deuxieme signal que re(;oivent les lympho- cytes B de I'hybride, provient indiscutablement des lymphocytes T du premier parent. Parmi les lymphocytes B, ceux qui sont susceptibles de reagir le plus fortement sont ceux qui ont deja 6te sensibilises par un premier signal. I~videmment, ce sont les lymphocytes B auto-reac- tifs qui se trouvent en premiere ligne : ils beneficient d'un surcroTt d'ac- tivation alors que (;a fait Iongtemps qu'ils sont titilles par les auto-anti- genes auxquels ils sont destines. Sur ce point, rexemple de la sclerodermie systemique est instructif. On s'est recemment aper(;u que des cellules de foetus circulaient en grand nombre dans le sang des femmes souffrant de sclerodermie systemique. Leurs troubles resul- tent du chimerisme des cellules du foetus et de celles de sa mere et donc de la GVH des premieres contre les secondes. Uoperation se deroule peut-#tre en deux etapes. Dans un premier temps, un mitogene ou un super-antigene active les lymphocytes B ; activation polyclonale, mais aleatoire. Dans un deuxieme temps, cet exces de zele est canalise par une minorit6 d'auto-antigene. Notons, dans le meme ordre d'idees, que les corps apoptotiques regroupent la plupart des antigenes qui sont la cible des auto-anticorps du LED. Cette mort cellulaire anticipee a meme ete imputee a certains AAN : ils auraient le pouvoir de forcer la membrane plasmique, de traverser le cytoplasme et de penetrer dans les noyaux [1]. Decidemment, les lymphocytes B connaissent un regain d'interet depuis quelques annees. Longtemps ravalees au rang de cellules effec- trices a la solde des lymphocytes T, ils ont recemment et6 rehabilites. D'ailleurs, le phenotype de ceux qui infiltrent les glandes salivaires du syndrome de Gougerot-SjSgren rappelle celui des cellules qui tran- sitent entre la moelle osseuse et les CG ; ou, alors, celui des cellules de la zone marginale qui existe dans tousles organes lympho'(des secondaires. Une dichotomie equivalente a celle des Th-1/Th-2 a meme 6te appliquee aux lymphocytes B effecteurs. Cela donne des Be-1 qui produisent plutet de I'IFN-y et orientent plutet les Th-0 vers roption Th-1 et des Be-2 qui secretent surtout de I'lL-4 et favorisent plutet la differenciation des Th-0 en Th-2. Par ailleurs, on accorde de plus en plus d'importance & des facteurs comme le B lymphocyte stimulator, qui proviennent des macrophages ou des cellules dendritiques, avan- tagent les elements de la zone marginale et les cellules de la sous- population B-l, activent les lymphocytes B au cours du LED et du syn- drome de Gougerot-SjSgren et en previennent I'apoptose dans la leuc~mie lympho'l'de chronique (LLC). Ce qui justifie le recours a un anticorps monoclonal contre le CD20 des lymphocytes B pour trai- ter le syndrome de Gougerot-SjSgren, comme on le fait dans la LLC depuis plusieurs annees.

4.1.2. Par attraction antig~nique

On insiste 6galement sur I'influence des auto-antigenes dans la pro- duction de leurs propres anticorps [14]. C'est facile & comprendre dans les MAI specifiques d'organe : enlever la thyrdl'de du poulet obese nou- veau-ne desamorce toute secretion d'anticorps contre la thyroglobuline puisqu'il n'y a plus de stimulus [3]. Ce qui ne debarrasse evidemment pas le poulet de sa thyrdf'dite. Par ailleurs, il est troublant que les AAN contre la particule sicca syndrome A (SSA) soient diriges contre run de ses epitopes dans le syndrome de Gougerot-SjSgren, et que les anticorps anti-SSA du LED en reconnaissent un autre. Ces observa-

tions conferent plus d'importance & I'auto-antigene dans la genese de I'auto-immunit6 (f0t-elle non specifique d'organes) que celle qui leur avait 6te accordee autrefois (& I'epoque, les auto-antigenes n'avaient aucune initiative). Trois effets de I'auto-antigene ont 6te discutes. Le premier se limite & une anomalie biochimique de rantigene. I 'exemple des IgG de la PR eclaire ce point de vue. Les FR reconnaissent les IgG qui sont des gly- coproteines. Celles du malade sont depourvues de galactose puisque ses lymphocytes B sont depourvus de galactosyl-transferase, ce qui incluit la synthese des FR correspondants. II est en effet possible que les glucides en question recouvrent des sites proteiques qui ne deman- dent qu'a. ~tre immunogenes sur la molecule d'lgG. En leur absence, ceux-ci deviennent accessibles au systeme immunitaire qui n'a aucune raison de les tolerer puisqu'il n'en a jamais entendu parler. Pour vivre heureux, vivons caches.., ils ne lui ont jamais ete presentes. Cette ano- malie peut aussi faciliter I'inclusion d'lgG dans des CI et, ce faisant, les rendre plus immunogenes que quand elles sont libres. D'ailleurs, c'est curieux que I'anomalie de glycosylation des IgG soit retrouvee chez les parents des malades et qu'elle s'amende au cours de la grossesse. Cela explique peut-etre son effet mysterieusement apaisant sur la PR. Le deuxieme mecanisme que I'on invoque pour incriminer rauto-anti- gene consiste ~. remplacer le porteur autologue par un porteur etran- ger, tout en gardant le m6me haptene (figure 11). Cette correction mobilise un autre lymphocyte T que celui qui avait ete prevu par le por- teur initial, puis elimine dans le thymus, precisement parce qu'iil recon- naissait un auto-antigene sur ce porteur. Du fait de la mobilisation d'un nouveau partenaire T, la cellule B peut a. nouveau s'animer. Le porteur de substitution a ete apporte par une bacterie, un medicament ou une cellule. Le troisieme type de mecanismes permettant de tourner I'obstacle de la tolerance est le mimetisme moleculaire [2]. Le hasard peut faire qu'un antigene bacterien ressemble & un auto-antigene. L'analogie ancien- nement connue entre streptocoques et antigene myocardiques est le meilleur exemple de ce concours de circonstances. II existe aussi des similitudes entre le virus herpes de type 1 et I'une des cha'ines du

PoFtt~lIl"

LB LTA

LB LTA

Uantigene glisse son haptene dans le B cell receptor (BCR) du lymphocyte B, mais la reaction de cette cellule est clesamorcee car le porteur ne peut s'introduire dans le Tcell receptor (TCR) du lymphocyte T auxiliaire correspondant qui, lui, a ete delete dans le thymus par apoptose. Si le meme haptene s'unit & un autre porteur celui- ci s'insere dans le TCR d'un autre lymphocyte T auxiliaire qui, lui, n'a pas 6te delete. La reaction du meme lymphocyte B que dans la premiere combinaison redevient pos- sible.

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Les connectivites : la place des anticorps antinucl~aires

recepteur de racetylcholine. Cela a I'air plus simple que la notion d'heteronyme... Encore faut-i] comprendre que ce n'est pas la struc- ture de I'auto-antigene, que reproduit I'exo-antigene, c'est celle de I'un des peptides auxquels aboutit le traitement de cet auto-antigene par la CPA puisque ce sont ces peptides-ci (et non pas cet antigene-la.) que le TCR des lymphocytes T auxiliaires va cueillir dans le creux des molecules du CM H. Cette analogie entralne une competition entre les constituants du ,, soi peptidique ,, et les derives des proteines virales ou bacteriennes vis-a.-vis des recepteurs d'antigenes correspondant & ces demiers. Ce phenomene du mimetisme moleculaire peut meme etre incorpore au reseau des idiotypes. Quand, un exooanticorps et un auto-anticorps expriment le meme idiotype par le plus grand des hasards, rirruption d'un tel exo-antigene & la surface d'un virus ou d'une bacterie favorise, non seulement la synthese de I'exo-anticorps, mais egalement celle de rauto-anticorps. ,&, propos d'auto-antigene, on s'est Iongtemps pose la question de savoir pourquoi la plupart des auto-anticorps du LED etaient exclu- sivement diriges contre des structures tellement eclectiques que leur seul point commun est de se trouver & un moment ou #. un autre dans le noyau de la cellule. On s'est apergu que tous ces composants etaient artificiellement regroupes dans des corps apoptotiques spe- cialises, mais destines & la phagocytose par les macrophages, comme tousles corps apoptotiques. Si cette clairance par le systeme reticulo- histiocytaire (SRH) est retardee pour des raisons genetiques (on a prouve que cela etait possible), ou si les molecules, emprisonnees dans ces corpuscules sont rendues etrangeres par une enzyme denaturee (il n'y a pas d'experience qui le demontre), on congoit que se deploie le bouquet des auto-anticorps correspondants.

4.1.3. Par m~diation des molecules HLA

Les molecules HLA interviennent au debut du processus immuno- Iogique quand il s'agit de selectionner les lymphocytes T, e ta la fin, quand il s'agit de presenter les reliquats de I'antigene aux lympho- cytes T. Ni au debut, ni a la fin, les allotypes HLA ne sont inter- changeables car il n'y en a qu'un petit hombre qui soient associes aux MAI [5]. Deux sortes d'hypotheses ont ete avancees pour I'ex- pliquer. L'adequation peut etre ideale entre la structure de la mole- cule HLA et celle de la poignee d'acides amines resultant de la degradation physiologique de I'auto-antigene. Une forme originale de mimetisme moleculaire peut egalement en etre responsable si la formule de cet allotype comporte une sequence d'acides amines identique ~. I'une de celles de la surface d'un agent infectieux. Par exemple, on reconna~t les cinq residus communs aux sous-types Dw4, Dwl 4 et Dwl 5 de I'allele DR4 dans rune des glycoproteines de la capside du VEB. Les choses ne sont pas si simples qu'il y paratt : ce mimetisme ne devrait pas susciter de reaction puisque la tolerisation thymique s'est deroulee avant que se profile cette menace. L'effet de cette analogie entre agents infectieux et molecules HLA devrait etre une neutralisation et non pas une exageration de la reaction contre le germe porteur de ce succedane d'auto-antigene. Dans ce cas, il est difficile de comprendre comment est enclenche un processus d'auto-immunisation.

Des molecules HLA de classe II aberrantes peuvent aussi fleurir & la surface de cellules qui en sont depourvues & I'etat normal. Les auteurs de la brillante hypothese de rauto-immunite suscitee par cette experience provocatrice ont suggere qu'une telle anomalie devoilait des auto-antigenes membranaires qui n'avaient jamais eu I'occasion d'etre presentes au systeme immunitaire puisque les cellules oe ils se trouvaient etaient denuees de molecules capables de le faire. En consequence, ces peptides n'ont jamais figure darts I'echantillon d'auto-antigenes que le systeme a expertise dans le thymus et dans la moelle osseuse. Sous I'influence du plus banal des virus, IFN et TN F entraTnent cette expression inappropriee de molecules H LA. Le fait est avere au cours du syndrome de Gougerot-Sj6gren, de la cir- those biliaire primitive, de la dermatite herpetiforme et de la thyroT-

dite d'Hashimoto. En verite, on ne sait pas si cette expression est la cause ou la consequence de I'auto-immunisation. II semble que la seconde interpretation tienne la corde, ne serait-ce qu'en raison de I'effacement des molecules HLA sous I'effet d'un traitement contre les lymphocytes T, et parce que les memes anomalies surviennent dans les maladies qui n'ont rien d'auto-immun. C'est le cas du can- cer de la thyro'ide.

4.2. F-~:;rsistarlce de I auto- immurf i t , . ,

4.2.1. Carence des T suppresseurs

Ainsi, plusieurs stratagemes permettent-ils de suppleer les lym- phocytes T auxiliaires quand ils sont absents (deletion centrale) ou de lee contourner quand ils sont tenus en respect (anergie peri- pherique). Neanmoins, il faut comprendre que la reaction auto- immune qui en resulte n'est pas anormale en elle-meme. Elle I'est d'autant moins qu'elle se deroule sous la ferule des lymphocytes T suppresseurs. Peut-etre faut-il que cette suppression soit deficitaire pour qu'apparaisse une vraie MAI. Plusieurs anomalies de cette sup- pression ont ete recensees chez la souris lupique et retrouvees chez I'homme. L'activite suppressive des lymphocytes T sur la production des immunoglobulines est abaissee dans le LED et les lymphocytes T suppresseurs specifiques du VEB inefficaces dans la PR. En fait, il est possible que la faute en incombe aux lymphocytes T contre-sup- presseurs qui seraient trop actifs. Ces cellules (decrites par Gerhson [9]) s'opposent & I'effet des lymphocytes T suppresseurs. Elles sont tombees en desuetude. Enfin, une carence des lymphocytes T auxi- liaires pourvues de recepteurs pour I'lL-2, ou lymphocytes T regu- lateurs, a recemment ete demontree au cours du LED. II semble que cette faillite soit un prerequis & I'apparition des auto-anticorps patho- genes.

4.2.2. Embal lement des T auxiliaires

On peut defendre la these inverse, selon laquelle il y aurait un exces de zele des lymphocytes T auxiliaires. Ces lymphocytes T servent & ameliorer I'affinite des anticorps. Or, les auto-anticorps potentiellement les plus dangereux sont precisement les IgG dont I'affinite est la plus forte. C'est le resultat de selections successives parmi des cellules dont le BCR a change de specificite au hasard des mutations. Fatalement, c'est I'antigene qui foumit la force de traction necessaire & certain de mutations. Ce phenomene est normal ; c'est vrai, mais il peut etre exagere. Exageration authentique, ou exageration simulee par une activation polyclonale des lymphocytes B ou un effet trop eleve des lymphocytes T auxiliaires. Ce qui explique rabondance des muta- tions somatiques sur beaucoup de molecules d'auto-anticorps en cas de MAI d'origine plus humorale que cellulaire. Cette observation, negli- gee pendant Iongtemps, est & I'origine de plusieurs des interpretations actuelles de rauto-immunite.

4.2.3. Intervention des cytokines

Enfin, le r61e des cytokines dans le maintien (voire clans le declen- chement T) de cette auto-immunit6 n'est pas negligeable. On salt que I'harmonie entre Th-1 et Th-2 est assuree par rlL-10 dans un sens et par I'IFN-y dans I'autre. On devine qu'il faut que cet 6quilibre soit rompu pour qu'une MAI se developpe. On parle meme de ,, maladie Th-1 ,, dans le cas de la PR oe les macrophages produisent de grandes quantites d'lL-1, d'lL-6 et de TN F-c( [17] C'est pourquoi les anticorps monoclonaux anti-TNF-c~ sont tellement actifs dans cette affection, mais pas dans les autres ! De plus, ces cytokines activent de fa(;on intempestive les cellules dendritiques qui sont les CPA les plus efficaces de rorganisme. Ce qui stimule les lymphocytes T auxi- liaires de la synoviale rhumato'/de, meme s'il n'y a pas d'antigene en cet endroit pour le faire. La situation est inversee dans le LED :

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Les connectivites : la place des anticorps antinucl#aires Article

il semble que I'exces d'lL-10 secrete des macrophages et des lym- phocytes B determine I'apparition des auto-anticorps. L'administration d'lL-10 & la souris BW aggrave ses manifestations viscerales, alors qu'un anticorps monoclonal anti-lL-10 les corrige. Quant & la scle- rodermie systemique, erie ressemble & une maladie Th-2, et non pas

une maladie Th-1. On n'en devine pas moins que la realite n'est pas aussi manicheenne que cela.

4.3.1. Les auto-anticorps

C'est indiscutable, certains aute-anticorps sent pathogenes. Ainsi, suf- fit-it que le comptement soit active par des auto-anticorps agrippes & leurs GR pour que se developpe une hemolyse intra-vasculaire. A un degre de moins, des auto-anticorps empechent te facteur intrinseque de transporter la vitamine B12 & travers la muqueuse digestive au cours de I'anemie de Biermer et les anticorps diriges contre les recepteurs de la thyreo-stimulin-hormone (TSH) favorisent rhypertrophie de la glande dans certaines maladies de Basedow, car ils ne font que sin- ger la TSH.

II y a beaucoup d'autres formes de destruction. L'apoptose des cel- lules est un autre mode de pathogenie. Cela se passe quand des auto-anticorps adherent aux cellules endotheliales dans la sclero- dermie systemique [4]. C'est I'inverse quand des auto-anticorps s'ac- crochent aux recepteurs pour le Fc des IgG de type IIIb car ils retar- dent la mort des polynucleaires neutrophiles (PNN) au cours du LED, de la PR et du syndrome de Gougerot-Sjegren, en declenchant la production de granulocyte (G) colony-stimulating factor (CSF) et de G-macrophage CSF (GM-CSF) et, par vote de consequence, en sus- citant I'afflux de la proteine anti-apoptotique Bax [7]. En raison de la survie des PN N, reffet deletere des prostaglandines, enzymes, leu- cotrienes et radicaux libres qu'ils secretent est prolonge, notamment dans le liquide synovial de la PR. Faut-il traiter cette maladie par des anticorps monoclonaux anti-G-CSF et/ou des anticorps monoclonaux anti-GM-CSF ?

La notion d'idiotype ,, pathogene ,, porte par des auto-anticorps (figure 12) precede du meme ordre d'idees. Le plus connu d'entre eux est le 16/6 de certains anticorps anti-ADN [20]. Apres injection d'un

Ac3 anti-ADN

maria

J

Acl anti-ADN

humain

-3 s e r n a i n e s

Ac2 anti-ld

(image interne)

Schema (d'apres Yehuda Shoenfeld) de la pathog~nicit6 de certains idiotypes. Uanticorps humain 1 anti-ADN naturel est injecte & la souris qui fabrique un anti- corps 2 centre son idiotype, puis un anticorps 3 contre I'idiotype de I'anticorps 2. Get anticorps 3 reproduit la structure de Panticorps 1 et reconnaft I'auto-antigene. Mais cette fois, il s'agit d'un anticorps anti-ADN de souris. II est interessant que cette souris n'ait jamais 6te immunisee par de I'ADN.

tel auto-anticorps, la souris normale produit un anticorps n ~ 2 contre cet anticorps n ~ 1, puts un anticorps n ~ 3 contre son anticorps 2. Comme cet anticorps n ~ 3 reproduit I'idiotype de I'anticorps n ~ 1, lui aussi il reconnaft I'ADN... tant et si bien que finit par se developper un authentique LED, chez une souris qui n'a jamais eta immunisee contre de I'ADN.

4.3.2. Les complexes immuns

Certaines lesions resultent probablement du dep6t des CI. Encore faut- il que ces derniers remplissent trois conditions. IIs doivent circuler : leur persistance s'explique par la faillite des recepteurs du SRH pour le Fc des IgG et/ou par la pietre efficacite des recepteurs pour le com- plement. C'est demontre dans plusieurs MAI comme la dermatite her- petiforme, le LED, la cirrhose biliaire primitive et le syndrome de Gougerot-Sjegren [13]. Au depart, cette faillite a ete mise en evidence & raide de GR de malades rhesus-plus, preleves, bardes d' lgG anti- rhesus, marques par du chrome 51 et re-injectes au malade. II devient possible de mesurer la survie de ces CI artificiels, c'est-&-dire le temps que met le SRH #. en debarrasser le sang circulant. C'est interessant parce que toutes les affections o0 I'on denonce cette inefficacite du SRH sont celles qui sont associees & I'allele HLA-DR3. En effet, chez des individus normaux, les recepteurs du SRH sont plus efficaces quand les sujets sont HLA-DR3 que quand ils ne le sont pas.

II faut aussi que les CI se deposent. Cela arrive quand raffinite de I'an- ticorps pour son auto-antigene est 61evee et qu'il existe dej~ des lesions dans les organes cibles, dans les glomerules du rein d'une glomeru- Ionephrite aigu~ par exemple.

II faut enfin que les CI soient pathogenes, activant le complement ou autorisant les lymphocytes T cytotoxiques & exercer leur activite lytique. II faut dire que la these de la pathogenicit6 des CI est de plus en plus contestee. Certains auto-anticorps n'atteignent leurs antigenes qu'& la condition que ceux-ci se soient fiches dans le glomerule, I'articula- tion ou la peau. On parle d'antigenes ,, plantes ,,, mats rexistence de ces auto-antigenes insolites n'a jamais ete demontree de fa?on convaincante.

4.3.3. Les lymphocytes T

On s'interroge sur la culpabilite des lymphocytes T. Sans doute sont- ils en cause dans certaines MAI. II s'agit de lymphocytes T-CD8 cytotoxiques dans I'insulite du diabete juvenile insulino-dependant, mats ce sent des lymphocytes T-CD4 cytotoxiques dans la synoviale de la PR, dans les glandes exocrines du syndrome de Gougerot- Sj6gren et dans la thyro'/de de la thyroTdite d'Hashimoto. Cette conception obeit & une certaine Iogique. D'ailleurs, le traitement de certaines MAI par des anticorps monoclonaux contre les molecules CD4 ou centre les antigenes du TCR decoule directement cle cette interpretation.

5. Conclusion

B ref, une MAI n'est jamais que rexageration d'un phenomene naturel et donc utile... Somme toute, la diff6rence entre phy-

siologie et pathologie n'est qu'une difference de degr6 car chez les malades, cette reaction echappe & tout contrele. Ce qui se traduit par le remplacement des auto-anticorps non-pathogenes (de classe IgM, polyspecifiques et d'affinit6 faible) par des auto-anticorps patho- genes (de classe IgG, mono-specifiques et d'affinit6 forte). Pour autant, cela ne veut pas dire que les derniers soient issus des pre- miers (il semble meme que ?a ne soit pas le cas). Cette conception de I'auto-immunite differe grandement de celle qui prevalait il y a vingt ans, laissant augurer d' importants progres therapeutiques dans ce domaine.

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