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Le Memoire en Defense de Delphine Ernotte

Date post: 07-Aug-2018
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  • 8/20/2019 Le Memoire en Defense de Delphine Ernotte

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    SCP F. ROCHETEAU & C. UZAN-SARANO Avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation 

    21 rue des Pyramides - 75001 PARIS

    Tél. : 01 55 74 69 70 – Fax : 01 55 74 69 71

    N° 390.842

    CONSEIL D’ÉTAT 

    SECTION DU CONTENTIEUX

    MÉMOIRE EN DÉFENSE

    POUR : Madame Delphine ERNOTTE CUNCI,

    DéfenderesseSCP Rocheteau & Uzan-Sarano

    CONTRE : Le Syndicat national des personnels de la communication et del’audiovisuel CFE-CGC (SNPCA CFE-CGC),

    DemandeurSCP Yves Richard

    EN PRÉSENCE DE : 

    Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA)

    Sur la requête n° 390.842

    FAITS

    I.  Le mandat de Monsieur Rémy Pflimlin venant à expiration, leConseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), autorité compétente pour la nomination duprésident de la société France Télévisions en vertu de l’ article 47-4 de la loin° 86-1067 du 30 septembre 1986, issu de la loi n° 2013-1028 du 15 novembre2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public, a décidé l’organisation d’unappel à candidatures.

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    À cet effet, le Collège plénier du CSA a adopté, le 4 février 2015, unerésolution relative aux modalités de nomination du président de France Télévisions, rendue publique par un communiqué publié le même jour sur le siteInternet du Conseil (pièce adverse n° 2).

    Cette résolution prévoyait que les candidatures devaient être reçues souspli unique à l’attention du président du CSA à compter du 9 mars 2015 jusqu’au26 mars 2015, soit par courrier, soit par dépôt direct au siège du Conseil, la date du9 mars ayant été retenue afin que les candidats puissent tenir compte, dans leurprojet stratégique, des conclusions du groupe de travail interministériel coordonnépar Monsieur Marc Schwartz (cf. infra ) ainsi que des orientations gouvernementalessur l’avenir de France Télévisions rendues publiques le 4 mars 2015.

    Elle indiquait également que chaque dossier de candidature devaitcomprendre un projet stratégique ainsi que tous documents permettant d’apprécierla compétence et l’ expérience professionnelle du candidat. La date d’ouverture desenveloppes a été fixée au 1er avril 2015.

    Cette résolution prévoyait en outre une présélection des candidatures et l’établissement d’une liste restreinte des candidats à auditionner sur la base desdossiers reçus.

    Elle prévoyait que cette liste pourrait être rendue publique, à la conditiontoutefois « qu’aucun des candidats retenus ne s’y oppose auprès du président  », en vuede les protéger contre d’éventuelles pressions, et d’assurer la protection de leur vieprivée.

     Trente-trois candidatures ont été déposées, dont plusieurs émanaient dusecteur privé, dont celle de Madame Ernotte Cunci. L’objectif de diversification des

    candidatures que s’était fixé le CSA a ainsi été atteint  (sachant qu’il avait pu êtrereproché à l’occasion de la nomination du Président de Radio France que lescandidatures n’aient émané que du secteur public).

    Les modalités de présélection des candidats à auditionner ont été fixéespar le Collège du CSA. Les membres du CSA ont prévu, ensemble, la nécessité pourchaque candidat, afin d’être auditionné, de recueillir au moins cinq voix sur les huitmembres composant le Collège du Conseil.

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    Dans ce cadre, le Collège du CSA a retenu, lors de sa réunion du15 avril 2015, sept candidatures, dont celle de Madame Delphine Ernotte Cunci, àl’issue d’un vote sur chacun des candidats à bulletins secrets (sur la possibilité derecourir à un vote à bulletins secrets, voir article 6 du règlement intérieur du CSA),après et seulement après que chaque candidature a fait l’objet d’une discussion,chacun conseiller ayant été parfaitement libre d’exprimer son opinion personnelle.

    Ces sept candidats ont été auditionnés à huis clos, conformément auxtextes et à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, les 21 et 22 avril 2015.

    Ces auditions, de deux heures chacune, prévoyaient, d’une part, uneprésentation par le candidat de son projet stratégique, sans support visuel extérieur,

    d’autre part, un échange d’une heure et demi avec les membres du Collège(communiqué du 8 avril 2015, pièce adverse n° 3).

    À la suite de ces auditions, un nouveau vote à bulletins secrets a eu lieu.Chaque membre du Collège s’est exprimé en cochant un nom sur la liste despersonnes auditionnées qui lui était soumise. Si, à l’ issue du premier tour, uncandidat obtenait la majorité requise, soit cinq voix, celui-ci était nommé, à défaut dequoi il était convenu qu’il serait procédé à un autre scrutin en éliminant le ou lescandidats ayant obtenu le moins de voix.

    Au terme de deux tours de scrutin, deux candidats ont recueilli le plusgrand nombre de voix, à savoir Madame Delphine Ernotte Cunci, exposante, etMonsieur Pascal Josèphe, fondateur d’IMCA (International Media ConsultantsAssociés), société d’études et de conseil dans le domaine des médias. Pour lesdépartager, ces deux candidats ont été de nouveau auditionnés.

    De sorte que Madame Ernotte Cunci, contrairement à la plupart des

    autres candidats, a été auditionnée pendant plus de 3h30 au total.

    Ce n’est qu’à l’issue de ces nouvelles auditions que le nom de MadameErnotte Cunci a été définitivement retenu par le Collège du CSA, au terme d’unnouveau vote et d’une procédure où le pluralisme des opinions de chacun desmembres s’est amplement exprimé.

    Par une décision n° 2015-159 du 23 avril 2015, publiée au Journal

    Officiel  du 25 avril 2015, Madame Ernotte a été nommée présidente de la sociétéFrance Télévisions, à compter du 22 août 2015, pour une durée de cinq ans.

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    II.  C’est dans ces conditions que le SNPCA CFE-CGC a cru devoirformer un recours en annulation contre la décision de nomination, par requêteenregistrée au secrétariat du contentieux le 8 juin 2015.

    Il s’agit du recours auquel Madame  Delphine Ernotte Cunci vient àprésent défendre.

    Pour la complète information du Conseil d’État,  cette nomination aégalement été attaquée par le Syndicat national des Médias CFDT, sous le n° 390912,selon les mêmes moyens.

    DISCUSSION

    III.  À titre principal, sur l’irrecevabilité du recours 

    III.1  Tout d’abord, le présent recours sera rejeté pour irrecevabilité, lesyndicat requérant ne justifiant d’aucun intérêt à agir à l’encontre d’une décision denomination à la tête d’une société nationale à capitaux publics, au regard de son

    objet, lequel est défini par la loi.

    Il est en effet constant que si les syndicats justifient d’un intérêt donnantqualité pour agir à l’encontre de décisions individuelles favorables, c’est à la conditionque cette décision porte atteinte aux intérêts qu’ils ont la charge de défendre, c’est-à-dire à des intérêts professionnels collectifs (voir not. CE, Sect., 8 mars 1991, Ministredélégué aux transports c/ Syndicat indépendant du corps administratif supérieur del’aviation civile et de la météorologie , n° 82926).

    On rappellera que l’article L. 2131-1 du code du travail énonce que « lessyndicats professionnels ont ex clusivement pour objet l’étude et la défense des droitsainsi que des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu’individuels, des personnesmentionnées dans leurs statuts  » et que l’intérêt à agir d’un syndicat, régi par leprincipe de spécialité, s’ apprécie d’abord et avant tout au regard de ces dispositionslégislatives, sans que les statuts ne puissent venir extrapoler cet objet (CE,27 mai 2015, Syndicat de la magistrature , n° 388705 (à publier au Recueil ; A.Bretonneau, « L’intérêt à agir d’un syndicat professionnel ne dépend pas de sesstatuts », AJDA 2015, p. 1543 ; CE, Ass., 22 juillet 2015, Syndicat CGT de l’Union

    locale de Calais et environs , n° 383481).

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    Suivant cette logique, il est jugé que les syndicats ne justifient d’aucunintérêt donnant qualité pour agir à l’encontre d’une décision nommant le dirigeantd’une personne morale de droit privé à capitaux publics ou d’une personne morale dedroit public.

    Dans sa décision d’Assemblée Syndicat national des journalistes, sectionORTF et autres  (CE, Ass., 4 novembre 1977, n° 93599, Rec. p. 429, concl. J. Massot),la Haute juridiction a en effet dénié tout intérêt à agir à l’encontre de la nominationpar décret du Président Marceau Long aux fonctions de membre du conseild’administration et de directeur général de l’ORTF, ancêtre de France Télévisions. 

    Cette logique jurisprudentielle a été confirmée à propos d’un décretnommant le directeur général d’une direction ministérielle  (CE, 16 février 1979,Fédération du ministère de l’économie et des finances   du syndicat Force ouvrière ,n° 08570, Tables p. 784, concl. J.-F. Théry) et d’un décret portant nomination duprésident de la commission de la concurrence (CE, 20 novembre 1981, Schwartz etautres , n° 24923-24981, Rec. p. 437, concl. Pinault). La règle dégagée en 1977 a étéréaffirmée dans une nouvelle décision d’Assemblée Syndicat CGT des hospitaliers deBédarieux  (CE, Ass., 15 avril 1996, n° 120273, concl. J.-D. Combrexelle).

    En l’espèce, ces principes constants ont manifestement vocation às’appliquer. 

    La Haute Assemblée ne pourra donc que rejeter le recours formé par lesyndicat requérant pour irrecevabilité.

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    IV.  À titre subsidiaire, sur le caractère mal fondé du recours

    Sur les moyens de légalité externe invoqués

    IV.1 Le syndicat requérant articule, sur le plan de la légalité externe, cinqgriefs à l’encontre de  la décision de nomination du 23 avril 2015 : absenced’impartialité du président du CSA lors de la  procédure de présélection descandidatures (IV.1.1) ; absence d’impartialité d’un autre membre du Collège, quiaurait entretenu des liens « particuliers » avec Madame Ernotte, facilitant ainsi sanomination (IV.1.2) ; irrégularité du processus de présélection des candidats, du faitde la règle de majorité instituée par le président du CSA (IV.1.3) ; absence depublicité des candidatures (IV.1.4) ; et insuffisance de motivation de la décision de

    nomination (IV.1.5).

    Aucun de ces cinq griefs ne saurait convaincre, l’argumentation dusyndicat requérant étant largement controuvée et celui-ci n’ établissant à aucunmoment la réalité des faits avancés, se bornant en substance à renvoyer à un seularticle de presse, du site d’information Médiapart.

    IV.1.1 Le syndicat estime tout d’abord que le président du CSA aurait

    manqué à son devoir d’impartialité à l’occasion de la procédure de présélection descandidats, en déclarant, à titre liminaire, selon le syndicat qui se réfère en ce sens àun article du site Médiapart, qu’il convenait de veiller à ne pas déstabiliser le secteurde l’audiovisuel et qu’à ce titre, l’une des candidatures déposées ne pouvait êtreretenue (mémoire ampliatif, p. 9).

    S’agissant d’un grief touchant directement à la procédure conduite par leCSA, c’est naturellement le Conseil qui a vocation au premier chef à venir y défendre,puisqu’il détient les explications propres à justifier le rejet de cette critique. C’est ce

    qu’il a d’ailleurs fait dans son mémoire en défense enregistré le 28 octobre 2015 augreffe du Conseil d’Etat, qui développe sur ce point des arguments très circonstanciés(cf. p. 8 à 12), qui emporteront à l’évidence la conviction de la Haute Juridiction, et justifieront le rejet du moyen de la requête.

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    S’agissant de l’exposante, elle ne peut pour sa part que souligner ici que,d’une manière générale, strictement rien dans les vaines allégations du syndicatrequérant ne témoigne, prima facie , d’une quelconque atteinte au devoir d’impartialitédu président du CSA ; étant simplement observé qu’il est particulièrement mal venude la part du requérant de chercher à tirer opportunément prétexte d’un propos, audemeurant très général et visiblement de bon sens, qui aurait été tenu dans le cadredu délibéré, lequel est précisément le lieu d’expression et d’échange de l’opinion desmembres de l’institution.

    Ce grief ne pourra donc évidemment qu’être écarté. 

    IV.1.2 Le syndicat requérant soutient ensuite que Madame Sylvie Pierre-

    Brossolette, membre du Collège, aurait entretenu des liens « particuliers  » avecMadame Ernotte Cunci de nature à favoriser sa candidature et à entacher la décisionattaquée d’une irrégularité (mémoire ampliatif, p. 10). 

    L’article de Médiapart produit et cité par le syndicat requérant au soutiende sa demande, remet en cause l’impartialité de Madame Pierre-Brossolette sur labase d’ une « anecdote   » selon laquelle cette dernière aurait organisé une rencontreentre l’exposante et Monsieur François Pinault, homme d’affaires  propriétaire del’hebdomadaire Le Point , sans d’ailleurs être mesure d’ en donner la date précise.

    Une telle affirmation est purement gratuite et ne repose sur aucuncommencement de preuve, aucun lien particulier n’unissant évidemmentl’exposante à Madame Pierre-Brossolette.

    Si Madame Ernotte a effectivement eu l’occasion de rencontrer, avant ledépôt de sa candidature, comme d’ autres candidats d’ailleurs, Monsieur FrançoisPinault, c’était en vue de mesurer la crédibilité et donc l’intérêt  d’une éventuelle

    candidature (alors qu’elle occupait un poste à haute responsabilité dans le secteurprivé), cette démarche n’a yant absolument rien d’inhabituel  au regard del’importance des fonctions briguées.

    Cette rencontre n’a au demeurant nullement donné lieu à un« déjeuner », encore moins en la présence de Mme Pierre-Brossolette, mais à unesimple entrevue, pendant une demie heure seulement, en tête à tête, dans le bureaude Monsieur Pinault, lequel n’a évidemment joué aucun rôle dans la procédure denomination par le CSA.

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    Et contrairement à ce que tente de faire croire sans le moindre élémentprobant le site Médiapart, Madame Ernotte Cunci n’a à aucun moment entretenu lemoindre contact avec Madame Pierre-Brossolette à cette fin.

    L’article de presse produit se borne d’ailleurs en réalité à affirmer queMadame Pierre-Brossolette aurait eu l’occasion de déjeuner avec Monsieur Pinault etque le sujet de rencontres avec certains candidats aurait été évoqué, dans le cadre de« propos de table  ». Madame Pierre-Brossolette a toutefois démenti avoir organisé unerencontre entre Monsieur Pinault et Madame Ernotte Cunci, a fortiori  en sa présence.

    Rien ne vient donc accréditer l’allégation péremptoire du syndicatrequérant, concernant la prétendue organisation d’un déjeuner par Mme Pierre-

    Brossolette, ni un quelconque a priori  favorable de cette dernière envers Mme ErnotteCunci.

     Tout contact direct et individuel entre membres du CSA et candidats étaitau demeurant formellement proscrit, après ouverture des plis le 1er avril 2015, ce quiconstituait une garantie particulière ; et Madame Ernotte Cunci a évidemmentstrictement respecté cette consigne, tout comme les membres du CSA.

    Seule une présentation auprès des membres du CSA était possible jusqu’au 1er  avril 2015, avant donc l’ ouverture des plis, afin d’informer d’unecandidature ou d’exposer au contraire les raisons d’une absence de candidature,dans des conditions toutefois strictement définies (sur invitation du conseiller et dansles locaux du CSA). Dans ce cadre, Madame Ernotte a, comme d’autres candidats,pu rencontrer certains conseillers, dont Mme Pierre-Brossolette, ce qui étaitparfaitement licite et légitime. C’est le seul contact qu’elle a eu avec ce membre duCSA.

     Tout le reste n’est que conjecture, allégation gratuite et pétition deprincipe fallacieuse.

    Il n’y a  donc ici strictement aucun élément permettant d’affirmer uneatteinte subjective à l’impartialité des membres du collège.

    Ce nouveau grief sera par conséquent rejeté.

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    IV.1.3 Le syndicat requérant reproche ensuite à la décision d’avoir étéprise au terme d’une procédure irrégulière, du fait de la décision du président du CSAde fixer les modalités de présélection des candidats en nécessité pour chaquecandidat de recueillir au moins cinq voix sur les huit membres du Collège (mémoire,p. 11).

    Là encore, le grief vise directement à contester la régularité d’une desmodalités de mise en œuvre de la procédure de sélection menée par le CSA, et c’estdonc au premier chef au Conseil qu’il appartient de venir y défendre, l’exposanten’ayant évidemment pour sa part aucune maîtrise de la procédure suivie par le CSA.

    À ce titre, elle ne peut simplement que constater que les explications

    apportées par le CSA dans son mémoire en défense régularisé le 28 octobre dernier(cf. p. 13 et 14) sont de nature à justifier le rejet du grief, notamment en ce qu’ellesfont ressortir que contrairement aux allégations gratuites du requérant, la mesurecontestée –  concernant les modalités de présélection des candidats-, n’a pas été priseunilatéralement par le président du CSA, mais collégialement.

    Là encore, le rejet s’impose donc. 

    IV.1.4  Le syndicat requérant soutient ensuite que l’absence depublication de la liste des candidatures déposées auprès du CSA pour la nominationdu président de la société France  Télévisions aurait entaché la procédure d’unenouvelle irrégularité (mémoire, p. 12).

    IV.1.4.1 Ici encore, la requête dénonce une prétendue irrégularité de laprocédure menée par le CSA, de sorte que ce dernier est évidemment le mieux placépour réfuter les assertions du requérant, ce qu’il fait utilement dans son mémoire en

    défense (cf. p. 14 et 15).

    S’agissant de l’exposante, elle ne peut pour sa part qu’observer, en droit,qu’il ressort indubitablement de la jurisprudence du Conseil constitutionnell’exigence que le mode de nomination retenu par le CSA préserve la liberté de paroledes candidats, mais aussi –   et surtout, même  –   sauvegarde le respect de leur vieprivée (cf. décision n° 2000-433 DC du 27 juillet 2000).

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    Or, il n’est pas sérieusement contestable que la publicité de la listenominative des candidats puisse compromettre ces exigences. Et l’ exposante entendpour sa part souligner que c’est particulièrement le cas de candidats venant, commec’était son cas, du secteur privé : le candidat pourrait en effet être contraint, si sacandidature venait à être connue, de quitter son poste ou subir des pressionsincompatibles avec la nécessité de pouvoir librement s’exprimer et défendre sacandidature.

    Il apparaît donc légitime, notamment en vue de diversifier l’origine descandidatures et de permettre à des personnalités issues du secteur privé  –   et yoccupant par hypothèse des fonctions à forte responsabilité, vu le poste brigué-, deprévoir la possibilité que le nom des candidats ne soit pas publié, pour respecter leurvie privée (dont fait partie la sphère professionnelle, notamment au sens de l’article 8

    de la Convention européenne des droits de l’homme).

    IV.1.4.2 Au cas présent, compte tenu du nombre très élevé de candidats(33), dont la plupart occupaient des postes importants dans d’autres sociétés, ycompris dans le secteur privé, au moment de leur candidature, il n’est passérieusement discutable que la publication de la liste risquait de porter atteinte àleurs intérêts et à leur situation professionnelle.

    Tel était en particulier le cas de Madame Ernotte, qui occupait desfonctions importantes au sein de la société Orange, personne morale de droitprivé.

    Elle s’est d’ailleurs abstenue de toute campagne médiatique pour lapromotion de sa candidature, à laquelle elle ne souhaitait pas donner de publicité,pour des raisons personnelles et professionnelles bien compréhensibles.

    Comme l’explique le CSA dans son mémoire en défense, c’est donclégitimement qu’ il a été décidé de ne pas rendre publique la liste des candidatures,

    aux fins de respecter le souhait exprès en ce sens de certains candidats (trois d’entreeux ayant en effet, selon les indications du Conseil, explicitement demandé au CSAde ne pas donner de publicité à leur candidature) et d’assurer le respect de leur vieprivée ; étant évident que cette absence de publicité devait alors, dans un soucid’équité et d’égalité de traitement des candidatures, concerner l’ensemble descandidats –  sans que cela n’empêche, d’ailleurs, ceux des candidats qui souhaitaientrendre publique leur candidature de prendre eux-mêmes l’initiative de le faire-.

    Ici encore, le rejet du moyen est donc certain.

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    IV.1.5  Enfin, le syndicat requérant soutient que la décision attaquéeserait insuffisamment motivée (mémoire, p. 14).

    Ce moyen est à l’évidence dépourvu de tout caractère sérieux.

    IV.1.5.1 En droit, l’article 47-4 de la loi du 30 septembre 1986 disposeque la nomination du président de France Télévisions, comme celle du président de lasociété Radio France ou de la société France Médias Monde, fait « l’objet d’unedécision motivée se fondant sur des critères de compétence et d’expérience  ».

    Une telle exigence implique, comme on le sait, l’énonciation de

    considérations de droit comme de fait constituant le fondement de la décision (voir ence sens l’ article 3 de la loi du 11 juillet 1979).

    IV.1.5.2 Au cas présent, après avoir visé l’article 47-4 de la loi du 30septembre 1986, les critères d’expérience et de compétence, et salué la qualité et ladiversité des candidatures reçues, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a indiquéque :

    « En désignant Mme Delphine Ernotte Cunci, le conseil a fait le choix de

    confier la présidence de France Télévisions à une femme dotée de solidescompétences de management  et d'une expérience reconnue dans lagestion du dialogue social , qui a exercé des fonctions de direction ausein de l'un des plus grands groupes numériques européens ,imprégné d'une forte culture de service public.

    « Sa perception des enjeux de l'audiovisuel, en France comme àl'international, ainsi que son intuition des attentes du public dans unmonde en mutation  ont convaincu le conseil qu'elle saurait naturellementmettre ses qualités au service du développement de France Télévisions.

    « Le projet stratégique de Mme Ernotte Cunci lui est apparu commeconciliant de manière équilibrée l' ambition réformatrice portée par unevision exigeante de la télévision publique de demain, le souci d'unecontinuité indispensable à une transformation sereine et apaisée del'entreprise, et la volonté de susciter l'adhésion des personnels pourconduire les changements nécessaires.

    « Le conseil a relevé ses propositions consistant à bâtir, par la négociation etle dialogue, un plan stratégique visant à promouvoir la confiance au sein de

    France Télévisions, en identifiant les investissements et les adaptationsnécessaires à l'essor du groupe.

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    « Le conseil a salué son ambition de rénover l'offre proposée au public , en affirmant mieux les caractéristiques des chaînes : les programmes fédérateurs sur France 2, le patrimoine et les territoires surFrance 3, la jeunesse sur France 4, la connaissance sur France 5, lesoutremers sur France Ô.

    « Il a apprécié son triple souhait d'innover davantage dans les programmesafin de toucher tous les publics, notamment les plus jeunes, de placer lesnouveaux usages numérique s au cœur de l'offre et de faire émerger

    un nouveau modèle économique pour la diffusion des programmes ,apte à procurer de nouvelles ressources pour développer le groupe.

    « Le conseil a par ailleurs été convaincu par la volonté de promouvoir leservice public, exprimée par Delphine Ernotte Cunci à travers la conclusion

    d'un pacte entre la télévision publique et la production française, ledéveloppement d'une télévision de qualité reflétant toutes les cultures et lacréation d'une chaîne publique et numérique de l'information.

    « De façon générale, le conseil a été sensible à son fort attachement auservice public, qui anime sa volonté de renforcer les valeurs d'une télévisioncitoyenne par l'exemplarité, la transparence et la participation du public. »

    Le CSA a ainsi largement exposé, avec une précision suffisante, les

    raisons de droit comme de fait justifiant son choix ; il a notamment insisté sur laqualité du projet stratégique défendu par Madame Ernotte ; il n’a pas manqué derappeler son expérience de management dans le secteur du numérique, à des posteshautement stratégiques (cf. infra ).

    Il ne fait aucun doute que sa décision, qui répond aux exigences viséespar la loi, est ainsi suffisamment motivée et permet au juge de l’excès de pouvoird’exercer le contrôle de légalité qui lui appartient.

    Pour ces raisons, le cinquième grief invoqué ne pourra qu’être rejeté. 

    Sur l’unique moyen de légalité interne invoqué  

    IV.2 Le syndicat soutient, au titre de l’ illégalité interne de la décision deattaquée, que celle-ci serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation quant auchoix de la candidature de Madame Ernotte, au regard de son curriculum vitae  ; il

    l’accuse également de plagiat (mémoire, p. 17).

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    Une telle argumentation, qui procède d’une  mauvaise foi certaine, nesaurait davantage prospérer. L’accusation de plagiat est quant à elle totalementinfondée et inutilement infamante, en l’absence de toute ressemblance véritable surdes points originaux entre le projet de Mme Ernotte et celui prétendument copié.

    IV.2.1 En droit, l’article 47-4 loi du 30 septembre 1986 prévoit que :

    « Les présidents de la société France Télévisions, de la société Radio Franceet de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France sontnommés pour cinq ans par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, à lamajorité des membres qui le composent. Ces nominations font l'objetd'une décision motivée se fondant sur des critères de compétence etd'expérience .

    « Les candidatures sont présentées au Conseil supérieur de l'audiovisuel etévaluées par ce dernier sur la base d'un projet stratégique .

    « Les nominations des présidents de la société France Télévisions, de lasociété Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur dela France interviennent trois à quatre mois avant la prise de fonctionseffective.

    « Quatre ans après le début du mandat des présidents mentionnés au premier alinéa, le Conseil supérieur de l'audiovisuel rend un avis motivé

    sur les résultats de la société France Télévisions, de la société Radio Franceet de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France, au regarddu projet stratégique des sociétés nationales de programme. Cet avis esttransmis aux commissions permanentes compétentes de l'Assembléenationale et du Sénat.

    « Dans un délai de deux mois après le début de leur mandat, les présidentsmentionnés au premier alinéa transmettent au président de chaqueassemblée parlementaire et aux commissions permanentes compétentesde ces mêmes assemblées un rapport d'orientation. Les commissions

     permanentes chargées des affaires culturelles des assemblées parlementaires peuvent procéder à l'audition des présidents mentionnés aumême premier alinéa sur la base de ce rapport. »

    Ces dispositions sont issues de la loi du 15 novembre 2013 qui aentendu confier de nouveau au CSA le pouvoir de nomination des présidents deFrance Télévisions et de Radio France (lequel était revenu dans les mains duPrésident de la République), dans un souci de protection de l’indépendance dusecteur audiovisuel français.

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    Elles imposent la prise en compte, pour la sélection des candidatures etla nomination, de trois éléments : la compétence, l’expérience et le projet stratégiquede chaque candidat. L’appréciation opérée par le CSA est globale. 

    Le Conseil d’État exerce sur le choix retenu un contrôle évidemmentrestreint, limité à l’erreur manifeste d’appréciation, compte tenu du large pouvoird’appréciation dont dispose le CSA (CE, 19 janvier 1990, Association « La télé est ànous » , n° 84878, Rec. p. 9, concl. P. Frydman ; CE, 4 mars 1994, M. Legitimus ,n° 114651, inédit, concl. P. Frydman).

    S’agissant ensuite de la qualification de plagiat,  qui constitue unevariante du délit de contrefaçon dans le champ du droit d’auteur (article L. 122-4 du

    code de la propriété intellectuelle), celle-ci ne peut être admise que si deux grandesconditions sont remplies : il faut tout d’abord que l’œuvre contestée présente desressemblances par sa forme, le fond et le style avec une autre œuvre ; il faut ensuiteque l’œuvre plagiée présente elle-même un caractère original et soit évidemmentantérieure (P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique , PUF, 9e éd., 2015, pp. 784-797).  Il faut, en somme, qu’il y ait ressemblance saillante sur des pointsoriginaux.

    Pour le dire autrement, le plagiat nécessite la reprise d’ « éléments

    caractéristiques du travail d’un auteur pour les insérer indûment dans un   autretravail  », le juge devant alors « dégager dans cette opération des similitudes allant au- delà du hasard ou de la nécessité technique  » (N. Binctin, Droit de la propriétéintellectuelle , LGDJ, 3e  éd., 2014, p. 768). Il faut qu’il y ait des « ressemblancesdominantes  » et « quasi-identité  » (TGI Paris, 22 octobre 1966, Ann. Propr. Ind. 1967,288).

    L’appréciation est en outre différente selon le genre des œuvres enquestion, le juge s’attachant, par exemple, pour les romans, aux personnages, lieux,

    à l’évolution de l’intrigue, au cadre des événements… les ouvrages scientifiques outechniques ne se prêtant pas à la même analyse, compte tenu en particulier duprincipe selon lequel les idées sont de libre parcours (M. Vivant et J.-M. Brugière,Droit d’auteur et droits voisins , Dalloz, 2e éd., 2012, n° 1031, p. 834).

    S’agissant du plan d’un ouvrage de vulgarisation médicale, il n’y a ainsipas contrefaçon dès lors que les seules similitudes existantes sont celles imposéesnormalement par le sujet, lui-même dénué de toute originalité (TGI Paris, 19 avril1989, Revue Internationale du Droit d’Auteur , octobre 1989, p. 360).

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    De même, la contrefaçon, s’agissant  toujours d’ouvrages techniques ouscientifiques, ne peut résulter que de la reprise d’une formulation propre à l’auteur del’ouvrage antérieur et originale eu égard à la matière traitée (TGI Paris, 14 février1990, RIDA , juillet 1990, p. 357).

    IV.2.2 Au cas présent, Madame Ernotte Cunci, née le 28 juillet 1966, estdiplômée de l’École Centrale de Paris (promotion 1989).

    Elle a débuté sa carrière à France Télécom, alors établissement public,comme analyste financière, jusqu’en 1993. Elle y a ensuite été ingénieure économisteà la recherche et au développement, chargée de la planification, jusqu’en 1999. 

    Elle a ensuite dirigé le réseau Orange à Paris et a été nommée directricegénérale de la filiale SDR du groupe Orange de 2000 à 2004.

    De 2004 à 2006, elle a été directrice régionale Centre-Val de Loire et a éténommée en juillet 2006 directrice de la communication commerciale et dusponsoring France de la société Orange. Elle a été à ce titre responsable durenouveau de la marque Orange.

    En mai 2008, Madame Ernotte a été désignée directrice commercialeFrance puis directrice grand public France en 2009. À ce titre, elle a occupé lesfonctions de directrice générale d’Orange Distribution.

    En avril 2010, elle est devenue directrice exécutive adjointe du groupeOrange, chargée des opérations France, et a fait partie des deux femmes siégeant ausein du comité exécutif du groupe.

    Puis elle devient le 1er  mars 2011 directrice exécutive d’OrangeFrance.

    Madame Delphine Ernotte a ainsi accompli l’essentiel de sa carrière dansun groupe de télécommunications, fortement engagé dans le secteur dunumérique et les nouveaux médias (télévision numérique, via notamment safiliale OCS, Internet, téléphonie mobile, etc.), à des postes hautementstratégiques, impliquant par ailleurs une forte implication en termes de

    management.

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    On notera que le groupe Orange est engagé dans la productioncinématographique et plus largement audiovisuelle à travers sa filiale Orange studio,(anciennement Studio 37), aujourd’hui dirigée par Monsieur David Kessler.

    Madame Ernotte est par ailleurs une amatrice reconnue de théâtre, et àce titre administratrice du Cent Quatre (Paris). Elle est en outre présidente du conseild’administration de l’Ecole nationale de la photographie d’Arles, démontrantlargement son appétence pour les arts de la scène et de l’image. 

    Au regard de ces éléments, il est indéniable que Madame Ernotte disposed’une expérience professionnelle adaptée pour la présidence de France Télévisions etde compétences reconnues dans le secteur des médias, en premier lieu numériques,

    que ce soit en termes de développement commercial et de management, alors mêmed’ailleurs que la société France Télévisions, depuis quelques annéesmaintenant, a précisément pour objectif le développement de ses activitésnumériques  (cf. infra , rapport du CSA de décembre 2014, spéc. point 5 desconclusions, « stratégie du numérique à conforter  »).

    Outre la création d’un site d’informations (« Francetvinfo »), la société anotamment développé un service de « replay » (« télévision de rattrapage  ») et deretransmission en direct sur Internet, dénommé « Pluzz », pour toutes les chaînes du

    groupe.

    Le développement de l’offre numérique constitue toujours un enjeumajeur pour la société (cf. infra ), en particulier en matière de téléphoniemobile, le téléphone (smartphone) étant un support de plus en plus utilisé dansle secteur audiovisuel, y compris en matière de télévision.

    On signalera que 193 millions de vidéos de France Télévisions ont été

    vues, toutes plateformes confondues (web, smartphones, tablettes, TV, y comprispartenaires tels que Youtube, Dailymotion, etc.), selon les chiffres publiés en août2015 ; 6,3 millions d’applications FranceTV Pluzz ont été téléchargées au 31 août2015 ; plus de 10,5 millions de visiteurs uniques ont consulté le site InternetFranceTV info, ce qui plaçait la société devant TF1 (6,1 millions de visiteurs uniques),Canal Plus (2,9 millions) et M6 (2,4 millions), en juillet 2015. Le site FranceTV Info estle quatrième site Internet d’information avec près de 6,9 millions de visiteurs uniques (cf. productions, « Antennes », magazine interne de France Télévisions, n° 58,septembre 2015, p. 20).

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    L’expérience de Madame Ernotte Cunci au sein du groupe Orange, leaderen matière numérique, est de ce fait évidemment particulièrement adaptée etextrêmement précieuse.

    Madame Ernotte Cunci a d’ailleurs insisté, dans son projet stratégique,sur les enjeux numériques, face à la grande mutation des usages du numérique encours et à l’usage de plus en plus prononcé d’Internet sur les téléphones mobiles. Ellea notamment développé une partie consacrée aux « nouveaux usages numériques  »qu’elle souhaitait placer « au cœur de l’offre  » de France Télévisions (pp. 19-20).

    Dans cette partie, elle a notamment indiqué que :

    « Le premier enjeu à venir de la télévision est celui du second écran. Lenumérique ce n’est pas que le Web. C’est de plus en plus le mobile, latablette et toujours la télévision connectée. Il faut concevoir l’offre numérique

    en même temps sur tous ces supports et y retrouver une même ergonomie.La télévision de rattrapage se déroule en grande partie sur des ordinateurset à 25 % sur des appareils mobiles. Cette mutation des usages appelleune transformation de l’offre  ».

    Elle a ainsi proposé la création d’une « nouvelle plateforme numérique,

    basée sur un algorithme de recommandation   », qui doit rendre « la télévision derattrapage plus accessible  », en veillant avant tout à l’ergonomie d’utilisation, sur lemodèle de Netflix  par exemple. On soulignera à ce propos que Madame Ernotte Cuncis’est occupée, dans le cadre de ses fonctions au sein du groupe Orange,  del’introduction de l’offre Netflix dans le bouquet Orange TV.

    Madame Ernotte Cunci a également insisté sur le fait que la dimension« éditoriale numérique  » devait devenir centrale, le recours au numérique ne devantplus être un simple accessoire, et a proposé de créer de nouvelles marques ou

    univers numériques.

    Des développements sur le numérique sont également présents dans lapartie consacrée au « nouveau modèle économique de diffuseur  », Madame ErnotteCunci ayant notamment insisté sur l’importance de la vidéo à la demande (VàD ouVOD), toujours sur le modèle de Netflix .

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    Ces différents éléments ont été largement développés et discutés avec lesmembres du CSA, lors des deux auditions, et exposés à l’ensemble des personnels deFrance Télévisions après sa nomination (cf. productions, « Antennes », pp. 2, 7, 10-11et 18).

    Cette expérience a bien entendu était déterminante pour le CSA, qui aretenu dans la décision attaquée la volonté de l’exposante « de placer les nouveauxusages numériques au cœur de l'offre et de faire émerger un nouveau modèle

    économique pour la diffusion des programmes  », tout en soulignant l’exercice defonctions de direction « au sein de l'un des plus grands groupes numériqueseuropéens  ».

    De fait, tous les observateurs avisés du secteur audiovisuel saventaujourd’hui que le grand défi à relever est celui de la mutation, en cours, d’une offreuniverselle, hier hertzienne, à laquelle le téléspectateur décide ou non de seconnecter, de manière binaire, à une offre numérique toujours plus diversifiée voireindividualisée, où le téléspectateur/utilisateur compose quasiment son programme« sur mesure », en fonction de différents supports (écran TV, téléphone, tablette) etselon un emploi du temps variable et individualisable par le biais du rattrapage, du« replay », du « podcast »… 

    Le profil de Madame Ernotte Cunci répondait à cet égardindubitablement aux enjeux de développement et de diversification rencontrés par lasociété France Télévisions (Mme Ernotte a d’ailleurs récemment présenté un projet decréation d’un « Netflix de la création française », comme la presse, y comprisgénéraliste s’en est fait l’écho : Le Monde, Economie, 29 octobre 2015).

    Par ailleurs, pas un jour ne passe sans que soient soulignées les trèsfortes convergences économiques et structurelles entre le secteur audiovisuel et lesopérateurs télécoms, qui ont une avance indéniable en termes d’expérience de

    diversifications des offres et des supports (cf. là encore, Le Monde Economie, 28 juillet2015, « Le rapprochement entre télécoms et médias est inéluctable » ; Le MondeEconomie, 25 octobre 2015 : Bolloré, Drahi, Malone, la tentation de faire convergertélécoms et médias).

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    Pour toutes ces raisons, il est parfaitement inexact d’affirmer, comme lefait outrageusement le syndicat requérant, que Madame ne justifiait « d’aucuneexpérience dans le domaine des médias  » (mémoire, p. 17) et, plus généralement, queson profil ne répondait pas aux exigences de compétence et d’expérience définies, demanière très large au demeurant, par la loi du 30 septembre 1986. De tels propostendent en fait à réduire le secteur des médias à la seule production audiovisuelle,qui plus est comprise de manière étroite, ce qui n’est évidemment pas le cas.

    En réalité, ce qui transparaît dans le propos du requérant, c’est que MmeErnotte Cunci n’aurait pas le profil et l’expérience pour la télévision d’hier  ; mais leCSA a fait son choix en fonction des besoins et des défis de la télévision d’aujourd’huiet de demain.

    Il n’y a certes pas, là, d’erreur manifeste d’appréciation.

    Enfin, s’agissant du troisième critère de nomination, il ne saurait êtresérieusement affirmé que Madame Ernotte n’aurait pas personnellement établi leprojet stratégique soumis au CSA, à l’appui de sa candidature, au seul motif que sonprojet présenterait des « similitudes troublantes  », dixit   le requérant, avec celui deMonsieur Didier Quillot, qui aurait fait parvenir, par erreur, son projet à MonsieurXavier Couture (mémoire, p. 19).

    Le Syndicat requérant s’appuie une fois encore sur un seul document àla crédibilité discutable - l’article du site Médiapart –  sans aucun autre élément pourl’étayer.

    À titre liminaire, il sera souligné que Monsieur Xavier Couture, auquel ilest fait référence dans l’article de Médiapart n’a fait partie d’aucune « équipe », que cesoit auprès de Madame Ernotte Cunci ou de Monsieur Quillot, et n’a participé à la

    rédaction d’aucun projet stratégique, ce qu’il a lui-même eu l’occasion de déclarer,comme d’ailleurs relaté dans l’article de Médiapart.

    Ensuite, outre le fait que le site d’information en question a eu l’occasionde commettre des erreurs et n’est, à l’occasion, pas exempt de partialité, les passagesrelevés dans l’un et l’autre  des deux projets sont insusceptibles de caractériserl’existence d’un quelconque plagiat de la part de Madame Ernotte. 

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    Tout d’abord parce que le style, la forme et le fond  des proposcontenus dans les deux projets sont substantiellement différents. Les différentspassages cités par le requérant suffisent à le constater aisément.

    Ensuite parce que si certaines idées relevées par le syndicat et Médiapartsont communes aux deux candidats (audace, innovation, créativité, fierté d’êtreFrançais, clarification de l’offre  de France Télévisions, création d’un nouvelorganigramme paritaire, etc.), celles-ci restent assez générales, relèvent de l’air dutemps voire du simple bon sens, et surtout s’inspirent  de plusieursrecommandations issues d’un rapport du conseiller de  la Cour des comptesMonsieur Marc Schwartz  (Rapport « France Télévisions 2020 : Le chemin del’ambition », février 2015  –   dévoilé par BFM Business, cf. productions), et d’unrapport rendu par le CSA lui-même sur le bilan de l’action de Rémy Pflimlin à la

    tête de France Télévisions, au mois de décembre 2014  (cf. productions), étantrappelé que les dates de dépôt des candidatures ont précisément été fixées en vue depermettre aux différents candidats de prendre en compte les préconisations de cesrapports mais aussi des orientations gouvernementales.

    Il n’est donc pas surprenant que certains points clés soulignés par cesrapports se soient retrouvés développés dans le projet stratégique de plusieurscandidats ; c’est plutôt le contraire qui aurait été étonnant !

    Outre son titre particulièrement évocateur, le rapport du groupe detravail présidé par Monsieur Schwartz, qui constituait une véritable feuille de routepour le prochain président ou la prochaine présidente de la société France Télévisions, se concluait en effet ainsi :

    « Parce qu’elle pénètre dans tous les foyers, éclaire les premiers âges, formele regard sur le monde et les choses, la télévision publique, doit être, plusque jamais, la télévision de tous : une télévision unique, une télévisioncitoyenne, une télévision qui rassemble , qui donne envie de comprendre

    et d’agir, qui crée du sens.

    « Cette mission- là est irremplaçable. Nous n’en avons peut -être passuffisamment conscience, mais si la télévision publique n’était pas là, ilmanquerait quelque chose d’essentiel. Ce capital de confiance est précieuxet il nous revient de le préserver.

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    « France Télévisions en 2020 ? Une entreprise confortée dans son rôle deleader et d’acteur de référence du monde des médias ; une entreprise quis’est appuyée sur ses immenses atouts pour se réinventer, innovertoujours davantage, et prendre des risques   ; une entreprise quiassume pleinement un rôle central d’entraînement de la création

    audiovisuelle et a établi des relations mutuellement bénéfiques avec lemonde de la production ; une entreprise qui s’est projetée à l’international pour porter haut les couleurs de la culture et de la créativité françaises.

    « France Télévisions en 2020 ? Une entreprise agile, performante, réactive,autonome ; une entreprise fière d’elle -même, qui a réussi à libérer lesénergies et les talents de ses équipes ; une collectivité humaine qui aretrouvé confiance en elle et reconquis le chemin de l’ambition .

    « Demande-t-on trop à France Télévisions ? La question pourrait paraîtrelégitime à la lecture de ce rapport et des attentes exprimées. Le service public est invité à assumer de nouveaux territoires de conquête (jeunesse,citoyenneté, information) ; l’entr eprise à se transformer par une plus grandeefficience de ses moyens ( une stratégie de bouquet efficace , un fonctionnement plus souple, des coûts maîtrisés, des coopérations accruesavec les autres sociétés publiques) ; le diffuseur à rééquilibrer son modèleéconomique (des charges plus flexibles, des ressources propres accrues,des métiers davantage diversifiés vers la production et la gestion de droits); la société publique à construire une relation plus mature avec sonactionnaire (conseil d’administrat ion renforcé).

    « Si ces attentes font aujourd’hui corps avec une forme d’exigence, c’estqu’elles se mêlent avec une certaine urgence sur le plan économique. Lesecteur des médias est en mutation rapide, les ressources publiquesdemeurent contraintes, et le modèle économique des diffuseurs estconfronté à un risque d’affaiblissement structurel, en raison de l’arrivée denouveaux concurrents et de l’organisation segmentée du marché, qui freinela capacité des acteurs à se positionner au mieux au sein d’une  chaîne devaleur transformée par l’ouverture des marchés.

    « France Télévisions devra rapidement tracer un chemin qui lui permette deretrouver de l’agilité et reprendre le contrôle de son destin, afin de compter

    en 2020 parmi les leaders européens du secteur et redresser durablementsa situation financière. Un tel effort ne saurait être conduit sans un soutienactif de l’Etat. Celui - ci devra donner à l’entreprise un cadre stratégiquestable à moyen terme, assis sur une meilleure prévisibilité de sesressources ; accompagner son évolution vers une plus forte autonomie, encontrepartie de ses efforts de gestion ; et desserrer le cadre réglementairequi pèse sur son développement, pour lui permettre de faire évoluer sonmodèle économique.

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    « C’est à travers   un tel pacte de confiance et de développement que latélévision publique pourra retrouver la place qui est la sienne. Non pourtourner le dos à ce qu’elle est aujourd’hui : une grande entreprise qui a sumaintenir une vraie singularité dans ses programmes et conserver laconfiance de ses publics. Mais au contraire pour être fidèle à elle-même, et

    à la hauteur de sa mission.

    « France Télévisions en 2020 ? Nécessairement différente, mais résolument fidèle à ce qui fait son identité profonde, et qui aura réussi le pari de laréinvention du service public . »

    Il préconisait notamment de « stimuler la création et l’innovation  »(voir synthèse du rapport, p. 13, cf. productions) :

    « France Télévisions doit être un moteur, un aiguillon de la créationaudiovisuelle et cinématographique, afin de proposer au public une grandevariété d’œuvres qui se distinguent par leur qualité et leur caractèreinnovant . Dans ce cadre, elle doit prendre des risques pour renouveler lestalents et les formats sur tous les supports, particulièrement dans la fiction,et contribuer activement à la consolidation du secteur de la création, parune politique de financement élaborée et mise en œuvre en touteindépendance. »

    Il insistait sur la nécessité de prendre en considération « l’avènement dunumérique  » (synthèse, p. 2), de simplifier, de clarifier et de rendre lisible les missionsde service public de France Télévisions (pp. 7-9) mais également de clarifier son offre(p. 10, articulation des offres au sein du bouquet, notamment entre France 2, France3 et France 4).

    S’ agissant de France 3, le rapport a notamment suggéré un recentrage del’offre sur l’information, les services de proximité et les prises d’antennesexceptionnelles, ainsi qu’une mise en cohérence avec la future organisation

    territoriale du pays (p. 11).

    Le rapport a longuement insisté sur la clarification du bouquet de France Télévisions dans sa partie consacrée à « l’enjeu de cohérence  : réinventer une stratégiede bouquet auteur de la construction de marques fortes et complémentaires,correspondant à des promesses éditoriales claires  » (pp. 14-15).

    Le rapport préconisait également d’accompagner « l’évolution de la société

     française, en représenter la diversité dans toutes ses composantes et ses territoires  »(p. 13).

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    Bref, il s’agit de répondre aux enjeux actuels,  y compris en termesnumériques.

    Le rapport du CSA de décembre 2014, rédigé dans la perspective de lanomination du prochain président de la société France Télévisions, et sur lequel lerapport de M. Schwartz s’est en partie appuyé pour formuler ses propresconstatations et préconisations, énonce de son côté en guise de conclusion que :

    « Au terme de son étude, le Conseil souhaite rappeler l’importance ducontexte dans lequel l’entreprise publique a évolué au cours de la période2010-2014.

    « France Télévisions a ainsi fait face à un contexte de concurrence accrue, àune situation économique peu favorable aux investissements publicitaires

    et à des ressources publiques régulièrement revues à la baisse, sansvisibilité à terme. Ainsi qu’il a été marqué d’emblée, l’entreprise pu blique ainscrit son action dans ce contexte particulier, marqué par un héritagecomplexe. Dans ces conditions, certaines des actions entreprises ontvocation à ne produire des résultats qu’à moyen terme. 

    « A cette aune, le Conseil estime que plusieurs objectifs de la société FranceTélévisions annoncés par Rémy Pflimlin lors de son audition devant le CSAle 8 juillet 2010, ont été atteints. Ainsi, le Conseil salue la préservationd’une audience significative et l’affirmation d’une offre d’information

    abon dante et de qualité appuyée sur des magazines d’investigation quiconstituent dorénavant une caractéristique de l’offre de France Télévisions. (…)  

    « Pour autant, le Conseil observe que certains objectifs de l’entreprise n’ont pas été entièrement réalisés.

    « On peut tout d’abord estimer que la qualité de certains programmes (horsinformation) proposés par France Télévisions ne lui permet pas encore dese différencier assez nettement de l’offre des chaînes privées. Cettesituation peut trouver son origine dans un manque de renouvellement  et

    d’audace   notamment dans la fiction, ce qui a également desconséquences négatives sur l’objectif de rajeunissement de   l’audience.France Télévisions gagnerait sans doute à affirmer une ambition plusgrande en matière de programmes culturels , trop souvent relégués àdes horaires tardifs.

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    « Concernant l’offre de programmes des différentes chaîn es du groupe, leConseil estime indispensable une clarification des lignes éditoriales, qui pe rmettrait d’éviter que France 2 ne respecte pas assez la spécificité deFrance 3, se livrant ainsi davantage à une forme de concurrence internequ’à la conquête de nouveaux publics. Cette clarification   devra

    également porter sur la pérennité, à format inchangé, de France 4 et deFrance Ô. Par ailleurs, le Conseil ne peut que regretter l’absence de réformede France 3 régions qui constitue pourtant un enjeu éditorial et budgétairemajeur pou r France Télévisions et qui n’a  pas pu être définie clairementavec la tutelle.

    « Le Conseil estime également que la qualité des programmes a pu, dansune certaine mesure, être négativement influencée par une instabilité dumanagement , notamment sur France 2 et une répartition pas toujoursclaire dans ses responsabilités.

    « Le Conseil encourage France Télévisions à renforcer sa politiquede maîtrise des coûts , notamment ceux des moyens internes de production et à accompagner ce mouvement par une exigence renforcée enmatière de transparence.

    « Enfin, le Conseil salue l’implication et le pro  fessionnalisme dont font preuve quotidiennement les personnels de France Télévisions. Ils sont, à cetitre, les principaux garants du service public.

    « Au vu de ces appréciations, il est apparu utile au Conseil de fixer

    dix objectifs au regard desquels pourront être évalués les projetsstratégiques qui lui seront présentés par les candidats à la

     présidence de France Télévisions .

    « 1. Un impératif de qualité à renforcer  

    « Il devrait s’incarner dans :  

    « - l’exigence constante d’audace et d’innovation q ui doit irriguerl’ensemble des programmes, tant dans leur contenu que dans leurs

     formats, quelle que soit la chaîne considérée  ;

    « - la place particulière réservée à la culture : toutes les formes de culture –  ycompris classique –   doivent être proposées à des horaires attractifs etrendues plus accessibles ;

    « - l’offre d’information du service public qui doit se concentrer sur l’actualité politique, économique, sociale et internationale qui doivent être plus encoredes marqueurs de la télévision publique ;

    « - la mise en place d’une grille d’évaluation de la qualité de son offre plus

    encore fondée sur des critères objectifs sur la base de laquelle FranceTélévisions pourrait souscrire des engagements ;

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    « - une communication sur les programmes du groupe France Télévisionsqui mette mieux en valeur ses réalisations.

    « 2. Un périmètre des chaînes à optimiser

    « - en évitant que France 2 ne brouille pas trop fortement, par certains choixde programmation, l’offre de France 3. France 2 devr ait être mieux définiecomme la chaîne de l’actualité et de la société contemporaine, France 3incarnant la culture et les régions ; en répondant aux interrogations quesuscite l’aveni r de France 4 et de France Ô au sein du bouquet FranceTélévisions ;

    « - en renouvelant l’offre de France 5 à qui il importe d e donner les moyensd’exploiter mieux encore ses atouts ;

    « - en apportant une attention particulière à l’articulation, au plus hautniveau, de l’offre de programmes proposée par les différentes antennes àchaque moment de la journée.

    « 3. La question de France 3 à régler

    « La chaîne cumule les difficultés et les contraintes alors qu’ elle estabsolument vitale pour l’accomplissement des missions dévolues à FranceTélévisions. Il importera de mettre fin à cette situation en privilégiant :

    - un positionnement clair de France 3 qui trouverait toute sa légitimité

    comme chaîne de la culture et des régions ;

    « - la préservation de son rôle national, nécessaire au financement de lacréation et source de revenus publicitaires non négligeables pour le groupe public ;

    « - la réflexion sur le périmètre et les missions assignés en région à France 3au regard de la récente réforme territoriale. Cette analyse doit renforcerl’informatio n régionale en veillant à la gestion rationnelle de ses coûtsinduits par sa présence territoriale ;

    « - l’unification du management , qui devra mettre fin à la multiplicationdes centres de décisions (national, régional, programmes jeunesse etinformation nationale).

    « (…)  

    « 5. La stratégie numérique à conforter

    « A cette fin, il serait souhaitable :

    « - d’intégrer encore davantage le numérique dans chacune desdécisions du groupe France Télévisions  ;

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    « - de poursuivre la voie consistant à diffuser le plus largement possible les programmes du groupe, en particulier en ce quiconcerne la télévision de rattrapage  ;

    « - de mieux concentrer l’offre de programmes sur quelques services

    connus et reconnus par le public  ;

    « - de faciliter et de promouvoir la bonne lisibilité et la maîtrise descoûts consacrés au développement numérique en lui assignant desobjectifs quantifiés  ;

    « - de coopérer avec les autres entreprises publiques et tout particulièrementavec Radio France. (…)  

    « 7. Le management à améliorer  

    « Cette exigence devrait se traduire par :

    « - la rationalisation de la gouvernance de l’entrep rise, par la miseen place d’un organigramme simplifié apte à identifier lesresponsabilités  ;

    « - la stabilité des cadres, notamment supérieurs, de nature à garantir deschoix de long terme, conjuguée à un renouvellement des personnelsconsacrés aux fonctions éditoriales dans les unités de programmes ;

    « - l’adaptation et la formation des moyens humains  en cohérence avec lesmissions dévolues à l’entreprise et une meilleure v alorisation de ladélégation de responsabilité ;

    « - l’attention particulière apportée au climat social , dont la sérénité permettra au groupe de remplir les objectifs qui lui sont fixés ;

    « - la finalisation de l’entreprise unique, notamment en ce qui concerne lamise en commun des ressources.

    « 8. Le contrôle financier à renforcer  

    « A ce titre, pourraient être mis en place :

    « - un renforcement du rôle du conseil d’administ ration en élargissant sonchamp d’intervention afin de mieux utiliser ses compétences dans lecontrôle scrupuleux des dépenses. L’ensemble des outils de contrôleinterne  devront être mobilisés dans ce processus de reddition des compteset de transparence des dépenses ;

    « - le développement des prérogatives du Comit é d’audit et des comptes et

    le renforcement de la direction de l’ audit interne ; (…)  

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    « 10. Le financement à garantir

    « Le montant des crédits doit être assuré en liaison avec la réalisation desobjectifs.

    « L’entreprise doit être assurée d’une visibilité de ses ressources sur 5 ans. (…). »

    En d’autres termes, ces deux rapports ont largement balisé le terrain etfourni aux différents candidats de nombreuses pistes pour l’établissement de leurprojet stratégique, en insistant sur la nécessité d’innover, de créer mais aussi  derationaliser les différentes chaînes et de mieux organiser et gérer le groupe ainsi queses différentes structures.

    Il n’y a donc pas lieu de s’étonner que différents projets, tels que ceux deMadame Ernotte et de Monsieur Quillot - dont les parcours présentent au demeurantcertaines similitudes, tous deux ayant pendant longtemps travaillé au sein de lasociété France Telecom devenue Orange -, développent des thématiques et des idéescommunes, toutefois dans une optique et selon des termes clairement différents.

    Si l’on suit l’ordre  de déroulement de l’article de Médiapart, quoid’étonnant  en effet à ce que les deux candidats, en des termes substantiellement

    différents, aient préconisé la mise en place rapide d’un nouvel organigramme, enveillant à la parité hommes-femmes, le CSA ayant préconisé la poursuite des actionsmenées en ce sens (rapport, pp. 116 et 128) ?

    Une telle opération est du reste extrêmement courante lors de l’arrivéed’un nouveau dirigeant à la tête d’une grande société.

    On rappellera en outre que l’objectif de parité au sein des sociétésnationales audiovisuelles est clairement consacré à l’ article 43-11 de la loi. Il s’imposeégalement dans la composition même du CSA (article 4 de la loi du 30 septembre1986).

    Et Madame Ernotte Cunci a effectivement respecté l’objectif qu’elle s’étaitfixée (cf. productions, extrait de « Antennes », pp. 12-13).

    Une telle proposition découlait non seulement de l’air du temps maiségalement d’une contrainte extérieure, et n’avait ainsi aucun caractère original.

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    Quoi d’étonnant  également à ce que les deux candidats aient fait despropositions financières, en préconisant notamment la révision du budgetprévisionnel 2015, quand le CSA a insisté sur la nécessité de garantir le financementdes services de France Télévisions, de renforcer le contrôle financier interne (rapport,p. 129) et de mieux évaluer et gérer les coûts, en particulier en termes de productions(rapport, pp. 110-111) ?

    Les enjeux financiers que représente le service public audiovisuel sont audemeurant de notoriété publique, comme le révèlent les débats récurrents sur laredevance audiovisuelle et les incertitudes budgétaires qui l’entourent.

    Si Monsieur Quillot et Madame Ernotte Cunci, à l’instar d’autres

    candidats, ont insisté sur la nécessité de mieux distinguer les différentes chaînes deFrance Télévisions et notamment de faire de France 2 une chaîne de l’événement,c’est toujours en des termes très différents, et en suivant en cela non seulement lecahier des charges de France télévisions (rapport, p. 53) mais également lesrecommandations de « clarification » formulées par le CSA et Monsieur Schwartzdans leurs rapports respectifs (cf. supra ).

    Sur la nécessité de davantage intégrer France 3 national et France 3régions au niveau de la direction (management), les deux candidats se sont

    également inspirés, toujours de manière différente, du rapport du CSA (rapport, p.127) et du rapport de Monsieur Schwartz (synthèse, p. 15).

    Même chose concernant France 4 (rapport, pp. 65-68 : nécessité declarifier l’offre de la chaîne et de la recentrer sur sa première mission), dont le cahierdes charges fixe l’objectif « de fidéliser les jeunes et les jeunes adultes  » (voir égalementsynthèse rapport Schwartz, p. 15).

    Concernant enfin l’enjeu de la diversité, évoqué par les deux candidats, leCSA a rappelé l’existence d’un « Comité Diversité » au sein du groupe et a soulignédans son rapport la nécessité de renforcer la programmation en la matière (pp. 112-114). Étant rappelé que l’article 43-11 de la loi du 30 septembre impose aux sociétésnationales énumérées aux articles 44 et 45 de favoriser « les échanges entre lesdifférentes parties de la population ainsi que l’insertion sociale et la citoyenneté  » et demettre en œuvre « des actions en faveur de la cohésion sociale, de la diversitéculturelle, de la lutte contre les discriminations et des droits des femmes  ».

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    Il sera également relevé que Monsieur Quillot proposait le rattachementde ce comité à la direction générale déléguée aux programmes tandis que MadameErnotte Cunci a proposé son rattachement direct à la présidence de France Télévisions ; elle a également proposé qu’il soit composé de producteurs, d’experts etde représentants d’associations, composition aucunement suggérée par MonsieurQuillot.

    En somme, les deux candidats en cause, tout en développant leur proprevision et certaines idées originales, ont souhaité respecter plusieurs préconisationsextérieures, mais également prendre en compte les objectifs définis par la loi, àl’instar d’ailleurs, sans aucun doute, de la plupart des autres candidats.

    Le s yndicat requérant, comme l’article de Médiapart auquel il se réfère,n’établissent ainsi aucunement l’existence de ressemblances saillantes sur des pointsoriginaux et donc d’un quelconque plagiat, lequel relève en réalité de la pureinvention.

    Le syndicat requérant insiste en outre sur les ressemblances sanstoutefois évoquer les dissemblances, lesquelles sont bien plus nombreuses etdéterminantes, aussi bien dans la forme que dans le fond. Une simple lecture desplans et des thèmes développés par les deux projets suffit pour s’en convaincre. 

    Si l’on s’intéresse au fond, au notera à titre d’exemple des différencesfondamentales en matière de gestion des ressources humaines, Madame ErnotteCunci préconisant en particulier la mise en place d’une gestion prévisionnelle desemplois (GPEC), la réorganisation de la DRH pour donner la priorité auxresponsables de proximité, tout en insistant sur l’importance du dialogue social ausein de la société et la nécessaire sortie du « mille-feuilles  » statutaire et managérial ensimplifiant « l’échelle des responsabilités et en structurant la valorisation descompétences  » (projet, p. 8). Aucune de ces idées ou thèmes ne figure dans le rapport

    de Monsieur Quillot. Et cette expérience managériale a, comme on l’a souligné, euune place significative dans le choix de l’exposante, compte tenu de sa compétence reconnue en la matière et des enjeux de cet ordre pour France Télévisions.

    Enfin, rien ne permet d’affirmer que le projet de Monsieur Quillot seraitantérieur à celui de Madame Ernotte Cunci, élément tout aussi déterminant pourl’appréciation d’un quelconque plagiat.

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    Au demeurant, il est notable que Monsieur Quillot, premier intéressé, etqui n’a pas hésité à déposer une plainte (rapidement classée sans suite) contre lePrésident du CSA, n’a nullement entendu faire état, au pénal ou au civil, d’unquelconque plagiat de la part de Mme Ernotte Cunci.

    De même, force est de constater qu’alors que les projets des différentscandidats ont été décortiqués et disséqués par les membres du CSA, et que lescandidats sélectionnés ont été soumis à des auditions longues et approfondies, àaucun moment n’a été relevée ou même évoquée au cours de ces auditions  –   etsingulièrement de celle de Mme Ernotte Cunci- par aucun des membres unequelconque difficulté liée à la prétendue similitude excessive de certains projets, etencore moins à un quelconque soupçon de plagiat.

    En définitive, il n’y a donc strictement aucune raison que le juge puisse,dans les circonstances de l’espèce et dans le cadre du contrôle restreint qui est lesien, remettre en cause le choix opéré, de manière collégiale, par le Conseil supérieurde l’audiovisuel, au terme d’un processus parfaitement impartial et indépendant.

    À tous égards donc, le rejet du recours formé par le SNPCA CFE-CGCs’impose avec fermeté.

    V.  Sur les frais irrépétibles

    Au regard des circonstances de l’espèce, il serait particulièrementinéquitable de laisser à la charge de Madame Delphine Ernotte Cunci, défenderesse,les sommes qu’elle a dû engager pour la défense de ses intérêts. Elle demande enconséquence que soit mis à la charge du Syndicat demandeur, partie perdante, leversement d’une somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’articleL. 761-1 du code de justice administrative.

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    PAR CES MOTIFS, et tous autres à produire, déduire ou suppléer, aubesoin d’office, Madame Delphine Ernotte Cunci demande à ce qu’il plaise au Conseild’État :

    -  REJETER la requête,

    -  METTRE À LA CHARGE du Syndicat national des personnels de lacommunication et de l’audiovisuel CFE-CGC le versement d’unesomme de 2.500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative,

    Avec les conséquences de droit.

    Productions :

    1°) Extraits du magazine interne France Télévisions n° 58, septembre 2015

    2°) Rapport remis par Monsieur Marc Schwartz

    3°) Synthèse du rapport de Monsieur Schwartz

    4°) Rapport du CSA de décembre 2014

    SCP ROCHETEAU et UZAN-SARANOAvocat au Conseil d’État 

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