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Le siège de Rhodes par Cassius in Sièges de Rhodes

Date post: 08-Jan-2023
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Le siège de Rhodes par C. Cassius Longinus en 42 av. J.-C., de la bataille de Myndos à la prise de la ville Jusqu’en 42 av. J.-C. 1 , Rhodes demeure une cité inexpugnable. Bien à l’abri au large de la Carie et derrière ses hautes murailles, protégée par une flotte redou- tée, elle a été victorieuse de tous ceux qui l’ont assiégée, Démétrios Poliorcète en 305, Mithridate VI Eupator en 88. Pourtant, durant les guerres civiles suivant l’assassinat de Jules César, C. Cassius Longinus, un des chefs de la conspiration contre le dictateur, battit les Rhodiens sur mer puis investit leur île et leur ville. Fait étrange, cet exploit n’est presque pas célébré dans la littérature antique. En effet, ce fait d’armes n’est que brièvement mentionné par Velleius Paterculus, qui reconnaît la difficulté de l’entreprise, Valère Maxime, Plutarque et Orose, qui s’attachent surtout à la dureté des conditions faites aux Rhodiens 2 . Seuls Dion Cassius et surtout Appien montrent quelque intérêt pour cet épisode, mais ils sont loin d’éclairer toutes les obscurités du dossier 3 . La discrétion des sources invite donc à s’interroger sur le caractère exact des circonstances de ce siège : la capitulation rhodienne était-elle une véritable victoire ou bien la personnalité du héros, hostile aux héritiers de César, gênait- elle l’historiographie impériale ? Afin de répondre à cette double question, il conviendra d’abord de reprendre les relations houleuses entretenues par les Rhodiens avec les Libérateurs, puis de mettre en lumière les stratégies succes- sives adoptées par les premiers pour éviter le siège, enfin de comprendre com- ment cet événement a été en quelque sorte escamoté et pourtant célébré. RHODES À LA VEILLE DU SIÈGE Depuis 164, en raison de sa désastreuse tentative de médiation entre Rome et le roi Persée durant la troisième guerre de Macédoine 4 , Rhodes ne détenait plus la moindre marge de manœuvre diplomatique: elle avait les mêmes enne- mis que les Romains, devait répondre à toutes leurs réquisitions et la plus petite faiblesse compterait comme trahison 5 . Ce statut fut quelque peu assoupli par 171 Enquetes et documents 40:Enquêtes et documents n° 39 6/09/10 17:10 Page 171
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Le siège de Rhodespar C. Cassius Longinus en 42 av. J.-C.,

de la bataille de Myndos à la prise de la ville

Jusqu’en 42 av. J.-C.1, Rhodes demeure une cité inexpugnable. Bien à l’abri aularge de la Carie et derrière ses hautes murailles, protégée par une flotte redou-tée, elle a été victorieuse de tous ceux qui l’ont assiégée, Démétrios Poliorcèteen 305, Mithridate VI Eupator en 88. Pourtant, durant les guerres civiles suivantl’assassinat de Jules César, C. Cassius Longinus, un des chefs de la conspirationcontre le dictateur, battit les Rhodiens sur mer puis investit leur île et leur ville.Fait étrange, cet exploit n’est presque pas célébré dans la littérature antique. Eneffet, ce fait d’armes n’est que brièvement mentionné par Velleius Paterculus,qui reconnaît la difficulté de l’entreprise, Valère Maxime, Plutarque et Orose,qui s’attachent surtout à la dureté des conditions faites aux Rhodiens2. SeulsDion Cassius et surtout Appien montrent quelque intérêt pour cet épisode,mais ils sont loin d’éclairer toutes les obscurités du dossier3.

La discrétion des sources invite donc à s’interroger sur le caractère exactdes circonstances de ce siège : la capitulation rhodienne était-elle une véritablevictoire ou bien la personnalité du héros, hostile aux héritiers de César, gênait-elle l’historiographie impériale? Afin de répondre à cette double question, ilconviendra d’abord de reprendre les relations houleuses entretenues par lesRhodiens avec les Libérateurs, puis de mettre en lumière les stratégies succes-sives adoptées par les premiers pour éviter le siège, enfin de comprendre com-ment cet événement a été en quelque sorte escamoté et pourtant célébré.

RHODES À LA VEILLE DU SIÈGE

Depuis 164, en raison de sa désastreuse tentative de médiation entre Romeet le roi Persée durant la troisième guerre de Macédoine4, Rhodes ne détenaitplus la moindre marge de manœuvre diplomatique: elle avait les mêmes enne-mis que les Romains, devait répondre à toutes leurs réquisitions et la plus petitefaiblesse compterait comme trahison5. Ce statut fut quelque peu assoupli par

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Sylla qui donna aux Rhodiens le rang de cité libre et immune, pour récom-penser leur remarquable loyauté durant la guerre de Mithridate6. Par la suite,l’alliance fut renouvelée, d’abord par les Pompéiens en 517, puis par César en478.

En vertu du traité et à cause de l’exceptionnelle qualité de sa marine, Rhodess’était affirmée comme la plus importante alliée maritime des Romains malgrél’amoindrissement progressif de ses forces. Elle était pour eux une pièce maî-tresse incontournable dans la mesure où ils n’entretenaient aucune flotte per-manente en Méditerranée orientale et faisaient appel aux cités portuaires pourfournir les bâtiments et les équipages dont ils avaient besoin9. Ainsi, entre lafin du IIe et le début du Ier siècle, les bateaux rhodiens avaient été le fer de lancedes guerres contre les pirates10 et contre Mithridate11. En 48, l’île obéit au Sénaten envoyant contre les Césariens une escadre commandée par le PompéienC. Coponius, mais celle-ci fut balayée par une tempête au large des côtes illy-riennes12. La clémence de César à l’égard des naufragés retourna l’opinion rho-dienne en sa faveur13. Après Pharsale, la cité ferma son port aux Pompéiens quicherchaient de l’aide14. Elle s’engagea davantage durant la guerre d’Alexandrieoù elle dépêcha des navires qui soutinrent brillamment César. L’auteur duBellum Alexandrinum ne tarit pas ici d’éloges sur l’héroïsme de son amiralEuphranor qui joua un rôle décisif dans la bataille au large de Pharos15. Romainset Alexandrins étaient alors séparés par des hauts-fonds que seule une passeétroite permettait de franchir. De fait, la flotte qui prenait l’initiative de l’attaquerisquait d’être en difficulté le temps de rassembler ses forces16. Les Rhodiensse dévouèrent et, avec seulement quatre navires, tinrent en respect la flotteennemie le temps que manœuvrât avec succès le reste des forces romaines etalliées17. En 43, dans la suite logique de cet attachement, Rhodes choisit lecamp des Césariens.

En effet, dès le printemps 44, les provinces orientales devinrent l’enjeu dela compétition encore pacifique entre les partisans des tyrannicides et ceux deCésar. Le 17 mars, le Sénat décida d’entériner les attributions de provinces pré-vues sous la dictature18. Ainsi, deux membres de la conjuration, C. Treboniuset L. Tillius Cimber, obtinrent respectivement les gouvernements de Bithynieet d’Asie19. Dès leur arrivée sur place en avril, ils s’employèrent, à la demandede Brutus et Cassius, à lever des troupes, des fonds et à obtenir des naviresdes cités de la région20. Aucune évaluation de ces réquisitions ne subsiste maison sait que Rhodes ne leur a rien fourni à ce moment. En juin, une loi fut votéeà Rome; elle confiait la province de Syrie au consul césarien P. Cornelius Dola-bella21. En route pour revêtir sa charge, ce dernier se heurta en janvier 43 àC. Trebonius, dont il devait traverser la province, le saisit et le fit exécuter22.Rassemblant ensuite des troupes et de l’argent pour conquérir la Syrie qu’occu-pait déjà Cassius23, il reçut l’aide des Rhodiens, des Lyciens, des Pamphyliens,des Ciliciens et de la reine Cléopâtre VII d’Égypte qui, non seulement lui fourni-rent des navires pour le combat et le transport des troupes24, mais refusèrent

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le mouillage et l’avitaillement à P. Cornelius Lentulus Spinther, questeur duconjuré C. Trebonius25. L’affrontement décisif eut lieu en Syrie, à Laodicée-sur-Mer: la flotte de Dolabella y fut défaite, la ville, dans laquelle celui-ci s’était réfu-gié, tomba entre les mains de Cassius, le vaincu dut se résoudre au suicide26.Entre-temps, la situation politique à Rome s’était retournée en faveur des Libé-rateurs. Les Philippiques de Cicéron avaient fait évoluer l’opinion sénatorialequi avait condamné Dolabella et ses hommes comme ennemis publics et quiavait conféré à Cassius et à Brutus l’imperium sur les deux principales provincesde l’Orient romain27. Forts désormais de leur bon droit, ces derniers poursui-virent leur mainmise sur la région28. Mais, à Rome, le rapport de force s’est ànouveau inversé : en août 43, Octavien fut élu au consulat et l’une de ses pre-mières décisions fut de faire condamner les conjurés en vertu de la lex Pedia29.De plus, en novembre 43, le triumvirat se constitua, proscrivit tous ses adver-saires politiques et se prépara à faire la guerre à l’armée des Libérateurs.

C’est dans ce contexte que se place la conférence de Smyrne réunissantCassius et Brutus. Ces derniers décidèrent alors de se retourner contre Rhodeset la Lycie afin d’éliminer toute contestation dans les territoires orientaux avantle déclenchement de la campagne décisive contre les Césariens30. Appien etDion Cassius ne mentionnent que des considérations stratégiques pour expli-quer l’attaque de Rhodes. Cependant, il paraît tout aussi vraisemblable quedes raisons financières aient poussé en ce sens. En effet, le nerf de la guerreapparaît comme une préoccupation constante de Brutus et de Cassius. Lesecond a ainsi confisqué la fortune d’Ariobarzane III, roi de Cappadoce, qu’ilavait fait exécuter l’été précédent en l’accusant d’avoir comploté contre sapersonne31. De même, il a pillé Laodicée-sur-Mer et ses sanctuaires, levé de trèslourdes contributions sur la population ainsi que sur les Tarsiens jugés, nonsans motifs, par trop versatiles32. Malgré toutes ces rentrées d’argent, ce trésorde guerre n’était pas suffisant pour assurer le recrutement, l’équipement et lepaiement d’une puissante armée capable de se mesurer à celle des Césariens33.Cassius se tourna alors vers Rhodes qu’il connaissait bien.

En effet, le Libérateur conservait des relations privilégiées avec l’île où, danssa jeunesse, il avait acquis une grande partie de sa culture hellénique34, suivanten cela l’exemple de nombreux Romains de bonne famille de la fin de la Répu-blique, C. Iulius Caesar, M. Iunius Brutus, T. Manlius Torquatus, Cn. PompeiusMagnus, Ser. Sulpicius Rufus, M. Tullius Cicero père, M. Tullius Cicero fils,Q. Tullius Cicero35. Depuis au moins la fin du IIe siècle, Rhodes était renomméepour ses professeurs de philosophie et de rhétorique, de philologie et de lin-guistique, de poésie et de musique, ou bien encore de géographie et d’astrono-mie36. Elle était devenue un centre essentiel de la vie intellectuelle grecque grâceà la générosité de fondations royales éclairées et en raison de l’effacement cultu-rel d’Athènes après la dévastation de la ville par Sylla37. Rhodes se distinguaen particulier dans le domaine de la rhétorique et de la philosophie où brillèrentle fameux Apollônios Molôn d’Alabanda38 et Poseidônios d’Apamée de Syrie39.

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Ce dernier, à la suite de son maître Panaitios de Rhodes40, porta haut les valeursde la philosophie stoïcienne, contribuant un peu plus à son rayonnement dansles élites romaines41.

Comptant peut-être sur ces bonnes relations, les Rhodiens envoyèrent unepremière ambassade à Cassius qui rassemblait et entraînait ses troupes dansle port carien de Myndos42. Dion Cassius et Appien présentent des versions dela rencontre légèrement différentes mais concordantes. Le premier indique queles ambassadeurs narguèrent les Romains en leur présentant les entraves aveclesquelles ils comptaient les retenir prisonniers une fois leur défaite consom-mée43. Pour Appien, les délégués cherchèrent plutôt à éviter l’affrontement enfaisant appel à l’autorité des traités antérieurs et du Sénat de Rome44. Mais cedernier argument était spécieux, voire provocateur, dans la mesure où le Sénat,au début de 42, était hostile aux Libérateurs désormais condamnés et pros-crits45. En retour, Cassius opposa à ses interlocuteurs une logique de parti : enapportant de l’aide à Dolabella et en fermant son port aux Républicains, l’îleavait commis un acte hostile entraînant une réponse militaire46. Cette inflexi-bilité produisit un durcissement de l’opinion rhodienne qui porta au pouvoirdeux partisans de la guerre, Alexandros et Mnaséas47, et de fait réduisit ausilence, du moins provisoirement, les partisans d’une paix négociée.

Nouvel homme fort de sa cité, Alexandros devint prytane, magistrature trèsimportante chez les Rhodiens comme le souligne Appien. En effet, son électionà ce poste le faisait entrer dans un collège d’au moins cinq membres choisisparmi l’ensemble citoyens et désignés pour une durée de six mois. Siégeant auprytanée, où les archives de la cité étaient déposées, ces derniers exerçaient lamagistrature rhodienne la plus élevée, concentrant des pouvoirs de différentesnatures: ils présidaient la boulè et sans doute aussi l’ecclésia où ils présentaientles ordres du jour48. Comme les prytanes étaient aussi chargés de désigner lesambassadeurs49, la promotion d’Alexandros achevait de durcir la ligne diplo-matique rhodienne à l’égard de Cassius. Les prytanes jouissaient donc d’uneautorité décisive en dépit de la souveraineté théorique de l’ecclésia et du poidsconsidérable de la boulè évoqué par Cicéron50.

Mnaséas obtint pour sa part la charge de navarque qui n’était pas moinsimportante que celle d’Alexandros. En effet, en temps de guerre, le navarque deRhodes commandait comme amiral de la flotte et avait le droit de conclure destraités internationaux sans l’accord préalable de l’ecclésia. Ces prérogativesétaient bien sûr dictées par la nécessité de traiter rapidement en fonction dela situation militaire. C’est pourquoi le peuple lui déléguait pour un temps unepartie de son pouvoir souverain51. Cependant, cette charge n’était pas régulière;il s’agissait d’une magistrature extraordinaire qui n’avait de justification et dedurée que dans l’état de guerre. Le simple fait que les Rhodiens en aient élu unà l’issue de la première ambassade signifie qu’ils étaient déjà résolus à la guerre.

De par leurs fonctions, Alexandros et Mnaséas étaient bien « les chefs desRhodiens», pour reprendre une remarque d’Appien à leur sujet52. Mais, des

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décisions qu’ils prirent comme tels, nous ne leur en connaissons explicitementqu’une, celle de s’embarquer avec la flotte rhodienne pour attaquer Cassius53.Toutefois, peut-être sont-ils aussi à l’origine d’une seconde et curieuse ambas-sade auprès de ce dernier.

Selon le seul témoignage d’Appien, alors que les deux camps fourbissaientleurs armes, Rhodes envoya une nouvelle délégation au sein de laquelle figuraitArchélaos, ancien professeur de grec de Cassius54. Grâce à lui, elle espérait sansdoute jouer sur la corde sensible de la familiarité pour fléchir l’adversaire etle dissuader de mettre son projet à exécution. Avec force larmes et émotion,Archéalos rappela habilement à Cassius les titres de Rhodes à sa reconnaissanceet à celle de Rome, tout en le menaçant presque sans voile d’un revers dans lalignée des succès rhodiens face à des ennemis aussi prestigieux que Démé-trios Poliorcète, Antiochos III et Mithridate VI55. De même, il argua que les tyran-nicides, en s’attaquant à une puissance restée libre, étaient en contradictionavec leurs principes56. Le discours du vieillard achevé57, la réponse de Cassius,reposant sur le paradoxe droit/équité et réfutant toute légitimité au traité deCésar et au Sénat de 42, se révéla un autre morceau de bravoure58. Chaquepartie campait donc sur ses positions et ce qui aurait pu passer pour unenégociation de la dernière chance était voué, dès le départ, à l’échec. Comme lemontre l’absence de tout nouvel élément dans les argumentations, les adver-saires étaient déjà prêts à en découdre, ce qui nous amène à nous interrogersur les véritables raisons de ces nouveaux pourparlers. Si ces derniers ontvraiment eu lieu59, ils ne pouvaient être pour les Rhodiens qu’un moyen de faireperdre son temps à Cassius pour mieux le surprendre par une attaque éclair.

LES MÉCOMPTES MARITIMES RHODIENS

Rien dans les récits que Dion Cassius et Appien nous rapportent de cesnégociations n’était susceptible d’apaiser la colère de Cassius. Pire encore, lespropos des Rhodiens frisaient l’insolence. Leur but n’était pas de trouver unterrain d’entente mais de dissuader leur interlocuteur de courir le risque d’atta-quer une puissance aussi redoutable que celle de Rhodes. Bien évidemment,malgré la confiance en leur supériorité navale, les Rhodiens ne pouvaient s’illu-sionner sur l’issue d’un conflit avec une armée romaine. Toutefois, ils étaientcapables de décourager leur adversaire en lui infligeant des pertes dispropor-tionnées par rapport aux enjeux. Il ne faut pas oublier que, en même temps, lesCésariens se préparaient à une vaste contre-offensive contre les Libérateurs.Or, ni Cassius, ni Brutus n’avaient le loisir de s’attarder à réduire une vive résis-tance sur leurs arrières. En outre, les Rhodiens faisaient certainement le paride la victoire finale des Césariens. C’est, à notre avis, dans cet esprit qu’il fautcomprendre la stratégie déployée par les insulaires au large de Myndos etdurant le siège qui suivit.

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La première opération militaire se déroula près de la côte carienne, là oùCassius avait réuni sa flotte en prévision de l’investissement de Rhodes. DionCassius en fait le premier des trois actes conduisant à la prise de la ville, alorsqu’Appien, dont le récit est plus détaillé, semble considérer l’affaire de Myndoscomme le tournant décisif de la guerre.

Les Rhodiens prirent l’initiative d’attaquer Cassius avant même qu’il nequittât sa base navale pour investir leur île. Cette tactique tenait compte durapport de force entre les deux armées. Les Romains avaient une flotte nom-breuse, constituée d’au moins quatre-vingts navires de guerre60. Cette armadaétait issue de forces disparates réunies à la suite des rançons et des batailles.En effet, Dion Cassius cite parmi les chefs du siège de Rhodes Statius, qui avaitcommandé les navires républicains à Laodicée-sur-Mer et vaincu Dolabellaainsi que ses alliés rhodiens61. Appien mentionne également L. Cornelius Len-tulus Spinther parmi les officiers de Cassius62. Or, celui-ci dirigeait une des deuxescadres rassemblées par C. Trebonius et qui échappèrent à Dolabella lors deson passage dans la province d’Asie63. Les bâtiments la composant étaientmajoritairement des polyrèmes, unités de plus de trois rangs de rames, héri-tiers de la tradition hellénistique des géants des mers : les quadrirèmes-qua-drières et les quinquérèmes-pentères. Les plus grosses unités ou hexerei, à sixrangs de rames, étaient utilisées en général comme vaisseaux amiraux64. Ser-vies par des équipages pouvant aller jusqu’à 420 hommes65, puissammentarmées, hérissées de tours et de propugnacula, plus hautes sur l’eau que lestrières, ces véritables « forteresses flottantes» atteignaient les équipagesadverses sans difficulté et envoyaient des boulets, des traits et divers combus-tibles sur les autres bâtiments ou sur les infrastructures portuaires lors dessièges66. Conçues aussi pour affronter la haute mer, où elles résistaient mieuxà la houle que les navires légers, elles étaient enfin bien adaptées aux opéra-tions alliant combat terrestre et maîtrise de la mer, atout essentiel pour menerà bien une guerre de siège. Dans la perspective des combats terrestres et navalsà venir, la flotte de Cassius présentait donc deux avantages : le nombre et lataille de ses navires67. Mais elle souffrait en même temps d’un grave handicap :les équipages la composant n’avaient pas l’habitude de manœuvrer ensemble.C’est pourquoi le Libérateur entreprit de les entraîner longuement avantd’envisager toute action combinée contre la ville de Rhodes68.

De leur côté, les Rhodiens n’alignaient que trente-trois navires de guerre69,ce qui représentait un rapport de force d’environ 1 pour 2,5 en faveur de la flottede Cassius. Toutefois, une semblable disproportion était souvent source deprofit pour les Rhodiens. Ainsi, durant la première guerre mithridatique, uneescadre de six navires tint tête avec succès à vingt-cinq bâtiments de la flottepontique70. De même, lors de la guerre d’Alexandrie, quatre navires rhodienssuffirent à bloquer la flotte alexandrine à l’entrée du Grand-Port71. De tels suc-cès tenaient à la rapidité des embarcations ainsi qu’à l’art et à l’adresse de leurséquipages. Or, en 42, les Rhodiens disposaient de bâtiments plus légers et plus

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petits que ceux des Romains72. Cette mention fait penser à un bateau emblé-matique de la flotte rhodienne, la triemiolia. Ce navire long à trois rangs derames, apparenté à la fameuse hemiolia, dont il reprenait semble-t-il les atoutsde manœuvrabilité et de rapidité73, embarquait un équipage de 48 hommesd’après Chr. Blinkenberg, peut-être davantage selon V. Gabrielsen74, en tous lescas bien en deçà des capacités des polyrèmes romaines. Sans doute, les Rho-diens disposaient-ils en 42 de bâtiments plus imposants, aucune flotte n’étantcomposée, à quelque époque que ce soit, d’un seul type de bateau75. Toute-fois, on peut supposer que l’escadre envoyée contre Myndos ne représentaitpas la totalité des forces navales rhodiennes disponibles car seuls les vaisseauxles plus rapides avaient été sélectionnés pour l’attaque. Il faut dire que, comptetenu de la disproportion des flottes en présence, les Rhodiens devaient prendrede court les Romains pour les empêcher de déployer leur tactique et les enfer-mer dans un espace restreint où l’avantage de la taille se muerait en handicap.L’extrême rapidité de leurs bateaux et la qualité de leurs équipages devaientleur permettre cette tactique audacieuse.

Optant donc pour la surprise et le mouvement, Alexandros et Mnaséas firentroute rapidement vers Myndos pour frapper les navires de Cassius encore àl’ancre, comme cela avait été déjà fait au même endroit aux dépens de Mithri-date VI quelques décennies plus tôt76. À cette fin, ils mirent l’escadre rhodienneà la rame dès le premier jour de l’opération, «pour étaler leur force» nous ditAppien77. De prime abord, cette manœuvre peut paraître inconséquente dansla mesure où elle a certainement fatigué une chiourme dont le rôle allait êtrepourtant essentiel dans la bataille à venir. En fait, les vents n’étaient sans doutepas assez favorables pour marcher seulement à la voile. L’appoint des rameursne pouvait qu’accroître la vitesse de la flotte, ce qui lui permit de mouiller envue de Cnide le soir venu78. Le lendemain, les navires rhodiens allèrent directe-ment de ce port à Myndos qu’ils atteignirent par la haute mer dans le courant dela journée79. Ce mouvement suggère qu’ils contournèrent Cos par l’ouest pouréviter d’être repérés par les avant-postes de Cassius, qui dut installer un dispo-sitif de surveillance côtière pour prévenir les attaques par les routes maritimesordinaires80. Dans l’application d’un tel plan, aller le plus vite possible en toutediscrétion, les Rhodiens avaient pris à l’évidence de gros risques : d’une partsoumettre les équipages à des cadences élevées, et donc les éreinter, d’autrepart faire canal81, et donc allonger la durée de l’effort. Le choix de cette tactique,hypothéquant les chances de succès au moment de la confrontation, se com-prend néanmoins si l’on admet que les Rhodiens avaient l’intention, non de semesurer aux Romains dans une classique bataille rangée, dont ils n’avaientd’ailleurs aucune chance de sortir vainqueurs, mais de faire, tel un commando,le plus de dégâts possibles pour ruiner la confiance de l’adversaire et le dissua-der d’aller plus avant dans ses intentions de conquête. La disposition des bâti-ments de Cassius à Myndos, soit en rade, donc immobilisés, soit en désordre,donc privés de l’essentiel de leurs atouts, ne pouvait que servir pareil dessein.

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De fait, le début de la bataille fut favorable aux attaquants, les Romainsayant été pris de court par la soudaineté de l’attaque82. Mais, passé le momentde surprise, ces derniers réagirent plus vite que ne l’espéraient les Rhodiensdans la mesure où ils parvinrent à appareiller83. Malgré ce premier accroc dansle plan, les navires de Rhodes réussirent à exécuter la manœuvre connue sousle nom de dievkplou" (enfoncement au centre). D’après Appien84, ils se faufilè-rent sans difficulté entre les rangs ennemis pour les éperonner à revers. Mais,une fois de plus, leur tactique fut déjouée par les Romains. En effet, les poly-rèmes de Cassius avaient profité, semble-t-il, de l’élan que leur conférait leurmasse pour peser sur l’adversaire comme dans un combat d’infanterie. Puis,utilisant le rapport de force qui leur était favorable, elles encerclèrent lesRhodiens et les contraignirent à une attaque frontale. Le résultat de cettemanœuvre ne fut pas moins étonnant : pas un navire romain ne fut coulé mêmesi beaucoup furent endommagés85. Il faut penser que ces derniers, juste aprèsavoir levé l’ancre, n’offraient pas une ligne de bataille solide. Mais il est pro-bable que cela dissimulait un piège car ils présentaient une formation, certesdiscontinue, mais en profondeur, incitant les Rhodiens à se faufiler entre eux.Alors, très vite, déployant leurs forces, les navires de Cassius réduisirent lesdistances qui les séparaient les uns des autres et repoussèrent l’ennemi versl’avant. Ils réussirent ainsi à passer d’un dispositif en profondeur à un dispo-sitif linéaire, à former une vaste ligne serrée, peut-être en croissant. Leurnombre supérieur empêcha les Rhodiens de les contourner par les ailes où ilsavaient probablement installé les unités les plus puissantes et qui se refermè-rent en tenailles sur les navires qui n’avaient pas été assez rapides pourprendre le large. La tactique du dievkplou" fut alors transformée en perivplou"(encerclement).

C’est ce qui explique pourquoi, selon Appien, les Romains, soit brisèrent desbâtiments, soit capturèrent des navires avec leur équipage sans avoir eu besoinde pratiquer l’abordage86.

Déclenchée au départ pour empêcher un siège à l’issue incertaine, la mêléede Myndos fut une bataille de mouvement où prévalut l’utilisation de l’espaceselon les règles de l’art déjà fixées au temps de Thucydide87. Elle supposait dela part des deux camps une excellente connaissance du combat naval. La supé-riorité tactique de la marine rhodienne ne suffit pas à renverser le rapport deforce en sa faveur, peut-être pour deux raisons. La première résidait dans lapréparation des Romains et les qualités de leur chef ; la seconde, esquissée parAppien, est à porter au compte du navarque qui surmena la chiourme en vou-lant prendre l’ennemi de vitesse. La fatigue des rameurs diminua peut-être lacapacité de manœuvre de l’escadre, laissant l’initiative aux Romains.

Le résultat de la bataille, tout en ouvrant à ces derniers la route de Rhodes,justifiait également la prédilection des flottes tardo-hellénistiques pour lespolyrèmes, à condition d’avoir des équipages suffisants et entraînés.

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LA CHUTE DE RHODES

L’échec d’Alexandros et Mnaséas à Myndos rendait le siège de Rhodesdésormais inévitable et celui-ci se fit à de moins bonnes conditions que pré-vues. En effet, les Rhodiens n’avaient plus un dispositif maritime suffisant pouréviter le blocus car ils n’avaient récupéré que vingt-huit navires, et encoreendommagés, de l’escadre partie au combat88. La bataille de Myndos les avaitdonc affaiblis au lieu de dissuader Cassius d’aller plus loin dans son entreprise.Ce dernier, une fois ses navires réparés et équipés de tours escamotables enprévision de l’attaque des défenses portuaires ennemies, fit voile vers Lôryma,port situé à l’extrémité méridionale de la Pérée rhodienne, au point le plusproche de l’île89.

Le site était une des principales bases navales de Rhodes sur le continent.Point de passage obligé entre la mer Égée et la Méditerranée orientale, contrô-lant, avec la ville de Rhodes, le détroit séparant la mer de Lycie et la mer deCarpathos, l’endroit servit à plusieurs reprises de point de ralliement à degrandes flottes de combat. Tel fut le cas des Athéniens lors de leur campagnecarienne de 412-411 contre les Péloponnésiens et leurs alliés, des Perses aprèsla bataille de Cnide en 394, ou bien encore de Démétrios Poliorcète qui, en 305,y rassembla toutes ses troupes et son imposante flotte avant de prendre lamer en direction de Rhodes90. D’une importance stratégique capitale, Lôrymaétait défendue par trois forteresses construites à des époques différentes etdont la plus récente (appelée Lôryma III par les spécialistes) pourrait avoirété celle contre laquelle Cassius se dirigea91. Parvenue jusqu’à nous dans unexcellent état de conservation, cette dernière, située sur un promontoirerocheux de quarante mètres de haut, à l’ouest du port, couvre encore aujour-d’hui une surface de presque 0,9 hectare, est dotée de poternes et est flanquéede onze puissantes tours percées de meurtrières et près desquelles ont étécreusées des citernes, manifestement pour pouvoir soutenir un long siège92.Ce formidable édifice représentait donc un point de défense digne de la valeurdu lieu qu’il était censé protéger. Comme Démétrios Poliorcète avant lui, Cassiusse devait de prendre cet endroit avant de se lancer à l’assaut de Rhodes.

Une fois maître de ce point fortifié et de sa garnison93, le Libérateur putentreprendre, sans risque désormais pour ses arrières, l’investissement de l’îlepar son infanterie. Envoyée sur place au moyen de bateaux de transport, celle-ci avait été placée sous le commandement des légats Fannius et P. CorneliusLentulus Spinther94. Contrairement à ce qui s’était passé durant la premièreguerre mithridatique, les Rhodiens ne semblent pas avoir été en mesure degêner cette manœuvre car Cassius utilisa ses quatre-vingts navires de guerrepour bloquer la flotte rhodienne dans son port95. Bien entendu, les Rhodienstentèrent de forcer le blocus avant qu’il ne fût achevé. Nous ignorons tout descirconstances exactes de cet engagement si ce n’est que Rhodes y perdit encoredeux navires96. À partir de là, les assiégés n’eurent plus la capacité de se libérer

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de l’étreinte. La situation devint très vite critique car aucune provision n’avaitété faite, aucune mesure n’avait été prise en prévision d’un siège97. Cela prouveque les insulaires avaient tout misé sur la capacité de leur flotte, sinon à défaireles Romains, du moins à leur épargner les rigueurs d’un blocus. Désormais, letemps jouait en faveur de Cassius mais celui-ci, plutôt que d’attendre une red-dition inévitable, lança son infanterie et sa flotte à l’assaut des puissantesmurailles98. À la tête de la marine préparée à cet effet, il attaqua les défensesnavales de la ville grâce à des tours dépliables dressées sur ses grandsnavires99. Celles-ci constituaient l’équivalent des tours mobiles utilisées dansles sièges terrestres. Sur mer, les marines de guerre antiques, en particulier lesflottes romaines des guerres civiles, utilisaient ces superstructures en les pla-çant, tantôt à la proue, tantôt au milieu, tantôt à la poupe des navires pour sur-élever les pièces d’artillerie et amplifier ainsi leur champ balistique100. Grâceà de telles installations, Cassius était dans une situation plus favorable que nel’avait été Mithridate VI en 88101. En effet, dépourvu d’artillerie sur terre102, cedernier n’avait pu compter sur mer que sur une sorte de sambuque montée surdeux navires et d’où l’armée pontique lançait des projectiles sur les défensesadversaires. D’une efficacité en revanche limitée quant à sa capacité à déposersuffisamment de soldats au sommet d’un rempart, elle devait finir par s’écrou-ler sous l’effet de son propre poids103. Les choses allant tout autrement en 42,les dissensions internes, que l’arrivée au pouvoir d’Alexandros et Mnaséasavait un temps fait taire, ne tardèrent pas à resurgir chez les Rhodiens.

Il est vrai que la situation des assiégés était alors désespérée car la pressionexercée par les troupes de Cassius sur leurs remparts était aux limites de cequ’ils pouvaient soutenir. Par ailleurs, comme la ville avait été édifiée selon unplan hippodamien, la chute de ses murs impliquait celle, inévitable, de tous sesquartiers104. C’est pourquoi, à la suite d’Appien, « il était évident que (Rhodes)serait prise très rapidement par la force ou par la faim»105. Devant l’imminencede la défaite, des pourparlers furent engagés avec les assaillants. Si nous igno-rons tout de leur contenu106, c’est par la trahison, non par la reddition, que laville fut finalement investie. En effet, alors que les discussions étaient en cours,Cassius, à la tête d’une troupe d’élite, fit brutalement irruption au cœur de lacité sans qu’il eût besoin de passer par-dessus les remparts ou d’enfoncer unpoint des défenses adverses107. Il n’y eut pas de résistance. De l’avis général,des Rhodiens gagnés à sa cause lui avaient facilité un accès en ouvrant plu-sieurs poternes. Fort de ce soutien, le Libérateur s’installa ensuite sur une tri-bune et planta une lance comme si la ville avait été prise après un derniercombat108. Par ce geste, l’endroit et ceux qui l’habitaient étaient désormais àson entière discrétion.

Comme le rappelle G. Flamerie de Lachapelle109, le droit de la lance permet-tait au vainqueur d’appliquer à une ville prise d’assaut, quelles que fussent lescirconstances de sa soumission (reddition ou capture) et d’un point de vuestrictement juridique, le traitement de son choix : démantèlement des défenses,

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destruction de tout ou partie des bâtiments, mise à sac des lieux, exécution desnotables et des combattants, réduction en esclavage du reste de la population.Cela étant, dans la pratique, si une ville prise de vive force était effectivementpillée, une ville qui déposait les armes était traitée avec plus de mansuétude110.Dans le cas de Rhodes, en simulant un assaut et en revendiquant le droit de lalance, Cassius faisait craindre aux Rhodiens, qui s’étaient pourtant rendus, ledéchaînement de la violence. Or, le traitement, certes très dur, que Cassius leurimposa s’apparenta plutôt aux mesures réservées aux villes qui se rendaient :exécutions des notables compromis111, perception d’un lourd tribut sur lequelnous reviendrons plus loin. De plus, le Libérateur interdit rigoureusement toutpillage à ses soldats112. À l’évidence, il y avait une forte contradiction entre lesapparences et la réalité car Rhodes avait été tout à la fois prise et donnée. Celarésultait, sans nul doute, de négociations serrées où les deux parties trouvèrentplus ou moins leur compte. Cassius était certes assuré de prendre tôt ou tardla ville, mais l’incertitude demeurait sur le coût de l’opération et le délai de sonexécution. Mais ses partisans lui offrirent une victoire rapide et sans risqueaors qu’une grande offensive se profilait à l’ouest. Les assiégés, quant à eux,furent sauvés d’une famine et de destructions certaines au prix d’un nombrerestreint d’exécutions et de lourdes contributions. Enfin, ils n’avaient pas démé-rité aux yeux des Césariens dans la mesure ils avaient été réduits par la force.Cela explique pourquoi ils ne manquèrent pas de se présenter en victimesquand, l’année suivante, Marc Antoine, vainqueur des Libérateurs et nouveaumaître des îles et de l’Asie, leur rendit visite113.

Les circonstances troubles de la prise de Rhodes expliquent que l’on n’aitpas considéré dès l’Antiquité la conquête de la ville comme une franche victoire.Il manquait une épreuve de force décisive et une action d’éclat. La seconderaison de ce silence relatif des sources réside dans le fait que le siège n’étaitqu’un épisode de la grande campagne opposant les Libérateurs aux Césariens.La déroute finale des premiers effaça dans les faits comme dans les mémoiresle bénéfice des succès précédents. Toutefois, sur le moment, Cassius célébraune victoire qui mettait fin à la réputation d’invincibilité maritime des Rhodienset d’inviolabilité de leurs murailles. En outre, d’un point de vue stratégique, ily gagnait la maîtrise totale de la Méditerranée orientale, et d’un point de vuetactique il décourageait toute nouvelle velléité de révolte. Pour galvaniser sestroupes, il diffusa des aurei et des deniers répartis entre trois émissions, une d’oret deux d’argent, exaltant ses succès répétés en Orient. Deux de ces frappes,dont celle en or, montraient au droit une tête laurée de la Libertas à droite, avecla légende C(aius) CASSI(us) IMP(erator), et au revers un aplustre aux branchescouvertes de fleurs, des roses selon toute apparence, avec la légende M(arcus)SERVILIVS LEG(atus)114. Sur la troisième, si le type de droit et la légende derevers restaient les mêmes, la légende de droit était cette fois écrite C(aius)CASSEI(us) IMP(erator) et le type de revers montrait un crabe tenant unaplustre dans ses pinces, un diadème dénoué et une rose sous le crustacé115.

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Sur deux des émissions, les victoires de Cassius sont d’abord rappelées audroit par le mot IMP(erator) et précisées au revers par l’aplustre orné de roses,type parlant des monnaies rhodiennes116. Le succès de Cassius est ici à porterau compte de la cause qu’il défend, la Libertas montrée au droit. Cependant,la troisième émission offre une association plus complexe des symboles : àl’aplustre et aux roses (représentées ici par une corolle unique) s’ajoutent uncrabe et un diadème dénoué. Le crustacé est le symbole bien connu de la citéde Cos117 et sa présence s’explique par l’emplacement de la principale victoirenavale de Cassius, justement près de Cos, en face de Myndos, mais aussi parle fait que les Coiens, partisans de César118, ont certainement été soumis àl’autorité de Cassius lors de son passage dans la région. Le troisième symbolea davantage suscité l’attention des spécialistes. E. Babelon, E. A. Sydenham etH. A. Grueber y ont vu une allusion à une anecdote rapportée par Plutarque àpropos de la chute de Rhodes119. Les Rhodiens avaient salué Cassius des nomsde roi (basileuv") et seigneur (kuvrio"), mais celui-ci déclina ces titres en rappe-lant qu’il était « le meurtrier du seigneur et roi »120. Pour sa part, M. H. Crawfordpréfère rapprocher ce symbole du revers d’une émission de Brutus représen-tant une Victoire, une palme sur l’épaule, foulant au pied un sceptre brisé ettenant à deux mains un diadème noué mais rompu121. Il est certain que lesdeux revers renvoient à l’idée d’une abolition de la royauté. Mais s’agit-il iciuniquement de celle de César? La monnaie de Brutus commémore clairementles Ides de Mars : le sceptre foulé et le diadème rompu rappellent le couronne-ment des Lupercales et les soi-disant prétentions monarchiques du dictateur,mais la Victoire et la palme ne sont rattachées à aucune bataille précise. Enrevanche, sur les exemplaires de Cassius, le diadème, cette fois dénoué, appar-tient à une composition serrée liant trois symboles différents. Comme les deuxpremiers, le crabe et la rose, font allusion aux succès de Cassius contre desalliés de César en Asie Mineure, il est vraisemblable que le troisième doivetrouver aussi une interprétation locale. Ce symbole, le diadème, pourrait seréférer au roi de Cappadoce Ariobarzane III, ennemi déclaré des Libérateursau même titre que les Rhodiens et les Lyciens, et éliminé par Cassius122.

Pour en revenir à Rhodes, quel fut l’impact de la victoire de Cassius sur ledestin immédiat de la cité? Celle-ci a perdu sa réputation d’invincibilité, maisen partie seulement car le succès final du Libérateur a résulté d’une trahison.Par ailleurs, si le tribut imposé aux vaincus fut très lourd, il ne semble pas avoirété aussi dévastateur que certains auteurs l’ont laissé entendre. Les sourcessont d’ailleurs à ce sujet quelque peu contradictoires. Selon Appien, Cassiuspréleva tout l’or et l’argent détenus par le trésor public et par les particuliersfortunés, ce qui, d’après Plutarque, lui rapporta cinq cents talents dans le pre-mier cas et huit mille talents environ dans le second123. Les sanctuaires nefurent pas davantage épargnés dans la mesure où toutes les statues et lesoffrandes précieuses qu’ils abritaient furent saisies, à l’exception toutefois duchar du Soleil, œuvre prestigieuse du sculpteur Lysippe à laquelle les Rhodiens

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étaient attachés124. Enfin, Dion Cassius affirme que la flotte rhodienne fut confis-quée en totalité par le vainqueur125. À la lecture de ces témoignages, tout por-terait à croire, à la suite d’Orose126, que Cassius jeta les insulaires dans le plusgrand dénuement et qu’il ne leur laissa que la vie. Pourtant, selon d’autressources, les prélèvements ne paraissent pas avoir été aussi radicaux. Ainsi, unautre passage du texte d’Appien mentionne la réquisition, en octobre 42, detrente navires rhodiens par Cassius Parmensis, légat des Libérateurs envoyé enAsie pour y collecter des fonds, et la destruction par celui-ci du reste de la flottepour éviter toute révolte au lendemain du premier désastre de Philippes127.Rhodes n’avait donc pas livré tous ses vaisseaux à ce dernier au lendemain dusiège. De même, toujours à l’automne 42, Decimus Turullius extorqua aux Rho-diens une forte somme d’argent128. Enfin, avant de quitter l’île, Cassius laissa surplace, certainement à la charge de la cité, une garnison de trois mille hommescommandée par L. Varus129. À l’évidence, les Rhodiens n’avaient pas été saignésà blanc par leur vainqueur. La ponction, certes considérable, que celui-ci avaitopérée à leurs dépens restait à la mesure de ce que l’île pouvait fournir et endit long sur sa richesse économique et ses capacités de résistance130. En effet,lorsque Clodius, légat de Brutus, se rendit à Rhodes après la seconde bataillede Philippes, il trouva une cité révoltée contre les Libérateurs, au point que lagarnison laissée là par Cassius dut être évacuée131.

Le succès de Cassius apparaît donc bien paradoxal. Il s’inscrit dans la sériedes sièges de Rhodes par des ennemis prestigieux, Démétrios Poliorcète etMithridate VI Eupator. Autant que des sources, bien peu bavardes, nous per-mettent de le constater, les opérations militaires ont suivi dans les trois cas lemême scénario d’ensemble : affrontements navals dans la zone de Cnide, ins-tallation de l’assaillant dans la Pérée rhodienne, début de l’investissement del’île, attaques contre les défenses portuaires, siège terrestre. Mais, sans quel’on sache vraiment par quels procédés, Cassius réussit à déjouer les obstaclescomme s’il avait bien appris les leçons de ses prédécesseurs et comme si lesRhodiens avaient oublié les leurs. Les trois différences majeures que l’on peutrelever entre la réussite et les deux échecs consistent d’abord dans la supé-riorité navale de Cassius qui s’affirma tout au long de cette opération, ensuitedans le manque de ressources des Rhodiens une fois assiégés, enfin dans l’im-possibilité de recevoir une aide de leurs alliés égyptiens ou romains. Appiencondamna l’impréparation des va-t-en-guerre insulaires mais, à leur décharge,le manque de bateaux et de défenseurs pouvait s’expliquer en partie par l’échecde Dolabella qui avait privé les Rhodiens des bâtiments et des équipages prê-tés pour ses opérations. En prenant les sources au pied de la lettre, la flotterhodienne ne comptait pas plus de quelques dizaines de navires en 42. Maisce chiffre correspondait pratiquement aux effectifs de périodes plus fastes quine dépassèrent jamais une quarantaine de vaisseaux132. L’issue du siège nerésulte donc pas d’un problème numérique. La confiscation des uns et la des-truction des autres par Cassius Parmensis portèrent certainement un coup très

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rude à la dernière thalassocratie du monde grec antique133. Cependant, que cecoup fût décisif reste à prouver134. Pour finir, la reddition assez rapide de lacité résulta vraisemblablement d’un constat : avec Cassius, l’affaire était malengagée et il ne servait à rien de soutenir un siège qu’aucun allié n’était enmesure de faire lever. La vanité du combat fit plus que la valeur du vainqueur,et la reddition semblait être le seul moyen de ne pas hypothéquer l’avenir.

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et de Philippe V à la fin des Lagides, annales de l’Est, 32, Nancy, 1982 (rééd., Paris, 2003).WOOTEN, C., «Le développement du style asiatique pendant l’époque hellénistique», REG, 88, 1975,

p. 94-104.

NOTES

1. Sauf indication contraire, toutes les dates proposées dans cette étude s’entendent, comme ici,av. J.-C.

2. Vell., II, 69, 6 ; V. Max., I, 5, 8 ; Plut., Brut., 30, 3, et 32, 4 ; Oros., VI, 18, 13.3. DC, XLVII, 33 ; App., BC, IV, 65-74.4. Sur les détails de cette affaire et ses conséquences, cf. notamment SCHMITT H. H., Rom und Rhodos.Geschichte ihrer pilitischen Bezeihungen siet der ersten Berührung bis zum Aufgehen des Inselstaatesim römischen Weltreich, Münchener Beiträge zur Papyrusforschung und antiken Rechtsgeschichte,40, Munich, 1957, p. 139 sq., BERTHOLD R. M., Rhodes in the Hellenistic Age, Ithaque et Londres,1984, p. 179 sq., et WILL É., Histoire politique du monde hellénistique (323-30 av. J.-C.), II : des avè-nements d’Antiochos III et de Philippe V à la fin des Lagides, annales de l’Est, 32, Nancy, 1982(rééd., Paris, 2003), p. 275-276.

5. App., BC, IV, 66 (280 ; « les traités conclus entre Romains et Rhodiens leur interdis[aient] deprendre les armes les uns contre les autres») ; 66 (281 ; « le traité ordonnait de se comporter enalliés ») ; 70 (296 ; «ces traités disent que les Romains et les Rhodiens doivent se prêter assis-tance en cas de besoin ») ; 70 (299 ; « le traité prévoyant que les Rhodiens aident les Romainsvaut aussi pour chaque homme individuellement, s’il en a besoin de son côté»). Toutes les tra-ductions données entre parenthèses sont de Ph. Torrens (La roue à livres, Paris, Les BellesLettres, 2008).

6. Sén., Ben., V, 16, 6. Sur la promotion et le statut de Rhodes à cette époque, cf. également App.,BC, IV, 67 (286), et App., Mithr., 61 (250). Sur la liberté accordée par Rome aux cités grecques àla fin de l’époque hellénistique, cf. FERRARY J.-L., «Le statut des cités libres dans l’Empire romainà la lumière des inscriptions de Claros», CRAI, 1991, p. 573-577.

7. Cic., Fam., XII, 15 (lettre 902), 2.8. App., BC, IV, 68 (289) et 70 (296).9. Cf. in REDDÉ M., Mare nostrum. Les infrastructures, le dispositif et l’histoire de la marine militairesous l’Empire romain, BEFAR, 260, Rome et Paris 1986, p. 463-470.

10. Dans la lex de prouinciis praetoriis, datée de l’extrême fin du IIe siècle pour les uns, des toutespremières années du Ier siècle pour les autres (cf. SARTRE M., L’Anatolie hellénistique de l’Égée auCaucase, Paris, 2003, p. 219, nos 77 et 78, pour les dates proposées et la bibliographie afférente),le Sénat fait jouer un rôle important à des ambassadeurs rhodiens dans la coordination des

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efforts romains et alliés à faire contre les pirates (CRAWFORD M. H., Roman Statutes, I, BICS, Suppl. 64,Londres, 1996, p. 240, no 12, «Delphi Copy, Block B», l. 12-13 et 16-20). D’après les restitutionsproposées dans COLIN G., Fouilles de Delphes, III. Épigraphie, 4.1. La terrasse du temple et la zonenord du sanctuaire (no 1-86), Paris, 1930, no 37 (reprises dans Supplementum Epigraphicum Graecum,III [1927], no 378), F. Canali de Rossi se demande si les Rhodiens ne pourraient pas avoir étéchargés d’un «speciale compito di controllo del Mediterraneo orientale, in considerazione delfatto che i loro commerci soffrivano gravemente per l’anarchia regnante in quei mari» (Le ambas-cerie dal mondo greco a Roma in età repubblicana, Studi pubblicati dall’istituto italiano per lastoria antica, 63, Rome, 1997, p. 283). Sur la participation des Rhodiens à la guerre de Pompéecontre les pirates en 67, cf. Florus, I, 41, 8 (III, 6, 8), et Str., XI, 1, 6 (C492).

11. Sur le siège infructueux de Rhodes par Mithridate, cf. App., Mithr., 24-27 (94-106), V. Max., V, 2,ext. 2, Cic., Verr. Acc. II, 65, 159, DS, frg, 37, 28. Sur le siège d’Héraclée du Pont en 72 par la flotteromaine, essentiellement composée de navires rhodiens, cf. Memnon, FrGrHist, 434 F, 34.6-7.

12. Caes., Civ., III, 26-.2713. Caes., Civ., III, 27, 2. Sur l’attachement de nombreuses cités grecques d’Asie Mineure à Jules

César, leur bienfaiteur (cf. MEROLA G., « Il sistema tributario asiano tra Repubblica e Principato»,MedAnt, 4, 2001, p. 459-472, et MEROLA G., Autonomia locale. Governo imperiale. Fiscalità e ammi-nistratzione nelle province asiane, Bari, 2001, p. 72-84, d’après Cic., Fam., XV, 15 [lettre 468], 2,Plut., Caes., 48, 1, App., BC, II, 13 (92), et DC, XLII, 6, 3, et XLVII, 33, 2), cf. des témoignages à Ala-banda (ROBERT L., « Inscriptions de Phocée. 1. Inscription en l’honneur de César», Hellenica, X,Paris, 1955, p. 259), Chios (Corpus Inscriptionum Graecarum, A. Boeckh éd., Berlin, 1828-1877, II,no 2215), Cnide (BLÜMEL W., Inschriften griechischer Städte aus Kleinasien, Band 41, Die Inschriftenvon Knidos, I, Bonn, 1992, no 41), Éphèse (BÖRKER Ch. & MERKELBACH R., Inschriften griechischerStädte aus Kleinasien, Band 12, Die Inschriften von Ephesos, II, Bonn, 1979, no 251), Pergame(EILERS C. F., Roman Patrons of Greek Cities, Oxford, 2002, C74), Phocée (ROBERT L., ibid., p. 257),Samos (EILERS C. F., ibid., C53) et Tralles (Caes., Civ., III, 105, 6). Sur les inscriptions en l’honneurde Jules César en Orient, cf. Raubitschek A. E., «Epigraphical Notes on Julius Caesar», JRS, 44,1954, p. 65-75. Les ralliements étaient d’autant plus nombreux quand la clémence de Césars’opposait à la cruauté de ses adversaires pompéiens (cf. par exemple Caes., Civ., III, 8, 3, III, 28,4, III, 71, 4, et plus généralement RAAFLAUB K., Dignitatis contentio. Studien zur Motivation und poli-tischen Taktik in Bürgerkrieg zwsischen Caesar und Pompeius, Vestigia, 20, Munich, 1974, p. 293-307). Sur la clementia Caesaris, cf. notamment DAHLMANN H., «Clementia Caesaris», NJW, 10, 1934,p. 17-26, TREU M., «Zur Clementia Caesaris»,MH, 5, 1948, p. 197-217, LEGGEWIE O., «Clementia Caesarisals Beispiel einer exemplarischen Unterrichtsreihe», Gymnasium, 65, 1958, p. 19-36, et DUCOS M.,«César et la clémence», ACD, 40-41, 2004-2005, p. 117-127.

14. Caes., Civ., III, 102, 7-8.15. Euphranor, «par sa grandeur d’âme et son courage, était plus comparable aux hommes de chez

nous [Romains] qu’aux Grecs» (Ps.-Caes., Bel. Alex., 15, 1). De même, il était un homme, «sansqui n’avait jamais été livré aucun combat naval, bien plus, aucun qui n’eût bien tourné» (Ps.-Caes., Bel. Alex., 25, 3). Sur ce brillant soldat, cf. MERKELBACH R., «Der neue Euphranor in Bargyliaund Euphranor, der Admiral von Caesars rhodischem Geschwader», EA, 1, 1983, p. 29-32.

16. Ps.-Caes., Bel. Alex., 14, 5.17. Ps.-Caes., Bel. Alex., 15, 3-6. La rédaction de ce récit date de l’époque des guerres civiles et tra-

duit l’admiration des contemporains pour la supériorité navale des Rhodiens, leur courage, leurgrandeur d’âme et leur loyauté dans les moments difficiles.

18. App., BC, III, 2 (4).19. Plut., Brut., 19, 1, 4-5.20. Cic., Fam., XII, 13 (lettre 919), 3 ; App., BC, III, 6 (19) ; DC, XLVII, 21, 3 et 26, 1 ; Zonaras, X, 18. De

même, C. Trebonius fortifia les cités de sa province pour le compte des tyrannicides (App., BC,III, 26 [97]) et confisqua les biens de Theopompos de Cnide, un ami de César (Cic., Phil., XIII, 16[33] ; sur ce personnage, cf. infra). Selon D. Magie (Roman Rule in Asia Minor to the End of theThird Century after Christ, Princeton, 1950, p. 419), il aurait également, comme L. Tillius Timber,forcé les Grecs d’Asie à lui fournir des bateaux pour former une flotte.

21. Sur la répartition des provinces de l’empire à ce moment et l’attribution de la Syrie à Dolabella,les témoignages ne manquent pas dans la littérature antique : Cic., Att., XIV, 9 (lettre 728), 3 ;

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Cic., Att., XIV, 14 (lettre 735), 4 ; Cic., Phil., XI, 2 (4) ; Cic., Phil., XI, 12 (28) ; App., BC, III, 7 (23-26) ;App., BC, III, 12 (42) ; App., BC, III, 24 (91-92) ; App., BC, III, 27 (104) ; App., BC, IV, 57 (247) ; DC,XLV, 15, 2 ; DC, XLVII, 29, 1.

22. La capture et la mise à mort de C. Trebonius ont été souvent rapportées par les auteurs anciens.Nous citerons, au gré de nos lectures, Cic., Phil., XI, 2 (5) et 3-4 (7-9), Cic. Phil., XII, 8 (21) et 10(25), Cic. Phil., XIII, 10 (22), Cic., Phil., XIV, 3 (6), Cic., Fam., XII, 12 (lettre 878), 1, Cic., Fam., XII,14 (lettre 901), 5, Cic., Fam., XII, 15 (lettre 902), 4, Liv., Per., 119, 1, Str., XIV, 37, DC, XLVII, 29, 2-3et 30, 6, App., BC, III, 26 (100-101), Vell., II, 69, 1, ou bien encore Oros., VI, 18, 6.

23. App., BC, IV, 58 (249).24. App., BC, IV, 60 (258) et 61 (262-263). Dans le même esprit, alors que Dolabella était enfermé

dans Laodicée-sur-Mer, Cassius «envoya demander des navires en Phénicie, en Lycie et à Rhodes.On fit la sourde oreille, sauf à Sidon » (App., BC, IV, 60 [260], et 61 [261]). Un peu plus tard,«Cassius envoya de nouvelles demandes aux cités qui avaient fait la sourde oreille, ainsi qu’àCléopâtre, la reine d’Égypte, et à Sérapion, gouverneur de Chypre pour le compte de Cléopâtre.Les cités de Tyr et d’Arados ainsi que Sérapion, qui ne consulta pas préalablement Cléopâtre,lui envoyèrent tous les navires en leur possession» (App., BC, IV, 61 [262]). Les traductions sontde Ph. Torrens (coll. La Roue à Livres, Les Belles Lettres, 2008).

25. Cic., Fam., XII, 15 (lettre 902), 2-3. Sur ce personnage, cf. infra.26. Liv., Per., 121, 1 ; Str., XVI, 2, 9, App., BC, IV, 62 (265-267) ; DC, XLVII, 30, 3-5.27. Cic., Phil., X, 13 (25-26) ; Cic., Phil., XIII, 9 (20) ; Cic., Ad Brut., II, 4 (lettre 862), 4 ; Cic., Ad Brut., II,

5 (lettre 863), 2. Le basculement en faveur de Cassius aurait eu lieu à la fin du mois d’avril sil’on suit Cic., Phil., XI, 12 (30-31), Cic., Phil., XIII, 9 (20), et Cic., Fam., XII, 7 (lettre 847), 1.

28. Cic., Ad Brut., I, 15 (lettre 933), 2 et 18 ; Plut., Brut., 28, 3, à 29, 11 ; App., BC, IV, 63-64 (269-275) ;DC, XLVII, 22-25 et 32 ; Liv., Per., 121-122 ; Jos., AJ, XIV, 271-276 ; Jos., BJ, I, 11 (219-235).

29. Aug., Anc, 2 ; Liv., Per., 120, 1 ; Vell., II, 69, 5 ; App., BC, III, 94 (388) et 95 (392) ; DC, XLVI, 48-49 ;DC, XLVII, 22, 4.

30. App., BC, IV, 65 (277) ; DC, XLVII, 33, 2.31. App., BC, IV, 63 (272) ; DC, XLVII, 33, 4.32. Pour Laodicée-sur-Mer, cf. App., BC, IV, 62 (268). Pour Tarse, cf. App., BC, IV, 64 (273). Dans ce

dernier cas, le versement de la somme demandée, 1500 talents, se fit dans les pires conditions.En effet, aux dires d’Appien, comme les Tarsiens ne disposaient pas de cette somme, ces der-niers « remirent le trésor public en totalité et, en plus du trésor public, débitèrent en pièces demonnaies tous les objets sacrés qui servaient aux processions et aux offrandes. Comme, mêmeainsi, ils n’arrivaient à rien, les autorités s’efforcèrent de vendre la population libre : ce furentd’abord les jeunes filles et les enfants, puis les femmes et de pitoyables vieillards dont la valeurmarchande était très faible, et enfin les jeunes gens. La plupart se suicidèrent. Ils en étaient arri-vés là quand Cassius, revenant de Syrie, les prit en pitié et les dispensa des contributions quirestaient à payer» (BC, IV, 64 [274-275]).

33. Aux dires d’Appien, ces derniers pouvaient compter sur une force «d’environ quarante légionsdont huit avaient déjà franchi l’Adriatique» (BC, IV, 65 [276] ; trad. Ph. Torrens, coll. La Roue àLivres, Paris, Les Belles Lettres, 2008).

34. App., BC, IV, 65 (278), et IV, 69 (292).35. Cf. Plut., Caes., 3, 1, et Suet., Iul., 4 (pour C. Iulius Caesar), Plut., Brut., 3, 3, et Aur. Vict., Vir. ill.,

3, 82 (pour M. Iunius Brutus), Cic., Brut., 245 (pour T. Manlius Torquatus), Cic., Tusc., II, 25, 61,et Plut., Pomp., 42, 10 (Cn. Pompeius Magnus), Cic., Brut., 151 (pour Ser. Sulpicius Rufus), Cic.,Brut., 151 et 316, Cic., Tusc., II, 25, 61, Plut., Caes., 3, 1, et Plut., Cic., 4, 5 (pour M. Tullius Ciceropère), Cic., Fam., II, 17 (lettre 269), 1 (pour M. Tullius Cicero fils et Q. Tullius Cicero).

36. S’il a pu suivre tout ou partie de ces cours, Cassius a sûrement pris aussi des leçons d’histoirerelatant les hauts faits des Rhodiens depuis au moins la fin de l’époque classique (App., BC, IV,67 [284-285])

37. Sur le rayonnement intellectuel de Rhodes à la fin de l’époque hellénistique, cf. notammentDELLA CORTE F., « Rodi e l’istituzione dei pubblici studi », AAT, 74, 1939, p. 3-20 (= Opuscula, I,Gênes, 1971, p. 255-272). Sur la prise d’Athènes par Sylla et ses conséquences douloureuses,notamment pour les arts, cf. HABICHT Chr., Athènes hellénistique. Histoire de la cité d’Alexandrele Grand à Marc Antoine, Paris, 2000, p. 336-345.

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38. Comme le souligne A. Boulanger, celui-ci représentait «un art intermédiaire entre l’emphase desasiatiques et la simplicité un peu sèche des atticistes de Rome» (Aelius Aristide et la sophistiquedans la province d’Asie au IIe siècle de notre ère, BEFAR, 126, Paris, 1923 [rééd., 1968], p. 78). Sonécole d’art oratoire joua un rôle essentiel dans le développement de l’éloquence romaine(WOOTEN C., « Le développement du style asiatique pendant l’époque hellénistique», REG, 88,1975, p. 99). Sur ce personnage, cf. notamment RE, II/1 (1895), s.v. Apollonios, no 85, col. 141-144,et MYGIND B., « Intellectuals in Rhodes », Hellenistic Rhodes : Politics, Culture, and Society, inV. GABRIELSEN, Tr. ENGBERG-PEDERSEN, L. HANNESTAD et J. ZAHLE (éd.), Studies in Hellenistic Civilization,IX, Aarhus et Oxford, 1999, p. 260, no 24.

39. Cf. REINHARDT K., RE, XXII/1, 1953, s.v. Poseidonios, no 3, col. 558-826, MYGIND B., loc. cit. (supran. 38), p. 257, no 12, et surtout LAFFRANQUE M., Poseidonios d’Apamée : essai de mise au point,Paris, 1964.

40. Sur ce personnage, figure emblématique du médio-stoïcisme, et son influence à Rome au tempsde Scipion Émilien, cf. pour commencer VAN STRAATEN M., Panetius : sa vie, ses écrits et sa doc-trine, avec une édition des fragments, Leyde, 1946, et FERRARY J.-L., Philhellénisme et impérialisme.Aspects idéologiques de la conquête romaine du monde hellénistique, de la seconde guerre deMacédoine à la guerre contre Mithridate, Bibliothèque des Écoles Françaises d’Athènes et deRome, 271, Rome, École française de Rome, Paris, 1988, p. 395-424. Cf. également, en beaucoupplus synthétique, POHLENZ M., RE, XVIII/3, 1949, s.v. Panaitios, no 5, col. 418-440, et MYGIND B., loc.cit. (supra n. 38), p. 256-257, no 10.

41. Sur le stoïcisme et ses relations avec le monde romain, cf. notamment BRUNSCHWIG J., « LesStoïciens», in Philosophie grecque, M. Canto-Sperber (dir.), Paris, 1997, p. 511-562, et ROMAN D.& ROMAN Y., Rome et l’hellénisme. IIIe- Ier siècle av. J.-C., 2e éd. mise à jour avec collaboration deF. Delrieux, Paris, 2005, p. 70-76.

42. App., BC, IV, 65 (278).43. XLVII, 33, 3.44. App., BC, IV, 66 (280).45. L’assemblée avait été purgée de tous les éléments hostiles aux Césariens lors de la proscription

de la fin 43 (App., BC, IV, 66 [281], et 69 [294]).46. App., BC, IV, 66 (281).47. App., BC, IV, 66 (282). Tous deux sont présentés comme des démagogues.48. Sur les prytanes rhodiens à l’époque hellénistique, cf. par exemple, WALBANK F. W., A Historical

Commentary on Polybius, II : Commentary on Books VII-XVIII, Oxford, 1967, p. 418, O’NEIL J. L.,«How Democratic was Hellenistic Rhodes?», Athenaeum, 59, 1981, p. 471-472, et BERTHOLD R. M.,op. cit. (supra n. 4), p. 39.

49. Cette possibilité leur permettait, non seulement de contrôler l’impact diplomatique des déci-sions de l’ecclésia, mais de se désigner eux-mêmes comme ambassadeurs.

50. Rép., III, 35, 48.51. Sur les navarques rhodiens, cf. par exemple O’NEIL J. L., loc. cit. (supra n. 48), p. 469-472, et

BERTHOLD R. M., op. cit. (supra n. 4), p. 44.52. BC, IV, 71 (300 ; oiJ Rodivwn hJgouvmenoi).53. App., BC, IV, 71 (300).54. BC, IV, 67, 283. Notre méconnaissance d’Archélaos, inconnu par ailleurs, est telle que B. Mygind,

qui range le personnage parmi les rhéteurs de l’île, se demande s’il était rhodien (loc. cit. [supran. 38], p. 261, no 28). Cette question ne semble pas devoir se poser dans la mesure où, selonApp., BC, IV, 68 (287), Archélaos a agi auprès de Cassius « en faveur de (s)a patrie » (uJpe;r thj"patrivdo").

55. App., BC, IV, 67 (285-286).56. App., BC, IV, 67 (284 et 285).57. Sur l’âge d’Archélaos au moment des faits, cf. App., BC, IV, 69 (291).58. App., BC, IV, 69 (291) - 70 (299).59. Il est en effet curieux que seul Appien y fasse allusion. Pourtant, la présence d’Archélaos dans

l’affaire et ses liens privilégiés avec Cassius auraient dû susciter davantage l’attention.60. Appien mentionne ce nombre plus tard (BC, IV, 72 [306]), quand Cassius assiège Rhodes. Cela

étant, comme il n’a perdu aucun bâtiment à Myndos et qu’il a fait réparer ceux qui étaient endom-

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magés avant, cela doit correspondre aux forces de départ. Cf. la prudence de R. M. BERTHOLD àce sujet (op. cit. [supra n. 4], p. 226, n. 36).

61. XLVII, 33, 3. Sur la bataille de Laodicée-sur-Mer, cf. notamment Cic., Fam., XII, 12 (lettre 878), 5,Cic., Fam., XII, 13 (lettre 919), 4, Cic., Fam., XII, 14 (lettre 901), 4, Cic., Fam., XII, 15 (lettre 902),7, Vell., II, 69, 2, App., BC, IV, 60 (258) à 62 (268).

62. BC, IV, 72 (305 et 308).63. Cic., Fam., XII, 14 (lettre 901), et XII, 15 (lettre 902).64. REDDÉ M., op. cit. (supra n. 9), p. 114. Appien ne détaille pas la composition de la flotte mais, dans

le récit de la bataille, il insiste sur le très gros tonnage des vaisseaux romains engagés (cf. infra).65. Soit le double des effectifs montés sur des trières, 200 à 250 hommes environ (REDDÉ M., op. cit.

[supra n. 9], p. 112-117). Le chiffre, impressionnant pour l’époque, est donné dans Pol., I, 26, 7(300 rameurs et 120 épibates) et est confirmé dans Plin., Nat., XXXII, 1, 4 (400 hommes).

66. REDDÉ M., op. cit. (supra n. 9), p. 92-102.67. Cf., dans le même sens, DC, XLVII, 33, 3.68. App., BC, IV, 65 (278).69. App., BC, IV, 66 (279).70. App., Mithr., 25 (100).71. Ps.-Caes., Bel. Alex., 15, 5-6.72. App., BC, IV, 71 (302) ; DC, XLVII, 33, 3.73. Apparu au IVe siècle, probablement en Carie, ce vaisseau rapide et manœuvrant, fort utilisé par

les pirates, disposait de deux rangs de rames mais conservait semble-t-il toute sa vitesse et samaniabilité avec un rang et demi. Cela permettait, en cas d’attaque, de libérer de l’espace et dela chiourme pour le combat. L’hemiolia était donc recommandée pour les raids foudroyantes,dangereux pour les flottes traditionnelles car fondant sur l’objectif en se faufilant entre lesgrosses unités. Cf. BLINKENBERG Chr., Triemiolia, Copenhague, 1938, à nuancer avec GABRIELSEN V.,The Naval Aristocracy of Hellenistic Rhodes, Aarhus, 1997, p. 86-94, qui remet en cause de nom-breux acquis sur ce type de navire.

74. Chr. Blinkenberg part d’une liste de marins composant l’équipage d’une triemiolia (op. cit. [supran. 73], p. 44), mais V. Gabrielsen soutient que le nombre exact des membres des équipages nepeut être déduit simplement (op. cit. [supra n. 73], p. 95).

75. Durant les opérations militaires menées par les Rhodiens précédemment, se trouvaient despolyrèmes : des quadrirèmes étaient commandées par l’amiral Euphranor durant la guerred’Alexandrie (Ps.-Caes., Bel. Alex., 25, 6) et des quinquérèmes participèrent au siège de Rhodesdurant la première guerre mithridatique (App., Mithr., 25 [100]). De même, la flotte de Cassiuscomptait vraisemblablement des trières à côté des polyrèmes évoquées plus haut.

76. App., BC, IV, 71 (300).77. BC, IV, 71 (301).78. Une véritable prouesse car la vitesse moyenne de l’escadre rhodienne peut être estimée à envi-

ron 6,5 nœuds. Or, les escadres antiques avaient une vitesse moyenne bien inférieure, entre 0,9et 4,5 nœuds. Seuls les navires isolés, tel celui de Paul-Émile entre Brindes et Corcyre en (Liv.,XLV, 41, 3), atteignaient parfois les 8 nœuds (REDDÉ M., op. cit. [supra n. 9], p. 140-141). Il ressortdu récit d’Appien que bateaux, itinéraire et mode de navigation ont été choisis pour frapper vite.

79. App., BC, IV, 71 (301).80. Sur les routes maritimes utilisées d’habitude dans la région de Rhodes, cf. ARNAUD P., Les routes

de la navigation antique. Itinéraires en Méditerranée, Paris 2005, p. 223-228.81. C’est-à-dire opter pour un trajet hauturier à la place du cabotage.82. Les détails de l’engagement ne nous sont connus que par le témoignage d’Appien (BC, IV, 71

[301-304]).83. App., BC, IV, 71 (302). Il est vrai que leurs équipages avaient manœuvré en prévision d’un affron-

tement avec des marins expérimentés. Alexandros et Mnaséas, trop confiant dans la valeur deleur flotte, n’avaient manifestement pas prévu cela (App., BC, IV, 71 [300]).

84. App., BC, IV, 71 (302-303).85. App., BC, IV, 71 (304). Les dégâts ne devaient pas être très importants car les unités endom-

magées furent très vite réparées et participèrent à la suite de la campagne contre Rhodes (App.,BC, IV, 72 [305]).

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86. App., BC, IV, 71 (304).87. Thc., II, 88-92. Sur l’évolution de la guerre d’escadre, cf. REDDÉ M., op. cit. (supra n. 9), p. 331-340.88. App., BC, IV, 71 (304) : des trente-trois bâtiments engagés dans la bataille, « trois navires rhodiens

furent capturés avec leur équipage, deux furent brisés et les autres, endommagés, s’enfuirentà Rhodes» (trad. Ph. Torrens, coll. La Roue à Livres, Paris, Les Belles Lettres, 2008).

89. App., BC, IV, 72 (305).90. Cf. Thc., VIII, 43, 1, dans le premier cas. Dans le second, cf. DS, XIV, 83, 4 (l’auteur mentionne

plus quatre-vingt-dix trirèmes au mouillage). Dans le troisième cas, cf. DS, XX, 82, 4 (l’armée duPoliorcète comptait alors quarante mille hommes environ, et sa flotte deux cents vaisseaux longset plus de cent soixante-dix bâtiments de transport).

91. Cf. MCNICOLL A. W., Hellenistic Fortifications from the Aegean to the Euphrates, with revisions andan additional chapter by N. P. Milner, Oxford, 1997, p. 176, et PIMOUGUET-PÉDARROS I., Archéologiede la défense. Histoire des fortifications antiques de Carie (époques classique et hellénistique),Besançon, 2000, p. 382.

92. Sur Loryma III, cf. PIMOUGUET-PÉDARROS I., «Les fortifications de la pérée rhodienne», Fortificationset défense du territoire en Asie Mineure occidentale et méridionale, P. DEBORD et R. DESCAT (dir.),Table ronde CNRS, Istanbul, 20-27 mai 1993, REA, 96, no 1-2, 1994, p. 244-245, MCNICOLL A. W., op.cit. (supra n. 91), p. 175-178, et PIMOUGUET-PÉDARROS I., op. cit. (supra n. 91), p. 380-383.

93. Nous ignorons de quelle manière la place est tombée entre les mains de Cassius. Tout juste sait-on qu’une garnison rhodienne tenait l’endroit lors de son arrivée sur place (App., BC, IV, 72 [305]).

94. Sur Fannius, cf. RE, VI/2 (1909), s.v. Fannius, no 1, col. 1886-1987, et BROUGHTON T. R. S., The Magis-trates of the Roman Republic, Philological Monographs published by the American PhilologicalAssociation, XV, Cleveland, 1968, II, p. 365. Celui-ci a été assimilé parfois à C. Fannius Caepio,qui conspira contre Auguste (KAPPELMACHER A., RE, VI/2, 1909, s.v. Fannius, no 16, col. 1993-1994 ;DÜRRBACH F., Choix d’Inscriptions de Délos. Avec traduction et commentaire, Paris, 1921-1922 [rééd.,Chicago, 1977], p. 260 ; ROUSSEL P. & LAUNEY M., Inscriptions de Délos. Décrets postérieurs à 166 av.J.-C. (no 1497-1524). Dédicaces postérieures à 166 av. J.-C. (no 1525-2219), Paris, 1937, no 1623).Un autre C. Fannius était du côté pompéien à la même époque, mais il n’est apparemment pasidentifié avec notre personnage (MÜNZER F., RE, VI/2, 1909, s.v. Fannius, no 9, col. 1991-1992, no 9).Pour sa part, P. Cornelius Lentulus Spinther, mieux connu que le précédent, a servi non seule-ment Cassius à Rhodes, mais Brutus en Lycie (App., BC, IV, 82 [344]). Il est le fils de du consulde 57, artisan du rappel de Cicéron, mais fut adopté par Manlius Torquatus pour être éligibledans le collège des augures (DC, XXXIX, 17, 2). Durant les guerres civiles, il a vraisemblablementsuivi son père jusqu’au décès de ce dernier en Afrique (Cic., Att., XI, 13 [lettre 444], 1). Revenuà Rome où il divorça de sa femme Metella (Cic., Att., XII, 52 [lettre 808]), tout juste questeur en43, il se rallia aux conjurés (Plut., Caesar, 67, 4-5) et partagea leur sort. Il ne semble pas avoirsurvécu à la bataille de Philippes. Sur l’ensemble de sa carrière, cf. RE, IV/1 (1900), s.v. Cornelius,no 238, col. 1392-1398, BROUGHTON T. R. S., op. cit. (supra n. 94), II, p. 364, et HINARD Fr., Les pros-criptions de la République romaine, EFR, 83, Paris et Rome, 1985, p. 460-461, no 48.

95. App., BC, IV, 72 (306).96. App., BC, IV, 72 (307).97. App., BC, IV, 72 (308). Pour comparaison, en 88, peu avant le siège imposé par Mithridate VI (cf.

App., Mithr., XXIV, 94-96), les Rhodiens avaient eu le temps de fortifier leurs remparts et leursports, de mettre partout des machines de guerre en batterie, et de détruire « les faubourgs de laville afin que l’ennemi n’y trouvât rien d’utile» (trad. P. Goukowsky, CUF, Paris, Les Belles Lettres,2001). De même, leur flotte de guerre avait évité toute confrontation directe avec le gros de laflotte adverse avant le début du siège et les assiégés pouvaient compter sur le soutien d’alliésprécieux (Telmessiens, Lyciens et Romains fuyant les massacres ensanglantant alors le continent).

98. App. IV, 72 (307) ; Oros., VI, 18, 13.99. App. IV, 72 (307).100. REDDÉ M., op. cit. (supra n. 9), p. 95-100.101. Le Libérateur se mettait à l’école de Jules César qui bombarda dans les mêmes conditions le

rivage de Bretagne en 54 (Caes., Gal., IV, 25) et celui d’Alexandrie en 48 (Ps.-Caes., Bel. Alex.,19, 3) en vue de débarquements. Sur le sujet, cf. REDDÉ M., op. cit. (supra n. 9), p. 99. Cassiusréussit où Démétrios Poliorcète échoua sans que les sources nous renseignent précisément

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sur ce qui faisait la différence entre les deux tactiques. Démétrios utilisait également des toursembarquées, à l’image des Rhodiens (DS, XX, 85).

102. Les soldats partant à l’assaut des remparts rhodiens depuis la terre ne disposaient que d’échelles(App., Mithr., 26, [103]).

103. App., Mithr., 26 (103) et 27 (105). Sur ce matériel de guerre, cf. MARSDEN E. W., Greek and RomanArtillery. Historical Development, Oxford, 1969, p. 108-109, et MARSDEN E. W., Greek and RomanArtillery. Technical Treaties, Oxford, 1971, p. 90-94.

104. Le schéma quadrangulaire rigoureux d’un tel plan ne permettait pas de créer des obstaclescapables de retenir une armée. Cependant, lors du siège conduit par Démétrios Poliorcète, lesRhodiens avaient trouvé le moyen de contrebalancer cet inconvénient en aménageant un murde défense parallèle à la muraille sur le point de tomber (DS, XX, 93, 1). Sur le plan hippoda-mien appliqué aux villes grecques antiques, cf. MARTIN R., L’urbanisme dans la Grèce antique,2e éd. augmentée, Paris, 1983, p. 97-126.

105. BC, IV, 72 (308 ; trad. Ph. Torrens, coll. La Roue à Livres, Paris, Les Belles Lettres, 2008).106. Tout juste sait-on que, d’un côté, se tenaient « les plus intelligents des Rhodiens», conscients

de la gravité de la situation, et que, de l’autre, Cassius était représenté par Fannius et P. CorneliusLentulus Spinther (App., BC, IV, 72 [308]).

107. BC, IV, 73 (309).108. BC, IV, 73 (310).109. «Le sort des villes ennemies dans l’œuvre de Tite-Live : aspects historiographiques», RPh., 81,

2007, p. 81.110. Cf. la mise à sac de Phocée par les hommes d’Aemilius en 190 après que ce dernier leur a pour-

tant dit que « l’on pillait les villes après l’assaut, non après une reddition» (Liv., XXXVII, 32, 12 ;trad. J.-M. Engel, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1983). Cf. également les villes des Latins se ren-dant à Tarquin l’Ancien après que ces derniers eurent remarqué que «pour les villes prises parla force il s’ensuivait des asservissements et des destructions tandis que pour celles quientraient dans des accords par capitulation, il y avait seulement à obéir aux vainqueurs, etrien d’autre n’était à supporter d’irrémédiable» (DH, III, 51, 1 ; trad. J.-H. Sautel, CUF, Paris, LesBelles Lettres, 1999).

111. Selon Appien (BC, IV, 73 [310]), Cassius fit exécuter une cinquantaine de Rhodiens et condamnaà l’exil environ vingt-cinq autres personnes qui avaient eu le temps de fuir ou de se cacher.

112. App., BC, IV, 73 (310-312) ; DC, XLVII, 33, 4 ; V. Max., I, 5, 8 ; Plut., Brut., 32, 4 ; Oros., VI, 18, 13.Brutus n’agit pas autrement à Patara en Lycie (App., BC, IV, 81 [341]). Peut-être cette attitudeà l’égard de Rhodes explique-t-elle, du moins en partie, la clémence de Cassius à laquelle VelleiusPaterculus et Dion Cassius font allusion (Vell., II, 69, 6 ; DC, XLVII, 33, 4).

113. App., BC, V, 7 (29).114. BABELON E., Description historique et chronologique des monnaies de la république romaine, vul-

gairement appelées monnaies consulaires, Paris, 1885 (rééd., Bologne, 1964), I, p. 337, no 20-21 ;GRUEBER H. A., Coins of the Roman Republic in te British Museum, II : Coinages of Rome (conti-nued), Roman Campania, Italy, The Social War, and the Provinces, Londres, 1970, Coinage ofthe East, no 82-83 ; SYDENHAM E. A., The Coinage of the Roman Republic, révisé par G. C. Haines,Londres, 1952, no 1311-1312 ; CRAWFORD M. H., Roman Republican Coinage, Cambridge, 1974,no 505/1 et 505/2. Cf. ici p. 194, no 1 (= Numismatic Ars Classica, 51 [5 mars 2009], no 110; 8,28 g).

115. BABELON E., op. cit. (supra n. 114), I, p. 336, no 19 ; GRUEBER H. A., op. cit. (supra n. 114), Coinageof the East, no 84 ; SYDENHAM E. A., op. cit. (supra n. 114), no 1313 ; CRAWFORD M. H., op. cit. (supran. 114), no 505/3. Cf. ici p. 194, no 2 (= INumis, 8 [20 mars 2009], no 158 ; 3,44 g).

116. L’aplustre est reconnu pour être un symbole de la domination sur les mers (Edm. Saglio sou-ligne que l’aplustre figure comme un motif isolé dans les représentations de trophées mari-times et se retrouve sur les monnaies de familles romaines de la République qui s’enorgueillis-saient de victoires navales ; Dictionnaire des antiquités grecques et romaines d’après les texteset les monuments, Ch. DAREMBERG et Edm. SAGLIO [éd.], t. I, Paris, 1877, p. 308-309, s.v. aplustre).À ce titre, cf. les deniers de Faustus Cornelius Sylla (CRAWFORD M. H., op. cit. [supra n. 114],no 426/4a) et ceux de Sextus Pompée (CRAWFORD M. H., op. cit. [supra n. 114], no 511/2a). Sur lemonnayage rhodien à la fin de l’époque hellénistique et la rose comme type parlant (rJovdon[rose] – JRovdo" [Rhodes]), cf. par exemple ASHTON R., «Bronze Coinage and the Siege of Mithra-

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dates VI », NC, 161, 2001, p. 53-66. Plus généralement, sur les types monétaires parlants, dontcelui de Rhodes, cf. LACROIX L., « Réflexions sur les “types parlants” dans la numismatiquegrecque », RBN, 96, 1950, p. 5-11, p. 5-11, et LACROIX L., « Les types des monnaies grecques »,Numismatique antique. Problèmes et méthodes, Actes du colloque organisé à Nancy du 27 sep-tembre au 2 octobre 1971, Annales de l’Est, Mémoire no 44, Études d’archéologie classique IV,J.-M. DENTZER, Ph. GAUTHIER et T. HACKENS (éd.), Nancy et Louvain, Éditions Peeters, 1975, p. 155.

117. Sur le crabe, symbole monétaire de Cos à la fin de l’époque hellénistique, cf. par exemple SyllogeNummorum Graecorum - Deutschland : Staatliche Münzsammlung München, Munich, 2006,Karien, no 512.

118. Les témoignages plus ou moins directs ne manquent pas. Ainsi, après la divinisation de César,« les citoyens romains faisant des affaires à Cos (ont honoré) la cité coienne en raison de sapiété à l’égard de C. Iulius César, grand pontife, père de la patrie et dieu, et en raison de sabienveillance envers eux» (DEGRASSI A., « Iscrizioni latine inedite di Coo», Clara Rhodos, 10, 1941,p. 201, no 1 ; SEGRE M., Iscrizioni di Cos, 1 : testo, Monografie della scuola archeologica di Atenee delle missioni italiane in Oriente, 6, Rome, 1993, EV 23). De même, à une date non précisée,« le peuple (des Coiens) a honoré (dans l’Asclépieion de Cos, où l’inscription, gravée sur unebase, a été trouvée) Gaios Ioulios Theupompos fils d’Artémidôros (Cnidien que l’on sait avoirété un proche de Jules César, cf. n. 20) en raison de son mérite et de son dévouement enverslui » (PATRIARCA G., « Iscrizioni dell’Asclepieo di Coo», BMIR, 3, 1932, p. 17, no 13 ; AE 1934, no 91 ;sur ce personnage, bien connu par ailleurs, cf. notamment HIRSCHFELD G., «C. Julius Theupompusof Cnidus», JHS, 7, 1886, p. 286-290, et THÉRIAULT G., «Évergétisme grec et administration romaine:la famille cnidienne de Gaios Ioulios Théopompos», Phoenix, 57, p. 232-256). Sur l’octroi de pri-vilèges, proposés par Marc Antoine et son consilium, à des habitants de Cos en juin 39, et queS. M. Sherwin-White rapproche des témoignages précédents, cf. CRAWFORD M. H., op. cit. (supran. 10), p. 497-506, no 36. Malheureusement, les parties conservées du texte correspondant, trèsmutilé, ne donnent pas les raisons de ces bienfaits. Au moins le document témoigne-t-il desbonnes relations existant alors entre tout ou partie des Coiens et le parti césarien.

119. BABELON E., op. cit. (supra n. 114) I, p. 334 ; SYDENHAM E. A., op. cit. (supra n. 114), p. 205, n. 1313 ;GRUEBER H. A., op. cit. (supra n. 114), p. 484, n. 2.

120. Plut., Brut., 30, 3 (trad. R. Flacelière et É. Chambry, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1978).121. CRAWFORD M. H., op. cit. (supra n. 114), p. 741. Cf. ici p. 194, no 3 (= Stack’s, Saint Ludovico and

Firth of Clyde Collections [22 avril 2009], no 1340).122. App., BC, IV, 63 (272) ; DC, XLVII, 33, 1 et 4.123. App., BC, IV, 73 (312) ; Plut., Brut., 32, 4.124. V. Max., I, 5, 8. Sur le char du Soleil, cf. D. Chr., XXXI, 86, et Plin., Nat., XXXIV, 63. Plus générale-

ment, cf. JACQUEMIN A. & LAROCHE D., «Le char d’or consacré par le peuple rhodien», BCH, 110, 1986,p. 285-307, et trad. de Plin., Nat., XXXIV, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 2003, p. 231-232, § 63.3.

125. XLVII, 33, 4.126. VI, 18, 13.127. BC, V, 2 (5-6).128. App., BC, V, 2 (5-6). Sur ce personnage, cf. en dernier lieu HINARD Fr., op. cit. (supra n. 94), p. 539,

no 144, et FERRIÈS M.-Cl., Les partisans d’Antoine (des orphelins de César aux complices de Cléopâtre),collection «Scripta Antiqua», 20, Bordeaux, 2007, p. 480, no 137.

129. App., BC, IV, 74 (313). L. (Quinctilius?) Varus (RE, 11) est identifié par T. R. S. Broughton, avecun Quinctilius Varus qui se suicida après Philippes (op. cit. [supra n. 94], II, p. 368). Mais F. Hinardpense que le Varus de Philippes est Sex. Varus, le père du consul de 13 et qu’il serait de rangquestorien (op. cit. [supra n. 94], p. 510-511, no 111). Il existe un troisième Varus qui fut proscritet exécuté à Minturnes, qui était de rang prétorien (HINARD Fr., op. cit. [supra n. 94], p. 509, no 110).Il est impossible d’identifier Varus de Minturnes avec le légat de Cassius, qui, en revanche, pour-rait être celui qui meurt à Philippes, car la garnison semble n’avoir plus de chef au moment oùClodius passe à Rhodes.

130. On sera donc tenté de nuancer l’empressement des Rhodiens fortunés à livrer leurs biens àCassius qui, leur ville prise, les menaça de mort s’ils ne le faisaient pas (App., BC, IV, 73 [311-312]). Beaucoup avaient caché leurs richesses dans un premier temps. Sans doute certainsd’entre eux persistèrent-ils dans cette attitude malgré les risques.

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LE SIÈGE DE RHODES PAR C. CASSIUS LONGINUS EN 42 AV. J.-C., DE LA BATAILLE DE MYNDOS À LA PRISE DE LA VILLE

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131. App., BC, V, 2 (5-6).132. Cf. GABRIELSEN V., op. cit. (supra n. 73), p. 93.133. Les bienfaits, certes provisoires, de Marc Antoine à l’égard des Rhodiens lors de son passage

dans l’île ont eu pour but de réparer ce dommage (App., BC, V, 7 [29]).134. V. GABRIELSEN souligne que les conclusions de Chr. BLINKENBERG (op. cit. [supra n. 73], p. 47-50),

et L. CASSON (Ships and Seamanships in the Ancient World, Princeton, 1971, p. 131), surl’affaiblissement de la flotte qui se cantonnerait à quelques triemioliai, sont contredites par letémoignage de Dion Chrysostome, XXI, 102-104 (op. cit. [supra n. 73], p. 194, n. 92).

1. Numismatic Ars Classica, 15 [5 mars 2009], n° 110.2. INumis, 8 [20 mars 2009], n° 158.

3. Stack’s, Saint Ludovico and Firth of Clyde Collections [22 avril 2009], n° 1340.

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LES SIÈGES DE RHODES À L’ÉPOQUE MÉDIÉVALE

N

0 km

10

20

30

40

50 km

Myndos

Cos

Cnide

Rhodes

Smyrne

Lôryma

Mer de Lycie

Mer de Carpathos

LA CAMPAGNE DE CASSIUS CONTRE RHODES (42 av. J.-C.)

Route suivie par la flotte de CassiusRoute suivie par la flotte rhodienneLieu de combat

C A R I E

I O N I E

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